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1415. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

non, jamais je ne saurais l’oublier. […] Tu sais, un enfant est enfant, un jeu est un jeu. […] Je ne sais si je dois ! […] Je l’avouerai, cependant, je ne sais quoi s’est remué là (sur son cœur) pour vous. […] Aussi, lorsqu’il est là, je ne saurais prier et j’ai le cœur rongé intérieurement.

1416. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

On sait quelle importance Wagner attachait à l’accentuation absolument correcte. […] Je ne saurais dire dans quel style cela est écrit. […] Sous ces conditions, il ne saurait être question d’unité entre les paroles et la musique. […] Wilder n’existe point, tout simplement : c’est une œuvre mort-née, et on ne saurait mieux faire que de ne plus y penser. […] Ne voit-on pas de gros volumes, soi-disant documentaires, écrits par des hommes qui ne savent pas un seul mot d’allemand !

1417. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

On ne saurait contester que la formation ou construction d’un nombre implique la discontinuité. […] Reste à savoir, il est vrai, si ce milieu est du temps ou de l’espace. Mais un moment du temps, nous le répétons, ne saurait se conserver pour s’ajouter à d’autres. […] De fait, ce n’est pas une nécessité d’ordre physique, c’est une nécessité logique qui s’attache à la proposition suivante : deux corps ne sauraient occuper en même temps le même lieu. […] De toute manière, on ne saurait admettre définitivement deux formes de l’homogène, temps et espace, sans rechercher d’abord si l’une d’elles ne serait pas réductible à l’autre.

1418. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Guy de Maupassant »

Il est étrange de songer que ce cerveau, en qui la réalité avait reflété des images si nettes, qui avait su interpréter, ramasser, coordonner ces images avec une vigueur et dans des directions si décidées, et nous les renvoyer, plus riches de sens, à l’aide de signes si fortement ourdis, n’ait plus, à partir d’un certain moment, reçu du monde extérieur que des impressions confuses, incohérentes, éparses, aussi rudimentaires et aussi peu liées que celles des animaux, et pleines, en outre, d’épouvante et de douleur, à cause des vagues ressouvenirs d’une vie plus complète ; et que l’auteur de Boule-de-Suif, de Pierre et Jean, de Notre Coeur, soit entré, vivant, dans l’éternelle nuit. Et cela, parce qu’un jour les microscopiques cellules dont se composait la pulpe tassée sous son front se sont mises, on ne sait pourquoi, à se désagglutiner… Et je vois à quel point je me suis trompé il y a cinq ans, et j’ai presque un remords. […] Et Bel-Ami semblait une « remise au point », après un siècle et demi, du Paysan parvenu… Puis, l’angoisse vint… La volupté finit toujours, comme on sait, par être grande maîtresse de métaphysique. […] De plus en plus il paraît compatir aux objets de ses peintures, et de plus en plus il semble se plaire à nous décrire des passions et des sentiments de telle espèce, que, de les comprendre et de les aimer comme il le fait, cela seul prouverait qu’il a dépassé  sans trop savoir d’ailleurs où il va, — ce naturalisme rudimentaire par où il avait débuté si tranquillement. Fort comme la mort dit un amour « fort comme la mort » en effet, et raconte à la fois le plus noble des drames intérieurs et l’immense tristesse de vieillir  Notre Coeur flétrit la femme qui ne sait pas aimer ; et si l’amoureux demande des consolations à l’amour simpliste, tel qu’il était conçu dans les Sœurs Rondoli, il est clair qu’il n’y trouvera plus jamais le repos.

1419. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’état de la société parisienne à l’époque du symbolisme » pp. 117-124

Tout s’y trouve de ce qu’il est indispensable de voir et de savoir pour prendre figure d’homme du monde et se produire, avec avantage, dans la meilleure société : l’adresse des bons faiseurs, des recettes inédites de parfums, dont l’une est empruntée à M.  […] La supériorité intellectuelle et morale se résumait à peu près en ceci : « Mépriser la politique et aimer le théâtre. — Connaître au moins de vue et de nom les personnages de “la fête” à Paris. — N’aller déjeuner et dîner que dans les restaurants connus. — Faire semblant d’avoir tout lu. — Savoir tous les potins. — Couper les livres des auteurs qui dînent chez vous. — Dîner beaucoup en ville et aller à la messe. — Retenir d’une exposition les tableaux des gens qu’on rencontre dans le monde. — Éviter le solennel et prendre la vie à la blague. » * *   * Étrange société où connaître les gens qui font « la fête » suffit pour conférer un titre d’excellence. […] Ces messieurs du protocole y songent, tandis que de bonnes âmes proposent qu’en révérence de tant d’amis couronnés, nous grattions les murs de nos monuments et l’Arc de Triomphe, pour en déloger quelques inscriptions suspectes et nous adjurent de voiler la nudité indécente du groupe de Rude que d’honnêtes et pieux regards ne sauraient contempler sans rougir… On sent bien à toutes ces controverses dont les journaux de l’époque sont pleins que nos dirigeants nous ont amenés à un point culminant de notre histoire. […] Voici ce que les snobs de 1897 estiment façonné à leur usage particulier : « Savoir parler de Nietzche, Ibsen, Darwin, Schopenhauer. […] Savoir parler des primitifs en peinture.

1420. (1887) Discours et conférences « Discours prononcé à Quimper »

Discours prononcé à Quimper 17 août 1885 Que je suis touché, Messieurs, de vos bonnes paroles, et que je sais gré à nos jeunes amis qui, me rendant breton une fois par année, m’ont fait faire connaissance avec cette ville antique et charmante, que je désirais voir depuis si longtemps. […] Je n’en sais rien vraiment. […] Ce doit être un bien honnête homme, et qui ne sait pas ce que c’est que la réclame ; car il n’est pas venu me voir. […] On m’ajouta qu’il avait tout donné à l’Église, ce qui ne m’étonna pas ; mais je voulus savoir comment il avait gagné ce capital énorme. […] Je ne sais si j’en verrai d’autres de ce genre.

1421. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre VI. Suite des Moralistes. »

Les sentiments de Pascal sont remarquables surtout par la profondeur de leur tristesse, et par je ne sais quelle immensité : on est suspendu au milieu de ces sentiments comme l’infini. […] Ne sait-on plus que Clarke et Leibnitz n’étaient occupés qu’à combattre l’incrédulité ? […] Mais, en dérobant à ce rare génie la misère de l’homme, nous n’avons pas su, comme lui, en apercevoir la grandeur. […] S’il ne s’est point plongé dans les idées du jour, c’est qu’il leur a été supérieur : nous prenons sa puissance pour sa faiblesse ; son secret et le nôtre sont renfermés dans cette pensée de Pascal : « Les sciences ont deux extrémités qui se touchent : la première est la pure ignorance naturelle où se trouvent les hommes en naissant ; l’autre extrémité est celle où arrivent les grandes âmes qui, ayant parcouru tout ce que les hommes peuvent savoir, trouvent qu’ils ne savent rien, et se rencontrent dans cette même ignorance d’où ils sont partis ; mais c’est une ignorance savante qui se connaît.

1422. (1767) Salon de 1767 « De la manière » pp. 336-339

De la manière Sujet difficile, trop difficile peut-être, pour celui qui n’en sait pas plus que moi ; matière à réflexions fines et profondes, qui demande une grande étendue de connaissances, et surtout une liberté d’esprit que je n’ai pas. […] Elle a je ne sais quoi d’original qui séduit les enfants, qui frappe la multitude, et qui corrompt quelquefois toute une nation ; mais elle est plus insupportable à l’homme de goût que la laideur ; car la laideur est naturelle, et n’annonce par elle-même aucune prétention, aucun ridicule, aucun travers d’esprit. […] Mais Marcel ne savait rien de l’allure franche du sauvage. […] Qu’on prétende que son élève exécutait à merveille la singerie française du respect, j’y consentirai ; mais que cet élève sût mieux qu’un autre se désoler de la mort ou de l’infidélité d’une maîtresse, se jeter aux pieds d’un père irrité, je n’en crois rien. Tout l’art de Marcel se réduisait à la science d’un certain nombre d’évolutions de société ; il n’en savait pas assez pour former même un médiocre acteur ; et le plus insipide modèle qu’un artiste eût pu choisir, c’eût été son élève.

1423. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

Il y a un Quatrième État qui saura écouter et comprendre. […] Qu’en sait-il ? […] France sait ; M.  […] et comment le savoir. […] Ils ne le disent pas tous, mais tous le savent.

1424. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Déjà vieux et hors de la carrière (et il ne mourut qu’à près de quatre-vingt-six ans), il disait avec un soupir, en rejetant ses regards sur le passé : Je m’en irai sans avoir déballé ma marchandise ; et comme on ne m’a jamais mis en œuvre, on ne saura point si j’étais propre à quelque chose ; je ne le saurai pas moi-même : je m’en doute pourtant, et, croyant me sentir des talents, il y a eu des temps dans ma vie où je me suis trouvé affligé en songeant qu’ils étaient perdus, et en les comparant avec ceux des personnes à qui je voyais occuper les premières places. […] Le Tellier, accompagné d’un officier et de trente gardes, se rendit aussitôt à la maison où il savait qu’était Mlle Marianne : il la trouva à table chez un de ses oncles où se faisait le festin de noces, avec sa famille, et le duc de Lorraine à son côté : Je crois, dit Lassay, que la surprise fut grande de voir arriver M.  […] Personne ne saurait connaître la douceur qu’il y a à s’affliger et à sacrifier sa douleur à Dieu, que ceux qui l’ont sentie. […] Peu d’âmes sont assez fermes, peu de cœurs assez profondément tendres pour savoir conserver une grande douleur. […] Après être resté quelque temps à Vienne à observer les intrigues politiques et, qui sait ?

1425. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

C’est ce qui a lieu pour le duc de Bourgogne, et l’on ne saurait, en traversant les dernières années de Louis XIV, rencontrer cette figure originale, singulière et assez difficile de l’élève de Fénelon, sans se demander : « Que serait-il arrivé de tout différent dans l’histoire, et quel tour auraient pris les choses de la France s’il avait vécu ?  […] Il est nécessaire que dès à présent il s’accoutume à son rôle royal, « en se corrigeant, en prenant beaucoup sur lui, en s’accommodant aux hommes pour les connaître, pour les ménager, pour savoir les mettre en œuvre ». On a beau lui en dire du bien, il ne sera content que « lorsqu’il le saura libre, ferme et en possession de parler (même au roi) avec une force douce et respectueuse… S’il ne sent pas le besoin de devenir ferme et nerveux, il ne fera aucun véritable progrès ; il est temps d’être homme ». […] Vers la fin, et malgré les louanges obligées, les défauts de ce régime étaient sensibles à tous les esprits qui réfléchissaient, et sautaient à tous les yeux qui savaient voir. […] C’est le même dégoût de la vie, mais avec je ne sais quoi de plus prochain qui le corrige.

1426. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

C’était l’âme la plus sincère et la plus candide que j’aie jamais connue : jamais de déguisement, je ne sais s’il a menti en sa vie. […] On sait l’éclat et la catastrophe du lendemain : Maucroix en eut le contrecoup. […] Nous irons faire la révérence à Sa Majesté et lui dire tout ci tout ça ; qu’il est un grand prince, qu’il a pris une belle ville… Ne sait-il pas tout cela aussi bien que nous ? […] Je suis fort paresseux, et je ne sais pas beaucoup. […] Tu sais comme j’ai vécu.

1427. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

Santeul était bien malheureux et ne savait par où faire sa retraite. […] Arnauld a honoré de son estime et de son amitié pendant sa vie, de le décrier après sa mort, pour faire votre cour à des gens qui dans l’âme se moquent de vous et ne vous en savent aucun gré ? […] Les vers sont jolis, catulliens ; les idées sont piquantes, et le jeu se ferme sur le conseil donné à Santeul de ne plus faire le docteur et de savoir se taire : Sile et sape. […] On aime à savoir que l’aimable Bourdaloue contribua plus que personne à sceller la paix, et à réconcilier Santeul avec ses autres confrères plus irrités ou qui le voulaient paraître. […] On sait ce qu’était alors la capitale de la Bourgogne, avec son docte parlement, ses magistrats érudits qui faisaient pourtant de si gais noëls, et sa bourgeoisie gaillarde et prompte aux bons mots.

1428. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

alors encore notre amitié sera éternelle, mais il y aura quelques hommes que j’estimerai autant que toi, parce qu’ils sauront non seulement suivre le même plan avec une habileté très supérieure, mais encore le concilier avec leur bonheur personnel. […] Je ne sais si vous connaissez les usages ; on vous enverra des notes. On donne par an un fromage à chaque conseiller, et tant (un chiffre, je ne sais lequel) de fromages à l’avoyer. […] Nous avons vu Bonstetten, dès le principe, écrire comme naturellement en français, et même en anglais ; il fallut bien pourtant qu’il se remît à l’allemand qu’il savait mal, qu’il ne savait plus ; il s’y appliqua durant cette période bernoise de sa vie, et il devint par la suite un auteur distingué dans les deux langues. […] Préposé à l’administration et (si ce mot n’était trop pompeux) à la vice-royauté d’un pays sujet, qui voyait dans la Révolution d’un grand pays voisin un signal pour sa propre émancipation, Bonstetten sut, par son ascendant moral, maintenir jusqu’au bout sans violence le régime dont il était le représentant.

1429. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

Je ne sais si M.  […] Poujoulat, mais je ne sais non plus s’il a pris un parti. […] Villemain, lequel, apparemment, l’avait su distinguer et choisir. […] L’éloquent dominicain est de ceux dont l’éloge ne saurait être confié indifféremment. […] je sais que ce mot de sections va choquer.

1430. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

Gœthe, causant un jour avec Hegel, se félicitait avec raison d’avoir su échapper à cette infirmité sans le secours d’une dialectique artificielle, qui prête au sophisme et qui a toujours l’air d’un jeu. […] À cet égard comme à beaucoup d’autres, ses conversations nous prouvent que son calme n’était pas de l’insensibilité, mais de la force ; qu’il savait faire taire son indignation et se contenir. […] Ampère, a, comme vous le savez, quatre-vingts ans. […] À genoux devant Molière et La Fontaine, il admire Athalie, goûte Bérénice, sait par cœur les chansons de Béranger, et raconte parfaitement nos plus nouveaux vaudevilles. […] Je sais une traduction en vers français qui satisferait Gœthe aujourd’hui et réaliserait son Emblème 53.

1431. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français »

On sait les vers de Boileau ; je ne les rappellerai que pour dire à ceux qui y croient encore qu’ils ne sont plus, historiquement parlant, d’aucune valeur. Ce n’est pas un reproche qu’on fait à Boileau, lequel n’était pas obligé de savoir l’histoire littéraire mieux qu’on ne la connaissait de son temps : Chez nos dévots aïeux le théâtre abhorré Fut longtemps dans la France un plaisir ignoré. […] Le savoir, à la fin, dissipant l’ignorance, Fit voir de ce projet la dévote imprudence : On chassa ces docteurs prêchant sans mission… On ne sait de quels pèlerins veut parler Boileau. […] On revit là ce qui s’était déjà produit dans l’Antiquité aux origines de la tragédie : on le sait, la tragédie antique ne fut dans les premiers temps qu’une ode sacrée, toute simple, puis chantée par un double chœur qui tournait et retournait autour de l’autel ; le dialogue s’y introduisit subsidiairement et n’y fut d’abord que secondaire. […] Le vieil auteur, en étant si près d’un grand effet dramatique sans le saisir, a prouvé qu’il ne savait pas encore son métier.

1432. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite.) »

Quand je parle de beauté, je m’entends, et je m’adresse à ceux qui savent de quoi il s’agit, lorsqu’ils prononcent ce mot. […] Il est même piquant de voir comme, quand on sait une littérature, on en ignore volontiers une autre. […] Bientôt il se trouve en conflit avec son père Ruben sans le savoir. […] Judas, au contraire, bien qu’ignorant les liens qui l’attachent à Ruben, ne l’en tue pas moins avec tout l’instinct sanguinaire d’un scélérat ; et quand il épouse Cyborée, il sait parfaitement qu’elle est la veuve de sa victime. […] Le bon roi René, de béate mémoire, était, on le sait, le grand protecteur et admirateur des Mystères : rendons au roi René ce qui est au roi René, et à Périclès ce qui est à Périclès.

1433. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

« L’identité de langage est un premier rapport dont on ne saurait trop méditer l’influence. […] Adieu : amitié, admiration, respect, reconnaissance ; on ne sait où s’arrêter dans cette énumération. » Il me semble encore une fois lire du Voltaire, dans sa lune de miel avec le grand Frédéric. […] Il ne saurait y avoir désormais de Talleyrand sans Montrond, ni de Montrond sans Talleyrand. […] Il sut certainement donner à l’ensemble la forme la plus majestueuse, la plus spécieuse aussi et la plus décente. […] Un volume in-8°, chez Reinwald, libraire-éditeur, rue des Saints-Pères, 15. — J’ai dit, après beaucoup d’autres, que c’était par suite d’un accident et dès sa première enfance que M. de Talleyrand était boiteux ; mais la vérité en tout, avec de tels hommes, est difficile à savoir.

1434. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre IV »

« Il m’avait beaucoup interrogé au moment où Brown-Séquard communiqua à l’institut le résultat de sa dernière découverte, vous savez, son fameux élixir de Jouvence. […] Nous savons combien elles furent ingénieuses79, nous croyons simplement que l’assimilation en fut insuffisante : M.  […] Eh bien, savez-vous quel était l’auteur de l’étude qui m’avait servi de modèle ? […] « Mais là n’est pas la question importante ; elle est tout entière de savoir s’il a fidèlement représenté un véritable aliéné, et ici la réponse doit être négative. […] Nous ne savons quelle impression une pareille exhibition peut produire sur la masse des lecteurs, mais nous pouvons affirmer à M. 

1435. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre II. Distinction des principaux courants (1535-1550) — Chapitre I. François Rabelais »

On ne saurait trop dire que les cinq livres de Rabelais forment non pas un, mais cinq ouvrages, qui s’échelonnent pendant trente ans à des moments très divers de notre Renaissance, et qu’à vouloir les juger tous en bloc comme formant une seule œuvre, on risquerait de n’en pas apprécier exactement la valeur… et de s’égarer sur le caractère de l’auteur. […] Rabelais suivit la voie de Despériers : mais Berquin et Caturce brûlés comme le Cymbalum lui servirent de leçons ; il savait la vigoureuse joie de son Pantagruel odieuse à Genève autant qu’en Sorbonne, et il était averti qu’il ne ferait pas bon pour lui d’aller trouver Calvin. […] Rabelais en effet n’est pas seulement un helléniste, un médecin, un curieux investigateur de l’antiquité et de la nature : il sait beaucoup, mais surtout il y a en lui une âme, un esprit de savant ; il a eu le culte et la notion de la science, et son programme d’éducation, chimérique même pour ses géants, est le programme du travail de la raison moderne. […] Mais le pantagruélisme est aussi un appétit de savoir qui ne se contient dans aucune borne. […] Il sut se faire de puissants protecteurs, Budé, Geoffroy d’Estissac, les Du Bellay, les Châtillon, Diane de Poitiers ; il obtint ainsi de François Ier et de Henri Il des privilèges pour son 3e et son 4e livre.

