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285. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Les filles du roi Céléos, qui venaient puiser l’eau vive dans des vases d’airain, interrogent la vénérable étrangère. […] dit-il, en buvant de l’eau d’une mare dans le creux de sa main. […] Un jour on lui dit qu’une femme avait vécu plusieurs mois en buvant de l’eau pour toute nourriture. […] Puis il piqua son cheval ; mais, en tournant la tête, il aperçut le manteau qui flottait sur l’eau. […] L’eau des larmes est un philtre avec

286. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Lélia (1833) »

Les jours où je me sentais agitée au point de ne pouvoir plus reconnaître la ligne de démarcation imaginaire tracée autour de ma prison, je l’établissais par des signes visibles ; j’arrachais aux murailles décrépites les longs rameaux de lierre et de clématite dont elles étaient rongées, et je les couchais sur le sol aux endroits que je m’étais interdit de franchir : alors, rassurée sur la crainte de manquer à mon serment, je me sentais enfermée dans mon enceinte avec autant de rigueur que je l’aurais été dans une bastille. » J’indiquerai encore dans le début toute cette promenade poétique du jeune Sténio sur la montagne, la description si animée de l’eau et de ses aspects changeants, et, au sein de la nature vivement peinte, les secrets surpris au cœur : « Couché sur l’herbe fraîche et luisante qui croît aux marges des courants, le poëte oubliait, à contempler la lune et à écouter l’eau, les heures qu’il aurait pu passer avec Lélia : car à cet âge tout est bonheur dans l’amour, même l’absence. » On pourrait, chemin faisant, noter dans Léliaune foule de ces douces et fines révélations, dont l’effet disparaît trop dans l’orage de l’ensemble. 

287. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XII. Mme la Princesse de Belgiojoso »

Mais, tel qu’il est, ce livre a un accent à lui, et n’en a pas deux, qui vous attache et vous pénètre, et que vous retrouvez sous tous les spectacles qu’il étend devant la pensée, et cet accent unique, c’est l’âme de l’auteur, une âme plutôt lasse qu’apaisée et qui vide simplement son calice de vie, comme on boit tranquillement un verre d’eau à la fin du jour. […] L’humanité, depuis qu’elle existe, a toujours roulé entre trois systèmes et l’esprit humain n’en conçoit pas un quatrième : la polyandrie, le plus mauvais de tous, car il crée l’amazonat sous toutes les formes, le massacre des enfants et la pulvérisation sociale ; la polygamie, qui ruinerait l’État, si le sabre de Mahomet n’y mettait ordre, et enfin la monogamie, ce diamant divin d’une eau si pure, qui est l’exclusion de tous les inconvénients, qui agrandit la tête, épure le cœur et équilibre toutes les facultés.

288. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

Les premiers vers du recueil que nous avons sous les yeux sont adressés à Ponsard, et cela devait être, la sympathie n’étant jamais que l’amour du soi que l’on reconnaît chez les autres : Jeune homme fortuné de qui la muse antique N’a pas de corps secret ni de voile pudique, Dis-moi près de quel bois, au bord de quel ruisseau, Tu la surpris, baignant ses pieds polis dans l’eau, Et lorsqu’elle fuyait, confuse d’être nue, Par quels discours charmants elle fut retenue ! […] Il coupe avec de l’eau de Seine ce vin généreux, mûri par le soleil sur les rampes ardentes des volcans, et il épargne un mal de tête aux bourgeois, pleins de reconnaissance.

289. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Maurice Bouchor »

L’eau du baptême, pour lui comme pour presque tous les impies de ce temps, qui ne s’en doutent pas, a ruisselé de sa tête jusque dans le fond de son cœur… et elle est restée dans cette citerne profonde.   […] Avant ce poème, nous connaissions, parmi les poètes, des sceptiques, ramassés dans les plaisanteries de Voltaire et que ces plaisanteries ne persuadaient pas, comme le pauvre Alfred de Musset, par exemple, trempé aussi trop avant dans le baptême pour être perméable aux eaux de ce Styx de l’impiété qui met un calus sur les âmes !

290. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Paysant, Achille (1841-1927) »

Ô les fleurettes, les mille fleurettes des prés, des eaux et des bois !

291. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — E — Évrard, Laurent (1858-1911) »

Laurent Évrard, à la fin du court avertissement où il justifie son système rythmique, ajoute : « Ce n’est donc pas de la matière sonore ni du nombre métrique que le lecteur pourra se plaindre, mais du poète qui ne sait pas, dans les entraves d’or, marcher d’un pas agile ou boiter comme un dieu. » À quoi d’aucuns objecteraient que le poète eût mieux fait de ne se mettre aux chevilles nulle entrave, même d’or… Ce poète sait voir et exprimer ; il observe la vie latente des eaux, des pierres et des plantes ; l’obscur frisson des choses inertes ne lui a pas échappé.

292. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Deshays » p. 101

Les arbres, les roches, les eaux font un bel effet.

293. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VII, seconde guerre médique. »

. — « Ô toi, Eau amère !  […] car tu n’es qu’un fleuve perfide d’eau salée. » Ce supplice follement puéril, infligé à un élément, n’a rien qui étonne dans un monarque aussi terriblement absolu que l’était Xerxès. […] Les Thessaliens, les Locriens, les Achéens, les Doriens envoyaient « la terre et l’eau » à l’ennemi, et cet hommage fit une boue qui les a presque ensevelis. […] Ils entrevirent confusément, à travers les tourmentes des vents et des eaux, des faces de Divinités courroucées. […] Les deux Masques de la Tragédie et de la Comédie, à peine ébauchés, auraient perdu leurs yeux et leurs voix, pareils à ceux des fontaines taries dont le souffle se retire avec l’eau qu’ils ne versent plus.

294. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIe entretien. Boileau » pp. 241-326

Quand elle s’adresse à un homme, ce n’est pas grand-chose qu’une épigramme ; c’est une goutte de fiel dans un verre d’eau pour rendre le breuvage de la raillerie amer à celui qu’on force à le boire. […] Si une légère ironie ou si une épigramme inoffensive contre quelque ennuyeux récitateur de vers lourds de Rome s’y glisse à son insu, il ne court pas après pour la retenir, il la laisse rouler comme un caillou poli dans le lit de la cascade ou comme un flocon d’écume sur l’eau transparente. […] « Si tu pouvais t’arracher aux spectacles du Cirque », dit-il à son interlocuteur imaginaire, « tu pourrais te construire à Sora ou à Frosinone une maison convenable, à moindre prix que tu ne payes à Rome le loyer d’un réduit ténébreux ; là tu aurais à toi un petit jardin, un puits peu profond, dont l’eau, tirée sans roue et sans corde, désaltérerait d’une facile ondée tes plantes naissantes et tendres. […] dépêche-toi, curé de mon hameau ; Viens de ton eau bénite asperger mon caveau ! […] Il me semble entendre un buveur d’eau parler de l’ivresse.

295. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXe entretien. Dante. Deuxième partie » pp. 81-160

« “La terre où je vis le jour”, dit alors Francesca, “s’étend sur la pente marine où l’Éridan, fatigué du tumulte des eaux qu’il roule, se perd dans la mer pour y trouver enfin le repos. […] ” — la glace qui s’était resserrée autour de mon cœur se fit à l’instant eau et souffle, et sortit avec angoisse de mes yeux et de mon sein !  […] « Est-ce que tes honteux souvenirs n’ont pas déjà été effacés par l’eau de ton cœur ? […] Béatrice passe son bras d’amante autour du cou de son amant ; elle lui plonge la tête dans les eaux purifiantes du ruisseau. […] « La perle éternelle nous reçut dans son sein, comme l’eau reçoit, sans se rider, le rayon de lumière ! 

296. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — III. (Fin.) » pp. 479-496

Ramond, en même temps qu’il observait la nature en géologue, en physicien et en botaniste, s’appliquait expressément à rendre l’aspect et la physionomie des lieux, la teinte diverse des rochers, la couleur des eaux et jusqu’à l’individualité des monts. […] qu’il permette à ces rochers d’être de granit, à ces eaux d’être du saphir liquide ! […] On croyait avoir vu le Mont-Perdu, on ne le connaissait pas ; on n’avait nulle idée de l’éclat incomparable qu’il recevait d’un beau jour : Aujourd’hui, rien de voilé, dit Ramond, rien que le soleil n’éclairât de sa lumière la plus vive ; le lac complètement dégelé réfléchissait un ciel tout d’azur ; les glaciers étincelaient, et la cime du Mont-Perdu, toute resplendissante de célestes clartés, semblait ne plus appartenir à la terre… Tout était d’accord, l’air, le ciel, la terre et les eaux : tout semblait se recueillir en présence du soleil et recevait son regard dans un immobile respect.

297. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

Dans nos promenades solitaires nous allions quelquefois courir après les eaux d’un ruisseau où nous nous plaisions à lire nos destinées futures. — Vois-tu là-bas le calme des eaux, lui disais-je ; est-ce bonheur ou ennui ? […] là-bas, disait Matthisson, c’est mieux encore : un cours paisible suivi d’un vif entraînement. — Ce sera joli, lui dis-je ; et plus loin, vois-tu ces chutes d’eau sur de durs cailloux ?

298. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Une monarchie en décadence, déboires de la cour d’Espagne sous le règne de Charles II, Par le marquis de Villars »

Elle est particulièrement agréable à nous parler du Mançanarès, qui a si peu d’eau et sur lequel on a bâti deux énormes ponts, assez larges pour laisser passer le Rhin ou le Danube : « Je veux vous parler (24 mars 4680) d’une promenade où je fus hier, qui est la plus ordinaire quand il fait chaud, et il en fait déjà beaucoup ici. […] Il y a de petits filets d’eau par-ci par-là, mais pas assez pour qu’on en puisse arroser des sables menus, qui s’élèvent sous les pieds des chevaux ; en sorte que cette promenade n’est plus supportable. […] Il est bien plus large et bien plus long que le Pont-Neuf de Paris : et l’on ne peut s’empêcher de savoir bon gré à celui qui conseilla à ce prince de vendre ce pont ou d’acheter une rivière… » Ce Mançanarès tout poudreux est revenu fort à propos en idée au savant et délicat Boissonade dans je ne sais plus quel commentaire, pour lui servir à justifier une expression pareille qu’on rencontre chez les auteurs anciens et qui semblait invraisemblable ; ainsi, le pulverulenta flumina de Stace est vrai au pied de la lettre. — Un jour qu’un spirituel voyageur français (Dumas fils) était à Madrid, et que, mourant de soif, on lui apporta un verre d’eau, c’est-à-dire ce qu’on a de plus rare : « Allez porter cela au Mançanarès, dit-il, ça pourra lui faire plaisir.

299. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

Pour cela, il imagine de faire crever par Spendius l’aqueduc qui conduisait les eaux potables dans la ville, d’en détourner le fleuve nourricier, moyennant l’enlèvement de quelques dalles opéré avec des prodiges de dextérité et de patience ; car ce Spendius est comme le nain merveilleux du roman ; à lui seul, il fait tout. L’aqueduc, saigné par son milieu, déverse brusquement toute une cataracte dans la plaine : le moment où la chute d’eau s’élance est décrit d’une manière grandiose. Les Barbares exultent de joie, et Carthage, quand elle aura épuisé l’eau de ses citernes, va mourir de soif.

300. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise par M. Taine. »

Hippocrate, le premier, dans son immortel Traité des Airs, des Eaux et des Lieux, a touché à grands traits cette influence du milieu et du climat sur les caractères des hommes et des nations. […] De cent lieues en cent lieues le terrain change : ici, des montagnes brisées et toute la poésie de la nature sauvage ; plus loin, de longues colonnades d’arbres puissants qui enfoncent leur pied dans l’eau violente ; là-bas, de grandes plaines régulières et de nobles horizons disposés comme pour le plaisir des yeux ; ici la fourmilière bruyante des villes pressées, avec la beauté du travail fructueux et des arts utiles. Le voyageur qui glisse sur cette eau changeante a tort de regretter ou de mépriser les spectacles qu’il quitte, et doit s’attendre à voir disparaître en quelques heures ceux qui passent en ce moment sous ses yeux. » Admirable et agréable page !

301. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre dixième »

Est-ce bien un naturaliste qui a écrit ceci : « Ces tristes oiseaux d’eau dont on ne sait que dire, et dont la multitude est accablante ?  […] S’il avait cru avec la simplicité de cœur de Newton à un créateur, le ver de terre lui eût paru tout aussi étonnant que le lion, le plus humble oiseau d’eau que le cygne. […] La terre n’est pas seulement un fond de mer ; il y voit la double action de l’eau et du feu ; il y voit, c’est le mot ; à la façon dont Buffon peint ce que d’autres ont découvert, il a l’air de le découvrir.

302. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Dans Le Joueur, le caractère principal a beaucoup de vérité : cet homme, qui a joué, qui joue et qui jouera, qui, toutes les fois qu’il perd, sent revenir sur l’eau son amour, mais qui, au moindre retour de fortune, lui refait banqueroute de plus belle, cet homme est incurable ; il a beau s’écrier dans sa détresse : Ah ! […] Agathe, en vieille, dira : Je me porte encor mieux que tous tant que vous êtes ; Je fais quatre repas, et je lis sans lunettes ; Je sirote mon vin, quel qu’il soit, vieux, nouveau ; Je fais rubis sur l’ongle, et n’y mets jamais d’eau. […] Regnard, pour attacher sa vie et jeter plus sûrement cette ancre dont il a parlé et qui devait le retenir doucement au rivage, avait acheté la charge de lieutenant des eaux et forêts et des chasses de Dourdan, à onze lieues de Paris, et en même temps il acheta, dans le voisinage de cette petite ville, la terre de Grillon, dont le château est situé dans un vallon agréable entre deux forêts.

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