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37. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

La valeur littéraire des œuvres d’érudition se mesure à deux caractères : la quantité de pensée philosophique impliquée ou suggérée ; l’intensité de vie concrète exprimée ou dégagée. […] Très au courant de la science allemande comme de l’érudition française, fortement influencé par Renan, mais s’interdisant d’aborder directement les controverses brûlantes comme de discuter abstraitement les questions philosophiques, M.  […] Mais, ici, l’intérêt philosophique dépasse l’intérêt d’érudition ou d’histoire. […] Pour des raisons philosophiques, il a cessé de croire à la tradition catholique, et il est sorti du séminaire. […] L’idéalisme philosophique n’est pas à l’usage de-toutes les intelligences : l’idéalisme religieux est accessible aux plus humbles esprits.

38. (1913) La Fontaine « VIII. Ses fables — conclusions. »

Les deux catégories de fables dont je n’avais pas pu vous parler la dernière fois sont, comme je l’avais annoncé du reste, les suivantes : les fables qui ne sont pas des fables, qui sont des causeries philosophiques ou des discours philosophiques ou, puisque La Fontaine parle le plus souvent en dialogues, des « dialogues philosophiques », comme on en faisait dans l’antiquité et comme Renan en a fait en France. […] Mais cela ne fait rien à l’exposition de cette doctrine philosophique qui est quelque chose comme un milieu, un intermédiaire entre l’épicurisme et le stoïcisme. […] Le caractère de discours philosophique est encore plus marqué dans l’Astrologue qui se laisse tomber dans un puits. […] L’Astrologue qui se laisse tomber dans un puits est un pur discours philosophique. […] Vous savez que ce ne sont pas là banalités philosophiques ou oratoires.

39. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIII. Des tragédies de Shakespeare » pp. 276-294

Les modernes, et surtout Shakespeare, trouvent de plus profondes sources d’émotions dans la nécessité philosophique. […] Shakespeare, dans Macbeth, admet du fatalisme ce qu’il en faut pour faire pardonner au criminel ; mais il ne se dispense pas, par ce fatalisme, de la gradation philosophique des sentiments de l’âme. […] Il y a toujours quelque chose de philosophique dans le surnaturel employé par Shakespeare. […] Les guerres civiles et l’esprit philosophique ont corrigé de ce faux goût ; car le malheur, dont les impressions ne sont que trop vraies, exclut les sentiments affectés, et la raison fait disparaître les expressions qui manquent de justesse. […] Parmi la foule de traits philosophiques que l’on remarque dans les pièces de Shakespeare, même les moins célèbres, il en est un qui m’a singulièrement frappée.

40. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VII. Du style des écrivains et de celui des magistrats » pp. 543-562

Du style des écrivains et de celui des magistrats Avant que la carrière des idées philosophiques excitât en France l’émulation de tous les hommes éclairés, les livres où l’on discutait avec finesse des questions de littérature ou de morale, lorsqu’ils étaient écrits avec élégance et correction, obtenaient un succès du premier ordre. […] Dans les sciences exactes, vous n’avez besoin que des formes abstraites ; mais dès que vous traitez tout autre sujet philosophique, il faut rester dans cette région, où vous pouvez vous servir à la fois de toutes les facultés de l’homme, la raison, l’imagination et le sentiment ; facultés qui toutes concourent également, par divers moyens, au développement des mêmes vérités. Fénelon accorde ensemble les sentiments doux et purs avec des images qui doivent leur appartenir ; Bossuet, les pensées philosophiques avec les tableaux imposants qui leur conviennent ; Rousseau, les passions du cœur avec les effets de la nature qui les rappellent ; Montesquieu est bien près, surtout dans le Dialogue d’Eucrate et de Sylla, de réunir toutes les qualités du style, l’enchaînement des idées, la profondeur des sentiments et la force des images. […] Il ne faut rien exclure ; mais on doit convenir que les livres philosophiques qui n’en appellent jamais ni au sentiment, ni à l’imagination, servent d’une manière beaucoup moins utile à la propagation des idées, et que les ouvrages de littérature qui ne sont point remplis d’idées philosophiques, ou de cette mélancolie sensible qui retrace les grandes pensées, captivent tous les jours moins le suffrage des hommes éclairés. Un livre sur les principes du goût, sur la peinture, sur la musique, peut être un livre philosophique, s’il parle à l’homme tout entier, s’il réveille en lui les sentiments et les pensées qui agrandissent toutes les questions.

41. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 152-153

Son ton est plus hardi que philosophique ; ses plaisanteries plus indécentes qu’agréables ; ses discussions plus pédantesques qu’instructives. […] C’est ce noble courage qui a enfanté la Philosophie du bon sens, les Lettres Juives, les Lettres Cabalistiques, les Lettres Chinoises, les Songes philosophiques. Aujourd’hui on est assez généralement dégoûté de toutes ces miseres ; les sots même commencent à s’appercevoir que ses Lettres Juives ne sont qu’un répertoire de scandales & de mensonges ; sa Philosophie du bon sens, une compilation d’absurdités & de contradictions ; ses Lettres Cabalistiques, un fatras de satires & de redites ; ses Lettres Chinoises, un recueil d’observations communes & de déclamations ennuyeuses ; ses Songes philosophiques, un amas de chimeres & de visions ; ses Romans, une source d’ennui & de dégoût.

42. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VII. De la littérature latine, depuis la mort d’Auguste jusqu’au règne des Antonins » pp. 176-187

On peut observer une marche à peu près pareille depuis Auguste jusqu’aux Antonins, avec cette différence cependant, que les empereurs qui ont régné pendant ce temps, ayant été des monstres abominables, l’empire n’a pu se soutenir, l’esprit général a dû se dégrader, et un très petit nombre d’hommes ont conservé la force d’esprit nécessaire pour se livrer aux études philosophiques et littéraires. […] Les écrivains de la troisième époque de la littérature latine n’avaient pas encore atteint à la connaissance parfaite, à l’observation philosophique des caractères, telle qu’on la voit dans Montaigne et La Bruyère ; mais ils en savaient déjà plus eux-mêmes : l’oppression avait renfermé leur génie dans leur propre sein. […] Sous la tyrannie des empereurs, il n’était ni permis ni possible de remuer le peuple par l’éloquence ; les ouvrages philosophiques et littéraires n’avaient point d’influence sur les événements publics. […] Les pensées philosophiques se rallient à tous les sentiments de l’âme ; les sciences vous transportent dans un tout autre ordre d’idées. […] L’esclavage qui mettait une classe d’hommes hors des devoirs de la morale, le petit nombre des moyens qui pouvaient servir à l’instruction générale, la diversité des sectes philosophiques qui jetait dans les esprits de l’incertitude sur le juste et l’injuste, l’indifférence pour la mort, indifférence qui commence par le courage et finit par tarir les sources naturelles de la sympathie ; tels étaient les divers principes de la cruauté sauvage qui a existé parmi les Romains.

43. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre premier. Idée générale de la seconde Partie » pp. 406-413

peut-être l’empire d’anciennes habitudes ne permet-il pas que cet événement puisse amener de long temps ni une institution féconde, ni un résultat philosophique. […] Les nouveaux progrès littéraires et philosophiques que je me propose d’indiquer, continueront le développement du système de perfectibilité dont j’ai tracé la marche depuis les Grecs. […] Il faut vaincre le découragement que font éprouver de certaines époques de l’esprit public, dans lesquelles on ne juge plus rien que par des craintes ou par des calculs entièrement étrangers à l’immuable nature des idées philosophiques. […] Cherchons-le donc cet avenir, dans les productions littéraires et les idées philosophiques.

44. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Argument » pp. 249-250

De la sagesse philosophique que l’on attribue à Homère. […] Observations philosophiques et philologiques, qui doivent servir à la découverte du véritable Homère. La plupart des observations philosophiques rentrent dans ce qui a été dit au second livre, sur l’origine de la poésie.

45. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — II. Sur la traduction de Lucrèce, par M. de Pongerville »

Sainte-Beuve n’eût été occupé désormais que de la pensée philosophique. […] Il aurait déployé, à propos de Lucrèce, toute sa profession de foi scientifique et philosophique ; il eût pleinement justifié la définition qu’une noble intelligence184 donna un jour de lui : « un croyant sans religion », montrant une fois de plus la nature de ses croyances basées sur ce que les connaissances humaines ont de plus positif et de plus grandiose. […] Si vous l’ignorez, lecteur, le voici : « On avait cru jusqu’à ce jour en France, et depuis Gassendi jusqu’à MM. de Fontanes et Villemain, que Lucrèce, esprit rêveur et mélancolique, jeté dans le monde à une époque d’anarchie et de discordes civiles, troublé de doutes et de terreurs philosophiques à la manière de Pascal et de Boulanger, voyant l’État s’abîmer dans les crimes, et ne sachant où la destinée humaine poussait l’homme ; on avait cru que pour échapper au vertige et ne pas glisser misérablement de ces hauteurs où l’avait emporté sa pensée, il s’était jeté en désespoir sur la solution d’Épicure, s’y attachant avec une sorte de frénésie triomphante, et que de là, dans quelques intervalles de fixité et de repos, il avait voulu enseigner à ses contemporains la loi du monde, la raison de la vie, et leur montrer du doigt le sentier de la sagesse. […] Pourtant la traduction achevée, les corrections arrêtées, il fallait prendre un parti sur le sens philosophique de ce poème tout philosophique. […] Depuis ce jour, l’estimable traducteur de Lucrèce appartient à une coterie littéraire et philosophique ; il a un rôle, on l’a averti dans l’oreille de prendre garde à son déisme de Lucrèce, et que cela pouvait nuire ; il a raccommodé sa préface ; il est le candidat de l’école sensualiste ; et ce n’est plus qu’à ses heures perdues et dans ses visites confidentielles qu’il peut encore s’épancher avec attendrissement sur l’Être suprême, la Providence, l’âme universelle et les harmonies touchantes du Poème de la nature.

46. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Ernest Renan, le Prêtre de Némi. »

Renan a exprimées déjà (dans les Dialogues philosophiques, dans Caliban, dans la Fontaine de Jouvence, dans les Souvenirs, dans l’article sur Amiel) ; vous y retrouverez son dilettantisme, son attitude en face du monde, son âme hautaine et tendre, caressante et ironique, attirante et fuyante. […] I Qu’il a bien fait de ressusciter cette vieille forme du conte, du dialogue, du drame philosophique, si fort en honneur au siècle dernier, et comme cette forme convient à son esprit ! […] Je me figure que le conte ou le drame philosophique serait le genre le plus usité dans cette cité idéale des esprits que M.  […] Au contraire, le conte ou le drame philosophique est le plus libre des genres, et ne vaut, d’autre part, qu’à la condition de ne rien exprimer d’insignifiant. […] L’Histoire des origines du christianisme elle-même tient beaucoup du conte philosophique.

47. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Gratry »

Le livre dont nous allons parler a été annoncé quand il parut comme une bonne nouvelle philosophique. […] Il n’y a plus d’être absolu. » Aussi, cela posé une fois pour toutes, l’abbé Gratry, avec la magnifique souplesse et la magnifique étendue de l’instrument logique dont il dispose, force-t-il la pensée philosophique à s’établir dans le terre-plein de l’humanité et de l’histoire, et, sous peine de se détruire elle-même, à n’en plus sortir. […] Tels sont, indiqués d’une main bien rapide, les points culminants d’un travail qui rétablit la tradition philosophique interrompue et jette la première arche du pont qui doit unir, par-dessus les eaux troubles du xviiie  siècle, la philosophie du xviie  siècle et la philosophie de notre temps. […] Le livre par lequel il débute dans l’invention philosophique est certainement un des plus substantiels que la philosophie ait produits. […] Il n’a nulle part cette froideur de caverne qu’ont parfois les méditations philosophiques, et l’on ne s’en étonnera pas.

48. (1890) L’avenir de la science « VIII » p. 200

Sa place dans l’organisation philosophique n’est pas encore suffisamment déterminée, les monographies s’accumulent sans qu’on en voie le but. […] Ici, comme dans toutes les sciences, il a pu être utile que la curiosité naturelle de l’esprit humain ait suppléé à l’esprit philosophique et soutenu la patience des chercheurs. […] J’affirme, pour ma part, qu’il n’est aucun de ces ouvrages où je n’aie puisé plus de choses philosophiques que dans toute la collection de Descartes et de son école. […] Elle est aux sciences de l’humanité ce que la physique et la chimie sont à la science philosophique des corps. […] Ceux qui déclament contre le style et la beauté de la forme dans les sciences philosophiques et morales méconnaissent la vraie nature des résultats de ces sciences et la délicatesse de leurs principes.

49. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre septième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie. »

Chapitre septième L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie. […] Aussi est-il impossible de méconnaître le rôle social et philosophique de la poésie et de l’art. « Le poète a charge d’âmes », a dit Hugo. […] Comparez une simple description poétique, quelque belle qu’elle soit, à une belle pièce inspirée par une idée ou par un sentiment vraiment élevé et philosophique : à mérite égal du poète, les vers purement descriptifs seront toujours inférieurs. […] La conception moderne et scientifique du monde n’est moins pas esthétique que la conception fausse des anciens.L’idée philosophique de l’évolution universelle est voisine de cette autre idée qui fait le fond de la poésie : vie universelle. […] Notre poésie française, heureusement, a été dans notre siècle de plus en plus animée d’idées philosophiques, morales, sociales.

50. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

… La science philosophique, ou ce qu’on appelle de ce nom, n’aboutissant, par tous ses rayons, qu’à un scepticisme inévitable, les philosophes ne sont guère plus que des gymnastes dans un exercice de l’esprit… Leur effort seul et la mesure de leur force, font tout leur mérite et leur gloire. […] Pour l’auteur des Dialogues philosophiques, c’est là le vrai. […] Et non pas la science philosophique, — parce que la science philosophique raisonne et que la vraie science ne raisonne pas, — mais la science qui compte les grains de poussière, la science qui suppute, la science atomistique, hypothétique, amphigourique, hiératique même, — les savants, pour M.  […] Madame Sand, cette forte jupe philosophique, comme on sait, avait fait à ce livre sa dernière révérence avant de s’en aller dans l’autre monde. […] Renan trouve très au-dessus du livre des Évangélistes et qui doivent durer quand le livre des Évangiles ne sera plus ; — c’est sur ces déclarations du solennel Trissotin philosophique que fut Marc-Aurèle, que M. 

51. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — II. » pp. 460-478

Par exemple, le paragraphe sur la Terreur que j’ai cité précédemment, et qu’on lit d’abord dans sa brochure de La Révision des jugements (1795), se retrouve textuellement au dernier chapitre de son livre sur L’Usage et l’Abus de l’esprit philosophique. […] On était alors en Allemagne dans une grande occupation du système philosophique de Kant ; Portalis s’en faisait rendre compte ainsi que des autres systèmes particuliers et chers à cette nature des cerveaux allemands, qui sont, comme dirait Rabelais, « grands abstracteurs de quintessence ». […] En dénonçant l’abus de l’esprit philosophique, l’auteur ne fait ni comme Bonald, ni comme de Maistre, ni même comme Rivarol ; il n’en accuse pas amèrement, il n’en proscrit pas absolument l’usage, et il se montre attentif à extraire du grand mouvement moderne tout ce qui sert la raison sans détruire la morale et l’État. Le bon sens et la bonne foi sont les deux caractères philosophiques de Portalis. […] Cette manière de concevoir ce qui nous environne et qui nous touche n’est peut-être pas la plus philosophique ni la plus profonde, mais c’est la plus raisonnable, celle qui est la plus conforme au milieu humain.

52. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 169-178

Ce n’est pas l’obscurité qu’on peut reprocher à ses Pensées Philosophiques ; elles sont très-claires. […] ou, pour parler selon l’ordre historique, ne sera-t-on pas étonné d’apprendre que des Ouvrages d’agrément ait été le prélude de ses Œuvres philosophiques ? […] Sera-t-il croyable qu’en se laissant aller à l’intempérance des idées, en prétendant annoncer la vérité dans des accès de délire, en faisant hurler la raison d’un ton d’énergumene, en étalant des maximes gigantesques, en combattant les sentimens reçus, en se parant d’une morgue plus burlesque que philosophique ; sera-t-il croyable que M. […] Ignorent-ils que les siecles de Périclès, d’Auguste, de Léon X, n’ont cessé d’être les beaux siecles de la Littérure & de la saine raison, que quand l’esprit philosophique a commencé à égarer & à abrutir les autres genres d’esprit ?

53. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Il y a des natures poétiques ou philosophiques qui restent jusqu’au bout, et à travers leurs diverses transformations, toujours opiniâtres, incandescentes, à la merci du tempérament. […] Ce génie, dans son idéal complet (et Bayle réalise cet idéal plus qu’aucun autre écrivain), est au revers du génie créateur et poétique, du génie philosophique avec système ; il prend tout en considération, fait tout valoir, et se laisse d’abord aller, sauf à revenir bientôt. […] Voltaire avait de plus son fanatisme philosophique, sa passion, qui faussait sa critique. […] Bayle, âgé de trente-neuf ans, poursuivait ses Nouvelles de la République des Lettres, publiait sa France toute catholique, contre les persécutions de Louis XIV, préparait son Commentaire philosophique, et en même temps, dans une note qu’il rédigeait Nouv. de la Rép. des Lett. […] La maladie qui lui survint l’année suivante (1687), par excès de travail, le força de se dédoubler, en quelque sorte, dans ce rôle à la fois littéraire et philosophique ; il dut interrompre ses Nouvelles de la République des Lettres.

54. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre I : Rapports de cette science avec l’histoire »

Jusqu’à l’époque où la géologie positive a été fondée, l’idée d’un passé de la nature, d’une évolution dans son développement, était reléguée parmi les hypothèses philosophiques. […] Sans doute les systèmes philosophiques ont en grande partie leurs causes dans l’état général de la civilisation et des mœurs. […] Si elle ne l’égale pas pour ces grandes et vastes compositions qui embrassent l’histoire tout entière, en revanche nous avons sur presque toutes les grandes écoles philosophiques des travaux étendus et approfondis où la force de la pensée s’unit souvent à la solidité de l’érudition et à la sagacité de la critique. […] Cousin a été, à n’en pas douter, l’initiateur et le guide de ce mouvement de recherches, et c’est la partie la moins contestable de sa gloire philosophique. […] Je néglige tout ce qu’il a écrit sur la philosophie moderne, ses livres sur Locke, sur Kant, sur l’école écossaise, qui sont des travaux de controverse philosophique plutôt que de critique historique, mais qui n’en ont pas moins contribué à répandre parmi nous la connaissance des écoles modernes.

55. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

La partie historique et philosophique a conservé un tout autre attrait. […] — Enseignement littéraire et philosophique. […] Mouvement des idées philosophiques sur la fin de l’empire. — Royer-Collard […] Frayssinous et la marche de renseignement philosophique de M.  […] C’est l’âge philosophique du génie poétique de

56. (1828) Préface des Études françaises et étrangères pp. -

La poésie, repoussée des salons, va encore se briser, comme sur un écueil, contre le stoïcisme des têtes exclusivement philosophiques ou politiques. […] Et qu’on ne dise pas que dans un siècle comme le nôtre, où les sciences politiques et les études philosophiques sont portées à un si haut degré de perfection, les poètes ne peuvent plus acquérir la prépondérance qu’ils avaient dans les âges moins éclairés ; les hautes renommées de Goethe au milieu de la philosophique Allemagne, et de Byron dans le pays natal de la politique, sont là pour démentir ce préjugé trop répandu. […] Les besoins philosophiques et historiques du siècle sont admirablement bien servis par les cours de MM.  […] Casimir de la Vigne, œuvre essentiellement philosophique, qui peut-être n’a pas cet intérêt vulgaire que cherche d’abord la foule, mais qui frappe tous les esprits distingués par des situations fraîches, des caractères créés et par un style de poète. […] Lemercier est un poème non-seulement très intéressant et très philosophique, mais encore plein de beautés de style ; nous dirons avec beaucoup plus de monde, que l’Académie française a oublié M. 

57. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IX. L’abbé Mitraud »

Mais, si ce n’est pas le même malheur et le même sentiment d’impuissance qui unissent si tendrement, pour le quart d’heure, les écrivains philosophiques de ce temps et M. l’abbé Mitraud, il faut donc qu’il y ait dans le livre de ce dernier un fonds de choses qui soit un terrain commun où ils se rencontrent et s’embrassent, une petite île des Faisans quelconque où le prêtre et le philosophe passent leur traité des Pyrénées. […] Ce livre qui nous promet un système ne le donne point : il nous l’annonce, et après des réfutations tardives de doctrines épuisées, réfutations qui ne peuvent pas passer décemment pour des prolégomènes, il nous renvoie au numéro prochain, c’est-à-dire à un second volume qu’il nous faut attendre pour juger la valeur philosophique de M.  […] La sonnette du lépreux s’entendait avant qu’on ne vît le pauvre malade… M. l’abbé Mitraud, qui a, selon nous, dans la pensée, la contagion des maladies spirituelles contemporaines, fait entendre à nos cœurs et à nos esprits une triste sonnette dans ce premier écrit, où sa personnalité philosophique, c’est-à-dire sa théorie, ne paraît pas encore, mais s’annonce. […] Il est évident, en effet, qu’au-dessous de toute cette battologie philosophique, l’auteur de la Nature des sociétés humaines ne sait pas ce qu’on doit entendre par ce mot de société dont il se sert, et qu’il en confond la notion métaphysique avec la notion historique des différents peuples qui se sont agités sur la terre et se sont efforcés de réaliser cet idéal de société qui, pour l’incrédule, n’est qu’une ironie et pour le chrétien qu’une aspiration ? […] Sorte de harpe éolienne philosophique, qui donne des notes et ne joue pas d’airs !

58. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Henri Heine »

Le xixe  siècle, que j’aurai l’insolence réfléchie d’appeler, malgré les positivismes qu’il invente et les prétentions qu’il affecte, le siècle du scepticisme absolu, du touche-à-tout philosophique, — et de l’écroulement de tout sous ses mains toucheuses, — n’a pas la cuirasse d’une seule conviction à lacer sur le sein nu et délicat de ses poètes… et Heine en a fait l’expérience. Né juif, devenu protestant, mais ne croyant pas plus au judaïsme qu’au protestantisme, d’un pays où les châteaux de cartes philosophiques se succèdent avec la plus volubile rapidité et où chacun d’eux ne dépasse pas un équilibre de plus de quinze ans, il a joué avec ces petites constructions. […] Une des originalités les plus singulières de Henri Heine, qui en a plusieurs, c’est la compréhension philosophique. […] Jamais son intelligence n’est plus puissante que quand il enlève, à bout de bras, ces haltères philosophiques comme des plumes, et qu’il les casse, en les laissant retomber, comme des porcelaines qu’on ne recollera jamais plus. Qualité plus étonnante que les autres, que cette faculté philosophique, se retournant contre la philosophie, en cette ironique tête de poète !

59. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIX. De la littérature pendant le siècle de Louis XIV » pp. 379-388

La littérature, dans le siècle de Louis XIV, était le chef-d’œuvre de l’imagination ; mais ce n’était point encore une puissance philosophique, puisqu’un roi absolu l’encourageait, et qu’elle ne portait point ombrage à son despotisme. […] Corneille, plus rapproché des temps orageux de la Ligue, montre souvent dans ses tragédies le caractère républicain ; mais quel est l’auteur du siècle de Louis XIV dont l’indépendance philosophique peut se comparer à celle des écrits de Voltaire, de Rousseau, de Montesquieu, de Raynal, etc. ? […] L’indépendance républicaine doit donc chercher à imiter la correction des auteurs du siècle de Louis XIV, pour que les pensées utiles se propagent, et que les ouvrages philosophiques soient en même temps des ouvrages classiques en littérature. […] De nos jours, si le pouvoir absolu d’un seul s’établissait en France, il nous manquerait ce recours à des idées majestueuses, à des idées qui, planant sur l’espèce humaine entière, consolaient des hasards du sort ; et la raison philosophique opposerait moins de digues à la tyrannie, que l’indomptable croyance, l’intrépide dévouement de l’enthousiasme religieux.

60. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » pp. 540-543

Bossuet, qu’ils avoient une façon de penser toute philosophique, & que s’ils étoient nés à Londres, ils auroient donné l’essor à leur génie, & déployé leurs principes, que personne n’a bien connus, s’il n’avoit voulu grossir la Liste philosophique de deux noms, qui en seront toujours le fléau ? […] Rousseau, l’Abbé Desfontaines, M. de Maupertuis, &c. que nous avons traités d’une maniere plus conforme à la vérité, dans le Tableau philosophique de l’Esprit de M. de Voltaire.

61. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Chapitre neuvième Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). […] Une parodie de la poésie philosophique : les Blasphèmes. […] Par malheur, au lieu de ce lyrisme philosophique, nous trouvons bientôt un résumé abstrait de toute l’histoire de la philosophie, en vers mnémotechniques. […] Au reste, nous n’exigeons pas du poète l’originalité des idées philosophiques, mais nous lui demandons l’originalité du sentiment philosophique. […] La poésie, à notre époque, cherche sa voie, et, d’instinct, elle la cherche dans la direction des idées philosophiques, scientifiques, sociales.

62. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 326-344

La manie philosophique est venue renforcer la bonne opinion qu'il avoit de ses talens, & a achevé de répandre sur ses idées & sur ses expressions une morgue empesée & sentencieuse, qui défigure totalement son style. […] Cependant on a vu couronner, on a vu applaudir un pareil galimatias ; on a vu le Corps Philosophique s'empresser d'en adopter l'Auteur ; on a vu les Coryphées qui y président, nous retracer la Scene plaisante où le Médecin de M. […] Les Femmes ont compris que le vernis philosophique étoit celui de tous qui leur convenoit le moins, & le Recruteur philosophe s'est consumé en pure perte. […] Puisqu'il paroît si disposé à profiter des leçons qu'on lui donne, nous l'inviterons à porter les derniers coups au vice radical, qui sera toujours l'ennemi de ses talens, c'est-à-dire, à se défaire de cette morgue philosophique dont il ne paroît pas encore sentir assez les travers ; à se persuader qu'il ne saura jamais bien écrire, que quand sa diction sera pleinement modeste & naturelle ; que ce n'est pas être lumineux, que de s'attacher à des pensées plus compliquées que nettes & animées ; que ce n'est pas être élégant, que d'employer des tours pénibles & des expressions étrangeres aux idées ; que c'est être bien loin de l'éloquence, que de n'avoir que cette espece de sentiment qui naît de l'imagination, & non celui dont la source est dans le cœur. […] Réflexions philosophiques & littéraires sur le Poëme de la Religion naturelle, vol. 

63. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Taine » pp. 231-243

Il s’est engagé pour de bon dans le régiment philosophique. […] De ces deux Études, la meilleure pour moi est celle qui porte le nom de Carlyle, et non seulement pour la raison que j’ai déjà signalée, c’est-à-dire les doubles facultés qui semblent s’exclure d’ordinaire et qui se réunissent dans Carlyle, cet esprit puissant et bizarre, et aussi parce que les préférences philosophiques qui me gâtent M.  […] Taine la vérité philosophique, devrait saisir et animer beaucoup plus sa pensée que l’idéaliste Carlyle, cet excentrique à moitié fou et à moitié sublime, et c’est justement le contraire qui est arrivé. […] C’est ainsi qu’il a fait sortir des analyses les plus ingénieuses et les plus subtiles un Carlyle très complet et très contrasté, lequel, malgré tout ce qui aurait dû, dans ce vieux puritain halluciné, répugner à la raison philosophique de M.  […] Taine a incarné le positivisme anglais (l’épithète ne fait rien à la chose), n’est rien de plus qu’un soldat de la compagnie du centre dans le régiment philosophique pour l’heure en marche, et quelque jour nous nous chargerons, ses livres en main, de le démontrer… C’est un esprit d’une certaine force d’observation et de déduction, on ne le nie pas, mais qui ne fait guère que mettre en langage moderne l’expérience de Bacon et la sensation de Locke, — ayant pour grands amis, comme dit M. 

64. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVI. Médecine Tessier »

Les prétentions du temps actuel sont philosophiques. […] L’Esprit philosophique a mis partout sa main insolente ; il faut partout la lui couper. […] Tessier est, au contraire, une intelligence philosophique. […] Seulement, tout métaphysicien qu’il puisse être, l’auteur des Études de médecine générale est encore plus traditionaliste que philosophe, et il laisse à sa vraie place la métaphysique dans la hiérarchie de nos facultés et de nos connaissances, en homme qui sait que, sans l’histoire, les plus grands génies philosophiques n’auraient jamais eu sur les premiers principes que quelques sublimes soupçons… M. le docteur Tessier, qui croit à la science médicale, qui la défend contre les invasions sans cesse croissantes de la physique, de la chimie et d’une physiologie usurpatrice, donne pour chevet à ses idées le récit Moïsiaque, dont tout doit partir pour tout expliquer, et l’enseignement théologique et dogmatique de l’Église. […] Sans le chrétien Napoléon, qui se mit tout à coup à faire les affaires de Dieu, et quelques esprits du plus haut parage, comme le vicomte de Bonald, qui, par parenthèse, traita Cabanis dans ses Recherches philosophiques comme plus tard M. de Maistre traita Bacon, le Matérialisme passait presque à l’état d’institution politique.

65. (1890) L’avenir de la science « XX »

On lisait sur le fronton de telle école antique : « Que nul n’entre ici s’il ne sait la géométrie. » L’école philosophique des modernes porterait pour devise : « Que nul n’entre ici s’il ne sait l’esprit humain, l’histoire, les littératures, etc. » La science perd toute sa dignité quand elle s’abaisse à ces cadres enfantins et à ce langage qui n’est pas le sien. Pour rendre intelligibles au vulgaire les hautes théories philosophiques, on est obligé de les dépouiller de leur forme véritable, de les assujettir à l’étroite mesure du bon sens, de les fausser. […] Quant aux écrits sociaux et philosophiques, où la forme est moins exigeante qu’en littérature, les ouvriers y déploient souvent une intelligence supérieure à celle de la plupart des lettrés. […] L’Angleterre, le pays de la richesse, est de tous les pays civilisés le plus nul pour le développement philosophique de l’intelligence.

66. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Alaux. La Religion progressive » pp. 391-400

Alaux, avec sa Religion progressive, ce doit être encore, celui-là, un postillon philosophique de ce temps, qui ne court pas seulement la poste vers la vérité, mais qui croit que la vérité n’est qu’une poste ou plusieurs postes à courir ! […] tout aussi bien qu’un autre, la coquetterie de sa plaque de postillon philosophique qu’ils lui ont délivrée, à quelque École normale ou l’on tient de ces choses-là ! […] Il plonge, comme eux, dans le torrent des lieux communs philosophiques qui nous déborde et nous submerge. […] ce n’est point avec un esprit naturellement et exclusivement propre à l’analysent des doctrines philosophiques sans nouveauté et auxquelles on a deux cents fois répondu, qu’on peut faire sortir de sa tête une synthèse de la force d’une religion, progressive ou non progressive.

67. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Il ne serait pas besoin aujourd’hui d’une initiation spéciale pour suivre dans ses libres développements la poésie qui s’inspirerait des découvertes contemporaines, de leurs applications, de leurs conséquences morales et philosophiques. […] Sachons ne pas savoir, c’est la vraie démarche philosophique et la conclusion de cette ingénieuse dissertation où Spinosa ne semble triompher d’abord que pour succomber à la fin sous la critique de Kant. — « Sachons ne pas savoir », je note le mot, il est caractéristique ; il trahit une disposition philosophique qui a sa raison d’être, puisqu’elle est celle de beaucoup d’esprits distingués en ce temps ; mais ce n’est pas assurément une disposition poétique. […] L’importance du sujet et l’étendue des développements donnés à la pensée philosophique méritent que la critique s’y arrête pour le signaler. […] Nous ne pourrons donner qu’une idée bien incomplète de ce poème ; si philosophique qu’il soit, un poème ne s’analyse pas comme un traité. […] Voir, dans la Revue du 15 mai 1874, notre étude sur les Poésies philosophiques, de L. 

68. (1890) L’avenir de la science « XXII » pp. 441-461

Ils croient faire l’apologie du christianisme en riant de tout ce qui est sérieux et philosophique. […] Il y a, je le sais, un rire philosophique, qui ne saurait être banni sans porter atteinte à la nature humaine ; c’est le rire des Grecs, qui aimaient à pleurer et à rire sur le même sujet, à voir la comédie après la tragédie, et souvent la parodie de la pièce même à laquelle ils venaient d’assister. […] Le premier pas dans la carrière philosophique est de se cuirasser contre le ridicule. […] voilà de belles choses qui se fondent pour l’avenir. » Les grandes apparitions sont toujours accompagnées d’extravagances ; elles n’arrivent à une grande puissance que quand des esprits philosophiques leur ont donné la forme. […] Ou bien encore l’érudition spirituelle de Barthélemy, qui, pour être d’un ordre plus élevé, n’est pourtant pas encore la grande manière philosophique et scientifique.

69. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre premier. De la première époque de la littérature des Grecs » pp. 71-94

C’est Homère qui caractérise la première époque de la littérature grecque : pendant le siècle de Périclès, on remarque les rapides progrès de l’art dramatique, de l’éloquence, de la morale et les commencements de la philosophie : du temps d’Alexandre, une étude plus approfondie des sciences philosophiques devient l’occupation principale des hommes supérieurs dans les lettres. […] Il en est de même de la poésie d’images et de celle qui contient des idées philosophiques. […] Il ne s’ensuit pas que, pour faire de beaux vers, il fallût de nos jours renoncer aux pensées philosophiques que nous avons acquises. […] Les progrès des Grecs, sous les rapports philosophiques, sont extrêmement faciles à suivre. […] L’incertitude de la morale, dans ces temps reculés, n’est point une preuve de corruption ; elle indique seulement combien les hommes avaient alors peu d’idées philosophiques ; tout les détournait de la méditation, rien ne les y ramenait.

70. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VI, « Le Mariage de Figaro » »

Diffusion de l’esprit philosophique : salons, gens du monde et femmes. […] Valeur et sens politique de la pièce : image de l’état d’esprit de la société française après la prédication philosophique. […] Diffusion de l’esprit philosophique La diffusion des doctrines philosophiques à travers la société française se fait avec une prodigieuse puissance. […] Mais le plus célèbre et le plus influent des salons philosophiques fut celui de Mlle de Lespinasse573, l’ancienne lectrice de Mme du Deffand. […] Il fait jouer en 1787 l’opéra philosophique de Tarare, en 1792 la Mère coupable.

71. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Entre leurs mains l’éclectisme ou spiritualisme est devenu de moins en moins philosophique et de plus en plus correct. […] Ainsi accaparé, il a supprimé la philosophie philosophique, laissant entières les objections anciennes, répétant les démonstrations anciennes, effaçant les questions de science, réduisant la science à une machine oratoire d’éducation et de gouvernement. […] Composé d’expressions philosophiques, il semble introduire partout la philosophie. […] Qui n’eût été ravi de respirer tant de bouquets philosophiques, si bien choisis, si bien formés, si éclatants, si habilement présentés par une main si légère, si variés, et pourtant variés par des transitions si fines, que tout le monde croyait n’en sentir qu’un seul ? […] Il n’a guère pour adversaires déclarés que des hommes pleins de bonhomie qui rédigent le calendrier et le bréviaire d’une religion future, ou des hommes pleins d’imagination qui fabriquent des épopées philosophiques en prose.

72. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre V. Le roman »

Je ne sais quelle estime un archéologue peut avoir pour le roman de Flaubert : pourtant il est sûr que l’œuvre n’est ni symbolique ni philosophique, mais strictement historique. […] Le fanatisme artistique de Flaubert n’est pas griserie d’imagination ni expansion de sympathie : c’est la dernière étape d’une pensée philosophique, qui n’a point voulu s’arrêter dans le scepticisme pessimiste. […] La pauvreté et la raideur des caractères individuels les inclinent à devenir des expressions symboliques909, et le roman tend à s’organiser en vaste allégorie, où plus ou moins confusément se déchiffre quelque conception philosophique, scientifique ou sociale, de mince valeur à l’ordinaire et de nulle originalité. […] Dans le développement de ses caractères, point d’outrance philosophique, point d’exclusion a priori de la psychologie. […] Mais surtout il a eu le don de la causerie philosophique : il excelle à faire dialoguer sur les questions actuelles de sociologie ou de science des personnages légèrement caractérisés et spirituellement excentriques915.

73. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

et généralement que toute cette littérature encyclopédique, — à force d’être philosophique, — ne manque de rien tant que de réalité, de substance et de vie ? […] Le parlement de Paris répond en condamnant au feu le Dictionnaire philosophique, 1765. […] L’Histoire de Charles XII, 1731, et les Lettres philosophiques. — D’où est venue à Voltaire l’idée d’écrire l’histoire de Charles XII ? […] I et III]. — Influence de Rousseau dans l’ordre philosophique, sur Kant [Cf.  […] Nolen, « Les Maîtres de Kant », dans la Revue philosophique] ; — et sur Fichte. — Son influence sur Jacobi et sur Schleiermacher. — Influence littéraire de Rousseau [Cf. 

74. (1874) Premiers lundis. Tome II « La Revue encyclopédique. Publiée par MM. H. Carnot et P. Leroux »

Une mise en présence aussi tranchée de deux intérêts différents, de deux portions de la société aussi inégales, de ceux qui ont et de ceux qui n’ont pas, ne nous paraît avoir aucun inconvénient dans une analyse philosophique, et peut même être commode pour manier, pour dégager certaines vérités sociales et les exprimer plus en saillie ; mais il n’en serait pas ainsi, suivant nous, dans la pratique. […] Sur les autres sujets d’investigation et de noble inquiétude où s’est aventurée la pensée ardente de ce siècle, la Revue encyclopédique conserve cette ligne avancée, ce poste honorable d’avant-garde philosophique, qu’il est toujours bon d’avoir essayé de tenir, même lorsque par endroits on serait contraint de se replier. […] Leroux, sur l’influence philosophique des études orientales ; ce sont des pages, sinon vraies de tout point, du moins d’une verve hardie et d’un remarquable éclat littéraire. […] Avec la capacité philosophique éminente qui distingue les écrivains de cette école, s’ils savent tempérer leur ardeur à généraliser, ne pas forcer les conséquences encore lointaines de principes seulement entrevus, ne pas les étendre dès l’abord à tout ; s’ils continuent d’exercer cette faculté de comprendre, cette chaleur sympathique de leur esprit, sur les sujets nombreux susceptibles de solutions partielles et incontestables, nul doute qu’ils ne fondent un honorable centre où bien des esprits se rallieront et où l’élite du public s’habituera de plus en plus.

75. (1897) L’empirisme rationaliste de Taine et les sciences morales

« L’empirisme rationaliste de Taine et les sciences morales » Ce qui me paraît constituer l’œuvre propre de Taine, c’est qu’il a contribué plus que personne à introduire et à vulgariser en France une tradition philosophique qui, avant lui, ne comptait parmi nous que bien peu de représentants : c’est ce qu’on pourrait appeler l’empirisme rationaliste. […] Grâce au brillant exposé qu’il en a fait, elle s’est répandue et est ainsi devenue un des facteurs de notre vie philosophique. […] Mais, en réalité, on n’a pu lui faire tenir le langage qu’on lui a prêté qu’en faussant les principes sur lesquels il repose. jamais, je crois, Taine, n’eût accepté de regarder la morale comme la simple conclusion d’un syllogisme dont telle ou telle théorie psychologique ou philosophique aurait fourni les prémisses. […] Comte pourrait être rattaché à la même lignée philosophique.

76. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — I »

Je me déclare incapable d’exprimer avec convenance l’admiration que m’inspire cette incomparable imagination philosophique, et surtout de retracer avec l’ordonnance nécessaire le développement de cet esprit volontaire qui voua un culte si fiévreux à la logique.‌ L’imagination philosophique, le don de rendre émouvantes les idées, de dramatiser les abstractions, voilà, en effet, le trait essentiel qu’il faut souligner, et souligner encore, chez M.  […] Nous l’admirons comme un type, parce qu’il a manifesté, plus qu’aucun homme de notre connaissance, ce don singulier qu’on appelle l’imagination philosophique.

77. (1828) Introduction à l’histoire de la philosophie

Mais un système philosophique, quel qu’il soit, peut-il être compris isolément ? […] Qu’est-ce en effet qu’une époque philosophique ? […] L’étude de la conscience, dans le dictionnaire philosophique, s’appelle psychologie. […] C’est là le triomphe de l’esprit philosophique. […] Or, quelles sont les formules philosophiques ?

78. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Les grandes causes philosophiques et politiques, les grands partis littéraires, une fois que l’influence leur échappe et que le monde tourne décidément à un autre cours d’idées, se rétrécissent, s’immobilisent, passent à l’état de secte et comme de petite Église ; ils tombent dans ce que j’appellerai une fin de jansénisme. […] Sabbatier mettent en avant à tout propos, Cabanis, Tracy, Garat, Ginguené, Daunou, Laromiguière, et quelques autres ; mais ces hommes n’étaient pas tous aussi unanimes que de loin, en les rangeant de front sur la même ligne, on voudrait nous le faire croire ; mais surtout ils n’ont pas eu de postérité littéraire et philosophique digne d’eux, et ceux qui se sont portés comme héritiers directs de leurs traditions les ont dès longtemps compromises en les rapetissant et en les outrant avec un véritable fanatisme. […] Sabbatier parmi ces héritiers compromettants, et nous en aurions presque le droit en lisant les paroles plus que sévères et les qualifications flétrissantes qu’il inflige à toutes doctrines littéraires et philosophiques qui ne sont pas les siennes. […] Il vient à Paris en 1804 ; déjà en correspondance avec Ginguené, il le visite tout d’abord et s’initie par lui au groupe philosophique et littéraire qui soutenait honorablement la cause des idées et celle de la république expirante. […] Cette théorie de l’invasion, qui impute à un fait national aussi douloureux et aussi désastreux que la catastrophe de 1814 et 1815 tout le libre mouvement de renaissance philosophique, historique et littéraire dont nous provenons, et qui essaye par là de le flétrir, n’est point d’ailleurs particulière à l’éditeur, et M.

79. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Victor Vousin. Cours de l’histoire de la philosophie moderne, 5 vol. ix-18. »

On y saisit bien à son point de départ et à son origine la moderne école philosophique qui est devenue plus tard l’éclectisme, et qui n’était encore à ce moment que le spiritualisme. […] Aussi, malgré les premiers étonnements et les hauts cris que soulève toute idée nouvelle, l’éclectisme, servi par la belle parole et l’infatigable activité de son promoteur, a fait fortune avec les années, et son nom est devenu celui même de l’école philosophique moderne. […] Telles qu’on les peut lire aujourd’hui, sous cette forme de révision sévère, la suite de leçons où figurent successivement tant de noms célèbres dans l’ordre philosophique ou moral, Helvétius, Saint-Lambert, Hutcheson, Smith, est d’un aimable autant que sérieux intérêt. […] Les premiers Fragments philosophiques n’étaient pas entièrement exempts de cette manière. […] Cousin de même, dans l’ordre oratoire ou dans les développements de l’écrivain, n’a qu’à se laisser aller à sa pente et comme à son torrent : s’il ne se préoccupe d’aucune démonstration philosophique trop spéciale, il trouvera d’emblée, il parlera ou écrira avec plénitude et de source cette belle langue du xviie  siècle qui fait l’objet de nos regrets et de nos admirations.

80. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XV. De l’imagination des Anglais dans leurs poésies et leurs romans » pp. 307-323

L’invention des faits surnaturels a son terme ; ce sont des combinaisons très bornées, et peu susceptibles de cette progression qui appartient à toutes les vérités morales, de quelque genre qu’elles soient : lorsque les poètes s’attachent à revêtir des couleurs de l’imagination les pensées philosophiques et les sentiments passionnés, ils entrent en quelque manière dans cette route où les hommes éclairés avancent sans cesse, à moins que la force ignorante et tyrannique ne leur enlève toute liberté. […] Leur supériorité consiste dans le talent d’exprimer vivement ce qu’ils voient et ce qu’ils éprouvent ; ils ont l’art d’unir intimement les réflexions philosophiques, aux sensations produites par les beautés de la campagne. […] Si l’on peut trouver de la monotonie dans l’Ossian, parce que ses images peu variées en elles-mêmes ne sont point mêlées à des réflexions qui puissent intéresser l’esprit, il n’en est pas ainsi des poètes anglais ; ils ne fatiguent point en s’abandonnant à leur tristesse philosophique : elle est d’accord avec la nature même de notre être, avec sa destinée. […] Pour que l’état politique et philosophique d’un pays réponde à l’intention de la nature, il faut que le lot de la médiocrité, dans ce pays, soit le meilleur de tous ; les hommes supérieurs, dans tous les genres, doivent être des hommes consacrés et sacrifiés même au bien général de l’espèce humaine. […] La plus féconde des idées philosophiques, le contraste des qualités naturelles et de l’hypocrisie sociale, y est mise en action avec un art infini, et l’amour, comme je l’ai dit ailleurs54, n’est que l’accessoire d’un tel sujet.

81. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Il est même à penser que sans cette circonstance de vaincu, qui touche la chevalerie française, la Critique, trop spirituelle pour ne pas vouloir être populaire, aurait passé bien vite par-dessus le Saint Anselme, de M. de Rémusat, sujet philosophique et qui ne peut intéresser qu’un très petit nombre d’esprits. […] En effet, M. de Rémusat a un passé philosophique comme il a un passé politique, et on les connaît tous les deux. […] Ainsi, pour revenir à Hegel, Hegel a eu le droit d’écrire cette arrogante réserve : « Il ne manque à l’argument de saint Anselme que la conscience de l’unité de l’être et de la pensée dans l’infini », et M. de Rémusat a eu le droit aussi, à la fin de son ouvrage, de reprendre l’argument du Prologium, afin de le purifier de tout spinozisme et de lui donner cette valeur philosophique que nous avons indiquée et qui serait si grande si elle n’était pas chimérique, à savoir : le rationalisme du principe sans le panthéisme de la déduction ! […] Grâce à cette théocratie, que M. de Rémusat condamne dans son livre par la raison très philosophique que l’opinion de l’Europe moderne, qui a la tête déformée par les philosophes, lui est, en ce moment, hostile, l’influence du monde chrétien avait pris le monde musulman et pénétré l’Asie et l’Afrique. […] Mais s’il l’a eue jamais, il l’a bien perdue dans les études microscopiques d’une philosophie qui analyse l’homme dans les moindres nuances de son ondoyante personnalité ; et il est permis, on en conviendra, de s’étonner qu’un homme, qui fut ministre autrefois, s’imagine probablement, sinon de reprendre le gouvernement qu’il a perdu, au moins l’influence dans les esprits, qui est du gouvernement aussi, en traitant de la résurrection des systèmes philosophiques au onzième siècle.

82. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 329-336

Les sentimens que l’Ecrivain leur inspire, surtout dans ses Elévations & ses Méditations, semblent agrandir & multiplier leur existence, & sont bien supérieurs aux, froids mouvemens que peut exciter une imagination péniblement exaltée, ou une vaine fermentation philosophique. […] M. de Voltaire, entre autres, n’a pas craint d’avancer que Bossuet avoit des sentimens philosophiques bien différens de sa Théologie. […] Nous nous contenterons de dire qu’il étoit aussi peu fondé à insinuer que Bossuet avoit des sentimens philosophiques différens de sa Théologie, que nous le serions en assurant que M. de Voltaire a eu des sentimens théologiques différens de sa philosophie.

83. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre III. Comédie et drame »

Essais de polémique philosophique et de satire aristophanesque. […] Ses journaux, où s’unissait la réflexion philosophique à la description pittoresque des mœurs, étaient dressés sur le plan du Spectateur, dont on avait donné des traductions dès 1715 : en revanche, sa Vie de Marianne inspirait Richardson. […] Ce fut donc aux Italiens que Marivaux donna ses délicates comédies d’analyse, et toute sorte de pièces philosophiques, allégoriques, mythologiques. […] Et il indique même des formes intermédiaires, et deux formes extrêmes : la farce bouffonne, et le drame philosophique. […] Il a raison aussi d’insister sur la capacité philosophique du genre dramatique : plus la forme devient réaliste, plus il est nécessaire qu’une idée profonde, une conception générale des rapports naturels ou sociaux tirent hors de l’insignifiance pittoresque la représentation exacte des apparences.

84. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

Les coureuses de bal masqué philosophique ou littéraire n’ont peut-être pas autant de pudeur à risquer, mais elles ont leur orgueil et elles l’exposent. […] n’aurait pas, j’imagine, beaucoup de respect pour les culottes philosophiques que sa petite-fille s’obstine à porter. Elles sont, en effet, philosophiques, ses culottes. […] Si je m’en souviens bien, elle a publié une histoire, à considérations philosophiques, sur la République de 1848, car elle est républicaine, Mme Stern. […] On reconnaîtrait le bas-bleu, — le bas-bleu savant, — qui ne tient pas à être artiste ; qui trouve qu’il y a mieux que l’art, c’est la pensée philosophique, et qui croit l’avoir au fond de son creux, comme on a une perle au fond d’une cruche.

85. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

La troisième, où « donner vie aux idées modernes, selon la science, sur l’avenir des mondes et de la Vie » : donc, philosophique et sociologique. […] Je note des tendances socialistes, humanitaires, Monsieur   Une partie de la pensée philosophique de M.  […] Mais tout demeure dans le domaine philosophique : nous ne nous occupons pas de politique  Bien. […] Même intelligible aux lettrés la poésie philosophique de M.  […] Du côté paternel : Facultés de création avec nécessité de construction harmonieuse et de plan, la tendance philosophique et le recours premiers à la connaissance, à la Science.

86. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Diderot »

L’œuvre de destruction commençait alors à s’entamer au vif dans la théorie philosophique et politique ; la tâche, malgré les difficultés du moment, semblait fort simple ; les obstacles étaient bien tranchés, et l’on se portait à l’assaut avec un concert admirable et des espérances à la fois prochaines et infinies. Diderot, si diversement jugé, est de tous les hommes du xviiie  siècle celui dont la personne résume le plus complétement l’insurrection philosophique avec ses caractères les plus larges et les plus contrastés. […] Tel devait être, au xviiie  siècle, l’homme fait pour présider à l’atelier philosophique, le chef du camp indiscipliné des penseurs, celui qui avait puissance pour les organiser en volontaires, les rallier librement, les exalter, par son entrain chaleureux, dans la conspiration contre l’ordre encore subsistant. […] Je suis heureux de trouver dans le même ouvrage un jugement sur La Mettrie, qui marque chez Diderot un peu d’oubli peut-être de ses propres excès cyniques et philosophiques, mais aussi un dégoût amer, un désaveu formel du matérialisme immoral et corrupteur. […] La gêne et le besoin, une singulière facilité de caractère, une excessive prodigalité de vie et de conversation, la camaraderie encyclopédique et philosophique, tout cela soutira continuellement le plus métaphysicien et le plus artiste des génies de cette époque.

87. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Sa vie véritablement philosophique commença entre soixante et soixante-dix ans. […] Il les flattait dans leurs systèmes et dans leurs vices d’esprit pour les captiver dans son parti philosophique ; il avait le respect humain de sa haute raison avec les correspondants athées ; il leur livrait l’immortalité de l’âme et la providence divine pour les enrôler par cette tactique détestable dans une coalition commune contre les superstitions humaines. […] Dans la plus anti-chrétienne de ses poésies philosophiques : l’Épître à Uranie, il semble caractériser lui-même les opinions religieuses que nous lui attribuons ici ; il va même au-delà, et il touche au christianisme par une admiration pieuse des vertus de son fondateur. […] Dans les pages du Dictionnaire philosophique, où il laisse courir sa pensée sur tous les objets avec la liberté d’une confidence à voix basse, il parvient par les seules forces de sa raison jusqu’à des extases d’adoration et de vertu qui égalent le plus sublime mysticisme de l’Inde ou du christianisme. […] Le christianisme et la philosophie ne cesseront pas de se disputer ce cercueil, l’un pour la malédiction, l’autre pour l’apothéose, tant que l’une ne l’aura pas définitivement emporté sur l’autre, ou tant que l’une et l’autre ne se seront pas réconciliés dans une philosophie chrétienne ou dans un christianisme philosophique.

88. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre I. De la sagesse philosophique que l’on a attribuée à Homère » pp. 252-257

De la sagesse philosophique que l’on a attribuée à Homère Nous accorderons, d’abord, comme il est juste, qu’Homère a dû suivre les sentiments vulgaires, et par conséquent les mœurs vulgaires de ses contemporains encore barbares ; de tels sentiments, de telles mœurs fournissent à la poésie les sujets qui lui sont propres. […] La constance d’âme que donne et assure l’étude de la sagesse philosophique pouvait-elle lui permettre de supposer tant de légèreté, tant de mobilité dans les dieux et les héros ; de montrer les uns, sur le moindre motif, passant du plus grand trouble à un calme subit ; les autres, dans l’accès de la plus violente colère, se rappelant un souvenir touchant, et fondant en larmes84 ; d’autres au contraire, navrés de douleur, oubliant tout-à-coup leurs maux, et s’abandonnant à la joie, à la première distraction agréable, comme le sage Ulysse au banquet d’Alcinoüs ; d’autres enfin, d’abord calmes et tranquilles, s’irritant d’une parole dite sans intention de leur déplaire, et s’emportant au point de menacer de la mort celui qui l’a prononcée. […] Il faut donc refuser à Homère toute sagesse philosophique.

89. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Première leçon »

Sans cette condition, il est bien difficile de sentir et impossible de juger les réflexions philosophiques dont ces sciences seront les sujets. […] Pour expliquer convenablement ma pensée à cet égard, je dois d’abord rappeler une conception philosophique de la plus haute importance, exposée par de Blainville dans la belle introduction de ses Principes généraux d’anatomie comparée. […] En un mot, ce n’est évidemment que par l’examen philosophique des sciences qu’il est possible d’y parvenir. […] Aussi Laplace n’a-t-il présenté cette idée que comme un simple jeu philosophique, incapable d’exercer réellement aucune influence utile sur les progrès de la science chimique. […] Tout en tendant à diminuer, le plus Possible, le nombre des lois générales nécessaires à l’explication positive des phénomènes naturels, ce qui est, en effet, le but philosophique de la science, nous regarderons comme téméraire d’aspirer jamais, même pour l’avenir le plus éloigné, à les réduire rigoureusement à une seule.

90. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — L'abbé de Lamennais en 1832 »

Parmi les hommes qui se consacrent aux travaux de la pensée et dont les sciences morales et philosophiques sont le domaine, rien de plus difficile à rencontrer aujourd’hui qu’une volonté au sein d’une intelligence, une conviction, une foi. […] Du milieu de cette immense langueur, de cette espèce d’atonie à nombreuses nuances, il séparait, en se l’exagérant, la faction philosophique issue du xviiie siècle, la Révolution antagoniste, selon lui, du Christianisme, et endoctrinant contre Dieu le peuple. […] Ils envisagèrent donc M. de La Mennais comme un novateur audacieux en religion, un hérétique sans le savoir ; et, au point de vue philosophique, comme ruinant toute certitude individuelle sous prétexte de fonder celle du genre humain. […] Mais, ayant été placé chez un curé du pays vers l’âge ordinaire de la première communion, les développements qu’il entendit éveillèrent sa contradiction sur quelques points ; l’amour-propre se mit en jeu ; les arguments philosophiques qu’il avait lus lui revenaient en mémoire. Déjà, plus jeune, il s’était amusé souvent, par pur instinct de controverse, à présenter des objections qu’il tirait de Rousseau ou même du Dictionnaire philosophique, et il voulait quelquefois qu’on lui répondît par écrit.

91. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — Y. — article » pp. 529-575

C'est une addition de l'Auteur des Articles, copiée presque mot à mot d'un petit Recueil de Pieces prétendues philosophiques, où l'on attaque avec déraison & sans pudeur, les vérités les plus saintes & les plus respectables. […] Les Ecrits philosophiques se sont si fort multipliés de nos jours, la Philosophie ou l'Incrédulité est tellement devenue à la mode parmi nous, que la seule maniere aujourd'hui d'écrire avec fruit pour la Religion, est de chercher à diminuer, à détruire, s'il est possible, l'autorité que les prétendus Philosophes ont acquise sur l'opinion publique. […] Socrate n’a été regardé comme le plus sage des Hommes, que parce qu’il avoit su se dégager des erreurs Philosophiques & populaires de son temps, pour s’élever à la connoissance de l’Etre suprême. […] Tel est cependant le terme où vont aboutir toutes les méditations philosophiques. […] Est-ce parmi ces caracteres philosophiques, parmi ces ames enivrées d’elles-mêmes, concentrées dans leurs propres intérêts, & prêtes à tout sacrifier aux mouvemens impérieux qui les dominent ?

92. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

Il ne prit de cette éducation que la partie fructueuse et solide, et ce qui s’y mêlait déjà de philosophique et de libre ne l’atteignit pas. […] On voit que la pensée plus ou moins restauratrice, refoulée par le triomphe de l’idée philosophique et révolutionnaire, réagissait à son tour et faisait chaîne autour de la France. […] C’est ainsi encore que, plus de trente ans après, dans son dernier ouvrage (car, chez M. de Bonald, le dernier ouvrage ressemble au premier), dans sa Démonstration philosophique du principe constitutif de la société, il déduira d’une construction philosophique et presque grammaticale la nécessité de l’Homme-Dieu. […] Cette phrase de M. de Bonald peut se lire au tome X des Œuvres in-8º, qui est le tome premier des Mélanges littéraires, politiques et philosophiques (Paris, 1819), p. 258. […] La question philosophique pour Bonald porte tout entière sur les origines, sur l’origine des idées qu’il ramène à celle de la parole, et par conséquent sur l’origine même des êtres parlants.

93. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VIII. De l’invasion des peuples du Nord, de l’établissement de la religion chrétienne, et de la renaissance des lettres » pp. 188-214

Ils ont pour but et pour bannière une idée philosophique ; mais leur éducation est à plusieurs siècles en arrière de celle des hommes qu’ils ont vaincus. […] Heureux si nous trouvions, comme à l’époque de l’invasion des peuples du Nord, un système philosophique, un enthousiasme vertueux, une législation forte et juste, qui fût, comme la religion chrétienne l’a été, l’opinion dans laquelle les vainqueurs et les vaincus pourraient se réunir ! […] La religion chrétienne exige aussi l’abnégation de soi-même, et l’exagération monacale pousse même cette vertu fort au-delà de l’austérité philosophique des anciens ; mais le principe de ce sacrifice dans la religion chrétienne, c’est le dévouement à son Dieu ou à ses semblables, et non, comme chez les stoïciens, l’orgueil et la dignité de son propre caractère. […] Des commentaires sur les ouvrages des anciens avaient pris la place des observations philosophiques : il semblait qu’entre la nature et l’homme, il dût toujours exister des livres. […] Peut-être aussi que tout le faste de ces récompenses d’opinion était nécessaire pour exciter aux difficiles travaux qu’exigeaient, il y a trois siècles, le perfectionnement des langues modernes, la régénération de l’esprit philosophique, et la création d’une méthode nouvelle pour la métaphysique et les sciences exactes.

94. (1889) Méthode évolutive-instrumentiste d’une poésie rationnelle

Le premier, sans composer une œuvre, a maintenant publié le livre qui semble le dépositaire de son rêve philosophique : Le Bonheur. […] Quant au second, pendant que très rarement il donne quelque sonnet admirable de plastique idéale et d’éclat irradiant mais d’où la musique se retire de plus en plus et dont l’obscurité n’est excusée par aucune profondeur nécessaire d’idée, il n’a dit que peu de mots épars de l’œuvre philosophique (M.  […] Mallarmé lui-même ; l’autre étant philosophique, d’une philosophie à laquelle ceux-ci comme tous autres sont essentiellement étrangers. […] dominera : et de même elle sera, synthétiquement savante et philosophique expérimentalement en une langue ailleurs inouïe, ou elle n’a plus droit d’exister. […] Ainsi travailla ma pensée ; Une proposition de tout le fatras philosophique ancien demeure vraie, et comme essence même du Transformisme, celle de Hégel : que la Matière est en éternel devenir.

95. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VIII : M. Cousin érudit et philologue »

Fouiller des bibliothèques, déchiffrer d’horribles manuscrits, restaurer les textes mutilés, choisir entre les leçons, discuter l’authenticité du document, conjecturer son âge, chanceler partout sur le sol mouvant des probabilités, se plonger dans la foule querelleuse des commentateurs, user sa vue et sa pensée sur les sottises innombrables et sur les platitudes incroyables dont la populace littéraire et philosophique obstrue les œuvres des grands hommes, c’est là une étude si minutieuse, si stérile en conclusions générales et en vérités certaines, qu’il fallait pour l’entreprendre les instincts et les habitudes d’un érudit. […] Il n’a point trouvé en lui-même ni développé dans les autres l’esprit philosophique ; il a la gloire d’avoir montré en lui-même et développé dans les autres l’esprit d’érudition. […] « Nous nous serions offert bien volontiers pour, mettre au jour cette correspondance, où peut-être aurait été de mise quelque connaissance des matières agitées entre les deux métaphysiciens, et surtout de la littérature philosophique de cette époque. » On lui a fait tort, on lui a pris son bien. […] Ses Fragments philosophiques en sont remplis. […] Il apprit, en écoutant le langage exquis des gens de cour et des gens du monde, la différence du style enflé et du style noble, du style vague et du style élevé ; il se dépouilla d’une certaine rouille philosophique qu’il avait contractée en théologie, et comprit que, lorsqu’on faisait le portrait de personnes si élégantes et si mondaines, il ne fallait pas y apporter les habitudes philosophiques que la Sorbonne conservait dans ses argumentations d’apparat.

96. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

L’auteur, dont nous pressentons les opinions à certains accents qui passent à travers les surveillances de sa pensée, l’auteur nie à Saint-Martin et au mysticisme la vérité philosophique et religieuse, — ces deux vérités qui pour nous n’en font qu’une, mais que les rationalistes croient très habiles de séparer ; — et il a raison, s’il ne s’agit ici que de Saint-Martin, « le philosophe inconnu du xviiie  siècle », et du mysticisme hors l’orthodoxie, du mysticisme de l’hérésie ou de l’erreur. […] Une vraie critique philosophique, si elle avait voulu mériter l’honneur de son épithète, devait-elle, après avoir accumulé les négations, s’enfoncer et disparaître dans le néant qu’elle avait fait, et, sous peine de trop ressembler à tout ce qu’elle avait pulvérisé, n’était-elle pas tenue d’ajouter et d’affirmer quelque chose de plus ? […] Nous y avons trouvé ce qui vivifie tous les livres philosophiques, la verve de la discussion, la propriété du langage, et surtout la nouveauté inattendue et piquante du renseignement. […] La biographie intellectuelle de Saint-Martin n’était qu’une curiosité philosophique, mais, rattachée à l’histoire du dix-huitième siècle, elle prenait presque aussitôt de la consistance et de la valeur. […] Caro insiste beaucoup sur cette discussion, dans laquelle Saint-Martin déploya une aptitude philosophique véritablement supérieure.

97. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

les inepties que je trouve, par exemple, dans les Pensées soi-disant philosophiques du premier volume de l’édition Garnier que j’ai là sous les yeux. […] Il a de la passion philosophique, mais il n’a point de philosophie. […] Mais il a porté plus loin qu’aucun autre l’emphase et la jonglerie philosophiques. […] Il parodia Bacon, dit avec mépris Villemain, et il tomba jusqu’à cette honte de l’atomistique d’Épicure, jusqu’à cette vermine philosophique des atomes ! […] Opinion littéraire aussi dure à sa façon que son opinion philosophique.

98. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre V. Un livre de Renan et un livre sur Renan » pp. 53-59

.) ; diverses chroniques sur d’illustres sujets ; enfin les articles sur la Tentation de saint Antoine, sur Amiel, l’Examen de conscience philosophique et la Préface, ces quatre morceaux diversement considérables. […] L’Examen de conscience philosophique rassemble sur l’univers connaissable, sur les infinis possibles, sur l’amour, lien ombilical avec la nature, sur l’excellence logiquement nécessaire du monde, sur Dieu, — ce Dieu fuyant, improbable, discuté et finalement admis comme après ballottage, — des idées que par ses dialogues, ses essais, préfaces, etc., on savait déjà être celles de ce penseur. […] Renan est un penseur, non un philosophe, parce qu’il n’a pas la préoccupation systématisatrice et dogmatrice qui domine les cerveaux philosophiques.

99. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre IV. De la philosophie et de l’éloquence des Grecs » pp. 120-134

La métaphysique qui n’a ni les faits pour base, ni la méthode pour guide, est ce qu’on peut étudier de plus fatigant ; et je crois impossible de ne pas le sentir, en lisant les écrits philosophiques des Grecs, quel que soit le charme de leur langage. […] C’est un homme admirable pour son siècle ; mais c’est vouloir forcer les hommes à marcher en arrière, que de chercher dans l’antiquité toutes les vérités philosophiques ; c’est porter l’esprit de découverte sur le passé, tandis que le présent le réclame. […] L’éloquence philosophique des Grecs fait encore effet sur nous, par la noblesse et la pureté du langage. […] Les mœurs, les habitudes, les connaissances philosophiques, les succès militaires, tout semble, chez les Grecs, ne devoir être que passager ; c’est la semence que le vent emportera dans tous les lieux de la terre, et qui ne restera point où elle est née.

100. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XVII. Morale, Livres de Caractéres. » pp. 353-369

Le meilleur livre de morale philosophique qui ait paru de nos jours, est celui que M. […] L’auteur du Dictionnaire philosophique ou introduction à la connoissance de l’esprit humain, 1766. […] Il ne faut pas confondre ce Dictionnaire philosophique, avec un autre publié sous le même titre, & dans lequel on ne s’est attaché qu’à détruire la Religion ou à la rendre ridicule. […] Dans les lettres où il examine des sujets intéressans, il fait paroître cet esprit philosophique qui sait tout apprécier & tout approfondir, en paroissant glisser sur la surface.

101. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DE BARANTE. » pp. 31-61

La pension où il fut placé le laissait jouir d’une certaine liberté ; l’éducation, ou ce qui s’affichait alors sous ce nom, était un confus mélange où les restes informes des anciennes connaissances s’amalgamaient à des fragments de préceptes, débris incohérents de tous les naufrages ; on faisait la liaison tant bien que mal, moyennant une veine de phraséologie philosophique et philanthropique à l’ordre du jour. […] la critique littéraire à la fin du xviiie  siècle, de cette époque éminemment philosophique, était devenue, chez la plupart des disciples, purement méticuleuse et littérale : elle ne s’attachait plus guère qu’aux mots. […] Le xviiie  siècle avait usé et abusé de l’histoire philosophique, de celle où l’historien intervenait à chaque instant et s’imposait à son sujet. […] Un historien très-estimable et très-méritant, M. de Sismondi, plus soucieux des sources et plus porté aux recherches originales qu’on ne l’avait été avant lui, gardait avec cela les formes de l’école philosophique ; il imposait ou du moins il accolait son opinion du jour au fait d’autrefois. […] M. de Barante, dès son premier coup-d’œil, s’était montré choqué des abus de la méthode dite philosophique en histoire ; il fut conduit au désir d’en purger absolument le noble genre, et de lui rendre, s’il se pouvait, son antique sincérité.

102. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

Ce sont les idées générales, c’est-à-dire les vérités de l’ordre philosophique et de l’ordre moral dont l’expression, dans un langage définitif qu’elles seules peuvent inspirer, constitue la littérature ou l’art. […] J’entends les vérités philosophiques sur les caractères et leurs contrastés, sur les passions et leurs combats, sur tout ce qui fait le fond de cette vie si énergiquement qualifiée par Buffon de vie contentieuse. […] J’entends enfin les vérités de l’ordre moral qui se déduisent des vérités philosophiques, la connaissance de l’homme tel qu’il est, pouvant seule nous apprendre ce qu’il doit être. […] C’est donc dans les écrits philosophiques et dans les écrits de religion qu’il faut chercher jusqu’à quel point les écrivains en langue latine ont eu des idées générales. […] On peut trouver dans ses livres, soit quelques formes de raisonnement d’une application toujours efficace, soit un certain nombre d’axiomes philosophiques qui subsistent ; mais vainement prétendrait-on nous y faire voir l’idée claire de l’humanité.

103. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 117

Il est malheureux pour lui d’avoir introduit dans un Ouvrage grammatical un jargon philosophique, ridicule dans presque tous nos Ecrits modernes, & plus encore dans un Livre élémentaire. […] Si on pardonne ce défaut à M. d’Açarq, on trouvera dans sa Grammaire Françoise philosophique, & dans ses Observations sur Boileau, Racine, Crébillon & M. de Voltaire, de la justesse & de la profondeur.

104. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

Une première partie toute philosophique, et pour laquelle le jeune auteur lui-même se déclare incompétent, est confuse, peu digérée. […] L’Université a été trop longtemps habituée à vivre sous la doctrine philosophique de M.  […] Mais quel chemin a-t-on donc fait depuis M. de Tracy, membre honoré de l’ancien Sénat, pour qu’on en soit à discuter dans cette enceinte sur ces questions, comme si nous étions un concile philosophique ou théologique ? […] Vous continueriez, en vertu de certains articles positifs de la loi, de réprimer, de prévenir l’expression ouverte, la profession déclarée et la prédication de doctrines philosophiques que vous considérez comme dangereuses et antisociales. La guerre du clergé et de la science pure, de l’enseignement catholique et de l’enseignement purement philosophique, ne se mènerait donc point, de part et d’autre, à armes égales et enseignes déployées.

105. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre I : Philosophie religieuse de M. Guizot »

« L’homme a reçu sur l’objet fondamental de la métaphysique des lumières primitives, dot de la nature humaine plutôt que conquête de la science humaine : elle a dans l’homme même son point de départ profond et assuré ; mais son point de mire est en Dieu, c’est-à-dire au-dessus de sa portée. » Telle est la stérilité de la science philosophique en général. On la prouvera mieux encore en examinant chacun des grands systèmes philosophiques de notre temps en particulier. […] Elle a défendu la liberté humaine au point de vue philosophique, moral et politique. […] Sur deux arguments, l’un philosophique, l’autre historique. […] Aux obscurités, aux contradictions, aux lacunes des solutions philosophiques, M. 

106. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Dictionnaire philosophique ; article Goût. […] Voltaire, Dictionnaire philosophique ; article Scoliaste. […] Dictionnaire philosophique ; article Épopée. […] Dictionnaire philosophique ; article Épopée. […] Dictionnaire philosophique.

107. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Le génie italien voulait suivre l’impulsion philosophique de la France et de l’Angleterre, et il s’annulait lui-même. […] Ces trois vérités philosophiques répondent à autant de faits historiques : institution universelle des religions, des mariages et des sépultures. […] Il lut les auteurs dans des éditions sans notes, en cherchant à pénétrer dans leur esprit avec une critique philosophique. […] Idées philosophiques sur l’histoire de l’humanité, 1772 (traduit par M.  […] Essais philosophiques, ou nouveaux mélanges, etc., 1817.

108. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « I »

Jullien nous apprend que Wagner « a fait des deux amants les interprètes de l’école philosophique de Schopenhauer » (Richard Wagner, 148.)… Or, c’est là une idée qui ne peut supporter le moindre examen. […] Dans ces écrits il a examiné l’art d’abord, sous tous les points de vue possibles, absolus et contingents, et ensuite le monde — l’état, la religion, la société, etc. — Au point de vue exclusif de l’artiste, donnant ainsi une théorie complète du monde, non point philosophique, mais artistique. […] Jullien, par exemple5, commence son étude sur Tristan en nous disant : « Son esprit, porté vers les spéculations philosophiques et jusqu’alors imbu surtout des doctrines panthéistiques de Hegel et de Schelling… » (148) ; c’est de la pure invention. […] Jullien nous apprend que c’est « dans l’état d’isolement douloureux et d’absolu découragement où il se trouvait en exil… qu’il se laissa gagner… par une théorie philosophique décourageante entre toutes… » De nouveau, c’est là un mirage d’idées préconçues, qui ne reposent sur rien. […] Enfin, ce n’est pas la théorie philosophique en tant qu’explication abstraite du monde et basée sur ces déductions logiques, qui « gagna » Wagner, mais la théorie de l’art, notamment celle de la musique, ainsi que la morale (comme on vient de le voir par la phrase citée).

109. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre II. La tragédie »

Le théâtre philosophique. — 3. […] Avec une conviction véritablement profonde, il essaya d’exprimer les généralités des caractères et des passions dans toutes les tragédies qu’il écrivit, si l’on excepte quelques œuvres de ses vingt dernières années, où les personnages représentent plutôt des opinions philosophiques que des êtres moraux. […] Il sentit plus ou moins obscurément le danger : il jeta dans le moule tragique ses idées philosophiques, et toutes les formules analytiques de la pensée abstraite. […] A partir de 1760, on compte les pièces qui ne sont pas avant tout des pamphlets philosophiques.

110. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Abailard et Héloïse »

Abailard a longtemps été l’enfant gâté, le Benjamin philosophique du xixe  siècle. […] De braves niais qui ne verraient dans la publication de Didier qu’une étude désintéressée du cœur, qu’une anatomie de la passion dans deux âmes, et rien de plus, parce que nulle question philosophique n’y est agitée, ne connaîtraient pas grand-chose aux tactiques de la Philosophie et mériteraient bien de se prendre à toutes les souricières qu’elle nous tend. […] Vus à travers ces lettres, les deux amants de grande et bonne foi disparaissent, et vous ne voyez plus que deux philosophes qui font des phrases philosophiques au lieu de naïvement s’aimer. Vous ne voyez plus, à la place de la sombre fatalité du cœur, maudite et pourtant toujours pardonnée, que deux orgueils philosophiques avec toutes les nuances de ces sortes d’orgueils, lesquels s’arrangent pour draper de pourpre une intrigue scandaleuse et en faire chatoyer vaniteusement tous les plaisirs et toutes les larmes.

111. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIX. Abailard »

Abailard21 [Le Pays, 1er octobre 1853] Abailard est toujours l’enfant gâté, le Benjamin philosophique du dix-neuvième siècle. […] Didier qu’une étude désintéressée du cœur, qu’une anatomie de la passion dans deux âmes, et rien de plus, parce que nulle question philosophique n’y est agitée, ne connaîtraient pas grand-chose aux tactiques de la Philosophie, et mériteraient bien de se prendre à toutes les souricières qu’elle nous tend. […] Vus à travers ces lettres, les deux amants de grande et bonne foi disparaissent, et vous ne voyez plus que deux philosophes qui font des phrases philosophiques au lieu de naïvement s’aimer. Vous ne voyez plus, à la place de la sombre fatalité du cœur, maudite et pourtant toujours pardonnée, que deux orgueils philosophiques avec toutes les nuances de ces sortes d’orgueil, lesquels s’arrangent pour draper de pourpre une intrigue scandaleuse et en faire chatoyer vaniteusement tous les plaisirs et toutes les larmes.

112. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

En quelques coups de vent, ces amoncellements disparaissent ; en quelques années, ces systèmes… Demandez-vous quelle grande place tiennent, maintenant, dans le respect intellectuel des hommes, tous ces capucins de cartes philosophiques tombés les uns sur les autres : Kant, Fichte, Schelling, Hégel, qui étaient pourtant, comme on dit au whist, les honneurs du jeu. […] Caro a prises, pour les analyser, dans ses petites pincettes philosophiques, il ne s’agit plus uniquement d’être un charmant philosophe, adroit, poli et joli comme un cœur… Car, savez-vous de quoi il retourne aujourd’hui ? […] Pour être lu, il a caché tout d’abord la face de ces deux sinistres Pierrots philosophiques, — sinistres, mais amusants pour ceux-là qui se paient de tout avec le ridicule dont ils rient, — prévoyant bien que pour nous amener à ces deux gaillards, inouïs d’extravagance, qui sont, au fond, le but de son livre, il était nécessaire de faire un détour, et il a ouvert son crochet jusqu’aux premiers jours de la création. […] Caro, qui, en France, est attaqué de cette démence, et qu’il a ajouté — ridiculus mus — dans ses Dialogues philosophiques la carie des idées de Schopenhauer à sa propre carie naturelle !

113. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XII. »

. — Lyrisme philosophique. […] Platon, dont le génie s’essaya dans des dithyrambes avant d’avoir entendu Socrate, gardait évidemment plus d’un souvenir de la poésie dorienne de Pindare ; et, alors même qu’il eut renoncé à cette ambition poétique de sa jeunesse et jeté au feu ses premiers vers, il en retint cette inspiration lyrique dont il a parfois animé les débuts ou les épilogues de ses entretiens philosophiques. […] Mais la grande inspiration tragique, lyrique, philosophique ne paraissait plus. […] Cette fois la philosophique Athènes est redevenue tout idolâtre.

114. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

L’histoire philosophique. […] Passage de l’histoire philosophique à l’expression de la vie : Thierry. […] » Et il passait en revue tous ces prétendus historiens de France, depuis les Chroniques et Annales de Nicole Gilles, secrétaire de Louis XI, du Haillan, Dupleix, Mézeray, Daniel, Velly, Anquetil, etc. : il montrait combien l’ignorance des sources, le manque de science et de critique, l’inintelligence de la vie du passé, le goût romanesque, la rhétorique, l’esprit philosophique, avaient partout déformé l’histoire : combien froides et fausses étaient toutes ces annales, où avortaient vite quelques bonnes intentions d’exactitude. […] L’histoire philosophique : Guizot, Tocqueville. […] Ainsi, occupé à chercher des armes « contre les tendances réactionnaires du gouvernement », Thierry ne voulait encore que faire l’histoire « à la manière des écrivains de l’école philosophique, pour extraire du récit un corps de preuves et d’arguments systématiques ».

115. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre III. La poésie : V. Hugo et le Parnasse »

Sully Prudhomme : poésie scientifique ; généralisation de l’émotion personnelle par l’intelligence philosophique. […] Ses idées philosophiques, politiques, sociales, son déisme, son républicanisme, son « démocratisme », sont des idées moyennes, sans originalité, tout à fait imprécises et médiocrement cohérentes. […] Une idée philosophique et sociale soutient chaque poème : ici affirmation de Dieu ou de la justice, la dévotion au peuple, haine du roi et du prêtre. […] Sully Prudhomme891 est un philosophe, et il a voulu donner à la poésie philosophique plus de rigueur, plus d’exactitude qu’elle n’en a jamais eu. […] N’était la valeur de la pensée philosophique, on croirait par endroits lire un discours de Voltaire.

116. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 33, que la veneration pour les bons auteurs de l’antiquité durera toujours. S’il est vrai que nous raisonnions mieux que les anciens » pp. 453-488

Le temps et le hazard nous ont fait faire depuis quelques siecles une infinité de découvertes où je vais montrer que le raisonnement a eu très-peu de part, et ces découvertes ont mis en évidence la fausseté de plusieurs dogmes philosophiques que nos prédecesseurs substituoient à la verité, que les hommes n’étoient point capables de connoître avant ces découvertes. […] L’esprit philosophique, les physiciens speculateurs ne faisoient point usage des faits. […] Qu’on juge quelle part peut avoir eu dans l’établissement de ce dogme l’esprit philosophique né depuis quatre-vingt ans. […] Pour ne point sortir de notre sujet, les anciens n’ont-ils pas connus aussi-bien que nous que cette superiorité de raison, que nous appellons esprit philosophique, devoit présider à toutes les sciences et à tous les arts ? […] Ceux qui vantent si fort les lumieres que l’esprit philosophique a répanduës sur notre siecle, répondront peut-être, qu’ils n’entendent par notre siecle qu’eux et leurs amis, et qu’il faut regarder comme des gens qui ne sont point philosophes, comme des anciens, ceux qui ne sont pas encore de leur sentiment en toutes choses.

117. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Sully Prudhomme (1839-1907) »

Il avait, pour y réussir, non seulement les dons mystérieux du poète, mais encore une absolue sincérité, une inflexible douceur, une pitié sans faiblesse, et cette candeur, cette simplicité sur lesquelles son scepticisme philosophique s’élève comme sur deux ailes dans les hautes régions où jadis la foi ravissait les mystiques. […] C’était un recueil très curieux de sonnets surtout philosophiques. […] Sully Prudhomme, si différents d’aspect et d’esprit, marquent simplement les diverses étapes de sa pensée philosophique.

118. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Conclusion »

Parce que la sociologie est née des grandes doctrines philosophiques, elle a gardé l’habitude de s’appuyer sur quelque système dont elle se trouve ainsi solidaire. […] C’est ainsi que la sociologie, à mesure qu’elle se spécialisera, fournira des matériaux plus originaux à la réflexion philosophique. […] Tout cet appareil de précautions peut sembler bien laborieux pour une science qui, jusqu’ici, ne réclamait guère, de ceux qui s’y consacraient, qu’une culture générale et philosophique ; et il est, en effet, certain que la mise en pratique d’une telle méthode ne saurait avoir pour effet de vulgariser la curiosité des choses sociologiques.

119. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XVI »

Il y a évidemment deux façons d’étudier le style ; l’une technique, par les procédés et le métier ; l’autre philosophique, par les idées et les principes. […] Nous avons eu le tort ou plutôt nous avons eu le courage de quitter les hauteurs philosophiques où se placent nos adversaires ; nous sommes descendus dans les fondrières ; nous avons voulu débroussailler le chemin, nous frayer un passage dans l’encombrement des méthodes et le désarroi des contradictions. […] Un traité philosophique du style n’est pas, au demeurant, une chose bien difficile.

120. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Auguste Nicolas »

La philosophie a cette honte, bien méritée du reste, que personne ne l’invoque plus et que les professeurs qui la professaient hier encore, au lieu de créer et d’organiser des systèmes, c’est-à-dire de nous donner, après tout, la chose philosophique, le véritable produit philosophique, en sont descendus à ne plus professer que l’histoire et même les historiettes de la philosophie. […] Auguste Nicolas était déjà connu par ses Études philosophiques sur le Christianisme, qui firent tant d’impression quand elles parurent, son talent ayant cela de particulier et de supérieur dans sa mesure qu’il touche juste et vous prend où il a touché.

121. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre II. Des tragédies grecques » pp. 95-112

Les tragiques grecs, fondant la plupart de leurs pièces sur l’action continuelle de la volonté des dieux, étaient dispensés d’un certain genre de vraisemblance, qui est la gradation des événements naturels ; ils produisaient de grands effets, sans les avoir amenés par des nuances progressives ; l’esprit étant toujours préparé à la crainte par la religion, à l’extraordinaire par la foi, les Grecs n’étaient point astreints aux plus grandes difficultés, de l’art dramatique ; ils ne dessinaient point les caractères avec cette vérité philosophique exigée dans les temps modernes. […] Sophocle met souvent des maximes philosophiques dans les paroles des chœurs. […] L’esprit philosophique rend plus sévère sur l’emploi du temps ; et loin que les peuples à imagination exigent de la rapidité dans les tableaux qu’on leur présente, ils se plaisent dans les détails, et se fatigueraient bien plus tôt des abrégés. […] Les révolutions subites et fréquentes du gouvernement populaire, ramènent souvent à ce genre d’observations philosophiques.

122. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre IX et dernier. Conclusion » pp. 586-601

J’ai tenté de montrer avec quelle force la raison philosophique, malgré tous les obstacles, après tous les malheurs, a toujours su se frayer une route, et s’est développée successivement dans tous les pays, dès qu’une tolérance quelconque, quelque modifiée qu’elle pût être, a permis à l’homme de penser. […] Dès que les ouvrages de littérature ont pour but de remuer l’âme, ils approchent nécessairement des idées philosophiques, et les idées philosophiques conduisent à toutes les vérités. […] Les vérités philosophiques ont sur l’esprit éclairé qui les admet le même empire que la vertu sur une âme honnête.

123. (1890) L’avenir de la science « VI »

À Dieu ne plaise que nous cherchions à rabaisser ces nobles et utiles fonctions qui préparent des esprits sérieux à toutes les carrières ; mais il convient, ce semble, de distinguer profondément la science de l’instruction et de donner à la première, en dehors de la seconde, un but religieux et philosophique. […] La légèreté d’esprit, qui ne comprend pas la science, le pédantisme, qui la comprend mal et la rabaisse, viennent également de l’absence d’esprit philosophique. […] Personne ne s’en offense chez les humanistes de la restauration carlovingienne, ni chez ceux de la Renaissance : il faut que l’esprit humain s’amuse d’abord quelque temps de ses découvertes et des résultats nouveaux qu’il introduit dans la science, qu’il s’en fasse un plaisir, quelquefois même un jouet, avant d’en faire un objet de méditation philosophique. […] Notre public est trop difficile ; il exige de l’intérêt et même de l’amusement, là où l’instruction devrait suffire ; et, de fait, jusqu’à ce qu’on ait conçu le but élevé et philosophique de la science, tant qu’on n’y verra qu’une curiosité comme une autre, on devra la trouver ennuyeuse et lui faire un reproche de l’ennui qu’elle peut causer.

124. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre III : Le problème religieux »

Mais, dira-t-on, en quoi une telle religion se distinguera-t-elle de ce qu’on appelle la religion naturelle, ou du déisme philosophique ? […] De même que les philosophes ne peuvent pas fonder une société, mais peuvent rendre de plus en plus philosophiques les sociétés existantes, de même qu’ils ne peuvent créer des langues (au moins en dehors de la science), mais qu’ils peuvent rendre les langues usuelles de plus en plus claires, logiques, analytiques, en un mot philosophiques, de même ils ne peuvent créer des religions, mais ils peuvent transformer les religions historiques. […] Une fois cette grande Église philosophique constituée, qui l’empêcherait de prendre pour temple la vieille Église chrétienne, rajeunie, émancipée, animée du vrai souffle des temps modernes, entraînée par l’esprit nouveau, mais le purifiant, le pacifiant par cet esprit d’amour dont l’Évangile, plus qu’aucun livre religieux, a eu le secret ?

125. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VII. Vera »

Il n’est plus, il est vrai, dans la période ascendante d’une célébrité qui monta comme la mer, mais qui commence de s’abaisser et de reculer comme elle, et non pas, comme elle, pour revenir. « Trente ans, — disait le plus positif des esprits de ce siècle positif, — trente ans, voilà ce que dure à peu près toute gloire philosophique allemande !  […] Cet homme fameux, mais mal expliqué dans l’arcane de son texte, dont jusqu’ici on ne nous a donné que des déchirures, ce Vieux de la Montagne philosophique, compromis par les Cousins et les Proudhons et toute sa bande d’assassins littéraires ou politiques, M.  […] Mais, s’il avait plus songé à l’éducation à faire de l’intelligence du public, qu’il doit, avec ses convictions, vouloir rendre hégélien, qu’à l’éducation toute faite des philosophes comme lui, il eût commencé par les autres œuvres d’Hegel, moins cruellement abstraites (par exemple, les idées sur la Religion, sur l’État, sur l’Art, etc.), et il serait remonté de là vers les principes philosophiques d’où dépend toute la philosophie de son maître, et il eût placé ainsi le lecteur, familiarisé avec les idées et le langage hégélien, à la source même du système. […] Ce poëme, illisible sans la grâce d’état philosophique, n’est dangereux que par fragments.

126. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

Dans la correspondance qu’il entretient avec lui, Voltaire le tâte souvent, et essaye de l’engager ; en 1760, après la comédie des Philosophes de Palissot, après le discours de réception de Lefranc de Pompignan, et dans ce moment le plus vif de la mêlée philosophique, Voltaire voudrait que Duclos s’entendît avec les amis et surtout qu’il agît en cour pour faire arriver Diderot à l’Académie ; c’eût été un coup de parti en effet, et une éclatante revanche : « Vous êtes à portée, je crois, d’en parler à Mme de Pompadour ; et, quand une fois elle aura fait agréer au roi l’admission de M.  […] … Les dévots diront que Diderot a fait un ouvrage de métaphysique qu’ils n’entendent point (les Pensées philosophiques, ou toute autre brochure de Diderot) ; il n’a qu’à répondre qu’il ne l’a pas fait et qu’il est bon catholique. […] Il en revenait encore de temps en temps à ses regrets et à son projet de ligue philosophique universelle : « Si les véritables gens de lettres étaient unis, ils donneraient des lois à tous les êtres qui veulent penser. » Mais il sentait bien qu’il n’avait pas de prise et qu’il ne l’entraînerait pas. Mallet du Pan a rendu à Duclos cette justice qu’il gourmanda plus d’une fois l’effervescence philosophique : « Ils en diront et en feront tant, dit-il un jour impatienté, qu’ils finiront par m’envoyer à confesse. » Ce mot est de ceux qui courent et qui restent. […] [NdA] Dans un article des Archives philosophiques, politiques et littéraires, t. 

127. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gide, André (1869-1951) »

Henri Ghéon J’ai dit la raison philosophique des Poésies d’André Walter, et comment ç’avait été la première tentative de Gide pour échapper à la vie banale et quotidienne, et pour réellement vivre en une foi. Qu’on ne les prenne pas cependant pour une œuvre philosophique… En pièces courtes composées de quatrains aux vers longs et inégaux comme des plaintes, discrets et sourds comme des soupirs, rimés souvent ou assonaucés, et quelquefois en dissonance, se murmurent des désirs ou des inquiétudes ; les paroles sont simples, douces, presque sans images ; … il y a dans cette sobriété quelque chose de poignant, qui rappelle parfois les complaintes de Laforgue.

128. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Jouffroy »

Dans l’appréciation philosophique de l’homme, dans la vue des temps et de l’histoire, cette jeune élite éclairée se croyait, non sans apparence de raison, supérieure à ses adversaires d’abord, et aussi à ses pères qui avaient défailli ou s’étaient rétrécis et aigris à la tâche. […] Jouffroy envisageait le dogme religieux, ce semble, encore plus que le dogme politique ; il annonçait en termes expressifs la religion philosophique prochaine, et avec une ferveur d’accent qui ne s’est plus retrouvée que dans la tentative néo-chrétienne du saint-simonisme. […] Cette première année se passa pour eux à des exercices historiques et littéraires ; il fallait la révolution de 1814 pour qu’une spécialité philosophique pût être créée au sein de l’École par M.  […] La Romiguière et Boyer-Collard n’avaient professé qu’à la Faculté des Lettres, mais aucun enseignement philosophique approprié ne s’adressait aux élèves ; M.  […] Damiron publia de lui, peu après, un volume posthume de Nouveaux Mélanges philosophiques ; la haine et l’esprit de parti s’en emparèrent.

129. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

Ernest Naville est d’ailleurs, jusqu’à un certain point, indépendant de l’opinion qu’on a des écrits philosophiques et de la doctrine particulière de Maine de Biran ; c’est l’histoire d’un espritet d’une âme. […] Nous allions de pair l’année dernière ; il faut désormais que j’apprenne à me passer de considération publique, de renommée, et que je me couvre du manteau philosophique en prenant pour devise : Bene qui latuit bene vixit. […] Même là où il est sur son terrain et dans sa voie, il a peine à s’en bien démêler ; il entreprend plus d’un écrit philosophique ou politique avec le sentiment qu’il n’en finira jamais : Je fais un écrit politique (sur L’Ordre et la liberté, en 1818) comme Pénélope faisait sa toile. […] Il fonda chez lui, à Paris, un petit cercle philosophique, une véritable petite académie de métaphysique, qui s’assemblait une fois par semaine, et où se réunissaient MM.  […] Je ne sais laquelle choisir dans ces pages où l’on aperçoit insensiblement la transition du philosophique au mystique, le passage de Marc Aurèle à Fénelon ; c’est la continuité même qui en fait le prix et le charme.

130. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre quatrième. L’expression de la vie individuelle et sociale dans l’art. »

Le poète même, pour créer, doit être un penseur, un constructeur de systèmes vivants, mêlant à ses représentations de la vie des conceptions élevées et philosophiques. […] Les uns, très complexes, comme tous ceux que nous venons de citer, sont intellectuels en même temps que moraux : ils résument et systématisent la situation philosophique de toute une époque en face de la vie et de la destinée. […] Les premiers, qui sont pour ainsi dire des types philosophiques, sont peut-être d’un ordre supérieur, comme tout ce qui est plus complexe. […] Un sentiment intense joint à des idées toujours plus complexes et plus philosophiques, c’est dans ce sens que va le progrès général de la pensée humaine et aussi de l’art humain. […] Zola et de ses adeptes, par exemple, est tout à la fois abstrait comme une analyse philosophique, et matériel comme une anatomie médicale.

131. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

11 ; quel système philosophique, historique, esthétique, elle représente ? […] Le groupe philosophique, poétique et critique, dont les travaux et les productions forment d’habitude ce qu’on pourrait appeler le fonds de la Revue, indépendamment des portions de voyages ou de science où les faits seuls sont admis, ce groupe a une marche commune, rapprochée, sinon concertée, et constitue librement une alliance naturelle. Par la conception de l’art, par la recherche philosophique, il appartient tout entier à l’avenir, et ne s’enchaîne au passé par aucun préjugé d’école ; mais en même temps, c’est au passé surtout étudié positivement et avec impartialité, qu’il demande ses conjectures et ses espérances sur la destinée du siècle. […] En ouvrant le tome V des Contes de toutes les couleurs, je tombe sur Cyprien, fragment philosophique de Jules Sand12, ce nom de Sand m’ayant tout d’abord alléché.

132. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le comte du Verger de Saint-Thomas »

… Il n’a mis en tête de son livre aucun prolégomène philosophique sur la légitimité ou l’illégitimité du duel. […] Il ne s’est pas soulevé de l’indignation vertueuse, qui pouvait bien cacher une épouvante, contre la bête féroce, comme ce pied-plat philosophique de Rousseau. […] on se battra comme eux longtemps encore, malgré les progrès, philosophique, philanthropique et patriotique, et, ce qui est une meilleure raison pour ne plus se battre que le dévouement de tout son être à la République, malgré l’affaiblissement de l’esprit militaire, depuis si longtemps insulté, et la décadence même physique de la race, visible maintenant à tous les yeux. C’est que, si décadente qu’elle soit, cette race a en elle (nous l’avons dit plus haut) ce qui ne périt pas sur les ruines de tout : la vanité, — la vanité aristocratique, et égalitaire par aristocratie, qui veut jouer encore de l’épée parce qu’il n’y avait autrefois que les gentilshommes qui pussent la porter et en jouer… Or, il n’est pas d’idée philosophique, philanthropique, patriotique, il n’y a pas d’amour de la patrie et d’amour de la République auxquels on puisse immoler cette grande ou cette petite vanité.

133. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXI. Philosophie positive »

— ou plutôt est-ce le monde philosophique qui s’abaisse ? […] Célestin de Blignières est en France le vulgarisateur philosophique d’Auguste Comte comme miss Martineau l’est en Angleterre. […] Comte, mais avec ce désavantage que lui, l’escamoteur philosophique, il ne sait pas les retrouver… Ce déplorable escamoteur en second, qui ne sait rien faire revenir sous son gobelet de ce qu’il en ôte, a, pour toute baguette magique, une affirmation sans preuve, bête, en effet, comme un coup, de baguette : mais en philosophie ce qu’on écarte n’est pas supprimé. […] Comte, dans M. de Blignières, et qui vient après les escamotages de toutes les questions vraiment philosophiques, théodicée, métaphysique, vérités abstraites, comme les ombres chinoises venaient après les tours de gobelet, chez l’autre escamoteur.

134. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIX. M. Eugène Pelletan »

En France, depuis Condorcet, cette foi au progrès est connue, quoiqu’on ne la professe tout haut que sous les réserves du bon sens d’un peuple qui n’aime pas qu’on se moque de lui, et en Allemagne, où l’on n’a rien à craindre à cet égard, cette foi a été redoublée par des systèmes philosophiques qui sont du moins de formidables erreurs, les efforts puissants de grands esprits faux. […] de cette obligation philosophique il ne se préoccupe même pas. […] La Chute admise, le Progrès ne serait plus ï Les enfants verraient cela… Seulement, pour rendre son soufflet à l’histoire, il fallait rester dans la philosophie, nous donner, d’après la nature de l’homme et l’étude de ses instincts et de Ses facultés, la preuve philosophique de l’impossibilité radicale, humaine, de la chuté. […] De la question philosophique, qu’il n’a pas touchée comme on eût été en droit de l’attendre d’un homme qui a conçu l’idée de son livre, il a glissé tout à coup dans l’histoire.

135. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIV. De la plaisanterie anglaise » pp. 296-306

Quoique la plaisanterie ne puisse se passer aussi facilement qu’un ouvrage philosophique d’un succès national, elle est soumise comme tout ce qui tient à l’esprit, au jugement du bon goût universel. […] Swift, dans Gulliver et Le Conte du Tonneau, de même que Voltaire dans ses écrits philosophiques, tire des plaisanteries très heureuses de l’opposition qui existe entre l’erreur reçue et la vérité proscrite, entre les institutions et la nature des choses. […] Ce que les Anglais ont de gaieté, conduit presque toujours à un résultat philosophique ou moral ; la gaieté des Français n’a souvent pour but que le plaisir même.

136. (1903) La pensée et le mouvant

En dirait-on autant des théories philosophiques ? […] Là est le vice initial des systèmes philosophiques. […] Voici un problème philosophique. […] L’intuition philosophique est ce contact, la philosophie est cet élan. […] Des difficultés philosophiques, qu’on juge insurmontables, tomberaient.

137. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 344-346

On ne peut s’empêcher de trouver trop de gaieté dans son Amusement Philosophique sur le Langage des Bêtes : le ton qu’il y prend, sort un peu trop des bornes prescrites à la gravité de son état ; mais on peut dire en même temps que cette Dissertation agréable, dont on ne doit pas adopter toutes les idées, est la production d’un esprit aimable & pétillant, qui égale Fontenelle pour le talent de revêtir les choses les plus sérieuses des graces du badinage & de la légéreté. […] C’est ce sentiment qui le porta à rétracter l’Amusement Philosophique, & à composer son Exposition de la Doctrine Chrétienne par Demandes & par Réponses, divisée en trois Catéchismes, l’Historique, le Dogmatique & la Pratique, pour expier, disoit-il, la frivolité de cette premiere Production.

138. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 235-237

On n’ignore pas néanmoins qu’il a eu de grandes liaisons avec la Secte philosophique ; que ces liaisons lui ont valu les honneurs d’un Eloge historique, où, selon les loix de la Société, on l’éleve jusque aux nues : mais on sait aussi qu’il pouvoit se les procurer, sans les acheter par tant de complaisance à l’égard de ceux qu’il craignoit ou méprisoit peut-être. […] du Marsais a paru rétracter ses écarts philosophiques : il est mort en remplissant avec édification les devoirs d’un bon Chrétien.

139. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 260-261

Les petites Poésies de M. de Sauvigny n'ont pas les mêmes droits à l'indulgence ; elles manquent de naturel, & sentent trop le travail : à cela près, ses Lettres philosophiques & ses Odes anacréontiques offrent de l'esprit, de la finesse, & quelquefois de la sensibilité. Ce Poëte a de plus le mérite très-estimable d'avoir dédaigné dans ses Ouvrages le vernis philosophique, & de s'être élevé contre les Philosophes, dont les « Ouvrages, dit-il, ne peuvent servir que de trophée à l'extravagance humaine.

140. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

Ne semble-t-il point que la méthode chimique du premier et la méthode philosophique du second y préparent naturellement la pensée ! […] Des trois écoles philosophiques qui se partagent les esprits voués à la spéculation, c’est de beaucoup la moins nombreuse et la moins populaire : car c’est celle qui choque le plus le sens intime, celle surtout à laquelle l’imagination s’est toujours montrée le plus rebelle. […] Le fait est que la question n’est pas aussi simple que le pensent les moralistes profanes, et il faut y regarder de très-près pour voir où est l’exacte vérité dans ce débat entre la morale philosophique et la morale théologique. […] Que le monde moral ait ses lois aussi bien que le monde physique, rien n’est plus vrai ; que les sciences morales doivent tendre de plus en plus à la découverte, à la détermination de ces lois, rien n’est plus philosophique : mais là s’arrête l’analogie entre les deux ordres de sciences. […] Les Années philosophiques 1867 et 1868, par M. 

141. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Chapitre huitième L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). […] » Ce serait assurément beaucoup dire ; mais on peut soutenir qu’il est possible de trouver chez lui une grande richesse d’aperçus philosophiques, moraux, sociaux, et même de formules philosophiques dont il n’a pas toujours lui-même sondé la profondeur. […] On se rappelle ces espèces d’oracles philosophiques que contiennent les Contemplations, et tout ce que révèle la voix de l’ombre infinie, c’est-à-dire de l’univers, symboliquement appelée la « bouche d’ombre ». […] Ces vers sont, à notre avis, le modèle de la poésie philosophique. […] Renouvier, qui a publié autrefois dans la Critique philosophique de très belles études sur Hugo, fait remarquer que les oppositions de la lumière et de l’ombre ne tiennent tant de place dans les pièces lyriques du poète que depuis le livre philosophique des Contemplations.

142. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 277-279

Aussi le Carême qu’il a débité, cette année, à la Cour, a-t-il été regardé moins comme une suite d’Instructions évangéliques & chrétiennes, que comme un Cours d’éducation & de morale cent fois rebattue dans les Livres philosophiques de ce Siecle. […] De là, le défaut de liaison & de suite dans ses idées, d’assortiment dans l’ensemble, de caractere dans son style, tantôt philosophique, tantôt religieux, & toujours froid ; de là, ces figures étrangeres au sujet & préparées avec effort, ces tours étudiés, ces expressions symétriques qui supposent de l’esprit, mais qui décelent un cœur vide de sentimens, & par conséquent incapable de toucher les autres cœurs & de s’en rendre le maître.

143. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De la dernière séance de l’Académie des sciences morales et politiques, et du discours de M. Mignet. » pp. 291-307

Je comptais aujourd’hui parler encore du Roman de Renart et de ces malices du Moyen Âge ; mon second article est terminé, mais on me permettra de l’ajourner à huitaine pour m’occuper d’un petit événement littéraire et philosophique qui est d’hier, et dans lequel il s’est déployé du talent, de l’habileté, de la candeur, et même un peu de ruse. […] Bossuet, dans le Discours sur l’histoire universelle, après avoir énuméré les principales écoles philosophiques de la Grèce, celles de Platon, d’Aristote, de Zénon, d’Épicure, ajoute en passant brusquement aux Romains : Les Romains avaient dans le même temps une autre espèce de philosophie, qui ne consistait point en disputes ni en discours, mais dans la frugalité, dans la pauvreté, dans les travaux de la vie rustique et dans ceux de la guerre, où ils faisaient leur gloire de celle de leur patrie et du nom romain ; ce qui les rendit enfin maîtres de l’Italie et de Carthage. […] Jouffroy n’avait rien de cette activité extérieure, et toute la sienne se portait sur le fond même des questions morales et purement philosophiques qui faisaient son charme et son tourment. […] Jouffroy pour les études philosophiques et pour l’observation intérieure, j’ai toujours cru qu’après son premier feu jeté, il eût été bon pour lui de se détourner de cette contemplation absolue et un peu stérile où il s’est consumé, et d’appliquer son beau talent à des matières qui l’eussent nourri et renouvelé. […] Cousin disait à qui voulait l’entendre : « Damiron, — clarté littéraire, obscurité philosophique. » Depuis, après vingt années d’enseignement, et quand l’auteur de tant de mémoires étudiés et fins avait pris rang de maître (s’il devait jamais le prendre), M. 

144. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Argument » pp. 1-4

. == Cette science emploie d’abord des preuves philosophiques, ensuite des preuves philologiques. Les preuves philosophiques elles-mêmes sont ou théologiques ou logiques.

145. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — I. » pp. 235-256

Plus récemment, dans un travail philosophique non moins intéressant et des plus complets, où il a puisé aux meilleures sources biographiques, M.  […] Ce manuscrit intitulé Mon portrait historique et philosophique, et qui des mains de la famille a passé dans celles de M.  […] À dix-huit ans, au milieu des confusions philosophiques que les livres lui offraient, il lui arriva de dire : « Il y a un Dieu, j’ai une âme, il ne me faut rien de plus pour être sage. […] Quoi qu’il en soit, le beau monde recherchait beaucoup M. de Saint-Martin dans ce demi-incognito philosophique et divin où il vivait ; les princesses françaises et allemandes se le disputaient, dans un temps où il avait son logement au Palais-Bourbonf. […] Il me reste à bien montrer le rôle philosophique de Saint-Martin au milieu de la Révolution française, l’explication providentielle qu’il en donne, et qui, avec moins d’inclémence et moins d’éloquence aussi, ne fait toutefois qu’annoncer et présager la solution de De Maistre.

146. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Activité philosophique de Voltaire Alors, n’ayant plus rien à ménager puisqu’il n’avait plus rien à craindre, sentant la nécessité de ne pas se laisser distancer par les jeunes, Voltaire s’épanouit, plus fort, plus actif, plus jeune à soixante ans passés qu’il n’avait jamais été. […] De Ferney viennent des catéchismes portatifs, aux titres caractéristiques : Dictionnaire philosophique ou la Raison par alphabet (1764), Évangile de la Raison (1764), Recueil nécessaire (1768), puis, de 1770 à 1772, les neuf volumes de Questions sur l’Encyclopédie, qui ramassent dans toute l’œuvre philosophique de Voltaire les pages les plus efficaces sur toutes les matières. […] La satire du Pauvre Diable (1738) distribua impartialement de larges volées de bois vert sur les épaules de tous les ennemis du « vieux Suisse », ennemis philosophiques, poétiques, personnels ; jansénistes, jésuites, parlementaires, comique larmoyant, Gresset, Trublet, Pompignan, Desfontaines, Fréron, Chaumeix : que sais-je ? […] Voilà par où Voltaire est le maître du conte moral ou philosophique : ses chefs-d’oeuvre sont construits, dans leur plan et dans leur style, avec une rigueur mathématique ; tout y fait démonstration. […] Son Dieu philosophique était un postulat que son esprit acceptait, et qui n’intéressait pas son cœur.

147. (1888) La critique scientifique « La critique et l’histoire »

Revue philosophique, oct. 1882 [Il s’agit de l’article de la Revue philosophique cité plus haut « La répétition universelle », qui sera repris dans Les Lois de l’imitation en 1890. […] En effet, dans son article étudiant « La répétition universelle » (La Revue philosophique, 1882), le philosophe pense simultanément et analogiquement la répétition dans la nature et la répétition dans la société ; il décrit alors l’imitation sociale, métaphoriquement, en termes d’« onde » et de « vibration ». […] Tout ce passage est largement tributaire de la théorie psychosociale de Tarde, fondée sur l’imitation, et non sur la contrainte comme chez son grand rival Durkheim, exposée dans une série d’articles publiés dans La Revue philosophique entre 1882 et 1885, qui constitueront le noyau des Lois de l’imitation de 1890. […] Tort, Spencer et l’évolutionnisme philosophique, PUF, 1996. […] Juriste de formation, philosophe lecteur de Leibniz, criminologue opposé à Lombroso, psycho-sociologue rival de Durkheim, collaborateur depuis 1880 de la Revue philosophique de Ribot, co-directeur avec Lacassagne des Archives de l’anthropologie criminelle à partir de 1893, Tarde occupera en 1900 la chaire de « Philosophie moderne » du Collège de France.

148. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution française »

Après l’avoir dépouillée de ces trois caractères différents : providentiel, fatal, philosophique, Cassagnac arrache à la Révolution son caractère populaire. […] Ainsi, voilà le compte terminé des grandes causes de la Révolution française, Ni providentielle, ni fatalement logique, ni philosophique, ni populaire ! […] Après de longues années de grandes phrases et de pretintailles philosophiques, un esprit perçant, avisé, calmé par la critique et la science, conclut comme eux. […] En cela, il s’est mis d’un seul trait au-dessus de la funeste passion philosophique de son temps ; il a rompu avec des habitudes erronées et universelles. […] En prouvant, comme il l’a fait pour la Révolution française, qu’elle n’avait aucun des caractères providentiel, fatal, philosophique qu’on lui donne, il ne restait plus pour elle qu’une origine : la volonté et l’intelligence humaines, l’une dépravée et l’autre aveugle.

149. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

La plupart des principes philosophiques, qui tendaient à leur développement sous la Constitution de l’an III bien comprise et mieux respectée, trouvèrent un brillant organe en elle durant cette période, assez mal appréciée, de sa vie politique et littéraire. […] L’influence du Christianisme sur la société, lors du mélange des nouveaux-venus Barbares et des Romains dégénérés, n’est pas du tout méconnue ; mais cette appréciation, cet hommage, ne sortent pas des termes philosophiques. […] Suard et de la liberté philosophique dans les choses de l’esprit, donna trois bons articles signés D. […] En abordant l’Allemagne, Mme de Staël insista beaucoup aussi sur la partie philosophique, sur l’ordre de doctrines opposées à celles des idéologues français ; elle se trouvait assez loin elle-même, en ces moments, de la philosophie de ses débuts. […] L’influence de pensée que par cet ouvrage Mme de Staël exerça sur le jeune parti libéral philosophique, sur celui que la nuance du Globe représenta plus tard, fut directe.

150. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Mignet : Histoire de la Révolution française, depuis 1789 jusqu’en 1814. 3e édition. »

Venu à une époque philosophique, il n’a pu choisir que le point de vue du second ; venu après la plus complète et la plus irrésistible des révolutions humaines, il a dû, à l’exemple du premier, être tenté d’enchaîner toutes les phases des événements dans un système d’explications unique, universel, inflexible. […] Encore une fois, la force des choses de l’historien philosophique, laquelle résulte principalement de la nature humaine et de ses lois, ne signifie en sens mystique, pour l’historien sacré, que l’enchaînement des moyens dont la providence dispose. […] Thiers en accorde beaucoup moins aux inductions philosophiques, et laisse le plus souvent au lecteur le soin de les tirer, il semble plus à l’abri d’un défaut qui ne consiste, après tout, que dans l’expression trop absolue de certaines vérités générales.

151. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Le Génie du christianisme : son opportunité ; faiblesse de l’idée philosophique et du raisonnement ; comment l’ouvrage fut efficace. — 4. […] En vertu même de ce caractère, la forme de l’intelligence, en Chateaubriand, n’est pas philosophique ou scientifique, mais artistique. […] Au point de vue philosophique et logique, le Génie du Christianisme est singulièrement faible. […] Mais, si la faiblesse philosophique du livre n’en empêcha point l’efficacité pratique, elle le condamnait à n’avoir qu’une efficacité momentanée. […] Ce n’est pas que les idées littéraires de Chateaubriand valent beaucoup mieux que ses idées philosophiques.

152. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 489-492

Peut-être est-ce en faveur de son caractere, qu’on a jugé Perrault digne d’être agrégé au Corps philosophique. […] « Si l’on en excepte Perrault, dont le Versificateur Boileau n’étoit pas en état d’apprécier le mérite, & quelques autres, tels que la Motte, Terrasson, Boindin, Fontenelle, sous lesquels la raison & l’esprit philosophique ont fait de si grands progrès, il n’y avoit peut-être pas un homme [dans le Siecle dernier] qui eût écrit une page de l’Encyclopédie qu’on daignât lire aujourd’hui ».

153. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

Gasquet se réclame de l’enseignement orphique et affirme son intention de renouer le drame philosophique et religieux. […] III. — Théâtre satirique et philosophique C’est le théâtre dit injouable, parce qu’il paraît trop plein de pensées ou de paroles neuves et éternelles aux frivolités de notre public. […] Ses idées très originales, son lyrisme philosophique transportés au théâtre (Le Délire de Clytemnestre), sont à retenir. […] Franc-Nohain par Vingt mille âmes se révélait peintre exact et assuré des mœurs provinciales ; par La Fiancée du Scaphandrier, Papa les P’tits Bateaux, Aux temps des Croisades, etc…, il renouvelait la fantaisie et la poussait aux limites où elle atteint à la fois la comédie d’observation et la satire philosophique.

154. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

L’enseignement philosophique qui, par nature, ne peut suivre que de loin les travailleurs et inventeurs, comprit la physique jusqu’à la fin du xviiie  siècle. […] À une théorie comme celle de l’unité des forces physiques qui établit leurs corrélations et transformations, on reconnaît à juste titre une haute portée philosophique. […] Mais l’économie politique s’en tient aux faits, et quoiqu’elle supposé des principes philosophiques, elle ne les discute pas. […] De là ces constructions philosophiques qui ressemblent à de grands poëmes. […] Ce sont là des discussions purement philosophiques.

155. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Ackermann, Louise (1813-1890) »

. — Poésies philosophiques (1874). — Les Pensées d’une solitaire [précédées d’une autobiographie] (1883). […] Caro Au moins dans la forme d’un sentiment, sinon d’une doctrine, cette philosophie du désespoir a troublé, dans ces dernières années, plus d’une âme qui a cru se reconnaître dans l’accent amer, hautain, d’un poète de grand talent, l’auteur des Poésies philosophiques .

156. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 5-9

Ce dernier Recueil sur-tout n’a été, pendant tout le temps qu’il en a eu la direction, qu’un dépôt de fadeurs & de délires philosophiques, dont il ne paroît pas que le nouveau Directeur ait pris soin de le purger. […] Le Rédacteur de l’article en question n’a pas craint, malgré cela, d’altérer le dispositif de cette Sentence, & de la tourner tout à l’avantage de ma Partie adverse, par la raison qu’elle n’a pas donné lieu, comme moi, à la haine philosophique.

157. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Préface de l’auteur »

Mais quelle en est la signification philosophique ? […] La clef des plus gros problèmes philosophiques est là.

158. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

. — Le bon et le mauvais esprit philosophique. — § I. […] Il s’appelle l’esprit philosophique. […] Le bon esprit philosophique a inspiré tout ce que la littérature du dix-huitième siècle a de beautés durables. […] L’esprit philosophique n’y est pour rien. […] Dictionnaire philosophique, art.

159. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — I » pp. 236-253

Il a écrit dans son livre De la sagesse, en distinguant chez les hommes les divers genres de vie, soit tout à fait privée et intérieure, soit de famille, soit publique, que « de ces trois vies, interne, domestique, publique, qui n’en a qu’une à mener, comme les ermites, a bien meilleur marché de conduire et ordonner sa vie, que celui qui en a deux ; et celui qui n’en a que deux, est de plus aisée condition, que celui qui a toutes les trois. » Serait-ce dans ce sens tout philosophique qu’il voulait devenir ermite ou religieux ? […] Quelques-uns de ces caractères ne laissent pas d’étonner au premier abord : en effet Charron s’y montre plus sceptique dans l’exposé de certaines vérités naturelles qu’on ne s’y attendrait d’après son rôle public de théologien, et il nous est possible, sans trop de difficulté, de retrouver le lien qui unit ses ouvrages de religion et d’apologétique à celui qu’il composera bientôt à un point de vue tout philosophique, comme disciple de Montaigne, et sous le titre humain De la Sagesse. […] À le bien écouter, même en ses homélies, il semble qu’il ait toujours par-devers lui et en secret un autre refuge et comme une place de sûreté dans un certain système de sagesse philosophique. […] C’est le naufragé qui, réchappé à peine, veut sauver ses compagnons de naufrage ; car lui, il n’a pas sa porte de derrière comme Charron, son belvéder philosophique, son rocher du sage. […] Ils venaient dans les premières années du règne de Henri IV pour rattacher à la religion de l’État et à celle du prince nombre d’esprits raisonneurs, sérieux, assez philosophiques, et surtout politiques.

160. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Cousin, portant en lui tour à tour Maine de Biran, Royer-Collard, Platon, Plotin, Schelling, Descartes et Leibnitz, a fait briller au loin sur l’horizon philosophique leurs rayons un peu déviés et un peu déteints. […] Il n’est point allé emprunter une lampe oubliée dans la nécropole philosophique où dorment les systèmes ensevelis, veillés par le poudreux cortège des historiens et des antiquaires. […] On le juge aussi soigneux dans ses fautes que dans ses réussites ; lorsqu’il se trompe, il est exempt de reproche ; il a employé toute sa force ; ce sont les circonstances ou quelque invincible illusion philosophique qui l’ont perdu. […] Involontairement il faisait comme Descartes : il s’attachait aux pieds, comme des entraves, la méthode et les règles philosophiques ; mais il tenait ses yeux fixés sur un but unique, et n’allait que là. […] —De l’organisation des sciences philosophiques.

161. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LIV » pp. 209-212

La tendance de cet éclectisme a été de se rédiger en une sorte de religion philosophique officielle, il a essayé même un jour d’avoir son catéchisme. […] la liberté de penser, qui doit supposer possibles d’autres résultats philosophiques que l’éclectisme, n’a pas eu son organe dans la discussion.

162. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre premier. Aperçu descriptif. — Histoire de la question »

De Bonald paraît avoir conçu son système philosophique entre 1796 et 1802, date de la publication de la Législation primitive. […] Ecrit en 1818, à l’occasion des Recherches philosophiques ; publié par Naville, dans les Œuvres inédites. […] Cf. le Mémoire sur l’habitude (1802) [Le titre précis de l’ouvrage de Maine de Biran est Influence de l’habitude sur la faculté de penser (1802).], p. 39 (Œuvres philosophiques, éd. […] III, p. 279 (2e éd., 1875) Critique philosophique, 10 juin 1875, p. 308. […] Il est le traducteur en 1797 des Essais philosophiques d’Adam Smith et en 1808 des Eléments de la philosophie de l’esprit humain de Dugald Stewart.

163. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre I. Bernardin de Saint-Pierre »

C’est lui qui a créé les symboles de la religion philosophique, le culte laïque des grands hommes et des bons hommes, dont un Élysée national rassemblerait les cendres, les bustes, les monuments ; à côté des bienfaiteurs du genre humain, y seraient reçus le laborieux pêcheur et le charbonnier vertueux. […] Il n’a eu à trouver que l’idée très simple, l’idée de génie par laquelle la niaiserie philosophique est devenue efficace et profonde. […] A peine quelques fausses notes que la sentimentalité philosophique du temps ne remarquait pas : « les pâles violettes de la mort se confondaient sur ses joues avec les roses de la pudeur ».

164. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 424-428

Seroit-ce sur les lumieres philosophiques ? […] Il faut croire qu’abandonné à lui-même, son jugement est moins exposé aux méprises, que lorsque l’enthousiasme philosophique lui sert de guide.

165. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

Ses Dialogues ont été le perpétuel entretien de la Grèce : ils ont préparé l’esprit humain à la métaphysique de saint Paul et à l’école philosophique d’Alexandrie. […] Voilà l’Euthyphron ; la préface, ou plutôt l’exposition du drame philosophique. […] Ces ancêtres, selon nous, qui avons profondément scruté l’Orient religieux, philosophique et poétique, se retrouvent d’abord au fond de l’Inde primitive, puis au fond des dogmes, encore indiens, de l’Égypte. […] Saint Augustin dans son livre de la Cité de Dieu, Voltaire dans ses recherches philosophiques, Scaliger lui-même, n’hésitent pas à reconnaître dans ce livre la main d’un sage Égyptien. […] » Peut-on méconnaître les analogies frappantes entre ces doctrines engendrées les unes des autres jusqu’à l’explosion philosophique du dogme chrétien ?

166. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Ne vous y trompez pas, c’est la même audace à froid, la même haine de la vérité chrétienne, la même négation, le même athéisme philosophique, et j’insiste sur ce nom d’athée que je justifierai tout à l’heure et que je donne hardiment à M.  […] Une seule manquait, une seule qui n’aurait pas manqué au xixe  siècle, mais qui effrayait les hypocrisies philosophiques de celui-ci. […] Même dans l’Éclectisme, qui n’est pas, comme l’on sait, une bien grosse montagne philosophique, il y a plus que ne pourrait porter M.  […] Michelet, malgré son enthousiaste admiration pour le grand citoyen Robespierre, ne lui pardonne pas l’institution de la fête de l’Être suprême, et il tient contre elle avec Chaumette, le fondateur plus philosophique de la fête de la Raison ! […] partout où les idées philosophiques s’obstinent aujourd’hui à la voir, et où elle est si profondément déplacée.

167. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque. Deuxième partie. » pp. 225-303

Mais, nous le répétons avec douleur, là s’arrête la divinité philosophique de Platon ; presque dans tous ses autres dialogues le saint disparaît, le rhéteur se montre, argumente, et le dialecticien, faisant un ennuyeux abus de la parole, se livre à des puérilités d’esprit qui font rougir le génie grec. […] Écoutez, non plus ce rêve, mais ce délire philosophique, hélas ! […] Elle a servi depuis de texte à mille rêveries prétendues sociales et politiques, mais qui ne sont, en réalité, ni politiques, ni philosophiques, ni même poétiques, à l’exception de la descente de l’Arménien aux enfers. […] La propriété, c’est la vie : voilà l’axiome vraiment philosophique ; quiconque dépossède tue ! […] Il ne resterait plus à un pareil législateur qu’à interdire le mariage et qu’à honorer le célibat philosophique pour consommer autant qu’il serait en lui le suicide de l’espèce humaine !

168. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Lettres de m. l’Abbé Sabatier de Castres ; relatives aux trois siecles de la littérature françoise.ABCD » pp. -641

Un Auteur que l’amour du bien public a dévoué, comme moi, à toute l’amertume ainsi qu’à tous les traits de l’animosité philosophique & littéraire, peut & doit même mépriser les déclamations atroces. […] Sous ce dernier titre, Votre Majesté ne pourra qu’applaudir au zele qui m’a inspiré dans l’exposé des Trois Siecles de notre Littérature, & dans la censure des travers philosophiques, qui dégradent les Lettres parmi nous. […] Si vous êtes curieux d’apprendre comment, au milieu de cet ébranlement général, les Divinités majeures du Monde Philosophique ont vu les atteintes portées à leur culte & à leurs Adorateurs, vous saurez qu’elles sont restées muettes pendant quelque temps. […] Croiriez-vous que dans un de ces Libelles, vraiment philosophiques, on m’ait sérieusement reproché mon peu de fortune & attaqué du côté de la naissance ? […] Oui, Monsieur, quoique j’aye toujours eu une certaine antipathie pour la morgue philosophique, j’ai cependant été ébloui, dès les premieres années de mes études, de cet appareil imposant, dont ils savent si bien revêtir les choses médiocres.

169. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

Sa Justice dans la Révolution nous a appris qu’il n’est pas de si grande maison philosophique. […] Pour lui, cet homme, qui voit la Révolution au kaléidoscope, lequel lui renvoie la Révolte, Satan et sa propre individualité ; pour lui, cet homme, trombe de toutes les folies personnifiées, la question — et la question philosophique ! […] Qui pourrait, parmi les plus robustes estomacs littéraires et philosophiques, avaler cette pilule-bombe, si elle n’était pas bourrée d’injures, toujours douces à nos cœurs quand elles sont pour d’autres que nous ! […] Sans cela, cet homme de si peu de besoins, d’un tempérament si philosophique, serait aisément stoïque contre elles. […] Il avait la chasteté cérébrale, — ce tempérament philosophique que n’avait pas Diderot, le philosophe.

170. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre V. Le roman romantique »

Thèses philosophiques, autobiographie sentimentale, impressions pittoresques, ces trois éléments, ajoutés parfois, et le plus souvent substitués à la description des mœurs et à la psychologie analytique, avaient à peu près détruit l’objectivité du roman, et n’y avaient laissé que comme un voile au travers duquel transparaissait l’individualité librement étalée. […] L’ensemble est un roman philosophique et symbolique : d’abord c’est le poème du repentir, du relèvement de l’individu par le remords et l’expiation volontaire. […] Rien de plus romanesque, parfois de plus fantastique que ces histoires d’amour, traversées de déclamations philosophiques et d’exposés souvent bien verbeux de théories égalitaires. […] Nous pouvons laisser de côté les théories politiques, sociales et philosophiques de George Sand : elles attestent la force de ce grand courant d’idées humanitaires, démocratiques et socialistes qui a traversé la société et la littérature après 1830, et surtout entre 1840 et 1850. […] Il se croit une lumière des esprits, tout au moins un médecin qui, gravement, tâte le pouls au siècle, il réfléchit, disserte, expose, coupe son récit de tirades sociales ou philosophiques, où il affaiblit et délaie les observations justes dont l’action même du roman fournissait une expression concrète.

171. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

Érudition, critique, bon sens, exposition presque exacte des dogmes et des institutions, vues philosophiques sur l’enchaînement des faits et sur le cours général des choses, il n’y manque rien, si ce n’est des âmes. […] Conformité de la méthode philosophique. — L’idéologie. — Abus du procédé mathématique. — Condillac, Rousseau, Mably, Condorcet, Volney, Siéyès, Cabanis, Tracy […] Dans un livre qui est comme le testament philosophique du siècle382, Condorcet déclare que cette méthode est « le dernier pas de la philosophie, celui qui a mis en quelque sorte une barrière éternelle entre le genre humain et les vieilles erreurs de son enfance ». — « En l’appliquant à la morale, à la politique, à l’économie politique, on est parvenu à suivre dans les sciences morales une marche presque aussi sûre que dans les sciences naturelles. […] Voltaire, Dictionnaire philosophique, article Langues . « De toutes les langues de l’Europe, la française doit être la plus générale, parce qu’elle est la plus propre à la conversation. […] Par exemple, l’article Ignorance dans le Dictionnaire philosophique.

172. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. Le théâtre romantique »

Les Burgraves sont « le symbole palpitant et complet de l’expiation » ; ils posent devant les yeux de tous une « abstraction philosophique », la « grande échelle morale de la dégradation des races ». […] Entre l’individualité historique et le symbolisme philosophique disparaît la psychologie, l’étude des caractères généraux, vrais et vivants. […] De la pièce romantique qui, étant tout, n’est rien, l’un tirera le mélodrame, un autre la tragédie, un autre la comédie larmoyante ; l’un trouvera le drame philosophique, un autre le spectacle historique. […] L’objet de Vigny n’est pas une étude de caractère, une analyse de sentiments : c’est de manifester une idée philosophique. « J’ai voulu montrer l’homme spiritualiste étouffé par une société matérialiste, où le calculateur avare exploite sans pitié l’intelligence et le travail. » Chatterton est le symbole (le mot est de Vigny) du poète. […] Dès qu’il est individuel, il perd les raisons de mourir, et sa plainte dépasse son mérite ou sa misère : tant qu’il reste une abstraction philosophique, il n’est pas vivant, et qu’importe alors qu’il meure ?

173. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les fondateurs de l’astronomie moderne, par M. Joseph Bertrand de l’académie des sciences. »

Reportons-nous par la pensée au moment même où l’ouvrage parut, cet ouvrage si neuf, tout rempli et comme émaillé de vues philosophiques et scientifiques élevées, rendues avec piquant, avec imprévu, et se faisant accepter en faisant sourire. […] Les vieilles erreurs avaient fait leur temps pour le petit nombre des esprits éclairés et philosophiques ; pour les autres, les absurdes idées qu’on s’était forgées du monde, de l’univers, subsistaient encore. […] La science a marché, elle avance chaque jour, et ses résultats appartiennent à tous : l’esprit philosophique reste une faculté toute particulière et individuelle ; il est et sera toujours une chose rare. […] Biot l’ont évidemment dominé dans la révision de cette affaire de Galilée et ont imposé leurs limites à ses sentiments philosophiques et scientifiques. […] Une audience si bénigne du Pape n’est pas, on en conviendra, la meilleure préparation philosophique pour un jugement de Galilée.

174. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « La Mare au diable, La Petite Fadette, François le Champi, par George Sand. (1846-1850.) » pp. 351-370

L’auteur met en avant une idée philosophique, et je tremble toujours quand je vois une idée philosophique servir d’affiche à un roman. […] Il faut que tous soient heureux… Je supprime la série de ces Il faut, qui seraient mieux placés dans un de ces petits sermons philosophiques où ceux qui cherchent à imposer aux autres une foi qu’ils ne sont pas bien sûrs d’avoir eux-mêmes, s’échauffent en parlant, affirment sur tous les tons, et se font prophètes afin de tâcher d’être croyants. […] Mais, moralement, non moins que poétiquement, il y avait des qualités et des vertus que l’âge nouveau, avec ses inventions et ses recettes industrielles ou philosophiques, n’a pas su remplacer encore. […] On y peut voir aussi, à quelques-unes de ses paroles, une protestation contre la société au nom des êtres disgraciés et intelligents ; mais, ici, toutes ces idées sont arrêtées à point et revêtues de formes si vivantes, si gracieuses et si peu philosophiques, qu’on n’a le temps ni l’envie de les discuter.

175. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Chacun de ses savants écrits, ses Études d’histoire religieuse, ses Essais philosophiques et littéraires s’enlevaient rapidement, et il avait atteint, auprès du public lettré, à ce degré le plus désirable de considération et d’intérêt soutenu, au-delà duquel il n’y a plus que la vogue avec ses inconstances. […] Mais cet enseignement philosophique ne lui allait pas ; et dans son morceau sur l’Avenir de la métaphysique, à l’occasion d’un livre de M.  […] Et puis, nous dit-il encore : « Si j’étais né pour être chef d’école, j’aurais eu un travers singulier : je n’aurais aimé que ceux de mes disciples qui se seraient détachés de moi. » L’enseignement philosophique, en effet, s’il n’est pas la démonstration obligée d’une sorte de catéchisme philosophique dont les articles, posés à l’avance, sont réputés irréfutables, ne saurait être qu’une provocation et une excitation à une recherche incessante, qui, dès lors, amène avec elle ce qu’elle peut et n’exclut rien de ce qu’elle trouve.

176. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre II : Partie critique du spiritualisme »

Le moi l’occupait tout entier, et la pensée de l’absolu et du divin semblait dormir dans les profondeurs de sa conscience : une note mystérieuse ajoutée aux Rapports du physique et du moral était la seule indication d’une tendance religieuse et déjà mystique qui devait se développer plus tard dans sa dernière phase philosophique. De cette dernière phase, il ne nous reste que des débris, et tout porte à croire qu’elle était plutôt un sentiment de l’âme qu’une doctrine rigoureusement philosophique. […] C’est surtout dans cette partie de la philosophie que le spiritualisme a le plus à faire pour se mettre au niveau des recherches scientifiques et philosophiques de notre temps. […] Le faible du déisme philosophique, c’est de concevoir Dieu comme une chose séparée, en dehors du moi, en dehors du monde.

177. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VI. Le charmeur Anatole France » pp. 60-71

Anatole France ne s’est pas perdu en devenant compréhension philosophique. […] Jérôme Coignard, rubrique de L’Écho de Paris, précisent la nuance philosophique de M.  […] Enfin, ménageons-nous une foi, soit dans une confession religieuse, soit dans une doctrine scientifique, ou dans un credo philosophique ; l’essentiel est de mettre un fil qui ne casse pas entre nos jours mal attachés une bonne manie suffit au besoin ; des individus trouvent une raison de vivre dans une collection de tabatières à parachever… Jérôme Coignard est un sage hardi et prudent.

178. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre III. Suite du précédent. — Seconde cause : les anciens ont épuisé tous les genres d’histoire, hors le genre chrétien. »

Enfin la corruption des hommes, les règnes de Tibère et de Néron, firent naître le dernier genre de l’histoire, le genre philosophique. […] Suétone conta l’anecdote sans réflexion et sans voile ; Plutarque y joignit la moralité ; Velleius Paterculus apprit à généraliser l’histoire sans la défigurer ; Florus en fit l’abrégé philosophique ; enfin, Diodore de Sicile, Trogue-Pompée, Denys d’Halicarnasse, Cornelius-Nepos, Quinte-Curce, Aurelius-Victor, Ammien-Marcellin, Justin, Eutrope, et d’autres que nous taisons, ou qui nous échappent, conduisirent l’histoire jusqu’aux temps où elle tomba entre les mains des auteurs chrétiens : époque où tout changea dans les mœurs des hommes.

179. (1858) Du roman et du théâtre contemporains et de leur influence sur les mœurs (2e éd.)

Un épilogue qui clôt le mystère nous révèle la pensée philosophique du livre. […] L’auteur lui-même la porte sur un autre terrain, non point historique, mais philosophique. […] Quelle inépuisable matière à l’amplification littéraire et au paradoxe philosophique ! […] Regardez où nous ont conduits les idées, les doctrines morales, les théories philosophiques et sociales prêchée ? […] Vous n’avez plus ni la foi chrétienne ni la foi philosophique.

180. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DAUNOU (Cours d’Études historiques.) » pp. 273-362

Le jeune Oratoire était en partie philosophique, et de la philosophie d’alors la plus avancée. […] Le sujet de cet autre concours était plutôt philosophique et de droit civil, l’autorité des parents sur les enfants. […] Nous touchons là du doigt la grande erreur et l’illusion philosophique de la fin du xviiie  siècle. […] — Ce mémoire donnerait une fausse idée des opinions philosophiques de l’auteur, si l’on y voyait des conclusions expressément déistes. […] Daunou consigne dans ce dernier mot ce vœu le plus cher d’une vie philosophique heureuse et non périlleuse, qui lui échappait souvent : c’était son idéal à lui.

181. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Garnier avait découvert dans l’Essai sur La Fontaine un venin philosophique caché ; M.  […] Sa méthode d’exposition philosophique s’était modifiée pendant cette année d’observation de la vie réelle. […] Pour lui, l’histoire n’est ni un récit, ni une analyse philosophique, c’est une résurrection. […] Il ne construisait point de théories philosophiques, il ne s’amusait point à la métaphysique. […] C’est vers la philosophie qu’il se tourne d’abord ou plutôt vers l’histoire philosophique.

182. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Pottecher, Maurice (1867-1960) »

. — La Peine de l’Esprit, drame philosophique (1891). — Le Chemin du Mensonge, légendes, nouvelles et contes (1896, réédité 1898). — Le Diable marchand de goutte, pièce en trois actes (1895). — Morteville, drame en trois actes (1896). — Le Sotrè de Noël, farce rustique en trois actes, en collaboration avec Richard Auvray (1897). — Liberté, drame en trois parties. — Le Lundi de la Pentecôte, comédie en un acte (1898). — Chacun cherche son trésor, comédie en trois actes, en vers et en prose, musique de Lucien Michelot (1899). — Le Théâtre du Peuple, renaissance et destinée du théâtre populaire (1899). — L’Exil d’Aristide, conte (1899). — Le Chemin du repos, poèmes (1890-1900) [1900]. […] Maurice Pottecher est un poète philosophe ; son drame philosophique plaira aux penseurs, car il fait penser, ce qui n’est jamais vulgaire. — Et n’y a-t-il pas là un vaillant effort ?

183. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 532-537

On chercheroit en vain, dans ses Epîtres & dans ses Discours philosophiques, ce ton d’aigreur & de cynisme, qu’un coloris séduisant n’est pas capable d’adoucir ; ces maximes hardies qui défigurent toutes notions ; cet appareil de sentiment qui n’échauffe que l’imagination & laisse le cœur froid. […] Nous ne citerons rien de ses Discours philosophiques, parce que tout y est d’une égale beauté ; nous dirons seulement qu’ils suffiroient pour faire la réputation d’un grand Poëte, & qu’ils passeront à la Postérité, malgré les cris de l’Envie, comme un des plus beaux monumens de la Littérature de ce Siecle.

184. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre VI. Observations philologiques, qui serviront à la découverte de véritable Homère » pp. 274-277

Manéthon, grand pontife d’Égypte, avait donné à l’histoire des premiers âges de sa nation, écrite en hiéroglyphes, l’interprétation d’une sublime théologie naturelle ; les philosophes grecs donnèrent une explication philosophique aux fables qui contenaient l’histoire des âges les plus anciens de la Grèce. Nous avons, dans le livre précédent, tenu une marche tout à fait contraire : nous avons ôté aux fables leurs sens mystique ou philosophique pour leur rendre leur véritable sens historique. — 3.

185. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Cousin, et tout d’abord il marqua dans l’école philosophique au premier rang des amateurs, en attendant qu’il y fît sa place comme un maître. […] L’auteur y embrasse et y résume d’un coup d’œil philosophique les différentes phases par lesquelles a passé la liberté de la presse en France. […] M. de Rémusat est de ceux du moins qui ne sauraient se faire à l’indifférence en matière de vérité ; c’est sous cette forme plutôt philosophique qu’il combat le mal présent. […] Maintenant on comprend sans peine comment, en 1836, l’auteur, se retrouvant de loisir, médita d’aborder le vrai drame et d’y développer une sérieuse pensée philosophique. […] Archives philosophiques, politiques et littéraires, tome V, 1818.

186. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Lélia (1833) »

Mme de Staël avait uni à des dons puissants d’imagination et de sensibilité un coup d’œil politique et philosophique fort étendu ; mais elle faisait exception dans son sexe, et, depuis elle, la prétention de nos femmes, même les plus distinguées, s’était restreinte à des chants suaves, à de délicates peintures, à une psychologie fine et tendre sous l’aile du christianisme. […] Nous avons essayé autrefois de caractériser le genre de mérite et d’intérêt de ce premier ouvrage, mais sans faire assez ressortir peut-être l’inspiration philosophique et l’esprit de révolte contre la société qui perçait en maint endroit ; ce même esprit, qui ne s’était montré dans Valentine que sous des nuances moins directes et plus distrayantes, vient d’éclater avec toute son énergie et sa plénitude dans Lélia, roman lyrique et philosophique.

187. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « en tête de quelque bulletin littéraire .  » pp. 525-535

Le rapprochement philosophique et littéraire de l’auteur des Paroles d’un Croyant et du peintre magnifique de Lélia n’a rien eu de plus inattendu, de plus caractéristique par rapport à l’époque, que le soudain et profond reflet que vient de jeter la manière de M. de Balzac sur toute une partie souterraine de la Chute d’un Ange par M. de Lamartine. […] Le journal de la Restauration dans lequel s’est faite la meilleure, la plus intelligente et la plus loyale critique, le Globe, présentait essentiellement cet avantage d’un groupe uni par la même éducation philosophique, par les mêmes antécédents et les mêmes impulsions d’esprit. […] » On continuerait encore longtemps sur ces difficultés et ces épines de la critique, mais nous nous en tiendrons là, d’autant que ce dernier point nous mène assez droit à la récente publication de M. de Balzac… Les talents poétiques et littéraires d’aujourd’hui (sans parler des autres, politiques et philosophiques), sont soumis à de redoutables épreuves qui furent épargnées aux beaux génies du siècle de Louis XIV, et il est bien juste de tenir compte, en nous jugeant, de ces difficultés singulières qu’on a à subir.

188. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 151-168

Ils ont beau s’écrier d’un fausset philosophique, qu’il n’a fait que copier Horace & Juvenal, qu’il n’est tout au plus qu’un bon versificateur, qu’il ne connut jamais le sentiment, que ses idées sont froides & communes, qu’il n’est pas enluminé comme eux, qu’il n’a qu’un ton, qu’une maniere ; ils ont beau s’applaudir réciproquement de leurs prouesses littéraires, lever jusqu’aux nues l’entortillage & l’enflure de leurs pensées, ne trouver rien d’égal à la profondeur de leurs courtes vues, s’extasier sur le vernis de leurs mystérieuses expressions ; la voix noble & ferme de Stentor n’a qu’à se faire entendre, & aussitôt cette engeance mutine disparoîtra, avec son Général, pour se cacher sous ses humbles pavillons. […] Où trouver une touche plus philosophique, que dans la Description des maux qui suivent la mollesse & l’oisiveté ? […] Les Zélateurs du sentiment, qui en ont eux-mêmes si peu, voudroient-ils qu’il eût perverti les genres ; qu’il nous eût donné des doléances aussi déplacées que celles qui nous endorment dans leurs Romans, dans leurs Tragédies, dans leurs Œuvres philosophiques, dans leurs Comédies…. ?

189. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXV. Le Père Ventura »

Ventura est une intelligence philosophique. […] Gratry, un des esprits les plus aptes à la lutte, dans la grande bataille philosophique qui n’est pas finie. […] Ce n’est pas dans un chapitre d’un livre comme le nôtre, — un index des travaux philosophiques et religieux de ce temps, — qu’on peut analyser ou seulement jauger le flot de choses qui passent à travers ces sujets, tout à la fois éternels et contemporains.

190. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — II » pp. 375-394

Du sein de ce séjour enchanté, il se piquait de tout voir avec une tranquillité philosophique. […] Insistant sur l’utilité dont peut être une bonne dialectique pour prémunir contre les faux jugements : « Il est certain, dit-il, que la lecture fréquente des ouvrages de Bayle donne à l’esprit une certaine volubilité sur cette matière, qu’il ne tiendra jamais uniquement des avantages de la nature. » Tout en recommandant particulièrement à son frère quelques écrits de son auteur de prédilection, il ajoute que lui-même est occupé de faire imprimer en ce moment un extrait du Dictionnaire ; il compte que cet abrégé, qui porte principalement sur la partie philosophique de l’ouvrage, se répandra dans le public et pourra être utile : Je suis persuadé que la mauvaise conduite de la plupart des hommes vient moins d’un principe de méchanceté que d’une suite de mauvais raisonnements ; et je crois par conséquent que si on pouvait leur apprendre à raisonner d’une façon plus juste et plus conséquente, leurs actions s’en ressentiraient d’une manière avantageuse. […] En attendant, et tout en s’excusant de la sorte, ce roi, encore tout chaud et tout poudreux de la guerre de Sept Ans, ne laisse pas de payer tribut à l’idée philosophique, en se faisant l’abréviateur et l’éditeur de Bayle. […] Il est curieux de voir, à cette fin de campagne, l’impatience du vieux guerrier qui, arrivé toutefois à son but pour la politique, frémit de colère de n’avoir pu frapper un dernier coup, et de se voir obligé à remettre l’épée dans le fourreau sans s’être vengé une bonne fois de ses ennemis dans une bataille : « En fait de campagne, disait-il en se jugeant avec une sorte d’amertume, nous n’avons fait (cette fois) que des misères55. » Dans les années qui suivent, on retrouve Frédéric et le prince Henri en conversation par lettres, en discussion philosophique sur les objets qui peuvent le plus intéresser les hommes, la religion, la nature humaine et le rang qu’elle tient dans l’univers, les ressorts et mobiles qui sont en elle, et les freins qu’on y peut mettre. […] Cette lettre du prince Henri est suivie de six lettres philosophiques de Frédéric où, sans le combattre directement, il dit à côté, et du ton particulier, mordant et original qui lui est propre, bien des choses faites pour provoquer les réponses du prince.

191. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

L’édition contient ensuite les Mélanges philosophiques et littéraires du roi ; ses Poésies qui sont pour nous son plus gros péché, mais qu’on ne pouvait omettre et qui ont leur valeur historiquement ; enfin l’on arrive à la Correspondance qui, avec les histoires, forme la partie la plus intéressante de cette grande publication. […] L’esprit humain, pour sortir de la routine où il est sujet à s’endormir et à se rouiller, a de temps en temps besoin d’un précepteur philosophique nouveau : ce précepteur excitateur, qui doit quelque peu se mettre à la portée des gens du monde, varie beaucoup selon les pays et selon les temps : tantôt ce sera La Sagesse de Charron, tantôt La Logique de Port-Royal ou même Malebranche en ses Entretiens, tantôt Locke qui, pour la France, fut toujours trop long. […] Je cours après le temps que j’ai perdu si inconsidérément dans ma jeunesse, et j’amasse, autant que je le puis, une provision de connaissances et de vérités. » Plus tard, bientôt, au lendemain de son avènement au trône, la passion le saisira ; l’amour de la gloire, l’idée de frapper un grand coup au début et de marquer sa place dans le monde le fera, coûte que coûte, guerrier et conquérant ; il semblera oublier ses vœux et ses serments philosophiques de la veille ; il oubliera qu’il vient justement de réfuter Machiavel, il distinguera entre la morale qui oblige les particuliers et celle qui doit diriger le souverain. […] Nous allons représenter l’Œdipe de Voltaire, dans lequel je ferai le héros de théâtre ; j’ai choisi le rôle de Philoctète ; il faut bien se contenter de quelque chose… M. de Suhm, qui l’a compris, et qui lit, à travers cette indifférence soi-disant philosophique, le regret et le tourment d’une âme amoureuse des grandes choses, lui va toucher la fibre secrète et le rassure en lui disant : La réflexion que vous faites, Monseigneur, sur le bonheur qu’il y a à venir à propos dans le monde est des plus justes, et serait très propre à consoler le héros (le prince d’Anhalt) dont Votre Altesse Royale a une si haute opinion, si à ses qualités guerrières il savait joindre votre philosophie, Monseigneur. […] On se demande ce que serait devenue cette incomparable amitié si M. de Suhm avait vécu, ce qu’il aurait pensé de son ami le philosophe en le voyant devenu guerroyeur et conquérant, ce qu’il aurait dit des soupers de Potsdam, des entretiens de Sans-Souci, des licences philosophiques que certains convives y apportaient, et si l’idéal premier, au milieu de l’admiration persistante, n’aurait pas subi un déchet inévitable ?

192. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre II : Rapports de l’histoire de la philosophie avec la philosophie même »

Cette méthode barbare, qui a jusqu’ici régné dans l’établissement des systèmes philosophiques, outre qu’elle est très-injuste, a un grand inconvénient : c’est que chaque nouveau philosophe, en détrônant son prédécesseur, étouffe en même temps les vérités partielles que celui-ci peut avoir découvertes. […] Au reste, ce travail de restauration, qui consiste à retrouver et à préserver la tradition philosophique, à sauver cet héritage successivement accru par les âges, mais trop souvent renversé et détruit par les révolutions et les réactions, les révoltes et les coups d’État, les anarchies et les dictatures (car les écoles passent par les mêmes crises que les États), ce travail conservateur et réparateur ne doit pas être confondu avec ce que l’on a de nos jours appelé l’éclectisme. […] En second lieu, le progrès philosophique ne va pas jusqu’à détruire toutes les hypothèses précédentes au profit de l’hypothèse nouvelle ; mais l’on voit presque toujours tous les grands systèmes se reproduire ensemble ou du moins se succéder dans une série d’oscillations à peu près les mêmes. […] On a dit souvent que la cause des erreurs philosophiques est dans nos passions, et que si les vérités géométriques étaient aussi contraires à nos passions que le sont les vérités morales et religieuses, il y aurait autant d’hommes qui nieraient la géométrie qu’il y en a pour nier Dieu et la vie future. […] Rien de plus simple, pour peu qu’on ait l’esprit droit, le caractère bien fait et une solide éducation philosophique, que de reconnaître la vérité partout où elle se présente, que de rendre justice successivement à Descartes et à Locke, à Spinoza et à Kant.

193. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Il y a encore en lui l’artiste amateur qui, dans les genres à la mode qui passent, en saisit un, l’essaie, s’y exerce, s’y déploie et y réunit peut-être plus qu’il n’ose croire : c’est ainsi que M. de Rémusat a fait, depuis près de trente ans, plusieurs drames historiques, philosophiques, qui enlevèrent les applaudissements du monde d’élite qui en entendit la lecture, et dont l’un au moins, le drame d’Abélard, obtiendrait, j’en suis certain, le suffrage du public des lecteurs, si l’auteur se décidait à le publier. […] Très jeune, M. de Rémusat s’est pris d’un goût vif pour les questions philosophiques et métaphysiques, et pour cette escrime déliée qui semble tenir à la qualité même de l’intelligence. […] M. de Rémusat, dans les trois derniers chapitres de son livre, s’est étendu sur les ouvrages philosophiques de son auteur. Dans les développements qu’il y donne, il me permettra de regretter que là, comme il lui arrive d’ordinaire en pareille matière, il se soit trop asservi aux formes philosophiques du jour, et que lui, esprit si vif et si français quand il le veut, il ne perce pas d’outre en outre, une fois pour toutes, ces expressions vagues et vaines, ces métaphores abstraites qui donnent un air de réalité à ce qui n’est que le nuage subtilisé du raisonnement.

194. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de l’Évangile » pp. 89-93

Ne sachant trop que penser, lancé dans un sens par sa passion politique ou philosophique, relancé dans la voie contraire par ce que l’Histoire, dont on n’éteint pas complètement la lueur en soi, lui a pendant si longtemps enseigné, il ne sait à quoi se résoudre. […] partout où les idées philosophiques s’obstinent aujourd’hui à la voir, et où elle est si profondément déplacée.

195. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre VII » pp. 278-283

Découverte du véritable Homère Ces observations philosophiques et philologiques nous portent à croire qu’il en est d’Homère comme de la guerre de Troie, qui fournit à l’histoire une fameuse époque chronologique, et dont cependant les plus sages critiques révoquent en doute la réalité. […] Longin n’ose défendre de telles fables qu’en les expliquant par des allégories philosophiques ; c’est dire assez que, prises dans leur premier sens, elles ne peuvent assurer à Homère la gloire d’avoir fondé la civilisation grecque. — Toutes ces imperfections de la poésie homérique que l’on a tant critiquées répondent à autant de caractères des peuples grecs eux-mêmes. — 5.

196. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

En philosophie, il nous faut prendre Cousin, et laisser Maine de Biran ; surtout il nous faut écarter la plus puissante et, en tout cas, la plus féconde pensée philosophique de ce demi-siècle : je parle d’Auguste Comte ; et quelque fâcheux sort a voulu que l’école positiviste ne fournît aucun écrivain. […] Il avait inventé le nouveau spiritualisme, philosophie oratoire, libéralisme philosophique, juste et commode doctrine bien taillée sur l’intelligence et les intérêts du bourgeois français. […] Il aborda toutes les questions politiques, sociales, philosophiques qui passionnaient les esprits, il parla de la démocratie, des nationalités, de la Pologne, de tous les sujets brûlants. […] Jouffroy (1796-1842), suppléant de Royer-Collard à la Sorbonne en 1830, professeur au Collège de France, député de 1831 à 1838. — Éditions : Mélanges philosophiques, 1833, in-8 ; Nouveaux Mélanges, 1842, Cours de droit naturel, 3 vol. in-8, 1835-42. […] L’occasion de la rupture, très honorable pour lui, fut une déclaration libérale et philosophique dans une séance de la Ligue internationale de la paix (juin 1869) : il mettait le judaïsme, le catholicisme et le protestantisme sur le même pied, comme « les trois grandes religions des peuples civilisés ».

197. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

La bataille ne sera pas gastrosophique, comme le voulait Fourier ; elle sera philosophique. […] L’entretien philosophique, tel que Platon nous l’a conservé dans ses dialogues 202, la Sympasie antique, ne se conçoivent plus de nos jours 203. […] Proudhon est certainement une intelligence philosophique très distinguée. […] Il n’est pas de mot dans le langage philosophique qui ne puisse donner lieu à de fortes erreurs, si on l’entend ainsi dans un sens substantiel et grossier, au lieu de lui faire désigner des classes de phénomènes. […] Les religions qui ne prétendent pas s’appuyer sur une révélation, si inférieures comme machines d’action aux religions organisées dogmatiquement, sont, en un sens, plus philosophiques, ou plutôt elles ne diffèrent de la religion vraiment philosophique que par une expression plus ou moins symbolique.

198. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Deuxième leçon »

D’un autre côté, la théorie générale des classifications établie dans ces derniers temps par les travaux philosophiques des botanistes et des zoologistes permet d’espérer un succès réel dans un semblable travail, en nous offrant un guide certain par le véritable principe fondamental de l’art de classer, qui n’avait jamais été conçu distinctement jusqu’alors. […] Le corps de doctrine propre à cette classe nouvelle, et qui doit constituer les véritables théories directes des différents arts, pourrait sans doute donner lieu à des considérations philosophiques d’un grand intérêt et d’une importance réelle. […] La seule imperfection fondamentale qu’on pourrait reprocher au mode dogmatique, c’est de laisser ignorer la manière dont se sont formées les diverses connaissances humaines ce qui, quoique distinct de l’acquisition même de ces connaissances, est, en soi du plus haut intérêt pour tout esprit philosophique. […] Telle est l’intime relation générale que la véritable observation philosophique, convenablement employée, et non de vaines distinctions arbitraires, nous conduit à établir entre les diverses sciences fondamentales. […] Nous avons donc exactement déterminé dans cette leçon, non d’après de vaines spéculations arbitraires, mais en le regardant comme le sujet d’un véritable problème philosophique, le plan rationnel qui doit nous guider constamment dans l’étude de la philosophie positive.

199. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre I : L’histoire de la philosophie »

Quoi qu’on puisse penser de ces interprétations, elles montrent du moins que l’auteur prend plus au sérieux, qu’on n’aurait cru peut-être, ces premiers essais de la pensée philosophique. […] Il nie donc la matière, non dans le sens vulgaire, mais dans le sens philosophique du mot. […] La conclusion de l’ouvrage est une revue rapide de la situation philosophique de l’Europe actuelle. […] Elle a commencé, dit-il, par un mouvement de réaction contre les doctrines du xviiie  siècle : réaction vigoureuse parce que les excès de la Révolution, et les saturnales de la Terreur, s’étaient associés dans les esprits avec les opinions philosophiques de Condillac, Diderot, Cabanis. […] Il fut la source du patronage philosophique, et remplit les chaires françaises de professeurs qui étaient ses adhérents ou n’osaient exposer ouvertement sa faiblesse.

200. (1874) Premiers lundis. Tome I « Espoir et vœu du mouvement littéraire et poétique après la Révolution de 1830. »

Le talent se mettait au service de certaines idées religieuses ou philosophiques qui avaient besoin d’en combattre et d’en détruire d’autres. […] Le génie, la plupart du temps, n’était lui-même qu’un moyen ; il se subordonnait à des haines, à des déclamations, à une tactique philosophique reçue et imposée ; il se rabaissait à une œuvre de tous les jours, utile, mais simplement destructive. […] La mission, l’œuvre de l’art aujourd’hui, c’est vraiment l’épopée humaine ; c’est de traduire sous mille formes, et dans le drame, et dans l’ode, et dans le roman, et dans l’élégie, — oui, même dans l’élégie redevenue solennelle et primitive au milieu de ses propres et personnelles émotions, — c’est de réfléchir et de rayonner sans cesse en mille couleurs le sentiment de l’humanité progressive, de la retrouver telle déjà, dans sa lenteur, au fond des spectacles philosophiques du passé, de l’atteindre et de la suivre à travers les âges, de l’encadrer avec ses passions dans une nature harmonique et animée, de lui donner pour dôme un ciel souverain, vaste, intelligent, où la lumière s’aperçoive toujours dans les intervalles des ombres.

201. (1874) Premiers lundis. Tome II « Alexis de Tocqueville. De la démocratie en Amérique. »

M. de Tocqueville, au reste, ne presse pas trop cette sinistre pensée ; dans l’impartialité philosophique qui le commande, il se contente d’indiquer du doigt à l’horizon l’une des chances mauvaises, et il ne se livre à aucun mouvement vague de découragement ou de plainte. […] Nous ferons remarquer, comme exemple de l’excellente manière à la fois expérimentale et philosophique de M. de Tocqueville, ce qu’il dit de la division du Corps législatif en deux branches aux États-Unis. […] Excellent sous le rapport philosophique, incomplet seulement sous celui de l’art, le style de M. de Tocqueville, grâce à ce qu’il rejette, est plus normal et plus droit de déduction ; mais il faut, surtout dans le premier volume, se détourner souvent vers les notes qui complètent le texte ou le modifient.

202. (1875) Premiers lundis. Tome III « Instructions sur les recherches littéraires concernant le Moyen Âge »

Philosophie En ce qui concerne la recherche des manuscrits, traitant de matières philosophiques, on n’aura pas à s’occuper beaucoup de ce qui peut s’être fait avant le xiie  siècle, 1º parce que les œuvres philosophiques antérieures à ce siècle, comme celles de Saint-Anselme, de Scot Érigène, etc., existent imprimées ; 2º parce que la scolastique, qui est la grande philosophie du moyen âge, n’était pas véritablement fondée ; 3º parce que les auteurs de ces œuvres, antérieures au xiie  siècle, appartiennent rarement à la France. […] Mais on s’attachera principalement au xiie  siècle : 1º parce que c’est l’ère véritable de la scolastique ; 2º parce que c’en est surtout le commencement en France ; 3º parce qu’il y a très peu d’écrits philosophiques de ce temps qui aient été publiés.

203. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre I. Vue générale »

La vérité, scientifique ou philosophique, est toujours générale. […] L’esprit philosophique n’est autre que l’esprit scientifique : car la science est éminemment la connaissance rationnelle. […] Dans la première s’affirme l’insensibilité esthétique de l’esprit « philosophique, mais s’épanouit en même temps cet art spécial, unique, qui trouve en Marivaux sa perfection.

204. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre II. Précurseurs et initiateurs du xviiie  siècle »

Tous les arguments purement philosophiques dont on battra la religion, sont en principe dans le livre de Fontenelle. […] Mais il est, en somme, dégagé de tout préjugé religieux ou philosophique. […] Le dictionnaire de Bayle fut un des livres essentiels du xviiie  siècle ; il fit les délices de Voltaire, de Frédéric II, de tous les incrédules ; c’est le magasin d’où sortit presque toute l’érudition philosophique, historique, philologique, théologique, dont les philosophes s’armèrent contre l’Église et la religion.

205. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jules Girard » pp. 327-340

C’est cette raison humaine, philosophique, didactique, qui n’admet ou du moins ne veut admettre que ce qu’elle conçoit en elle-même ; c’est cette raison qu’il reconnaît, et qui fait la force, la beauté, la grandeur de histoire de Thucydide. […] Girard, si Thucydide n’est pas ce qu’on peut appeler rigoureusement un philosophe, c’est toujours cependant un esprit philosophique, une espèce de rationaliste plus ou moins athée, comme l’étaient tous les Grecs cultivés au temps de Périclès. […] III Cette vieille poétique, qui est probablement « la poétique de l’avenir », comme la raison philosophique de la Grèce doit être « la raison de l’avenir », cette vieille poétique n’est autre que la littérature des Grecs passée, après coup, à l’état de théorie, et qui a droit de retour et de despotisme si elle a l’absolu d’une vérité ; Or, pour M. 

206. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre premier. Existence de la volonté »

Mais parler ainsi, c’est passer du point de vue psychologique et physiologique au point de vue philosophique et métaphysique, je veux dire au problème des rapports généraux entre le mental et le physique. […] Mais, si on ajoute que c’est le mouvement réactif du cerveau qui est la réalité dont le désir serait un simple reflet, on avance une théorie philosophique à laquelle, pour notre part, nous en opposerons une autre, à savoir que c’est le désir mental qui est la réalité dont le mouvement cérébral est la manifestation dans l’espace pour un spectateur du dehors. […] Donc, pour l’expérience positive, abstraction faite de toute spéculation philosophique, nous avons le droit de conclure qu’il existe un fait original appelé le vouloir, lequel est à la fois inséparable et distinct de tout fait de discernement. […] Charlton Bastian, qu’a publiée la Revue philosophique d’avril 1892, l’auteur soutient d’abord, avec beaucoup de psychologues contemporains, que la volition n’est pas « la faculté primordiale » mais un développement ultérieur de l’attention. […] Danville, lui aussi, dans son article sur l’Idée et la Force (Revue philosophique, octobre 1801, p. 399), nous renvoie aux « observations incontestables » de M. 

207. (1889) L’art au point de vue sociologique « Introduction »

Disons plus, l’amour de la science et le sentiment philosophique peuvent, en s’introduisant dans l’art, le transformer sans cesse, car nous ne voyons jamais du même œil et nous ne sentons jamais du même cœur lorsque notre intelligence est plus ouverte, notre science agrandie, et que nous voyons plus d’univers dans le moindre être individuel. » VII. — La part croissante des idées scientifiques dans les sociétés modernes produira, selon Guyau, une transformation de l’art dans le sens d’un réalisme bien entendu et conciliable avec le véritable idéalisme. […] Le faux, c’est notre conception abstraite du monde, c’est la vue des surfaces immobiles et la croyance en l’inertie des choses, auxquelles s’en tient le vulgaire. « Le poète, en animant jusqu’aux êtres qui nous paraissent le plus dénués de vie, ne fait que revenir à des idées plus philosophiques sur l’univers. » Toutefois, en animant ainsi la nature, il est essentiel de mesurer les degrés de vie qu’on lui prête. […] VIII. — Après avoir constaté l’introduction des idées philosophiques et sociales dans le roman, Guyau nous la montre dans la poésie de notre époque, dont elle devient un trait caractéristique. […] L’idée philosophique de l’évolution universelle « est voisine de cette autre idée qui fait le fond de la poésie : vie universelle9. » Si le mystère du monde ne peut être complètement éclairci, il nous est pourtant impossible de ne pas nous faire une représentation du fond des choses, de ne pas nous répondre à nous-mêmes dans le silence morne de la nature : « Sous sa forme abstraite, cette représentation est la métaphysique ; sous sa forme imaginative, cette représentation est la poésie, qui, jointe à la métaphysique, remplacera de plus en plus la religion. » Voilà pourquoi le sentiment d’une mission sociale et religieuse de l’art a caractérisé tous les grands poètes de notre siècle ; s’il leur a parfois inspiré une sorte d’orgueil naïf, il n’en était pas moins juste en lui-même. « Le jour où les poètes ne se considéreront plus que comme des ciseleurs de petites coupes en or faux où on ne trouvera même pas à boire une seule pensée, la poésie n’aura plus d’elle-même que la forme et l’ombre, le corps sans l’âme : elle sera morte. » Notre poésie française, heureusement, a été dans notre siècle tout animée d’idées philosophiques, morales, sociales.

208. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Introduction »

La liberté de penser est donc le droit commun de toutes les écoles philosophiques : elles ne sont philosophiques qu’à cette condition. […] La spéculation philosophique ne peut résoudre tous les problèmes ; elle laisse bien des vides et bien des fissures que le sentiment remplit. […] La liberté de penser, telle que je l’entends, n’est donc ni l’affirmation, ni la négation ; elle n’est ni catholique, ni protestante, ni philosophique, ni croyante, ni incrédule : elle est au-dessus de tout cela, elle est le droit d’examiner et de n’affirmer qu’après examen. […] Cette difficulté ne porte pas contre la liberté de penser, car de tout temps, sous tous les régimes philosophiques et religieux, les hommes ont su trouver des sophismes pour couvrir à leurs propres yeux leurs passions et leurs faiblesses.

209. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 512-518

Ne sera-t-il donc pas permis de dire que des vers, prétendus philosophiques, sont froids & rampans ; de relever des défauts de poésie, de versification, de style & de goût ; de se plaindre d’une langueur & d’une monotonie assommantes dans un Ouvrage (le Poëme des Saisons) dont l’agrément, la chaleur & la variété devoient faire tout le prix, sans avoir à craindre une détention ignominieuse, quand on n’offense, ni la Religion, ni le Gouvernement, ni les mœurs ? […] Graces au Gouvernement, éclairé par d’autres lumieres que par les lumieres philosophiques, les sages Littérateurs ne seront plus exposés à de pareilles insultes.

210. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres choisies de Charles Loyson, publiées par M. Émile Grimaud »

Le volume s’ouvre par quatre Épîtres d’une bonne poésie philosophique, adressées à M.  […] Le nom de Maine de Biran, son autorité qui a singulièrement grandi en ces toutes dernières années dans l’école philosophique universitaire, représentée par MM.  […] Delavigne, qui avait bien des avantages comme poète, n’approchait pas de Loyson dans l’ordre des idées, dans l’intelligence des questions philosophiques et politiques : il eût été profondément incapable de manœuvrer en prose et de tenir campagne en face d’un Bonald, d’un Benjamin Constant et d’un La Mennais. — Delavigne, confiné dans son art, ne s’intéressait qu’aux vers et y bornait sa vue : Loyson s’intéressait à tout130. […] Esprit amer et coquet qui distillait douloureusement des vers érotiques ; qui, en politique, passait aisément à l’extrême ; qui combinait les lascivetés de boudoir avec la haine des rois, et insinuait à plaisir un coin de priapée dans le républicanisme, il n’était pas fait pour comprendre le sentiment libéral, sincère et modéré, le sentiment religieux, également sincère et philosophique, le talent simple, élevé, et toute l’âme morale de celui qu’il croyait avoir suffisamment accablé en l’appelant un doctrinaire, et en faisant une pointe digne de Brunnet sur son nom.

211. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre III. Théorie de la fable poétique »

Opposons-la à une fable philosophique, qui ne sait qu’aligner des idées générales, et à la fable primitive qui ne sait qu’entasser de petits faits sensibles ; et voyons si la seconde recherche ne confirme pas la première, en conduisant par une autre voie au même but. I, opposition de la fable philosophique à la fable poétique. […] » Cette fable montre que la perfection de l’âme est préférable à la beauté du corps. »206 Voilà le modèle de la fable philosophique. […] La poésie va transformer cette fable enfantine comme elle a transformé la fable philosophique.

212. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre I : De la méthode en général »

Duhamel sur la Méthode dans les sciences de raisonnement, œuvre d’un esprit serré et philosophique auquel je ne reprocherai qu’une chose : c’est de trop dédaigner les philosophes, car il pourrait retrouver parmi eux beaucoup de ses propres idées. […] C’est la question même de l’esprit philosophique qui est en jeu. […] Au reste, même de telles hypothèses, si ambitieuses qu’elles soient, sont bien loin d’être sans utilité, et, pour le dire en passant, nous croyons que les systèmes philosophiques eux-mêmes peuvent avoir pour la science plus d’utilité que ne le croient les savants. […] Le livre de Joseph de Maistre est un pamphlet amusant, mais sans aucune valeur philosophique.

213. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIII. Pascal »

On l’a si peu compris, que les uns le traitèrent comme un philosophe aberrant, et lui firent la petite leçon philosophique ; les autres comme un chrétien trébuchant dans le jansénisme, et lui firent la petite leçon religieuse, quand il eût mieux valu montrer les causes si particulières et presque organiques de ce jansénisme de Pascal. […] établit le plus grotesque des rapports entre le scepticisme philosophique et l’opposition politique qui n’est pas constitutionnelle ; ni même M.  […] Je n’ai point à examiner si cette peur, qui était pour l’âme immatérielle de Pascal ce que serait une hypertrophie pour nos cœurs de chair, était légitime ou exagérée, mauvaise ou salutaire ; si elle avait le droit philosophique ou religieux d’exister, ou si elle n’était pas plutôt un manque d’équilibre et un égarement dans des facultés toutes-puissantes.

214. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. de Ségur. Mémoires, souvenirs et anecdotes. Tome II. »

Il l’assaisonne, ce qui semblerait superflu, d’une réflexion philosophique : il aime en effet la réflexion philosophique ; commune et usée ailleurs, elle garde encore quelque chose de distingué sous sa plume.

/ 1789