« J’entends déjà les gens de bon sens et de bonne foi s’écrier : “Ah ! […] L’avez-vous entendu rire ? […] Mais il s’agit de s’entendre, et c’est ici que vont commencer les difficultés. […] Vous me direz que je ne l’entends pas parce qu’il est trop haut. […] J’entends bien ; théoriquement, je suis très intéressé.
L’haleine nous manquait ; nous entendions notre cœur battre dans notre gorge et des moiteurs glacées nous baignaient les tempes. […] Il fallait entendre avec quel accent de galanterie, surannée à dessein et remontant aux délicatesses du bon vieux temps, il disait ces mots. […] Maquet a prouvé qu’il entendait le théâtre. […] Ces bœufs verront du rouge et entendront des vers d’Hugo. […] Il nous semblait même entendre encore la rumeur de la première représentation.
Mais, entendons-nous. […] Il s’entend mieux à ébranler notre intelligence qu’à toucher notre cœur. […] J’entends le couvre-feu qui sonne à la chapelle des Carmélites. […] Le « moi » est haïssable, c’est entendu, Pascal l’a dit. […] Ainsi, c’est entendu.
Et quel bonheur d’entendre, à son bras suspendue, La lointaine chanson tant de fois entendue ! […] ils laissent entendre, à demi-voix, que La Calprenède et Scudéry ne sont pas à mépriser. […] Et cette vie du théâtre, telle que l’entendaient les contemporains de Scarron ! […] Ceci, bien entendu, n’ôte rien au mérite du livre de M. […] Sa bouche ne s’ouvrait que pour faire entendre les naïvetés les plus aimables.
Une préface, non-seulement érudite, mais philosophique, d’un ordre élevé, y met en lumière les divers systèmes des anciens sur le principe du droit, et témoigne d’un esprit devenu maître en ces questions, et qui s’entend avec Chrysippe comme avec Kant. […] Pasquier peuvent bien apprécier tout ce qu’on apprend à les voir et à les entendre, et que la théorie moderne ne supplée pas. […] Durant les dernières années, quand il entendait prodiguer l’appellation devenue banale, M. […] Le dernier mot d’Abélard mourant qu’on entend à peine, est : Je ne sais. […] Pour bien entendre l’allusion, il faut se rappeler la devise royaliste du Conservateur et de la Monarchie selon la Charte.
J’ai entendu des curieux stupéfaits, n’apercevant que le cadre qui entoure ces glaces, se demander ce que faisait là ce cadre magnifique, car ils n’avaient pas aperçu le verre. […] Il n’y a pas un coup de fusil sur les remparts de Gênes qu’on n’entende retentir à travers ce demi-siècle. […] C’était, en un mot, un ambassadeur accompli, mais point un ministre dirigeant ; bien entendu qu’on ne prend ici cette expression que dans son acception la plus élevée. […] Elle avait déjà entendu les frères du premier Consul prononcer le mot fatal de divorce. […] Fouché, elle avait pris ce dernier en gré, parce que, tout jacobin qu’il était, disait-elle, il osait faire entendre la vérité au premier Consul, et, à ses yeux, faire entendre la vérité au premier Consul, c’était lui conseiller la conservation de la République, sauf à augmenter son pouvoir consulaire.
J’entends dire autour de moi : Voilà une belle femme ! […] Mes sœurs s’amusaient et criaient ; j’entendais leur lointain tapage comme un accompagnement à mes idées. […] D’abord j’essayai de me mettre à mon aise dans mon fauteuil, puis je reconnus les avantages de ma position en me laissant aller au charme d’entendre la voix de la comtesse. […] ” et avait raison, tandis que je n’entendais rien encore, moi dont l’ouïe possède une remarquable étendue. […] Quand cessa le rêve où m’avait plongé la longue contemplation de mon idole, et pendant lequel un domestique vint et lui parla, je l’entendis causant du comte.
