Ils ont créé des héros dans l’espoir d’enfanter l’héroïsme. […] Le retour du héros et sa vengeance deviennent le juste accomplissement des promesses du poète à l’ouverture de sa fable. […] Le cyclope à qui le héros vient d’arracher le seul œil qui l’éclairé, appelle à grands cris les autres cyclopes de l’île. […] C’est qu’en prenant leurs dieux, il s’est emparé de même de l’un des héros de leurs fables. […] En quoi le goût sage des modernes serait-il offensé de voir un héros descendre dans les enfers de sa religion, et en sortir ainsi que les héros fabuleux ?
Et quant aux nuances et aux délicatesses du sentiment, on va voir que Médée n’en est pas plus dépourvue que Didon ni qu’aucune héroïne plus moderne. […] Qu’il périsse, lui le premier ou le dernier des héros, que m’importe à moi ? […] Je crains que ce voyage des héros n’apporte quelque grand malheur. […] Pour trouver des monologues dignes d’être comparés à ceux que son héroïne nous fait entendre, il faut revenir à Didon. […] Le héros aimé de Phèdre ou de Didon est tellement en présence d’une vraie maladie et d’un fléau des Dieux, que, s’il résiste, il a affaire à une héroïne violente et très-aisément à une femme cruelle.
Tant de fêtes commémoratives qui formèrent nos spectacles d’enfant, les cérémonies régionales en l’honneur des « héros morts pour la patrie », une telle activité civique n’a pas été assurément sans accentuer le caractère de nos passions et sans en purifier l’objet. […] Combien, aux homélies d’Ibsen, nous préférons la violente volupté, l’impudeur d’une rustique et robuste héroïne, la fresque ardente où se répandent les hautes foules que créa Zola ! […] Par l’entremise de ces figures nous ̃ avons connu que le monde terrestre nourrit des héros éternels, qu’ils songent, ceux-ci, ténébreusement, au flanc des montagnes et qu’il suffirait d’un grand homme afin d’en accoucher la terre. […] D’ailleurs ces grands artistes ne contentèrent point tout à fait des hommes à qui la compagnie de Napoléon, des héros guerriers, des postes grecs et de Wagner, ont, malgré tout, communiqué un sens plus étendu de la beauté humaine. […] Nous glorifierons les héros.
Ils rapportaient au cœur tous les conseils ; les héros roulaient leurs pensées, leurs inquiétudes dans leur cour ; agitabant, versabant, volutabant corde curas. […] Ils disaient sententiæ, pour résolutions, parce que leurs jugements n’étaient que le résultat de leurs sentiments ; aussi les jugements des héros s’accordaient toujours avec la vérité dans leur forme, quoiqu’ils fussent souvent faux dans leur matière. […] Les héros, récemment sortis des géants, étaient au plus haut degré grossiers et farouches, d’un entendement très borné, d’une vaste imagination, agités des passions les plus violentes ; ils étaient nécessairement barbares, orgueilleux, difficiles, obstinés dans leurs résolutions, et en même temps très mobiles, selon les nouveaux objets qui se présentaient. Ceci n’est point contradictoire ; vous pouvez observer tous les jours l’opiniâtreté de nos paysans, qui cèdent à la première raison que vous leur dites, mais qui, par faiblesse de réflexion, oublient bien vite le motif qui les avait frappés, et reviennent à leur première idée. — Par suite du même défaut de réflexion, les héros étaient ouverts, incapables de dissimuler leurs impressions, généreux et magnanimes, tels qu’Homère représente Achille, le plus grand de tous les héros grecs. Aristote part de ces mœurs héroïques, lorsqu’il veut dans sa Poétique, que le héros de la tragédie ne soit ni parfaitement bon, ni entièrement méchant, mais qu’il offre un mélange de grands vices et de grandes vertus.
On se créa des Dieux ; on imagina des Héros peu différents de ces Dieux mêmes. […] Ce livre fut la source où puiserent, depuis, presque tous les anciens Poetes ou Romanciers qui prirent Charlemagne pour leur héros. […] On ne choisit plus pour Héros de Romans des Paladins ; mais nos Romanciers firent des Paladins de tous leurs Héros. […] L’héroïne ne résiste que pour donner à l’auteur le temps de tout dire ; le Héros daigne se prêter à ces arrangements ; mais la constance du lecteur est à bout long-temps avant que la sienne soit récompensée. […] Il est vrai que le caractere de son Héros étoit par lui-même très romanesque.
Don Quichotte comparé à Gœtz de Berlichingen, à Charles Moor et aux héros de romans. — Sancho Panza. — Sommet de la perfection comique. […] Dans ce fier héros, la loi sévère du devoir, du sang à verser pour laver un affront, parle plus haut que l’amour. […] Les héros possédaient en eux-mêmes le principe divin de leurs entreprises générales. […] Stephano, Trinkale, Pistol et le héros entre tous, Falstaff, sont bien supérieurs à leur propre personnage. […] Gœtz et Sickingen sont des héros comme Hercule ou Thésée.
Si tu devenais l’épouse de ce héros, ô charmante fille de roi, l’enfant qui naîtrait de cette union éclaterait de perfections surhumaines. […] Les chefs, les héros, les dieux y passent en revue, dans leur majesté et leur terreur, sous l’œil du poète. […] Le poète, mystique et épique à la fois, réserve à son héroïne de plus cruelles épreuves. […] Je veux m’élancer dans le bûcher des veuves aux flammes d’or, si le héros de Nishada ne me presse pas dès aujourd’hui sur son sein ! […] Des demi-mots révélateurs s’échangent peu à peu entre l’esclave et le héros.
On est sûr de retrouver alors tout cela grandi, idéalisé dans les héros créés par les poètes. […] On le charge un jour de s’emparer d’un cheval pour un héros qui se trouve démonté. […] Les héros mettent leur point d’honneur à refuser d’appeler à leur aide. […] Si l’idée du devoir décidait seule à agir, dit-il, que de héros à rayer des fastes de l’humanité ! […] Pathelin est alors le héros populaire.
Il voyait que le monde s’était repris d’amour pour les histoires des anciens héros. […] Le plus célèbre épisode du poème, et qui est de nature à nous intéresser encore, a pour sujet la rencontre du héros Roustem et de son fils Sohrab. […] lui dit le héros tout étonné. […] » La femme voilée n’était autre que la belle Tehmimeh, la fille unique du roi de Sémengan, et elle confessa ingénument au héros son désir. […] On ne le fléchit qu’en lui représentant que s’abstenir en une telle rencontre, ce serait paraître reculer devant le jeune héros.
Ce qui me paraît demeurer bien évident et sauter aux yeux quand ils lisent au naturel et sans les lunettes des systèmes, c’est que le sujet et le héros de l’Iliade, c’est Achille. […] Cela donne patience au lecteur et lui rafraîchit, s’il en avait besoin, la mémoire, l’image toute-puissante du héros. […] Les héros, sans en rien perdre, ont conservé toute leur fleur de jeunesse, de beauté à demi sauvage, et leur immortelle attitude. […] Les raffinements étranges et impurs que plus tard Théocrite et tant d’autres n’ont pas rougi de chanter, d’embellir, et qu’ils ont reportés en arrière en les imputant aux héros des vieux âges, n’ont de place ni de près ni de loin dans les mœurs homériques. […] On a dit qu’il n’existait point de héros pour son valet de chambre.
Quelques étrangères [Gabrielle d’Annunzio] « Je ne sais parler que de moi-même », déclare le héros du Feu. […] Le chevalier de la Triste Figure est un héros naturel et sa folie, d’origine littéraire — romantique, si vous voulez — lui cache le prosaïsme de son époque, fait de lui un admirable et poétique anachronisme. […] Cervantès, au contraire, héros bafoué par la vie, crée un être réel et noble, puis il le livre à l’insulte des basses réalités. […] Le dessein de l’auteur est d’ailleurs presque aussi incertain que la conduite de son héroïne. […] Ou bien il la déclare trop faible pour supporter la désapprobation générale et regrette seulement pour ses héros qu’ils soient venus « cinquante ans trop tôt ».
Son héros, mi-parti d’amour et d’amitié, est de race germanique, dit-elle ambitieusement, et agriculteur… Pourquoi agriculteur ? […] Seulement, un jour, cette amitié consolatrice et sufficiente est, tout à coup, brisée — et je ne dirai pas de quelle sotte manière ; je vous l’épargnerai. — Alors, le pauvre ami, aussi malheureux que le pauvre amant, meurt d’un désespoir, compliqué, il est vrai, d’un fort anévrisme, et c’est ainsi que Mme Gustave Haller prouve du même coup la puissance de l’amitié chez son héros, et chez elle, la puissance de l’invention et de la pensée ! […] Le héros du roman de Mme Gustave Haller, lequel se passe en Angleterre et fait mille politesses à ce pays, est une espèce de Grandisson, membre de la Société de tempérance et qui fait boire de l’eau à son domestique, né Français (il nous en fait boire aussi !) […] L’héroïne de Vertu, très au-dessus du héros, comme dans tous les romans de femme, est aussi une vertu humaine ; mais si elle est humaine dans tous les deux, les passions, certes ! […] L’héroïne, lymphatique autant que dans le blême dessin de Carpeaux, est une institutrice française à Londres, rencontrée par le héros dans un naufrage (ils ont fait connaissance dans l’eau) et retrouvée dans une maison anglaise.
Trois héros seuls se détachent, en relief et en détail, des autres héros dont il parle : La Tour d’Auvergne, Desaix et Hoche. […] Avant lui, les héros qu’il raconte l’avaient transposée… Ils étaient dans l’ignorance du Dieu de leurs pères, qui avait été pendant des siècles le Dieu de la patrie, mais ils étaient des soldats comme les premiers soldats chrétiens, comme Sébastien, Saint Maurice et Saint Georges ; ils étaient des soldats comme les Croisés, comme Bayard, et comme tout ce qu’en fait de soldats le Christianisme a produit de plus pur et de plus héroïque dans l’histoire du monde ! […] C’est bien moins de leur génie militaire et de leurs hauts faits de bataille dont il se préoccupe que de ces vertus, qu’il croit humaines et qui sont chrétiennes ; car l’Antiquité, qui ne fut qu’humaine, n’a rien produit de comparable à de tels héros ! […] Michelet s’y est montré — d’accent — digne de ses héros. […] Et cependant, lui, l’inconséquent, qui fait l’histoire des héros qui furent des chefs, Michelet, que j’aime quand il est inconséquent, ne peut pas s’y tromper, au fond de son cœur.
À l’âge divin ou théocratique dont nous venons de parler, succéda l’âge héroïque avec la même distinction de natures qui avait caractérisé dans l’antiquité les héros et les hommes. […] Par analogie on appelait les héros pasteurs ; Homère ne manque jamais de leur donner l’épithète de pasteurs des peuples. […] Par opposition à leurs vassaux ou homines, les seigneurs des fiefs furent appelés barons dans le sens où les Grecs prenaient héros, et les anciens Latins viri ; les Espagnols disent encore baron pour signifier le vir des Latins. […] Ils les saluaient du titre des anciens héros, ave rex, les menaient au forum, et les ramenaient le soir à la maison. […] C’est que dans la sévérité des temps héroïques où la cité se composait des seuls héros, tout meurtre de citoyen était un acte d’hostilité contre la patrie, perduellio.
Puis humble, n’osant plus parler, elle attend l’heure Où le héros charmant va fuir, silencieux, Et dans ses longs cheveux répandus elle pleure. […] Et le héros, vaincu par le futur, se livre A l’ineffable mal d’être grand et de vivre. […] Le Héros, sur les fleurs sanglantes du bûcher, Semblait surgir des couchants mornes et marcher Dans l’auréole d’or ces flammes triomphales, Tandis qu’en un torrent d’or fluide et de bruit, Flagellé par le vol sinistre des rafales, Le Palais merveilleux s’écroulait dans la nuit. […] Dans son cœur, il sentit gémir l’humanité, Traînant ses lourds espoirs en ses métempsychoses Les pensers de la joie et les secrets moroses, Il les connut, sondant le héros indompté Et la femme, puissante en sa fragilité, Et l’immémoriale antiquité des choses. […] Mais Wagner voulait faire ressortir le caractère chrétien de son œuvre et de son héros, pour l’opposer au paganisme agonisant personnifié dans Ortrud.
La barbarie et le polythéisme ont produit les héros d’Homère ; la barbarie et le christianisme ont enfanté les chevaliers du Tasse. Qui, des héros ou des chevaliers, méritent la préférence, soit en morale, soit en poésie ? […] Si, par héroïsme, on entend un effort contre les passions, en faveur de la vertu, c’est sans doute Godefroi, et non pas Agamemnon, qui est le véritable héros. […] Et, d’un autre côté, le poète chrétien, plus heureux qu’Homère, n’est point forcé de ternir sa peinture en y plaçant l’homme barbare ou l’homme naturel : le christianisme lui donne le parfait héros.
Elle eût laissé tomber une gaze qui eût dérobé son fils à la fureur du héros grec. […] Apollon, enveloppé d’une nuée, se jette entre le héros grec et Enée qu’on voit renversé. […] L’attitude de son héros est fière, et son regard méprisant et féroce. […] Mais ayant à donner l’avantage de la grandeur à ses héros sur ses dieux, que vouliez-vous que le peintre fît de ceux-ci, sinon des génies, des ombres, des démons.
On demandait, après Corneille, des héros qui fussent plus des hommes, des femmes qui fussent moins des héros. […] C’est avec nos cœurs que Racine a pétri les cœurs de ses héros. […] Dans Racine, je vois non plus des héros, mais des types humains. […] Les héros de Corneille sont raisonneurs. […] L’histoire a-t-elle des héros plus vivants que Joad et Acomat ?
Il n’est rien que les héros cornéliens affirment plus fréquemment, ni plus fortement que leur volonté, claire, immuable, libre, toute-puissante. […] Tous les personnages de Corneille, du moins ceux du premier plan, les héros sont construits sur cette donnée, les femmes comme les hommes, les scélérats comme les généreux. […] De là enfin résulte que ces héros sont des raisonneurs : car ils n’agissent pas par aveugles impulsions, et les objets même de leur passion sont transformés par eux en fins de leur raison. […] D’où la hautaine et calme ironie de Nicomède, qui est le pur héros cornélien. […] Ce qui se mêle de passion, auxiliaire ou adversaire, à la volonté des héros, l’ait la beauté dramatique du Cid, de Polyeucte, de Cinna.
Le principe d’adhésion, de répétition fait que la particularité humaine ainsi apparue, suscite, s’associe, unit tous ceux dont l’âme est faiblement ou fortement configurée de la même manière que celle de l’artiste et du héros, en vertu et dans la mesure de cette ressemblance. L’artiste et le héros sont à la fois les causes et les types du mouvement qu’ils provoquent ; ils le provoquent, le qualifient et l’orientent ; la foule le fait ; la foule et l’artiste, la foule et le héros le forment parce qu’ils participent entre euxej. […] De même encore, en psychologie générale, il faut admettre un principe d’individuation, qui crée à mesure les types humains et, entre autres, les types des artistes et des héros, — et un principe de répétition qui agrège et soulève l’humanité à ces protagonistes, principe qui se ramène, nous l’avons vu, à une constatation ressentie de ressemblance entre les exemplaires et les adhérents. […] Mais il sera intéressant de remarquer que même l’adhésion à un héros (l’admiration active) et l’adhésion à un livre (l’admiration passive)eo coexistent rarement et tendent à se remplacer, à s’exclure, en vertu du fait que toutes deux mettent en mouvement le même mécanisme psychologique avec des résultats différents. […] Comparée de même à l’histoire des héros, la critique scientifique des œuvres d’art procure également des connaissances plus importantes et plus sûres.
Le caractère du héros, versatile et médiocre, est essentiellement Gaulois, et en cela, vive Dieu, ils ont raison ! Nos héros sont plus héros, nos picaros plus picaros que Gil Blas. […] Le héros, le chevalier des Grieux, un tricheur de haute volée ; l’héroïne, Manon, une courtisane de bas étage. […] Seulement dans les anciens romans anglais, ce qui était lourd et interminable, c’était la peinture des sentiments, des passions et des aspirations de leurs héros et de leurs héroïnes, de leurs grandes batailles avec eux-mêmes, et de leurs plaintes amoureuses. […] dirons-nous avec le héros de Very well.
quels héros ! […] C’est Auguste qui en est le héros, et non pas Cinna. […] Mais le même Voltaire se trompe, ou veut nous tromper, lorsqu’il dit que Polyeucte n’est pas héros ; car il est plus héros que le galant Sévère. […] L’amour, dans les héroïnes de Corneille, n’est jamais que l’esclave de l’honneur et du devoir. […] Qu’est-ce qu’une tragédie dont le héros ne paraît pas, attendu qu’il est mort dès le commencement de la pièce ?
En commençant par les derniers, nous choisirons le songe d’Énée dans la nuit fatale de Troie ; le héros le raconte lui-même à Didon : Tempus erat, etc. […] Moi-même il me sembloit qu’au plus grand des héros, L’œil de larmes noyé, je parlois en ces mots : « Ô des enfants d’Ilus la gloire et l’espérance ! […] est le cri d’un héros, qui relève la dignité d’Hector. […] Énée se réjouit d’abord de voir Hector qu’il croit vivant ; ensuite il parle des malheurs de Troie, arrivés depuis la mort même du héros.
