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608. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat »

Bossuet, grand théologien, grand orateur funèbre, meurt aux premières années du xviiie  siècle (12 avril 1704) : sa mémoire recueille aussitôt la gloire qui lui est due et qui, depuis longtemps, le couronnait ; mais l’admiration, sur son compte, s’attache littérairement aux endroits célèbres, aux chefs-d’œuvre en lumière. […] Visiblement destiné à l’éloquence de la chaire et à l’action de l’orateur, on ne lui laissa pas complètement ignorer l’action même du théâtre : il vit donc des spectacles dans sa jeunesse, mais sans s’y attacher ; et après en avoir profité pour ce qui le concernait, il n’en fut que plus sévère ensuite contre la Comédie, jusqu’à nous sembler violent même et cruellement injuste : son jugement sur Molière restera une des taches, une des inintelligences comme des duretés de Bossuet.

609. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Rien de tel ; si le déchirement exista en effet, ce fut dans un autre ordre, dans celui des relations personnelles ; il lui fut pénible et douloureux, sans doute, d’avoir à se séparer des hommes respectables auxquels il était attaché par des sentiments d’affection et de reconnaissance ; il souffrit de devoir les affliger en leur annonçant une résolution irrévocable. […] En général, le procédé de critique qu’il applique en toute branche d’étude, et qu’il a élevé jusqu’à l’art, est celui-ci : Il s’attache à tirer la formule, l’idée, l’image abrégée de chaque pays, de chaque race, de chaque groupe historique, de chaque individu marquant, pour l’admettre à son rang, à son point, dans cette représentation idéale que porte avec elle l’élite successive de l’humanité.

610. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens, par M. Le Play, Conseiller d’État. »

Moyennant tout un ensemble d’engagements réciproques et de subventions tutélaires, lui et sa famille restent attachés, affectionnés même à cette existence frugale, à ce labeur pénible dans lequel il vit presque toujours enfoui. […] Homme de progrès, n’ayant pas, comme certains philosophes opiniâtres, d’attache et de parti pris pour un ancien régime, par cela même qu’il est ancien, il s’est pourtant demandé, en terminant cette série d’études comparatives, comment il se faisait que le dégagement de l’individualité et du libre arbitre, la plus grande disposition de soi-même et le choix dans le travail n’amenaient pas toujours (tant s’en faut !)

611. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

Mais je ne m’attache en lui qu’au poëte. […] —  Le quadrige est vaincu : nous tenons un génie Qui fume, haletant d’un utile courroux, Et, dans l’oppression d’une ardente agonie, Attache au vol du temps l’homme pensif et doux.

612. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « L’abbé Prevost et les bénédictins. »

J’aimois un corps auquel j’étois attaché par mes promesses ; je souhaitois d’y être aimé ; et, fait comme je suis, j’aurois perdu la vie plutôt que de commettre quelque chose d’opposé à ces deux sentiments. […] Je vis, grâce au ciel, sans reproche ; tel en Hollande qu’à Paris, point dévot, mais réglé dans ma conduite et dans mes mœurs, et toujours inviolablement attaché à mes vieilles maximes de droiture et d’honneur.

613. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens II) Henry Fouquier »

Dans les cinquante ou soixante mille lignes qu’un journaliste écrit tous les ans, ce qui lui appartient en propre, ce qui le signale et le distingue se trouve perdu dans ce qui le confond et le mêle, dans tout ce qu’il a laissé s’écouler de lui sans y apporter d’attention et sans y attacher de prix. […] Il a montré, presque avec émotion et en condamnant sur ce point les railleries vulgaires, ce qu’il y a de touchant dans l’amour, des femmes qui ont un peu dépassé l’âge de l’amour, des amantes mûries et meurtries, qui s’attachent à leur dernière passion avec fureur et avec mélancolie, parce qu’après il n’y aura plus rien, et qui, pour se faire pardonner, pour s’absoudre elles-mêmes et sans se douter du sacrilège, mêlent à leur suprême amour de femme un sentiment d’équivoque maternité.

614. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Barbey d’Aurevilly. »

C’est aux choses qui ont le moins d’importance qu’il se pique d’en attacher le plus. […] Comme il fait quelque chose avec le néant, comme ses inventions consistent en des riens parfaitement superflus et qui ne valent que par l’opinion qu’il en a su donner, il nous apprend que les choses n’ont de prix que celui que nous leur attachons, et que « l’idéalisme est le vrai ».

615. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Premiere partie. » pp. 12-34

S’il est coupable, pourquoi donc la gloire demeure-t-elle attachée à ses pas & devient-elle le prix de sa noble audace ? […] Quand des esprits aveugles s’obstinent à condamner un homme vertueux ; cet homme vertueux n’en sera pas moins attaché à ses devoirs.

616. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Seconde partie. » pp. 35-56

Si l’envie s’attache à tes pas, si l’imbécile superstition te poursuit de contrées en contrées (a) si la calomnie exhale les poisons de sa bouche ; que peuvent de tels monstres contre toi ? […] Ami, ne te regarde pas comme une victime préparée pour le seul bonheur d’autrui : la Nature n’a pû te sauver les peines inévitables attachées à la condition humaine ; mais vois aussi toutes les qualités dont elle t’a doué avec une magnificence digne d’elle & de toi.

617. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre III. La commedia dell’arte en France » pp. 31-58

Isabelle peut être citée comme un exemple de la considération et des honneurs qui s’attachaient fréquemment en Italie à la profession du comédien. […] De ce livre imprimé du temps de Henri IV, j’ai pris le dessin de l’habit d’Arlequin. » Ce costume, comme on le voit, est bien différent de celui qu’Arlequin adopta par la suite : il porte ici une jaquette ouverte par devant et attachée par de mauvais rubans ; un pantalon étroit, collant, couvert de morceaux d’étoffes placés au hasard, et sans doute de diverses couleurs.

618. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXI. Dernier voyage de Jésus à Jérusalem. »

Un jour, sa mauvaise humeur contre le temple lui arracha un mot imprudent : « Ce temple bâti de main d’homme, dit-il, je pourrais, si je voulais, le détruire, et en trois jours j’en rebâtirais un autre non construit de main d’homme 993. » On ne sait pas bien quel sens Jésus attachait à ce mot, où ses disciples cherchèrent des allégories forcées. […] Totafôth ou tefillîn, lames de métal ou bandes de parchemin, contenant des passages de la Loi, que les Juifs dévots portaient attachées au front et au bras gauche, en exécution littérale des passages Ex.

619. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Dernière semaine de Jésus. »

Mais après la mort de Jésus, on attacha à cette soirée un sens singulièrement solennel, et l’imagination des croyants y répandit une teinte de suave mysticité. […] Il est très-ordinaire, en Orient, qu’une personne qui vous est attachée par un lien d’affection ou de domesticité aille vous servir quand vous mangez chez autrui.

620. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — I. La Poësie en elle-même. » pp. 234-256

Les inconvéniens, attachés à la poësie, se trouvent également dans l’éloquence & dans toutes les parties des belles-lettres. […] On ne sçait presque plus ce que signifient ceux qu’on montre à Sceaux, ou les personnes attachées à madame la duchesse du Maine, M. de Malézieux, le cardinal de Polignac, madame de Staal, sont représentées sous des figures de singes.

621. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « De la tragédie chez les Anciens. » pp. 2-20

Aussi les passions principales que touche Homère, sont-elles conformes à la durée de son poème et à la nature de l’homme, considéré comme lecteur ; c’est la joie, la curiosité et l’admiration, passions douces, qui peuvent attacher longtemps le cœur sans le fatiguer : au lieu que la terreur, l’indignation, la haine, la compassion, et quantité d’autres dont la vivacité peut épuiser l’âme, ne sont traitées dans l’Iliade qu’en passant, et toujours avec subordination aux passions modérées qu’on y voit régner. […] Les passions vives et courtes sont donc les vrais mobiles propres à animer le théâtre ; car si ce que je viens de dire est vrai dans la nature, le spectacle qui en est une imitation, doit s’y conformer d’autant plus, que les passions, fussent-elles feintes, se communiquent d’homme à homme d’une manière plus soudaine que la flamme d’une maison embrasée ne s’attache aux édifices voisins.

622. (1854) Préface à Antoine Furetière, Le Roman bourgeois pp. 5-22

Préface La fatalité qui a poursuivi Furetière pendant sa vie s’est attachée après sa mort à ses écrits. […] L’Amour, descendu sur la terre pour fuir une correction maternelle, s’attache successivement à différents types, destinés, dans la pensée de l’auteur, à attester la dépravation des sentiments et l’avilissement des cœurs de son siècle : une pédante, Polymathie-Armande ; une prude, Archelaïde-Arsinoë ; une coquette, Polyphile-Célimène ; Landore, une sotte ; Polione, une courtisane, etc., etc.

623. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Nièces de Mazarin » pp. 137-156

Tous les grands hommes n’ont pas que des filles à la manière d’Épaminondas… Tous les grands ministres, même ceux qui furent cardinaux, ne sont pas des moines comme Ximénès et ne sombrent pas tout entiers sous leur cilice et dans la tombe, et il est intéressant de suivre, après eux, la destinée de ces familles au sein desquelles ils ont brillé, — dont ils étaient l’âme et la puissance ; il est intéressant d’apprendre comment se sont écartées et rompues ces racines, verticales et horizontales (comme dit un écrivain allemand), qui les attachaient à la terre ! […] Une surtout nous a beaucoup frappé, et nous la citerons parce qu’elle grandit, dans un aperçu juste, celle des Mancines à qui l’histoire attache l’intérêt romanesque du premier amour de Louis XIV.

624. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre II. La relativité complète »

Le physicien qui construit la Science sera attaché à ce trièdre. […] Sans doute une multitude de déplacements et de changements se montrent à sa surface et se cachent à l’intérieur d’elle ; mais ces mouvements tiennent dans un cadre fixe : je veux dire qu’on peut trouver sur la Terre autant de points fixes qu’on voudra les uns par rapport aux autres et ne s’attacher qu’à eux, les événements qui se déroulent dans les intervalles passant alors à l’état de simples représentations : ce ne seraient plus que des images se peignant successivement dans la conscience d’observateurs immobiles en ces points fixes.

625. (1915) La philosophie française « I »

Attaché à Pascal autant qu’à Maine de Biran, épris de l’art grec autant que de la philosophie grecque, Ravaisson nous fait admirablement comprendre comment l’originalité de chaque philosophe français ne l’empêche pas de se relier à une certaine tradition, et comment cette tradition elle-même rejoint la tradition classique. […] Nous nous attachons surtout, dans le présent travail, à ceux qui furent, en philosophie, les créateurs d’idées et de méthodes nouvelles.

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