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349. (1900) La culture des idées

Mais comme celle-ci qui se promène, attendant un évocateur, va se révéler différente selon la parole qui l’aura sortie des ténèbres ! […] Sans doute, mais il y a aussi : frein, frère, frêle, frêne, fret, frime et vingt autres sonorités analogues pourvues chacune d’un sens très différent. […] Donc les empires naissent, croissent et meurent ; les combinaisons sociales sont instables ; à différentes époques les groupes humains ont des forces différentes de cohésion ; des affinités nouvelles apparaissent et se propagent : voilà de quoi écrire un traité de mécanique sociale, si l’on ne tient pas rigoureusement à conformer sa philosophie à la réalité des catastrophes inattendues. […] Pour l’intelligence limitée, les conditions de la pensée sont toutes différentes ; elle a besoin de l’excitation du choc extérieur. […] La lettre est citée tout entière par Eckermann, II, 331 ; la traduction de Délerot est un peu différente.

350. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

La raison est toute différente : c’est qu’il n’avait jamais eu l’intention d’en faire des sonnets. […] L’évolution de l’intrigue nous fait passer successivement par ces manières différentes d’envisager la vie. […] Il y avait là quinze tableaux représentant tous la même meule prise à des heures différentes du jour et aux différentes saisons de l’année. […] Mais, réfléchissant à ce qu’il avait dit et mettant sur le papier ses souvenirs, il composa un essai entièrement différent. […] La langue nouvelle est encore à naître et aujourd’hui il y a partout de la confusion parce qu’on se sert de langues différentes.

351. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre IV. Le mécanisme cinématographique de la pensée  et l’illusion mécanistique. »

Celui qui va du jaune au vert ne ressemble pas à celui qui va du vert au bleu : ce sont des mouvements qualitatifs différents. […] L’action de manger ou de boire ne ressemble pas à l’action de se battre : ce sont des mouvements extensifs différents. […] Des phrases différentes diront des choses différentes si elles appartiennent à une même langue, c’est-à-dire si elles ont une certaine parenté de son entre elles. Au contraire, si elles appartiennent à deux langues différentes, elles pourront, précisément à cause de leur diversité radicale de son, exprimer la même chose. […] L’expérience ne se meut pas, à ses yeux, dans deux sens différents et peut-être opposés, l’un conforme à la direction de l’intelligence, l’autre contraire.

352. (1899) Esthétique de la langue française « La métaphore  »

Car une fleur bien différente, la verrucaire 174, en gréco-français héliotrope, tourne aussi selon le soleil ses odorantes fleurs violettes, et il semble qu’[mot en caractères grecs] ait été traduit littéralement en allemand et en hollandais par sonnenwende et zonnewende ; ces deux langues possèdent, en effet, les formes sonnenblume et zonnebloem qui s’appliquent bien au soleil175 ; le suédois dit solrose 176 ; le danois, solsikke ; l’anglais, sunflower ; le polonais, slonecznie. […] Cette idée était, d’ailleurs, contenue soit directement, soit par confusion, dans le nom même du coq (latin : coccum)177 ; et c’est ainsi que les mêmes syllabes ont pu désigner deux choses aussi différentes qu’une fleurette et le chant d’un oiseau. […] Outre leurs noms distinctifs, presque toutes les plantes sauvages ont ainsi un surnom qui souvent est commun à des espèces fort différentes ; la flore populaire se meut dans l’heureuse imprécision de la poésie et de la nonchalance. […] Le français nielle n’a, sans doute, jamais contenu l’idée qui est évidente dans nigella ; pour la retrouver, il faut aller chercher les formes verbales où la nielle est appelée l’herbe au poivre187 et voici la poivrette, la piperelle, les spezii, les épices (Parme), l’alipivre (portugais) ; on trouve en allemand Schwarz kümmel, (le carvi noir) mais les langues modernes ont surtout baptisé la nielle d’après sa très vague ressemblance avec des cheveux, de la barbe, de la laine, une toile d’araignée et, rencontre assez curieuse, la nielle et l’agnelle, si différentes sémantiquement, ont fraternisé sur le terrain phonétique : on trouve dans le domaine d’oc, les formes niella, gniella, niello, aniello, aniella et, en Piémont, agnela. […] Mais le même conte ou le même mot ont pu être créés plusieurs fois et même simultanément ; pour les mots nous en avons la certitude par la coexistence des mêmes combinaisons d’images dans des langues très différentes ; pour les contes, cela est fort vraisemblable.

353. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

Languet, a pris un parti tout différent. […] Autant d’écrivains associés, autant de systêmes différens. […] Il parcourut différentes villes d’Italie : il fut à Pavie, à Naples. […] Il y eut alors deux églises dans la ville qui sembloient former deux religions différentes. […] Rejetté du sein de la Sorbonne, il est successivement anathématisé par différens prélats.

354. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre quatrième. L’idée du temps, sa genèse et son action »

En quoi est-il besoin de concevoir « une distance particulière » entre deux taches de couleurs diverses pour les percevoir en dehors l’une de l’autre, tout au moins différentes l’une de l’autre ? […] Ainsi, quand il y a en nous une succession de choses différentes, nous éprouvons une certaine impression de changement qui ne saurait se confondre avec un état de repos et d’inertie, pas plus qu’en voiture nous ne confondons l’impression de la marche avec celle de l’arrêt. […] Or, dans tous ces cas, il y a une attitude d’esprit très différente de celle de la possession actuelle. […] Cette chose invisible et intangible, le son, a du tendre à se projeter dans un milieu différent de l’espace même, plus ou moins analogue au milieu intérieur de l’appétit vital, qui n’est autre que le temps. […] Les temps différents, en effet, ne sont que des parties d’un même temps.

355. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre I. Des poëtes anciens. » pp. 2-93

Contentons-nous aujourd’hui d’avoir les six premiers livres de l’Iliade, traduits avec autant d’exactitude que les caractères différens des deux langues ont pu le permettre. […] Nous n’avons de Pindare que les quatre Livres d’Odes que les Anciens ont appellé les Livres de la Période ; il y célébre les victoires remportées aux différens Jeux de la Grèce. […] Elle vient encore plus de ce qu’il a donné à tant de sujets différens la beauté propre à chacun. […] Ses vers sont aisés ; mais il y en a beaucoup qui ne différent de la prose que par la rime, sur-tout ceux qu’il appelle vers libres. […] Mais quelque chose qu’on dise, il faut toujours admirer l’aisance qu’a l’auteur de s’exprimer en beaux vers sur tant de sujets différens.

356. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

Seulement, entre la moralité de la pensée et la moralité de la vie, entre la moralité des œuvres et la moralité des actes, il y a l’abîme qui sépare la volonté de l’homme de son esprit, lesquels sont des puissances d’un ordre différent et incommutable. […] En effet, pour Carlyle, sur Shakespeare, il n’y a plus dans l’homme de facultés distinctes ni de faits d’ordre différent. […] On y trouve le pathétique dans les situations, la puissance de conception dans les caractères, la beauté idéale dans les sentiments, l’énergie ou la grâce dans le langage qu’il faut admirer partout dans Shakespeare ; en d’autres termes, l’identité du même génie, dans des sujets différents. […] Elle était tirée d’un épisode du roman de Brut (1153), et elle avait été mise à la scène et jouée sous différents noms d’auteurs, je ne sais combien de fois. […] François-Victor Hugo, qui a des illusions différentes de celles de M. 

357. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

L’homme, par un instinct occulte, mais fatal, semble avoir senti, dès le commencement des temps, le besoin d’exprimer dans un langage différent ces choses différentes. […] XV Il nous a semblé que rien ne pouvait mieux compléter ces pages laissées inachevées que cette naïve et touchante image des deux natures de poésie et des deux natures de sons que rend l’âme du poëte aux différents âges, reprise d’une des dernières préfaces des Méditations et que les ravissants vers tirés des Destinées de la poésie. […] XVI Ces deux harpes dont les cordes rendent des sons différents selon l’âge de leurs fibres, mais aussi mélodieux à travers le réseau blanc qu’à travers le réseau blond de ces cordes vivantes ; ces deux harpes ne sont-elles pas l’image puérile, mais exacte, des deux poésies appropriées aux deux âges de l’homme ?

358. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

Cependant, pour peu que la transformation des habitudes et des goûts qui nous a frappés ait une certaine profondeur et qu’elle apparaisse en plusieurs milieux éloignés et différents de langue et d’organisation sociale, il est bien difficile de croire à une transmission d’une pareille promptitude et l’on est obligé de se demander s’il n’y a pas eu sur ces points divers naissance multiple de phénomènes semblables. […] Il n’est pas de grand homme qui n’ait eu aux yeux des générations successives plusieurs physionomies fort dissemblables, et par suite des influences très différentes sur leur esprit. […] On n’approchera de la vérité en ces matières que lorsqu’une série de monographies auront suivi au dehors l’expansion de nos différentes écoles, les adaptations innombrables de nos pièces, les traductions de nos romans, les annexions de mots faites aux dépens de notre langue. […] Il semble que la France, dans une grande débauche historique, se soit complu à passer en revue ses traditions les plus différentes et à revivre toute son existence en quelques années.