On n’ignore pas que toutes les odes de Pindare sont des éloges de ce genre, et je m’y arrêterai peu ; leur impétuosité, leurs écarts, leur désordre, et surtout les longs détours par lesquels il passe pour trouver ou fuir son sujet, tout cela est connu ; il semble que Pindare a peur de rencontrer ses héros, et qu’il les chante, à condition de n’en point parler. […] Sans doute à Sparte, la vue du tombeau de Léonidas, et cette fête consacrée à un héros, devait exciter le même enthousiasme chez l’orateur. À Athènes, les chants de Callistrate célébraient tous les jours les deux héros qui avaient délivré la ville de la tyrannie des Pisistratides ; ces chants étaient dans la bouche de tous les citoyens, et à la fin des repas, dans ces moments où l’on couvrait la table de fleurs, où les jeunes esclaves distribuaient des couronnes sur toutes les têtes, et où les vins délicieux de l’Archipel animaient déjà les convives, chacun prenant dans sa main des branches de myrte, faisait une libation aux Muses, et chantait l’hymne d’Armodius et d’Aristogiton. […] C’est là encore que l’on voit le génie de ce peuple, qui mêlait à ses plaisirs mêmes des leçons de grandeur ; là, tous les arts étaient asservis à la politique, et la musique même, qui ailleurs n’est destinée qu’à réveiller des idées douces et voluptueuses, ou à irriter une sensibilité vaine, célébrait dans Athènes les grandes actions et les héros.
Rien de si attachant pour le spectateur, que ces sortes de situations ; il se met à la place du héros et éprouve les mêmes déchirements. […] La nécessité exige quelquefois qu’un héros fasse une démarche qui semble affaiblir son caractère. […] C’est le défaut de Corneille ; il fait toujours dire à ses héros qu’ils sont grands : ce serait les avilir, s’ils pouvaient l’être. […] La première est celle que nous éprouvons en voyant le héros dans le péril et la perplexité, et pour lequel nous frémissons. […] Voyez celui de Roland : ce héros a tout quitté pour Angélique ; Angélique le trahit et l’abandonne pour Médor.
Les peres y sont durs et cruels, les héros foibles et passionnez, les dieux misérables, inquiets et querelleurs. […] des héros. les héros de l’iliade ne sont pas plus dignes d’estime que les dieux. […] Nous a-t-on donné Hector pour un héros ou pour un lâche ? […] Cet homme pourroit faire un poëme où le génie perceroit à travers le défaut de sa matiere ; mais que seroit-ce que ces héros ? […] Despreaux que les héros d’opera étoient plûtôt des parleurs d’amour que des amoureux.
Premiers héros. […] Les serviteurs, investis par les nobles ou héros du domaine bonitaire des champs qu’ils cultivaient, deviennent les premiers plébéiens, et aspirent à conquérir, avec le droit des mariages solennels, tous les privilèges de la cité. […] Les dieux montèrent dans les planètes, les héros dans les constellations. […] Les héros qui passent pour avoir fondé des colonies lointaines, Hercule, Évandre, Énée, etc., ne sont que des expressions symboliques du caractère des indigènes qui fondèrent ces villes.
À cette vue, les grenadiers à cheval de la garde, conduits par le général Lepic, l’un des héros de l’armée, s’élancent à leur tour pour seconder les efforts de Murat. […] Thiers devient sinon sévère, du moins exigeant envers son héros. […] Nous le suivrons jusqu’où il voudra aller, car l’historien, pendant ces quinze volumes, est aussi entraînant que le héros. […] On dirait que la Providence a mis la main dans ce hasard : le héros a été fait pour l’historien, et l’historien a été fait pour le héros ; de la plume à l’épée ils se ressemblent. […] Ce qu’il dit et ce qu’il prouve admirablement, c’est le génie gouvernemental, administratif et militaire de son héros.
Achille du Clésieux, qui n’est pas seulement religieux, mais catholique, est resté ferme dans sa croyance et dans la vérité, malgré les orages de son âme et les entraînements d’une imagination qui est toujours un danger… Quand on vient de lire le poème d’Armelle, il est impossible de ne pas penser au poème de Jocelyn ; Jocelyn, ce chef-d’œuvre, dont le héros seul fait tache souvent dans la splendide lumière du poème, tandis que le héros d’Armelle fait toujours lumière dans le sien ! […] Du Clésieux, dans son poème, est resté jusqu’à la dernière page et jusqu’à son dernier vers dans la beauté du sentiment chrétien le plus pur, et cette beauté s’ajoute à celle de l’émotion humaine qui fait palpiter tout son poème, comme un cœur vivant… IV Rien de plus simple que ce roman en vers qui pourrait bien être une histoire, et cette simplicité est si grande que la donnée du poème peut se raconter en deux mots… Le héros du livre, qui n’est pas nommé dans le poème, l’amant d’Armelle, est un Childe Harold de ce temps où toute âme un peu haute est plus ou moins Childe Harold, et n’a pas besoin d’aller au fond de toutes les coupes que nous tend le monde pour s’en détourner et revenir à la solitude, — et pour s’essuyer, comme un enfant à la robe de sa mère, de ses souillures et de ses dégoûts, à la Nature. Eh bien, c’est là que par un de ces hasards vulgaires de la vie, le héros de du Clésieux tombe amoureux d’une jeune fille rencontrée au fond des campagnes qu’il habite. […] il en est si près, que le critique, très bienveillant pour l’auteur, dont j’ai parlé en commençant, Armand de Pontmartin, estime que l’amant d’Armelle, ce héros de la vie privée, qui a ses héros comme la vie publique, diminue, dans l’intérêt que lui porte le lecteur, précisément de ce qui fait son héroïsme… Oui !
Dans Berte aux grands piés, l’héroïne du poème est victime d’une odieuse trahison ; pendant qu’une serve prend sa place d’épouse auprès du roi Pépin, on la perd dans une forêt. […] Vous n’êtes pas Guillaume. ― Désespéré, le héros fait un suprême effort. […] Les tendres bergers du Lignon, comme les galants héros des pastorales et des tragédies précieuses, font profession de ne vivre que pour l’amour. […] Bientôt Corneille, mêlant de plus en plus l’amour et la politique, outre encore les volontés tyranniques de ses héroïnes. […] Et les héroïnes de roman ne le cèdent pas sur ce point à celles de l’histoire.
Les héros parurent des images des dieux ; et, comme on leur vit le pouvoir de récompenser et de punir, les louanges qu’on adressait aux statues des dieux se tournèrent enfin vers les héros. […] Je l’ai tracé en quelques vers : permettez-moi de les extraire d’un poème que j’ai publié sous le nom de ce héros. […] La qualité de héros, dit ce risible aristarque, implique avec elle l’idée de la valeur ; l’épithète de vaillant est donc de trop : c’est un pléonasme ; le héros étant jeune, il n’est pas étonnant que sa haute sagesse ne soit pas le fruit tardif de la vieillesse. […] Sont-ce des héros de notre monde ? […] Aussi les héros des époques anciennes nous frappent-ils plus vivement que les héros des époques modernes.
La Lorraine eut Garin et Bègue ; la Bourgogne eut Girart de Roussillon, et sans doute Roland fut d’abord le héros local des marches de Bretagne avant d’entrer comme neveu de Charlemagne dans la tradition nationale. […] Bertolais, le premier auteur du poème de Raoul de Cambrai (s’il n’est pas supposé par un trouvère plus récent pour donner de l’autorité à ses inventions), ce Bertolais avait combattu à côté de son héros. […] Enfin le héros, blâmé dans son orgueil, est grand dans la défaite et dans la mort : haute intuition d’avoir exalté le vaincu, et doublé la puissance de l’admiration de toute la tendresse de la pitié ! […] Une figure légendaire aura plus de consistance, plus d’être, si en elle nous apparaît le fils ou le père d’un héros, qui nous est connu. […] Le public voulait du nouveau : quoi de plus simple, pour exciter son intérêt, et pour utiliser encore une part de ses émotions antérieures, que de lui présenter les pères ou les fils des héros qu’il aimait ?
. — Le nom de Morée, que le Péloponnèse conserve jusqu’à nos jours, nous prouve assez que Persée, héros d’une origine évidemment grecque, fit ses exploits célèbres dans la Mauritanie grecque ; le royaume de Pélops ou Péloponnèse a l’Achaïe au nord, comme l’Europe est au nord de l’Afrique. […] Puisque des Latins nous sommes revenus aux Grecs, remarquons que cette nation vaine en se répandant dans le monde, y célébra partout la guerre de Troie et les voyages des héros errants après sa destruction, des héros grecs, tels que Ménélas, Diomède, Ulysse, et des héros troyens, tels que Anténor, Capys, Énée. […] Cependant toute tradition vulgaire doit avoir originairement quelque cause publique, quelque fondement de vérité.… Ce sont les Grecs qui, chantant par tout le monde leur guerre de Troie et les aventures de leurs héros, ont fait d’Énée le fondateur de la nation romaine, tandis que, selon Bochart, il ne mit jamais le pied en Italie, que Strabon assure qu’il ne sortit jamais de Troie, et qu’Homère, dont l’autorité a plus de poids ici, raconte qu’il y mourut et qu’il laissa le trône à sa postérité.
Je doute cependant que tous liens de la sorte (comme il les appelle) finissent aussi misérablement que la liaison de son héros et de son héroïne. […] Mais de plus indiscrets ont voulu chercher plus avant ; et comme le héros du livre, Adolphe, est évidemment le portrait de Benjamin Constant lui-même, que celui-ci a bien eu l’éducation et la jeunesse qu’il donne à son personnage, qu’il a bien eu un père comme celui-là, d’apparence froide et sans confiance avec son fils, qu’il a bien réellement connu, dès son entrée dans le monde, une femme âgée, philosophe, telle qu’il nous la montre (Mme de Charrière), on a voulu le suivre plus loin et trouver, dans les tristes vicissitudes de la passion décrite, des traces et des preuves d’une de ses propres passions et de la plus orageuse. […] Mais l’analyse de tous les sentiments du cœur humain est si admirable, il y a tant de vérité dans la faiblesse du héros, tant d’esprit dans les observations, de pureté et de vigueur dans le style, que le livre se fait lire avec un plaisir infini.
Ce poème est à la fois l’Iliade, l’Odyssée et le Don Quichotte ; car son principal héros devient fou comme le héros espagnol, et est infiniment plus plaisant. […] Ce qu’il y a de plus extraordinaire encore, c’est d’intéresser vivement pour les héros et les héroïnes dont il parle, quoiqu’il y en ait un nombre prodigieux. […] « Ne faites pas plus d’attention qu’il ne faut à tous ces héros et à toutes ces héroïnes secondaires du poème, nous dit le professeur au déjeuner ; tout cela n’est que le cadre plus ou moins bien ciselé des tableaux de la galerie infinie de mon poète : mais attachons-nous seulement à cinq ou six médaillons qui priment tout le reste. […] Car remarquez qu’il a donné à son héroïne le nom de la tendre veuve de Florence, dont il fut l’adorateur pendant son âge mûr et jusque dans ses jours avancés. […] Les poètes, selon moi, portent le modèle de leur héros en eux-mêmes ; ils ne peignent jamais bien que ce qu’ils ont eux-mêmes éprouvé.
Il leur défend de mettre dans la bouche de leurs héros des leçons de sagesse & de vertu ; de rendre ces illustres personnages les précepteurs du genre humain. […] Il trouve qu’Énée n’a rien moins que les qualités d’un héros. […] L’apologiste de ce héros ne le trouve foible en rien, pas même dans les larmes qu’il répand quelquefois. […] On ne choisit plus les héros sur le trône : on les tira de partout, même de la lie du peuple. […] Une héroïne ne brille, dans un roman, que par le contraste de vingt femmes prostituées.
Les pieux héros font retentir les cités mortes. […] Les Héros, les Martyrs sont sa progéniture. […] Ainsi il peut créer des héros véridiques et atteindre, en même temps, à l’Épopée. […] Et les poètes vers ces héros se mettent en marche, afin de les leur restituer. […] Ces héros agrestes ou citadins, il en admire le merveilleux destin.
Le grand Corneille enfin (car il est de cette famille), Corneille couvert de cicatrices, épuisé, mais infatigable et sans relâche comme ses héros, pareil à ce valeureux comte de Fuentès dont parle Bossuet, et qui combattit à Rocroi jusqu’au dernier soupir, Corneille ramènera obstinément au combat ses vieilles bandes espagnoles et ses drapeaux déchirés. […] Le procédé en est d’ordinaire analytique et abstrait ; chaque personnage principal, au lieu de répandre sa passion au dehors en ne faisant qu’un avec elle, regarde le plus souvent cette passion au dedans de lui-même, et la raconte par ses paroles telle qu’il la voit au sein de ce monde intérieur, au sein de ce moi, comme disent les philosophes : de là une manière générale d’exposition et de récit qui suppose toujours dans chaque héros ou chaque héroïne un certain loisir pour s’examiner préalablement ; de là encore tout un ordre d’images délicates, et un tendre coloris de demi-jour, emprunté à une savante métaphysique du cœur ; mais peu ou point de réalité, et aucun de ces détails qui nous ramènent à l’aspect humain de cette vie. […] Au reste, Racine a tellement pris garde à ce genre de reproche, qu’au risque de violer les convenances dramatiques, il a su prêter des paroles pompeuses ou fleuries à ses personnages les plus subalternes comme à ses héros les plus achevés. […] Racine fils avoue avec candeur qu’on peut regretter dans l’Iphigénie française cette vive peinture de l’Agamemnon grec ; mais Euripide n’avait pas craint d’entrer dans l’intérieur de la tente du héros, et de nommer certaines choses de la vie par leur nom29. […] Talma, qui, dans ses dernières années, en était venu à donner à ses rôles, surtout à ceux que lui fournissait Corneille, une simplicité d’action, une familiarité saisissante et sublime, l’aurait vainement essayé pour les héros de Racine ; il eût même été coupable de briser la déclamation soutenue de leur discours, et de ramener à la causerie ce beau vers un peu chanté.
Je ne connais point de tragédie dont le héros soit plus fou, plus avili et plus niais. […] Il n’y a point, dit-on, de héros pour son valet de chambre : Mahomet ne peut être le héros d’Omar, qui le voit en déshabillé, et n’aperçoit en lui que le plus odieux et de plus scélérat des hommes. […] Une fougue imprudente n’est pas l’ardeur d’un héros ; un jeune homme de seize ans, qui s’enfuit de la maison paternelle, n’est pas un héros. […] Brutus n’a-t-il pas bien mérité d’être un héros de tragédie ? […] Les héros de Voltaire, en général, sont tous boursoufflés.
Mais Polynice, qui avait rapporté de Thèbes un collier splendide, présent des dieux à Harmonia, lorsqu’elle épousa le héros Cadmos, l’offrit à Ériphyle, la femme du devin. […] Aristophane lui fait dire dans les Grenouilles : « Ma tragédie des Sept Chefs était toute pleine de l’haleine d’Arès, faisait des héros. […] La Cité, personnifiée par son Chœur, en est l’héroïne. […] Homère fait lancer à ses héros « des paroles ailées » ; les ailes de la parole d’Étéocle sont les plumes qui portent la flèche droit au but. […] On y voit une belle Euménide, sortie à mi-corps de l’abîme, un flambeau de fête à la main, saisir l’attelage par les rênes, comme pour introduire le héros divinisé dans le noir royaume.
Plusieurs fois les dieux en viennent aux mains dans Homère ; mais, comme nous l’avons déjà remarqué, on ne trouve rien dans l’Iliade qui soit supérieur au combat que Satan s’apprête à livrer à Michel dans le Paradis terrestre, ni à la déroute des légions foudroyées par Emmanuel : plusieurs fois les divinités païennes sauvent leurs héros favoris en les couvrant d’une nuée ; mais cette machine a été très heureusement transportée par le Tasse à la poésie chrétienne, lorsqu’il introduit Soliman dans Jérusalem. Ce char enveloppé de vapeurs, ce voyage invisible d’un enchanteur et d’un héros au travers du camp des chrétiens, cette porte secrète d’Hérode, ces souvenirs des temps antiques jetés au milieu d’une narration rapide, ce guerrier qui assiste à un conseil sans être vu, et qui se montre seulement pour déterminer Solyme aux combats, tout ce merveilleux, quoique du genre magique, est d’une excellence singulière. […] Préférerons-nous Ascagne, caché par Vénus dans les bois de Cythère, au jeune héros du Tasse enchaîné avec des fleurs, et transporté sur un nuage aux Îles Fortunées ?
Bourdaloue prouve méthodiquement la grandeur de son héros, tandis que l’âme enflammée de Bossuet la fait sentir ; l’un se traîne et l’autre s’élance. […] Parmi les pertes particulières, le trône était toujours brillant, et les trophées publics se mêlaient souvent aux pompes funèbres des héros. […] misérables intérêts, sources de tant de querelles entre des héros, vous ne prévalûtes jamais dans le cœur de celui-ci aux mouvements de son zèle ; il promit son bras, ses conseils, sa vie, s’il était besoin, mais sous le même général qui commandait déjà l’armée ; il eut beau cependant se dépouiller de ses titres, il les retrouva dans l’estime du général, dans le respect des officiers, et dans l’affection des soldats. […] Enfin, prêt à commencer son éloge et à rassembler en lui tout ce qui peut caractériser un grand homme, il s’arrête, et demande pardon à son héros de respecter si peu le dégoût qu’il avait pour les louanges et le soin qu’il se donnait de les fuir autant que de les mériter. […] Massillon, comme on sait, fut le dernier des hommes éloquents du siècle de Louis XIV ; on le choisit aussi quelquefois pour célébrer des héros et des princes, à peu près comme la tendresse ou l’orgueil ont recours aux plus célèbres artistes pour élever des mausolées.
