Il ne me reste plus qu’à vous faire l’histoire de la distribution des prix de cette année, de l’injustice et de la honte de l’académie, et du ressentiment et de la vengeance des élèves ; ce sera pour le feuillet suivant, le seul que je voudrais que l’on publiât et qu’on affichât à la porte de l’académie et dans tous les carrefours, afin qu’un pareil événement n’eût jamais lieu.
Certes il s’était passé beaucoup d’événements depuis 1849 ; quelques-uns fâcheux, quelques-uns heureux. […] Il voulait protester contre des événements et une existence si misérables, et il réclamait le secours de la Grâce pour bien mourir. […] Il me semble, à moi, que rien ne fait mieux comprendre un être que ses actes, mais M. de Goncourt estime qu’un homme est surtout intéressant lorsqu’il ne lui arrive rien ; il supprime toute intrigue, même le plus léger événement ; il veut connaître la sensibilité des gens lorsqu’ils ne sentent pas ; comme certains pianistes, il adore les difficultés, il cherche l’impossibilité. […] Écrire un journal quand on a une existence mouvementée, pleine d’événements, quand on voit des hommes très divers, cela est intéressant ; mais écrire son journal quand on vit chez soi et qu’on n’en bouge pas, quelle bizarrerie !
XIII Mais un événement plus grand que tous ceux qui avaient influé, depuis l’origine de la nation, sur sa langue, allait faire faire à la littérature française une explosion dans le monde, comparable à l’explosion de la langue grecque quand elle répandit les premières rumeurs du christianisme de Constantinople sur toutes les côtes de l’Asie et de l’Afrique : cet événement, c’était la révolution française, littérature d’abord, philosophie après, politique ensuite, écroulement et conquête tour à tour, retentissement immense et universel ; le plus grand bruit des temps européens ! […] Il nous est difficile de comprendre comment un esprit d’un si grand sang-froid, et comment un coup d’œil d’une si habituelle justesse ont semblé méconnaître à cet égard le caractère, les causes, la portée du plus vaste événement de l’histoire moderne. […] L’Europe fit silence pour écouter ces représentants d’un siècle nouveau à qui des événements inattendus venaient de donner la parole, non pour la France, répétons-le bien, mais pour l’esprit humain.
Guizot déclare en être demeuré à apprécier, dans ce vaste et habile ouvrage, « l’immensité des recherches, la variété des connaissances, l’étendue des lumières, et surtout cette justesse vraiment philosophique d’un esprit qui juge le passé comme il jugerait le présent », et qui, à travers la forme extraordinaire et imprévue des mœurs, des coutumes et des événements, a l’art de retrouver dans tous les temps les mêmes hommes. […] Dans les volumes suivants, l’historien s’est un peu détendu et de plus en plus développé : il ne s’est refusé aucune des branches d’événements et de faits qui se rencontraient sur son chemin dans son champ immense. […] La Révolution française, dont les premiers événements jetèrent tant d’émigrés français au bord du lac de Genève, fut la grande préoccupation des dernières années de Gibbon.
Les événements s’accélérant chaque jour et le péril croissant, la reine fut bientôt obligée d’être sérieuse, de peser des résolutions graves, de se former un avis sur le mode d’agir, d’avoir enfin de la décision et de la volonté pour deux : ici s’ouvre tout une autre vie pour elle, et elle suffit avec noblesse à ce second personnage qui put et dut commettre bien des fautes, mais qui ceignit la couronne d’épines, épuisa tous les calices et porta sa croix jusqu’au martyre. […] J’ai été bien émue de cet événement, car M. de Choiseul a toujours été un ami de notre famille et m’a toujours à l’occasion donné de bons avis. […] Il y a, dans ces lettres données par M. le comte d’Hunolstein, quelques-uns de ces mots tellement à point et significatifs qu’on les croirait mis exprès en vue des événements futurs.
Les événements du premier Empire ne se réfléchissent guère dans cette Correspondance que par le côté ecclésiastique, par la lutte contre l’Université au sujet du petit séminaire de Saint-Malo, et par la participation morale que prend La Mennais aux affaires générales de l’Église. […] Qui t’a empêché de te lier à ce diocèse, si ce n’est la liberté que tu voulais te réserver de le quitter en cas que les événements m’appelassent ailleurs ? […] « J’ai peu de talent, écrit-il (26 octobre 1814), et pourtant en regardant dans ma tête il me semble qu’il y a là quelque chose qui ne demande qu’à sortir. » Les événements politiques pourront encore retarder La Mennais un ou deux ans ; l’écrivain dès lors se sentait prêt, en mesure et de force pour le combat.