J’aurai voulu aussi lui demander, dans La Puissance des ténèbres, quand Nitika assis sur la planche fait craquer les os de l’enfant, et que l’on entend piauler le petit écrasé, s’il croyait que la pièce aurait été plus loin, si Tolstoï était Français, et s’il croyait encore, que les trois actes de Mademoiselle Julie auraient été joués, si Strindberg était Français. […] Ce soir, comme je dînais au restaurant Voisin, j’entendais le Bordelais Marquessac, le propriétaire actuel du restaurant, dire à des clients, à propos de la chaleur de cette année, que les vendanges qui se font dans son pays, en octobre, allaient se faire à la mi-août. […] Mardi 8 août Les impatiences des animaux, n’ayant pas le langage pour se faire entendre des humains, sont curieuses. […] Puis, c’est son vol à Buenos-Ayres, où les huit hommes qui s’étaient constitués ses gardiens, ont été si bien ensommeillés, qu’ils n’ont rien entendu, qu’elle, il a fallu la jeter en bas de son lit, pour la réveiller, et que son chien a dormi trois grands jours. […] Dans un coin, le vieux Rosny parle de Napoléon, et de temps en temps, à une phrase brillante prononcée par lui, se retourne pour voir, si elle a été entendue de la chambrée.
Cela me vexe, à la fin, d’entendre pareille énormité redite à tous les coins de rue : et je suis ravi de l’occasion que m’offre l’Ermitage d’exprimer là-dessus ma pensée. […] Détaillons : Musset charma mon adolescence de 15 à 18 ans ; Lamartine eut son tour et fut remplacé par Vigny (le Vigny des poèmes philosophiques s’entend) ; Mallarmé, première manière, vint ensuite. […] Je préfère Verlaine quand je parcours les rues tristes des faubourgs ou les bois rouillés par l’automne, quand j’entends la pluie chanter aux vitres. […] Je n’en ai pas au sens où vous l’entendez. […] Mais je l’aime surtout parce que, comme l’a très bien dit de Gourmont, il est une force naturelle ; quand je le lis j’ai l’impression d’entendre les vents gronder et chanter dans les ramures d’une forêt éternelle.
Mais ceux qui se sont inclinés de loin devant la parole mystique, parce qu’ils en entendaient au fond d’eux-mêmes le faible écho, ne demeureront pas indifférents à ce qu’elle annonce. […] Il ne s’agit, bien entendu, que de l’Inde antique, seule avec elle-même, avant l’influence qu’a pu exercer sur elle la civilisation occidentale ou le besoin de réagir contre elle. […] Reste à savoir ce que fut cette contemplation elle-même, et quel rapport elle pouvait avoir avec le mysticisme tel que nous l’entendons. […] En attendant cette confirmation, nous avions des résultats que la méthode philosophique, telle que nous l’entendons, nous autorisait à tenir pour vrais. […] Il est évident qu’ils entendent par là une énergie sans bornes assignables, une puissance de créer et d’aimer qui passe toute imagination.
L’autre entend par liberté la participation des citoyens non fonctionnaires au fonctionnement de l’administration du pays. […] Il entend les voix qui protestent. […] « N’entendez-vous pas la terre qui crie et demande du sang ? […] Il y entend comme un appel. […] Pour s’y mettre, il faudrait s’entendre ; et s’entendre, c’est être en état social depuis des siècles.
Magendie, Robiquet, de Blainville, entendre des lectures littéraires, etc. […] Quand on dit que j'ai assisté aux prédications de la rue Taitbout, qu’entend-on par là ? […] Sainte-Beuve dans les derniers mois, dînait quelquefois avec lui, et l’on aimait toujours à entendre cette parole éloquente et convaincue. […] Sainte-Beuve lui ont entendu raconter l’épisode suivant des absurdes et à jamais odieuses journées, où l’on ne savait plus pourquoi on tirait des coups de fusil dans la rue. […] Tout d’un coup une fusillade est dirigée contre la façade même du palais Mazarine ; les vitres volent en éclats ; on n’a que le temps de rouler le fauteuil de M. de Feletz entre deux fenêtres, puis l’on n’entend plus rien.
Ballanche avait envoyé son livre, lui écrivait une lettre qui ne lui parvint pas, mais c’était aussi en un sens plus que pathétique et poétique, en un sens théosophique, qu’il avait entendu Antigone. […] Pourtant, les passions exaspérées en divers sens ne l’entendaient pas ainsi, et la guérison sociale au moyen de la Charte en était très-compromise. […] Ballanche un philosophe non didactique, qui nous introduit à travers des enceintes compliquées et par détours gracieux ou obscurs jusqu’à un sanctuaire profond : le poëme d’Antigone est comme une symphonie attrayante que nous avons entendue au parvis. […] Ballanche parle de la légitimité dans l’Essai, il s’agit, non point du droit divin tel qu’on l’entend vulgairement, mais d’une légitimité historique que nul publiciste spiritualiste ne conteste aujourd’hui. […] Ballanche, au chapitre xi de l’Essai, parlait, il est vrai, d’éliminer dorénavant le latin de la première éducation, et ce qu’il avançait à ce propos est assurément contestable, dans les termes surtout dont il usait ; mais il n’entendait aucunement abolir cette langue catholique.
