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1188. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre V. Le Séminaire Saint-Sulpice (1882) »

Les questions supérieures leur échappaient. […] Le côté scientifique lui échappa tout à fait ; quand je lui parlai de critique allemande, il fut surpris.

1189. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIV » pp. 126-174

Le roi sauva le Valois, quoique le François, né Gaulois, fût sacrifié à Francès italien, La loi échappa aussi, parce qu’à la cour on n’en parlait pas ; la foi fut sauvée, parce qu’elle était un mot de ralliement dans ces temps de guerre intestine. […] Il avait pu croire aussi l’autorité de l’exemple si puissante que personne n’y ait échappé, et qu’ainsi toute apparence contraire était hypocrisie, et que le poète comique qui démasquerait cette hypocrisie, servirait les mœurs et la justice.

1190. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VIII, les Perses d’Eschyle. »

Au lieu de l’échappé de la défaite qui se lamentait tout à l’heure, on croit entendre un héraut radieux, lancé par une armée victorieuse, qui tombe, comme du ciel, sur la place publique, et raconte sa délivrance au peuple resté dans la ville, en jetant au pied d’un autel des faisceaux de palmes. […] Les héros épiques ne les approchent qu’avec des prières. — Ulysse, échappé de son radeau englouti, nage deux jours contre les flots courroucés.

1191. (1772) Éloge de Racine pp. -

Et combien cette générosité, qui n’échappe pas au spectateur, la rend plus attendrissante ! […] Le crime et la vertu, représentés, l’un par Narcisse, l’autre par Burrhus, et se disputant l’ame de Néron, formaient un tableau sublime, mais qui devait d’abord échapper aux regards de la foule.

1192. (1913) La Fontaine « VIII. Ses fables — conclusions. »

Je voudrais être en lieu d’où je pusse aisément Contempler la foule importune De ceux qui cherchent vainement Cette fille du Sort de royaume en royaume, Fidèles courtisans d’un volage fantôme. » Quand ils sont près du bon moment, L’inconstante aussitôt à leur désir échappe. […] Et tout le petit peuple en question s’échappe et se disperse dans toutes les directions.

1193. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Taine » pp. 305-350

Par là, il échappait à cette double bassesse de toute popularité. […] Deux ou trois fois peut-être, dans cet épouvantable récit, dans ce fleuve de citations qui roule le Jacobinisme et ses cadavres, quelques mots vengeurs — des mots à la Tacite — lui échappent.

1194. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Lettres de la mère Agnès Arnauld, abbesse de Port-Royal, publiées sur les textes authentiques avec une introduction par M. P. Faugère » pp. 148-162

Mais si je ne craignais de blesser quelques bonnes âmes restées peut-être encore jansénistes au pied de la lettre, je dirais tout simplement qu’après avoir bien considéré les incidents et les personnages de ce drame intérieur, je suis persuadé que la mère Agnès, livrée à elle-même et à sa propre nature, eût été plus soumise qu’elle ne l’a été, qu’elle était portée, comme elle l’a écrit un jour, à l’indifférence sur ces questions de controverse, mot très sage chez une religieuse et dont elle eut tort ensuite de se repentir ; je dirais que la manière indulgente dont elle continua de traiter une de ses nièces qui avait signé ce qu’exigeait l’archevêque et ce que conseillait Bossuet, que la parole tolérante qui lui échappa alors : « À Dieu ne plaise que je domine sur la foi d’autrui ! 

1195. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. Louis de Viel-Castel » pp. 355-368

La déclaration de Saint-Ouen, « malgré les lacunes et les ambiguïtés calculées du texte » qui échappèrent alors à tous ceux qui n’étaient pas dans le secret, suffisait pourtant et ouvrait carrière à tout un régime nouveau qui allait avoir son cours et son développement.

1196. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « M. Viguier »

J’ai tout à l’heure prononcé le mot de candeur : entendons-nous bien, cet homme de simplicité et de modestie n’était nullement dupe, et quand l’amitié ne l’enchaînait pas, il pénétrait avec bien de la sagacité ses grands contemporains universitaires : quelques lignes sur eux qui lui échappaient à l’occasion, tracées de son encre la plus légère, seraient, si on les détachait, tout un jugement135.

1197. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET (La Confession d’un Enfant du siècle.) » pp. 202-217

Une expérience secrète qu’on ménage, qu’on dissimule parfois, est plus profonde et plus vraie encore : quand elle s’échappe à distance, par moments, elle impose davantage, et elle se fait croire.