Le plan général est vaste et même grandiose ; l’historien procède par grandes masses qu’il dispose et distribue autour d’un événement principal qui donne son nom à chaque livre. […] Encore l’horreur de l’événement moderne dépassait-elle l’horreur des événements anciens de toute la puissance des moyens de destruction imaginés par la science.
Voici maintenant le fait : Avant qu’on parlât dans l’Assemblée de cet événement, Desmeuniers me montra une lettre qui le lui annonçait. […] Dans les pages de réflexions et de considérations élevées qu’il écrivit dans la retraite ou dans la captivité en 1792, il faut lui rendre cette justice qu’il parle surtout des choses et des événements généraux, et très peu de lui. […] Lorsque les événements qu’il a redoutés le plus sont consommés, il y souscrit, il abandonne ses anciens chefs et ses anciens principes, et cherche seulement, dans la nouvelle marche, à former encore l’arrière-garde et à retarder la marche de la colonne révolutionnaire, à la suite de laquelle il se traîne à contrecœur.
Les événements de 1814 interrompirent brusquement ces joutes universitaires. […] Villemain, dans son excellent Rapport de 1840, a indiqué les mérites et donné à deviner les lacunes, quand il a dit : L’histoire est toujours à faire ; et tout esprit distingué, en s’aidant lui-même du progrès d’idées qu’il adopte ou qu’il combat, découvre dans les événements racontés par d’autres des leçons et des vues nouvelles. […] Si quelques événements n’offrent pas dans ses récits le pathétique terrible auquel s’attendait l’imagination du lecteur, on n’en doit pas moins apprécier la finesse impartiale de son esprit.
Comme journaliste et comme publiciste, dans cette rude fonction de saisir, d’embrasser au passage des événements orageux et compliqués qui se déroulent et se précipitent, nul n’a eu plus souvent raison, plume en main, que lui. […] Cet indiscret Garat, dans un épanchement qu’il adressait à Condorcet en 1792, écrivait, en se reportant aux scènes de la Constituante (de tels aveux sont bons à recueillir dans tous les temps) : Vous savez, monsieur, qu’à ces mêmes époques les séances de l’Assemblée nationale ; d’où tous les mouvements partaient et où tous venaient retentir et se répéter, étaient beaucoup moins des délibérations que des actions et des événements. […] De loin en loin il s’élève quelques hommes d’État supérieurs aux événements qu’ils savent prévoir, préparer et conduire (Frédéric le Grand, Franklin, par exemple) ; mais la routine ou la nécessité gouvernent ordinairement le monde, et la vieille Europe renferme malheureusement plus d’ouvriers que d’architectes.
Necker, et il retint de son père ce fonds de principes politiques qui, recouvert par tant d’événements et de pensées de tout genre, subsista toujours en lui. […] Cet événement fatal, surtout dans un moment où il n’y avait pas une minute à perdre pour réparer les fautes, mit de la confusion dans les mouvements. […] Elles sont revenues à ma pensée après les événements d’Essonne, et m’ont fait alors une impression que l’on conçoit, et qui jamais ne s’est effacée de ma mémoire.
plus on a connu le monde, ses fantômes et ses vains prestiges, plus on a senti le besoin d’une grande idée pour élever son âme au-dessus de tant d’événements qui viennent la décourager ou la flétrir. […] Pour mettre sa sensibilité plus à son aise, par un singulier et subtil accommodement il supposait que c’était d’un autre que lui qu’il parlait : C’est d’un moi que je parle, et non pas de moi ; car, loin des hommes, au pied des hautes montagnes, au bruit d’une onde monotone qui ne présente d’autre idée que la marche égale du temps, et sans autre aspect qu’une longue solitude, une retraite silencieuse que bordent déjà les ombres d’une éternelle nuit, je n’ai plus de rapport avec ce ministre naguère emporté par les événements, agité par les passions du monde, et sans cesse aux prises avec l’injustice ; je n’ai plus de rapport avec lui que par les émotions d’une âme sensible… Il revient à chaque instant, avec des cris de David ou de Job, sur cette calamité, qui véritablement n’était pas si grande qu’il le supposait : Quelquefois seulement, au pied de ces montagnes où l’ingratitude particulière des représentants des Communes m’a relégué, et dans les moments où j’entends les vents furieux s’efforcer d’ébranler mon asile, et renverser les arbres dont il est environné, il m’arrive alors peut-être de dire comme le roi Lear : « Blow, winds, … Soufflez, vents impétueux ! […] Necker, de la manière la plus claire et la plus positive sur les avantages et les désavantages de mon caractère ; et, lors d’une conférence qui se tint dans le cabinet de Sa Majesté vers l’époque de la convocation des États généraux, et où les principaux ministres assistèrent, je me souviens d’avoir été conduit, par le mouvement de la discussion, à dire devant le roi qu’aussi longtemps qu’un esprit sage, un caractère honnête, une âme élevée pourraient influer sur l’opinion, je serais peut-être un ministre aussi propre à servir l’État que personne ; mais que, si jamais le cours des événements exigeait un Mazarin ou un Richelieu, ce furent mes propres expressions, dès ce moment-là je ne conviendrais plus aux affaires publiques.
