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1499. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Parny poète élégiaque. » pp. 285-300

Un critique spirituel et sensé le remarquait à propos de la musique d’Auber, en parlant d’un de ses derniers opéras qui avait fort réussi : « Pour remporter ce succès avec une œuvre si élégante et si claire, un style si aimable et si charmant, il a fallu, disait-il, un très grand talent et un très grand bonheur ; car aujourd’hui, par la pédanterie qui court, par les doctrines absurdes qu’on voudrait accréditer, par l’ignorance et l’outrecuidance de quelques prétendus savants, la clarté, la grâce et l’esprit sont un obstacle plutôt qu’un avantage… Le beau mérite que d’entendre et d’admirer ce que tout le monde admire et comprend !  […] Faites l’épreuve, s’il est encore temps, si vous n’avez pas atteint le chiffre fatal où il est honteux d’aimer : Nec amare decebit…, cet âge « où, comme le dit Joseph de Maistre, il ne faut être fou qu’en dedans » ; si donc vous trouvez encore une heure de reste pour avoir une écolière en musique et même en amour, récitez à une jeune fille naïve une élégie de Lamartine, si belle quelle soit, et une élégie de Parny, vous verrez laquelle elle comprendra, laquelle elle retiendra.

1500. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Soustrait à toute inspection, à tout contrôle officiel, le régime intellectuel des grands séminaires est celui de la liberté la plus complète : rien ou presque rien n’étant demandé à l’élève comme devoir rigoureux, il reste en pleine possession de lui-même ; qu’on joigne à cela une solitude absolue, de longues heures de méditation et de silence, la constante préoccupation d’un but supérieur à toutes les considérations personnelles, et on comprendra quel admirable milieu de pareilles maisons doivent former pour développer les facultés réfléchies. […] Renan mérite d’être bien compris et défini.

1501. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens, par M. Le Play, Conseiller d’État. »

Le Play, elle constitue si nettement son originalité propre, qu’il me paraît curieux et utile pour tous de la faire comprendre et de l’exposer ici avec quelque étendue. […] Des comparaisons fécondes se faisaient à chaque instant dans l’esprit de l’observateur, et ce n’était pas seulement l’histoire qu’il y gagnait de mieux comprendre ; il se demandait si de ces institutions, si réprouvées chez nous, quelque chose n’était pas bon, n’était pas utile, n’était pas à reprendre et à réimplanter en le transformant.

1502. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

On le comprend assez, cette grande colère du dehors ne s’est pas formée en un jour, et le mal vient de plus loin. […] Je comprends très-bien, et j’ai souvent accepté moi-même avec joie, avec orgueil, ce rôle, cet office de la critique en tant qu’elle sert la poésie : Nous tiendrons, pour lutter dans l’arène lyrique, Toi ta lance, moi les coursiers !

1503. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

Lui-même en a compris toute la noblesse ; il y a constamment visé, et en a plus d’une fois dessiné les principaux traits. […] Il y a de vilains vers de lui sur Marie-Antoinette ; on ne les a pas compris dans ses œuvres.

1504. (1875) Premiers lundis. Tome III « Sur le sénatus-consulte »

Je ne suis pas jurisconsulte ; je suis un peu étonné, tout le premier, d’avoir à discuter un texte de loi ; je suis prêt à déférer à toutes les lumières des personnages plus compétents ; mais quand j’ai lu le texte du sénatus-consulte, seul, livré à mon seul bon sens et sans le commentaire de personne, j’ai bondi à voir en tête et en vedette d’un acte libéral ces mots désobligeants pour tout le monde, y compris les ministres eux-mêmes (car il n’est pas agréable de s’entendre dire en face qu’on dépend) : « Les ministres ne dépendent que de l’empereur. » Eh ! […] Mais, même sans les attendre, j’aimerais qu’au sein du Sénat il fût dit et compris tout d’abord, qu’à un ordre de choses tout nouveau, il convient d’apporter un nouvel esprit.

1505. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre premier. De la première époque de la littérature des Grecs » pp. 71-94

De la première époque de la littérature des Grecs Je comprends dans cet ouvrage, sous la dénomination de littérature, la poésie, l’éloquence, l’histoire et la philosophie, ou l’étude de l’homme moral. […] Quelques courtisanes sans pudeur, des esclaves que leur sort avilissait, et des femmes inconnues au veste du monde, renfermées dans leurs maisons, étrangères aux intérêts de leurs époux, élevées de manière à ne comprendre aucune idée, aucun sentiment, voilà tout ce que les Grecs connaissaient des liens de l’amour.

1506. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VIII. De l’éloquence » pp. 563-585

à qui viendrait-il dans l’esprit de s’imposer une contrainte inutile, puisque personne n’en comprendrait le motif et n’en recevrait l’impression ? […] Les idées intermédiaires peuvent être tracées d’une manière plus rapide, lorsque l’enchaînement d’un très grand nombre de vérités est généralement connu ; l’intervalle des morceaux de mouvement peut être rempli par des raisonnements forts, l’esprit peut être constamment soutenu dans la région des pensées hautes ; et l’on peut l’intéresser par des réflexions morales, universellement comprises, sans être devenues communes.

