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574. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

Desjardins que Corneille, en matière historique ancienne, tout instinctif qu’il était et à la merci de sa verve, méditait certainement et réfléchissait plus qu’on ne le suppose. […] Pourquoi venir infirmer, même en ces matières légères, ce qui est appuyé suffisamment et ce qui est mieux ?

575. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

La création du monde et de l’homme, voilà la réponse chrétienne, et non pas l’éternité du monde, c’est-à-dire sa formation et ensuite sa transformation (une première matière étant donnée) en vertu de lois naturelles, éternellement existantes, constantes même dans leur infinie progression et ne dérivant que de soi. […] Le portrait ne sera ni flatté ni noirci : je tâcherai seulement qu’il soit fidèle, et qu’il exprime la parfaite idée de l’esprit critique en ces matières, tel que je le conçois.

576. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre IV »

À chaque nouveau roman, je m’entoure de toute une bibliothèque sur la matière traitée, je fais causer toutes les personnes compétentes que je puis approcher, je voyage, je vais voir les horizons, les gens et les mœurs. […] Zola ne pouvait certes pas, en matière d’atavisme, prophétiser et devancer la science ; il eut, croyons-nous, le tort littéraire de vouloir la suivre sur ce terrain mouvant encore, et de s’y enliser.

577. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

Je reviens à l’époque où on ignorait la pente de cette matière en fusion et qu’elle irait se refroidir en un moule connu. […] Il est intéressant de voir la matière première de ce qui deviendra poésie.

578. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Patru. Éloge d’Olivier Patru, par M. P. Péronne, avocat. (1851.) » pp. 275-293

Les historiettes de Tallemant, intitulées Madame Lévesque et La Cambrai, eussent bien fourni matière à des contes de La Fontaine, La Cambrai est une belle marchande, femme d’un orfèvre qui logeait vers le Châtelet, au bout du Pont-au-Change, « une femme aussi bien faite qu’il y en eût dans toute la bourgeoisie ». […] Patru, en lisant L’Astrée de d’Urfé et en l’admirant, n’y avait pas puisé, ce semble, la constance ni l’élévation romanesque en matière d’amour ; il était resté de la pure lignée de nos aïeux, peu platonique et médiocrement fidèle, un enfant de la Cité.

579. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — I. » pp. 441-459

En attendant, et durant les vingt-trois années qui s’écoulèrent depuis son entrée au barreau (1765) jusqu’en 1788 à la chute des parlements, il mena la vie d’un avocat occupé et consulté sur toutes les matières importantes. […] L’artiste (si l’on ose employer ce mot en pareille matière), le metteur en œuvre chez Portalis fait un peu défaut quand il écrit : l’honnête homme n’en était que plus à nu quand il parlait.

580. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — II. » pp. 460-478

Les rhéteurs de l’Antiquité ont ainsi conseillé aux orateurs d’avoir toujours en réserve, dans le trésor de la mémoire, des portions entières de discours ; et, si cet artifice est permis, c’est assurément dans l’ordre des matières stables, telles que la jurisprudence, la morale sociale, qui ne permettent ni aux idées ni même à l’expression de varier, quand les mêmes sujets se rencontrent. […] La théorie du Code civil a été expliquée par Portalis en trois discours qui sont classiques dans la matière.

581. (1912) L’art de lire « Chapitre III. Les livres de sentiment »

Les livres de sentiment Il est permis de lire un peu moins lentement les auteurs qui ont pour matière les sentiments de l’âme humaine, guère moins du reste. […] On demandait à Massillon, très honnête homme : « Où prenez-vous donc la matière de toutes les peintures de vice que vous faites ? 

582. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

beaucoup d’esprits qui, à cette heure, accepteraient sans nausées toutes ces explications qui nous font horreur, à nous, car elles sont la déification absolue de la matière ; et Michelet a beau raffiner et broyer menue sa poudrette, il est, de fait, aussi matérialiste que La Mettrie et que Chaussier. […] Au lieu de cette grosse explication qu’on a appelée longtemps la Nature, et dont Joseph de Maistre, notre Voltaire, à nous autres chrétiens, s’est moqué avec une gaieté si peu piémontaise, Michelet a parlé « d’animaux se faisant eux-mêmes et se faisant par pièces et morceaux », ce qui serait plus fin, à la vérité, si Michelet, en toute matière, ne pressait pas toujours le ressort jusqu’à ce que le grotesque jaillisse.

583. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Ce que je lisais, ce que j’entendais de philosophie, n’avait d’autre effet que de me donner matière à penser, à chercher. […] Je n’ai rien su que ce que j’ai trouvé, et quand il m’est entré dans la tête des opinions qui étaient aussi celles des autres, c’est que mes recherches comme les leurs y avaient abouti. » Un peu plus tard, traitant des signes, il ne voulut ouvrir aucun des ouvrages de ses prédécesseurs, et expliqua son étrange refus comme Descartes : « Notre première raison, c’est que les idées qu’ils nous suggéreraient gêneraient la liberté de notre esprit qui aime à se conduire à sa façon, et dépouilleraient pour lui cette recherche de son plus grand charme, qui est dans la recherche même plutôt que dans le résultat qu’elle peut donner à la science ; la seconde, c’est que les idées d’autrui, quand nous n’avons pas d’abord exploré nous-même la matière à laquelle elles se rapportent, n’ont pour nous qu’un sens vague, et nous troublent plutôt qu’elles ne nous éclairent54. » Cette habitude et ce goût sont le signe du véritable philosophe.

584. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Maine de Biran mettait partout des forces spirituelles, et le public souhaitait devoir la matière détruite au profit de l’âme. […] Enfin, en matière d’idées, le Français est naturellement discipliné, fort différent des Allemands qui réfléchissent chacun à sa façon et chacun dans son coin, très-docile aux opinions courantes, très-paresseux contre les opinions nouvelles, très-grognon quand on dérange ses habitudes, et qu’au lieu de réciter il est contraint de penser.

585. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIII : De la méthode »

Son grand besoin est de voir clair ; il veut toujours se rendre compte, et dans la discussion dit quinze fois par heure : « Je n’entends pas. » Un peu sceptique, parfois moqueur, destructeur par occasion, surtout en matière d’illusions poétiques et métaphysiques, il a des habitudes d’algébriste, et a copié de sa main la Langue des calculs. […] On étudie par la chimie la nature nouvelle de ce liquide ; on trouve que tout aliment composé de matières neutres azotées s’est transformé en une substance définie, nommée albuminose, laquelle peut être assimilée, c’est-à-dire réparer les pertes du corps.

586. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

En matière biographique l’invention tombe tout de suite dans le charivarique et le tintamarresque. […] Comment supposer que Racine eût épuisé la matière tragique et pût craindre de manquer de sujets ? […] Tout ce qu’on peut dire de Racine, c’est qu’en aucune matière il n’a dominé son siècle. […] Si ce sont des esprits, ils n’ont pas d’ondes, vu que les ondes appartiennent à la matière. […] Il divise clairement sa matière en trois parties : la Poésie, le Roman, les Idées.

587. (1907) Le romantisme français. Essai sur la révolution dans les sentiments et dans les idées au XIXe siècle

Je ne vois rien non plus dans les conceptions, passions et imaginations qui font la matière de son éloquence, à quoi le caractère romantique puisse être dénié. […] Il en a même emprunté la magnificence, comme la flamme emprunte la splendeur des matières qu’elle dévore. […] Ils brouillent tout appelant esprit ce qui est matière et sens. […] Emile Faguet, c’est la matière terne et sèche de René. […] De là la matière de chacun des deux livres suivants.

588. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettre sur l’orthographe » pp. 427-431

On lui épargne toutes les difficultés, on va au devant de tous ses désirs ; on prévient ses méprises ou ses faux pas ; il a sous la main, en quelques minces feuillets, ce qui faisait autrefois la matière d’un in-folio.

589. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Rêves et réalités, par Mme M. B. (Blanchecotte), ouvrière et poète. » pp. 327-332

En un mot, ce n’est pas la matière de la poésie qui manque, ce n’est pas le sentiment poétique ; c’est plutôt la forme et le glorieux accident.

590. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VIII. De la clarté et des termes techniques »

Fontenelle disait de ses Entretiens sur la pluralité des mondes : « Je ne demande aux dames, pour tout ce système de philosophie, que la même application qu’il faut donner à la Princesse de Clèves, si on veut en suivre bien l’intrigue, et en connaître toute la beauté. » Dans un dialogue de Diderot, le philosophe Crudeli, au moment d’entamer une discussion sur les matières les plus ardues avec la Maréchale, qui n’avait jamais lu que ses heures, répond à ses inquiétudes en disant : « Si vous ne m’entendiez pas, ce serait bien ma faute » ; et il fait toute sa démonstration en transposant dans le langage d’une femme ignorante les idées des plus obscurs métaphysiciens, sans que, dans cette conversion, la profondeur perde ce que gagne la clarté.

591. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Philosophie du costume contemporain » pp. 154-161

De plus, la matière employée pour le costume, ce sont surtout des tissus.

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