1436. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre II. L’éloquence politique »

Et surtout le monde ne saurait pardonner au scandale. […] Il joignait à ses grands dons celui de savoir utiliser le travail d’autrui. […] S’il sait mettre à contribution ses amis, s’il sait leur faire produire ce qu’ils n’auraient jamais fait sans lui, il en est véritablement l’auteur. » Du moins, nous sommes assurés par ses travaux antérieurs de la capacité de son esprit, de l’étendue de ses connaissances : si, accablé d’affaires, il dut recourir à des secrétaires pour la préparation de ses discours, c’était une économie de temps, et non un supplément de génie qu’il y cherchait. […] Il croit aux fictions constitutionnelles, aux contrepoids qui assurent le délicat équilibre des pouvoirs : il sait exactement le point jusqu’où l’exécutif doit aller, la ligne que le législatif ne doit jamais franchir. […] Du Tite-Live : « Dira-t-on de nous que nous avons su vaincre, mais que nous n’avons pas su profiter de la victoire ? 

1437. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVI » pp. 413-441

Vous savez mieux que moi ce qu’on dit en disant deux poètes. […] N’en doutons pas, ceux-ci s’étaient assurés de la manière la plus positive qu’ils n’avaient point à redouter les applications des ouvrages satiriques dont les auteurs leur faisaient la lecture ; ils savaient indubitablement de la bouche des auteurs mêmes le nom des personnes qui avaient servi de modèle à leurs tableaux, et ils n’avaient pas besoin de le demander. […] Soyons certains que quand madame de Sévigné ménageait à son ami le cardinal de Retz la lecture de la sa lire de Boileau, elle en avait d’avance la clef, et savait à qui le poète consentait (tout au moins) qu’on appliquât les traits de sa satire. […] La querelle élevée entre les mœurs dissolues et les mœurs chastes et décentes trouve son terme à la fin de la période que nous parcourons ; il était nécessaire, pour en bien connaître le résultat, de savoir comment et par quelles personnes elle fut terminée. […] Vigueul-Marville rapporte qu’il disait à ses amis : « Vous voyez la manière dont je parle : sachez que je suis toujours sur mes gardes et que personne n’observe mieux que moi les longues et les brèves. » T. 

1438. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le surintendant Fouquet. (Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M. P. Clément.) 1846. » pp. 294-312

Fouquet le sut, et, tout prisonnier qu’il était, il fit prier Mlle de Scudéry d’envoyer secrètement à Loret 1 500 francs pour le dédommager ; ce qui fut exécuté, et sans qu’on pût deviner d’abord d’où venait le bienfait. […] Mais le plus grand témoignage rendu à Fouquet dans sa disgrâce, fut assurément celui du poète Brébeuf, lequel, dit-on, mourut de chagrin et de déplaisir de le savoir arrêté : voilà une mort qui est à elle seule une oraison funèbre. […] Maintenant, je le sais, tout le monde est plus ou moins homme de lettres ; ce n’est plus une classe proprement dite ; on les traite avec la rudesse et le positif qui règnent dans les relations ordinaires de la vie, et eux-mêmes ils semblent s’être dès longtemps appliqué ce régime universel. […] On sait très peu de chose de sa prison. […] [NdA] Depuis j’ai su que les papiers de la cassette de Fouquet sont très bien connus de messieurs de la Bibliothèque nationale ; M. 

1439. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

Un roc sert de portique à la funèbre voûte :                    Sur ce fronton, Un artiste martyr dont les Anges, sans doute,                    Savent le nom, Peignit les traits du Christ, sa chevelure blonde,                    Et ses grands yeux, D’où s’échappe un rayon d’une douceur profonde                    Comme les cieux ! […] Lieux sacrés où l’amour, pour les seuls biens de l’âme,                    Sut tant souffrir ! […] On sait le mot de Bossuet, d’après Tertullien, lorsque parlant du cadavre de l’homme : « Il devient un je ne sais quoi, s’écrie-t-il qui n’a plus de nom dans aucune langue. » L’admirable page qu’on va lire de l’abbé Gerbet est comme le développement et le commentaire du mot de Bossuet dans cette première station aux Catacombes, il s’attache d’abord à étudier le néant de la vie, « le travail, je ne dis pas de la mort, mais de ce qui est au-delà de la mort » ; l’idée de réveil et de vie future viendra après. […] Sachez donc que de deux âmes qui s’étaient attendues sur la terre et qui s’y étaient rencontrées, etc. […] Il est de ceux qui édifient sans tristesse, et qui savent animer les heures sans les dissiper.

1440. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

Tout à coup un bruit sourd se répand ; dans les cafés, dans les athénées, dans les théâtres, on se dit à l’oreille : « Vous ne savez pas ? […] Les mieux informés surent bientôt qu’il existait à la Bibliothèque impériale un exemplaire d’une ancienne comédie en vers, provenant de la bibliothèque du duc de La Vallière, et ayant titre : Conaxa, ou Les Gendres dupés. […] Étienne à ce sujet des Deux Gendres, ne saurait s’énumérer que dans un catalogue : Lettre d’Alexis Piron à M.  […] Étienne eussent encore de commun, vers la fin, beaucoup de négligence, même sur leur personne, je ne saurais me décider à établir ce parallèle. […] Étienne, avec tout son esprit, ne savait pas que lui-même était loin d’écrire en vers comme Racine.

1441. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

La nature, je le sais, fait des exceptions encore : nous avons eu Désaugiers ; sans trop chercher, nous trouverions après lui d’aimables gens qui mènent légèrement la vie et portent avec eux la joie. […] On ne sait rien de son enfance et de ses premières études, sinon qu’avant l’âge de douze ans il faisait des vers. […] Il paraît bien que, dans les premiers temps, son patron algérien l’employa tout simplement à ramer ; mais bientôta, ayant su que Regnard qui, dès cette époque sentimentale, avait déjà des dispositions pour la gastronomie, faisait très bien les ragoûts, il l’occupa dans sa cuisine. […] Lui qui, pendant dix ans, du couchant à l’aurore, Erra chez le Lapon, ou rama sous le Maure, Lui qui ne sut jamais ni le grec ni l’hébreu, Qui joua jour et nuit, fit grand chère et bon feu ! […] Aristote ne le sait pas mieux que nous.

1442. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1853 » pp. 31-55

J’ai vu quelqu’un qui sait tous ses voyages et qui m’a conté le dernier. […] Du reste, le ministère de la justice d’alors, qui nous faisait poursuivre, n’avait-il pas eu, vingt-quatre heures, l’idée de poursuivre en police correctionnelle, dans un article de je ne sais qui du Paris, une ligne de points, paraissant avoir un sens obscène à M.  […] Mais on ne voulait rien nous épargner. « Il y a eu répétition hier, je le sais d’un avocat », me dit Karr, en s’asseyant avec nous entre les gendarmes. […] Sa femme, une vraie paysanne, ne sait ni lire ni écrire. […] * * * — Je ne sais pourquoi le directeur de la Porte-Saint-Martin avait exposé au foyer les portraits que Gavarni a publiés dans Le Paris, et parmi lesquels figuraient les nôtres.

1443. (1912) Le vers libre pp. 5-41

Nous savions fort bien quel était le génie d’Émile Zola, nous savions trouver une place dans nos admirations à côté de Flaubert indiscuté pour ces puissants travailleurs, ces stylistes éminents : les Goncourt ; nous trouvions du bon aux Médanais, nous ne nous détournions que des plats copistes et des écrivains scatologiques. […] On sait aussi qu’après avoir trop servi les formes demeurent comme effacées ; leur effet primitif est perdu, et les écrivains capables de les renouveler considèrent comme inutile de se soumettre à des règles dont ils savent l’origine empirique et les débilités. […] on ne saurait dire le plus tard possible, mais pourtant on en aurait bien envie. […] Dès les premiers jours, forts de la vérité de l’instinct lyrique, nous avons dit que les travaux de laboratoire donneraient raison à nos théories, et l’on ne peut que savoir gré à Robert de Souza de son application à en essayer la laborieuse confirmation. […] On ne le saurait prévoir.

1444. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Deux transparents pseudonymes, derrière lesquels tout le monde à présent sait ce qu’il y a. […] Arsène Houssaye savait très bien… ce qu’il savait : le Jockey-Club, le demi-monde, les salons de la princesse Mathilde, le Café anglais, le champ de courses, la langue verte, la langue rose, toutes les langues de Paris, du Paris-feuilleton ! […] Eh bien, c’est cet accent profond, toujours très reconnaissable quand il est dans une œuvre, c’est ce je ne sais quoi tout-puissant, qui donne même à l’ignoble, oui ! […] Fervaques et Bachaumont n’ont pas su trouver. […] Savez-vous à quoi se réduisent les traditions de ce faubourg Saint-Germain, qui, en ton, en esprit, en conversation, en dominance de tous les genres, était autrefois le premier des mondes ?

1445. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Un symbole »

Il s’agit cette fois de savoir définitivement si la France de 1898 se considère, toujours comme la fille aînée de l’Église, ou au contraire si elle se suffit à elle-même pour se créer sa foi et son idéal ; il s’agit de savoir si le vote qui prosterne aux pieds du Saint-Père la France repentante et gémissante de ses péchés, doit faire plus longtemps obstacle à l’effort spontané des meilleurs vers l’indépendance et la conscience. […] Je m’étonne qu’aucun représentant n’ait su dévoiler ce subterfuge de l’archevêque, et, par la production à la tribune du texte même du « Vœu national » n’ait clairement démontré à la Chambre qu’elle était dupée. […] Faut-il encore pour déjouer ce calcul en avoir pénétré le mécanisme et savoir lire dans l’âme de nos « républicains catholiques » et de nos « démocrates chrétiens ». […] En face de ce panorama grandiose, sur la hauteur inondée de lumière et d’air, elle n’a su faire jaillir que ce bloc de pierres sans élan, sans caractère ni majesté. […] Nous ne le savons.

1446. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Un de ses amis lui disait : « Vous ne savez pas ce que vous avez fait ? […] Sachons donc consentir à voir dans M. […] Enfin, monsieur, je ne saurais trop vous exhorter à continuer vos études et vos travaux. […] Ballanche est la harpe éolienne, et dont il sait nous renvoyer un sympathique et merveilleux écho. […] Coëssin meilleure, avait obtenu, je ne sais comment, des chefs du parti républicain d’alors, MM.

1447. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

D’autres eussent voulu savoir ce que je crois précisément sur chaque matière. […] Elle nous fait apprendre ce que nous ignorons, et nous rend capables d’enseigner ce que nous savons. […] Par notre travail, c’est-à-dire par nos mains, nous savons multiplier et varier nos aliments. […] C’est aux autres à savoir ce qu’ils devront dire de toi. […] Savez-vous pourquoi ?

1448. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Il ne sait pas la respecter. […] Or, on sait à quel prix, il y a douze ans, on l’achetait, cette popularité. […] Michelet sait donc à merveille de combien de bonnets de femmes se compose, en France, l’opinion publique. […] Il se contente de nous dire une fois de plus ce que tout le monde en sait. […] Troublé comme tous les philosophes qui ont altéré ou ruiné la grande notion de la famille chrétienne, il ne sait plus que faire de la femme qu’il a tirée de la fonction sublime entre le père et l’enfant, pour la voir sur la place publique et, que sais-je ?

1449. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

On le sait, l’Amérique n’est pas douce aux rêveurs. […] on ne saura jamais pourquoi ! […] Le caractère général de cette race, qui ne le sait ? […] Et savez-vous ce qui vous répond ? […] Elle en avait fait je ne sais quel bohème avili et violemment désordonné.

1450. (1890) L’avenir de la science « X » pp. 225-238

Il y a, je le sais, des éléments communs que l’examen de tous les peuples et de tous les pays rendra à l’analyse. […] Rien, rien ne remplace l’âme : aucun enseignement ne saurait suppléer chez l’homme à l’inspiration de sa nature. […] Il plane sur les écrits de cette nation je ne sais quelle suave médiocrité. […] L’esprit philosophique sait tirer philosophie de toute chose. […] Je ne sache pas qu’au XVIIe siècle on ait écrit un mot plus avancé.

1451. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

Je ne sais plus quel vieil auteur, tout près d’être centenaire, tenait des propos abominablement réactionnaires, dans le foyer des Variétés. […] Je rêvais, que venant de je ne sais où, et me rendant à Paris, je m’arrêtais à Nancy, pour voir la plaque, récemment mise dans la maison, où je suis né. […] Mais vous savez, le nombre de don Juan est : Mille e tre. […] * * * — Je ne sais plus, si je n’ai pas déjà jeté cela dans mon journal. […] Hier, la femme, la femme d’un diplomate de ma connaissance me racontait, que le nouveau chargé d’affaires, je ne sais plus où, sollicitait d’elle quelques renseignements.

1452. (1896) Le livre des masques

Ils ne savent pas. […] Ces arbres m’adopteront peu à peu, et pour le mériter, j’apprends ce qu’il faut savoir : « Je sais déjà regarder les nuages qui passent. « Je sais aussi rester en place. […] Il n’ignora rien des éternelles turpitudes, mais, dit Ozanam, il sut les haïr. […] Il y a on ne sait quoi de provincial, de pas au courant de la vie, de retardataire dans ce souci d’imitation et de restauration.

1453. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — II. (Suite.) » pp. 463-478

Il y a des natures, distinguées d’ailleurs, qui sont singulièrement prédestinées à la crédulité ; il ne s’agit pour elles que de savoir de qui elles seront dupes, et par malheur elles ne font pas le choix. […] On sait d’ailleurs que Ramond retourna en Suisse dans les années 1783-1784, et pour y rejoindre sans doute Cagliostro ; il l’accompagna ensuite à Lyon, et ce fut lui qui, par ordre du cardinal, l’installa à Paris, dans la rue Saint-Claude au Marais, en février 1785, prenant à cet effet tous les arrangements et passant tous les marchés nécessaires. […] Un jour Cagliostro lui envoya demander comme à son préparateur (car il en faisait quelquefois l’office) je ne sais quelle poudre nécessaire pour une opération : Ramond se contenta de prendre une prise de tabac et la mélangea de cendre, de manière à donner au tout l’apparence de la poudre demandée, et la poudre ensuite opéra comme si elle avait été la vraie. […] Il est à noter cependant que peu après ou durant même le procès du Collier, Jefferson, le ministre américain en France, ayant à faire un voyage, apprécia assez les talents et la capacité de Ramond pour le charger de suivre en son absence les affaires de son gouvernement ; il fut même question alors pour Ramond de partir pour l’Amérique et d’y obtenir je ne sais quel poste auprès de Washington. […] Je ne sais si M. 

1454. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

Je sais des hommes d’étude et de lecture approfondie qui placent Fleury très haut, plus haut qu’on n’est accoutumé à le faire aujourd’hui, qui le mettent en tête du second 265 rang ; ils disent « que ce n’est sans doute qu’un écrivain estimable et du second ordre, mais que c’est un esprit de première qualité ; que ses Mœurs des israélites et des chrétiens sont un livre à peu près classique ; que son Traité du choix et de la méthode des études, dans un cadre resserré, est plein de vues originales, et très supérieur en cela à l’ouvrage plus volumineux de Rollin ; que son Histoire du droit français, son traité du Droit public de France, renferment tout ce qu’on sait de certain sur les origines féodales, et à peu près tout ce qu’il y a de vrai dans certains chapitres des plus célèbres historiens modernes, qui n’y ont mis en sus que leurs systèmes et se sont bien gardés de le citer ; que Fleury est un des écrivains français qui ont le mieux connu le Moyen Âge, bien que peut être, par amour de l’Antiquité, il l’ait un peu trop déprécié ; que cet ensemble d’écrits marqués au coin du bon sens et où tout est bien distribué, bien présenté, d’un style pur et irréprochable, sans une trace de mauvais goût, sans un seul paradoxe, atteste bien aussi la supériorité de celui qui les a conçus. » Pour moi, c’est plutôt la preuve d’un esprit très sain. […] Les Lettres persanes et Voltaire, voilà les prochains ennemis, les troupes légères qui s’empareront des hauteurs, à la française, avant de dire gare, et qu’on ne saura plus ensuite comment débusquer. […] Nous savons par lui quel jour Bossuet s’est décidé à prendre des lunettes enferme à mettre sur le nez. […] Aujourd’hui qu’on est entré jour par jour pendant quatre années dans l’intérieur de Bossuet vieux, malade, laborieux toujours, mais défaillant par degrés et mourant, on sait à quoi s’en tenir, comme si l’on avait été soi-même un témoin oculaire lisant dans cette belle et bonne conscience à toute heure. […] — Encore une fois, Bossuet ressort de cette lecture et de l’épreuve suprême de ces intimes documents avec des traces de faiblesse sans doute et d’infirmité humaine ; je ne sais si ceux qui se dressent dans l’esprit d’illustres statues qui ressemblent trop souvent à des idoles, trouveront qu’il ait grandi à leurs yeux ; mais cet homme, qui a eu tant de grandeur dans le talent, s’y montre avec bien de la bonté morale et de la piété vraie dans le cœur ; que faut-il davantage ?

1455. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier » pp. 303-319

Mme Récamier était, en 1823-1824, leur confidente à tous deux ; elle entrait bien pour quelque chose dans leur jalousie, dans leur rivalité déguisée ; elle penchait d’inclination, je le crains, pour le moins sage (les meilleures même des femmes sont ainsi) ; pourtant elle savait tenir la balance assez indécise encore : chacun était écouté, chacun lui parlait de l’autre ; tout le monde était content, personne n’était trahi. […] Le genre de mon talent, je le sais, ne présente aucune surface : d’autres bâtissent un palais sur le sol, et ce palais est aperçu de loin ; moi, je creuse un puits à une assez grande profondeur, et l’on ne peut le voir que lorsqu’on est tout auprès. […] Le duc de Laval avait de la gaieté dans l’esprit ; c’est lui qui disait d’une grande femme qui avait un grand nez : « Il faut beaucoup la ménager, car si on la fâchait, elle vous passerait son nez au travers du corps. » Le mot a été relevé comme spirituel et original ; mais je ne saurais admettre, avec l’écrivain distingué qui en a fait la remarque, qu’il n’y ait que ce mot-là à retenir dans les deux volumes. […] Un art et une grâce de Mme Récamier, c’était de faire valoir la personne avec qui elle causait ; elle s’y appliquait, en s’effaçant volontiers ; elle n’était occupée que de donner des occasions à l’esprit des autres, et on lui savait gré même de ses demi-mots, de ses silences intelligents. […] Vous savez ce qu’il en est et ce qu’il en pense lui-même ; il a dîné hier chez moi à mes côtés.

1456. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand »

Acteur consommé, M. de Talleyrand, plus encore qu’aucun autre auteur de Mémoires, aura écrit pour colorer sa vie, non pour la révéler ; s’il avait l’à-propos en tout et savait ce qu’il faut dire, il savait encore mieux ce qu’il faut taire. […] Ce maître accompli en l’art de séduire et de plaire aura certes bien su ce qu’il faisait en triomphant de sa paresse pour écrire. […] Je demanderai d’abord si l’on n’abuse pas de ce mot : avoir du caractère, et si cette force, qui a je ne sais quoi d’imposant, réalise beaucoup pour le bonheur du monde. […] On voit que l’évêque d’Autun savait, lui aussi, jouer, quand il le fallait, du bréviaire du coadjuteur ou des burettes de l’abbé Maury. […] Dumont, qui le vit beaucoup à ce moment, nous l’a peint au physique et au moral avec vérité : « Je ne sais s’il n’avait pas un peu trop l’ambition d’imposer par un air de réserve et de profondeur.