359. (1868) Curiosités esthétiques « VI. De l’essence du rire » pp. 359-387

Dans la caricature, bien plus que dans les autres branches de l’art, il existe deux sortes d’œuvres précieuses et recommandables à des titres différents et presque contraires. […] Aussi le rire des enfants, qu’on voudrait en vain m’objecter, est-il tout à fait différent, même comme expression physique, comme forme, du rire de l’homme qui assiste à une comédie, regarde une caricature, ou du rire terrible de Melmoth ; de Melmoth, l’être déclassé, l’individu situé entre les dernières limites de la patrie humaine et les frontières de la vie supérieure ; de Melmoth se croyant toujours près de se débarrasser de son pacte infernal, espérant sans cesse troquer ce pouvoir surhumain, qui fait son malheur, contre la conscience pure d’un ignorant qui lui fait envie. — Le rire des enfants est comme un épanouissement de fleur. […] La division peut avoir lieu sur différentes bases. […] Mais qu’une armée à la parade est différente d’une armée dans ses casernes, fourbissant ses armes, astiquant son fourniment, ou, pis encore, ronflant ignoblement sur ses lits de camps puants et sales !

360. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mallarmé, Stéphane (1842-1898) »

Différent, ils le soupçonnent méprisant et, voulant imiter ce qu’ils devinent, se fabriquent des partis pris : cependant qu’il n’est pas sorti de sa générale bonté, même pour les fustiger, ces petits. […] Il s’en satisfaisait, indulgent aux livres simples de ses adversaires dont il exaltait les mérites si différents de ses vertus.

361. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 372-383

in-8°. de plus de quatre cents pages, offrent différentes Pieces de Prose & de Vers, qui lui donnent le droit de figurer avantageusement parmi les personnes qu’une naissance illustre n’a point empêchées de cultiver les Lettres & de grossir le nombre des Auteurs. […] Histoire, Morale, Métaphysique, Eloquence, Poésie, Mathématiques, Histoire Naturelle, tout a été du ressort de son esprit pénétrant & actif, & dans les différentes matieres qu’il a traitées il ne s’est jamais montré au dessous de son sujet.

362. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean de Meun, et les femmes de la cour de Philippe-le-Bel. » pp. 95-104

Clopinel donna différentes preuves de ses talens : mais il n’est resté de lui que la continuation du roman de la Rose. […] Elles paroissent les unes après les autres sur la scène, y parlent leur différent langage.

363. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Montmaur, avec tout le Parnasse Latin & François. » pp. 172-183

Ces différentes pièces, soit en prose, soit en vers, servirent de supplément à ce qu’avoit déjà donné Ménage. […] On fit mention du cheval avec lequel il alloit dans un même jour dîner rapidement dans différentes maisons.

364. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — De la langue Latine. » pp. 147-158

Aussi écrivit-il avec force, pour justifier les stiles différens de celui de l’orateur Romain. […] Chacun a son ton, son caractère : le génie offre tant de faces différentes.

365. (1767) Salon de 1767 « De la manière » pp. 336-339

De là les différentes manières propres aux diverses écoles, et à quelques maîtres distingués de la même école : manière de dessiner, d’éclairer, de draper, d’ordonner, d’exprimer ; toutes sont bonnes, toutes sont plus ou moins voisines du modèle idéal. […] Comment n’y aurait-il pas un vice de technique, résultant des faux mélanges ; un vice de l’école ou de maître ; un vice de l’organe, si les différentes couleurs ne l’affectent pas proportionnellement ?

366. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « III »

Ils ne sauraient être en trop grand nombre, s’ils sont agréables ; car, les goûts étant différents, on a à choisir. » Nisard lui reproche ces concessions : « Raison spécieuse, dit-il, et qui n’est pas d’un maître de l’art. […] L’art ne consiste pas à contenter tous les goûts, en flattant les uns par ce qui choque les autres, mais à faire que les goûts les plus différents soient d’accord de la justesse d’une pensée, de la beauté d’une expression, de la vérité d’une peinture. »‌ C’est fort bien dit ; mais Nisard oublie que La Bruyère n’était pas dupe et qu’en cette occasion surtout il ne parlait point par principe.

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