1198. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  premier article .  » pp. 326-341

La structure des vers lyriques, la cadence des vers dramatiques, échappent volontiers, et je n’oserais répondre qu’à force d’application l’oreille des érudits l’ait en effet reconquise ; le vers d’Homère, large et régulier, est d’une mesure aussitôt intelligible et sensible à tous ; l’harmonie, cette portion si essentielle du poëte, ne reste pas un seul moment absente avec lui : en le lisant, nous l’entendons chanter.

1199. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Lettres de Rancé abbé et réformateur de la Trappe recueillies et publiées par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont-Ferrand. »

J’y trouve assez de goût pour croire que je ne m’ennuierai point de la vie que je fais… » Mais, après cette sorte d’étape et ce premier temps de repos, Rancé se relève et se met en marche pour une pénitence infatigable et presque impitoyable, à l’envisager humainement : « Je vous assure, Monsieur, écrit-il à l’abbé Favier (24 janvier 1670), que depuis que l’on veut être entièrement à Dieu et dans la séparation des hommes, la vie n’est plus bonne que pour être détruite ; et nous ne devons nous considérer que tanquam oves occisionis. » A côté de ces austères et presque sanglantes paroles, on ne peut qu’être d’autant plus sensible aux témoignages constants de cette affection toujours grave, toujours réservée, mais de plus en plus profonde avec les années, qu’il accorde au digne vieillard, son ancien maître ; les jours où, au lieu de lui dire Monsieur, il s’échappe jusqu’au très-cher Monsieur, ce sont les jours d’effusion et d’attendrissement.

1200. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mémoires de Casanova de Seingalt. Écrits par lui-même. »

Ce Vénitien, issu de sang espagnol, qui compte dans sa généalogie force bâtards, religieuses enlevées, poètes latins satiriques, compagnons de Christophe Colomb, secrétaires de cardinaux, et une mère comédienne ; ce jeune abbé, qui débute fraîchement comme Faublas et Chérubin, mais qui bientôt sent l’humeur croisée de Lazarille et de Pantalon bouillonner dans sa veine, qui tente tous les métiers et parle toutes les langues comme Panurge ; dont la vie ressemble à une comédie mi-partie burlesque et mi-partie amoureuse, à un carnaval de son pays qu’interrompt une atroce captivité ; qui va un jour visiter M. de Bonneval à Constantinople, et vient à Paris connaître en passant Voisenon, Fontenelle, Carlin, et être l’écolier du vieux Crébillon ; ce coureur, échappé des Plombs, mort bibliothécaire en un vieux château de Bohême, y a écrit, vers 1797, à l’âge de soixante et douze ans, ses Mémoires en français, et dans le meilleur et le plus facile, dans un français qu’on dirait naturellement contemporain de celui de Bussy.

1201. (1874) Premiers lundis. Tome II « Hippolyte Fortoul. Grandeur de la vie privée. »

S’il y a quelque anachronisme ici, il n’est pas choquant, et on l’accepte, parce qu’il laisse jour aux accents les plus généreux échappés à l’âme de l’auteur.

1202. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIII. Des tragédies de Shakespeare » pp. 276-294

Celui qui souffre, celui qui meurt en produisant un grand effet quelconque de terreur ou de pitié, échappe à ce qu’il éprouve pour observer ce qu’il inspire ; mais ce qui est énergique dans le talent du poète ; ce qui suppose même un caractère à l’égal du talent, c’est d’avoir conçu la douleur pesant tout entière sur la victime : et tandis que l’homme a besoin d’appuyer sur ceux qui l’entourent jusqu’au sentiment même de sa prospérité, l’énergique et sombre imagination des Anglais nous représente l’infortuné séparé par ses revers, comme par une contagion funeste, de tous les regards, de tous les souvenirs, de tous les amis.

1203. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre III. L’écrivain »

Il ne leur accorde guère qu’une obéissance extérieure et machinale ; à toute occasion il s’échappe en escapades ; son plus grand plaisir est de remarquer qu’il n’est pas leur dupe, et de le faire remarquer à son voisin.

1204. (1892) Boileau « Chapitre III. La critique de Boileau. La polémique des « Satires » » pp. 73-88

Et la marque infaillible de sa vocation, la voici : tandis que les poètes, qui sont essentiellement et éminemment poètes, ne font guère que la théorie de leur talent, érigeant en bornes de l’art leurs impuissances et leurs procédés en lois, celui-ci échappe à la tyrannie du tempérament : il explique ce qu’il ne sait faire ; il conçoit un art supérieur au sien ; sa théorie est infiniment plus vaste et plus haute que sa pratique.

1205. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « I. Leçon d’ouverture du Cours d’éloquence française »

Que Larroumet ait donné à son auteur un peu de cette sympathie complaisante à laquelle, quand on passe quatre ou cinq ans en tête à tête avec un écrivain, on n’échappe que par la haine et en concevant la passion de le démolir : c’est bien possible.

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