1457. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVII. De la littérature allemande » pp. 339-365

Comme on l’appelle un roman, beaucoup de gens ne savent pas que c’est un ouvrage. […] Il n’y a que Rousseau et Goethe qui aient su peindre la passion réfléchissante, la passion qui se juge elle-même, et se connaît sans pouvoir se dompter. […] Ce n’est pas Goethe qui l’a créé, c’est lui qui l’a su peindre. […] un pays où cependant on connaît l’amour, où deux êtres se dévouent l’un à l’autre, vivent longtemps à deux, puis savent exister seuls ! […] Les Allemands sont éminemment propres à la liberté, puisque déjà, dans leur révolution philosophique, ils ont su mettre à la place des barrières usées qui tombaient de vétusté, les bornes immuables de la raison naturelle.

1458. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre douzième. »

L’auteur sait ce qu’il a voulu dire, et n’est pas obligé de s’en rapporter aux lumières d’un prince âgé de huit ans. […] On sait que c’était le symbole des banqueroutiers. […] Elle ne saurait en faire un reproche à sa fille. […] L’univers leur sait gré du mal qu’ils ne font pas. […] Tout le discours du solitaire est parfait, et ceux qui aiment les vers le savent par cœur.

1459. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre III. Les explications anthropologique, idéologique, sociologique »

Il n’en est pas moins vrai que ces idées se ressemblent par certains traits, dont l’ensemble constitue justement l’égalitarisme, et qui ne sauraient donc s’expliquer par les traits spécifiques des races. […] On sait que, suivant la nature des inventions qui font l’homme grand, cette action sera plus ou moins facile à saisir. […] Ainsi, pour l’explication du succès d’une idée sociale, ni la physiologie, ni la psychologie purement individuelle ne sauraient suffire. […] Les sciences physiques et naturelles ont prouvé mille fois qu’elles savaient suppléer à la première par la seconde ; plus que toutes les autres, les sciences sociales devront user de cette faculté. […] Or on sait que l’histoire ne se répète guère ; il est rare qu’elle ramène deux fois les mêmes combinaisons de conditions.

1460. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

je ne le sais, mais il n’y a rien de semblable. […] On ne le savait pas davantage aux environs de 1840, et le mot lui-même de « socialisme » n’était alors qu’un barbarisme d’invention récente. […] Je ne sache pas qu’il y ait non plus de plus beaux vers que ceux de Leconte de Lisle : j’entends encore de plus « classiques ». […] L’auteur des Poèmes antiques ou des Poèmes barbares savait ce qu’il voulait ! […] Dumas l’a su, s’il l’a dit un peu confusément.

1461. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Ainsi, avant qu’aucun modèle eût paru, on savait à quelles conditions un écrit est un modèle. […] Il n’en laissa rien savoir à ses parents, pour éviter leurs observations et leurs reproches, et ne se confia qu’au père Mersenne, auquel il avait fait promettre de lui garder le secret. […] Le seizième siècle, personnifié dans ses libres penseurs, Montaigne en tête, était arrivé au doute par le savoir. […] C’est ainsi que Descartes allait jusqu’à ce paradoxe, qu’il n’est pas plus du devoir d’un honnête homme de savoir le grec et le latin que le langage suisse ou bas-breton. […] Je suis sûr d’y découvrir un certain défaut familier, un côté où penche son esprit, faute de force pour se tenir en équilibre ; une faiblesse qu’il a su rendre séduisante par l’adresse dont il la déguise.

1462. (1914) Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne pp. 13-101

Mais poursuivons parallèlement à l’intérieur des différents ordres et sachons reconnaître les qualités parallèles. […] Bien peu d’êtres sont visés, pour qui sait sa chrétienté. Et au dehors il y a cet immense royaume de disgrâce, qui consiste à ne pas même savoir de quoi on parle. […] Et cela, même le véritable physicien aussi le sait. […]  » Toute la question est précisément de savoir si la pensée aussi n’est pas mieux n’importe où que dans le milieu d’une forêt.

1463. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Edmond et Jules de Goncourt »

… et, qui sait ? […] Et ce que j’en admire le plus, savez-vous ce que c’est ? […] Je ne le sais pas. […] Voulez-vous savoir comme il finit son roman, ce romancier qui veut être poétique par exception et qui le dit dans sa préface ? […] Quel sujet de roman qu’une telle créature, pour un romancier fort en nature humaine, et qui sait la brasser.

1464. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

De ce fonds il retrouve sans le savoir quelques-uns des sentiments grecs les plus fins. […] On ne saurait le dire sans présomption ni lourdeur. […] Pour un peu il penserait, comme Malebranche, qu’Adam avant la chute savait toutes choses, et que, comme il ne savait pas l’histoire, l’histoire n’est rien. […] il ne sait — de son temps. […] Je ne sais.

1465. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « VII » pp. 25-29

Puis, la pièce jouée et applaudie, l’orage du parterre a recommencé ; on demandait avec cris je ne sais quoi, je ne sais qui. […] Un incident burlesque a prêté dès le début aux railleurs qui, au milieu des nombreux amis, ne manquaient pas : un chat gris en personne a paru on ne sait d’où sur la scène. […] La vente qui a lieu depuis lundi dans les appartements du Palais-Royal, et qui finit aujourd’hui mercredi au profit de la Guadeloupe et sous les auspices de la reine, a mis en circulation dans la haute société un charmant recueil de nouvelles inédites, trois nouvelles, Marie-Madeleine, Une Vie heureuse et Résignation, composées par une jeune femme du monde12 pour elle seule et quelques amis ; mais la reine l’ayant su a désiré que ce fût imprimé à l’Imprimerie royale et vendu pour cette infortune extraordinaire : il a fallu obéir.

1466. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Début d’un article sur l’histoire de César »

Tout ce qu’il faut savoir à heure donnée, César le sait ; tout ce qu’il faut entreprendre et faire, il le fait à point. […] Il nous faut du grand, diront-ils, mais ce grand à quoi ils rêvent sans cesse, ils ne sauraient le trouver eux-mêmes ni l’inventer ; ils sont en peine des voies et moyens, et resteraient bien empêchés tous seuls à le réaliser ; il faut qu’on le leur prépare, qu’on le leur présente tout fait, et alors ils l’acceptent, sans trop de discernement toutefois, sans distinguer toujours le fond de l’apparence et le simulacre d’avec la réalité. […] Ils le sont ; ils en ont la marque, le masque ou le haut du masque et le signe au front, une parole rare, un silence imposant, une allure lente, étrange, auguste si l’on veut, je ne sais quoi d’original dans leur croisement et d’aussi impossible à confondre avec rien autre que de difficile à démêler en soi et à définir.

1467. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MARIA » pp. 538-542

Sur un front de quinze ans la chevelure est belle, Elle est de l’arbre en fleur la grâce naturelle, Le luxe du printemps et son premier amour : Le sourire la suit et voltige alentour ; La mère en est heureuse, et dans sa chaste joie Seule en sait les trésors et seule les déploie ; Les cœurs des jeunes gens, en passant remués, Sont pris aux frais bandeaux décemment renoués ; Y poser une fleur est la gloire suprême : Qui la pose une fois la détache lui-même. […] A force toutefois de savoir le chemin, Elle s’apprivoisa : — comme un oiseau volage Que le premier automne a privé du feuillage, Et qui, timidement laissant les vastes bois, Se hasarde au rebord des fenêtres des toits ; Si quelque jeune fille, âme compatissante, Lui jette de son pain la miette finissante, Il vient chaque matin, d’abord humble et tremblant, Fuyant dès qu’on fait signe, et bientôt revolant ; Puis l’hiver l’enhardit, et l’heure accoutumée : Il va jusqu’à frapper à la vitre fermée ; Ce que le cœur lui garde, il le sait, il y croit ; Son aile s’enfle d’aise, il est là sur son toit ; Et si, quand février d’un rayon se colore, La fenêtre entr’ouverte et sans lilas encore Essaye un pot de fleurs au soleil exposé. […] Je pourrais bien ici faire le romanesque, Vous peindre Maria dans la couleur mauresque, Quelque gitana fière, à l’œil sombre, au front d’or ; Mais je sais peu décrire et moins mentir encor.

1468. (1874) Premiers lundis. Tome I « Le vicomte d’Arlincourt : L’étrangère »

Izolette réunit tous les charmes et toutes les vertus ; elle aime Arthur dès le premier jour : mais elle n’a pas l’air assez mélancolique ni assez idéal ; et le jeune et bel Arthur, qui a été élevé par le philosophe systématique Olburge, dans tout le vague de théories hyperboliques, ressent pour elle je ne sais quel mécontentement. […] Que cette infortunée, qui n’est ni femme ni vierge, et qui pourtant n’est point coupable, soit la véritable Agnès, qui a trouvé moyen de courir les champs en laissant à sa place dans le donjon quelque amie complaisante, c’est ce que devine tout d’abord le lecteur qui sait tant soit peu son d’Arlincourt : mais c’est ce qu’Arthur ne saurait deviner ; et pourtant son cœur à tout hasard n’en préfère pas moins la proscrite de la vallée à l’héritière du château. […] C’est qu’en effet ce qui est faux n’est jamais utile, et qu’au fond il y a quelque chose d’immoral et de pervers dans cette falsification de l’histoire qui ment sans pudeur à la vérité des traditions, et dans cette falsification bien autrement coupable de la nature humaine, qui la représente dégradée par d’indéfinissables passions, poussée au crime par je ne sais quel vertige sans objet, qui la calomnie en lui prêtant des désordres qui ne sont pas les siens, et qui n’est qu’une insulte, un attentat perpétuel aux lois éternelles et sacrées de la raison.

1469. (1887) Discours et conférences « Discours prononcé aux funérailles de M. Stanislas Guyard, Professeur au Collège de France »

En peu d’années, il a su remplir le cadre d’une longue vie scientifique ; il en a fait assez pour sa tâche virile ; mais nous qui fondions sur lui tant d’espérances, nous qui nous consolions de vieillir en voyant grandir à côté de nous cette laborieuse et vaillante jeunesse, c’est pour nous qu’est le deuil. […] Il savait s’attacher ses élèves, leur inspirer le goût du travail qui le remplissait lui-même. […] Indulgere genio est un art que notre ami ne savait pas, ne voulait pas savoir ; il ne pécha que par excès d’amour pour le bien.

1470. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 348-354

Seroit-il permis d’ajouter, que peu de Littérateurs ont eu le coup-d’œil plus juste pour découvrir les défauts d’un Livre, le tact plus fin pour en sentir les négligences & les beautés, qu’il a été long-temps le seul des Journalistes qui relevoit les fautes de langage aujourd’hui si communes, & qui, en matiere de style, ait su plus finement distinguer le simple du bas, le naturel du recherché, le sublime de l’enflure, le vrai du faux ? […] Il a eu beau dire que le goût & la gloire des Lettres étoient intéressés à cette sévérité ; que les défauts des Auteurs célebres sont beaucoup plus dangereux que ceux des Auteurs médiocres, qu’on n’est jamais tenté de prendre pour modeles ; qu’il est essentiel d’arrêter les usurpations des Tyrans littéraires, qui abusent de leur réputation pour renverser les Loix & faire respecter jusqu’à leurs écarts : de pareilles raisons ne sauroient justifier ces attentats toujours impardonnables, si on fait attention aux génies qu’ils attaquent. […] Quoiqu’on n’ait cessé de lui dire qu’il ne sauroit trop respecter ces hommes qui honorent notre Nation par leur Littérature, autant que par leurs lumieres & leurs vertus ; il n’a pas craint de les qualifier d’Ecrivains bizarres, de les accuser d’être vindicatifs, intolérans, orgueilleux, égoïstes, pleins de morgue. […] Qui ne sait cependant que ce sont les plus ardens Prédicateurs de la modération, de la tolérance ; qu’ils n’ouvrent la bouche que pour recommander la modestie, & jamais pour parler d’eux-mêmes ; que tous leurs Ecrits déposent en faveur du respect qu’ils ont pour la Religion, la Nation, les Loix, & toute autre espece d’autorité ?

1471. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Je ne le savais pas ; mais je crus tout à coup que les bois me seraient délicieux. […] Mais l’homme sait-il bien toujours ce qu’il veut, est-il toujours sûr de ce qu’il pense ? […] Ne t’explique point, ne t’excuse point, je sais tout ; j’ai tout compris, comme si j’avais été avec toi. […] Que je sus peu de gré à ceux qui me rappelèrent au jour ! […] je sus donc ce que c’était que de verser des larmes pour un mal qui n’était point imaginaire !

1472. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Il n’est pas un artiste : il ne sait ce que c’est que plasticité du style, rythme expressif des vers. […] Je ne sais trop pourquoi Ganelon trahit ; par orgueil, je suppose : mais je lui sais gré de devenir traître, et de ne pas l’être par destination première, par emploi, comme tant de traîtres des chansons de geste, ancêtres de ceux des mélodrames. […] Je ne sais trop : mais la vie domestique n’est-elle pas épique dans l’Odyssée ? […] A vrai dire, on ne saurait nier que quelques-uns aient eu du talent. […] Puis l’instruction se répandit, on sut lire : on eut chez soi des manuscrits.

1473. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Treize lettres inédites de Bernardin de Saint-Pierre. (Article Bernardin de Saint-Pierre, p. 420.) » pp. 515-539

Mais vous savez que j’ai plus de délicatesse que de vanité. […] On ne sait trop comme l’on vit avec les philosophes. […] Je ne saurais oublier les gens avec lesquels j’ai vécu. […] Je ne sais encore quelle tournure prendra ma fortune. […] [NdA] L’écrivain, qui l’était d’abord sans le savoir, commence à s’apercevoir qu’il l’est en effet.

1474. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre IV. Shakespeare l’ancien »

Du reste, on ne sait où trouver ce blasphème. […] Qui sait l’arrière-pensée de la tempête ? […] La foi est une ignorance qui croit en savoir et qui, dans de certains cas, en sait peut-être plus long que la science. […] On sait ce que peut une Marseillaise. […] Rien ni personne ne saurait appréhender la pensée au corps.

1475. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre V : Règles relatives à l’explication des faits sociaux »

Mais, en premier lieu, elle ne saurait à elle seule rendre compte de la spécialisation même la plus rudimentaire. […] Mais les mouvements inhibitifs ne sauraient être confondus avec ceux qui constituent la contrainte sociale. […] Enfin, elle ne saurait avoir de valeur morale pour l’avenir, dans la mesure où il est inconnu. […] Toutefois, l’action de ces milieux particuliers ne saurait avoir l’importance du milieu général ; car ils sont soumis eux-mêmes à l’influence de ce dernier. […] Mais, sans revenir sur les difficultés qu’implique une pareille hypothèse, en tout cas, la loi qui exprime ce développement ne saurait avoir rien de causal.

1476. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

Qu’est-ce que reconnaître un objet usuel sinon savoir s’en servir ? et qu’est-ce que « savoir s’en servir » sinon esquisser machinalement, quand on le perçoit, l’action que l’habitude a associée à cette perception ? […] Nous savons qu’il y a ici mouvement du schéma aux images, et que l’esprit ne travaille que dans la conversion du schéma en images. […] Parler ainsi serait admettre qu’on peut percevoir exactement le mouvement de la valse quand on ne sait pas valser. […] Sensations et représentation sont d’ailleurs ici en continuité si parfaite qu’on ne saurait dire où l’une finit, où les autres commencent.

1477. (1864) Le positivisme anglais. Étude sur Stuart Mill

— Encore moins ; il sait trop bien les sciences modernes. — Imite-t-il Condillac ? […] Quand j’examine de près ce que je sais d’elle, je trouve que je ne sais rien d’autre que les impressions qu’elle fait sur moi. […] J’en sais autant en le commençant qu’après l’avoir fini. […] Mais comment savez-vous cela ? […] Sans doute on peut savoir ainsi que deux droites ne sauraient enclore un espace, mais on peut le savoir encore d’une autre façon.

1478. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — I » pp. 93-106

Je ne sais rien de plus fait que ces deux volumes pour confirmer et accroître l’estime et le respect qu’inspirait déjà un des esprits les plus distingués et des plus honorables caractères de ce temps-ci. […] On a reproché quelquefois à Montesquieu les historiettes dont il égaye encore plus qu’il ne les appuie ses graves sujets ; mais il savait, l’habile homme et le grand artiste, que même en telle matière il est souvent vrai de dire que le conte fait passer la morale avec lui. […] Sans faire tous les métiers comme Gil Blas, il est bon de savoir ce que c’est qu’un métier, ne fût-ce que pour être plus indulgent au pauvre monde, au commun des honnêtes gens, et pour ne pas opposer trop souvent un veto absolu aux faits accomplis nécessaires. […] Je sais qu’entre l’arbre et l’écorce il ne faut pas mettre le doigt, ni demander une raison exacte à ces étroites alliances d’âmes, à ces amitiés de Montaigne et de La Boétie ; pourtant, dès qu’on nous livre les secrets de l’intimité, nous devenons plus ou moins des juges. […] Un livre, quel que soit son succès, n’ébranle donc point l’esprit public et ne saurait même attirer longtemps, ni de la part du grand nombre, l’attention sur son auteur.

1479. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Lettres de Rancé abbé et réformateur de la Trappe recueillies et publiées par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont-Ferrand. »

Gonod a jugé à propos de répondre à ces pauvretés qui ont fait orage dans le pays ; nous ne savions pas que l’Auvergne fût si loin de Paris encore. […] Il avait résigné à l’abbé Favier son abbaye de Saint-Symphorien-lez-Beauvais, dont ce dernier ne savait trop que faire. […] Cet abbé Nicaise, que Rancé avait connu durant son voyage de Rome, était, comme on sait, le plus infatigable écriveur de lettres, le nouvelliste par excellence et l’entremetteur officieux entre les savants de tous les pays ; c’était un Brossette avec beaucoup plus d’esprit et de variété ; il ne résistait pas à l’idée de connaître un homme célèbre et d’entretenir commerce avec lui. […] Si les esprits malins croyaient remarquer quelque contradiction entre cette première lettre et celle de septembre suivant, dans laquelle on donne à l’abbé Nicaise quelques notes et renseignements à l’avantage de la Trappe, il est bon de savoir (ce que M.  […] La plupart des nouvelles qu’il commente, ou des ouvrages qu’il préconise (voulant toujours savoir le jugement qu’on en porte), n’arrivent point jusqu’à la Trappe ; Rancé se tue à le lui dire avec douceur, avec tranquillité : « Nous n’avons vu ni même ouï parler d’aucun des livres dont vous m’écrivez.