1507. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre III. De la vanité. »

C’est non seulement à la réunion des hommes en société que ce sentiment est dû, mais c’est à un degré de civilisation qui n’est pas connu dans tous les pays, et dont les effets seraient presque impossibles à concevoir pour un peuple dont les institutions et les mœurs seraient simples ; car la nature éloigne des mouvements de la vanité, et l’on ne peut comprendre comment des malheurs si réels naissent de mouvements si peu nécessaires. […] Une femme qui se croit remarquable par la prudence et la mesure de son esprit, et qui n’ayant jamais eu deux idées dans la tête, veut passer pour avoir rejeté tout ce qu’elle n’a jamais compris, une telle femme sort un peu de sa stérilité accoutumée, pour trouver mille ridicules à celle dont l’esprit anime et varie la conversation : et les mères de famille, pensant, avec quelque raison, que les succès mêmes du véritable esprit ne sont pas conformes à la destination des femmes, voient attaquer avec plaisir celles qui en ont obtenu.

1508. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre I. Origine des privilèges. »

Quand on se représente un peu nettement la condition des hommes en ce temps-là, on comprend qu’ils aient accepté de bon cœur les pires droits féodaux, même celui de marquette ; ce qu’on subissait tous les jours était pire encore11. […] Enfin il est maître absolu et le déclare19. — Ainsi des biens, des exemptions d’impôt, des agréments d’amour-propre, quelques restes de juridiction ou d’autorité locale, voilà ce qui reste à ses anciens rivaux ; en échange, ils ont ses préférences et ses grâces. — Telle est en abrégé l’histoire des privilégiés, clergé, noblesse et roi ; il faut se la rappeler pour comprendre leur situation au moment de leur chute ; ayant fait la France, ils en jouissent.

1509. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre II. L’homme »

Il comprend ce qu’est l’égoïsme royal aussi bien que Saint-Simon lui-même. […] Quand il se convertit, le point qui le heurtait le plus c’était l’éternité des peines : « Il ne comprenait pas comment cette éternité peut s’accorder avec la bonté de Dieu. » Il jugeait Dieu d’après lui-même ; ce n’était pas là une si grande injure, et sa garde n’avait point tort de dire « que Dieu n’aurait jamais le courage de le damner. » III On voit bien déjà, par les excès et les singularités de ses qualités et de ses fautes, que, sans quitter le caractère gaulois, il le dépassa.

1510. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre VII. Induction et déduction. — Diverses causes des faux raisonnements »

La théorie du raisonnement est facile à comprendre : c’est dans l’application qu’est la difficulté. […] « Le portrait qu’il trace du Français, de corps chétif, sans vigueur musculaire, incapable d’avoir des enfants, ignorant l’orthographe (t la géographie, hors d’état d’apprendre une langue étrangère, libre penseur sans avoir jamais pensé, ne songeant qu’à être décoré d’un ordre quelconque et à émarger au budget, dépaysé quand il a dépassé le boulevard des Italiens, hostile au gouvernement et acceptant servilement tous les régimes, incapable de comprendre ni les mathématiques, ni le jeu d’échecs, ni la comptabilité ; ce portrait, dis-je, est une vraie caricature.

1511. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre V. Subordination et proportion des parties. — Choix et succession des idées »

. — Choix et succession des idées Ces premiers points étant acquis, le travail qui reste à faire consiste principalement à régler le nombre, la subordination et les proportions réciproques des parties que l’œuvre doit comprendre, à choisir parmi toutes les idées que la réflexion a suggérées celles qui doivent y être reçues, à déterminer enfin l’ordre dans lequel elles seront employées. L’unité du tout admet diverses parties ; la continuité du mouvement comprend plusieurs étapes.

1512. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Barbey d’Aurevilly. »

Je comprends et il me plaît que la critique d’un écrivain catholique soit intolérante à l’endroit des ennemis de la foi. […] Comprenez-vous qu’au moment même où je cherche à mettre mes impressions en ordre, il m’en reste encore quelque ahurissement ?

1513. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre III. La commedia dell’arte en France » pp. 31-58

Ils prenaient quatre sols de salaire par tête de tous les Français, et il y avait tel concours, que les quatre meilleurs prédicateurs de Paris n’en avaient pas tous ensemble autant quand ils prêchaient. » Cet empressement du public se comprend aisément. […] Un des traits les plus plaisants de ce rôle qui nous reviennent à la mémoire est celui de ce capitan à qui l’on reprochait d’avoir laissé enlever sa maîtresse par les corsaires barbaresques, et qui répondait : « Debout sur la proue de mon vaisseau, j’étais dans une telle fureur que le souffle impétueux qui sortait de ma bouche frappant les voiles du navire ennemi lui imprima une impulsion si rapide qu’il fut impossible de l’atteindre7. » C’était là le ton ordinaire de ce personnage qui fut si longtemps applaudi sur tous les théâtres de l’Europe, et dont nous ne comprendrions bien le succès que si le règne des traîneurs de sabre recommençait parmi nous.

1514. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre premier. La critique et la vie littéraire » pp. 1-18

Seulement il ne faut pas écrire de critique quand on n’a pas assez le sens historique pour comprendre la nécessité, donc la légitimité de toutes les éclosions littéraires. […] Pour moi, je ne l’ai jamais comprise, ni pratiquée.

1515. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre V. L’antinomie esthétique » pp. 109-129

Ainsi l’esthéticien individualiste et le moraliste comprennent diversement le rôle et l’importance de la beauté en art. […] On comprend qu’en art cette volonté de conformisme soit sans valeur.

1516. (1890) L’avenir de la science « XXI »

Sans l’idée du progrès, on ne saurait rien comprendre aux mouvements de l’humanité. […] Je comprends que des écrivains allemands aient regretté à ce point de vue la vieille vie germanique et maudit l’influence romaine et chrétienne qui en altéra la rude sincérité.

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