Minerve donne les mains à l’expédient de Junon : « Je n’entends rien, dit-elle, à tous ces traits ni à tous ces foments de l’amour ; mais puisque le moyen te paraît bon, j’y consens, et je suis prête à te suivre : seulement ce sera à toi de porter la parole. » Les deux déesses s’envolent aussitôt et arrivent au palais bâti à Vénus par son boiteux époux. […] a-t-elle entendu quelque menace d’Éétès contre Chalciope et ses enfants ? […] Pour trouver des monologues dignes d’être comparés à ceux que son héroïne nous fait entendre, il faut revenir à Didon. […] On n’entendait plus le hurlement des chiens à travers la ville, ni aucun bruit de loin retentissant : le silence occupait l’obscurité tout entière. […] Certes, certes, son cœur se brisa souvent lorsqu’elle croyait entendre courir tout auprès un bruit de pas ou le bruit du vent111.
Nous allons vous en traduire quelques stances ; elles sont du nombre de celles que Thérésina elle-même pouvait entendre sans que la délicate pudeur de sa mère s’en alarmât pour son enfant. […] Pendant le combat, elle prend la fuite ; Odorie abandonne le combat, la poursuit, l’atteint, veut lui faire violence ; elle pousse des cris qui sont entendus par une bande de brigands, qui la retiennent captive depuis neuf mois dans cette caverne pour la vendre ensuite aux pirates de la côte. […] La lune l’exauce, le nuage qui la couvrait se dissipe ; Médor court en pleurant à l’endroit où gît Dardinel ; il le reconnaît à ses armes, il s’agenouille, il baigne son visage inanimé de ses larmes amères, dont un double ruisseau coulait sous ses cils ; son attitude était si pieuse, ses gémissements si tendres, que les vents eux-mêmes se seraient arrêtés pour les entendre. Il les réprime toutefois, non pas par crainte d’être entendu des ennemis et par aucun soin de sa propre vie, dont il lui serait plus doux d’être délivré, mais par peur qu’on ne l’empêche d’accomplir l’œuvre pieuse pour laquelle il s’est dévoué. […] Mais il est bien entendu que vous n’interviendrez en aucune façon dans la question politique et dans les affaires intérieures du gouvernement romain.
II Mais, avant de feuilleter avec vous Platon, disons ce que nous entendons ici par philosophie. […] C’est là ce que nous entendons, dans cet Entretien, par ce mot « philosophie ». […] Je succombe pour n’avoir pas voulu vous dire les choses que vous aimez à entendre. […] Au contraire, Échécratès, cet ami me paraissait heureux, à le voir et à l’entendre, tant il mourut avec assurance et dignité ! […] « — J’entends, dit Socrate ; mais au moins il est permis et il est juste de faire ses prières aux dieux, afin qu’ils bénissent notre voyage et le rendent heureux ; c’est ce que je leur demande ; puissent-ils exaucer mes vœux !
On dirait qu’on écoute aux portes du ciel et qu’on entend les chuchotements de l’esprit à travers le grand murmure des sphères. […] Souvent j’éprouve un grand ennui à force de lire et d’entendre ; en vous est tout ce que je désire, tout ce que je veux. […] Heureuse l’âme qui entend le Seigneur lui parler intérieurement, et qui reçoit de sa bouche la parole de consolation ! […] et ferme la porte de tes sens, afin que tu puisses entendre ce que le Seigneur ton Dieu dit en toi. […] Ceux-là entendent ce que l’esprit de vérité dit en eux.
