C’est à quoi servent les fêtes, les cérémonies publiques, ou religieuses, ou laïques, les prédications de toute sorte, celles de l’Église ou celles de l’école, les représentations dramatiques, les manifestations artistiques, en un mot tout ce qui peut rapprocher les hommes et les faire communier dans une même vie intellectuelle et morale.
Quelle belle et dramatique scène il a oublié de nous écrire, lui qui nous en a écrit de si belles, et cela parce qu’il avait un mal caché, un mal qui l’humiliait, son infirmité secrète !
Il fait œuvre là d’auteur dramatique, et il n’est pas plus responsable de toute cette fureur que Shakespeare, par exemple, des rugissements d’Othello, Le comte de Maistre, en grand artiste qu’il est, invente une colère, mais il ne la ressent pas ; et, cependant, il n’y a pas que la haine et la violence contre lui qui s’y soient trompées !
Je ne parle point des Misérables de Victor Hugo, qui sont des Pauvres à qui on a fait des têtes, — pour me servir d’une expression du métier dramatique, — des Pauvres arrangés dans l’intérêt d’un parti, des Communards d’avant l’heure.
Ils croiraient moins à la couleur locale, ils croiraient plus à la dramatique humanité, à l’égalité des âmes et des douleurs, qui fait que le reste est secondaire, le temps, le lieu et toute l’enveloppe de ces âmes.
» Je n’ai pas à insister sur l’intérêt du reste du livre, mais quelle belle scène dramatique ces deux pages fourniraient pour le théâtre ! […] Voici un livre qui, de par son intérêt dramatique et les événements extraordinaires qu’il rapporte, a le don d’intéresser dès la première page. […] Nos lecteurs nous sauront gré de leur citer un des passages les plus dramatiques du bon livre de M. […] Comme on le voit, ce ne sont pas les tableaux dramatiques et émouvants qui manquent à la nouvelle l’œuvre de M. […] Mais il n’y a pas que cette lutte, il y a encore une étude de caractère, celle de la fille de ce parvenu (il était veuf) qui fournit le prétexte d’un récit des plus émouvants et des plus dramatiques, de pages doucement poignantes ou poétiques qui toucheront certainement tous les lecteurs.
Alexandre Parodi, versificateur dramatique, ami de Sarcey et auteur de la Reine Juana, une lettre en laquelle il déclare avoir inventé le vers sans rime (symbolique, en outre !) […] Un poète dramatique peut se révéler même sans la traduction (et encore !) […] Je fais très peu de vers en dehors des œuvres dramatiques, et, en ce moment, je suis absorbé par la répétition de mon drame, le Fils de l’Arétin, au Théâtre-Français.
L’habileté, relative, de Fabre d’Eglantine, qui se trouvait d’ailleurs en conformité avec la progression dramatique, a été de présenter d’abord Philinte comme indifférent au malheur général, sur quoi le public s’est dit : « Bon ! […] Molière s’y moque des médecins que Rousseau n’aimait pas ; il s’y moque des malades imaginaires, et Rousseau l’était ; mais il ne savait pas qu’il le fût et il était ici dans la position de la plupart des spectateurs qui, dans les peintures que font les auteurs dramatiques, ne voient que le portrait de leur voisin. […] Molière pourrait répondre ainsi assez pertinemment ; car la prétention des adversaires de la comédie, pour être extrême, lui donne beau jeu ; elle va, puisqu’elle ne veut pas de belles passions, à ne vouloir point de passions du tout, puisque sans doute elle ne veut pas non plus de passions mauvaises ; et elle réduirait l’auteur dramatique et tout auteur à n’être plus qu’un sermonnaire. […] Il définit la comédie « l’ouvrage dramatique qui peint les mœurs des hommes dans une condition privée ». […] Tel est Molière, — C’est précisément ce que je lui reproche, dira Rousseau. — Soit ; mais comme auteur dramatique il a ses excuses et en soi il ne mérite pas le mépris ni même la colère.
Qu’il n’aborde pas l’art dramatique. […] Il me semble que le sujet de la Morte, aussi audacieux et plus dramatique, valait d’être traité dans le même parti pris de décision. […] Corneille, dans notre poésie dramatique, n’est pas seulement le tragédien de l’héroïsme. […] Vous aviez trouvé votre voie d’auteur dramatique, votre chemin de Dumas, aurait dit un de vos camarades de Montmartre. […] Auteur dramatique, il avait, avec le Passant, pris place dans la lignée des fantaisistes issus du Comme il vous plaira de Shakspeare, pas trop loin du Musset d’À quoi rêvent les jeunes filles.
