. — Question de grammaire, question de goût ; les esprits stériles seuls s’y adonnent ; elle dénigre beaucoup, elle ne produit rien. — Sous ce rapport, il faut la laisser aux esprits méticuleux et jaloux, qui se consolent de leur impuissance en montrant les imperfections des œuvres d’autrui. […] L’expérience est donc quelque chose, et les années apportent cette expérience aux esprits sincères. […] Malheur et mépris aux esprits progressifs qui s’améliorent, qui se rectifient, qui se corrigent eux-mêmes en vivant ! […] De telles histoires, pamphlets de la démocratie ou pamphlets de l’aristocratie, n’étaient propres qu’à éterniser la guerre civile des esprits entre les enfants d’un même peuple. […] Or, le bout, c’était évidemment, dans l’esprit de Garnier-Pagès, le renversement du trône et la république. « L’entendez-vous ?
Viens donc, et tu trouveras ton pieux adorateur calme d’esprit et tranquille, ou tu me rendras tel aussitôt. […] Il faut reconnaître les diverses familles d’esprits et de talents, et, pour ainsi dire, les différentes races. […] Il n’est pas rare que les livres soient un talisman et comme un grimoire magique à l’aide desquels d’habiles esprits, subtils enchanteurs, tiennent asservie une foule sans pensée. […] Cette fin de vie de Cowper est triste, humiliante pour l’esprit humain, et bien propre à faire rentrer en soi quiconque est tenté de s’enorgueillir. […] Tes esprits ont un cours moins rapide ; je te vois chaque jour devenir plus faible ; c’est ma détresse qui t’a ainsi réduite si bas, ma Marie !
C’est un bon esprit plus qu’un esprit supérieur, un écrivain laborieux autant qu’éclairé, d’une vaste lecture, d’une sincérité parfaite, sans un recoin obscur ni une arrière-pensée ; c’est surtout une riche nature morale, sympathique, communicative, qui se teint des milieux où elle vit, qui emprunte et qui rend aussitôt. […] Et en effet, esprit essentiellement moderne, Sismondi n’aura rien de l’art antique ; il appréciera peu ce je ne sais quoi qui fait la finesse rare et la simplicité exquise des anciens. […] Il redevint Genevois de cœur et par devoir, tout en restant cosmopolite par l’esprit. […] Dupont (de Nemours) que tous les hommes distingués qu’il avait connus avaient eu des mères de mérite et d’esprit. » C’est De Candolle qui dit cela dans ses Mémoires. […] Une telle remarque, confirmée par des esprits observateurs et d’aussi éminents naturalistes, a force de loi.
En réalité, elles ne sont ni de l’un ni de l’autre et forment un groupe à part : il y a là une vingtaine d’années et une dizaine d’écrivains, qui nous font assister à la transformation de l’esprit de la Renaissance, à la formation de l’esprit classique. […] C’est un Beauceron en qui continue de vivre le vieil esprit bourgeois, celui de Villon et de Jean de Meung. […] Mais ce n’est pas le naturel de Marot : à force de s’étirer, l’esprit français a grandi ; à force de se guinder, il s’est haussé. […] L’esprit qui tendait à prévaloir abolissait le sens historique par l’attention exclusive qu’il donnait à la commune et immuable essence de l’humanité. […] Le Père Garasse l’a appelé « le patriarche des esprits forts », à cause de sa Sagesse : mais Saint-Cyran l’a défendu.
Necker un esprit élevé, étendu, compliqué et fin, avec un grand fonds de moralité et d’onction ; son livre Sur l’administration de M. […] La gloire de l’esprit ! […] Je n’ai voulu, en effet, que donner idée de la personne, de la forme de talent et d’esprit de M. […] c’est une certaine façon compliquée, un peu subtile, un peu hautaine, de prendre et de présenter les choses, qui n’est pas à l’usage des esprits ordinaires, ni même des esprits très naturels ; c’est le procédé de gens habitués à regarder intuitivement (comme ils disent quelquefois) au-dedans de leur pensée, plutôt qu’à mettre la tête à la fenêtre et à laisser courir leur parole au-dehors. […] On peut dire que l’esprit français a fait insensiblement l’office d’un Voltaire universel, qui a eu raison, à la fin, du savant défaut dont il s’agit.
Un naturaliste des esprits, comme M. […] Etant donné l’esprit de M. […] Taine était dressé dans son esprit dès ses premiers livres. […] Qu’il le sache ou non, celui qui juge un produit de l’esprit fonde son arrêt sur une théorie particulière de l’esprit. […] C’est son esprit même.
Apparition de l’art d’écrire. — Différence entre la forme d’esprit de l’âge artistique et la forme d’esprit de l’âge classique. — Procédés de Dryden. — La diction soutenue et oratoire. […] Au centre du grand courant se meut un esprit supérieur. […] Ils exprimaient jadis l’état de l’esprit, désormais ils le démentirent. […] La forme, qui n’est plus inventée ni spontanée, mais imitée et transmise, survit à l’esprit passé qui l’a faite, et contredit l’esprit présent qui la défait. […] Je crois que Dryden, avec tous ses prosternements, a plutôt manqué d’esprit que d’honneur.