C’est que là on voit l’homme agir de lui-même et par lui-même, sûr de sa force, comme le héros d’une véritable épopée. […] Miltiade, Léonidas, Aristide, Thémistocle, Pausanias, Cimon, voilà les acteurs qui ont tout conçu, tout préparé, tout dirigé, tout exécuté avec cette poignée de héros qu’on voit se ruer sur les multitudes de l’Orient. […] On reconnaît dans les chefs et les soldats des guerres médiques les fils des héros de l’Iliade ; c’est une histoire tout épique, une chronique héroïque mêlée d’anecdotes qui en redoublent l’effet moral. […] L’homme reste toujours le héros du drame historique ; mais il n’en est plus le seul acteur. […] De là une double légende pour le vulgaire, celle qui fait des grands personnages révolutionnaires des tigres altérés de sang, et celle qui en fait des héros du devoir et du dévouement civique.
Tous les peuples de l’antiquité dirent un Hercule pour un héros. […] De même les premiers hommes, incapables de former l’idée abstraite du poète, du héros, nommèrent tous les héros du nom du premier héros, tous les poètes, etc. […] Issus de Jupiter, c’est-à-dire, nés sous ses auspices, ils étaient héros par la naissance et par la vertu. […] Les héros s’honoraient du nom de brigands (Voy. […] La violence des héros ne connaissait qu’un seul frein : le respect de la parole.
comme Vaudrey dans la Vigie, comme les moins bons des héros de l’auteur, il a de l’odieux : on ne peut le suivre jusqu’au bout sans une impression écrasante ; après la récidive, et dès qu’on le voit incorrigible, il devient intolérable53. […] Or ce que Bossuet dit des héros de l’histoire, je le redirai à plus forte raison des héros du poëme ou du roman : « Loin de nous les héros sans humanité ! […] Enfin cette révolte désespérée produisit son homme, son héros, héros assez équivoque sans doute, figure peu achevée et très-mêlée d’ombre, mais par cela même un commode personnage de roman, Jean Cavalier. […] Sue, dans le portrait de son héros, a bien tenu compte des principales données de l’histoire. […] De l’aventurier au héros, il n’est qu’un pas, et Cavalier ne put le franchir.
Ajoutons : et quel début pour la vie d’un poète et d’un héros ! […] La popularité du héros s’accroît de tant de gloire ; avec la popularité, la jalousie du roi. […] ” » Et elle monta sur une ânesse, et cinq jeunes filles la suivirent, et elle épousa le héros. […] Le peuple entier se précipite vers Hébron pour reconnaître roi son héros expatrié. […] Il raconte la filiation des héros de cette maison.
Les enfants reprochant à un futur héros de n’avoir pas de père. […] Le sabre destiné à un héros qui, seul, pourra s’en emparer. — Cf. […] Le héros ingénu lors de ses débuts dans la vie. — Cf. […] Certains héros des contes indigènes paraissent petits, mais c’est par contraste avec les géants, d’origine surnaturelle, qui figurent en même temps qu’eux dans le récit. […] Le héros du conte a bien un fils qui abat les oiseaux tout préparés, mais encore faut-il qu’il fasse l’effort de tendre son arc et de les mettre en joue.
On peut d’abord en juger par l’invocation de la Henriade, dont la tournure est la même que celle de Clovis : Muse, qui ceins ton front d’une immortelle gloire, Qui, plaçant les grands noms au Temple de Mémoire, Des outrages du temps affranchis les Guerriers, Couronne mon Héros de tes plus beaux lauriers. […] Louis fait voir à ce Héros les Princes qui doivent un jour lui succéder. […] Tous semblent s’opposer à l’ardeur qui le guide : Il veut armer son bras ; mais le sage Druide Arrête ce transport, & lui parle en ces mots : Apprends que la Vertu forme seule un Héros.
la nuit, la tente d’Achille, ce héros pleurant Patrocle auprès du fidèle Automédon, Priam apparaissant au milieu des ombres, et se précipitant aux pieds du fils de Pélée ! […] D’abord il se garde bien de nommer le héros troyen ; il dit seulement, il y en avait un, et il ne nomme Hector à son vainqueur, qu’après lui avoir dit qu’il l’a tué combattant pour la patrie ; Τὸν σὺ πρώην κτεῖνα ; ἀμυνόμενον περὶ πάτρης : il ajoute alors le simple mot Hector, Ἔκτορα. […] L’orgueil d’Achille est satisfait d’avoir triomphé d’un héros qui seul défendait ses frères et les murs de Troie.
Génie loyal, plein d’honneur et de moralité, marchant la tête haute, il devait se prendre d’une affection soudaine et profonde pour les héros chevaleresques de cette brave nation. […] Le bon Corneille y manqua de mesure et de convenance ; il insista lourdement là où il devait glisser ; lui, pareil au fond à ses héros, entier par l’âme, mais brisé par le sort, il se baissa trop cette fois pour saluer, et frappa la terre de son noble front. […] Ses tyrans et ses marâtres sont tout d’une pièce comme ses héros, méchants d’un bout à l’autre ; et encore, à l’aspect d’une belle action, il leur arrive quelquefois de faire volte-face, de se retourner subitement à la vertu : tels Grimoald et Arsinoé. […] Ses héroïnes, ses adorables furies, se ressemblent presque toutes : leur amour est subtil, combiné, alambiqué, et sort plus de la tête que du cœur. […] Il retourne et déguise en prose ces phrases altières et sonores qui vont si bien à l’allure des héros, et il se demande si c’est là écrire et parler français.
Thiers ici fait tort, selon nous, au bon sens gouvernemental de son héros, comme il fait tort à la sincérité de M. […] Il nous semble donc ici faire pour son héros précisément ce que son héros faisait pour M. […] Avec ces hochets tant dédaignés, on fait des héros ! […] Thiers ne demande à son héros que de s’arrêter dans son nouveau triomphe, sans paraître s’apercevoir que son héros n’a obtenu ce nouveau triomphe que par l’insatiabilité de grandeur que M. […] Une telle complaisance de l’historien pour l’ambition satisfaite est une complicité du moraliste avec le caractère de son héros.
» Il en adresse autant aux autres héros adorateurs d’Angélique : Agrican et Ferragus. […] Ce n’est qu’au vingt-troisième chant que l’on revient à Roland, le véritable héros, mais le héros toujours oublié du poème. […] À l’instant où il recouvre sa raison, le héros déteste la perfide Angélique. […] Elle déclare que cette belle héroïne est déjà l’épouse de son frère Roger. […] Roger, toujours héros au milieu de son bonheur, tue le jour même de ses noces le féroce Rodomont.
À son arrivée à Missolonghi avec de l’or et des armes, le ciel lui avait refusé l’occasion d’illustrer deux fois son nom de poète en y ajoutant le nom de héros, d’homme d’État et de libérateur de la Grèce. […] Pleure ta chute en vantant tes héros ! […] Ces vers ne sont nullement dans sa bouche, ils sont dans la bouche de son héros ; et si jamais il a été possible de confondre le héros et l’auteur, et de rendre l’un solitaire des opinions de l’autre, à coup sûr ce n’était pas ici le cas. […] Mais depuis quand un auteur serait-il solidaire des paroles de son héros ? […] L’auteur et le héros ont deux langages très opposés, etc. » (Préface de la première édition d’Harold.)
Usant d’abord du langage muet, ils montrèrent autant d’épis ou de brins de paille, ou bien encore firent autant de fois le geste de moissonner, qu’ils voulaient indiquer d’années… Dans la chronologie ordinaire, on peut remarquer quatre espèces d’anachronismes. 1º Temps vides de faits, qui devraient en être remplis ; tels que l’âge des dieux, dans lequel nous avons trouvé les origines de tout ce qui touche la société, et que pourtant le savant Varron place dans ce qu’il appelle le temps obscur. 2º Temps remplis de faits, et qui devaient en être vides, tels que l’âge des héros, où l’on place tous les événements de l’âge des dieux, dans la supposition que toutes les fables ont été l’invention des poètes héroïques, et surtout d’Homère. 3º Temps unis, qu’on devait diviser ; pendant la vie du seul Orphée, par exemple, les Grecs, d’abord semblables aux bêtes sauvages, atteignent toute la civilisation qu’on trouve chez eux à l’époque de la guerre de Troie. 4º Temps divisés qui devaient être unis ; ainsi on place ordinairement la fondation des colonies grecques dans la Sicile et dans l’Italie, plus de trois siècles après les courses errantes des héros qui durent en être l’occasion. […] Ainsi chez les Latins, il s’écoule plus de neuf cents ans depuis le siècle d’or du Latium, depuis l’âge de Saturne jusqu’au temps où Ancus Martius vient sur les bords de la mer s’emparer d’Ostie. — L’âge héroïque qui vient ensuite, comprend deux cents années pendant lesquelles nous voyons d’abord les courses de Minos, l’expédition des Argonautes, la guerre de Troie et les longs voyages des héros qui ont détruit cette ville.
Lorsque l’âge héroïque succéda à l’âge divin, on n’admira, on ne célébra que les exploits des héros. Alors parurent les poètes lyriques semblables à l’Achille de l’Iliade, lorsqu’il chante sur sa lyre les louanges des héros qui ne sont plus 90. […] Dans la satire dramatique, on voyait paraître, selon Horace, divers genres de personnages, héros et dieux, rois et artisans, enfin esclaves.
Victor Hugo le porte dans le portrait physique ou moral de ses héros : Il y avait de l’illisible sur cette figure. […] Il sépare la vie de ses héros en deux parties, généralement de signes contraires, l’existence avant la crise, celle postérieure, toutes deux unes et cohérentes, mais d’attributs diamétralement adverses. […] Le faux Lord Chancharlie est historiquement vraisemblable, et de toutes les héroïnes de théâtre, la reine Marie Tudor, se distingue par des passions humaines conçues en termes vrais. […] Quand on dit, sans trop y songer : un héros, un vieillard, une jeune fille, une mère, nous apercevons vaguement quelque chose de fort net et de fort simple. Un héros est un beau jeune homme brave et rien de plus ; une jeune fille est un être chaste, joli et timide.
… Dans ce fouillis de gloire qu’on appelle les Montmorency, il doit y avoir, si on fait l’histoire de chaque tombe, bien de hautes vertus, de fières et chastes physionomies de femmes, de destinées sublimes de grandeur et de simplicité, qu’on pourrait nommer aussi : Madame de Montmorency, comme l’héroïne de Renée, et qu’on ne distinguerait pas, à la première vue, sous ce nom collectif porté comme un pavois par soixante générations, et qui nous brouille tout de sa splendeur. […] II Telle est l’héroïne que Renée a préférée pour nous en raconter l’histoire à toutes les femmes du xviie siècle, de ce temps complet qui commença par les grandes femmes et qui finit par les grands hommes. […] Elle aima son mari, voilà toute sa gloire ; mais elle l’aima avec l’abandon, la résignation, la grandeur, la simplicité et la fidélité après la mort d’une héroïne de Corneille. […] Eh bien, Renée a un peu ce sentiment pour son héroïne ! […] Après la mort de son héros, cette noble infortunée, qui n’avait jamais, hélas !
Vos sociétés savantes proposent des prix pour savoir quelle a été l’utilité des croisades ; vous cherchez à expliquer les actions merveilleuses de l’héroïne d’Orléans, qui fut la simple bergère de Domremy ; et vous demandez où sont les sujets pour l’histoire, pour la poésie ! […] Tous les poètes qui ont suivi ont créé des événements plus ou moins analogues les uns aux autres, mais tous ont été fidèles à la sorte de vraisemblance du sujet ; tous ont été unanimes dans les caractères des personnages qui sont les héros de cette épopée romanesque. Les exploits et les aventures diffèrent, mais la couleur de ces exploits et de ces aventures, mais la physionomie des héros, sont les mêmes. […] L’exemple que l’illustre auteur des Martyrs a donné, en prenant un simple particulier pour héros d’une épopée, est un grand fait littéraire. […] Les vêtements, il faut l’avouer, s’allient mal avec l’art statuaire ; de plus, cet art est monumental et public : on élève des statues aux héros, aux grands hommes ; mais si vous ne pouvez vous identifier avec la pensée de l’apothéose, il faut que vous renonciez au nu.
Il est vrai qu’un an plus tard, l’éloge eût été plus honorable encore, et pour le panégyriste et pour le héros, car, en 1610, Sully n’était plus rien. […] On peut dire qu’il fut véritablement le héros de la France. […] Sa gaieté au milieu des combats, ses bons mots dans la pauvreté et le malheur, toutes ces saillies d’une âme vive et d’un caractère généreux, cette foule de traits que l’on cite, et qui sont à la fois d’un homme d’esprit et d’un héros, semblaient peindre en même temps l’imagination française, et le genre d’esprit avec le caractère national. […] Mais la bonté de Henri IV fut tout à la fois celle d’un particulier aimable et d’un héros. […] Le sujet vous entraîne, et l’on oublie l’orateur pour ne penser qu’au héros.
Bien autrement difficile serait d’accorder à nombre de héros réalistes la valeur de types de l’homme réel. […] Avec une autre collection de notes, ou avec la même, un autre historien en refera un héros. […] Dans l’histoire naturelle et sociale » des Rougon-Macquart, il déclare lui-même qu’il étudiera chez ses héros « le débordement des appétits ». […] Les deux héros principaux nous sont d’abord montrés seulement de profil, comme enveloppés dans les éternels brouillards gris de la Bretagne. […] Yann est un personnage symbolique, un peu à la manière de quelques héros de Zola, comme Albine, par exemple !
Il y eut donc, à la fin du seizième siècle, contre la tragédie savante, une sorte d’insurrection, dont le chef et le héros fut Alexandre Hardi. […] Ceux-ci sont plus des héros que des hommes ; ou, si l’on veut y voir des hommes, ce sont des hommes tels qu’ils devraient être. […] D’ailleurs, parmi ces héros, quelques-uns ont vécu ; leur grandeur est une tradition historique. […] Nous sommes idolâtres des héros, et du fond de notre misère nous battons des mains à ceux qui nous font jouer quelque grand rôle sur la scène du monde, et qui nous attirent les applaudissements du genre humain. […] Plus tard, ses héros parlèrent comme Benserade.
L’un fit une chanson de geste de la vie d’Alexandre, telle que le faux Callisthène l’avait racontée, et la chevauchée du roi macédonien à travers l’immense Asie et l’Inde prodigieuse, le caractère du héros, type accompli de vaillance et de largesse chevaleresques, eurent le succès le plus populaire. […] Cependant d’autres poètes avaient écouté les harpeurs bretons et gallois, et tout le monde celtique, Tristan et Yseult, Arthur et Genièvre, Lancelot, Yvain, Perceval, faisaient leur apparition, héros plus étranges, plus captivants que tous les héros anciens par l’imprévu des aventures et la nouveauté des sentiments. […] Mais tous ces romans dont les héros se nomment Alexandre, ou Hector, ou Enée, ne peuvent être pour nous que des parodies ridicules. […] Il mit même en roman breton un conte oriental, dont la femme de Salomon était l’héroïne. […] Mais pour la femme surtout, quel enivrement : servante plutôt qu’égale et compagne de son seigneur, elle se voyait brutalisée, traînée par les cheveux, dans les chansons de geste, et le mépris de la femme était comme un article de la perfection du héros féodal.
Quinet a donné carrière à ses sympathies de moyen âge, en les relevant et les rachetant par ses vues philosophiques sur l’avenir du monde, sur la guerre dont il voit en Napoléon le dernier grand représentant, et sur la démocratie dont il le considère également comme le héros : « La poésie, dit-il, n’a pas seulement pour but de représenter Napoléon tel qu’il s’est montré aux contemporains. […] Le désordre des assonances dans l’ode de Malherbe convient au trouble réel de la poésie lyrique ; mais le vers épique doit avoir une tout autre constitution ; il doit pouvoir atteindre à tous les effets du dithyrambe sans se permettre aucun trouble apparent ; il faut qu’il ressemble à ces héros qui ne portent jamais sur leurs visages la marque des combats intérieurs. » La distinction est bien ingénieusement exprimée ; mais il m’est impossible de voir dans l’ode de Malherbe autre chose qu’un ordre majestueux et harmonieux, un concours d’avance réglé de justes consonnances. […] Quinet n’a pas, à beaucoup près, atteint le premier dans le sentiment discret, et justement saisi, de la renommée populaire de son héros, il n’a pas non plus égalé le profil si net, si ferme, si vivement taillé en ivoire ou en airain, qu’en a souvent tracé le second. […] Quinet est un peu nuageux de profil ; il a quelque chose des héros d’Ossian, ou encore d’un héros de l’Orient nous arrivant par les Niebelungen 99. […] Or, d’une part, ce Napoléon a beaucoup du héros féodal ; la multitude d’images de chevalerie qui parsèment la peinture, les termes de fauconnerie qui escortent son aigle impériale, nous figurent plutôt un baron, un conquérant du moyen âge.
Je ne loge que chez des comtes, des marquis qui nous appellent des héros et qui nous trouvent encore le caractère aimable des Français. […] Encore un, et ce sera le dernier… Illusion et mobile des héros ! […] Les héros de Lodi, de Millesimo, de Castiglione et de Bassano, sont morts pour leur patrie ou sont à l’hôpital ; il ne reste plus aux corps que leur réputation et leur orgueil. […] Nous sommes abandonnés au fond de l’Italie… Joubert, en tête de cette élite dont chaque nom est celui d’un héros, quel plus bel éloge ! […] La campagne suivante est le plus beau fleuron militaire de notre jeune héros.