Coleridge a tracé son rôle avec une délicate subtilité, avec une vive pénétration, et la scène, dans laquelle Démétrius découvre qu’il n’est point le fils d’Ivan et n’a aucun droit au nom qu’il réclame, est extrêmement forte et dramatique. […] Mais ces derniers livres n’ont point d’égaux pour la pure intensité de passion, pour la concentration de l’intérêt intellectuel, pour la maestria de construction dramatique. […] Ils sont particulièrement dramatiques et savent jacasser l’argot d’atelier avec autant d’aisance que le critique du Gil-Blas. […] Imprégné de Swinburne et passionné de Browning, il s’évertue à reproduire la merveilleuse mélodie du premier et la vigueur dramatique, l’âpre énergie du second. […] Froude, les autres sont entièrement dramatiques, introduits pour marquer les traits caractéristiques.
La personne humaine est si complexe que le logicien qui aperçoit successivement ses diverses parties ne peut guère les parcourir toutes, ni surtout les rassembler en un éclair, pour produire la réponse ou l’action dramatique dans laquelle elles se concentrent et qui doit les manifester. […] Ils y verront les difformités du temps disséquées jusqu’au dernier nerf et jusqu’au dernier muscle, avec un courage ferme et le mépris de la crainte… Ma rigide main a été faite pour saisir le vice d’une prise violente, pour le tordre, pour exprimer la sottise de ces âmes d’éponge qui vont léchant toutes les basses vanités137. » Sans doute un parti pris si fort et si tranché peut nuire au naturel dramatique ; bien souvent les comédies de Jonson sont roides ; ses personnages sont des grotesques, laborieusement construits, simples automates ; le poëte a moins songé à faire des êtres vivants qu’à assommer un vice ; les scènes s’agencent ou se heurtent mécaniquement ; on aperçoit le procédé, on sent partout l’intention satirique ; l’imitation délicate et ondoyante manque, et aussi la verve gracieuse, abondante de Shakspeare.
Shakespeare seul est aussi vaste et aussi dramatique ; mais, bien qu’il s’étende plus large, il est loin de s’élever aussi haut. […] Cela n’existait pas dans ce monde avant l’épopée dramatique de Weimar.
C’est que, l’année précédente, il avait parlé, à propos de l’évolution du genre dramatique, de ces mêmes comédies, qui pourtant sont à peine du théâtre. […] Jamais il ne me demanda rien, qu’une mention dans ma chronique dramatique.
Quant au poème dramatique, il apparaît, ici, comme un triomphateur en qui éclate la notion réelle du présent. […] Il y a un instant (dans ce vaste poème auquel la forme dramatique a permis de tels développements) où le Faust rajeuni adore la Beauté et la choisit pour guide vers la vérité.
» Le choix fut heureux au Petit-Bayreuth : Madame Hellman, qui si elle n’était une femme du monde, serait bien aujourd’hui l’une de nos premières chanteuses dramatiques, M. […] Et ce qui peut aussi advenir, c’est que Wagner se trouve sur le même terrain sur lequel se trouvait Beethoven dans la IXe Symphonie et dans la Missa Solemnis, — qu’il n’ait besoin de paroles que comme un matériel sur lequel la voix humaine puisse se mouvoir, et de quelques indications dramatiques pour bien préciser et pour « réveiller des impressions », mais qu’au fond il s’agisse d’états d’âme par nous pressentis, inexprimables par des mots, et auxquels la musique seule peut donner une « certitude absolue ».
Pour François Hugo, en effet, pour le fils d’un homme qui a écrit des drames, lesquels ont plus tapagé dans leur temps que ceux de Shakespeare, ce qui prouve, par parenthèse, en faveur de la gloire dramatique, — la plus bête des gloires ! […] Mais entre cette grandeur du plus grand des poètes dramatiques, et l’ubiquité dans toute grandeur dont voudrait le douer François Hugo, il y a bien quelques étapes à faire que ne font pas si vite ceux qui, au lieu de traduire officiellement Shakespeare, se contentent de le lire pour leur plaisir personnel !
Il faut bien le dire, il a diminué la notion du roman, de cette chose complexe et toute-puissante, égale au drame par l’action et par la passion, mais supérieure par la description et par l’analyse ; car le romancier crée son décor et descend, pour l’éclairer, dans la conscience de ses personnages, ce que le poète dramatique ne fait pas et ne peut pas faire. […] Mais telle que la voilà, cette histoire, avec son échevèlement dramatique « l’orateur et ces trouées dans le monde moderne, — ce monde moderne qui marche à toute minute sur le cœur chrétien de Féval et le fait crier !
Roederer, dans sa Chronique des cinquante jours, a fait ce qu’il y a de mieux à défaut du burin vengeur : il a raconté le vrai, jour par jour, par ordre chronologique, « sans art, sans arrangement, sans ambition d’effet oratoire, logique, dramatique, romantique ».