1480. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIII. Des tragédies de Shakespeare » pp. 276-294

Shakespeare a su peindre avec génie ce mélange de mouvements physiques et de réflexions morales qu’inspire l’approche de la mort, alors que des passions enivrantes n’enlèvent pas l’homme à lui-même. […] Les profondeurs du crime s’ouvrent aux regards de Shakespeare ; et c’est dans ce Ténare qu’il sait descendre pour en observer les tourments. […] comme il sait imprimer son âme du Nord à la peinture de l’amour ! […] comme elles savent que ce n’est pas dans la flatterie que consiste l’art tout-puissant des hommes pour se faire aimer d’elles ! […] Ils n’ont aucun rapport avec les sublimes effets que Shakespeare sait tirer des mots simples, des circonstances vulgaires placées avec art, et qu’à tort nous n’oserions pas admettre sur notre théâtre.

1481. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leconte de Lisle, Charles-Marie (1818-1894) »

Jeune, mais déjà mûr, d’un esprit ferme et haut, nourri des études antiques et de la lecture familière des poètes grecs, il a su en combiner l’imitation avec une pensée philosophique plus avancée et avec un sentiment très présent de la nature. […] On ne saurait rendre l’ampleur et le procédé habituel de cette poésie, si on ne l’a entendue dans son récitatif lent et majestueux ; c’est un flot large et continu, une poésie amante de l’idéal et dont l’expression est toute faite aussi pour des lèvres harmonieuses et amies du nombre. […] Tout d’abord aussi, il faut reconnaître que nul, à côté de la prodigieuse expansion de Victor Hugo, n’a su créer ainsi partout un nouvel idéal de puissance, de sérénité superbe et d’objectivité lumineuse. […] Il ne raisonne plus, il croit, il voit, il sait. […] Et, pour toutes ces raisons, vous conclurez qu’on ne saurait mieux définir la part propre de M. 

1482. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre VIII. La crise actuelle de la Physique mathématique. »

Imaginons deux observateurs qui veulent régler leurs montres par des signaux optiques ; ils échangent des signaux, mais comme ils savent que la transmission de la lumière n’est pas instantanée, ils prennent soin de les croiser. […] Quand même la compensation serait exacte elle ne saurait être simultanée. […] Certes, c’en est un auquel on ne saurait toucher sans ébranler la mécanique. […] Les électrons négatifs n’ont pas de masse, c’est entendu ; mais les électrons positifs, d’après le peu qu’on en sait, semblent beaucoup plus gros. […] Ce dernier signifie que le centre de gravité d’un système isolé se meut en ligne droite ; mais s’il n’y a plus de masse constante, il n’y a plus de centre de gravité, on ne sait même plus ce que c’est.

1483. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Cours de littérature dramatique, par M. Saint-Marc Girardin. (2 vol.) Essais de littérature et de morale, par le même. (2 vol.) » pp. 7-19

Le paysan d’Athènes ne le pardonnait pas à Aristide ; je ne saurais le passer à M.  […] Anacréon dit quelque part qu’il y a un petit signe, un je ne sais quoi auquel on reconnaît les amants : ce je ne sais quoi manque à M.  […] Lui qui sait si bien indiquer les défauts de la cuirasse d’autrui, voilà le sien. […] Il a de la gaieté dans l’esprit, il a du léger et du plaisant ; il sait toutes les finesses du cœur et les nuances de la société. […] Saint-Marc Girardin, qui connaît si bien la nature humaine, le sait mieux que nous.

1484. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Introduction. Du bas-bleuisme contemporain »

Rudement mais nettement posé par la Révolution française, et toujours frémissant dans les limites entre lesquelles Napoléon, qui savait l’indomptabilité du monstre, l’enferma, le principe de l’Égalité sautera, dans un temps donné, ses barrières. […] En Amérique, qui ne le sait ? […] Enfin, jusqu’en religion, la sphère impénétrable, l’influence de la femme a, par je ne sais quels invisibles pores, pénétré… Des esprits hardis ont irrévérencieusement écrit que présentement la Vierge primait Jésus-Christ. […] Il ne s’agit nullement de faire aux femmes, qui aiment tant à être victimes, parce qu’elles savent que c’est la meilleure manière d’être bourreau, le plaisir de leur refuser tout ; mais simplement de reconnaître exactement, — en le déterminant, — ce qu’elles ont, et ce qu’on ne veut pas, certes ! […] À la dixième ligne, et sans savoir de qui elles sont, vous êtes prévenu ; vous sentez la femme !

1485. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Buloz »

Apprenez-moi, si vous le savez, ô antiquaires de la littérature d’hier, plus vieille que celle d’un siècle ! […] Je laisse les charmes de son visage aux photographes littéraires, qui peuvent le ramasser, s’ils savent par où le prendre. […] C’était un entrepreneur de littérature qui s’oubliait… Ce que je dis là publiquement ici, tout le monde le sait et se le chante à l’oreille depuis vingt-cinq ans. […] Ils savent, en effet, les traditions intérieures de la Revue des Deux Mondes. […] Aujourd’hui, François Buloz n’est plus que le propriétaire de sa Revue, mais il sait la mettre au service des petites oppositions parlementaires et académiques du moment.

1486. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VI. M. Roselly de Lorgues. Histoire de Christophe Colomb » pp. 140-156

On ne savait pas qu’en s’approchant, en regardant de près, on trouvait dans l’imposant colosse un chef-d’œuvre de perfection humaine sous tous les aspects. […] Il est assez indifférent de le savoir, mais, quoi qu’il en puisse être, il a choisi Colomb avec intelligence, et pour les plus hautes et les plus péremptoires raisons. […] C’était l’enfant gâté de la circonstance, lequel avait trouvé un monde sans le savoir et en faisant des fautes, comme ces enfants, qui jouaient, trouvèrent le télescope, en posant deux verres l’un en face de l’autre. […] Excepté d’avoir grandi outre mesure la figure, imposante d’ailleurs, d’Isabelle la Catholique, il n’y a pas de reproche à faire à cette plume qui sait se contenir. […] Roselly de Lorgues, qui l’a étudié comme il a étudié la géographie, l’art nautique et les divers problèmes scientifiques que la découverte de Christophe Colomb résolvait, a rencontré un intérêt et une vie qu’il a su élargir et dont il a renvoyé les réverbérations tantôt sombres, tantôt brillantes, sur la figure épique et presque biblique de son héros.

1487. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

Après Saint-Preux, après Werther, après René, elle sut être elle-même, à la fois de son pays et du nôtre, et introduire son mélancolique Scandinave dans le vrai style de la France. […] Pas une œuvre d’elles qu’on puisse lire autrement que par curiosité, pour savoir les modes de la sensibilité de nos mères. […] On sut d’ailleurs un gré médiocre à Mme de Krüdner, dans le monde allemand poétique, d’avoir déserté sa langue pour la nôtre, et Goëthe a lui-même exprimé quelque part le regret qu’une femme de ce talent eût passé à la France. […] si vous saviez combien de misères et d’angoisses s’y recèlent ! […] Honneur et bénédiction à celle qui sut demeurer jusqu’au bout, et sous le scandale de son zèle, un infatigable martyr de la charité !

1488. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

Mais est-ce que vous ne trouvez pas qu’il y a là quelque chose d’un peu humiliant pour le français, qui a su s’imposer au choix de poètes étrangers comme Verhaeren et Mme de Noailles et qui n’a pas su se faire préférer des poètes de Narbonnaise et d’Aquitaine ? […] Je sais qu’il faut tenir compte de la croisade des Albigeois, et de tout ce qu’eut à souffrir la délicate culture méridionale. […] Qui sait si quelqu’un d’entre eux ne fut pas des lointains aïeux de Corneille ou de Malherbe ? […] On ne sait pas. […] Quand il naît un poète de génie, il sait user de l’instrument qu’il trouve à sa portée, ou, s’il le faut, il s’en forge un tout neuf.

1489. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juillet 1886. »

Je sais, dans les Improperia, un fragment du Popule meus, à peine moins sublime que le Popule meus du vieux plain-chant. […] Je ne sais rien de plus saisissant que cette longue entrée muette. […] Le style chromatique ne saurait aller plus loin. […] On ne sait ce qui va se produire, mais on est sûr que le charme ne sera pas rompu. […] non, la lente mélopée du roi ne saurait se brusquer d’aucune sorte.

1490. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VI »

Il sait que son fils aime madame Lecoutellier, née de Valtaneuse ; il sait aussi que la veuve convoite ardemment le château qui lui permettrait de reprendre ce nom patricien. […] Cette grande coquette ne sait pas son rôle. […] Ce qu’elles savent le mieux faire, après les blessures, c’est la charpie. […] Encore une fois, ce mariage, que nous savons impossible, ne rentre plus dans l’action. […] Il s’agit seulement de savoir si l’ingénieur est aussi à vendre.

1491. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre II. La perception extérieure et l’éducation des sens » pp. 123-196

J’éprouve une démangeaison en un point du dos, et j’en sais l’endroit ; mais je ne le sais point ou je le sais mal, par la représentation visuelle ; je ne me figure pas clairement la vertèbre ou la côte, le renflement de muscle ou le creux d’échine, dont ce picotement est voisin ; il n’est pas associé, comme dans le pied, la main, le bras, le visage, à tel point précis d’une forme figurée à l’œil intérieur. […] Aucun de ces aveugles opérés ne sut, du premier coup, interpréter ses nouvelles sensations, décider de la situation, de la forme, de la grandeur des objets, les reconnaître. […] Au soleil et par une belle lune, elle savait d’où venait la lumière ; rien de plus ; elle avait vécu ainsi jusqu’à quarante-trois ans. […] À trois mois, elle savait, en certains cas, diriger son regard en tournant les yeux et la tête vers l’objet qu’elle voulait voir, entre autres, mon visage. Mais elle ne savait pas faire cela pour tous les objets. — Visiblement, ce qu’elle a distingué, noté dans sa mémoire, et reconnu d’abord, ce sont les voix et les visages.

1492. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Aujourd’hui, où je sais un interviewer à la cantonade, je jette rapidement sur le papier les idées que je veux développer. […] Je sais que Gallimard a donné une commission de 3 000 fr. à Conquet. […] Je ne sais décidément pas si la pièce est bonne ou mauvaise, mais pour moi, c’est un fort emmagasinement d’émotions dramatiques. […] tu sais, maman, il ne faut pas te donner toute, ainsi que tu l’as fait ce soir… » Eh bien ! […] Voici une de ces choses qu’il serait pour tout le monde de la plus grande utilité de savoir, et que personne ne dit ou n’imprime, et que très peu de personnes savent.

1493. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Jusqu’alors je ne savais à qui je parlais. […] Aucun autre germaniste n’a été ministre, que je sache, si ce n’est M.  […] Il sait qu’il combat pour la vieille religion nationale. […] Mais on sait maintenant qu’ils se sont trompés. […] Qui sait ?

1494. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Je ne saurais que m’en féliciter. […] Rousseau a eu je ne sais quelle hésitation et senti je ne sais quelle gêne en cette affaire. […] Vous savez que d’ailleurs je n’étais point leur ami. […] Auguste Comte le voit si bien qu’il en fait, comme on sait, le fondement de son système. […] Et je ne sais pas s’il y a là une simple coïncidence.

1495. (1899) Arabesques pp. 1-223

Il sait, d’ailleurs, l’affection que je lui porte. […] Mais nous savons que la Révélation est un conte de bonne femme. […] Déroulède rimerait des quatrains pour les savons du Soudan. […] … Prends les devants ; sus, sus ! […] Ce critérium n’existe pas : il ne saurait exister.

1496. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

On veut tout savoir sur le point de départ des grandes âmes avant-courrières. […] À s’en tenir au point de vue de la stricte réalité, on sait déjà les inconvénients de toute chose, le néant des amitiés, le revers des enthousiasmes, l’insuffisance des doctrines stoïques et altières. […] Nous ne savons comment modérer notre mémoire. […] comme il se saurait gré de sa race ! […] On sait tous les personnages du château, on sait jusqu’aux lieux où couchent les domestiques dans la grosse tour ou dans les souterrains.

1497. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

Elle professe, dit-elle en un endroit deux maximes principales, à savoir que la sécurité est le tombeau de la liberté, que l’indulgence envers les hommes en autorité est le moyen de les pousser au despotisme. […] Témoin ému d’un triomphe éloquent de Brissot aux Jacobins, elle s’écrie : « Enfin j’ai vu le feu de la liberté s’allumer dans mon pays, il ne saurait s’éteindre. […] Et, avec cela, elle ressentait la vie domestique, la vocation maternelle, pratiquait le ménage dans sa simplicité et savait écouter la nature dans ses secrètes solitudes. […] Les femmes comme Mme Roland sauront toujours se faire leur place, mais elles seront toujours une exception. […] « Quant au docteur Lanternas, disait-il en pleine Convention, tout le monde sait que c’est un simple d’esprit. » 82.

1498. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

si tu avais su t’aimer davantage toi-même, peut-être qu’aujourd’hui tu distinguerais mieux ce qu’il y a de bon et de mauvais parmi les objets qui flattent tes désirs et tes espérances. […] Appliquez-vous à régler votre maison, réduisant insensiblement les choses sur le pied de la décence et de la modération, ce qui ne saurait être, dans ces premiers moments où le maître et les domestiques sont encore nouveaux et étrangers les uns aux autres. […] Adoptez pour votre nourriture ordinaire des mets simples et communs, et faites beaucoup d’exercice, parce qu’on est bientôt exposé à des infirmités, dans l’état que vous avez embrassé, si l’on ne sait pas prendre les précautions convenables. […] Cette lettre me fait le plus grand plaisir, car j’aime les morceaux de sculpture au-delà de toute expression ; je ne saurais me lasser d’admirer l’habileté d’un artiste qui sait travailler le marbre au point d’imiter la nature elle-même. […] La nature elle-même est, sans doute, toujours supérieure à ces imitations ; cependant on est excusable d’admirer un art qui sait donner à la matière morte tant de vie et d’expression, qu’il semble qu’il ne faudrait que le souffle pour l’animer.

1499. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Ce prince ayant su par Desyveteaux que le gentilhomme normand dont Duperron lui avait tant vanté les vers était à Paris, le fit venir, et lui demanda une prière pour son voyage en Limousin. […] Jusqu’à cette époque on ne sait rien ne sa vie, sinon qu’ayant quitté son père, gentilhomme de Caen119, parceque celui-ci s’était fait huguenot, il vint en Provence, et s’attacha au grand prieur de Provence, Henri d’Angoulême. […] Pédanterie, latinerie, disait-il de toutes ces prétentions au savoir extraordinaire. […] Rompant tour à tour avec toutes les servitudes de cette poésie qu’infectait l’imitation ou la folie du savoir, avec tous ces mensonges convenus, auxquels des poëtes bien doués étaient forcés d’accommoder leur naturel, il fit de la langue des vers la langue même des sentiments les plus personnels au poëte. […] Mais l’art d’en faire des couronnes N’est pas su de toutes personnes Et trois ou quatre seulement Parmi lesquelles-on me range, Savent donner une louange Qui demeure éternellement124.

1500. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « I »

Il faut savoir gré à un chef de concert aussi musicalement doué, d’initier son public si nombreux et si ouvert, aux grandes pages de l’œuvre wagnérienne. […] On sait que Parsifal est réservé exclusivement au théâtre de Bayreuth et ne peut être représenté nulle part ailleurs. […] S’ils étaient des adeptes de la philosophie de Schopenhauer, ils sauraient dompter la passion qui les ronge, puisqu’ils sauraient que l’amour n’est qu’un leurre tendu par la nature pour la préservation du genre aux dépens de l’individu (Die Welt als Wille… II, 638) ; ils ne se répandraient pas en plaintes interminables, puisque leur maître enseigne qu’il faut bénir les souffrances (1, 468) ; et surtout ils n’appelleraient pas constamment la mort, puisque rien n’est plus contraire aux principes et aux doctrines de l’école. […] Ceux qui ont étudié la Métaphysique de l’Amour savent que Schopenhauer ramène toute manifestation de l’amour aux instincts sexuels. […] Je ne sais point de photographies — même entre les meilleures de la maison Braun — qui vaillent davantage à me charmer par leur perfection technique, et leur sincérité artistique.

1501. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Sieyès. Étude sur Sieyès, par M. Edmond de Beauverger. 1851. » pp. 189-216

Convenez qu’ici l’agent le plus utile n’est pas celui qui ne sait et ne veut pas voir au-delà de ce qui est. » Voilà qui est formel. […] Je voudrais bien savoir si dans la Grèce, si dans Rome libre, les orateurs s’occupaient d’un autre art que de celui d’aller à leur but. […] Je ne sais si Descartes a réellement fondé une philosophie, et, quoique quelques-uns de ses soi-disant disciples me l’assurent, j’en doute ; mais je sais bien qu’il a fait main basse sur les derniers empêchements que la scolastique mettait à l’esprit humain, et c’est là sa gloire. […] Fertile en découvertes d’exécution, sachant se taire et attendre, ne concevant point de plans chimériques, et alliant la dextérité à la constance, personne ne sait mieux, lorsqu’un grand intérêt l’exige, conserver de l’empire sur lui-même et en obtenir sur les autres. […] Il niait avoir prononcé les paroles qu’on lui prête après le 18 Brumaire : « Messieurs, nous avons un maître ; ce jeune homme sait tout, peut tout et veut tout.

1502. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

Illusion qui ne sera pas longue, car le temps sait arracher l’oripeau. […] Elle ne savait pas se proposer un juste but. […] Et savez-vous pourquoi ? […] Mais qui sait ? […] Cousin sait se frapper, comme Caton… dans une position gratuite.

1503. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

Madame Sand, cette forte jupe philosophique, comme on sait, avait fait à ce livre sa dernière révérence avant de s’en aller dans l’autre monde. […] Il le fut de sa femme Faustine, qui le trompa sans qu’il sût jamais s’il fut trompé. […] Nous savions à l’avance ce que cela devait être. Nous savions qu’il ne pouvait avoir rien de nouveau sous cette plume qui s’est fait la gaine d’un système, et qu’une pensée… du diable chez M.  […] Il s’agit de savoir si, en présence de ces faits colossaux qu’il fallait reproduire et faire revivre, le peintre qu’on dit être dans M. 

1504. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Les Musulmans n’ont pas le préjugé de la naissance, et l’hétérogénéité des races ne les choque pas ; mais en revanche ils ne sauraient supporter l’hétérogénéité des religions. […] Là même où l’égalité est proclamée avec la tolérance, qui ne sait que la dissemblance des convictions risque souvent d’entraîner des différences de traitement ? […] La division du travail ne saurait associer intimement les hommes sans les égaliser. […] En ce sens la proportionnalité ne saurait être visée qu’à travers une certaine uniformité. […] On sait en effet que, plus les éléments générateurs diffèrent, plus il y a de chances pour que leurs produits soient originaux.

1505. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre IV. Conclusions » pp. 183-231

Ces étapes sont nécessaires à l’évolution normale ; aucune ne saurait être omise sans danger, mais aucune ne saurait être définitive. […] Si tel était le cas, pourquoi ne savons-nous jamais prévoir l’œuvre de demain ? […] Je sais qu’on a expliqué ce désir par un Créateur et que, réciproquement, on a voulu prouver par lui l’existence du Créateur. […] Se connaître soi-même, savoir où l’on va, c’est remplacer insensiblement le devoir par le vouloir. […] Dans la réalité toutefois, toute forme est imparfaite, toute idée incomplète, parce que l’homme ne saurait se soustraire au relatif.