Pour Victor Hugo, ce génie lyrique par essence, à l’inspiration large toujours, sinon toujours mesurée, les choses prenaient vie et âme : il croyait les entendre tour à tour, ou mieux encore toutes ensemble, et il a fait de son œuvre un chœur immense, puissant parfois jusqu’à assourdir, duquel se dégage, comme une voix d’airain retentissante et prophétique, la voix même de la nature, telle qu’elle a résonné au cœur du poète. […] » un mot hardi que les cieux qui vieillissent Avec étonnement entendent prononcer, Et qu’osent répéter des lèvres qui pâlissent Et qui vont se glacer. […] Puis le poète entre dans une église, au mois de Marie, et il entend le sermon d’un prêtre : Je l’entendis longtemps parler d’une voix dure, Mêlant son dogme trouble à la morale pure Et, dans son rêve noir et respirant l’effroi, Jetant les mots d’amour, d’espérance et de foi, Pareil à l’orateur qui, sous le drapeau rouge, Parlait aux malheureux réunis dans le bouge De progrès, de bonheur et de fraternité. […] Nous voyons là, comme dans un brusque rayon, ce qu’il y a de folie et de hideur à être privé de la sagesse ; et nous y voyons aussi que, comme le Christ nous le donne à entendre, le royaume de Dieu n’est autre que la sagesse, qu’il n’est ni un lieu ni une chose visible, mais l’attribut du sage : — Le royaume de Dieu est au dedans de vous » (page 576). — Il y a des livres, selon Joubert, dont l’effet naturel est « de paraître pire qu’ils ne sont, comme l’effet inévitable de quelques autres est de paraître meilleurs qu’eux-mêmes ; » le livre des Blasphèmes réunit les deux effets : il ne mérite d’être placé ni si haut, ni si bas. […] Je poursuivais le monstre sans me laisser effrayer ni attendrir, et c’est ainsi que je l’ai frappé jusque dans ses avatars les plus subtils ou les plus séduisants, j’entends le concept de cause, la foi dans une loi, l’apothéose de la science, la religion du progrès. » Honte aussi à ces « faux matérialistes qui honorent la vertu !
En vain Klopstock présenta à Frédéric, en vers sublimes, l’apologie de la muse germanique : le grand roi ne comprit pas le loyal patriote ; mais l’Allemagne l’entendit. […] Entre les écoles qui se battent depuis des siècles dans cette arène de disputes sans fin qu’on appelle la métaphysique, et le public de notre temps, qui confesse ne rien entendre à ces débats et ne pouvoir s’y intéresser, qui a tort et qui a raison ? […] Par là il ne faudrait pas entendre une critique de tel ou tel système. […] Nous proclamons hautement notre entière adhésion à ces vues simples et fécondes qui dérivent de la méthode d’observation bien entendue. […] Si par métaphysique on entend une disposition naturelle de l’esprit humain à se poser et à résoudre un certain nombre de problèmes, on doit répondre assurément que la métaphysique est possible, puisqu’elle est ; mais, selon Kant, tous les systèmes nés de cette disposition naturelle sont tellement défectueux et si peu satisfaisans, qu’il n’est pas permis de leur donner le nom de science ; de sorte que si par métaphysique on entend non pas une disposition naturelle, mais une vraie science, on est forcé de répondre que la métaphysique n’est pas.
» Venait ensuite l’hymne des chérubins, cri populaire et prolongé dont retentissait l’église, pieuse extase d’une foule fidèle qui semblait imiter et croyait entendre le concert même des cieux saluant le Créateur. […] La prose seule de saint Jérôme, cette prose latine d’un Dalmate naturalisé en Orient, cette prose savante encore, mais qui est comme forcée et emportée par la violence du souffle qu’elle voudrait contenir, nous étonne davantage et nous fait croire par moment que nous entendons la voix du Psalmiste interdite à notre ignorance. […] Je croirais entendre, non l’hymne triomphal d’un martyr, mais la voix solennelle du prêtre consécrateur. […] Nous entendons encore retentir dans notre mémoire quelques vers harmonieux d’Horace sur la primauté de Jupiter par-dessus tous les dieux : Quid prius dicam solitis Parentis Laudibus ? […] Pour Grégoire de Nazianze, et dès lors pour ses disciples, la lecture même de l’Écriture sainte était comme une initiation que devait précéder une prière dont il avait tracé la formule à son usage et à celui des autres : « Entends204 », disait-il avant d’ouvrir l’Évangile, « entends, Père du Christ qui vois tout, mon humble prière ; accorde à ton serviteur la grâce de la parole céleste.
