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1323. (1887) Essais sur l’école romantique

Tel qui a supputé son temps et ses besoins intellectuels, a trouvé, me dit-il, qu’en lisant tous les jours, il pouvait à peine connaître superficiellement les écrivains d’un génie incontesté ; que dès lors, il ne lui restait pas un moment pour les écrivains d’un génie contestable. Quiconque, parmi ce public d’élite, estime son temps, soit comme un capital, soit comme une richesse intellectuelle, soit comme le bien de sa femme et de ses enfants, soit comme le bien de son esprit, ne se croit pas le droit d’en retrancher une minute pour le plaisir douteux de lire un roman d’homme ou un conte de femme. […] Le bas est moins intellectuel.

1324. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

Nous naissons à la vie intellectuelle avec les idées de notre temps ; mais, selon notre complexion, ou nous nous y tenons ou nous les modifions dans le sens de notre humeur, ou très vite nous rompons en visière avec elles. […] C’est alors que commence sa véritable éducation intellectuelle, celle qu’on se donne soi-même, au gré de son goût. […] Comme, au moment où il publie cette pièce (1855), il s’occupe de socialisme, d’histoire au point de vue populaire, de libération intellectuelle et morale, d’extinction du paupérisme, etc., ayant dans l’esprit les Misérables et la Légende, ces idées qui le sollicitent, il croit les avoir eues avant 1846, et c’est en parlant de son œuvre d’avant 1846 qu’il dit : « J’ai plaidé pour les petits, j’ai demandé la grâce universelle, j’ai voulu résorber le bagne par l’école, j’ai rêvé tous les progrès, j’ai mis en liberté l’amour, j’ai réhabilité le forçat et la prostituée, et j’ai été républicain », toutes choses dont il n’est pas question le moins du monde dans ses livres de 1830 à 1848.

1325. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

Il ne restait que celui d’Érope et de Thyeste, ou de Canace et Macareus, ou de Canne et Bybis chez les Grecs et les Latins, ou d’Amnon et de Thamar chez les Hébreux. » Ainsi, pour punir le crime intellectuel de René, il paraît qu’il n’y a pas de châtiment plus convenable, plus congruent, plus nécessaire que de le faire aimer par sa sœur et de lui faire entendre, chuchoté par cette sœur sous le drap mortuaire de ses vœux, l’aveu de cet incestueux amour. […] Il est clair qu’il y a, dans ses livres, plus d’idées, et plus amies de notre esprit, plus de sentiments, et plus nuancés, et plus de nourriture intellectuelle que dans Chateaubriand. […] Un de ses goûts les plus marqués est d’exalter certains principes et d’en détester les représentants, de magnifier la royauté et de mépriser les rois, pour se donner à la fois le plaisir de la supériorité intellectuelle et de la supériorité morale.

1326. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Cette sédition intellectuelle n’alla pas bien loin : des réclamations, des menaces vagues, de beaux projets d’utopie. […] Je n’y tiens presque pas, et, sauf le petit nombre de personnes avec lesquelles je me reconnais une fraternité intellectuelle, je dis à chacun ce que je suppose devoir lui faire plaisir.

1327. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Elle jouissait d’une décentralisation intellectuelle très précieuse et toute naturelle, par l’effet du manque de communications rapides ; et les grandes villes étaient encore des foyers de science, de talents, et d’enseignement que Paris n’avait pas éteints en les absorbant. […] Vous créez, petite, mais qui pourra devenir grande, une puissance spirituelle dont Rousseau ne veut pas entendre parler. « Tout ce qui rompt l’unité sociale ne vaut rien. » — Ainsi : des croyances particulières et personnelles, mais qui restent particulières et personnelles ; des religions, si vous voulez, mais qui ne relient pas, des religions qui ne soient pas autre chose que des opinions philosophiques et littéraires, voilà la part faite à la liberté, à l’autonomie intellectuelle du citoyen. […] Auguste Comte, encore, fait très ingénieusement remarquer que l’ordre extérieur est notre régulateur intellectuel, et que si par exemple l’ordre astronomique nous apparaissait comme irrégulier, nous en prendrions une conception morale et sociale très irrégulière aussi, et ne serions pas choqués de l’incohérence dans notre organisation politique (Système de politique positive ; Statique sociale, ch.

1328. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

La science française Pour affirmer que la Belgique a impudemment provoqué l’Allemagne, que Louvain n’a pas été détruite ni la cathédrale de Reims abîmée et que les soldats allemands sont les soldats de la science, les imposteurs connus sous le nom d’« Intellectuels allemands » se sont mis à quatre-vingt-treize ; pour rédiger un autre manifeste, et d’une autre qualité, les deux tomes de La Science française que le ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts vient de publier, il a suffi d’une trentaine d’écrivains : la vérité n’a pas besoin d’autant de signatures que le mensonge. […] Voire, il n’a pas attendu le volume et, dès les premières communications de ce savant, célèbre depuis lors, à l’Académie des sciences, il courait après le savant, se faisait expliquer l’invention, la révélait avec autant de claire exactitude que d’allégresse et de son côté, sur les données de la permanence physique et physiologique, il établissait une loi de « constance intellectuelle », qui semble contredire le transformisme général, mais ne le contredit pas, et qui associe aux caractères de mutabilité le principe de l’invariabilité essentielle, et qui pourrait fournir à l’histoire de la pensée humaine, pareille et enrichie, une règle ou une méthode. […] Il considère que toutes les opinions qui ont cours ici-bas, sous le nom de préjugés, de dogmes ou de certitudes, sont l’œuvre de ce mécanisme intellectuel souvent décrit, l’association des idées.