S’il ne peut pas se dire qu’il est un historien à la taille de son héros, il peut au moins se rendre cette justice, et la Critique la lui rendra, qu’il a essayé de lui faire une histoire à sa taille, et que dorénavant cette histoire est mesurée. […] Roselly de Lorgues a passé gratuitement condamnation sur les jugements qu’on a fait subir à son héros. […] Pour ajouter à la clarté du nimbe dont il a couronné son héros, pour démontrer par toutes les voies qu’il était de la race de ceux que Dieu envoie remplir un mandat spécial sur la terre, il est entré dans toutes les interprétations familières aux plumes vigoureusement catholiques. […] Il l’a grandie, il l’a élevée dans ses événements et dans son héros, mais il n’a pas empêché l’historien d’entrer dans ce que la critique de la philosophie appelle le positif et la réalité des choses humaines. […] Roselly de Lorgues, qui l’a étudié comme il a étudié la géographie, l’art nautique et les divers problèmes scientifiques que la découverte de Christophe Colomb résolvait, a rencontré un intérêt et une vie qu’il a su élargir et dont il a renvoyé les réverbérations tantôt sombres, tantôt brillantes, sur la figure épique et presque biblique de son héros.
Il est des romanciers qui aiment leurs héros, qui les exaltent, qui les justifient ou les plaignent. […] Il est à sa singulière héroïne ce qu’elle-même est à son enfant. […] Non content d’avoir expliqué son héroïne par son père, son éducation, son mariage et surtout son mari, M. […] Il combine sa fable de manière à ouvrir ce château à son héroïne et à la mêler un soir aux fêtes et au luxe d’une société entr’aperçue seulement dans les livres à couverture jaune qu’elle a lus. […] Elle fume, elle met des gilets d’homme, et finit par vouloir être enlevée et faire son petit voyage d’Italie, tout comme une autre… Malheureusement, ici, le faux héros du roman auquel elle s’est donnée, s’écroule.
Les principaux chefs insurgés furent pris, et périrent ; et aujourd’hui qu’on élève des mausolées à ces victimes, aujourd’hui qu’on voudrait faire retomber leur sang sur ceux qui eurent le droit de le verser, il est bon de remarquer qu’après tout, les affligeants trépas des Sombreuil et des Charettene doivent pas être imputés seulement à la valeur républicaine, et que, si les héros exhalèrent en mourant des ressentiments et des plaintes, ces plaintes et ces ressentiments s’adressaient à d’autres qu’à leurs vainqueurs. […] Vingt héros, divers de caractère et de talent, pareils seulement par l’âge et le courage, conduisaient ses soldats à la victoire. […] On pesait leurs mérites divers ; mais aucun œil encore, si perçant qu’il pût être, ne voyait dans cette génération de héros les malheureux ou les coupables : aucun œil ne voyait celui qui allait expirer à la fleur de l’âge, atteint d’un mal inconnu, celui qui mourrait sous le poignard musulman ou sous le feu ennemi, celui qui opprimerait la liberté, celui qui trahirait sa patrie ; tous paraissaient grands, purs, heureux, pleins d’avenir ! […] Français, qui avons vu depuis notre liberté étouffée, notre patrie envahie, nos héros fusillés ou infidèles à leur gloire, n’oublions jamais ces jours immortels de liberté, de grandeur et d’espérance !
Placer ses Héros dans des circonstances embarrassantes, les en tirer sans effort ; étonner le Spectateur par des sentimens, des réponses, des raisonnemens imprévus ; réunir à la fois l’élévation des pensées, la grandeur des images, la variété & l’énergie du style : tout cela n’étoit qu’un jeu pour un Génie devant qui les difficultés s’applanissoient d’elles-mêmes. […] Ce n’est pas par des Remarques plus subtiles que justes, par des Réflexions plus fausses que conformes au goût, par des Analyses infidelles & insidieusement présentées, par des Critiques minutieuses & souvent puériles, par des Notes grammaticales auxquelles on attache une importance d’autant plus ridicule, que les fautes de langue qu’on y releve appartiennent moins au Poëte qu’au temps où il vivoit, qu’on pourroit se former une idée sûre du Héros de la Tragédie. […] De petits Auteurs froids & composés auront beau disserter, raisonner, subtiliser, ressasser ces mots imposans de vûes justes & fines, de discernement sûr, de sentiment, de convenance, de sensibilité ; le Héros de notre Tragédie sera toujours en droit de dire, au sujet de ses sentimens & de sa Poésie : Rome n’est plus dans Rome, elle est toute où je suis.
Aussitôt le héros s’écrie : « Qui donc a déplacé ma couche ? […] Elle ne peut arracher ses beaux bras du cou du héros ; et l’Aurore aux doigts de rose aurait vu les larmes de ces époux si Minerve n’eût retenu le soleil dans la mer…… Cependant Eurynome, un flambeau à la main, précédant les pas d’Ulysse et de Pénélope, les conduit à la chambre nuptiale…… Les deux époux, après s’être livrés aux premiers transports de leur tendresse, s’enchantèrent par le récit mutuel de leurs peines…… Ulysse achevait à peine les derniers mots de son histoire, qu’un sommeil bienfaisant se glissa dans ses membres fatigués, et vint suspendre les soucis de son âme11. […] Ils ont un goût plus sûr, une imagination plus noble : ils ne savent travailler que l’ensemble, et négligent les ornements ; un berger qui se plaint, un vieillard qui raconte, un héros qui combat, voilà pour eux tout un poème ; et l’on ne sait comment il arrive que ce poème, où il n’y a rien, est cependant mieux rempli que nos romans chargés d’incidents et de personnages.
Du mot Ἥρα, Junon, viennent ceux de ἥρως, héros, Ἡρακλῆς, Hercule, ἔρως, amour, hereditas, etc. […] Apollon est le dieu de la lumière, de la lumière sociale, qui environne les héros nés des mariages solennels, des unions consacrées par les auspices. […] Mais les héros reçoivent ceux qui se présentent en suppliants.
Des nains ou des héros pour la plupart, mais quelques-uns aussi des monstres. […] Victor Hugo tombe dans le faux en passant le badigeon du lyrisme sur la virginité détruite de son héroïne ; et que M. […] Il n’est pas d’héroïne de roman ou de comédie qui ne soit une femme charmante, une créature incomparable, une personne accomplie. […] Il est tout à la fois le héros de la pièce et le paillasse, excellent peintre et meilleur charlatan, s’il est possible. […] Que deviennent ses héros devant les pères-nobles de la Constituante et les jeunes premiers de la Convention ?
L’héroïne meurt à la trentième page du premier volume, mais son cadavre ensanglanté sort du tombeau et toutes les nuits va se coucher à côté de son mari, un Othello du temps de Charlemagne. […] Trois fatalités pèsent sur l’héroïne. […] Son précepteur qui la modelait sur Clarisse Harlowe et sur Pamela, n’espérant pas qu’elle trouvât en elle la force de résistance des héroïnes anglaises, appela à son aide la religion et lui imposa un vœu de virginité, en guise de frein. […] Sainte-Beuve possédait l’exemplaire annoté de la main de l’auteur ; comme il manque mille occasions d’exercer sa malice habituelle, en exposant les faiblesses du héros, il est à présumer qu’il l’avait lu très inattentivement. […] Un Anglais sur notre scène est toujours un milord, ou un capitaine, héros de sentiment et de générosité. » Chateaubriand, Essai sur la littérature anglaise.
La seconde langue, qui répond à l’âge des héros, se parla par symboles, au rapport des Égyptiens. À ces symboles peuvent être rapportés les signes héroïques avec lesquels écrivaient les héros, et qu’Homère appelle σήματα. […] Les trois espèces de langues et d’écritures furent aussi contemporaines dans leur origine, mais avec trois différences capitales : la langue divine fut très peu articulée, et presque entièrement muette ; la langue des héros, muette et articulée par un mélange égal, et composée par conséquent de paroles vulgaires et de caractères héroïques, avec lesquels écrivaient les héros (σήματα, dans Homère) ; la langue des hommes n’eut presque rien de muet, et fut à peu près entièrement articulée. […] Le premier genre de vers dut être approprié à la langue, à l’âge des héros : tel fut le vers héroïque, le plus noble de tous. […] Ce qui est plus certain, c’est que les fondateurs de la civilisation grecque furent les poètes théologiens, lesquels furent aussi héros et chantèrent en vers héroïques.
Ces messieurs avaient même trouvé, dans un théâtre voisin le héros de la comédie qu’ils désiraient pour leur théâtre, et ce héros était une statue de pierre, ou de Pierre ! […] » Sans nul doute, ainsi aurait pu dire Molière à ce nouveau héros qui le narguait. […] On accueillait avec enthousiasme ces héros grandis de vingt coudées. […] Quelle est la récompense suprême de Jupiter, sur la terre des héros ? […] À peine mort, il devint le sujet de louanges sans fin… le héros de mille apothéoses !
Enfin, les lucides héros de M. […] Ces fiers poètes furent les enfants sacrés de héros très sublimes. […] « Ses héros manquent de proportion, il les a pourvus d’emphatiques pensées. […] L’humanité a donc besoin de rudes héros pour donner à nos esprits une nouvelle impulsion. […] Il a su, lui aussi, incarner le vice en des héros qu’il a sculptés dans de la brique et peints de sang.
Goethe comprenait tout dans l’univers, — tout, excepté deux choses peut-être, le chrétien et le héros. […] » Mais Goethe est comme Jean-Jacques, comme tout poète : il est amoureux ; mais amoureux de l’héroïne de son roman et de son rêve. […] Hofer, le héros de l’insurrection du Tyrol, est la première infidélité de Bettina. […] que ne puis-je aller en Tyrol, et y arriver à temps pour mourir de la mort des héros ! […] Dans le sang répandu des héros tyroliens, il n’a vu encore qu’un parfum de poésie : « Tu as raison, écrivait-il à Bettina, de dire que le sang des héros répandu sur la terre renaît dans chaque fleur. » Encore un coup, l’héroïsme n’est pas le côté supérieur de Goethe.
Elle lui fournira quelques-uns de ses sujets et quelques-unes de ses héroïnes. […] Depuis la mort de Mazarin (1661), il joue le rôle de héros bienfaisant. […] À coup sûr, le héros de Racine devait lui paraître amoureux hors de propos. […] Il me paraît le premier des héros romantiques. […] Iphigénie est une héroïne merveilleusement bien élevée.
Dans les héros de Shakespeare, je retrouve à la fois l’homme que je suis et l’homme que j’aimerais à être ; mais je n’ai pas la même ressource avec les héros de Calderon. […] Cervantes a commis cependant, me dira-t-on, cette impertinence envers son héros. […] Oui, Cervantes a commis cette impertinence envers son héros, mais au détriment de son livre. […] Les héros de Byron n’ont jamais plu qu’à mon imagination. […] Il semble qu’il ait éprouvé pour son héros le même sentiment que Cervantes pour le sien.
Toujours ce héros, qui foule une brume autant que notre sol, se montrera dans un lointain que comble la vapeur des plaintes, des gloires, et de la joie émises par l’instrumentation, reculé ainsi vers des commencements. […] Siegfried, le héros prédestiné, ayant éveillé Brünnhilde, les deux, en la joie claire de leur virginal embrassement, apportaient au Monde l’ère sereine de l’Amour. […] — « Que de fortes bûches soient empilées, là, au bord du Rhin, en amas : haut et clair, flambe le brasier, par qui le noble corps du plus auguste Héros soit consumé ! Menez ici son cheval, à fin qu’avec moi, il suive le Grand : car partager du Héros le très sacré honneur, est le désir de mon corps. […] Dans le feu luisant, là, gît ton Maître, Siegfried, mon bien heureux Héros : pour suivre l’Ami, hennis tu, joyeusement ?
indépendamment des opinions, des vues et de la conclusion de l’auteur, qu’il soit pour ou contre son héros, qu’il le tue sous la société ou qu’au contraire il tue la société sous lui. […] Ce livre, c’est L’Ensorcelée, dans lequel le héros s’envoie un coup de tromblon chargé de dix-huit balles par la figure, et, s’il manque son cerveau, il ne manque pas sa figure, que le coup emporte, tandis que le suicidé de Monsieur de Camors se tue roide, et n’est pas le héros du roman. C’est le père du héros, et si j’en crois la lettre qu’il écrit à son fils avant de se tuer, un tout autre homme que monsieur son fils, et que j’aurais mieux aimé voir à la besogne. […] Ce ne serait pas le diable chez Balzac, le peintre des de Marsay, des Palférine et des de Trailles, ces vicieux étoffés qui conduisaient la vie à grandes guides et ne regardaient pas aux pourboires, mais c’est le diable, à ce qu’il paraît, pour Octave Feuillet et les auditeurs au Conseil d’État qui sont ses héros ! […] Et quant à madame de Talyas, l’héroïne satanique du roman, préférée dans le cœur du romancier à l’héroïne céleste qui est la Jeanne, elle n’est pas plus inventée ni plus neuve ; et, scélérate, elle n’est que la petite monnaie de scélérates plus logiques qu’elle, dans la littérature de ce temps.
Malgré la réputation qu’eut cette biographie, dont tout l’intérêt vient exclusivement du héros qui y est platement raconté et dont l’héroïsme pouvait braver en paix la platitude de ses historiens, ce livre ne valait pas l’honneur que lui fait deux fois M. […] Il fallait y mettre un désintéressement fier, et y rencontrer l’expression juste d’un esprit qui n’étudie plus que l’intensité de la nature humaine dans les héros. […] Mais la vie du grand Amiral n’a pas été que sa fonction, et son individualité est plus compliquée… Ce héros, et presque ce saint du pays des Excentricités profondes, a des singularités qui semblent incompréhensibles ! […] En effet il était Nelson, et le désordre d’un héros comme Nelson doit plus peser que tous les désordres d’un poète !
Malgré la réputation qu’eut cette biographie, dont tout l’intérêt vient exclusivement du héros qui y est platement raconté et dont l’héroïsme pouvait braver en paix la platitude de ses historiens, ce livre ne valait pas l’honneur que lui fait deux fois M. […] Il fallait y mettre un désintéressement fier et y rencontrer l’expression juste d’un esprit qui n’étudie plus que l’intensité de la nature humaine dans les héros. […] Mais la vie du grand Amiral n’a pas été que sa fonction, et son individualité est plus compliquée… Ce héros et presque ce saint du pays des Excentricités profondes, a des singularités qui semblent incompréhensibles. […] En effet, il était Nelson, et le désordre d’un héros comme Nelson doit plus peser que tous les désordres d’un poète !
Et, pour terminer ce tableau, où je cherchai, fidèle secrétaire de la France, à préparer les versets d’une Bible éternelle de notre nation, je veux raconter ce qui advint à la mort du plus étonnant des héros que j’ai nommés, à la mort du capitaine-prêtre Millon, qui tomba sous Verdun après avoir calqué ses derniers jours sur les derniers jours du Christ. […] Pour conclure, il proclama sur le cercueil du héros (et n’entendez-vous pas sa voix sur toutes nos tombes ?) […] … Je fais mes réserves, moi aussi, telles qu’un instinct du goût nous les suggère, sur ces ententes qui, dans le froid de nos vies quotidiennes, seraient des compromissions ; mais dans la fraternité du sacrifice pour la France et pour la civilisation, nos héros reçoivent spontanément le secours de toutes les prières, l’effusion de toutes les consciences bouleversées par le même sublime. […] A l’issue d’une guerre où tous les enfants de la France furent plus beaux que dans aucun siècle, la patrie doit un hommage aux femmes et aux mères des héros, l’enthousiasme glorieux de nos combattants est fait pour une grande part du courage et de l’abnégation des Françaises, et celles-ci, quand la funeste nouvelle tombe dans leurs foyers, sont dignes de recueillir (pour la défense de leur famille et de la patrie) le bulletin de vote du soldat dont l’âme était pareille à la leur.
Alors la mémoire des héros était confiée à des orateurs dont le génie donnait l’immortalité. […] Ces voûtes augustes ont été dignement choisies pour l’apothéose d’un héros. […] Au-dessus, on croyait voir planer encore l’âme du héros, attentive aux hommages de la France. […] Le temps découvre les imperfections des plus grands héros, et rien ne se dissimule à son tribunal. […] « De combien de héros Louis foule la cendre !
Il lui fallait un héros pour oser et vaincre, les dieux l’envoyèrent. […] L’oracle de Delphes, consulté par les Athéniens, leur ordonna d’adorer en lui le héros Échellos, c’est-à-dire « l’Homme au manche de charrue » : —’Εχέτλη : — sans cloute l’incarnation du pays rural, le moissonneur des gerbes se transformant en faucheur d’hommes, aux jours de combat. […] La bataille fut peinte sur un panneau du Pœcile, et Miltiade y fut représenté avec Callimaque, au milieu d’un groupe de héros et de demi-dieux.
Les montagnes de la Navarre n’avaient-elles point encore quelque druide, qui, sous le chêne, au bord du torrent, au murmure de la tempête, chantait les souvenirs des Gaules, et pleurait sur la tombe des héros ? […] La barbarie expirait, l’aurore du siècle de Louis commençait à poindre ; Malherbe était venu, et ce héros, à la fois barde et chevalier, pouvait conduire les Français au combat en chantant des hymnes à la victoire. […] Les héros de ce poème débitent de beaux vers qui servent à développer les principes philosophiques de Voltaire ; mais représentent-ils bien les guerriers tels qu’ils étaient au seizième siècle ?
Seulement, l’auteur du Blessé de Novare, qui ne voulait pas recommencer un livre achevé, mais qui voulait l’allonger en le variant, a cru qu’il était bon de tirer son héros du vague magnifique dans lequel Chateaubriand noie cette sombre et rêveuse figure, et d’en faire, par ce temps florissant de réalisme et de réalité, un être d’une réalité très précise et très coudoyée. […] Mais pour cela il aurait fallu battre la terre avec la figure de son héros. […] L’auteur du Blessé de Novare, qui croit à son héros, qui le choie, qui le berce sur son cœur et a pour lui toutes les tendresses de la maternité littéraire (la seule maternité qui ne soit pas touchante), n’a pas beaucoup remué les ornières du grand chemin de tout le monde dans lequel il a continué de marcher.
que le Don Juan de Byron devait parcourir le globe tout entier dans le plan du poëte, de même le héros de Gogol devait parcourir l’empire russe ; mais ce n’était pas la main aveugle des circonstances qui le poussait à travers l’empire, c’était une pensée de spéculation. Le héros de Gogol est… il faut bien le dire ! […] ce sont ces âmes, mortes en réalité, mais vivantes sur les registres du fisc, que Tchitchikoff (l’impudent héros de Gogol) achète à qui veut les lui vendre, dans un but facile à comprendre. […] Certes, on peut concevoir que, dans un but de moralité supérieure, un génie misanthropique ou indigné prenne un coquin pour héros de son livre et en dévoile l’idéal affreux, comme Vautrin, ou la réalité immensément comique, comme Panurge, mais pour cela il faut savoir individualiser.