Tous les hommes raffinés d’une époque s’entendent sur l’idée de beauté. […] M’entendez-vous maintenant ? […] Qui, hormis le confesseur ou le médecin, a entendu le gémissement de la femme toujours trompée ? […] Bien entendu que je ne fais aucune allusion à ce libertinage universel que des sociologues déments appellent « l’amour libre ». […] Si le cercle des auditeurs est étroit, la voix est mieux entendue.
cela n’est plus aussi doux maintenant que tout à l’heure. » Entendez-vous cette voix doucement énervée ? […] Un peu d’émasculation bien entendue ne me déplairait point. […] Elle nous fait entendre la voix de l’esprit sans nous dire d’où il vient ni où il va. […] Qu’entendons-nous par là ? […] Leurs fonctions accomplies, ils disparaissent, et nous n’entendons plus parler d’eux.
Mesdames eurent la curiosité de l’entendre ; il sut leur plaire, et elles voulurent prendre des leçons de lui. […] » Elle parut curieuse d’entendre la lecture du pamphlet. […] Leconte de Lisle fait un paysage et un morceau symphonique que l’oeil voit, que l’oreille entend. […] Elle avait un son argentin tellement agréable que le prélat ne pouvait se lasser de l’entendre. […] Un amour bien entendu de soi-même qui produit la vertu, est-ce donc quelque chose de méprisable ?
Mais la question n’a de sens que si l’on suppose que la désordre, entendu comme une absence d’ordre, est possible, ou imaginable, ou concevable. […] Mais il est entendu que je ne puis en rester là. […] Notre oreille n’entend que les mots ; elle ne perçoit donc que des accidents. […] La science, entendue comme le système des concepts, sera plus réelle que la réalité sensible. […] Et quand on dit qu’un mouvement ou tout autre changement a occupé un temps t, on entend par là qu’on a noté un nombre t de correspondances de ce genre.
Mais il avait à peine eu le temps de se manifester que déjà l’on entendit la voix des autres : « Quel est ce charabia ? […] Il entend par leurs oreilles. […] Nous entendons toujours les coups irrésistibles du crucifix rustique que manœuvrait Veuillot. […] Il s’agit, bien entendu, du pamphlet à la française. […] J’ai entendu reprocher à ces récits passionnels leur décousu ; je ne suis point de cet avis.
Je suis tout anéantie devant ces charmantes célébrités, et quand j’entends mon nom sonner après les leurs, Dieu seul sait ce que je deviens dans le tremblement de mon cœur… » Et dans une lettre de Paris du 23 décembre 1837 : « Je ne perds à la solitude que je quitte qu’une sorte de voisinage avec Mme Tastu. […] — « Un jour, il entendit frapper vivement à sa fenêtre et l’ouvrit. […] On a vu de reste toutes ses douces superstitions légendaires et les crédulités qu’elle avait gardées du pays natal ; mais il est un point sur lequel elle ne fléchit pas ; si elle est catholique d’imagination, elle a, si je puis dire, le catholicisme individuel ; elle n’entend y faire intervenir personne ; elle est surtout pour qu’on respecte la paix des mourants, et elle écrit à sa nièce, fille d’Eugénie, de se bien garder d’alarmer sa mère à l’instant suprême : « (5 septembre 1850)… J’attends une lettre avec la plus grande anxiété, et votre silence me jette dans l’effroi. […] Langlais, à Saint-Denis d’Anjou : Mme Valmore y passa quelque temps avec sa fille ; le sentiment de cette vie des champs grasse et nourricière, au milieu des fermiers et des colons , respire et rit au naturel dans ce passage d’une lettre d’Ondine à son frère : « (1851)… Ici on oublie tout ; on se plaint par genre, mais sans amertume ; on dort, on mange, on n’entend point de sonnette. […] Entendez-vous les partisans de Louis-Philippe, ils disent que ce ramas de révoltés était composé de vagabonds, de forçats libérés, engeance dont cette ville abonde.