1329. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

… Je prends dans l’anarchie d’une part ce qui me distrait ; de l’autre, ce qui s’accorde avec mes théories, ce qui favorise mon égoïsme d’intellectuel. […] Il s’est pénétré de leurs beautés, il s’est assimilé leurs idées ; il est parvenu à cet état de scepticisme et d’épuisement qu’engendre généralement l’excès de culture intellectuelle. […] Hermann a grandi dans une atmosphère intellectuelle ; il a beaucoup vu, beaucoup réfléchi ; la science a tué en lui l’orgueil, il s’est attristé au spectacle de la condition humaine, il en est arrivé à se convaincre, qu’en dépit de son blason il est l’égal de ses sujets et il se jure de les aider, d’améliorer leur condition, si jamais la fortune lui en donne les moyens… La fortune l’exauce.

1330. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1894 » pp. 185-293

Mardi 11 décembre Dans un salon, ce qui donne de la vie, de la chaleur à une société, à défaut d’affections de cœur entre les gens, ce sont les affections cérébrales, nouées entre les communiants d’une même pensée, d’une même élaboration intellectuelle .

1331. (1911) Études pp. 9-261

  La couleur de Matisse brille d’une splendeur intellectuelle. […] Aussi ne faut-il pas chercher d’abord la direction intellectuelle du poème, mais trouver le point précis d’où l’on puisse contempler sans déplacement toutes les visions offertes.

1332. (1896) Les époques du théâtre français (1636-1850) (2e éd.)

Mais elle l’était bien plus, elle l’est surtout des écrivains du xviiie  siècle, d’un Crébillon ou d’un Voltaire, formés à l’école de la tragédie classique et de l’histoire ; engagés, comme par profession, de toute une partie d’eux-mêmes, l’intellectuelle, dans les souvenirs de l’antiquité ; contemporains à la fois de Louis XIV et de Sémiramis, du régent et de Manlius Capitolinus ; vivant ainsi comme en partie double ; et, du mouvement des rues de Paris ou de la conversation libertine du café Procope et du café Gradot, passant le plus naturellement du monde à rimer pour la scène française les fureurs de Rhadamiste, roi d’Ibérie, ou les remords du fils de Clytemnestre et d’Agamemnon. […] Mais elles l’étaient plus que jamais en ce temps-là, par un esprit de révolte, très naturel et très légitime, contre l’état d’infériorité intellectuelle et morale où il faut bien convenir que le xviie  siècle avait prétendu les maintenir98.

1333. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Et, comme jadis Baal, Cantagnac représente la puissance corruptrice de l’argent, telle qu’elle s’exerce de nos jours ; il représente la banque, la spéculation financière et l’exploitation, tantôt des idées et du travail des « intellectuels », tantôt de l’effort, de la sueur ou des humbles économies des pauvres, et la mise en coupe réglée des biens de tous au profit de quelques-uns, et le cosmopolitisme, et finalement le nihilisme.

1334. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

— Elle pourrait renoncer à la spiritualité et conserver son caractère, ne plus croire aux marchands de stoïcisme et croire toujours à sa supériorité intellectuelle.] — Suivant M.  […] On ne guérit pas d’un vice organique comme le pédantisme… Ce qui la décide à unir Henriette à Clitandre, c’est un motif tout intellectuel ; le sentiment y est pour peu de chose. » — Cette fois-ci je comprends un peu moins bien. N’y a-t-il rien que d’intellectuel dans l’admiration que lui a inspirée « le trait généreux » de Clitandre ?

1335. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

Le plus rigoureux puritain a sa confession de foi ; sa représentation intellectuelle des choses divines.

1336. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Notre condition intellectuelle serait bien misérable si, en fait d’écrits, nous n’attachions pas tous le même sens aux mots raison et vrai, comme, en fait de conduite, aux mots probité, honneur, foi publique.

1337. (1933) De mon temps…

La hauteur intellectuelle et littéraire de Villiers accablait d’un souverain mépris ce qu’il y avait, dans le réel talent de Mendès, d’artificiel et d’un peu équivoque.

1338. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Ce qui empêche que Napoléon ne soit dans l’histoire le représentant de son siècle, c’est donc qu’il a manqué a toutes ses tendances libérales, c’est qu’il a comprimé son essor intellectuel, quand il pouvait si justement prétendre à le diriger ; c’est qu’il n’a été que le glorieux soldat d’une révolution dont il pouvait être le législateur politique.

1339. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

Pierre Lasserre, est un jeune philosophe, pour qui les lourdes vapeurs, amassées à l’horizon intellectuel, semblent dissipées. […] Elle avait compris tout comme une autre ; et cependant elle s’amuse à nous alléguer je ne sais quelle jalousie intellectuelle.

1340. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

Entre lui et Viéra, il y avait, trop peu de rapports intellectuels.

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