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2012. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Or, je crois avoir découvert le vrai coupable, l’auteur responsable de la violation de l’Édit de Nantes, des Dragonnades, de la Révocation et de l’émigration. […] Je vous réponds, l’histoire en main, que Bossuet, représentant le plus illustre de l’épiscopat français sous Louis XIV, en fut l’inspirateur principal, non seulement le complice, mais l’auteur direct. […] Le philosophe… J’emprunte à un auteur déjà cité80, un excellent résumé de sa doctrine : « On voit bien qu’il s’est nourri du terrorisme biblique bien plus que des tendresses de l’Évangile. […] Le politique… « … Ses théories sont telles, sur ce point, (l’organisation des sociétés humaines), ajoute le même auteur, que les civilisations asiatiques devraient être regardées comme un idéal en fait de politique et de gouvernement. […] Notre conclusion, nous la donnons en peu de mots : C’est à la Révocation de l’édit de Nantes que nous devons d’avoir été vaincus et l’auteur responsable du désastre de la France, il y a vingt-sept ans, n’est autre que Bossuet.‌

2013. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « L’abbé Fléchier » pp. 383-416

Mon but, dans cette introduction, sera surtout d’amener tous les esprits qui daigneront me suivre à comprendre que ces Mémoires sont tout à fait d’accord, et pour le fond et pour le ton, avec ce qu’on pouvait attendre de la jeunesse de Fléchier ; qu’ils ne la déparent en rien ; qu’ils font honneur à l’esprit de l’auteur, à sa politesse, sans faire aucun tort à ses mœurs, ni à sa prochaine et déjà commençante gravité ; que dans ce léger et innocent ouvrage, il a tout simplement le ton de la société choisie où il vivait ; et qu’on ne saurait, même au point de vue de la morale et de la religion, trouver cela plus étonnant que de voir saint François de Sales ouvrir son Introduction à la vie dévote en nous narrant de la bouquetière Glycera. […] Par exemple, le chapitre sur « L’esprit critique et satirique » est d’un homme qui préférait de beaucoup la morale insinuante de La Fontaine fabuliste à la franche satire de Boileau et même de Molière ; on dirait que l’auteur continue de faire, à l’égard de ces derniers, quelques-unes des restrictions et des réserves de M. de Montausier. […] Et l’auteur entre dans un détail d’exemples assez agréable. […] Je dois avertir cependant que, bien qu’il se trouve recueilli parmi les œuvres de Fléchier et que, selon moi, il ne les dépare pas, cet écrit est reconnu pour ne pas être de lui, mais d’un ecclésiastique de son temps et de son école ; d’un abbé Groussault82 oublié aujourd’hui, et auteur de plusieurs ouvrages dont celui-ci est de beaucoup le meilleur. […] Telle est la qualité nouvelle que la relation de Fléchier a acquise en vieillissant : ce qui, pour l’auteur devenu tout à fait grave, n’était plus qu’une bagatelle de société, ce qui a pu continuer de paraître tel en effet jusqu’à la fin du xviiie  siècle, et tant que dura l’ancienne monarchie, a pris, à la distance où nous sommes, toute l’importance d’un témoignage circonstancié, d’un tableau neuf et hors de prix.

2014. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Les premières années du règne de Charles VII appartiennent surtout au troupe des humanistes qui commencent à épeler avec un accent nouveau les auteurs tant de fois compilés et cités parle pédantisme des siècles précédents. Ne nous arrêtons pas à l’excellente Christine Pisan114, bonne fille, bonne épouse, bonne mère, du reste un des plus authentiques bas-bleus qu’il y ait dans notre littérature, la première de cette insupportable lignée de femmes auteurs, à qui nul ouvrage sur aucun sujet ne coûte, et qui pendant toute la vie que Dieu leur prête, n’ont affaire que de multiplier les preuves de leur infatigable facilité, égale à leur universelle médiocrité. […] L’Italie commence à nous rendre ce qu’elle a reçu de nous : ses auteurs sont mis sur le pied des anciens, traduits et goûtés comme tels, Boccace après Pétrarque, et plus que lui, d’autant qu’il a de quoi charmer les courtisans avec les érudits. […] La découverte des auteurs du vol de Navarre, la prise et les | aveux de l’un d’eux, fermèrent à Villon les portes de Paris. […] A deux ou trois moments décisifs, il ne nomme pas l’auteur du conseil qui a tout sauvé : et ce conseiller anonyme, on a tout lieu de croire que c’est lui.