Nul peuple n’a conçu ce genre de drame, dont l’action est toute morale, qui néglige tous les accidents secondaires de la vie, tous les événements extérieurs, toutes les formes changeantes de l’humanité, pour peindre l’homme en général et surtout l’homme aux prises avec lui-même dans ce grand combat de la passion et de la vertu. […] Je comprends que la tragédie classique, telle que je viens de la définir et de l’expliquer, ait beaucoup de peine à plaire aux hommes de notre temps : c’est que nous préférons en tout le sensible à l’intelligible ; pour que le cœur humain nous intéresse, il faut qu’il soit mêlé à des événements réels plus ou moins semblables à ceux que nous connaissons. […] La Fronde, bien entendu, est un événement perdu auquel on ne fait que de vagues et lointaines allusions : à plus forte raison a-t-on oublié le xvie siècle.
Mais alors pourquoi trouve-t-on les résultats de son pontificat si petits dans le cadre des événements du temps où il vécut ? […] C’était un de ces événements terribles même dans ce qu’ils ont de plus heureux, car s’ils ne portent pas aux nues, ils écrasent ; leur bonheur se retourne contre l’homme qui n’en a pas usé, et fait croire que la fortune s’est prostituée. […] Le perçant, le vif, le fier y manquent ; nulle grande manière dans la peinture des caractères et dans le récit des événements.
Je ne cherche à jeter de la défaveur sur personne, mais un jour chacun de ceux qui ont eu part aux événements devra rendre compte au gouvernement de sa conduite ; la mienne sera facile à connaître : le général Menou fut nommé par vous notre général en chef9 ; il avait votre estime, il eut votre confiance ; devais-je lui refuser la mienne ? […] Dans la relation de la Campagne d’Égypte, publiée en 1847, et où le général Friant est plus d’une fois mentionné avec honneur, Napoléon a traité, en finissant, des événements militaires qui amenèrent l’évacuation de la conquête.
« Le caractère de plusieurs généraux, a dit Napoléon, avait été détrempé par les événements de 18H ; ils avaient perdu quelque chose de cette audace, de cette résolution et de cette confiance qui leur avaient valu tant de gloire et avaient tant contribué aux succès des campagnes passées. » À tous ces éléments humains de fatalité s’ajouta, la veille du dernier jour, un orage du ciel, un obstacle matériel considérable et imprévu. En temps ordinaire, toutes ces circonstances qu’on énumère avec soin et qu’on relève auraient eu moins d’importance, car toutes n’auraient pas donné à la fois ; l’une, en manquant, aurait corrigé et compensé l’autre ; mais ici tout s’ajouta par l’effet du courant général des idées et des événements.
Le drame est plus court, plus concentré, plus fictif ; il est plus à la merci d’un seul événement, d’une seule idée ; l’exaltation en dispose aisément ; il peut se détacher, s’arracher davantage du fond de la vie commune. […] Puis, lorsque plus tard encore il vit sans doute qu’illusions pour illusions il ne fallait pas être trop dédaigneux des premières, il revint à Bug, le remania, conserva le cadre, mais le redora en mille manières, enrichit le paysage de ces couleurs où la Muse lui avait récemment appris à puiser, compliqua les événements, introduisit entre ses personnages le seul sentiment qui ait un attrait souverain pour la jeunesse, et d’où sortent les rivalités, les perfidies, les sacrifices, les incurables blessures ; il mit l’amour, il montra la douce Marie.
Quand on dit que l’imagination du spectateur se figure qu’il se passe le temps nécessaire pour les événements que l’on représente sur la scène, on n’entend pas que l’illusion du spectateur aille au point de croire tout ce temps réellement écoulé. […] Votre spectateur parisien voit à sept heures précises Agamemnon réveiller Arcas ; il est témoin de l’arrivée d’Iphigénie ; il la voit conduire à l’autel où l’attend le jésuitique Calchas ; il saurait bien répondre, si on le lui demandait, qu’il a fallu plusieurs heures pour tous ces événements.