1506. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Valentine (1832) »

Non, Indiana n’était pas une œuvre isolée, née d’un concours de circonstances fortuites, et qui ne dût pas avoir de sœur ; non,  l’auteur n’était pas seulement doué d’une âme qui eut souffert et d’un souvenir qui sût se peindre. Sa propre histoire contée (si tant est que ce fût sa propre histoire), l’auteur d’Indiana en savait d’autres, il en pouvait recommencer et dire à l’infini ; avec la clef des cœurs humains, il avait la création et le jeu des figures. […] Je ne sais aucun début de roman qui soit plus irrésistible et plus engageant. […] Il est à regretter qu’ayant su si bien conduire le roman à son point de maturité, l’auteur en ait développé la seconde moitié avec une précipitation qui laisse beaucoup de traces. […] Au sujet de la scène de chambre à coucher, j’avoue que le délire éloquent que l’auteur a su tirer de la potion d’opium bue par Valentine ne me fait point passer sur la convenance de ce moyen fantastique, devenu si à la mode : y aura-t-il donc inévitablement dans chaque roman nouveau une scène d’opium, comme il y avait autrefois un songe et une tirade : Où suis-je ?

1507. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre IV. Des femmes qui cultivent les lettres » pp. 463-479

Il n’y a que ces êtres en dehors des intérêts politiques et de la carrière de l’ambition, qui versent le mépris sur toutes les actions basses, signalent l’ingratitude, et savent honorer la disgrâce quand de nobles sentiments l’ont causée. […] Les femmes sans esprit de conversation ou de littérature, ont ordinairement plus d’art pour échapper à leurs devoirs ; et les nations sans lumières ne savent pas être libres, mais changent très souvent de maîtres. […] Les hommes d’esprit, étonnés de rencontrer des rivaux parmi les femmes, ne savent les juger, ni avec la générosité d’un adversaire, ni avec l’indulgence d’un protecteur ; et dans ce combat nouveau, ils ne suivent ni les lois de l’honneur, ni celles de la bonté. […] Qui sait si l’image offerte par la calomnie ne combat pas quelquefois contre la vérité des souvenirs ? Qui sait si les calomniateurs, après avoir déchiré la vie, ne dépouilleront pas jusqu’à la mort des regrets sensibles qui doivent accompagner la mémoire d’une femme aimée ?

1508. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre IV. Unité et mouvement »

Quand il y a dans le discours un véritable mouvement, nulle part on n’aperçoit de solution de continuité : le développement s’achemine tout d’une suite à son but, comme, dans l’être vivant, chaque état du corps, chaque moment de la vie plongent dans l’état et dans le moment qui précèdent, et ne sauraient s’en distinguer : l’enfant devient homme insensiblement, et change en restant le même. Pour assurer l’unité, et pour marquer le mouvement, il faut savoir où l’on doit commencer et où l’on doit finir. […] Voilà ce qu’il faut savoir résoudre, et cela ne laisse pas d’être souvent embarrassant. Dans les choses même qu’on croit le mieux connaître, si on veut les exposer, on ne sait souvent pas par quel bout les prendre. […] On a beau savoir à fond la chose, et où elle se termine : on ne trouve pas l’idée et la phrase de la fin, celles qui doivent achever l’impression et conclure le discours ; on reprend son propos, on revient sur ses pas, on change un peu sa direction, sans pouvoir tomber juste au but.

1509. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

Il y a là, en effet, je ne sais quoi de contradictoire : la souffrance de M.  […] D’ailleurs, l’ignorance où nous sommes de nos origines et de nos fins ne saurait être une souffrance positive, puisque cette ignorance est la condition même de l’activité de l’esprit, laquelle est nécessairement un plaisir. […] Ce qui m’irrite, voulez-vous le savoir ? […] Un chagrin le frappe, la vieillesse vient, il se sent homme, et voici s’éveiller en lui un immense besoin d’aller aussi prier obscurément dans les recoins des églises et d’y déposer sa souffrance, et de savoir qu’il est écouté… Mais c’est Dieu maintenant qui le traite ironiquement en égal, qui discute et raisonne et lui renvoie les questions qu’il lui posait, et le promène en raillant par la chaîne des cercles vicieux qu’il avait forgée. […] Cet idéal, dont l’accomplissement est la raison d’être de l’univers, je ne sais s’il réside dans l’intelligence d’un Dieu, ou s’il se forme peu à peu dans le cerveau des êtres supérieurs.

1510. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VII » pp. 56-69

Quand ils ont manqué, ils craignent plus qu’il le sache, qu’ils ne craignent qu’on les châtie. […] Après avoir fait des miracles de courage, ces gens-là venaient savoir s’ils avaient bien fait ou non ; ils venaient rendre compte de la victoire de laquelle il fallait quelquefois se justifier, et laquelle était quelquefois punie. […] Il veut aussi pour ce commerce une certaine douceur et facilité de mœurs, qui sait être accommodante sans être servile, qui n’approuve pas tout sans choix, qui ne rejette pas tout par dégoût. […] « Sans la franchise, elles seraient ou des écoles de dissimulés qui ne veulent pas dire qu’elle heure il est, ou des théâtres de capitans qui disent plus qu’ils ne savent et plus qu’ils ne font et peuvent faire. […] Cette dernière partie est d’une érudition qui sait choisir les sources auxquelles on peut remonter avec profit.

1511. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VII »

Donc, c’est entendu : toutes les traductions d’Homère sont suspectes, parce qu’il ne saurait y avoir de bonne traduction. […] Mais puisqu’on ignore, puisqu’on ne peut savoir ce que c’est qu’Homère, comment M. de Gourmont sait-il que « Leconte de Lisle a mis dans sa traduction ce qui n’est pas dans Homère » ? […] Car ils sont fort rares, par bonheur, les écrivains français qui ont su le grec. » Que beaucoup de grands écrivains français aient imité Homère, c’est un fait que toutes les négations du monde ne détruiront pas ; et si, de plus, ils ignoraient le grec, cela prouve qu’il n’est pas nécessaire de le savoir pour faire des chefs-d’œuvre et fructueusement imiter Homère, Nous ne disons pas autre chose. […] Albalat a coloré avec soin et en vain une petite image d’Epinal à compartiments étanches. »‌ Le malheur, c’est que ma description a été faite — mes amis le savent — sous la dictée et d’après les détails exacts d’un bon observateur qui arrivait du mont Saint-Bernard, bouleversé par ce spectacle.

1512. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIII. Henry Gréville »

… Je ne sais rien d’elle… Elle a pour moi le charme du mystère, si elle n’a pas le charme du silence. […] Je ne l’ai su, en effet, qu’en lisant Dosia, le chef-d’œuvre de Mme Henry Gréville. […] On dit que c’est l’esprit français qui l’y a mis, je n’en sais rien, mais il y est ! […] Non, ce n’est pas Mme Sand qui, dans aucun de ses romans, n’a su dialoguer et à qui, dans le Marquis de Villemer, M.  […] Les roses vieillissent vite et vous savez nomme on les appelle, quand on ne les nomme plus des roses… Je ne voudrais pas effacer le nom que je donne encore à Mme Henry Gréville et plus tard être obligé de l’appeler justement et insolemment : un bas-bleu !

1513. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Kœnigsmark »

Au milieu de la cacophonie d’un ouvrage où le récit croise la correspondance et la correspondance le dialogue, ce qui plane, ce qui domine et ce qui choque, c’est je ne sais quel ton cavalier dont le dessous et le vrai nom sont le sans-façon et l’impertinence historiques, — deux défauts et deux ridicules que la Critique ne peut laisser passer, du moins sans avertir ! […] Philippe de Kœnigsmark, — dont l’Hisloire n’a dit qu’un mot et à voix basse, car le métier de l’Histoire est de tout savoir, et la honte d’ignorer se mêlait pour elle à l’ignorance et au mystère, ce héros byronien, avant Byron, qui disparaît comme Lara ou comme le Corsaire, dont les uns disaient qu’il avait été jeté dans un four par la jalousie de Georges Ier, roi d’Angleterre, et les autres qu’il avait été enterré sous une des feuilles du parquet de sa royale maîtresse, Sophie-Dorothée, — Philippe de Kœnigsmark sort enfin des ténèbres qui pesaient sur son tombeau, et il en sort avec tout un monde que l’Histoire n’a pas vu, dans l’éblouissement d’une époque qui nous a trop longtemps aveuglés de sa gloire et qu’il faut aujourd’hui savoir juger ! […] Sans elle, qui sait ? […] Son mérite actuel a été de savoir l’anglais et l’allemand, — ce qui est honorable et souvent utile, mais ce qui n’est pas tout, car le mot célèbre de Charles-Quint n’est pas vrai en littérature… Dans ce mystère dévoilé de la mort du comte de Kœnigsmark, que de questions à tenter un esprit qui aurait eu quelque puissance, et qu’il n’a pas effleurées ! […] Quand son mari devint roi d’Angleterre, frappé, sans doute, de l’attitude d’innocence de cette femme sublime ou diabolique de volonté, il lui envoya des ambassadeurs qui lui proposèrent de sa part le pardon et le partage du trône ; mais, plus fière que si elle avait été pure, ou, qui sait ?

1514. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Quitard »

Ce sont des idées générales qui furent déposées, on ne sait quand, — c’est la question ! […] Des idées générales, parfois primitives, — dans tous les cas toujours anciennes, — des jugements, des sentences, des vérités, soit absolues, soit relatives, rapidement poinçonnées, — le diable sait par qui !  […] Les proverbes, les sentences, toutes ces généralisations des esprits qui surent observer et réfléchir les premiers, sont du despotisme d’esprits supérieurs, s’imposant à l’esprit faible et bas des multitudes… C’est de la sagesse toute faite, non par les nations, mais pour elles. […] Qui sait si la plupart des pensées les plus individuelles de Rivarol lui-même ne passeront pas un jour dans la langue française et ne feront pas corps avec elle, comme des inscriptions sur le marbre où elles sont gravées, — et si, comme tant de mots dont le génie qui les a prononcés a été exproprié, pour cause d’utilité publique, avant le Code Napoléon, elles ne seront pas recueillies par quelque Quitard de 1990 ? […] Et pourquoi n’a-t-il pas fait, philologue qui veut toucher aux mœurs par la philologie, l’histoire de ces mots redoutables, Tarquins futurs d’une Académie qui n’est pas Lucrèce, et qui, pour cette raison, ne doit pas mourir… de ce que vous savez ?

1515. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ch. de Barthélémy » pp. 359-372

… Fréron, le vil folliculaire Fréron, comme rappelait Voltaire, qui n’était pas vil, lui, comme on sait ! […] Or, c’est cette personnalité du critique contre la personnalité des critiqués que j’aurais voulu trouver aussi dans ce livre des Confessions de Fréron, qui sont plus des extractions que des confessions… parce qu’il n’y a de critique efficace, de critique qui mérite ce nom de critique, qu’à la condition de traverser l’homme par le livre et le livre par l’homme… Je sais que le préjugé contraire court les chemins. […] … Il faut être au courant de la vie que lui firent les philosophes, qui pouvaient tout dans le temps où la France était au pillage de leurs idées et de leurs ambitions, pour savoir à quel point sublime Fréron poussa l’invulnérabilité. […] C’est bien là une figure celtique, avec son front étroit et dur, renflé aux tempes, le profil coupant et recourbé, cette maxillaire en saillie, — l’assise solide d’un visage qui n’exprime que la force, — tout cela porté sur de hautes épaules comme en ont les hommes faits pour la guerre, et vous reconnaissez la race opiniâtre qui ne sait pas reculer, la race héroïque qui va de Beaumanoir, du combat des Trente, jusqu’à ce Georges Cadoudal qui mourut pour avoir voulu le renouveler ! […] On sait qu’à moitié mort, il rouvrit les yeux pour demander qu’on la respectât… Fréron fut l’homme de la famille chrétienne, comme il avait été l’homme de la Société et de la Monarchie chrétiennes.

1516. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le comte de Fersen et la cour de France »

Le comte de Fersen, qui fut un homme d’action, a cependant écrit, sans le savoir, une chose égale en résultat à l’histoire de Taine. […] Un jour, la calomnie noua, avec un de ces liens qu’elle sait tacher de fange, le nom pur de Fersen au nom plus pur encore de Marie-Antoinette, et ce fut là toute sa célébrité ! […] Et quand tout est fini, quand l’œuvre à laquelle il a consacré sa vie et à laquelle il eût voulu la sacrifier est interrompue par cette mort du Roi et de la Reine de France, que les misérables souverains du temps ne surent empêcher, il n’a pas une récrimination ! […] on savait cela, mais en gros ; mais le détail de cela, parle menu et comme la Correspondance de Fersen nous le donne, on ne le savait pas, et on le sait maintenant ; et à présent on ne l’oubliera plus !

1517. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Lettres d’une mère à son fils » pp. 157-170

Excepté le fatalisme, qui n’a pas le droit d’enseigner et qui n’en saurait avoir la prétention sans inconséquence, il n’y a que trois philosophies qui veulent se partager l’empire de la nature humaine en l’expliquant. […] Jusque-là, c’est un enfant encore, qui ne sait rien, quoi qu’il ait appris ; car on ne sait pas pour avoir déposé dans sa mémoire des notions qu’on peut y reprendre, a dit profondément un penseur. […] Il y a un mot de Kant, magnifiquement niais et bien digne, du reste, d’un anthropomorphite comme lui : « Quand un être parfait — dit-il quelque part — en aura élevé un autre, on saura alors quelles sont les limites du pouvoir de l’éducation. » On ne le saura donc jamais ; car d’êtres parfaits, il n’y en a point dans ce monde. […] Du reste, en acceptant ce type de femme, nous disons que Corne a su l’animer, et parfois jusqu’à l’illusion.

1518. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVI. M. E. Forgues. Correspondance de Nelson, chez Charpentier » pp. 341-353

Or c’était précisément un historien épique qu’il aurait fallu à Nelson, cet homme épique de grandeur, et cela n’aurait pas suffi : il lui aurait fallu un autre genre d’historien encore, celui-là qui sait regarder profondément au fond des cœurs pour débrouiller les sombres problèmes dont ils sont pleins, car Nelson fut romanesque aussi et même criminellement romanesque. […] Ce fils d’un placide ministre protestant qui fut le plus audacieux des marins et peut-être de toutes les âmes qui aient été créées impassibles, était faible de corps jusqu’à l’infirmité, et les portraits que nous avons de lui avec ses cheveux longs et plats, les plans de ses joues vieillies avant l’âge, et son air de simple ecclésiastique de campagne, disent à qui sait que c’est là Nelson, toute la profondeur du cratère qu’il y avait en cet homme d’apparence si peu volcanique. […] Forgues, trop traduit de Southey, malgré quelques miettes de correspondance qu’il y ajoute, n’augmente pas de beaucoup les faits connus : mais il ne s’agit pas de connaître plus qu’on ne sait, de la vie de Nelson, dont on sait tout, mais de l’écrire. […] C’est la plus étonnante spontanéité qui ait jamais vécu, et voilà le trait pour qui saura le dégager, voilà le grand trait de sa physionomie ! […] Forgues, qui ne sont que des chroniqueurs, l’ont-ils su ?

1519. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Nelson »

Or, c’était précisément un historien épique qu’il aurait fallu à Nelson, cet homme épique de grandeur, et cela n’aurait pas suffi : il lui aurait fallu un autre genre d’historien encore, celui-là qui sait regarder profondément au fond des cœurs pour débrouiller les sombres problèmes dont ils sont pleins ; car Nelson fut romanesque aussi et même criminellement romanesque. […] Ce fils d’un placide ministre protestant, qui fut le plus audacieux des marins et peut-être de toutes les âmes qui aient été créées impassibles, était faible de corps jusqu’à l’infirmité, et les portraits que nous avons de lui, avec ses cheveux longs et plats, les plans de ses joues vieillies avant l’âge, et son air de simple ecclésiastique de campagne, disent, à qui sait que c’est là Nelson, toute la profondeur du cratère qu’il y avait en cet homme d’apparence si peu volcanique. […] Mais il ne s’agit pas de connaître plus qu’on ne sait de la vie de Nelson, dont on sait tout, mais de l’écrire. […] C’est la plus étonnante spontanéité qui ait jamais vécu, et voilà le trait pour qui saura le dégager, voilà le grand trait de sa physionomie ! […] Forgues, qui ne sont que des chroniqueurs, l’ont-ils su ?

1520. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « X. Doudan »

Sans cette lumière, on n’aurait rien su de ce qu’il était ; et encore il y avait, quoiqu’il fût un causeur de ce salon où l’on parlait plus qu’on ne causait, bien des petits coins voilés dans son âme où cette lumière ne pénétrait pas. On ne savait pas grand-chose de son origine, de sa famille, de son passé, et il a bien couru la chance de mourir tout entier, n’ayant vécu, sinon toujours en lui, au moins pour lui, — ce qui est peut-être la meilleure manière de vivre… Le prince de Ligne disait de Catherine II que son empire allait d’une tempe à l’autre de son beau front. […] Lui aussi était un corps dont son âme ne savait que faire, ainsi que le disait Madame de Châtenay de son ami Joubert. […] Elles viendront hiérarchiquement après celles de Madame de Sévigné, de Voltaire, du prince de Ligne, de Madame Du Deffand, l’aveugle clairvoyante et l’amusante ennuyée, et enfin de Joubert, qui n’était pas, lui, qu’un épistolier, mais un penseur à la Platon et un très grand artiste sans le savoir… Est-ce bien sûr qu’il ne le savait pas ? […] Nous sommes aussi curieux que Doudan lui-même, qui était curieux de tout et qui disait : « Je n’ai jamais passé devant un chenil sans avoir envie de savoir comment on y pensait et comment on y vivait. »

1521. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XI. Gorini »

de vocation, cette reine des miracles, un érudit sans bibliothèques, sans livres, ou avec peu de livres, au fond du plus modeste presbytère, dans une campagne perdue, et tout en remplissant les devoirs du pasteur qui a charge d’âmes, et qui sait porter son fardeau. […] On l’y a prononcé avec respect parmi ceux qui savent. […] Et c’est ainsi qu’en vingt années, et sans sortir de l’aride milieu qu’il sut féconder, il put écrire sa Défense de l’Église, qu’il publia en 1853 et dont il nous donne une seconde édition aujourd’hui. […] C’était plus étonnant que Jasmin le coiffeur, que Reboul le boulanger, que Mangiamel l’arithméticien, ce pauvre prêtre de campagne, parachevé érudit en vingt ans, on ne sait comment, mais qui certainement s’était donné plus que la peine de naître. […] S’il n’a pas su les mettre dans un livre que tous pussent lire avec plaisir, un autre les y mettra.