2015. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « M. Deschanel et le romantisme de Racine »

L’aimable auteur du Mal et du bien qu’on a dit des femmes a voulu consoler ce dernier tiers, auquel se joint tout ce qu’il y a de lettré en France, et il a publié intégralement, en deux volumes, ses leçons du Collège de France sur le théâtre de Racine. […] Deschanel, Racine avait la sensibilité d’imagination ; mais il semble avoir eu le cœur un peu sec35. » Ainsi, pour se mettre à l’aise avec l’auteur de Bérénice, M.  […] En tout cas, je n’appellerai jamais « sensibilité à fleur de peau »38 la sensibilité de l’auteur d’Andromaque. […] L’auteur du Cid avait fait des tragi-comédies en le disant ; Racine en fait sans le dire, et d’autre sorte. […] (Je crois que ce mot de brio, soit dit en passant, choquerait un peu l’auteur de l’Antéchrist, et qu’il n’accepterait pas le compliment. ) Pour moi, le Néron de Racine me plaît fort et me semble d’une grande vérité historique et humaine ; mais le fou naissant et le cabotin paraîtraient un peu plus chez lui, que je ne m’en plaindrais pas.

2016. (1913) La Fontaine « I. sa vie. »

On peut se poser cette question et avoir ces hésitations à propos des grands auteurs. Il y a de grands auteurs qui n’ont pas besoin du tout de leur biographie pour qu’ils soient expliqués ; on peut les comprendre tout entiers sans rien savoir de leur existence. […] Je me suis aperçu très vite qu’il était précisément de ces auteurs qui ont besoin qu’on fasse leur biographie pour les faire comprendre. […] Son père était lui-même, sinon auteur, du moins amoureux de littérature, et nous avons quelques témoignages — un peu vagues, mais enfin quelques témoignages — nous marquant qu’il a poussé un peu son fils du côté de la littérature. […] Mais en somme — j’y reviens et je termine par là — il est assez utile, malgré ce que je vous ai dit tout à l’heure de la malignité qui préside quelquefois et même souvent à ces anatomies, il est, en définitive, assez utile, pour les raisons morales que je vous ai exposées, de savoir ce qu’a été un auteur comme homme, comme de savoir ce qu’il a été comme écrivain.

2017. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — II. (Fin.) » pp. 98-121

C’est une branche charmante et bien variée de la littérature française dès le Moyen Âge que le conte, depuis les auteurs de fabliaux jusqu’à La Fontaine, en passant par les nouvelles de la cour de Bourgogne, par les jolis romans d’Antoine de La Sale, par les contes de Marguerite de Navarre, de Des Périers. […] — Dans l’âge suivant, au xve  siècle, dit Gray à la suite du passage que j’ai précédemment cité, je vois que Froissart était lu avec grand plaisir par tous ceux qui savaient lire, et sur le même pied que le Roi Arthur, Sire Tristram et l’Archevêque Turpin ; non pas qu’on le prît pour un romancier auteur de fables, mais bien parce qu’on les prenait, eux tous, pour de vrais et authentiques historiens ; tant il était alors de peu de conséquence pour un homme, de se mettre en peine d’écrire la vérité ! […] La réflexion qui termine et que l’auteur ne fait pas en son nom, mais qu’il place dans la bouche des chevaliers présents, ce pronostic tout flatteur et favorable sur l’avenir du prince-roi, s’il lui est donné de vivre pour y atteindre, rappelle dans une perspective éloignée l’instabilité des choses humaines et les compensations du sort, qui ne permet pas aux plus heureux d’accomplir tout leur bonheur :-ce prince si brillant, et à qui tous souhaitent vie, ne régnera pas en effet, et mourra plein de gloire, mais avant le temps. […] Le cas de ce savant homme est piquant et nous offre un singulier phénomène : c’est que plus il a étudié et approfondi son auteur, plus il en a collationné de manuscrits, et plus aussi la tâche de choisir et de fixer un texte lui est devenue impossible.