Daudet suppose que nous connaissons maintenant à fond son héros. […] Nous montons donc cette fois vers des régions moins malsaines ; héros et héroïnes sont présentables. […] Bourget qui me paraît, à moi, une énigme, bien plus que celui de son héros et de son héroïne. […] Son héros n’est ni vous ni moi. […] Mme Caverlet est l’héroïne, et c’est M.
À la place des belles figures de la mythologie grecque, on voit des diables, des sorcières, des vampires, et les nobles héros du temps passé doivent céder la place à des escrocs et à des galériens. […] « Je ne connais aucun livre plus riche en leçons que ces Mémoires ; par eux notre regard pénètre profondément dans les recoins les plus cachés de l’époque, et Mirabeau, ce miracle, devient un être naturel ; mais le héros ne perd rien cependant de sa grandeur. […] Les Français voient dans Mirabeau leur Hercule, et ils ont parfaitement raison ; mais ils oublient qu’un colosse se compose de fragments, et que l’Hercule de l’Antiquité lui-même était un être collectif, qui réunissait sur son nom avec ses exploits les exploits d’autres héros. […] Lisant une des histoires quelconques de Napoléon qu’on publiait alors, il fait cette remarque, si justifiée depuis : « Le héros n’en est pas diminué ; au contraire, il grandit à mesure qu’il devient plus vrai. » Il essaye de lire Bourrienne, et le livre bientôt lui tombe des mains : « Cela », dit-il, « tiraille des brins à la frange et aux broderies du manteau impérial, déposé d’hier, et cela croit par là devenir quelque chose ! […] … Quand on pèse tout ce que celui-là a fait et enduré, il semble qu’à quarante ans il devait être usé jusqu’au dernier atome ; mais pas du tout ; à cet âge, on le voyait s’avancer encore, toujours héros parfait. » Qu’on se rappelle les magnifiques jugements de Gœthe sur Louis XIV, sur Voltaire, sur Molière, sur les hommes-types par qui la France est si grande, et qu’on y joigne celui-ci57.
L’œuvre portait le nom de son héros ou de son sujet principal : c’est l’Iliade pour les luttes d’Ilion, l’Odyssée pour les aventures d’Ulysse. […] Gustave Geffroy en donnant, il y a deux ans, une fort bonne biographie de Blanqui, crut devoir l’intituler l’Enfermé, pour indiquer que son héros avait passé toute sa vie, ou presque, en prison, mais sans réfléchir que ce surnom pourrait aussi bien s’appliquer à d’autres personnages célèbres : Silvio Pellico, si l’on veut. […] On s’était contenté, à l’origine, d’intituler les romans du nom du héros principal. […] Au xviie siècle encore, les romanciers donnèrent à leurs livres le nom du héros : la Princesse de Clèves, Cyrus, Clélie, etc. […] Le héros de Daniel Defoe3 eut, presque tout de suite, des frères en quantité, de toutes nations, de tous les âges et de tous les métiers.
On ne voit plus ni prologues d’opéra sur les princes, ni odes pindariques sur les grandes vertus d’un héros que personne ne connaît. […] Se contentera-t-il de fonder la statue colossale d’un héros, et d’imiter parfaitement ses traits ? […] Il ne placera donc point son héros sur un froid piédestal ; on le verra sur un rocher escarpé, qui lui sert de base, poussant à toute bride un cheval fier et vigoureux qui gravit au sommet du rocher, et de là il paraîtra étendre sa main sur son empire. La partie du rocher qu’il aura parcourue, offrira l’image d’une campagne cultivée ; celle qui lui restera à franchir, sera encore brute et sauvage ; cependant un serpent à demi écrasé, et ranimant ses forces, s’élancera pour piquer les flancs du cheval, et tâcher, s’il le peut, d’arrêter la course du héros. […] C’est aux vivants qu’il faut parler ; c’est dans leur âme qu’il faut aller remuer le germe de l’honneur et de la gloire : ils veulent être aimables, faites-les grands ; présentez-leur sans cesse l’image des héros et des hommes utiles ; que cette idée les réveille.
Il ne connaissait guère autre chose sur son héros que cette pièce de Guillem de Castro avec quelques romances ; et à la rigueur, dans un examen littéraire, on peut se borner, comme l’a très-bien fait M. […] Le héros de son choix, et qu’elle a une fois épousé, acquiert ainsi, à chaque génération, une vertu nouvelle, la vertu régnante et à la mode dans chaque temps. […] Sur ce canevas, l’imagination castillane s’est émue, s’est mise à l’œuvre et s’est brodé son héros. […] Il est le héros, le protecteur et le promoteur de la monarchie espagnole, maîtresse bientôt de Paris et devenue comme la monarchie universelle. […] » Voilà le héros tendre, humain et paternel que le Cid est devenu.
Hugo : le type byronien du héros romantique ; médiocrité psychologique et invraisemblance dramatique des drames de Hugo ; l’érudition historique et les visions poétiques ; le lyrisme du style ; le comique. […] Point d’histoire, point de particularités singulières : Vigny ne s’intéresse pas à ce que fut son héros dans la réalité. […] Aux trois héros des combats de 1830, à Dumas, Hugo, Vigny, nous devons ajouter ici Alfred de Musset. […] Le héros de ces comédies, c’est toujours Musset ; et nous voilà débarrassés du héros byronien à formule fixe. […] Il suffit que Rachel montrât dans toute la violence de leurs passions les « raisonnables » héroïnes du théâtre classique, pour rabattre l’extravagante excentricité du drame romantique.
Héros de la Poésie Françoise de son temps, il a les plus singulieres conformités avec le Héros de notre Poésie actuelle.
La force et l’originalité avec lesquelles il a peint des mœurs barbares, prouvent qu’il partageait les passions de ses héros. […] C’est que les caractères des héros qu’il a peints ne se rapportent pas à des êtres individuels, mais sont plutôt des symboles populaires de chaque caractère moral.
Goethe semble le croire, et raconte, comme s’il s’agissait d’un exploit très noble, la lutte que son héros soutint contre Cologne. […] Mais que le héros nous en soit donné comme un modèle de chevalerie, c’est ce qu’il nous est plus difficile d’admettre. […] Pallmann lui-même, malgré toute son ingéniosité, ne parviendrait point à faire de lui, comme de son héros, un précurseur de M. de Bismarck. […] Elle se passionnait avec lui pour ses héros. […] Accordons aussi, si l’on y tient, qu’il ait pris à Maximilienne les yeux noirs de son héroïne.
Lorsqu’il a voulu élargir son plan, tenter de remonter aux origines et de grouper tous les événements auxquels fait allusion le poème germanique, il a dû consulter les chants scandinaves qui traitent des héros — la Vaelsunga-Saga, les Wilkina-Saga et Nifflunga-Saga — et enfin, les Eddas elles-mêmes. De ces poèmes, c’est la Vaelsunga-Saga qui lui a sans doute le plus servi pour le gros œuvre dramatique, du moins lorsqu’il lui a fallu passer des dieux aux héros, de Wotan à Siegfried. […] Dans le premier poème, Sigurdarkvida Fafnirsbana (premier chant de Sigurd vainqueur de Fafnir), le héros chante au sage Griper : « Je suis Sigurd, fils de Siegmund ; Hiœrdis est la mère du héros. […] Dans la Saga de Sigurd telle qu’au commencement du siècle les habitants des îles Feroë avaient encore coutume de la chanter, Siegmund est tué par le fils (l’un guerrier nommé Hunding ; sa femme Hioerdis reçoit du héros mourant les deux morceaux de l’épée brisée au combat : « Dans ton sein, dit Siegmund, tu portes un fils de héros, l’espérance de ma race. […] Aux jours de la jeune vaillance des âmes, le gazouillement magique appelait les héros aux vocations les plus hautes.
Malherbe d’un Héros peut vanter les exploits, Racan chanter Philis, les Bergers, & les Bois. […] Que sert à ces Héros ce pompeux appareil Dont ils vont dans la lice éblouir le Soleil Des trésors du Pactole ?
Il a donc fait son canevas d’un fait divers retentissant, dont les héros étaient princes héritiers d’une maison régnante d’Europe. […] Si la caractéristique du roman historique est le respect qu’inspirent ses héros proportionné à leur distance ( major e longinquo reverentia ), Racine, préface de Bajazet, a décisivement observé que « l’éloignement des pays répare en quelque sorte la trop grande proximité des temps ». […] Une très belle anecdote, lentement développée, souligne par l’opposition de ses deux héros l’infranchissable distance de deux civilisations, celle de la mère-patrie et de la colonie : l’aventure se poursuit, sentimentale, de la sous-préfète Clotilde Hardigny, femme d’esprit et de cœur, et du riche interprète arabe, Saïd-bel-hadj-Ali. […] Des aventures, des hommes, des princes, des caractères, des héros, des femmes merveilleuses et d’émotion, des âmes qui s’exaltent et crient et s’acharnent et s’apaisent, du malheur qui s’obstine, et du lyrisme, et du cœur, et des larmes.
Tiré de flancs embrasés, accouché par la foudre qui dévorait sa mère, frappé de démence par une déesse hostile, attaqué par des rois qui reniaient sa divinité, aux prises avec des géants et des monstres, déchiré par les Titans, d’après d’autres mythes, il avait affronté tous les périls, surmonté toutes les épreuves d’un héros souffrant. […] Les héros envahissent le royaume tragique, ils y revendiquent leur droit et leur place, lis ne détrônent pas le dieu qui le gouverne, mais, ce sont eux qui vont le remplir et l’agiter sous son nom. […] Le héros tragique paraissait à travers l’élément lyrique qui submergeait encore sa personne, comme un nageur qui passe sa tête au-dessus des flots. […] Derrière le décor, comme au bord de la fosse de l’Odyssée, les dieux et les héros, « les vieillards qui ont subi beaucoup de maux, les tendres vierges ayant un deuil dans l’âme, les guerriers aux armes sanglantes », attendent, « avec un frémissement immense », l’Évocateur suprême qui va les rappeler à la vie sublime.
que le Don Juan de Byron devait parcourir le globe tout entier dans le plan du poète, de même le héros de Gogol devait parcourir l’empire russe ; mais ce n’était pas la main aveugle des circonstances qui le poussait à travers l’empire, c’était une pensée de spéculation. Le héros de Gogol est… il faut bien le dire ! […] Eh bien, ce sont ces âmes, mortes en réalité, mais vivantes sur les registres du fisc, que Tchitchikoff (l’impudent héros de Gogol) achète à qui veut les lui vendre, dans un but facile à comprendre. […] on peut concevoir que, dans un but de moralité supérieure, un génie misanthropique ou indigné prenne un coquin pour héros de son livre et en dévoile l’idéal affreux, comme Vautrin, ou la réalité immensément comique, comme Panurge, mais pour cela il faut savoir individualiser.
Tandis que dans Rome Tacite écrivait l’histoire, que Pline célébrait Trajan, que Quintilien professait l’éloquence, que Martial cultivait la poésie légère, que Stace chantait les héros, et Juvénal, ardent et sombre, poursuivait, avec le glaive de la satire, les crimes des Romains, à l’autre extrémité de l’empire, dans l’Ionie, la Grèce et une partie de l’Asie, les orateurs grecs, qu’on nommait sophistes, jouaient le plus grand rôle, et remplissaient quelquefois de l’admiration de leur nom les villes et les provinces ; ce qui les distinguait, c’était l’art de parler sur-le-champ avec la plus grande facilité. […] Le messager des dieux descend du ciel pour instruire ce héros, et le conduit sur une montagne inaccessible et bordée de précipices. […] Telle est la fin de ce discours qui est adressé à Trajan même, et où l’on reconnaît par tout le héros qu’il a voulu peindre ; on peut dire que c’est une espèce d’éloge allégorique. […] Il chantait les Antonins, comme Achille chantait les héros ; et ce qui était tout à la fois plus difficile et plus grand, il les imitait.
On ne se seroit pas attendu, après cela, que les Entretiens de Phocion, si lumineux & si utiles pour la Morale, fussent devenus la matiere du radotage insipide d’un Héros de Roman. […] Tout son art consiste à altérer les bonnes choses qu’on avoit dites avant elle ; semblables aux Harpies qui vivoient de rapines, & infectoient, en y touchant, les mets servis sur la table des Sages & des Héros.
Ses héros sont concentrés et fixés à n’être qu’un penchant, une attitude, une phrase, un trait de caractère sans lequel ils n’existeraient pas plus qu’un morceau de bois qui cesserait d’être ligneux. […] Micawber est présenté au jeune héros du livre et s’offre à lui fournir une chambre, on voit tout d’abord les habits râpés et la fausse élégance du personnage, sa calvitie, son visage rebondi, son lorgnon, sa canne à glands, son imposant col de chemise. […] Quand ses héros ne sont pas comiques ou n’étonnent pas le lecteur par une perfidie tellement marquée qu’elle force l’attention et, dans une certaine mesure, l’intérêt, Dickens faiblit et échoue dans l’emploi de son art particulier de délinéation conversationnelle. […] Ils exaltent leurs tics, leurs qualités, leurs vertus, leurs ridicules et leur méchanceté ; ils se confessent avec une abondance d’indications, une franchise d’aveux, qui frappent et amusent les plus inattentifs lecteurs, qui compromettent parfois l’effet d’effroi que devraient produire les traîtres, féroces vraiment avec trop d’abandon, qui font verser la vertu des héros et des héroïnes tantôt dans une benoiterie stupide, tantôt dans trop d’humilité. […] Il ne réussit à provoquer chez ses lecteurs aucune part de l’admiration qu’il ressent pour ses vertueux héros et ses gracieuses héroïnes ; les personnages et les scènes où on le sent animé d’indulgence et de plaisir ne sont artistiquement efficaces que quand il met à les décrire quelque malice et quelque douceur, usant ainsi de ce mélange de gaîté et d’attendrissement qui est à proprement parler l’humour, tel que Stern et Lamb eu ont donné de célèbres exemples.
Le charmant portrait que Voltaire a tracé du héros de Denain dans Le Siècle de Louis XIV est bien plus celui qui nous semble juste, sauf l’indispensable teinte de flatterie, laquelle encore est si transparente qu'elle laisse bien apercevoir les défauts. […] Il n’y dit jamais de mal de lui, mais dans le bien qu’il en raconte, dans ses récits les plus avantageux, il y a tant d’esprit, de gaieté, de bons mots joints à l’action, de belle et vaillante humeur française, il est si bien un héros de notre nation, que ses défauts cessent d’y déplaire. […] De même s’il avait un peu de romanesque dans l’humeur, il le devait sans doute à son père, à qui sa belle mine et ses airs de héros de roman avaient valu dans la société le surnom d’Orondate. Cet Orondate ou Oroondate est le principal héros du roman de Cassandre, de La Calprenède. […] De tous ces vœux, le plus en dehors et le plus flamboyant est celui de Villars, mais il l’a exprimé ce jour-là comme un héros de Corneille.
Car je n’accepte pas pour mon compte, et je ne crois pas que les gens de la Libre-Pensée qui ont toujours fait de Mme Sand une espèce d’héroïne intellectuelle, acceptent, pour le leur, ses déclarations du moment… très peu héroïques. […] Il y a du démodé aussi dans les premiers héros et les premières héroïnes de Mme Sand, comme il y en a dans les héros et les héroïnes de Mme de Montolieu ou de Mme Riccoboni.
Il a ajouté : — Je te conterai les guerres des héros, les exploits de tes ancêtres et tes prouesses plus grandes que les leurs. […] Ô mes frères en prostitution, saluons nos trois héros : Saint Paul qui adresse aux Romains et aux Corinthiens de sublimes épîtres, mais qui se refuse aux simonies, qui ne vit ni de l’autel ni de la parole, qui, pour avoir à manger, tisse des tentes ; — saint Spinoza qui compose la plus logique ou creuse la plus profonde des philosophies, mais qui, ayant besoin chaque jour de quelques grains de gruau pour soutenir son corps ascétique, ne veut pas les obtenir comme professeur, méprise les chaires offertes et polit des verres de lunette ; — saint Tolstoï, le plus noble génie de notre temps, qui donne ses livres libérateurs et ne se reconnaît le droit de dîner que lorsqu’il a raccommodé une paire de souliers. […] Je n’ai pas le courage de monter jusqu’au fier sommet où siègent les trois héros.
Les héros de romans sont francs, généreux, civils, modestes, galants, intrépides jusqu’à la folie ; les héros d’Homère sont fanfarons, traîtres, cruels, grossiers, gourmands, et quelquefois même poltrons ; cependant l’Iliade d’Homère est un chef-d’œuvre adoré de tous les siècles et de toutes les nations. […] C’est sur les héros de La Calprenède que nos poètes ont calqué leurs personnages tragiques, et les héros d’Homère ont servi de modèle à ceux de Sophocle et d’Euripide. […] Cependant Mithridate est par lui-même plus fier, plus imposant que les anciens héros de la Grèce. […] un héros qui ne s’occupe pas d’amour et de mariage, au moment où il faut partir pour la guerre ! […] Quel bonheur pour notre littérature que Racine, au lieu d’un héros grec, nous ait offert dans Achille un chevalier français !