1522. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ch. de Rémusat. Abélard, drame philosophique » pp. 237-250

Je ne sache rien de plus facile et de plus misérable que ces sortes de placages, répétés par Flaubert dans sa Tentation de Saint Antoine, et qu’on pourrait appeler de l’imagerie historique et dramatique je ne sache rien qui soit au-dessous de ces compositions hybrides, dont la monstruosité est précisément de n’avoir pas de composition. […] Mais ni grand talent, ni même grand génie, ne sauraient arracher de telles œuvres à leur radicale, à leur irrémédiable infériorité. […] Mais à présent, quand toutes les expériences et applications ont été faites de la fausse Poétique dont le manifeste fut la préface du Cromwell, nous savons à quoi nous en tenir sur ces drames sans logique, ni dans l’espace ni dans le temps, qu’on nous a donnés pour un art nouveau, quand ce n’était qu’une impuissance. […] Car, tout le monde l’a su, si tout le monde l’oublie, Charles de Rémusat a fait un traité sur la philosophie d’Abélard. […] Cette Héloïse n’a pas même l’air de savoir l’horrible attentat dont son très peu platonique amant a été victime.

1523. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

Caro a prises, pour les analyser, dans ses petites pincettes philosophiques, il ne s’agit plus uniquement d’être un charmant philosophe, adroit, poli et joli comme un cœur… Car, savez-vous de quoi il retourne aujourd’hui ? […] sachez-le bien, les poètes, avant tout, sont des âmes ! […] Mais les pessimistes de la science et de la pensée, qui veulent supprimer le mal absolu, le mal ontologique de la vie, sont je ne sais quels êtres innommables, abstraits, sans principes, sans entrailles, des espèces de boîtes à logique comme il y a des boîtes à musique ! […] Eh bien, je sais gré à M.  […] J’ai dit que je voudrais savoir ce que M. de Bismarck, cette fière intelligence casquée, comme aurait parlé saint Jérôme, pense de Schopenhauer et de sa métaphysique ?

1524. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « A. Dumas. La Question du Divorce » pp. 377-390

Alexandre Dumas fils, il n’y a plus rien à en espérer, et il ne saurait faire un pas de plus dans la voie où il est entré. […] On se rappelle ce livre fou, on ne sait déjà plus quel bas-bleu russe, intitulé : L’appel au Christ, auquel, tous les deux, dans des lettres qu’ils ne s’attendaient pas à voir publier, ils donnaient également une approbation galante et charmante. […] Ce n’est pas non plus une question pour une nation historique qui sait, comme la nôtre, par son histoire, que le mariage indissoluble est une affaire de race, de tempérament, de mœurs et de siècles. […] Qu’ils se taisent donc et dévorent leur mépris, mais qu’ils comprennent enfin qu’où il n’y a plus de religion d’État, il n’y a plus d’indissolubilité religieuse possible ; et puisque nous n’avons su la défendre, cette religion d’État qui fit la force morale et la gloire de la France, ce n’est pas sans elle que nous sauverons le mariage chrétien. […] Alexandre Dumas a su inspirer aux hommes le sentiment très rare d’un respect voisin de la peur, et c’est le meilleur respect, celui-là !

1525. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Docteur Favrot »

L’erreur, d’ailleurs, glisse beaucoup moins quand elle est carrée, et je sais mieux ainsi par où la prendre pour la renverser… Il était matérialiste comme la plupart des médecins, ces grands tripoteurs de matière, qui finissent par s’en aveugler… Et justement, en ces temps derniers, le matérialisme a beaucoup remué, sans arriver à rien, cette question des inhumations qui est pour lui la question définitive. […] Et les faits même, j’aurais voulu les voir brasser au docteur Favrot avec cette force que je sais en lui… Tel qu’il est, cependant, son livre peut certainement être utile. […] Il nous y a rapporté, avec un grand détail d’érudition, ces coutumes de tous les peuples en matière de sépulture qui, jusqu’à l’établissement de l’Église Romaine, laquelle sut seule doser exactement le respect qu’on doit à nos poussières, ne furent guères que des superstitions idolâtres, grossières et quelquefois sanglantes. […] mais les coutumes des peuples et les inventions, en fait de tombes, decette Humanité qui ne sait comment s’adorer et s’éterniser dans ses propres débris, ne sont pas aussi variées qu’on pourrait le croire. […] Le docteur Favrot, qui ne trouve pas que ce soit tout à fait assez que cela, lance, vers la fin de son ouvrage, l’idée des chambres mortuaires de l’Allemagne ; mais il ne nous les décrit pas, ne les examine point, et n’ajoute rien à cette idée de chambres mortuaires, avec leur système plus ou moins ingénieux de sonnettes, correspondant, comme on le sait sans le docteur Favrot, aux doigts du mort, et mises en vibration au moindre mouvement qui s’éveillerait dans le cadavre.

1526. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. J. Autran. Laboureurs et Soldats, — Milianah. »

Il peut le dégrader, mais il ne saurait l’abolir, même quand il le transfigure. […] Théophile Gautier insulte lui-même son grand talent par coquetterie, à savoir : qu’avec de certains procédés, on peut créer des poètes, comme Vaucanson fabriquait des joueurs de flûte et des canards. […] Évidemment, il n’est pas un poète à la hauteur des sujets qu’il a su choisir, et nous disons choisir à dessein, car les sujets ne s’emparent point de M.  […] Mais Dieu sait où il va ! […] Vous qui savez les lois, vous nanti de science, Venez guider un peu l’humble inexpérience !

1527. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Théophile Gautier. » pp. 295-308

Le Capitaine Fracasse, sachez-le bien, n’est qu’un morceau de tapisserie faite d’après les tableaux, plus ou moins oubliés ou empoussiérés maintenant, de ces maîtres qu’on appelle Scarron, Mme de Lafayette, Segrais, Scudéry, Cyrano de Bergerac, et, pour mieux dire, tous les romanciers du commencement du dix-septième  siècle, que M.  […] Savez-vous à quoi je pensais en lisant ce livre qui a la prétention d’être un livre écrit dans l’esprit et pensé dans la langue d’un temps qui n’est plus ? […] Or bien, si vous voulez savoir, — car la vie ne se discute point, — combien il est aisé de reconnaître la présence ou l’absence de la vie, dans un livre où magnifiquement elle abonde et dans un livre où elle n’est pas, comparez seulement l’œuvre de Balzac à l’œuvre de M.  […] Quel est le sens esthétique ou moral, mais quelconque, de ce livre sans caractère tranché, fait de miettes et de petits souvenirs rapprochés, qui ne sait être nettement ni un roman d’idée, comme Don Quichotte, ni un roman de cœur, comme La Princesse de Clèves, ni un roman de nature humaine ou de mœurs, comme Gil Blas, ni même un roman d’aventure, comme le Roman comique de Scarron, car avec les comédiens qui emplissent le roman du Capitaine Fracasse, M.  […] Ses amis, qui savent très-bien, eux, sans vouloir l’avouer, bien entendu, tout ce qui manque à M. 

1528. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Les Mémoires d’une femme de chambre » pp. 309-321

Mais les Mémoires d’une femme de chambre, c’est-à-dire de la femelle de ce genre d’animal dont on a dit le mot resté proverbe : « Pour un valet de chambre, il n’y a pas de héros » (et, vous le savez, la femelle de toutes les espèces est, en fait d’observation, de finesse et de tact, bien au-dessus de tous les mâles de la terre, même dans cette espèce supérieure de messieurs les valets !)  […] Tout le temps que je le lisais, cet auteur : Voilà, me disais-je, une femme de chambre qui parle comme tous les livres à couvertures jaunes que je connais, et Dieu sait, hélas ! […] Il a attaché les deux siennes, dans toute leur longueur, au loup de velours noir qu’il a mis sur le visage de sa femme de chambre, pourtraite au frontispice de ce volume qui pue le faux ; et si on ne sait pas le sexe de ces deux oreilles, on en sait l’espèce, et cela suffit… L’auteur, quel qu’il soit, n’a pas même de talent littéraire… Du moins n’en a-t-il pas montré. Il écrit en petites phrases saccadées qui ressemblent à l’expectoration fréquente d’un fumeur qui ne sait pas fumer. […] Mais n’ajouter rien à ce que nous savons et nous refaire, en l’abaissant et en l’encanaillant chaque fois davantage, La Dame aux Camélias ou Le Demi-Monde, ou le quart de monde, et s’enfoncer dans des milieux encore plus immondes et qui ne sont plus des mondes du tout, je dis que ce n’est pas là seulement amour de l’immoralité, mais, en matière d’observation, manque de regard et radicale impuissance !

1529. (1773) Essai sur les éloges « Morceaux retranchés à la censure dans l’Essai sur les éloges. »

En 1642, Cinq-Mars, favori du roi, est exécuté pour avoir conspiré contre, le cardinal : de Thou, qui avait su la conspiration, et qui s’y était opposé de toutes ses forces par ses conseils, est aussi arrêté, jugé à mort et exécuté. […] On sait que Richelieu se servit toujours de cette voie pour assassiner juridiquement ses ennemis. […] On peut donc lui reprocher d’avoir prodigieusement augmenté cette maladie épidémique des emprunts, qui devient de jour en jour plus mortelle ; d’avoir donné l’exemple de la multiplication énorme des impôts ; d’avoir aggravé tour à tour et la misère par le despotisme, et le despotisme par la misère ; de n’avoir jamais vu que je ne sais quelle grandeur imaginaire de l’État, qui n’est que pour le ministre, et dont le peuple ne jouit point ; et d’avoir sacrifié à ce fantôme les biens, les trésors, le sang, la paix et la liberté des citoyens. […] Il ne sera pas mis non plus parmi ces grands hommes d’état nés pour être conquérants et législateurs, puissants par leur génie, grands par leur propre force, qui ont créé leur siècle et leur nation, sans rien devoir ni à leur nation ni à leur siècle : cette classe des souverains n’est guère plus nombreuse que la première ; mais il en est une troisième qui a droit aussi à la renommée : ce sont ceux qui, placés par la nature dans une époque où leur nation était capable de grandes choses, ont su profiter des circonstances sans les faire naître ; ceux qui avec des défauts ont déployé néanmoins un esprit ferme et toute la vigueur du gouvernement, qui, suppléant par le caractère au génie, ont su rassembler autour d’eux les forces de leur siècle et les diriger, ce qui est une autre espèce de génie pour les rois ; ceux qui, désirant d’être utiles, mais prenant l’éclat pour la grandeur, et quelquefois la gloire d’un seul pour l’utilité de tous, ont cependant donné un grand mouvement aux choses et aux hommes, et laissé après eux une trace forte et profonde. […] Il sut, comme Auguste, employer les talents qu’il n’avait pas, et faire servir les grands hommes à sa renommée ; mais il fallait qu’Octave se servît de ses égaux pour sa grandeur, et leur persuadât qu’il avait droit à leurs victoires, quoiqu’il ne tînt ce droit que de leurs victoires même ; tandis que Louis XIV, armé de la souveraineté, commandait à des hommes qui lui étaient soumis, etc.

1530. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XII. »

Les trois grands tragiques et leur parodiste créateur étaient loin, vous le savez, d’avoir épuisé la veine théâtrale d’Athènes. […] Il savait que le roi Philippe, si habile séducteur de l’esprit des Grecs, avait compté pour trois prospérités ‘égales qui lui étaient échues le même jour, la défaite des Triballiens rebelles, une victoire à la course des chars, et la naissance du fils que lui donnait Olympias. […] Il semble, cependant, par un souvenir de son règne, que là même, l’ostentation orgueilleuse de la puissance, et ce je ne sais quoi d’asiatique et de barbare qu’Alexandre recevait du contact de ses ennemis vaincus, venaient altérer, dans les arts qui touchent à l’expression matérielle de la grandeur, la sublime pureté du génie grec. […] Les chefs-d’œuvre qu’elle avait laissés, ces marbres antédiluviens que la génération moderne ne pouvait reproduire, n’en étaient que plus admirés ; et on sait quelle gloire obtenait, en les interprétant, l’esprit encyclopédique d’Aristote. […] Mais il est beau de voir, même sous la conquête macédonienne, ce qui restait de dignité morale à la philosophie, et quel langage elle savait prendre, entre la servitude du peuple civilisé et les apothéoses que se décernaient les généraux grecs conquérants des barbares.

1531. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

Le plus grand nombre des livres se fait pour ceux qui savent lire à peine. […] Il y a mis en même temps tout ce que son époque pouvait savoir et sentir de la couleur et des mœurs homériques. […] La nature ne saurait être belle que par l’esprit dont elle est animée. […] On ne sait plus où commence la peinture et où finit la poésie. […] Ouvertement, ou sans le savoir, toutes ses pensées ont le même but : la révolution.

1532. (1853) Propos de ville et propos de théâtre

Il s’agissait de savoir pourquoi. […] On ne sait comment, il arrive on ne sait d’où. […] C’est la seule chose qu’il ne sache pas ou ne veuille pas faire. […] — Je sais : To be or not to be. […] Tu sais que ces soldats sont les plus beaux hommes de l’Angleterre.

1533. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 274

Un fou du moins peut rire, & sait nous égayer. Mais un froid Ecrivain ne sait rien qu’ennuyer. […] La Pluralité des Mondes, Guliver, Micromégas, en sont une preuve certaine ; mais nous ne savons pas en quoi Moliere lui a de pareilles obligations, à moins qu’on ne prétende parler d’une scene des Femmes savantes, qui paroît être une imitation d’une scene du Pédant joué.

1534. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. Le théâtre romantique »

Mais ce n’est pas tout : le simple pittoresque n’est pas le but du poète, et l’on ne saurait se réduire, dit dédaigneusement V. […] Il dresse gauchement son intrigue ; il ne sait pas la conduire. […] On sait comment les fantaisies parurent d’abord sur la scène du théâtre français de Saint-Pétersbourg, d’où Mme Allan les rapporta : le Caprice fut joué d’abord (nov. 1847) ; et peu à peu le reste suivit. […] Rien ne devait plus faire obstacle au poète qui aurait quelque chose à dire sur l’homme, et qui saurait le dire par les moyens spéciaux du drame. […] Et je ne sais si, dans le répertoire de Scribe, il y a rien qui vaille, littérairement, l’Ours et le Pacha 814, cette pure folie.

1535. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

C’est bien sec, et nous savons mieux que cela, même en fait de civilisation purement économique. […] Voltaire a pourtant parlé de « la gravité chrétienne » au dix-septième siècle ; il a su la voir ; il ne l’a pas sentie. […] Qui sait s’il ne croyait pas faire honneur à Bossuet ? […] S’il n’admire pas Homère, c’est qu’il ne sait pas le grec, et qu’il préfère la Henriade à l’Iliade. […] Aussi je ne sache pas de meilleur guide que sa Correspondance, pour apprendre à lire et à juger les écrivains des deux derniers siècles et Voltaire lui-même.

1536. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XV »

Elle sait que Gérard est dans les salons, et elle s’irrite de ne pas le voir. […] Son père sait qu’elle l’a aimé et qu’elle l’aime encore ; M.  […] Mistress Clarkson sait que le duc est un tireur de premier calibre, et que Gérard n’est fort qu’au maniement du compas. […] Savez-vous l’idée que suggère cette coalition honteuse et haineuse ? […] — Je n’en sais rien.

1537. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre I. Le Bovarysme chez les personnages de Flaubert »

Ainsi, la haine du réel se confond, chez Mme Bovary, au centre même de sa personnalité, avec le pouvoir de se concevoir autre qu’elle n’est, et les deux tendances sont si intimement unies que l’on ne saurait dire laquelle engendré l’autre. […] Elle sait qu’elle en est l’unique instigatrice, elle juge son amant et elle connaît « la petitesse des passions que l’art exagère ». […] C’est cette même force mensongère et fatale qui désorbitait les individus et qui maintenant manifeste son pouvoir sur l’espèce tout entière, contraignant l’humanité à se concevoir autre qu’elle n’est, faite pour d’autres destins, pour un autre savoir. […] Ils ne savent plus apprécier les distances, toute critique est abolie en eux. […] Elle est notre création, mais nous ne le savons pas.

1538. (1856) Les lettres et l’homme de lettres au XIXe siècle pp. -30

Je sais que l’homme de lettres ne doit pas vivre éloigné du monde, il perdrait dans une solitude absolue les occasions d’observer et la puissance d’agir. […] Qu’il y paraisse avec le prestige, d’un noble caractère, et, s’il le peut, avec l’éclat de la gloire : le monde estimera celui qui pourrait conquérir la richesse et qui sait s’en passer. […] Les lettres savent fort bien se frayer seules leur route et se passer de l’appui du pouvoir. Je ne sais même si les charges de ses faveurs n’en excèdent point les bénéfices. […] Une nation n’est pas suspecte de camaraderie : la gloire ne sait pas mentir.

1539. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

Les cercles sociaux ne sauraient guère se multiplier à l’infini en se diversifiant sans arriver à se couper. […] Mais on sait l’impossibilité de pareilles substitutions, brusques et totales. […] On sait enfin que des lois nouvelles facilitent la constitution des associations professionnelles. […] Le compagnon moderne ne saurait être aussi esclave de sa profession. […] Avec la civilisation prédominent les associations « finalistes », volontaires ou contractuelles, dont chacune ne saurait interdire à ses adhérents d’adhérer à une autre.

1540. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

On le sait. […] — « Ce que j’en fais, on le sait. […] Que sait-on de Descartes ? […] Ce censeur en sait-il plus que Juvénal ? […] tu n’en serais pas là, si tu avais su gouverner comme tu savais chanter.

1541. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIII : Affinités mutuelles des êtres organisés »

Nous savons, ainsi que M.  […] Dans des changements de cette nature, il ne saurait y avoir qu’une tendance bien faible à modifier le plan originel et aucune à en transposer les parties. […] Nous le voyons du reste clairement dans nos propres enfants : nul ne peut savoir s’ils seront grands ou petits, et quels seront précisément leurs traits. […] Néanmoins tout organe, si peu développé qu’il soit, ne saurait être considéré comme rudimentaire dès qu’il est d’une utilité quelconque. […] Un organe devenu inutile peut être très variable, car ces variations ne sauraient être empêchées par la sélection naturelle.

1542. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

Les premiers hommes du siècle sont ceux qui savent le grec. […] Le divin poète, impénétrable aux autres hommes, revit en lui ; il est juste qu’on le respecte en lui… Voilà la folle illusion qui allume le zèle des homéristes ; mais le plaisant est que le public ait si longtemps servi cette même illusion… Combien peu de gens savent la langue grecque ! […] Souffle, véhémence, torrent, abondance, grandeur, feu et richesse, voilà les caractères continus de L’Iliade, que Pons ni La Motte ne soupçonnaient pas : On ne saurait dire, prétendait l’abbé de Pons, qu’une langue soit moins propre qu’une autre à la vraie peinture des pensées et des sentiments. […] Dans la suite de la querelle, l’abbé de Pons sut maintenir sa position avancée en observant toutes les convenances. […] Une voix qui rappelle la blancheur du lis, c’est une voix qui a clarté et douceur, et je ne sais quoi encore qui se marie bien avec des cheveux blancs.

1543. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

Je ne saurais me voir dans ce miroir fidèle, Ni telle que j’étais, ni telle que je suis. […] Il savait, Aristocratès, tenir d’agréables discours en public, et, vertueux, ne pas froncer un sourcil sévère. Il savait aussi, autour des coupes de Bacchus, diriger sans querelle le babil qui sied aux banquets. Il savait se montrer plein d’accueil et avec les étrangers et avec ses concitoyens. […] On ne saurait méconnaître ici un accent profond et d’une sincère amertume, un accent à la Lucrèce.

