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345. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Si j’avais une fille à marier ! » pp. 215-228

Et si ce n’était là qu’une illusion de père de famille, dite en famille, nous n’en parlerions pas, et peut-être serions-nous touchés ; mais le livre a des prétentions à la théorie générale. […] Et d’ailleurs, sentimental, attendri, cordial, aimant la famille, un naïf au fond, une bonne pâte d’homme, que la Fantaisie, cette boulangère ravissante, qui a des écus intellectuels et des trésors de sensation, roulera jusqu’au dernier moment dans sa fleur de farine, sous ses roses mains potelées, l’auteur de Si j’avais une fille à marier !

346. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iv »

Cette prière, d’une grandeur paisible, où il avait mis ses dernières pensées, le petit soldat la répétait si souvent que la sœur catholique qui le soignait la recueillit et l’envoya à la famille en deuil. […] A la veille de l’offensive de Champagne, où il allait être tué le 6 octobre 1916, le sous-lieutenant Maurice Dieterlin, ancien élève de l’École des Chartes, envoie à sa famille ses dernières paroles :‌ Je vis le plus beau jour de ma vie. […] Raoul Allier, est un des coups les plus graves qui aient été portés à notre famille spirituelle.

347. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Gilbert Augustin-Thierry »

La justice immanente et implacable qui gouverne secrètement l’histoire des familles et de leurs générations successives, le conflit de la personnalité humaine et des fatalités de l’atavisme ; « les responsabilités solidaires » transmises par les pères aux enfants, le problème de la suggestion … tels sont quelques-uns des sujets qui s’offrent aujourd’hui aux méditations et aux divinations de l’« artiste penseur ». […] L’histoire d’une famille peut exiger des siècles et des siècles pour que le drame moral y soit complet : patiens quia æternus.

348. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre ix »

Il leur remettait un petit paquet, et surtout sa visite rappelait les jours heureux, les scènes de la vie de famille. […] Il n’était si pauvre famille qui n’eût envoyé à son soldat, fils, mari, parent, quelque victuaille.

349. (1894) Critique de combat

Malheur à ceux qui demeurent en dehors de la petite famille ! […] Ce sont là querelles de famille auxquelles je n’ai ni le droit ni l’envie de me mêler. […] J’entends bien répéter que la famille est le fondement de notre société. […] Sa famille le confie à une autre famille. […] Elle devrait, ce me semble, commencer dans la famille, continuer au collège !

350. (1898) Émile Zola devant les jeunes (articles de La Plume) pp. 106-203

Il résolut de l’étudier comme un naturaliste : l’Histoire naturelle et sociale d’une famille était conçue. […] Zola, comment une famille, un petit groupe d’êtres se comporte dans une société, en s’épanouissant pour donner naissance à dix, à vingt individus, qui paraissent, au premier coup d’œil, profondément dissemblables, mais que l’analyse montre intimement liés les uns aux autres. […] Émile Zola a écrit l’Histoire naturelle et sociale d’une Famille, et que trouvez-vous d’étonnant à ce qu’il ait insisté sur ces fougueux instincts inhérents à l’humanité vivante qui nous poussent à nous nourrir, à nous reproduire et à vivre. N’oubliez pas sa préface des Rougon-Macquart et que ce qu’il a voulu écrire, c’est le roman de l’espèce et de la société, considérés dans leur unité la plus simple, qui est une famille. […] Dans la Conquête de Plassans, il a noté scrupuleusement les basses intrigues de la Prêtraille, amenant souterrainement la discorde dans les familles de toute une ville.

351. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Je me rappelle une de ces maisons, voisine de celle de ma famille, où j’avais plusieurs condisciples. […] Il y avait, comme je l’ai dit, dans la famille de ma mère des éléments de sang basque et bordelais. Un Gascon, sans que je le susse, jouait en moi des tours incroyables au Breton et lui faisait des mines de singe… Ma famille elle-même était partagée. […] J’aurais été en prêtre ce que j’ai été en père de famille, très aimé de mes ouailles, aussi peu gênant que possible dans l’exercice de mon autorité. […] Il prétendit, chose délicate peut-être, que la même éducation servît aux jeunes clercs et aux fils des premières familles de France.

352. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

» Ma famille me gronderait bien d’avoir oublié le de et le Rebecque ; mais je les vendrais à présent three pence a piece. […] Vous trouveriez, dit-il, une famille toute disposée à vous aimer, à vous admirer, et, ce qui vaut mieux, le plus beau pays du monde. […] Il fit le voyage de La Haye ; il s’y retrouvait en présence de la famille de Mme de Charrière. […] Pressé pourtant, persécuté de nouveau par sa famille, il repart en novembre pour cet éternel Brunswick. […] La famille Cazenove est aujourd’hui à peu près éteinte.

353. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Au-delà du paisible horizon de la famille, il n’aperçoit pas de bonheur digne d’envie. […] Une famille au temps de Luther. […] Quelques vers donneraient à penser que la famille tragique habite la ville d’Augsbourg. […] Dieu et sa famille remplissent toutes ses journées. […] Lucrèce Borgia, Marie Tudor et Angelo sont de la même famille, mais à coup sûr ne sont pas de la famille humaine.

354. (1866) Nouveaux essais de critique et d’histoire (2e éd.)

Philippe Brideau est un soldat dépravé par le métier et la famille, par le succès et le malheur. […] Il exploite ses gens et sa famille, ses amis et ses ennemis. […] L’homme est un des membres de cette grande famille. […] Marc-Aurèle les eut, et à profusion, autour de lui, jusque chez lui, dans sa famille. […] Le gros de la nation, les laboureurs, tombèrent au-dessous des familles guerrières obligées de s’exercer aux armes, et des familles sacerdotales chargées de conserver et de pratiquer les rites sacrés.

355. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

Dans les familles bourgeoises, il n’y a plus de parenté au-dessous d’une certaine position de fortune, au-dessus du quatrième étage d’une maison. […] Au milieu de la soie claire d’un panneau, un noir Bonvin, représentant un homme attablé dans un cabaret, apparaît à la façon d’un portrait de famille, d’un ressouvenir de basse origine, du père de la fille passant la tête au milieu de sa fortune. […] * * * — La vie est hostile à tout ceux qui ne suivent pas le grand chemin de la vie, à tous ceux qui ne rentrent pas dans les cadres de la grosse armée régulière, à tous ceux qui ne sont ni fonctionnaires, ni bureaucrates, ni mariés, ni pères de famille. […] Quelles figures fantasques, quels originaux, quelles silhouettes grotesques ou bizarres, puissantes ou tranchées, s’accusant dans les souvenirs, les légendes de famille, avec une verdeur, une saveur du cru, une turgescence de comique, qu’on ne trouve pas dans les bonshommes parisiens. […] Nous ne nous saluons pas… Ça se passe en famille à l’Académie, voyez-vous.

356. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Dîner chez Daudet, en tout petit comité de famille, et le soir, avec Alphonse, une longue et captivante causerie sur la fin de terre touchant au pôle, où il n’y a plus d’humanité, d’animalité, de végétation, où plus rien n’est que glace et nuit, — et sur l’effroi du silence, qui règne dans ce monde glacé. […] C’est un jeune homme, tout dernièrement commis à douze cents francs, dans le principe, intermédiaire entre des fils de famille et des usuriers, aujourd’hui exerçant par lui-même, tout en étant homme de cercle et cavalier du bois de Boulogne. […] C’est intéressant cette famille, où se sent dans une aisance très restreinte, une allègre insouciance mêlée à un certain désordre artiste. […] Il reste coucher, et le soir, il nous parle de sa famille, de son père : son père, élevé au séminaire, et destiné à être prêtre, s’engageant dans l’infanterie de marine, devenant général, gouverneur de la Guyane et de la Guadeloupe, et mourant à trente ans de vie exotique. […] Dimanche 24 septembre Le capitaine de l’Isle, le descendant du chevalier, du favori de Marie-Antoinette, m’apprend que la famille Diez, la famille dans laquelle mon grand-père avait pris sa femme, avait été anoblie au xviie  siècle, pour avoir fondé une messagerie, Laffitte et Caillard, qui allait de la Haute-Marne à Pont-à-Mousson.

357. (1863) Cours familier de littérature. XV « XCe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (3e partie) » pp. 385-448

Mon Dieu, le voilà tombé lui aussi, lui si jeune, le dernier né de la famille, que je comptais bien laisser en ce monde, entouré d’enfants qui m’auraient pleurée comme leur mère ! […] XIV Un autre devoir de famille la rappelle à Paris : lisez ses apprêts de voyage. […] Je vais partir avec les souvenirs les plus agréables et les plus doux, tant du dedans que du dehors : famille charmante où je suis adoptée, où j’ai reçu les témoignages les plus touchants d’affection, affection si vraie puisqu’elle est désintéressée. […] Les notes se multiplient, les morts surviennent, les douleurs enseignent les résignations, la religion console, les tendresses de famille s’exaltent et se concentrent dans l’excellent et malheureux père, puis tout se décolore excepté la piété, et tout meurt. […] » Son âme est de même famille que la mienne, et, puisque Dieu m’a permis de la connaître dans cette confidence, cette âme ne me quittera plus jusqu’à mon dernier jour.

358. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (3e partie) » pp. 365-427

un être sorti d’un autre être, qui lui-même était sorti d’un autre, et ainsi de suite jusqu’à l’origine de cette espèce d’êtres appelés hommes. — Mais le premier de cette famille humaine, l’ancêtre de l’univers, vivant, pensant, aimant, qui lui avait donné la vie ? […] Il appartient à la famille des figuiers, et il a été décrit et dessiné dans l’atlas des voyages de Spix et Martius. […] Que la tendance à grimper se soit imposée à diverses espèces par une nécessité de circonstance, celle d’arriver jusqu’à l’air et à la lumière au milieu d’une végétation aussi drue, cela est démontré jusqu’à l’évidence par ce fait, que les arbres grimpants ne constituent ni une famille ni un genre spécial. Point de catégorie exclusive : cette habitude pour ainsi dire adoptive, ce caractère forcé, sont communs à des espèces d’une foule de familles distinctes qui, en général, ne grimpent point. […] Les feuilles pinnées, comme dans le reste de la famille, que cette forme caractérise, sortent du stipe à de grands intervalles, au lieu de se réunir en couronne, et portent, à la pointe terminale, de longues et nombreuses épines courbes.

359. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

— Mais, à propos de châtaignier, dis-je, comment se fait-il que, si vous aimez tant de père en fils cet arbre nourricier de la famille, vous ayez creusé à coups de hache dans son tronc ce grand creux où l’on voit encore l’empreinte du fer dont vous l’avez si cruellement frappé, au risque de le faire écrouler avec son dôme immense et ses branches étendues sur votre chaumière ? […] Que voulez-vous, mon jeune monsieur, je l’ai entendu dire à mon père et au père de mon père : notre famille est aussi vieille sur la montagne que le rocher fendu qui pleure de vieillesse, comme mes yeux, et que les racines de l’arbre qui ont fendu la roche en se grossissant sous terre. […] Ils disaient qu’ils avaient entendu dire, par le plus vieux moine du couvent de là-haut, que les Zampognari, c’est notre nom de famille, étaient descendus, dans le temps des guerres des Pisans contre les Florentins, d’un jeune officier toscan prisonnier des Pisans, qui s’était sauvé de la tour de Pise, où il attendait la mort, avec la jeune fille du capitaine geôlier de sa tour, et qu’il s’était bâti, au plus haut de la montagne, alors déserte, une cabane sous les châtaigniers pour y vivre de peu avec sa maîtresse. […] LXIV — Je ne sais pas autre chose de la famille, continua la tante. […] allez vous êtes bien de la famille.

360. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Paroles d'un croyant »

« Et les hommes se regarderont à cette lumière, et ils diront : « Nous ne connaissions ni nous ni les autres, nous ne savions pas ce que c’est que l’homme : à présent nous le savons. » « Et chacun s’aimera dans son frère, et se tiendra heureux de le servir ; et il n’y aura ni petits ni grands, à cause de l’amour qui égale tout, et toutes les familles ne seront qu’une famille, et toutes les nations qu’une nation.  […] Prenez dans chaque famille les jeunes gens les plus robustes et donnez-leur des armes, et exercez-les à les manier, et ils combattront pour vous contre leurs pères et leurs frères ; car je leur persuaderai que c’est une action glorieuse. 

361. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Feuilles d'automne, (1831) »

Assis dans sa gloire au foyer domestique, croyant pour dernière et unique religion à la famille, à la paternité, il accepte les doutes et les angoisses inséparables d’un esprit ardent, comme on subit une loi de l’atmosphère ; il reste l’heureux et le sage dans ce qui l’entoure, avec des anxiétés mortelles aux extrémités de son génie ; c’est une plénitude entourée de vide. […] Cette tristesse du ciel et de l’horizon, cette piété du poëte réduite à la famille, est un attrait, une convenance, une vérité de plus, en nos jours de ruine, au milieu d’une société dissoute, qui se trouve provisoirement retombée à l’état élémentaire de famille, à défaut de patrie et de Dieu.

362. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre I. Place de Jésus dans l’histoire du monde. »

La famille chargée de tenir les leviers et de veiller sur ces archives portatives, étant près du livre et en disposant, prit bien vite de l’importance. […] Jusqu’au temps des Macchabées, le judaïsme, malgré sa persistance à annoncer qu’il serait un jour la religion du genre humain, avait eu le caractère de tous les autres cultes de l’antiquité : c’était un culte de famille et de tribu. […] On embrassait le culte de Jéhovah quand on entrait dans la famille juive 87 ; voilà tout.

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