Qu’y rencontreront-ils comme héros ? […] Il en possédait désormais les héros. […] Ne vous hâtez pas autant de faire mourir vos héroïnes. […] Daudet n’a pas osé pousser jusque-là sa triste héroïne. […] L’héroïne d’Une Vie manquée a fait un triste mariage.
A ce trou, Lemierre substitua un bûcher véritable sur lequel montait son héroïne ; on courut à la pièce avec fureur. […] Plusieurs ne sont que d’agréables héros de roman ; on les voit volontiers une fois, mais on n’a pas envie de les revoir. […] Dans Voltaire l’anachronisme est souvent tout le caractère de ses héros. […] Il survit au malheur, à la vieillesse ; les derniers actes de Louis XIV sont d’un héros, les dernières lueurs du génie de Corneille sont des vers sublimes. […] La simplicité des héros de Corneille me rappelle celle de César dans ses Mémoires.
C’est elle qui est en train de nier l’héroïsme et les héros, posant en principe, par la plume de tous ses petits polissons, « qu’il n’y a plus de héros dans l’humanité », et que tous les lâches et les plats de la médiocrité les valent et sont même mille fois plus intéressants qu’eux. […] C’est un de ces plats de la médiocrité qu’il a choisi pour son héros. […] Moreau, c’est le nom d’un héros et d’un poète. Dans sa haine pour l’héroïsme et dans son amour pour la vulgarité, il n’aurait pas dû donner au drôle de son livre un nom porté par ce qu’il y a de plus beau parmi les hommes, un poète et un héros ! […] Et, en effet, Bouvard et Pécuchet, les deux héros du roman, sont des bourgeois qui n’ont pas en eux de quoi faire plus rire que messieurs leurs ancêtres, à qui Sieyès disait : « Vous étiez à genoux, mettez-vous debout !
« Le monde tout entier dépend des héros. […] Quand nous aurons constitué un univers de héros, dans les poudroyantes et riches fresques, dans les groupes de marbre taillés pesamment, dans les strophes dialogiques et apologétiques, dans les molles et hautes harmonies, il n’y aura plus qu’à le rendre vivant. […] Avant de vouloir former des héros, devenons donc tels nous-mêmes. […] Et peut-être aurons-nous la joie de voir naître un jour la race de héros dont sans nul doute auparavant, nos statues auront incarné les traits pompeux, dont nos poèmes auront chanté les magnifiques destinées, dont nos tableaux auront contenu les proportions implacables et dont nos hautes symphonies auront développé la vivante rêverie.
Gobineau, qui pense, et avec juste raison, qu’on ne peut plus s’intéresser à l’histoire de la décrépitude et de l’avilissement continu des peuples actuels, et que le seul intérêt et le seul mérite appartiennent à quelques individualités supérieures, — étoiles (pour parler son langage) pointant encore dans un firmament dévas té, — nous a fait un livre à plusieurs héros, dont il a décrit les passions et développé les caractères. […] Je parle de l’intérét qui vient de l’ensemble du livre ; je ne parle pas de l’intérêt spécial, individuel, détaché de chaque histoire de ce Décameron d’histoires, quoique cet intérêt-là l’auteur l’ait bien dispersé en l’étendant à plusieurs héros placés tous au même plan, en un parallélisme qui leur fait tort les uns aux autres, dans ce livre sans perspective, sans hiérarchie, sans unité ; car toute hiérarchie bien faite s’achève et se couronne par l’unité, tout ce qui n’est pas unitaire dans les œuvres ou les institutions des hommes, tout ce qui s’y rencontre de multiple étant anarchique en plus ou en moins. Dans ce livre, à oligarchie de héros, de Gobineau, tous les héros ne sont pas des chevaliers Grandisson ou des Washington, — ce chevalier Grandisson de l’histoire, — mais s’ils ne sont pas tous des perfections absolues, au moins ils y sont des distinctions très grandes.
Mirbeau à qui le livre est dédié, c’est-à-dire satirique), Héros d’Afrique de Ch. […] Trop froids ou d’une énergie trop haute nous paraissaient des héros de Mme Gautier, descendants directs des créations de Chateaubriand. […] -Henry Hirsch, le premier qui fait revivre Salomé dans le décor breton est plein de contraste saisissant de la légende et du réalisme, le second qui procède ouvertement par symboles : la petite Antge représente la campagne hollandaise, simple, pure, Loyé Gladys, la cité d’Amsterdam, la volupté fausse et perverse ; le héros, partagé entre ces héroïnes revient à la simplicité. […] Boylesve présentait ses héros à la façon de Balzac et qu’on les voyait trop bien pour les oublier. […] Lorsque Bourget fait parler ses héros, il nous explique selon la méthode psychologique, par des déductions les paroles prononcées.
Il lisait aussi, comme avait fait Henri IV, le Plutarque d’Amiot, et s’enflammait pour les héros grecs et romains ; Épaminondas et Scipion étaient ses modèles. […] pour nous, et cependant qui peut être estimée pour son regard, et selon le monde, heureuse. » Et il explique en quoi et en quel sens (un peu païen et antique) cette mort fatale est heureuse pour le héros, une mort sans appréhension, sans douleur, commune à plusieurs grands personnages du passé, et qui laisse l’imagination rêver un avenir de gloire plus grand encore que ce qu’il avait obtenu. […] Rohan sera, à sa manière, un héros, mais un héros empêché, qui aura un fardeau à porter sur les épaules : on dirait qu’il s’y plaît encore plus qu’il ne s’y résigne ; il aime la peine. […] Il y a la famille des guerriers brillants, favorisés, des héros heureux : Rohan n’en est pas.
La première de ces épopées est le livre des héros, la seconde est le livre de l’homme. […] s’écrie Ménélas en soupirant avec force, ils osent aspirer, ces lâches insensés, à reposer dans la couche du héros ! […] Il écarte, en leur lançant des pierres, les chiens, et dit au héros : « Ô vieillard ! […] Alors, dans une écuelle de racine de lierre, préparant du vin aussi doux que le miel, il s’assied en face du héros et lui dit : Mangez ! […] Si vous m’accusez de faiblesse, accusez donc Homère et ses héros ; ne sont-ils pas aussi femmes que moi ?
Goulu, pour avoir fait quelques mauvais vers & donné quelques traductions qu’on ne lit point, se croyoit un personnage digne d’entrer en lice avec le héros de la littérature. […] L’aggresseur de Balzac en avoit fait un pigmée, & son apologiste en fit un héros hors de nature. […] Ils l’appelloient gouffre d’érudition, Hercule gaulois, destructeur du tyran de l’éloquence, héros véritable & seul digne des lauriers arrachés à l’usurpateur.
Mais que donnez-vous aux héros des sereines épopées et des majestueuses tragédies ? […] Enfin de tous ces héros de tragédie ou d’épopée il n’en est pas un qui à son heure ne lui communique un austère et religieux enseignement. […] » Le héros du poëme est un voyageur, il a, pour je ne sais quelle mystérieuse et sublime aventure, entrepris l’ascension des Alpes aux redoutables escarpements.
Il est étonné que son héros, avec si peu de forces, ait tenté une guerre si importante : « Assurément, lui dit-il, vous avez quelque intelligence secrète avec l’âme universelle et divine, qui daigne se manifester à vous seul, tandis que nous, ce sont des dieux subalternes et du second ordre qui sont chargés de nous conduire. » Ensuite il ne peut comprendre qu’il se soit trouvé dans l’univers des hommes qui aient eu l’audace de résister à Constantin : « Eux qui auraient dû, lui dit-il, céder, je ne dis pas à la présence de votre divinité, mais en entendant seulement prononcer votre nom. » Bientôt après, ce lâche orateur fait un crime à son héros d’avoir combattu lui-même, et de s’être mêlé au milieu des ennemis, d’avoir par là, dit-il, presque causé la ruine de l’univers. […] Après cela, le panégyriste peint son héros qui vole sur les bords du Rhin pour combattre les Francs nos aïeux, et il le loue très sérieusement de ce que vainqueur, il a fait servir le carnage des vaincus aux amusements de Rome, de ce qu’il a embelli de leur sang la pompe des spectacles et donné le délicieux plaisir de voir dévorer par les bêtes une multitude innombrable de prisonniers ; de manière que ces malheureux en expirant, dit-il, souffraient encore plus des outrages de leurs vainqueurs, que des morsures des bêtes féroces et de la mort même. » Dans quels siècles de férocité et de bassesse de tels panégyriques ont-ils été écrits ?
— Caractère du squire. — Les héros de Fielding. — Amélia. […] Rien d’insipide comme un héros édifiant. […] Mon héros est l’homme qui naît généreux, comme le chien naît affectueux, et comme le cheval naît brave. […] Pareillement Sterne écrit quatre volumes pour raconter la naissance de son héros. […] C’est tout le contraire pour les héroïnes de George Sand.
Des rondes de bergers tournant sur les collines imitaient les évolutions des étoiles ; la Gnossienne, attribuée à Thésée, retraçait par l’ondoiement de ses cercles, les dédales du labyrinthe affronté par le héros athénien ; la Pyrrhique frappait de l’épée le bouclier du combat ; des chœurs figuraient les noces de Zeus et d’Héra, la victoire d’Apollon sur le Dragon pythien, les combats et les exploits des Dioscures. […] Le passé qui redevient le présent, des fantômes reprenant leurs corps, des légendes immémoriales revenant du fond des siècles, sur le premier plan de la vie ; des hommes quelconques, connus et coudoyés tout à l’heure, transformés par le revêtement d’un costume, par l’ascension de quelques gradins, en dieux visibles, en héros ressuscités et palpables, et le faisant croire aux yeux autant qu’à l’esprit !
Mais il en est résulté, dans le caractère du héros, quelque incohérence, et, dans la donnée même du drame, quelque incertitude. […] Est-ce à cause de cela qu’on en a fait le héros de notre légende ? […] Quant au héros, sans doute anonyme dans les récits italiens, il reçut le nom de Tannhäuser, pour les raisons que j’ai essayé d’indiquer plus haut. […] Ils ont cela de commun que des paroles dites par le héros du récit au Christ sont reprises par celui-ci et deviennent le texte même de sa sentence. […] Pour nous, il nous intéresse surtout comme un document vivant sur la légende dont il a prétendu se faire le héros.
En général, on imitait les vêtements autant, ou plus que les passions de ses héros. […] Il a renoncé à l’appareil de la terreur ; mais ses héros sont toujours attristés. […] « Les héros à la Marlinski, a dit M. […] Hassan, son héros, est un sceptique, un blasé. […] Vous vous préoccupez des rêves creux de votre héroïne.
C’était les soldats de la grande armée amusant les soirées des chaumières par les contes soldatesques de l’incendie de Moskou ; chaque cause avait ses héros et ses désastres. […] Il y fut fusillé en 1795, sans doute comme un complice tardif des ennemis de la Convention ; il mourut en héros, ne témoignant d’autres regrets que de laisser son sang inutile à son roi toujours fugitif, et la gloire de son aïeule encore incomplète. […] Le premier s’appelait Lygdamon : il raconte en vers délicieux que dans un combat, où il allait périr, un héros se présente, renverse ses ennemis et le sauve ; que ce héros blessé, qui est une femme, répand des flots de son sang, puis disparaît emporté par les siens aux murs de Venise, où il va la rejoindre et l’épouser. […] En 1495, près de sa mort, elle ravive sa verve héroïque et elle adresse au Rhône ces strophes où revivent sa fidélité et son adoration pour Charles VIII, son roi et son héros. […] Rousseau des Évangiles dans le Vicaire savoyard j’y crois, car l’invention en serait plus merveilleuse que le héros.
Taine (et nous pouvons nous en rapporter là-dessus à sa conscience d’historien, qui est difficile et exigeante) a évidemment lu tout ce que les contemporains ont écrit sur son héros. […] Je crains, en y réfléchissant, qu’il ne place son héros d’abord un peu trop au-dessus, puis un peu trop au-dessous — ou en dehors — de l’humanité. […] Taine fait son héros un peu trop inhumain, ne lui laisse pas un seul bon sentiment. […] Mais le poète nous avertit lui-même que ses héros conservent intégralement, dans leur premier paradis, leur qualité d’hommes. […] Sully-Prudhomme n’a nullement voulu dénaturer et diviniser ses héros dans cette première étape d’outre-tombe.
Ceux qui ont pris parti pour l’ode, et qui lui donnent le premier rang dans la poësie, s’imaginent qu’elle ne doit chanter que les loüanges des dieux et des héros ; et ils tirent de ces sujets mêmes à quoi ils la bornent, une preuve de sa dignité. […] Mais comme leur mérite trop borné et trop uniforme, ne fournissoit pas de lui-même assez d’étenduë au discours, il se jetta souvent à l’écart sur la loüange des héros, dont prétendoient descendre les siens, et sur celle des dieux qui protégeoient, ou qui avoient fondé la ville d’où ils étoient. […] Les siennes roulent indifféremment sur les loüanges des dieux et des héros, sur la galanterie, la table, la morale, et même la satyre. […] Il dit dans sa premiére ode que sa lyre ne veut chanter que les amours, et il raconte que, quoiqu’il l’eût remontée de cordes nouvelles pour chanter les actions des héros, elle ne rendoit cependant que d’amoureux accords. […] Pour donner une idée de Pindare avec moins de risque d’ennuyer, j’ai substitué des héros de nos jours aux vainqueurs des jeux olympiques, et la flûte que nous connoissons, à celle que décrit Pindare, et qui n’est plus en usage.
Ceci donc ne plut guère à messire Jean de Clermont de ce qu’il vît porter sa devise à messire Jean Chandos… De là les grosses paroles des deux héros qui en viendraient aux coups, n’était la trêve, et qui se donnent rendez-vous au lendemain. […] Cette figure de messire Jacques d’Audelée, nous le verrons, est digne en tout d’un Homère chrétien ; c’est comme un héros du Tasse. […] Cette idée de transfuge n’entraînait pas toujours déshonneur dans les idées du temps, et le chevalier de Morbecque, de Saint-Omer, racontant son histoire au roi Jean et comme quoi il a dû quitter le royaume de France par suite d’un homicide qu’il a eu le malheur de commettre dans sa jeunesse, ressemble à ces héros d’Homère qui racontent sans embarras comment ils ont été obligés de quitter leur pays pour avoir tué un homme par imprudence. […] Le prince de Galles fait aussi demander des nouvelles du brave chevalier Jacques d’Audelée, le héros de la journée : « De messire James d’Audelée, est-il nul qui en sache rien ? […] Ce messire Jacques d’Audelée est une figure de héros modeste, pieux et humain.
Sur cette misérable scène de l’Hôtel de Bourgogne, à la maigre lueur des chandelles, le contraste de la réalité signifiée et de l’image figurée était trop fort ; on remarqua que la forêt était un arbre, la mer un bassin : on s’étonna que l’Allemagne et le Danemark, ou même la place Royale et les Tuileries ne fussent séparés que par quelques toises, et qu’en une heure le héros eût vieilli de trente ans. […] Ce n’est pas tout : le Cid pose cette loi, que le héros tragique fait sa destinée par les déterminations de sa volonté : il ne reçoit pas l’impulsion du dehors ; le hasard et l’accident sont exclus (en principe) de l’intrigue tragique. […] Il pose encore cette loi que le héros n’est pas un Espagnol, un Français, mais simplement et plus, un homme. […] Mais aussi bien que le Cid de l’histoire, que le Cid toujours barbare du Poème ou de la Chronique Rimée, et que le Cid chevaleresque des romances, Corneille a refusé d’évoquer le Cid de Guillen de Castro, héros national, presque saint, mais beau cavalier et serviteur des dames, hidalgo tueur de Mores et diseur de pointes : il n’a gardé du caractère local de l’action et du héros, que ce qui était indispensable à la réalisation des sentiments généraux.
Cela sent un reste de mauvais goût natif et de grossièreté septentrionale, et l’on a pu dire, avec une juste sévérité, des lettres de Frédéric : « Il y a de fortes et grandes pensées, mais tout à côté il se voit des taches de bière et de tabac sur ces pages de Marc Aurèle. » Frédéric, qui avait du moins le respect des héros, a dit : « Depuis le pieux Énée, depuis les croisades de saint Louis, nous ne voyons dans l’histoire aucun exemple de héros dévots. » Dévots, c’est possible, en prenant le mot dans le sens étroit ; mais religieux, on peut dire que les héros l’ont presque tous été ; et Jean Muller, l’illustre historien, qui appréciait si bien les mérites et les grandes qualités de Frédéric, a eu raison de conclure sur lui en ces mots : « Il ne manquait à Frédéric que le plus haut degré de culture, la religion, qui accomplit l’humanité et humanise toute grandeur18. » Je ne veux plus parler aujourd’hui que de Frédéric historien. […] Il a pour les héros un attrait visible ; il ne parle qu’avec respect et avec un instinct de haute fraternité, des Gustave-Adolphe, des Marlborough, des Eugène ; mais il ne se méprend pas à la grandeur, et n’en prodigue pas le mot : la reine Christine, avec son abdication par caprice, ne lui paraît que bizarre ; le duel de Charles XII et de Pierre le Grand à Poltava lui paraît celui des deux hommes les plus singuliers de leur siècle. […] Ce héros goguenard est l’ami le plus tendre et le plus fidèle, et l’on sait que sa passion pour son pays était telle, qu’il se privait de tout pour avoir de quoi soulager les misères de ses sujets ou doter la Prusse d’institutions utiles. » 18.
