Le Moyen Âge, lui, n’y a guère vu que ce que l’on y reconnaît d’abord de pareil ou d’identique. […] Entre la Chanson de Roland, que l’on date de l’an 1080, et celle de Raoul de Cambrai, dont on place la rédaction aux environs de 1220, s’il y a quelques différences, n’étant guère que « philologiques », elles ne se révèlent donc aussi qu’aux seuls érudits. […] En même temps, dans la classe aristocratique, plus instruite, quoiqu’elle ne le soit guère, l’individu, sous la double influence des Romans de la Table-Ronde et de l’exemple des troubadours provençaux, commence à prendre conscience de lui-même ; et le lyrisme naît. […] Originalité de Commynes. — Il est lui-même, ce qui le distingue des chroniqueurs ses contemporains ; — lesquels ne sont guère, en français ou en latin, que l’expression de leur temps ; — et la voix de l’opinion plutôt que celle de leur pensée. — Son expérience des affaires. — Qualités de ses Mémoires ; — ils sont d’un politique ; — et aussi d’un psychologue [Cf.
À l’époque où Commynes, le seigneur d’Argenton comme on l’appelle, connu pour sa prudence éprouvée et par la longue confiance de Louis XI, est envoyé à Venise, à ce poste d’honneur de la diplomatie, pour y lutter de finesse avec les rusés Vénitiens, avec ce gouvernement qu’il admire et dont il nous définit si bien le génie, de grands changements s’étaient accomplis depuis le temps de Henri Dandolo : toute trace de démocratie, comme aussi toute velléité de monarchie, y avait disparu ; le doge, toujours honoré comme un roi, ne pouvait plus guère rien par lui-même ; le patriciat et les Conseils étaient tout. […] Daru, que cette quatrième croisade n’eut guère pour résultat définitif que d’agrandir la suprématie maritime de Venise : « Le reste de l’Europe y perdit beaucoup de vaillants hommes et de monuments précieux, et n’y gagna que l’introduction de la culture du millet, dont le marquis de Montferrat envoya des graines en Italie. » S’il était vrai que la prise de Constantinople par les croisés et le sac de cette ville eussent fait périr, comme il est trop probable, des monuments de l’ancienne littérature grecque qui avaient échappé précédemment, il faudrait, nous les lettrés et les disciples des doctes, le déplorer avec regret, avec amertume : mais vouloir que toute une époque soit heureuse de la manière dont nous l’entendons, et que les chevaliers du siècle de Villehardouin conçoivent l’emploi de leurs facultés et de leur temps comme les hommes de cabinet de nos jours, c’est demander beaucoup trop.
J’aime ce titre donné à des fragments de mémoires : Histoire de ma jeunesse ; il me semble que ce n’est guère qu’ainsi et dans cette mesure que chacun devrait écrire les siens. […] Arago n’avait guère que vingt-trois ans.
« Je n’ai guère reçu, monsieur, en ma vie ni de lettres plus agréables que celle dont vous m’avez honoré, ni de plus jolis vers que les vôtres. […] [NdA] Un spirituel amateur d’autographes m’écrit pour me communiquer un doute au sujet de ce papier glacé, qu’on ne voit guère employé en effet au xviiie siècle, même par les mains les plus délicates : ce serait une invention de notre siècle.
Marcotte (1832) ; je dois vous dire qu’ayant l’intention de faire un pendant à mes deux autres, je ne pouvais guère représenter autre chose que le peuple, qui a toujours plus de caractéristique que la classe plus élevée. […] Il y en a qui penseront qu’au contraire il peut être développé par ce moyen : voilà comment on ne s’entend guère.
Molière, qui sait son Lucrèce, n’a guère eu le temps ni l’occasion, près de Gassendi, d’aller jusqu’à Homère. […] Par malheur, aucun de nos grands prosateurs d’alors, ni Montesquieu, ni Voltaire, ni Buffon, ni Jean-Jacques, n’ont lu directement Homère : il n’est entré pour rien dans la composition ni dans la trempe de leur talent ; on s’en aperçoit à leur cachet. — Ce n’est pas la bonne volonté pour Homère qui a manqué à Diderot, et, sans guère le lire, il a dû plus d’une fois en causer de près et par bouffées avec son ami l’Allemand Grimm, l’ancien élève d’Ernesti. — Celui qui l’a lu (j’entends toujours lu à la source), dans tout ce monde du xviiie siècle, ce n’est ni d’Alembert, ni Duclos, ni Marmontel, ni même le critique La Harpe, dont ce serait pourtant le devoir et le métier ; ce n’est pas même Fontanes, d’un goût si pur, mais paresseux.
Ce qu’on peut appeler l’atticisme dans notre langue ne date guère que du xviie siècle, et on le retrouve, selon moi, avec toute sa pureté jusque dans la langue parlée de la fin du xviiie ; je dis la langue parlée et non écrite, la langue de la conversation et non celle des livres ; là où cette langue parlée a laissé des traces et des témoignages d’elle-même, c’est-à-dire dans les correspondances, on la goûte encore en ce qu’elle a de parfait, et c’est à ce titre qu’après l’excellente et plus ample correspondance de Mme Du Deffand, les billets de Mme de Créqui ont leur prix. […] Il est certainement très compromis, et c’est un mot et une chose qui n’a plus guère de sens aujourd’hui ni d’application.
Il n’y avait guère de milieu de la recherche à l’abandon. […] Sa femme lui sert furieusement dans la province ; sans elle la noblesse ne le visiterait guère : il se lève là à onze heures comme ici, et s’enferme quelquefois pour lire, n’aime point la chasse et n’a rien de populaire.