1544. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

Si, hier encore, on ne savait trop où la prendre dans quelque exemple net et distinct, les Lettres de Mme Roland à Buzot nous en offrent aujourd’hui l’expression la plus haute et la plus pure. […] Nos plus libres auteurs comme Molière et La Fontaine imitent beaucoup eux-mêmes ; le principal, aux yeux de ce dernier, et tout le fin de l’art consiste à savoir rendre sien cet air d’Antiquité. […] C’est délicatesse à Mme Champagneux d’avoir éprouvé ce sentiment de souffrance filiale ; mais la postérité, mais les indifférents ne sauraient la suivre en cela ni l’imiter. […] L’amitié plus clairvoyante a pu donner un moment raison à la piété filiale, mais ne saurait se régler sur elle. […] de désagrément ou de ridicule, — est désormais attachée au nom de l’austère Roland, depuis qu’on sait, à n’en pouvoir douter, l’infidélité idéale de sa femme et cette passion avouée pour Buzot.

1545. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

73 Ses premiers goûts, sa première vocation, le portaient vers la sculpture : il y réussissait et promettait un artiste distingué ; il avait remporté, je ne sais en quelle année au juste, le premier prix dans un des concours pour Rome. […] 81 Le général Foy, qui fut dépêché quand on sut la prise du général Franceschi, arriva trop tard à Madrid. […] Le colonel d’un régiment de chasseurs lui avait sauvé la vie en Galice ; elle s’attacha à lui par reconnaissance et par inclination ; on lui savait gré parmi nous de son courage et de sa fidélité à son libérateur. […] Ce qu’il eut à souffrir durant cette longue captivité, que rien ne trompait ni ne consolait, et qui dans la suite ne fit que changer de cadre et de barreaux, nul ne le sait : il contenait stoïquement ses impressions. […] Le père était probablement Piémontais, mais si peu lettré qu’il ne savait pas même comment son nom devait être écrit suivant l’orthographe italienne.

1546. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [II] »

Ce que c’était qu’être classique au sens où l’avait conçu Du Bellay, et comme on l’a été en France jusqu’au temps de notre jeunesse, nous le savons tous, nous qui y avons passé et qui en avons été témoins ; mais nos neveux, je le crains, ne le sauront plus bien et auront peine à se le figurer dans la juste mesure. […] Il ne sait pas ce qu’on n’a appris que depuis : la succession et la transformation gallo-romaine, néo-latine et romane, lui échappent. Tout ce qu’il croit savoir, c’est que la négligence de nos ancêtres a laissé notre langue « si pauvre et si nue, qu’elle a besoin présentement des ornements et comme des plumes d’autrui ». […] Pour moi, je ne saurais l’en blâmer, et je le trouve bien français encore par le tribut qu’il paye, sous cette forme, à l’Antiquité. […] Il ne sait plus les hautes origines.

1547. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

Je sais de graves admirations, des suffrages imposants. […] Picard le savait ; il professait, m’assure-t-on, pour son jeune et brillant héritier, une admiration, une adoration presque naïve. […] Nous ne savons que les succès ; mais il y en a une quantité qui sont tombées, et quelques-unes à tort, dit-il. […] Dans les proportions où son paradoxe s’est produit sur ces sujets plus graves, il a touché mainte fois à l’odieux, et, à force d’art, il a su l’esquiver. […] Sachons gré à M.

1548. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE PONTIVY » pp. 492-514

L’amour, comme tout ce qui tient à la pensée, ne saurait être à la merci d’un jeu du dehors, d’un tort sans intention ; il ne se brise pas comme le verre dont le cadre neuf a tout d’un coup joué sous un rayon ardent, ou sous une pluie humide. […] Vous êtes mon soleil ardent, vous le savez ; je ne suis peut-être que l’astre qui s’éclaire de vous, qui s’éteint en vous, et que vous ne revoyez briller que quand vous semblez disparaître. […] Que ne le savait-elle ? […] Le lendemain, à l’heure de midi, par un de ces ciels demi-riants dont on ne saurait dire la saison, ils marchaient ensemble dans les allées solitaires, et vertes encore, d’un vaste jardin non cultivé, qui ne recevait qu’eux. […] pour un tort indéfinissable et dont on ne saurait marquer le moment !

1549. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

L’Étourdi, on le sait déjà, c’était L’Inavertito de Beltrame, que nous avons analysé précédemment. […] Pandolfo se rassure et dit à Ricciardo qu’il veut auparavant parler à sa fille pour savoir d’elle la vérité, et que dans une heure il lui rendra réponse. […] Pandolfo veut savoir qui est la femme qui est entrée chez lui et la force à se découvrir le visage. […] Il s’agit d’une jeune fille qui a reçu une lettre de son amant, lequel est à l’armée ; elle ne sait pas lire et voudrait qu’on lui lût cette lettre. […] Ils confirment, dans une certaine mesure, ce qu’on sait de la faculté d’improvisation que possédait Molière et du plaisir qu’il prenait à l’exercer.

1550. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

Chacun sait qu’en France, durant ces trente-cinq années, tous les genres littéraires ont vu triompher avec éclat, sous le nom de réalisme ou de naturalisme, la tendance à subordonner le beau au vrai, l’art à la science. […] Il y a eu, je le sais, des protestations. […] On sait quelle a été dans notre théâtre comique ainsi que dans nos fabliaux, contes et chansons, la profusion des plaisanteries grasses sur les maris malheureux et sur les femmes revêches. On sait en revanche à quelles catastrophes aboutissent dans nos drames modernes et dans nos romans de passion les défaillances de la fidélité conjugale et les complications causées dans le ménage par l’intrusion d’un tiers trop aimé. […] Agrippa d’Aubigné les peint hypocrites, serviles, cruels, avares, ignorants, réunissant en leurs tristes personnes tous les péchés capitaux et quelques autres en sus.

1551. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « V »

Dûment porté en terre, le bon chevalier au cygne ne risque plus de déranger, d’ici longtemps sans doute, le « bedit gommerze » que vous savez. […] la musique fracassante, la musique algébrique, chimique, tartare, hottentote, descriptive, que sais-je ! […] On lui en sut un gré infini… La réaction commençait d’ailleurs. […] Les belles œuvres ne sauraient plaire à ceux qui vivent des mauvaises, et au besoin s’en engraissent. […] On sait en quel paysage de montagnes, de lacs, de vallées et de forêts s’élevait, à Triebchen, la maison de Wagner.

1552. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

la royauté, ce n’est qu’un homme, qu’une famille tout au plus contre la nation entière ; nous le savons. […] Des circonstances de sa vie intérieure que chacun savait alors, et que ses amis arrivés au pouvoir auraient dû apprécier, le détournaient impérieusement d’accepter des fonctions publiques en province. […] Il y a de plus, dans certaines positions d’avant-garde, comme un surcroît d’honneur et de valeur qui sied à quelques hommes par leurs antécédents, et qui ne saurait faire loi pour tous. […] Au fond, ce qu’il tenait surtout à savoir, c’était si l’on était brave ; quand il vous avait tâté et qu’il était sûr de vous, vous étiez sûr, en un point, de son estime. […] Avant tout, il voulait savoir si les hommes qui briguaient son affection étaient bien pourvus à cet égard.

1553. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — I. » pp. 414-435

Il en reste assez pour le biographe observateur et pour tout critique qui sait lire. […] C’est alors seulement qu’il y répandra ce je ne sais quoi de chaleur et de lumière qui nous en réfléchira tout le ciel. […] La correspondance qu’on a de l’un à l’autre ne donnerait au lecteur qu’une idée imparfaite et trop inégale de leurs relations, si l’on ne savait que beaucoup les réponses de M.  […] Je ne sais qui a pu vous dire que les fonds littéraires n’étaient employés qu’en aumônes. […] C’est encore une chose que vous saviez avant que vous vous fussiez éloigné de la société.

1554. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie »

Les contradictions nombreuses dans lesquelles sont tombés les physiologistes semblaient autoriser cette manière de voir, qu’on ne trouvera pas indigne d’être discutée lorsqu’on saura que le grand Cuvier lui-même en était pénétré, et qu’il considérait comme tout à fait illusoire d’introduire l’expérience dans la science de la vie. […] J’admets, en effet, que les manifestations vitales ne sauraient être expliquées par les seuls phénomènes physico-chimiques de la matière brute… Mais, si les phénomènes vitaux ont une complexité et une apparence différentes de ceux des corps bruts, ils n’offrent cette différence qu’en vertu de conditions déterminées ou déterminables qui leur sont propres. […] Elle représente une limite, à savoir l’ensemble des phénomènes irréductibles à la physique et à la chimie. […] Claude Bernard se fait de la vie est encore conforme à cette grande loi, admise par tous les métaphysiciens, à savoir que l’inférieur est la condition du supérieur. […] Il n’en est pas de même pour le métaphysicien, car pour lui le problème est précisément de savoir comment les phénomènes sont possibles.

1555. (1868) Curiosités esthétiques « VII. Quelques caricaturistes français » pp. 389-419

Aussi, ressemblant en cela à beaucoup d’autres caricaturistes, Pigal ne sait pas très-bien exprimer la jeunesse ; il arrive souvent que ses jeunes gens ont l’air grimé. […] Daumier a vécu intimement avec lui, il l’a épié le jour et la nuit, il a appris les mystères de son alcôve, il s’est lié avec sa femme et ses enfants, il sait la forme de son nez et la construction de sa tête, il sait quel esprit fait vivre la maison du haut en bas. […] Mais il ne savait pas en tirer des conséquences justes ; il cahotait comme une locomotive déraillée. […] Grandville est très-comique ; mais il est souvent un comique sans le savoir. […] Depuis quelque temps Traviès a disparu de la scène, on ne sait trop pourquoi, car il y a aujourd’hui, comme toujours, de solides entreprises d’albums et de journaux comiques.

1556. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 133-139

On ne sait, après cela, quel nom donner à l'étrange Divinité qui a inspiré à un de nos plus célebres Poëtes le courage d'avancer, dans ses Ecrits, que le mérite de Rousseau se bornoit à deux ou trois Odes, qui ne sont , dit-il, que des déclamations de Rhétorique ; à autant de Pseaumes au dessous des Cantiques d'Esther & d'Athalie, & à quelques Epigrammes dont le fond n'est jamais de lui. […] Son pinceau, tantôt noble, tantôt délicat, tantôt vigoureux, & toujours facile, sait retracer à propos le beau désordre de Pindare, les graces d'Anacréon, la saine raison d'Horace, & la pompe majestueuse de Malherbe. […] On sait qu'il est le créateur de l'Allégorie, genre de poésie que ni lui ni ses Imitateurs n'ont point encore porté au degré de perfection dont il est susceptible, mais qui n'en prouve pas moins la fécondité de son imagination. […] Le Public impartial sait, depuis long-temps, à quoi s'en tenir.

1557. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « LEOPARDI. » pp. 363-422

On ne saurait se tromper en reportant la grande conversion philosophique de Léopardi entre les années 1820-1823. […] On ne saurait, en France, comparer ce privilège heureux de l’Italie140 à nos efforts estimables et incomplets d’archaïsme studieux. […] Car, vous le savez, je n’ai pu lire moi-même ces pages que je vous offre, et il m’a fallu, pour les corriger, me servir des yeux et de la main d’autrui. Je ne sais plus me plaindre, mes chers amis ; la conscience que j’ai de la grandeur de mon infortune ne comporte pas l’usage des paroles. […] je ne sais trop ; mais telle est, en effet, D’amour puissant et vrai la marque et le bienfait.

1558. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Mais, dans la comédie, où l’accidentel et l’arbitraire jouent naturellement un rôle essentiel217, on ne saurait en faire une règle absolue. […] Ils savent combien vaine est la lutte que la folie humaine ose engager contre eux. […] Mais chacun sait comment cela finira. […] Dans la Sierra-Morena, il est fou, sait qu’il est fou, et veut l’être, lorsqu’il fait pénitence à l’imitation du Beau Ténébreux. […] Il faut que l’homme sache prendre par lui-même une libre détermination, qu’il assume la responsabilité de ses actes et de leurs conséquences.

1559. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Je sais cela. Je sais aussi qu’il y aurait mauvaise grâce à exiger de la nation un examen de conscience, si bref fut-il, puisqu’elle a le bonheur envié de posséder la vérité indiscutable et éternelle. […] Nous savons d’autre part que c’est la puissance militaire de la Prusse qui a donné à l’Allemagne sa force et son unité. Nous savons également que notre défaite de 1870 nous fut infligée par cette Allemagne dont les proscrits français déterminèrent la fortune. […] Mais il reste à savoir si les sautes brusques, précédées et suivies de stagnations, valent les évolutions méthodiques et lentes.

1560. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 366

Les Contes des deux premiers volumes commençoient tous par ces mots : Ma chere Sœur, si vous ne dormez pas, faites-nous un de ces beaux Contes que vous savez. […] Galland, qui courut en chemise à la fenêtre pour savoir ce qu’on vouloit. […] Galland lui-même, Auteur des mille & une Nuits, & celui-ci leur ayant répondu qu’oui : Monsieur Galland , lui dirent-ils, si vous ne dormez pas, faites-nous un de ces beaux Contes que vous savez .

1561. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre I. La poésie »

La Motte savait mal le grec et travaillait sur la traduction en prose de Mme Dacier, une lourde, honnête et respectueuse traduction. […] On ne sait plus ce que c’est que le rythme : il ne s’agit que de mettre la césure ici ou là. […] La satire lyrique du xvie  siècle ou du xixe ne saurait se rencontrer ; mais on trouvera la satire analytique, critique, épigrammatique, le pamphlet en vers, amusant ou virulent, qui dissout les doctrines ou diffame les hommes. […] Il a une âpreté qui donne du sérieux à l’épigramme et par la sûreté des applications, par la nerveuse perfection de la forme, il a su agrandir ce jeu d’esprit : il en a fait un appareil de condensation de la critique littéraire ; ses meilleures pièces sont comme des extraits concentrés et mortels. La Harpe en a su quelque chose.

1562. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre V : Rapports du physique et du moral. »

Il est contraire à tout ce que nous savons de l’action du cerveau de supposer que la chaîne matérielle des actions nerveuses se termine brusquement à un vide occupé par une substance immatérielle ; que là cette substance agisse seule, puis communique les résultats de cette action à la substance matérielle : « il y aurait ainsi deux rivages matériels séparés par un océan immatériel. » — En fait, les choses ne se passent pas ainsi et lorsque nous parlons d’une action de l’esprit, nous avons toujours une cause à deux faces ; l’effet est produit non par l’esprit seul, mais par l’esprit associé au corps. […] Lorsqu’il nous arrive, comme dans le pur sentiment de plaisir ou de peine, de passer de l’état, objectif à l’état subjectif ; nous subissons un changement qui ne saurait être traduit dans l’espace. […] On sait en quoi consiste la doctrine appelée persistance ou équivalence des forces, et comment elle s’applique à la chaleur, à la lumière, à l’électricité, au mouvement mécanique, etc. […] Nous savons à n’en pas douter que les forces mentales dépendent de l’activité du cerveau ; nous savons aussi que l’activité cérébrale dépend de la force nerveuse ; que cette force nerveuse provient immédiatement des transformations qui se font dans le sang, et en dernier ressort de l’oxydation des matériaux de la nutrition ; qu’elle est un équivalent défini de cette combustion ou oxydation.

1563. (1912) L’art de lire « Chapitre X. Relire »

A la fois l’on se sait gré de cette découverte, et c’est un plaisir ; et l’on peste un peu de ne l’avoir pas faite plus tôt et c’est un exercice d’humilité qui est très sain. […] Les beaux lieux vus autrefois paraissent ordinaires et avoir été surfaits par on ne sait qui. […] On ne sait. […] C’est un peu pour cela qu’il faut les relire, pour se relire, pour se rendre compte de soi, pour s’analyser, pour se connaître par comparaison et pour savoir ce qu’on a perdu. […] De même, je ne sais plus à quelle occasion, et peut-être sans occasion, je relus Leone Leoni.

1564. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Edmond About » pp. 63-72

Il faudra le génie, qui a le droit de parler de ce que tout le monde sait, parce qu’il y ajoute quelque chose que ne sait pas tout le monde, pour faire excuser la hardiesse d’un auteur qui s’en vient raconter ou décrire ce que tout le monde a vu ou pu voir, maintenant, à si bon marché : un coin quelconque de la planète ! […] Après Barthélemy, Choiseul-Gouffier et Chateaubriand, il aborde les augustes ruines de la Grèce et leur récrépissage moderne avec l’irrévérencieuse plaisanterie d’un enfant de Paris (pour ne pas dire un autre mot), et, comme ce gros obèse intellectuel d’allemand qui sautait par la fenêtre pour se faire vif, il saute, lui, en pleine ironie, — tenant infiniment, sans doute, à nous montrer qu’il sait, quand il le faut, s’éponger de sa science et s’alléger du pédantisme de ses études et de ses fonctions ! […] Du moins, les qualités qu’on y trouve ne sauraient constituer cette originalité qui doit, un jour ou l’autre, établir d’une manière fixe la valeur d’un livre dans l’opinion. […] Qui sait ?

1565. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Comte de Gramont »

cette chimère du passé, des réalités la plus terriblement réelle, cette inévitable fatalité du souvenir que Manfred maudit, dans Byron, et qu’il appelle l’impossibilité d’oublier, voilà, malgré les tours de force du linguiste et les travaux de joaillier que Gramont exécute sur le rhythme, ce qui distingue ses poésies et communique un charme profond à ce recueil, qui est, on le sent à travers les ciselures passionnées du poète et de l’idolâtre matériel, un fragment rompu de la vie et non un livre de vers écrit seulement pour montrer qu’on sait faire des vers ! […] Il n’a pas — cela est vrai — l’âme infinie, le grand souffle, la palpitation dilatée, l’abondance, la facilité magnifique des plus puissants parmi les poètes ; mais comment le saurait-il, comment pourrait-il les avoir avec la forme qu’il préfère, sous ce strict compas du sonnet, entre les deux branches duquel il ploie et reploie sa pensée ? […] Un livre qui a des défauts littéraires d’autant plus grands qu’il est le produit d’un système, mais qui a aussi une valeur absolue, un mérite qui ne passera pas, c’est-à-dire la vérité presque maladive d’une inspiration qui ressemble à un empoisonnement, les Poésies de Joseph Delorme, datèrent bien ce commencement d’une époque traversée par nous maintenant, mais Dieu sait à quel prix ! […] Chassant loin du devoir l’intérêt adultère, Avec sa conscience il ne fit point de troc ; Il affronta sans peur le plus terrible choc, Et, le danger fini, sut noblement se taire. […] Les sonnets religieux, les poésies qu’il adresse à la Vierge, marquent bien ce dernier coup d’aile de sa Muse dans le ciel chrétien où elle s’envole, et qui sait ?