Le héros des Mémoires est le chevalier, depuis comte de Grammont, l’homme le plus à la mode de son temps, l’idéal du courtisan français à une époque où la Cour était tout, le type de ce personnage léger, brillant, souple, alerte, infatigable, réparant toutes les fautes et les folies par un coup d’épée ou par un bon mot : notre siècle en a vu encore de beaux restes dans le vicomte Alexandre de Ségur et le comte Louis de Narbonne. […] Pour être le héros du récit d’Hamilton, il n’en est bien souvent que le prétexte. […] On sent d’abord combien les idées morales ont changé en ces matières, pour que, même en plaisantant, l’historien puisse faire honneur au héros de ce qui intéresse si fort la probité. […] Quand son héros passe à la cour d’Angleterre, la manière de l’historien change un peu ; on entre dans une série de portraits et dans une complication d’aventures où l’on a quelque peine d’abord à se démêler.
Dans ce grand entrepôt du commerce de la Méditerranée et de l’Orient, un peuple si vaniteux16, avide de superstitions nouvelles, imbu du préjugé de son antiquité prodigieuse et des vastes conquêtes de ses rois, ignorant enfin que les autres nations païennes avaient pu, sans rien savoir l’une de l’autre, concevoir des idées uniformes sur les dieux et sur les héros, ce peuple, dis-je, ne put s’empêcher de croire que tous les dieux des navigateurs qui venaient commercer chez lui, étaient d’origine égyptienne. […] Je parle de deux vérités historiques, dont l’une nous a été conservée par Hérodote : 1º Ils divisaient tout le temps antérieurement écoulé en trois âges, âge des dieux, âge des héros, âge des hommes ; 2º pendant ces trois âges, trois langues correspondantes se parlèrent, langue hiéroglyphique ou sacrée, langue symbolique ou héroïque, langue vulgaire, celle dans laquelle les hommes expriment par des signes convenus les besoins ordinaires de la vie. […] ne voit-on pas dans Homère un Conseil des héros, βουλή, où l’on délibérait de vive voix sur les lois, et un Conseil du peuple, ἀγορά, où on les publiait de la même manière. […] Les héros investis du triple caractère de chefs des peuples, de guerriers et de prêtres, furent désignés dans la Grèce par le nom d’Héraclides, ou enfants d’Hercule ; dans la Crète, dans l’Italie et dans l’Asie mineure, par celui de Curètes (quirites, de l’inusité quir, quiris, lance).
M. de Valincour, avec son tact fin, fut le premier à le sentir ; il démêla à travers l’effusion de Villars une certaine adresse peut-être et une intention de gloire, l’ambittion « d’être le seul académicien que la postérité vît représenter à côté de Richelieu et de Louis XIV. » M. de Valincour se réserva donc, le jour où l’Académie reçut le portrait du maréchal, d’offrir pour sa part à la compagnie ceux de Despréaux et de Racine, et, sans faire tort au héros, l’égalité académique, la dignité des Lettres fut maintenue15. […] Voltaire lui avait adressé une pièce de vers pour s’excuser de ne pouvoir aller à Villars au printemps de 1722 ; sa mauvaise santé l’avait engagé à se mettre dans les remèdes, entre les mains d’un empirique appelé Vinache : Je me flattais de l’espérance D’aller goûter quelque repos Dans votre maison de plaisance ; Mais Vinache a ma confiance, Et j’ai donné la préférence Sur le plus grand de nos héros Au plus grand charlatan de France. […] Un dernier bonheur de Villars, c’est d’avoir inspiré une des dernières bonnes oraisons funèbres : celle que prononça l’abbé Seguy, à Saint-Sulpice, sans échapper aux inconvénients du genre, est remarquable du moins par un bel exorde d’un nombre et d’une pompe bien appropriés au héros.
II Le nom attaché à cette édition des Philippiques fait écho à une gloire si militaire et si chrétienne qu’il est impossible de ne pas le remarquer, et qu’on se demande si ce de Lescure est un descendant du pieux héros de la Vendée. […] Tout le monde n’est pas bâti pour faire un héros et même le métier n’en vaut rien, au point de vue des aises et des tranquillités de l’existence, mais il y a des gens pourtant qui se sentent faits pour cette mauvaise vie des héros.
Les réfugiés, impies et sans dieu, obéissaient à des hommes pieux, qui adoraient la divinité, bien qu’ils la divisassent par leur ignorance, et qu’ils se figurassent les dieux d’après la variété de leurs manières de voir ; étrangers à la pudeur, ils obéissaient à des hommes qui se contentaient pour toute leur vie d’une compagne que leur avait donnée la religion ; faibles et jusque-là errants au hasard, ils obéissaient à des hommes prudents qui cherchaient à connaître par les auspices la volonté des dieux, à des héros qui domptaient la terre par leurs travaux, tuaient les bêtes farouches, et secouraient le faible en danger. […] Par elle les nobles régnaient sur les plébéiens, dont les unions n’étaient pas ainsi consacrées. — Au gouvernement théocratique où les dieux gouvernaient les familles par les auspices, succéda le gouvernement héroïque où les héros régnaient eux-mêmes, et dont la base principale fut la religion, privilège du corps des pères qui leur assurait celui de tous les droits civils. […] Si donc, comme le dit Aristote, de bonnes lois sont des volontés sans passion, en d’autres termes, des volontés dignes du sage, du héros de la morale qui commande aux passions, c’est dans les républiques populaires que naquit la philosophie ; la nature même de ces républiques conduisait la philosophie à former le sage, et dans ce but à chercher la vérité.
Un pareil enthousiasme devoit nécessairement conduire à des bévues : c’est pourquoi le Louangeur épistolaire, après avoir comparé son Héros à trois anciens Géometres, dont les connoissances ont été infiniment surpassées par leurs successeurs, Songe que tu rends à la France Diophante, Hipparque & Proclus. […] Ce n’est certainement pas pour avoir fait celui qui termine un Quatrain à la louange du Maréchal de Saxe, où le Poëte Géometre, après avoir mis en pieces deux Héros de l’antiquité, César & Scipion, dit que Maurice eut pour sa part, La tête du premier, & le bras du second.
Désormeaux auroit dû éviter, est une affectation trop sensible dans les louanges qu’il donne à ses Héros, une application trop marquée à passer légérement sur les foiblesses & les fautes dont ils n’ont pas été exempts. […] C’est par ces éclipses sagement présentées, qu’on instruit les autres hommes, sans nuire à la gloire des Héros qui les ont éprouvées.
Les héros de M. […] Bourget, et je ne sais rien de plus émouvant que le combat qui se livre dans les âmes honnêtes de ses héros. […] » Un héros pourtant. […] de Tacite ; mais ce cri était ici poussé par des héros. […] Le cadavre d’un voleur peut usurper, durant des années, par suite d’une erreur des antiquaires, les honneurs dus aux héros !
Une femme disoit un jour d’une tragédie, qu’elle lui paroissoit belle, et qu’elle n’y trouvoit qu’une chose à reprendre ; c’est qu’il y avoit trop de héros. […] La plûpart de nos héros s’exagerent leur propre importance, ils sont toûjours leurs premiers panégiristes, et il semble qu’ils ne fassent rien de grand que pour le dire. […] Et cependant tous nos héros de théatre sont atteints de cette espece d’égarement. […] Non, lui répondit-on, cela même y devroit nuire : les héros des tragédies nous ressembleroient trop. […] Nous croirions voir des héros de nos jours ; et autant de rabattu sur l’admiration.
Comment imaginer un faisceau plus serré d’influences que celles qui présidèrent à la conception d’Antoine Arnault, le héros de la Domination ? […] … Je voudrais évoquer ici un souvenir de ma première jeunesse, dont la principale image se rattache d’invincible façon à l’héroïne de Mme Henri de Régnier. […] Il me devenait impossible de me représenter l’héroïne d’Esclave sous d’autres traits que ceux de mon apparition vénitienne. […] La seule excuse de Mme Henri de Régnier est d’avoir étendu à son héroïne l’empreinte dont elle n’hésite pas à marquer son héros. […] Que seront-ils pour l’héroïne elle-même ?
Encore moins a-t-il songé à nous attacher par le charme et la variété des aventures, à nous intéresser à son héros. Son roman est d’une monotonie systématique ; son héros est le moins intéressant des hommes. […] Si, au lieu de prendre son héros si bas, M. […] Mais, assurément, le héros de M. […] » Nous en dirons autant, pour unir, non pas seulement de l’héroïne, mais du livre.
C’est que le poète travaille dans sa province, conçoit et exécute dans la retraite ses œuvres de conscience et d’émotion ; cela est bon pour la tragédie, pour le drame historique : « Les héros de l’histoire, a dit M. Nisard, peuvent venir d’eux-mêmes visiter le poète dans sa province ; mais les héros de la comédie ne sont pas si commodes ; il faut les aller chercher de sa personne au milieu du monde et à Paris, où se trouvent les plus illustres. » On ne saurait mieux penser ni mieux dire, et avec plus de piquant.
L’Oraison funebre de M. de Turenne peut être regardée comme un chef-d’œuvre, par la maniere dont les différentes qualités du Héros sont développées, & par la chaleur du style, la beauté des traits qui s’y succedent sans appareil, sans gêne, comme la vraie peinture de chaque objet. […] Avec un Livre à la main, vous êtes transporté dans des siéges & dans des batailles ; c’est l’Orateur qui vous charme, & vous n’êtes occupé que du Héros ; c’est Fléchier qui parle, & vous ne voyez que le grand Turenne ; l’Art cache l’Orateur, & ne montre que le grand Capitaine ou le grand Magistrat ».
La seconde nature fut héroïque ; les héros se l’attribuaient eux-mêmes, comme un privilège de leur divine origine. Rapportant tout à l’action des dieux, ils se tenaient pour fils de Jupiter ; c’est-à-dire pour engendrés sous les auspices de Jupiter, et ce n’était pas sans raison, qu’ils se regardaient comme supérieurs par cette noblesse naturelle à ceux qui pour échapper aux querelles sans cesse renouvelées par la promiscuité infâme de l’état bestial se réfugiaient dans leurs asiles, et qui, arrivant sans religion, sans dieux, étaient regardés par les héros comme de vils animaux.
Le genre a fait son entrée dans la personne de son héros le plus légitime et le plus brillant, le maréchal de Richelieu. […] L’auteur s’est conduit bravement, il est entré in medias res, comme on dit ; il s’est jeté là comme son héros à Port-Mahon. […] Quant au chevalier, c’est un frère d’Antony et de tous ces sombres héros modernes de la scène et du roman ; il a dès l’abord une vraie mine funèbre, un langage d’après Werther ; le duc de Richelieu et lui ne sont pas du tout contemporains.
Un personnage providentiel est là pour intervenir sans cesse en faveur des amants ; ainsi qu’il sied, d’ailleurs, il est lui-même amoureux de l’héroïne, mais comme il est laid et comme son amour est sans espoir, il ne cherche qu’à faire le bonheur de celle qui ne le comprend pas. […] Cela même eût mieux valu : l’auteur n’eut pas été tenté de défigurer, en un médiocre récit, l’étonnante Histoire comique des États et Empires de la Lune, et n’eût pas commis les interminables plaisanteries sur le nez de son héros. […] Ce fut une vision de jeunesse et de tendresse sous la rose lumière de la lune, et Sylvette et Percinet avaient comme des aspects de héros échappés de la forêt de Shakespeare, avec leurs caracos de satin et leurs habits de soie : Roméo écolier et Juliette colombinette.
Alors vraiment nous portons en nous le héros de Plutarque, notre Alexandre, si jamais nous le portons. Plus tard on survit trop souvent à son héros. […] On dirait d’une héroïne de Jean-Jacques telles qu’il aimait à les placer dans le pays de Vaud, une Claire d’Orbe qui raille avec innocence. […] La jeune héroïne, que j’ai comparée plus haut à un personnage de la Nouvelle Héloïse, était devenue très-semblable à quelque amante de Corneille quand elle songeait au vertueux et sensible absent. […] Sa vie déborde, elle se compare à un lion en cage : elle devait naître femme spartiate ou romaine, ou du moins homme français ; osons citer son vœu réalisé depuis par des héroïnes célèbres : « Viens donc à Paris, écrit-elle à la douce et pieuse Sophie ; rien ne vaut ce séjour où les sciences, les arts, les grands hommes, les ressources de toute espèce pour l’esprit, se réunissent à l’envi.
Nous allons représenter l’Œdipe de Voltaire, dans lequel je ferai le héros de théâtre ; j’ai choisi le rôle de Philoctète ; il faut bien se contenter de quelque chose… M. de Suhm, qui l’a compris, et qui lit, à travers cette indifférence soi-disant philosophique, le regret et le tourment d’une âme amoureuse des grandes choses, lui va toucher la fibre secrète et le rassure en lui disant : La réflexion que vous faites, Monseigneur, sur le bonheur qu’il y a à venir à propos dans le monde est des plus justes, et serait très propre à consoler le héros (le prince d’Anhalt) dont Votre Altesse Royale a une si haute opinion, si à ses qualités guerrières il savait joindre votre philosophie, Monseigneur. Pour ce qui est de mon héros, je n’en suis pas en peine. […] Il persiste à repousser toute comparaison, tout point de contact avec les héros, avec les conquérants ; il en est presque là-dessus aux lieux communs de la philosophie : Si les qualités du cœur peuvent entrer dans la composition d’un héros, si la fidélité et l’humanité peuvent tenir lieu de cette fureur brutale et souvent barbare des conquérants ; si le discernement et le choix des honnêtes gens peut être préféré au vaste génie de ceux qui conçoivent les plus grands desseins ; si enfin les bonnes intentions et la douceur sont préférables à l’activité de ces hommes remuants qui semblent être nés pour bouleverser tout le monde ; alors, et à ces conditions, je puis entrer en compromis avec eux.
Quelques détails biographiques sur le général Hugo et sur son fils aîné, Abel, diminueront peut-être l’admiration des hugolâtres pour le génie machiavélique de leur héros ; mais permettront au psychologue de s’expliquer comment tant de diplomatie pouvait se loger dans un si jeune cerveau. […] D’autres hugolâtres, panégyristes maladroits, prenant au sérieux les déclarations de dévouement et de désintéressement du poète, le représentent comme un héros d’abnégation ; — ils le dépouillent de son prestige bourgeois, par simplicité. […] Le poète était digne d’un tel sacrifice : Hugo fut en effet un héros de la phrase. […] Pièce de vers Sur le bonheur de l’Étude, envoyé au concours de poésie de 1817 : tout lui devenait occasion pour outrager son héros. […] On ne saurait trop en recommander la lecture aux Hugolâtres qui désirent connaître intimement leur héros.
Rendre hommage aux héros de Mostaganem, de Milianah ou de Constantine ! […] Ponsard en fut le héros, et Lucrèce le signal. […] Rodolphe, son véritable héros, rappelle à M. […] Un héros, et, qui pis est, un poëte contemporain. […] Et les héros de cette troupe comique dont il fut la fortune et la gloire !
— Changeons de carrière : Combien faut-il de Hoche, de Desaix, de Joubert, de ces héros moissonnés avant l’heure pour rehausser et grandir encore le général en chef consommé, qui conçoit, qui combine avec génie, qui dirige et résout, après se les être posés, les plus grands problèmes de son art ? […] Et cette prophétie encore du plus sensible des poètes : « Jeune héros, si tu parviens à rompre le destin contraire, tu seras Marcellus ! […] Joubert a été l’un des héros de ces combats. […] On n’est pas plus héros et plus sceptique à la fois. — Et arrivé à Trente, après avoir réussi : Je me livre à la fortune, mais je m’en défie ; et si la chance est favorable, je m’en défierai plus encore et rechercherai les postes secondaires que vous prétendez que je ne dois plus accepter.
On l’a vu quelquefois personnifié dans un héros puissant sur l’imagination des peuples. […] Vous n’avez pas oublié le poëte de Thèbes préludant pour le roi de Syracuse : « Hymnes qui régnez sur la lyre, quel dieu ou quel héros allons-nous célébrer ? […] Il semble presque se jouer de tout ce qu’il invoque : « Quel homme, ou quel héros, ou quel dieu choisis-tu de célébrer, ô Clio, sur la lyre ou sur la flûte guerrière ? […] Parfois Horace est plus ouvertement flatteur, et il ose célébrer Octave comme le héros de Rome.
Bref, l’Étrangère aime Arthur et le repousse ; Izolette délaissée pleure et dépérit : quant au noble héros, il s’élève par tous les degrés de la démence aux plus horribles crimes, et finit par mourir suicide. […] La scène est au commencement du treizième siècle, notez l’époque ; et, quand il veut peindre son héroïne, il ne trouve d’autres images que celles d’Hélène, de Vénus, de Galatée et d’Eurydice ; Philippe-Auguste est l’Alcide français, l’Apollon de Lutèce.
Didon s’occupe encore des travaux de sa cité naissante : la tempête s’élève et apporte un héros. […] Ensuite, avec l’adresse d’une femme, et d’une femme amoureuse, elle rappelle tour à tour le souvenir de Pygmalion et celui de Iarbe, afin de réveiller ou la générosité ou la jalousie du héros troyen.
Ces sentiments sont ennemis de la dissimulation, et n’excluent point la générosité ; elle devait admirer Achille, le héros de la force. […] La Grèce devait alors admirer Ulysse, le héros de la sagesse.