Il y a longtemps que la réputation de l’abbé de Marolles est faite, et, comme auteur, il ne vaut guère mieux que sa réputation ; et cependant il mérite un souvenir. […] Petit écolier poli, petit monsieur déjà mondain, ayant besoin, pour s’affectionner aux choses, qu’on lui parlât civilement, il ne rencontra guère que des pédagogues qui le rebutèrent, et il s’habitua à confondre le pédantisme et la discipline.
Le journal belge se plaint vivement de cette poursuite rigoureuse, qui ne l’expose guère pourtant qu’à 5 fr. d’amende… » Et il poussait à bout sa raillerie et ses conclusions. […] Après avoir exposé à merveille et dans un parfait tableau les libertés de la presse anglaise et les avoir expliquées par le caractère du public à qui elle s’adresse, il reconnaît les différences de notre esprit, à nous, et de nos tendances françaises ; et cependant ses conclusions n’admettent guère, sur cet article capital, de différence de régime d’un pays à l’autre.
Delécluze est, à mes yeux, le bourgeois de Paris par excellence ; c’est le bourgeois de Paris fils de bourgeois, resté bourgeois lui-même, ni pauvre ni enrichi, ayant eu de bonne heure pignon sur rue, modeste et très-content, aimant les lettres, les arts, et en parlant, en jugeant à son aise, de son coin, — un bon coin ; — ayant gardé quelques-uns des préjugés et peut-être quelques-unes des locutions de son quartier ; s’étant formé sur place, rondement et sans en demander la permission au voisin ; ayant voyagé sans changer, s’étant porté lui-même partout ; ne s’étant guère perfectionné, mais ne s’étant pas corrompu. […] Delécluze, connu des gens de lettres et des artistes ne l’est guère du public ; car, bien qu’il écrive depuis tant d’années, il n’est pas, je le répète, un de ces écrivains qu’il suffit de nommer ; il n’a jamais eu de ces rencontres brillantes de plume qui éclatent aux yeux de tous sous forme de talent.
Don Quichotte relu tout naturellement, lorsqu’on vient de lire une notice exacte de la vie de l’auteur, ne laisse guère de difficulté dans l’esprit. […] Votre nom n’est plus guère qu’une enseigne et un symbole.
Jasmin n’avait guère faibli d’ailleurs, et il soutenait jusque dans son dernier volume, avec une sorte d’aisance et une verve de tempérament, cette dureté de condition qui condamne les artistes toujours en scène à se répéter, à repasser sur les mêmes tons, à tirer de leur chanterelle jusqu’à la dernière note, à jouer de leur voix jusqu’à la dernière corde. […] Cambouliu, professeur à la Faculté des Lettres de Montpellier, a écrit à l’un de ses amis, à l’occasion de ce mien jugement : « … Il n’y a rien en effet chez les Félibres de comparable à Mistral (à qui j’ai consacré cet hiver une leçon qui a eu un grand succès), et Jasmin a largement obtenu tout ce qu’il méritait, — j’oserai même ajouter plus qu’il ne méritait ; car je vous avoue franchement que je ne le tiens pas en très haute estime et que je ne puis guère voir en lui qu’un écolier de nos maîtres parlant patois ; je mets une grande différence entre lui et l’auteur de Mireïo, qui est, celui-là, un véritable poëte.
Les établissements de l’espèce des cafés ne dataient guère que de ces années-là, et remplaçaient avantageusement pour les auteurs et gens de lettres le cabaret, où s’étaient encore enivrés sans vergogne Chapelle et Boileau. […] Ajoutons seulement que, sans trop modifier le fond de notre jugement sur les odes, qui n’est guère après tout que celui qu’a porté Vauvenargues (Je ne sais si Rousseau a surpassé Horace et Pindare dans ses odes : s’il les a surpassés, j’en conclus que l’ode est un mauvais genre, etc., etc.
Balzac On ne lit plus guère Balzac288 aujourd’hui : c’est un phraseur, un emphatique, qui maintes fois joue au précieux. […] Dès 1624, il se retira chez lui, et à partir de 1631 n’en bougea plus guère.
Le Parlement n’avait guère plus de force conservatrice que l’épiscopat : le zèle aveugle de ses magistrats le discréditait sans sauver la religion ni la société ; les Gilbert de Voisins, les Omer de Fleury, les Séguier, toujours prêts à requérir contre les Lettres anglaises, l’Encyclopédie, le Bélisaire, l’Emile, comme contre l’inoculation, le jésuitisme et l’ultramontanisme, avilirent leur compagnie par le ridicule qui s’attache aux violences impuissantes ; ils décuplèrent la puissance des œuvres qu’ils faisaient brûler au pied du grand escalier de leur palais. […] Je ne fais guère ici que résumer une page de Taine.
Avant elle on n’a guère su chez nous que dessiner des caricatures. […] Elle affirme, en vertu de sa thèse, l’infériorité des Grecs, qu’elle ne connaît pas, à l’égard des Romains, qu’elle ne connaît guère.
Le charme, c’est peut-être une certaine aisance heureuse, une fleur de naturel même dans le rare et le recherché ; c’est, en tout cas, quelque chose d’incompatible avec des qualités trop laborieuses et trop voulues : ainsi le charme ne se rencontre guère chez les chefs d’école. […] Alphonse Daudet conservera même quand il ne fera plus que regarder et qu’il ne rêvera plus guère.