2018. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Chateaubriand, Vie de Rancé « Mon premier ouvrage a été fait à Londres en 1797, mon dernier à Paris en 1844 : entre ces deux dates, il n’y a pas moins de quarante-sept ans ; trois fois l’espace que Tacite appelle une longue partie de la vie humaine : Quindecim annos, grande mortalis ævi spatium. » Cette pensée s’élève inévitablement dans l’esprit du lecteur qui ouvre le volume, quand l’auteur ne l’aurait pas fait remarquer. […] J’étudiai néanmoins ; je lus, et c’est le résultat de ces lectures qui compose aujourd’hui la vie de Rancé. » Cette humble origine de l’ouvrage sied à l’humilité du sujet ; cette docilité de l’illustre auteur est touchante ; mais le vieux confesseur avait raison ; avec le coup d’œil du simple, il lisait dans le cœur de René plus directement peut-être que René lui-même ; il avait touché les fibres secrètes par où René était fait pour vibrer à l’unisson de Rancé.  […] Je ne  voudrais rien dire qui eût l’air d’amoindrir M, de La Mennais ; l’éloquent et agréable auteur des Affaires de Rome sait trop bien la vie de Rancé pour ne pas s’en dire beaucoup plus à lui-même.  […] « Lisez la première lettre, adressée en 1715 à la marquise de Mimeure, et le dernier billet écrit le 26 mai 1778, quatre jours avant la mort de l’auteur, au comte de Lally-Tolendal ; réfléchissez sur tout ce qui a passé dans cette période de soixante-trois années.

2019. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

Béranger en 1832 Dans ces esquisses, où nous tâchons de nous prendre à des œuvres d’hier et à des auteurs vivants, où la biographie de l’homme empiète, aussi loin qu’elle le peut, sur le jugement littéraire ; où ce jugement toutefois s’entremêle et supplée au besoin à une biographie nécessairement inachevée ; dans cette espèce de genre intermédiaire, qui, en allant au delà du livre, touche aussitôt à des sensibilités mystérieuses, inégales, non encore sondées, et s’arrête de toutes parts à mille difficultés de morale et de convenance, nous reconnaissons aussi vivement que personne, et avec bien du regret, combien notre travail se produit incomplet et fautif, lors même que notre pensée en possède par devers elle les plus exacts éléments. […] Aussi, quand le poëte, dans sa chanson adressée à l’auteur du Génie du Christianisme, s’écrie : Ta voix résonne, et soudain ma jeunesse  Brille à tes chants d’une noble rougeur ! […] Un peu d’eau pure au pauvre voyageur, il ne fait que rendre témoignage sincère d’une impression éprouvée par lui à cet âge de rêves épiques, lorsque, attendant l’heure d’aborder son Clovis, l’auteur futur des Clefs du Paradis et du Concordat de 1817 traitait en dithyrambe le Déluge, le Jugement dernier, le Rétablissement du Culte. […] Dès 1815, lors de la publication de son premier recueil, on l’avait prévenu, avec une sorte d’indulgence, qu’il prît garde de recommencer, parce qu’on serait, à regret, contraint de sacrifier une autre fois Bacchantes, Gaudrioles, Frétillons et ces Demoiselles, au décorum universitaire : on croyait jusque-là devoir quelque ménagement à l’auteur du Roi d’Yvetot.

2020. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

Comme ceci n’est pas un inventaire exact, ni même un jugement général des nombreux écrits de notre auteur, nous ne nous arrêterons qu’à ceux qui nous aideront à le peindre. […] L’ouvrage se partage nettement en deux parts : l’auteur, voyant que la première avait réussi, y rattacha l’autre. […] L’impuissance de la philosophie solitaire en face des maux réels y est vivement mise à nu, et la tentative de suicide par où finit Cléveland exprime pour nous et conclut visiblement cette moralité plus profonde, j’ose l’assurer, qu’elle n’a dû alors le sembler à son auteur. […] Qu’un auteur empesé et fardé paroît fade en comparaison !