82, Ulysse, personnage épique, ou tout au plus personnage dramatique du second ordre, ne pouvait être le héros d’une tragédie ; il a trop de finesse pour cela. […] A Télémaque lui-même qui s’étonne de tant de prudence, Ulysse a besoin de dire : Peut-être tu sauras, par l’exemple d’un père, Que parfois au héros la feinte est nécessaire ; Qu’elle est vertu souvent, et qu’avec le danger La forme du courage est sujette à changer83. […] Au commencement du troisième acte, Ulysse inconnu, et qui se donne pour un simple compagnon du héros, y parle ainsi indirectement de lui-même à son fils : Il se peignait souvent ces rivages chéris, Où l’attendaient en vain Pénélope et son fils. […] Je me tiens à l’héroïne de la tradition et de l’illusion ; je me borne au point de vue français et de 1820 encore ; je me reporte à la première représentation, à l’une des cinquante premières. […] ) On me cite encore la funèbre apostrophe que voici, tirée de la première scène de Rubena par le poëte portugais Gil Vicente, de la fin du xve siècle : c’est l’héroïne qui, dans les transes étouffées d’un enfantement mortel, s’écrie : « Sombres et tristes nuées qui passez si rapides, oh !
M. de Chateaubriand n’a pas cessé cependant de se présenter très franchement au monde, après la Restauration accomplie, comme le type invariable et le héros accompli de la légitimité ! […] XVIII Quoi qu’il en fût, M. de Marcellus, par esprit littéraire, et par esprit sérieusement chrétien, se mit à parcourir la Grèce nouvelle et l’Albanie, ni littéraire ni chrétienne, mais tour à tour, et selon le goût des Albanais, chrétienne ou mahométane comme son héros Scanderbeg, pour y chercher un nouvel Homère. […] Et, puisque vous êtes en Grèce, n’en croyez sur leurs héros ou leurs héroïnes que les Grecs. » Là-dessus, nous nous quittâmes, et le lendemain je le rejoignis chez le Beyzadé Nicolaki Morusi. […] Je ne vous ferai pas néanmoins remonter plus haut que l’arrière-grand-père de notre héros. […] Legouvé, un de nos plus charmants poètes, en a écrit une infiniment supérieure, pour que la belle tragédienne, madame Ristori, épanchât en italien de Montanelli les plaintes de l’héroïne si dévouée et si abandonnée.
Le Cyrus et tous ces romans et tragédies dont les héros ont l’air d’être assidus à Versailles, ont d’abord le tort de ne peindre que des manières et des modes. […] Que Lamotte a tort de se plaindre qu’Homère ait fait ses héros grossiers ou brutaux ! […] — Enfin sur tous les héros de la légende et de l’histoire j’ai une idée ; mon voisin du parterre ou des loges en a une aussi, plus ou moins nette : et de toutes ces idées particulières se compose une opinion moyenne qui détermine les caractères, et que le poète doit éviter de choquer directement. […] Et puis, ne conviendrons-nous pas qu’un héros poétique fait mieux de s’appeler Rodrigue que Manco-Capac ? […] Voilà donc les limites du genre comique ; il exclut les héros et le peuple, les larmes et la bouffonnerie.
Ses héros osent tout tenter, quitte à s’arrêter en chemin ; ses héroïnes osent tout penser, quitte souvent à ne rien exécuter. […] Les héros et les héroïnes de M. […] C’est l’histoire de l’héroïne de M. […] Tous les lecteurs connaissent les noms de ses héros et surtout de ses héroïnes, Mme de Palme, Marguerite Laroque, Sibylle de Férias. […] Enfin l’héroïne de Gustave Flaubert est très supérieure en intérêt à l’héroïne de Daudet.
En tout cas, la correspondance de Vittoria Savorelli a fourni à Tolla Feraldi, l’héroïne de M. […] Remarquez que le héros et l’héroïne du livre ne se repentent pas ; ils regrettent leurs illusions perdues. […] Chaque grande tragédie a son chœur qui environne le héros de la pièce. […] Raoul de Chalys, le héros du livre avec Sibylle, est entre le réel et l’idéal. […] Ce n’est pas précisément la faute du critique, c’est la faute du poète, qui ne fait paraître son héroïne — triste héroïne !
Une héroïne comme Élisabeth cesse de s’appartenir. […] Le héros de M. […] Je ne le chicanerai pas sur le caractère de son héroïne. […] Tel est le héros de M. […] Parlons net : il se solidarise avec son héros.
D’abord la condition des personnages : ce ne sont que princes et princesses, rois et empereurs, à moins que ce ne soient des héros légendaires à qui leur mystérieux éloignement prête je ne sais quelle vaporeuse grandeur. […] Henri IV, le Béarnais sceptique et narquois, l’adroit politique qui changeait de religion comme on change d’habits, l’homme qui appelait cela « faire le saut périlleux » et calculait que « Paris vaut bien une messe », a été par Voltaire transfiguré, je dirais presque défiguré, en héros dont la gravité ne se dément pas une minute. […] Faut-il rappeler ces traductions qu’on appelait « les belles infidèles » ; la Bible pomponnée, attifée, presque enrubannée ; les formules superbes prêtées aux orateurs des républiques antiques : Messieurs les Athéniens, j’ai l’honneur de vous proposer telle mesure. ; les hommes des siècles passés, qu’ils s’appelassent Achille ou Pharamond, dotés de cette majesté dont Louis XIV ne se départait pas, « même en jouant au billard » ; tel poète d’autrefois, à commencer par Homère, honni par les uns, parce qu’il a manqué aux convenances, en mettant aux prises des héros qui se traitent de cœur de cerf et d’œil de chien, défendu par les autres, au nombre desquels est Boileau, sous prétexte que le mot âne, trivial en français, est parfaitement noble en grec. […] Que ce paisible amoureux ressemble peu aux héros de notre théâtre contemporain, qui ferraillent si volontiers avec les femmes à fleuret démoucheté ! […] Puis, à force de plier ses héros aux règles d’une courtoisie raffinée, elle les a maintes fois affadis et faussés.
Ma remarque pourra paraître minutieuse, mais ce n’est pas une petite chose pour un poète de savoir donner à son héroïne un nom qui aille à son caractère comme une guirlande à son front. « S’il te naît une fille, — disent les livres sacrés de l’Inde, — donne-lui un nom doux, facile à prononcer, et qui résonne harmonieusement à l’oreille. » Molière, Shakespeare, et tous les grands poètes ont suivi, sans le savoir, le conseil des brahmes ; Shakespeare surtout, qui, pour parer ses filles de prédilection, va cueillir on ne sait où, dans la lune, sur les nuées, des noms inouïs, éthérés, célestes, des auréoles de pudeur, des étoiles de couronnement. […] Le héros du livre, séduit un moment par la fortune, revenait bien vite demander à la pauvreté ses inspirations et ses rêves ; il se pervertit dans la pièce ; il s’endurcit, il se déshonore ; et vous allez voir dans quels excès et dans quelles ignominies vraiment incroyables il va s’enfoncer. […] Heureusement que le drame s’indigne à son tour, et qu’il élève enfin la voix pour maudire et exécrer son triste héros. […] Et où était donc la nécessité d’avilir à ce point votre misérable héros ? […] Il a l’âme d’un ange et la tenue d’un rapin de soixante-cinquième ordre en goguette ; il se conduit comme un héros et il se présente comme un bohémien.
À la fin de Louis XIII et au commencement de Louis XIV, ce type et ce modèle s’était principalement formé d’après les héros et les héroïnes de Corneille et aussi d’après ceux de Mlle de Scudéry. […] Quand elle revint peu après à Paris, tout le peuple sortit à sa rencontre ; elle était l’héroïne du moment. […] Vous avez été bien aise de faire l’héroïne, et que l’on vous ait dit que vous l’étiez de notre parti ; que vous l’aviez sauvé deux fois. […] Je ne sais ce que c’est que d’être héroïne : je suis d’une naissance à ne jamais rien faire que de grand et d’élevé.
Je vis avec de bonnes gens en les lisant ; dès que ce sont des romans de mœurs, les auteurs y peignent les mœurs de leur temps, et non celles du temps où vivait le héros. […] J’aime ces auteurs qui me décrivent les usages de leur temps, peu soucieux, il est vrai, du temps où vécut leur héros.
. — Héros et Pierrots (1898). […] Dans la première partie de son recueil des Héros et Pierrots, il s’enferme dans la tour d’ivoire de ses pensées, et nous donne des poésies grandes, belles, d’une ligne impeccable, dans lesquelles il chante les passions les plus hautes, mais aussi les plus personnelles.
Pierre Quillard M. de Bouhélier a le droit d’écrire, sans nous suggérer d’ironie, « Dieu et le brin de paille », parce que rien ne s’offre à lui que sous les espèces du pathétique ; il sait fort bien reconnaître dans le paysan qui jette le blé au sillon une manière de héros, et telles pages, Le Départ après les moissons, indiquent simplement et sûrement la très ancienne tragédie des adieux sans retour. […] Mais son ivresse est d’un lettré farci de littérature — s’il était le strict « naturiste » qu’il dit, à quoi bon transposer en des livres son émotion — et il n’est pas sans charme de retrouver en lui, par les réminiscences qui s’y font jour, un culte tacite et éclectique pour les poètes et les penseurs les plus divers ; Denis Diderot, Michelet et Hugo lui enseignèrent à construire les phrases désordonnées seulement en apparence ; Emerson et Carlyle inspirèrent son louable amour pour les paysans et les héros ; il n’ignore ni le Barrès du Jardin de Bérénice, ni le Taine de la Littérature anglaise, et quand il écrit : « Des liserons sonnent et un coq luit » ou qu’il appelle les abeilles « les petites splendeurs des campagnes », je ne sais pas oublier les métaphores chères au magnifique Saint-Pol-Roux.
Jérôme et Jean Tharaud prennent leur triste héros tout petit. […] ou l’épopée n’est-elle pas la soumission d’une époque à son héros ? […] Et nous pensons à cet autre héros, Achille, loin de l’armée. […] Le héros de cette confession, — ai-je tort ? […] … Seulement, le héros, aux mains de Dieu, m’échappe.
Tallemant des Réaux, qui reste dans la mémoire comme un conteur rabelaisien d’anecdotes crues et drolatiques, a porté dans les ruelles le nom d’Astibel, un héros de roman galant, et il a fourni sa fleur à la guirlande de Julie. […] Je crois que le Cid, coupable de célébrer un héros espagnol, eût fort risqué d’être arrêté au passage, si Richelieu eût été aussi ombrageux que l’Empereur. […] Il compose une pièce dont Charles VI est le héros. […] Le drame n’ose pas s’abaisser à la vie et au langage de tous les jours ; il reste historique et empanaché ; il parle en vers ; ses héros sont des grands de la terre ou des hommes à passions et à destinées extraordinaires, toujours des êtres d’exception ; la basse condition d’un Ruy Blas ou d’un Didier est voilée d’un manteau tissé d’images éclatantes. […] On voyait se reproduire dans un siècle se croyant éclairé l’admiration fanatique qui avait grandi démesurément la figure de Charlemagne et avait fait de l’illustre empereur le héros de tant d’aventures fabuleuses.
Comment on peut tirer, de ces caractères de l’épopée proprement dite, une division de son histoire. — Elle a dû débuter par les chansons du Cycle du roi, c’est-à-dire dont Charlemagne est le héros [Ex. la Chanson de Roland] ; — auxquelles ont succédé les chansons du Cycle de Garin de Montglane [Ex. la Chanson d’Aliscans] dont les héros sont les continuateurs de la lutte du grand Empereur contre le Sarrasin ; — et à celles-ci les chansons du Cycle féodal [Ex. Renaud de Montauban], dont les héros sont les barons en révolte contre une royauté qui ne remplit plus son office. — Coïncidence notable des chansons de ce dernier cycle avec le recul de l’Islam. — Le même temps doit être aussi celui des chansons qui nous montrent les nationalités intérieures en lutte les unes contre les autres [Ex. la Chanson de Garin le Loherain] ; — et celui des poèmes généalogiques [Ex. Les Enfances Guillaume], qui ont pour objet est de donner aux héros une origine et des débuts dont les merveilles s’accordent avec la grandeur de leurs exploits. — Comparaison des poèmes de ce genre avec les poèmes cycliques de la poésie grecque ; — et avec les « généalogies » sémitiques. — Que nos dernières Chansons de geste sont déjà, dans le vrai sens du mot, des épopées littéraires ; — non moins artificielles qu’en d’autres temps une Henriade ou une Pétréide ; — mais que l’inspiration vraiment sincère se retrouve, en même temps que la cause reparaît, dans les chansons qui forment le Cycle de la Croisade [Ex. la Chanson du Chevalier au Cygne]. C’est presque aussitôt après que l’histoire proprement dite se dégage de l’épopée. — Geoffroi de Villehardouin et La Conquête de Constantinople, 1210-1215 ; — conditions « épiques » de l’événement, et allure « épique » du récit ; — comparaison à cet égard de l’évolution de l’épopée française et de celle de l’épopée grecque : — l’auteur de la Conquête de Constantinople est à l’auteur de la Chanson de Roland ce qu’Hérodote est à Homère. — Il serait plus arbitraire de prétendre retrouver le caractère « épique » dans la Vie de saint Louis, du sire de Joinville, 1275 ; — et cependant, si saint Louis en est le héros, ne peut-on pas dire que l’hagiographie est la véritable épopée chrétienne ? […] 2º Moralités, Farces et Soties. — Que l’examen des Moralités confirme les observations précédentes sur la « littérature allégorique », directement et indirectement : — directement, si les moralités ne sont qu’une forme de cette littérature : — par la nature des personnages qui en sont les héros : Mal-Avisé, Bien-Avisé, Rébellion, Malefin, etc. ; — par l’intention de « moraliser » dont leur seul nom témoigne ; — et par ce qu’elles contiennent de satire enveloppée. — Les mêmes observations sont indirectement confirmées : — par la supériorité des Farces sur les Moralités ; — et par la nature de cette supériorité, — qui consiste essentiellement en ce que les personnages n’y sont point des allégories, — mais des personnages réels.
Il ne donne pas les femmes de la Révolution, mais quelques héroïnes, quelques femmes plus ou moins célèbres… Il dit telles vertus éclatantes, et il tait un monde de sacrifices obscurs d’autant plus méritants que la gloire ne les soutint pas. » Mais pourquoi ce remords tardif ? […] Nous en avons nommé les héroïnes ; mais ce qui dépasse infiniment l’admiration et le culte que M. […] Les Femmes chrétiennes, les Héroïnes historiques du Christianisme, mises en regard des Héroïnes de la Révolution, c’était là un spectacle et c’était là une leçon ! […] Nous l’avions cru, et il nous eût été doux de rendre compte d’un tel ouvrage ; il nous eût été doux de démontrer la différence qu’il y a entre les héroïnes de la foi en Dieu et les héroïnes de la foi en soi-même, car, malgré l’éternelle mêlée des systèmes et le fourré des événements, il n’y a que cela dans le monde, le parti de Dieu ou le parti de l’homme, et il faut choisir ! […] Les héroïnes de M.
On y aura un tableau vivant et animé, non des faits d’une nation policée, puissante, belliqueuse, qui se borne à former des politiques, des héros, des conquérants, mais des actions d’un peuple savant, qui tendent à former des sages, des doctes, de bons citoyens, de fidèles sujets. […] On a, dans ce recueil de fables et de récits dont le Renard est le héros, un assemblage de bien des types et des personnages qui ont couru depuis sous d’autres noms. […] Ce qui est certain, c’est que la vieille langue française du Nord, elle aussi, possède, dès le xiie et le xiiie siècle, toutes sortes de récits en vers, dont le Renard est le sujet et le héros. […] Ulysse et le Cyclope peuvent donner idée de l’antagonisme ; mais Ulysse, même dans ses fourberies, est un héros, et le Renard ne l’est jamais.
Ce pauvre Don Quichotte, répétant les exploits des anciens chevaliers avec une si parfaite bonne foi et une candeur si unique, donne jour à une telle variété de rencontres et d’aventures, — l’écuyer Sancho, dès la seconde sortie, accompagne et double si grotesquement son maître, avec ce perpétuel contraste de demi-bon sens et de demi-bêtise qui ne feront que s’accroître et se solidifier en avançant, — l’auteur, par des stations ménagées à propos, sait si naturellement entremêler d’autres récits et nous intéresser, chemin faisant, par les côtés passionnés et romanesques de notre nature, — il profite si justement et avec une si légitime hardiesse des instants lucides de son héros qui n’extravague que sur un point, pour le faire noblement et fermement discourir des matières que lui-même avait le plus à cœur de traiter, — tout cet ensemble vit, marche, se déduit si aisément, d’un cours si large, si abondant, et avec une telle richesse de développements imprévus et d’embranchements inépuisables, qu’on est bien réellement en plein monde, en plein spectacle, en plein air sous le ciel, qu’on nage dans un courant de curiosité humaine de tous côtés excitée et satisfaite, et que rien ne sent ni ne rappelle l’application critique et satirique née dans le cabinet. […] Cette seconde partie de Don Quichotte, qui déroule les faits et gestes du héros depuis sa troisième sortie, et où s’accomplit l’incomparable mystification de Sancho, soi-disant gouverneur de Barataria, est plus méditée, plus réfléchie que la première, et sans prétendre rien ôter à la grâce de celle-ci ni à sa charmante légèreté, elle la fortifie, la mûrit et la couronne admirablement. […] Certes, dans la conduite et les déportements de son Don Quichotte, de ce fou à idée fixe, Cervantes a observé suffisamment le vraisemblable, et on lui accorde, en le lisant, cette singulière et perpétuelle intermittence, chez son héros, cette coexistence bizarre d’hallucination et de raison. […] Ce qu’il y a de plus certain en tout ceci, c’est que Cervantes avait beaucoup vu, qu’il avait probablement observé des aliénés, et qu’avec le tact de l’artiste, encore plus qu’avec le tact médical, il a présenté la folie de son héros du côté le plus plausible et le plus acceptable, de manière à entraîner son lecteur. — Mais qu’il est donc difficile de garder la juste mesure dans l’admiration comme dans la critique, et quel ingrat métier que celui qui consiste à venir sans cesse dire gare à tout excès, à vouloir toujours remettre le cavalier d’aplomb sur sa monture !