Le développement général de l’esprit est nécessaire pour bien écrire, avant toute préparation particulière Tout revient donc là : habituer l’esprit à réfléchir, à penser sans cesse, lui donner de la pénétration : de sorte que rien ne lui soit insignifiant, que tout ce qu’il aperçoit éveille en lui quelque idée ; que ses idées soient dans un perpétuel mouvement, au lieu de se déposer dans un coin de la mémoire, pour y dormir comme de vieux papiers dans la poudre des archives ; qu’elles se heurtent, s’associent, se groupent, se multiplient par leur incessante activité ; qu’elles se renouvellent au contact des impressions récentes, s’agrandissent, se modifient. Il faut pour cela une volonté ferme et constante, une attention soutenue, une réflexion laborieuse : mais, par le temps et l’habitude, l’effort disparaît ; les idées restent dans l’esprit vivantes, actives, efficaces et fécondes ; rien ne s’y perd, tout y germe. Si on a été attentif à regarder en soi comme au dehors, si on a essayé de noter ses émotions, d’en saisir les causes, les effets, les nuances, les degrés, la communication ira se resserrant chaque jour entre la sensibilité et l’intelligence ; les émotions multiplieront les idées, l’esprit affinera le cœur, et la subtilité du jugement s’augmentera avec la délicatesse du sentiment. […] Il suffira de quelques conseils bien simples, bien évidents pour former le style ; quand l’esprit saisit bien, quand le cœur sent bien, quand on a échappé à la tyrannie paresseuse de la mémoire, on n’écrit jamais mal et l’on est tout près de bien écrire. […] Mais il a fallu un esprit pénétré de poésie, une imagination excitable et prompte à transfigurer ses impressions, et, par-dessus tout, cette pudeur des âmes délicates qui voile l’émotion d’un sourire et élude par la fantaisie l’expression trop poignante de la réalité.
Encore et toujours par la souveraineté de l’esprit. […] « L’esprit qui créa le Parthénon est le même esprit qui créa la cathédrale. […] Le grand Condé, assez esprit fort, désira voir Spinoza. […] Mais il aimait l’esprit. […] La science de l’esprit humain, disait encore Renan, c’est l’histoire des produits de l’esprit humain.
que de gaieté et que d’esprit ! […] … Les choses ne t’arrivent que par l’intermédiaire de ton esprit. […] Cette qualité, c’est la santé parfaite de l’esprit. […] Des facultés de l’esprit, laquelle est reine et maîtresse ? […] Non, Sainte-Beuve n’avait pas la santé parfaite de l’esprit.
Le Français est actif de corps et paresseux d’esprit. […] L’esprit de la Réforme et l’esprit de la Renaissance, si différents, si contraires, du reste, en leur dernière influence sur l’esprit des classes moyennes françaises, mènent également à un détachement relativement à la foi. […] Ensuite l’esprit général de l’œuvre de Molière c’est, il me semble bien, l’esprit modéré, l’esprit tempéré, l’esprit moyen terme et, en un mot, l’esprit bourgeois. […] Dans un esprit de cette sorte l’argument devient sentiment (Kant). […] Elle pouvait, elle devait avoir un très grand empire sur les esprits.
Puis, faites attention que l’aptitude aux sciences mathématiques et physiques (je parle d’une aptitude moyenne et je connais d’ailleurs les exceptions) est la faculté qui témoigne le moins sûrement en faveur des autres dons de l’esprit et qui s’allie le mieux avec la médiocrité sur tout le reste. […] Elles scellent entre eux l’engagement mutuel de garder fidèlement cette naïve croyance ; de n’estimer qu’eux au monde ; d’être rogues, dédaigneux, formalistes ; d’être absolus et abstraits ; d’appliquer à tout une étroite et outrecuidante logique ; d’user aveuglément de l’« esprit géométrique » là même où l’« esprit de finesse » serait le plus nécessaire ; de mépriser les autodidactes (si intéressants !) […] L’esprit d’école me semble, ici, mauvais, parce que c’est, ici, l’esprit d’un groupe artificiel, et qu’il est moins efficace pour ceux qui sont de ce groupe que contre ceux, bien plus nombreux, qui n’en sont pas. […] Les brimades de l’X, qui sont la manifestation la plus brutale de cet esprit-là, sont donc condamnables deux fois. […] C’est que j’étais indigné et que, comme Montaigne, « je hais cruellement la cruauté. » J’ignore si à l’heure qu’il est nos enfants de l’École polytechnique — qui, dans le fond et quoi que j’aie dit, doivent être presque tous de « gentils garçons » — ont eu l’esprit et le courage de désarmer.