2021. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

Plus le thème est simple, et plus le développement est clair ; or, dans toute cette littérature, la première obligation de l’auteur est de développer clairement le thème qu’il s’est choisi. […] Parcourez les innombrables tragédies et comédies dont Grimm et Collé nous donnent l’extrait mortuaire, même les bonnes pièces de Voltaire et de Crébillon, plus tard celles des auteurs qui ont la vogue, Belloy, Laharpe, Ducis, Marie Chénier. Éloquence, art, situations, beaux vers, tout y est, excepté des hommes ; les personnages ne sont que des mannequins bien appris, et le plus souvent des trompettes par lesquels l’auteur lance au public ses déclamations. […] Vaugelas, Remarques sur la langue française : « C’est la façon de parler de la plus saine partie de la cour conformément à la façon d’écrire de la plus saine partie des auteurs du temps… Il vaut mieux consulter les femmes et ceux qui n’ont point étudié que ceux qui sont bien savants en la langue grecque et en la latine. » 356.

2022. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre II. Les romans bretons »

Le plus fameux auteur, en ce genre, est Chrétien de Troyes57 qui écrivait, comme je l’ai dit, à la cour de Champagne, dans la seconde moitié du xiie  siècle. […] En même temps, notre auteur aime à moraliser ; il raisonne volontiers sur ce qu’il conte, analyse, épilogue, marivaude, débite une sentence, lâche parfois une épigramme contre les dames : mais à l’ordinaire il les cajole, il les respecte. […] Mais ce monstrueux Perceval auquel quatre ou cinq auteurs ont travaillé, est tout plein, dans ses 30 000 vers, de disparates et de contradictions. […] Plus sévère que Dieu et que l’Église, notre auteur n’absout même pas le mariage : et quand la quête du Graal commence, quand tous les chevaliers de la Table ronde se mettent en route pour le chercher, un ermite défend à leurs femmes de les accompagner.

2023. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre VIII »

Les auteurs n’ont pas réussi à remplir ce vide par une enfilade de tableaux épars, au milieu desquels des personnages factices se mêlent et se heurtent, sans qu’aucun lien les rassemble. […] Madame Caverlet Toute justice rendue au talent qui éclate dans quelques belles scènes de Madame Caverlet, à l’esprit un peu gros de quelques parties du dialogue, il m’est impossible de classer au rang des bons ouvrages de l’auteur cette pièce morose et inanimée. […] L’auteur l’a rendu plus inacceptable encore en mêlant des enfants au conflit pénible qu’il a mis en scène. […] En face de la famille officielle, l’auteur nous fait voir la famille exclue et déshéritée, s’enrichissant par le travail, prospérant par l’accord parfait de deux volontés courageuses, de deux cœurs unis.

2024. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre III : Examen de la doctrine de Tocqueville »

Un premier défaut déjà reproché au livre de la Démocratie, c’est que la vue de l’auteur y est constamment partagée entre deux objets différents qui, malgré quelques ressemblances essentielles, se refusent à entrer dans un même système : à savoir la démocratie en Europe et la démocratie en Amérique. […] Il faut se garder d’obscurcir cette idée, car il s’agit de relever les âmes, et non d’achever de les abattre. » Sur un autre point, j’admire également la finesse de l’auteur, mais je n’approuve pas autant sa conclusion. […] Il semble qu’ici l’auteur laisse un peu trop paraître son dédain pour les sociétés démocratiques, puisqu’il les juge complètement incapables d’entendre parler de la vertu d’une manière désintéressée. […] Si l’on cherche maintenant à quelle conclusion la méthode précédente a conduit M. de Tocqueville, on verra qu’en dehors des vues particulières, qui sont très-nombreuses dans ses écrits, il a mis en pleine lumière cette loi aperçue par quelques auteurs, mais que nul n’avait encore développée comme lui.

2025. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre V. La parole intérieure et la pensée. — Premier problème : leurs positions respectives dans la durée. »

Mais cette propriété s’affaiblit à la longue : de même qu’une mauvaise écriture est illisible pour son auteur au bout de quelques années, de même une formule inexacte ne garde pas longtemps le dépôt qui lui a été confié. […] Les auteurs dont les manuscrits ne sont souillés d’aucune rature, dont le premier jet est définitif, sont toujours ou des écrivains négligés, à la fois obscurs et incorrects, ou des esprits vagues, ou des esprits faciles et superficiels. […] Nous citerons plus loin les passages d’Horace dont Boileau s’est inspiré. — Quintilien (X, 1) est plus pénétrant que Boileau ; il comprend que l’expression peut être en retard sur la pensée ; mais, si les nombreuses analyses psychologiques de cet auteur sont très fines, elles sont aussi très vagues ; nulle part il ne distingue dans la mémoire verbale la puissance (conservation) et l’acte (reproduction, parole intérieure) ; puis la parole est pour lui le but, et la pensée le moyen : ce faux point de vue est l’erreur fondamentale de son livre. […] II, p. 273) : « L’extrême clarté ne sert pas seulement à se faire bien entendre ; elle est aussi, comme la preuve d’une addition, la démonstration pour l’auteur lui-même qu’il ne se laisse pas entraîner par des aperçus confus.