1566. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Charles Monselet »

Cet homme aimable, que tout le monde appelait Monselet tout court dans une chaleureuse et flatteuse sympathie et parce qu’il plaisait à tout le monde, ce nonchalant de mœurs, fait, à ce qu’il semblait, pour se chauffer, lazzarone d’esprit, au soleil de tous les printemps et au feu de toutes les cuisines, cette gloire de tout festin et que toute la terre qui sait dîner eut voulu avoir à sa table, hospitalité intéressée ! […] une mélancolie encore, comme s’il avait su ne devoir plus jamais, jamais nous en donner… II Voulez-vous les déguster avec moi, ces gouttes de poésie qui filtrent et glissent dans ce recueil de vers comme les gouttelettes de rosée sur les fleurs d’un bouquet, — de cette rosée qui vaut mieux que les roses qu’elle baigne ? […] Or, je ne sais par quel sortilège exécrable, Dans cet homme flétri, dégradé, lamentable, Je revoyais l’enfant du tableau contemplé, Les traits purs de l’enfant sérieux et bouclé. […] on savait, bien longtemps avant ce recueil, que Monselet était un chanteur plein de verve et de fantaisie et dont on citait et on répétait les chansons, mais le poète d’âme, on le savait moins, et lui-même se méconnaissait : Entre les noms dont se contente Avec grand’peine maint rimeur, Il n’en est qu’un seul qui me tente : Poète de la bonne humeur.

1567. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre premier. De la louange et de l’amour de la gloire. »

Voulez-vous savoir ce que peut le sentiment de la gloire ? […] Ne l’attendez pas d’un peuple voluptueux ; ce peuple n’a que des sens, il ne sait renoncer à rien, il ne sait pas perdre un jour pour gagner des siècles. […] En général, le sentiment de la gloire a je ne sais quoi de réfléchi et de profond qui se nourrit surtout dans la retraite. […] On sait que la première règle est le génie, et celui qui l’a, trouve aisément les autres.

1568. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — II. (Fin.) » pp. 213-233

Le xvie  siècle était pour Mézeray ce que le xviiie a été pour nous : il en sortait, il en était nourri, il en savait les traditions, le langage ; il en avait ouï raconter les derniers grands événements à des vieillards ; les souvenirs et l’esprit lui en venaient de tous les côtés ; nul n’était plus propre que lui à en retracer une histoire entière, et c’est ce qu’il a fait pendant l’étendue d’un in-folio et demi. […] En tous ces passages, Mézeray montre qu’il sait préférer le vrai tout simple et tout naturel à ce que l’imagination est tentée d’accepter pour agrandir les faits. […] (Journal littéraire général), ce qu’il ne saurait faire s’il n’a sur ce nos lettres qui lui en permettent l’impression. […] Par malheur, Mézeray, dans ce genre de vie, pas plus que dans son style, ne sut éviter le bas ; il était devenu un anachronisme sous le règne de Louis XIV. […] L’Histoire de France de Mézeray (je parle toujours de la grande Histoire et non de l’Abrégé), depuis le règne de François II notamment jusqu’à la paix de Vervins (1559-1598), est une lecture des plus fertiles et des plus nourrissantes pour l’esprit ; on y apprend chemin faisant mille choses de l’ancienne France, de l’ancien monde, que les meilleures histoires modernes ne sauraient suppléer.

1569. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « De la poésie de la nature. De la poésie du foyer et de la famille » pp. 121-138

Dans tout ce que fera Saint-Lambert en poésie légère, on notera les mêmes qualités et les mêmes défauts : c’est sec, spirituel, galant et bien tourné : « Ce sont autant de myrtes dont une feuille ne passe pas l’autre », disait de lui Parny ou Boufflers, je ne sais lequel. Quelques épigrammes qu’on a, quelques mots piquants qu’on sait de Saint-Lambert, marquent le talent qu’il aurait eu pour le genre satirique s’il se l’était permis. […] J’omets ce que tout le monde sait, l’éclat que causa sa liaison avec Mme du Châtelet et qui le mit à la mode à la mort de la marquise. […] » — « Plus que beaucoup de littérateurs, mais un peu moins qu’il ne croit l’être. » — « Il sait sa langue ?  […] » Il me semble qu’on ne peut demander à la critique d’une époque rien de plus net et de plus formel que ces jugements : elle ne saurait aller plus loin sans faire elle-même office et acte de poésie.

1570. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — II » pp. 159-177

Tels sont les petits hommes, tels aussi doivent être les petits poèmes. » Mais évidemment il cherchait encore ses sujets, et la forme neuve et curieuse de ce talent en éveil ne savait où s’appliquer avec suite et vigueur. […] Une après-midi que lady Austen le voyait plus triste qu’à l’ordinaire et prêt à retomber dans ses humeurs sombres, elle imagina, pour le stimuler, de lui raconter une histoire de nourrice qu’elle savait d’enfance, très drôle et très gaie, L’Histoire divertissante de John Gilpin, où l’on voit comme quoi il alla plus loin qu’il n’eût voulu et s’en revint sain et sauf. […] Unwin, qui la lit imprimer dans un journal ; on ne savait pas d’abord le nom de l’auteur, et l’on s’en inquiétait peu. […] Tu sais que ma louange de la nature est la plus sincère, et que mes ravissements ne sont point évoqués exprès pour procurer des occasions de pompe et de peinture poétique, mais qu’ils sont vrais, et tu les as tous partagés. […] Cependant ici, dans cette description si parfaite qu’on vient de lire, Cowper a su concilier les deux ordres de qualités, la finesse et le relief de chaque détail (je dirai même le brillanté sur un ou deux points), et la gradation et la fuite aérienne de la perspective.

1571. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

Au savoir, il unit le sens et le jugement. […] Ce qu’il faisait par dépravation, faisons-le par principe, et, prêts à nous livrer au sommeil, disons avec allégresse : J’ai vécu… — Je loue (continue Casaubon) l’art du sage stoïcien qui sait tourner à si bon usage les mauvais exemples, et faire son remède d’un poison. […] On sait le résultat de l’unique séance qui eut lieu, le 4 mai. […] Casaubon, à la veille de cette séance et quand il en sut l’objet, était dans les transes, et il nous a laissé un tableau fidèle de ses fluctuations douloureuses : Mon esprit est en proie à une incroyable inquiétude, ne sachant que faire, ne voulant point offenser Dieu, ni, sans de graves raisons, paraître refuser obéissance au roi. […] Toutes les prétentions et les éruditions de Jacques Ier ne sauraient me faire oublier un admirable mot de Henri IV, ce prince qui, pour être peu fort sur les livres, n’en paraît que plus grand de cœur et d’esprit.

1572. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni (suite et fin.) »

Le reste est horrible ; les jambes sont d’un squelette, les pieds de je ne sais quel animal fourchu. […] » Et une autre fois, tandis qu’il écoute accroupi je ne sais quel prêcheur humanitaire debout qui s’exalte et pérore, les cheveux dressés sur la tête, ce court dialogue s’engage : « — … L’homme est le chef-d’œuvre de la création. » — « Et qui a dit ça ?  […] Un des amateurs qui savent le mieux leur Gavarni et à l’aimable obligeance duquel je dois beaucoup pour m’avoir facilité ce travail, M.  […] C’était un de ces grands lavis, un de ces effets généraux et larges comme Daumier en sait trouver. […] Il était devenu aussi un jardinier consommé ; comme ce vieillard de Virgile, il savait les expositions heureuses, les saisons propices, le terrain où se plaît le mieux chaque arbre, et le voisinage qui le contrarie.

1573. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

Il est difficile, je le sais, de l’aborder autrement aujourd’hui qu’avec bien des objections. […] » Cela est d’avance une réponse a ces artistes orgueilleux et vains, impatients de toute observation, comme nous en avons connu, et qui, confondant tout, ne savaient donner qu’une seule définition du critique : « Qu’est-ce qu’un critique ? […] J’ai omis, dans cet Essai d’art critique et poétique, de charmants modèles de versification et de poésie imitative que l’auteur a su joindre aux leçons, si bien que le précepte porte avec lui l’exemple. […] » — « Je ne saurais réellement le dire au juste, répondit-il : tous deux ont extrêmement de charme. » Il est certain, toutefois, qu’il était loin de remplir le programme détaillé que Bowles propose au poète et les conditions pittoresques qu’il exige ; Wordsworth seul, depuis, a pu y suffire. […] Enfin, je ne saurais quitter un semblable ouvrage et un auteur de ce mérite sans dire quelque chose de l’incident académique qui a fait bruit.

1574. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

L’espèce d’insurrection montagnarde qui s’était tout à coup réveillée et soulevée contre elle avec fureur, grâce à je ne sais quel appel insensé (je ne puis trouver un autre mot) et à je ne sais quelle aberration d’auteurs d’ailleurs estimables, MM.  […] Vous supprimez des Confessions l’histoire du ruban et de Mme de Warens ; vous ne voulez pas que je sache que Rousseau a mis ses enfants à l’hospice, qu’il a laissé accuser un innocent du vol dont il était l’auteur ; et cependant Rousseau avait voulu que ces choses fussent connues. […] Et puis Mme de Staël savait la vie, le grand monde, les vraies fautes, et par cela même était plus contenue et plus chaste en paroles. […] Dauban, avec une jolie phrase en sus et dont la grâce vive est, après tout, sans inconvénient (page 66). […] Pour moi, j’en sais qui pensent que Mme Roland aurait mieux fait de ne rien dire du tout à M. 

1575. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre »

Toutefois il est ici à remarquer que d’Argenson, sans le savoir, s’accorde et se rencontre en plus d’une de ses remarques sur le personnage avec Saint-Simon. […] Le duc de Noailles se fit aimer de lui, il en prit la peine : ce raffiné musicien pinça avec lui les cordes qu’il savait lui tenir le plus au cœur, notamment la dignité des ducs si abattue. […] On sait qu’à l’occasion d’une tabatière donnée par le duc de Noailles à la duchesse de Bourgogne, le matin du jour où elle tomba malade, et qui ne s’est plus retrouvée depuis, il s’est laissé aller à des soupçons diaboliques. […] Il devint favori de Mme de Maintenon ; il épousa son héritière, et sans perdre sa confiance ni celle du feu roi, il sut pourtant se ménager la faveur du duc d’Orléans par ses utiles manœuvres. […] Le duc de Noailles trouva, dans une vieillesse utile et considérée, un port où se reposent rarement des ambitieux aussi inquiets. » On ne saurait mieux résumer, mieux conclure, ni mieux dire.

1576. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN FACTUM contre ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 301-324

Anacréon dit qu’il y a un petit signe auquel on reconnaît les amants ; il y a aussi un petit signe, un je ne sais quoi auquel se reconnaissent d’abord ceux qui ont un parti pris de ne pas aimer. […] Qu’il sache de plus que même dans leur nouveauté elles ont été impuissantes, et que les points essentiels, les seuls auxquels on tenait, demeurent désormais gagnés. […] Eh bien, André Chénier n’en est, lui, à aucun degré ; car, en étudiant beaucoup et en ayant une connaissance plus que suffisante de l’antiquité, il n’a pas su dans ses imitations observer la mesure ni maintenir sa propre originalité. […] Heureusement, dans le bel Hymne à Apollon attribué à Homère, on lit ce passage dans lequel le divin aveugle n’est pas présenté autrement que ne l’a fait Chénier, si abreuvé de ces sources habituelles : « … Elles (les jeunes filles de Délos), elles savent imiter les chants et les sons de voix de tous les hommes ; et chacun, à les écouter, se croirait entendre lui-même, tant leurs voix s’adaptent mélodieusement ! […] De plus, lorsqu’un poëte, un peintre, a un style à lui et une manière reconnue, on lui passe d’ordinaire quelque mélange : ainsi La Fontaine se laisse souvent aller dans ses plus franches peintures à je sais quelles teintes du goût Mazarin.

1577. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE DURAS » pp. 62-80

Les romans d’Ourika et d’Édouard ne sont donc, selon nous, que l’expression délicate et discrète, une peinture détournée et adoucie pour le monde, de ce je ne sais quoi de plus profond qui fermentait au sein de Mme de Duras. […] à conjurer ces fantômes : je ne savais pas qu’il n’y a de repos qu’en vous ; » quand on entend ce simple élan interrompre le récit, on sent que l’auteur lui-même s’y échappe et s’y confond, et qu’il dit sa propre pensée par la bouche de cette martyre. […] Pardonnez-leur, mon Dieu, car ils ne savent ce qu’ils font ! […] Ce qui met le comble au chagrin, c’est de trouver des torts sans excuse à ceux qu’on aime ; là il y a une excuse : « Ils ne savent ce qu’ils font ! » Ils nous ont déchiré le cœur, mais ils ne savaient ce qu’ils faisaient ; ils étaient aveuglés, leurs yeux étaient fermés ; vos propres souffrances sont le gage de leur ignorance.

1578. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Émile Zola, l’Œuvre. »

A côté de Claude Lantier, l’artiste impuissant tué par son œuvre, il nous montre Sandoz, l’artiste triomphant qui vit d’elle parce qu’il a su la faire vivre. […] Nous savons donc sous quels traits M. Zola se voit comme homme et, ce qui nous touche davantage, comme romancier ; nous savons ce qu’il est ou ce qu’il croit être. […] Mais c’est que pour ce brave Sandoz, la psychologie est je ne sais quoi d’absurde, de suranné, de ridicule, de gothique, de tout à fait en dehors du monde réel. […] le père Ingres, tu sais s’il me tourne sur le cœur, celui-là, avec sa peinture glaireuse ?

1579. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

Les jours où l’on est trop entêté de soi-même et de son importance, je ne sais rien de plus calmant que de lire un voyage en Perse ou en Chine. […] Ce Firdousi ou Ferdousi, par exemple, ce grand poète qui, à première vue, nous étonne, et dont nous ne savons pas même très bien comment prononcer le nom, est populaire dans sa patrie. […] Le Tasse, au milieu des délices de Ferrare, en sut quelque chose : Ferdousi, à la cour de Ghaznin, va également l’éprouver. […] On devine déjà que le poème sorti d’une telle main et couvé d’un tel cœur ne saurait être une œuvre vulgaire. […] Roustem s’étonne d’avoir rencontré pour la première fois son égal, presque son maître, et de sentir son cœur défaillir sans savoir pourquoi.

1580. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mme du Châtelet. Suite de Voltaire à Cirey. » pp. 266-285

Il fallait donc que Mme du Châtelet eût de vrais titres à cette admiration d’un juge excellent, et c’est un premier titre déjà que de l’avoir su à ce point retenir et charmer. […] Il semble avoir été tracé par une Furie à froid, qui sait écrire, et qui grave chaque trait en trempant sa plume dans du fiel ou dans du vitriol. […] Un Des Grieux honnête et une Manon sage, voilà l’idéal de ceux qui savent être heureux en silence : la gloire en tiers dans le tête-à-tête ne fait que tout gâter. […] Un libelle de l’abbé Desfontaines l’avait tellement mis hors de lui, qu’il voulait, à chaque poste où il recevait des lettres, partir pour Paris, voir les ministres, le lieutenant criminel, présenter requête, porter plainte, que sais-je ? […] Privé de l’amie qui le fixait et qui tenait pour lui le gouvernail, il ne savait plus que devenir ni à quoi se rattacher.

1581. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

Un critique qui est, comme nous le sommes, à son poste de chaque semaine, ne saurait laisser passer, sans les saluer, les pertes les plus remarquables que font la littérature et la société. […] Mais elle composait aussi, en ces années, des romances sentimentales très agréables, que chacun savait par cœur et qu’on applaudissait. […] Le dépit qu’elles en ressentent les conduit souvent à faire, pour plaire, des frais exagérés qui les compromettent si bien qu’elles ne savent plus comment rétrograder, et bientôt elles se trouvent engagées sans avoir le moindre sentiment pour excuse. […] Anatole, le beau silencieux, est un sourd-muet de naissance, mais on ne le sait pas d’abord, et c’est là qu’est le secret. […] Tu sais que pour toi seule il fut imaginé ; Alors que du malheur nous ressentions l’outrage,          À te distraire il était destiné.

1582. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

Quand j’ai dit que je ne savais trop où fixer le moment de la plus grande détresse et de la crise nerveuse la plus aiguë de Bernardin de Saint-Pierre avant la publication de ses Études, je me trompais : c’est dans l’année et dans les mois mêmes qui précédèrent cette publication. […] Vers la fin et dans la scène déchirante de la tempête, Bernardin de Saint-Pierre a montré que son pinceau avait, quand il le voulait, les teintes fortes et sobres, et qu’il savait peindre la nature dans la sublimité de ses horreurs comme dans ses beautés. […] Je ne sais s’il le lut mal, mais ce discours très long et plein de hors-d’œuvre, venant après trois discours consécutifs, parut peu agréable à l’assemblée. […] Voici une anecdote que je sais d’original et qui doit être d’une date un peu postérieure ; on y voit comme les belles dames cherchaient l’auteur de tant de pages charmantes et ne le trouvaient pas. […] Un matin, comme Bernardin de Saint-Pierre n’était point descendu à l’heure du déjeuner, la maîtresse de la maison envoya savoir de ses nouvelles.

1583. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Dieu sait quel scandale causa cette audace du jeune homme ! […] Je ne répéterai pas ce que chacun sait, mais voici une historiette qui n’est pas encore entrée, je crois, dans les livres imprimés. […] Ce sont là de ces tours délicats de flatterie comme en avait Boileau ; ce satirique, qui savait si bien piquer au vif, est le même qui a pu dire : La louange agréable est l’âme des beaux vers. […] Savez-vous ce qui, de nos jours, a manqué à nos poètes, si pleins à leur début de facultés naturelles, de promesses et d’inspirations heureuses ? […] [NdA] Ce fut Boileau, savez-vous bien ?

1584. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Prosper Mérimée »

Mais il veut à toute force qu’elle sache le grec et qu’elle lise Hérodote, pas moins ! […] Mérimée était cependant admirablement placé pour savoir et pour observer. […] il ne l’a jamais été, que je sache. […] … Qui le sait et qui peut le croire ? […] … Qui sait ?

1585. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

Je ne sache pas, en effet, de meilleure occasion de parler maintenant de Saint-Bonnet, et vous allez tout à l’heure le comprendre. […] Ils ne le sauront pas. […] Il faut savoir comme il le prouve et comme il le décrit, dans la partie de son ouvrage qu’il intitule : La métaphysique de la douleur dans le temps… ! […] Il faut savoir le dire : Saint-Bonnet est, au fond, un mystique, et cela va peut-être, dégoûter de lui quelques imbéciles d’hommes d’esprit qui allaient lui trouver du talent ! […] il s’en faut, au contraire, mais des gens d’esprit qui savent ce qu’il faut servir à la curiosité dépravée des sociétés en décadence.

1586. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Brizeux (tout le monde le sait) est un Breton qui a bretonne le plus qu’il a pu en français, et, selon nous, pas assez encore. […] qu’importe la langue que l’on parle, quand on sait vraiment la parler ? […] Je n’en sais rien. […] Il ne savait pas que dans cet adorable pays qui n’était pas le sien, il ne faut jamais revenir sur une sensation. […] Ce n’est pas armoricain, cela, que je sache !

1587. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

Mais je ne connais la vôtre que par la mienne, et je n’en sais rien que je n’aie puisé en moi. […] Supposition inutile : car ne voyant que des portraits, nous ne pouvons savoir si le portrait ressemble à l’original. […] L’autre homme, à qui je permets l’accès de la philosophie, ne sait pas que ce public existe. […] Royer-Collard, vous allez rendre les Français révolutionnaires, — Je n’en sais rien. […] Je dure depuis quelque temps, et je sais tout cela.

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