Et nous disons : quand la fantaisie le prend d’écrire l’histoire… car, on le sait de reste, Méry, cette belle plume brillante et changeante, ce souple esprit qui a mille manières de s’enlever sur ses longues ailes, n’est qu’exceptionnellement historien. […] Conversationniste éblouissant, qui parle comme il écrit et qui écrit comme il parle (et quand on a dit cela on ne sait pas ce que l’on a vanté le plus de sa conversation ou de son style), cet esprit multicolore a toujours eu la facilité du génie, même les jours où il n’en eut pas la puissance. […] Ce livre-ci nous donne la mesure du progrès accompli par cet esprit qui fait sa spirale éternelle, comme dit Gœthe, mais qui la fait en haut, du côté du ciel ! […] On sent que son catholicisme n’est pas un simple effet de coloris, mais une réflexion de son esprit devant l’Histoire, qui va donner à un talent jusqu’ici plus étincelant que profond la dernière main : la Profondeur. […] Nous le souhaitons pour notre compte, et dans l’intérêt même de l’Histoire, à laquelle nous désirons que Méry revienne parce qu’il nous semble organisé pour l’écrire ; — de l’Histoire, cette dernière occupation des grands esprits quand ils ont atteint l’apogée de leurs facultés complètement développées et mûries, cette pourpre impériale de leurs jours de force éprouvée, et que Méry vient, par son livre Sur Constantinople, de commencer à revêtir !
L’esprit de Benjamin Constant, étincelant dans un salon, lui réverbérait le sien. […] Montaigne a dit jadis : Je suis Français par Paris, et s’il pensait ainsi il y a trois siècles, que serait-ce depuis que l’on a vu réunies tant de personnes d’esprit dans une même ville, et tant de personnes accoutumées à se servir de cet esprit pour les plaisirs de la conversation ? […] La grandeur de son esprit ne la défendait pas contre la petitesse de cette terreur de l’exil. […] Est-ce petitesse d’un esprit si vaste d’ailleurs, mais qui s’est localisé dans les habitudes d’une seule ville ? […] L’esprit de société est cependant très-favorable à la poésie de la grâce et de la gaieté dont l’Arioste, La Fontaine, Voltaire sont les brillants modèles.
L’espace alentour s’étendra dans un mutisme solennel, et se tairont toutes luttes, toutes ambitions ; l’esprit respirera un air serein ; et l’on verra la place unique parmi l’univers ou l’univers s’effacerait. […] et les mots, quelle intensité expressive n’auront-ils pas, isolés dans l’esprit ! […] Un littérateur est un homme dont l’esprit, né dispos aux généralisations, a été développé par l’éducation suivant sa tendance native ; dès sa maturité, l’esprit du littérateur sera devenu éminemment capable de littérature ; et éminemment signifie presque exclusivement ; la puissance de vision linéaire et la puissance de perception musicale se seront atténuées par le fait de la croissance de l’autre faculté ; et la prédominance de la capacité littéraire sera telle qu’un spectacle sensible sux esprits ordinaires sous une part égale des trois facultés, à lui littérateur apparaîtra — naturellement — redondant de littératures. Il ne sera certes ni aveugle ni sourd ; mais son esprit, par l’habituel fonctionnement de l’ordre abstrait, verra plus abstraitement, sentira plus abstraitement. […] Notons ici ce phénomène possible — et fréquent — en nos modernités, un même homme qui aurait un esprit de peintre et de littérateur, de littérateur et de musicien.
Le vrai culte de l’antiquité, c’est de sortir du sanctuaire avec l’esprit du dieu prêt à se répandre dans un monde nouveau. […] Ou si d’un faible esprit l’indolente paresse Veut rejeter sur toi sa honte et sa faiblesse ? […] Elle n’est encore qu’une hypothèse, mais cette hypothèse suffit à remuer profondément les esprits, à les agiter dans un sens ou dans un autre. […] Il y a eu comme un grand travail d’accumulation des idées scientifiques dans l’esprit moderne. […] Son esprit n’est rien moins que dogmatique : il se défie, il fait des réserves.
La province juge avec son esprit et avec son instinct, pendant que Paris juge avec son esprit tout seul ; la province a douze heures par jour à donner à chaque gloire nouvelle, onze heures et demie de plus que Paris. […] Était-ce là du bel et bon esprit ? […] L’art ne doit parler qu’à l’esprit ; s’il parle aux sens, il se dégrade. […] Monteil indiquait dans ses livres ; il était le poète de ces esprits dont M. […] que d’esprits égarés il eût arrêtés sur le penchant de leur ruine !
Esprit universitaire et bourgeois. […] L’esprit des laïcs ne pouvait rester indéfiniment fermé à la science des clercs. […] Mais ce sujet fait pour plaire aux fins seigneurs et aux dames délicates, Guillaume de Lorris le traita avec la méthode et l’esprit des clercs. […] Ils avaient l’esprit et la faconde, une mémoire bien garnie qui les faisait disposer de l’esprit et de la faconde des autres : et ils lisaient le livre, qui donne la science, ils lisaient l’Art d’aimer. […] Les clercs portèrent naturellement dans la matière de l’amour toutes leurs habitudes d’esprit.