2026. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De la dernière séance de l’Académie des sciences morales et politiques, et du discours de M. Mignet. » pp. 291-307

Mignet, comme auteur de notices et d’éloges, a à se garder de cette faculté d’omettre ce qui le gêne dans les sujets qu’il traite. […] Comme interprète de l’Académie des sciences morales et politiques, et comme auteur de notices et d’éloges, M.  […] Cousin disait à qui voulait l’entendre : « Damiron, — clarté littéraire, obscurité philosophique. » Depuis, après vingt années d’enseignement, et quand l’auteur de tant de mémoires étudiés et fins avait pris rang de maître (s’il devait jamais le prendre), M. 

2027. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres de François Arago. Tome I, 1854. » pp. 1-18

Arago vient de paraître : il contient, après une introduction de M. de Humboldt, une centaine de pages intitulées Histoire de ma jeunesse, qui sont des mémoires assez détaillés jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans, et une suite de notices biographiques que l’auteur eut à prononcer comme secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences : la série de ces notices ne remplira pas moins de trois volumes. […] Aujourd’hui que l’auteur n’est plus, rien n’empêche de dire quelle fut l’impression universelle, ou plutôt il suffit de l’indiquer et de la rappeler à tous les témoins qui l’éprouvèrent si péniblement. […] La notice sur Carnot ouvre une seconde série en quelque sorte, celle des notices semi-politiques, telles que les biographies de Bailly, de Monge, de Condorcet, dans lesquelles l’auteur abonde dans son sens et ne se refuse plus aucune digression ni aucune controverse.

2028. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — I. » pp. 446-462

Pour préface, on lit simplement dans l’édition première : « Voici les erreurs, les infortunes des cœurs sensibles ; lis, Âme froide, et condamne. » Mais, dans un exemplaire augmenté des notes de l’auteur, je trouve cet autre projet de préface ou d’avertissement : En composant cet ouvrage, j’ai connu ou je n’ai pas connu les unités. […] Flatté de l’attention du célèbre petit-maître en poésie, que de loin on se figurait moins frivole qu’il ne l’était, il lui adressait de Paris où il était venu, à la date du 4 février 1778, la lettre suivante, qui accompagnait l’envoi de ses Élégies : Le jeune auteur d’un drame auquel M.  […] C’est après avoir lu ces belles pages des Notes sur la Suisse que Buffon, accueillant l’auteur, lui disait magnifiquement : « Monsieur, vous écrivez comme Rousseau. » Et en effet, ces parties du premier Voyage de Ramond rappellent notablement les formes et le ton du maître ; et, parmi les écrivains célèbres que nous avons vus depuis, Lamennais, George Sand, ces grands élèves de Rousseau, n’ont rien écrit de mieux, de plus plein, de plus nombreux et de plus correct dans leurs descriptions de nature.

2029. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — I » pp. 1-17

Ils n’ont pas eu de peine à montrer que Saint-Simon exagère, en les résumant, les défauts du personnage ; nos jeunes auteurs vont trop loin toutefois quand ils font de Saint-Simon un ennemi de Dangeau : on n’est pas ennemi de ceux dont on voit les ridicules, et le seul tort de Saint-Simon est de trop voir et d’être doué par la nature d’un organe qui est comme un verre grossissant, et d’une parole de feu irrésistible : de là tant de portraits ressemblants, outrés, vrais à les bien entendre, et en tout cas ineffaçables. […] Ouvrons donc ce Journal de Dangeau, et apprenons à le lire en y mettant de cet esprit historique que l’auteur n’avait pas, mais qu’il sert si bien. […] Et d’ailleurs, dans ce genre de statistique et de chronique, si l’auteur se permet de choisir et d’élaguer une fois à son gré, il n’y a plus de garantie.

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