» — Dans toute la première moitié du dix-huitième siècle, je ne vois dans le Tiers-état que ce seul foyer d’opposition, le Parlement et, autour de lui, pour attiser le feu, le vieil esprit gallican ou janséniste. « La bonne ville de Paris, écrit Barbier en 1733, est janséniste de la tête aux pieds », non seulement les magistrats, les avocats, les professeurs, toute l’élite de la bourgeoisie, « mais encore tout le gros de Paris, hommes, femmes, petits enfants, qui tiennent pour cette doctrine, sans savoir la matière, sans rien entendre aux distinctions et interprétations, par haine contre Rome et les jésuites. […] Ce Contrat social, qui dissout les sociétés, fut le Coran des discoureurs apprêtés de 1789, des jacobins de 1790, des républicains de 1791 et des forcenés les plus atroces… J’ai entendu Marat en 1788 lire et commenter le Contrat social dans les promenades publiques aux applaudissements d’un auditoire enthousiaste. » — La même année, dans la foule immense qui remplit la Grand’Salle du Palais, Lacretelle entend le même livre cité, ses dogmes allégués582 « par des clercs de la Basoche, par de jeunes avocats, par tout le petit peuple lettré qui fourmille de publicistes de nouvelle date ». […] Le chapelain d’un régiment, curé dans le voisinage, ne veut pas en démordre ; quant à savoir ce qu’il entend par là, c’est une autre affaire. […] À quatorze ans, présentée à Mme de Boismorel, elle est blessée d’entendre appeler sa grand’maman « mademoiselle » « Un peu après, dit-elle, je ne pouvais me dissimuler que je valais mieux que Mlle d’Hannaches dont les soixante ans et la généalogie ne lui donnaient pas la faculté de faire une lettre qui eût le sens commun ou qui fût lisible. » — Vers la même époque, elle passe huit jours à Versailles chez une femme de la Dauphine, et dit à sa mère : « Encore quelques jours et je détesterai si fort ces gens-là, que je ne saurai plus que faire de ma haine Quel mal te font-ils donc Sentir l’injustice et contempler à tout moment l’absurdité. » — Au château de Fontenay, invitée à dîner, on la fait manger, elle et sa mère, à l’office, etc En 1818, dans une petite ville du nord, le comte de…, dînant chez un sous-préfet bourgeois et placé à table à côté de la maîtresse de la maison, lui dit en acceptant du potage « Merci, mon cœur ».
Puis il fit quelques visites à Charles X dans son exil, visites qu’il ébruita, au retour, par des sarcasmes ; la pudeur de ses amis les lui fit retrancher de l’impression ; mais je les ai moi-même entendus chez madame Récamier, sa dernière amie, et j’en ai gémi pour l’honneur du cœur humain ; il y flattait les ennemis de tous les trônes par des moqueries domestiques. […] On l’entend pleurer en chantant. […] « Émerveillé d’entendre retentir si mélodieusement la langue antique dans une bouche enfantine, je déposai quelques petites pièces de monnaie dans le panier vide ; et l’écolier, après avoir porté une main à ses lèvres et à son front, s’éloigna en me disant : Que vos années soient nombreuses ! […] « Elle accompagne son chant de sa guitare et fait entendre une voix angélique. […] Mais Manos se lève, se dirige vers quelques tablettes suspendues à la muraille et saisit l’Odyssée. « Écoutez-moi à mon tour, dit-il, et oubliez ce que vous venez d’entendre !
* * * — J’entends un timbre : c’est un bruit net, sec, mécanique, anglican, toujours semblable à lui, qui dit qu’on sonne et non qui sonne : la détente d’un ressort d’acier qui tombe dans le vide de votre attente, de vos espérances. […] Une porte derrière laquelle on entend, pendant plusieurs secondes, des pas avant qu’elle ne s’ouvre. […] * * * — Je suis triste, et j’entends sur le marbre de la servante du salon tomber, une à une, avec un bruit mou et floche — une chute à voix basse — les feuilles d’un gros bouquet de pivoines — et, au-dessus et au-dessous de ma chambre, des éclats de rire de femmes. […] Lavallée nous conte ensuite que Feuillet de Conches a montré l’autre jour, en petit comité, à l’Empereur et à l’Impératrice, des lettres de Marie-Antoinette, et que Feuillet a été tout étonné d’entendre l’Empereur parler. […] J’entendais l’un, un jeune blond, à la tête bonasse, s’écrier en tapant sur sa poitrine : « Ce n’est point une poitrine que j’ai là, c’est un mur !
Les vers scientifiques mal entendus ne sont eux-mêmes que des descriptions de choses ennuyeuses. […] Ce soir, dans le silence de la nuit, j’entends une petite voix qui sort des rideaux blancs du berceau. […] Dans le bois il entendit des pas, Et puis il vit rôder la torche de Judas. […] « Je roule avec dédain, sans voir et sans entendre A côté des fourmis les populations Je ne distingue pas leur terrier de leur cendre, J’ignore en les portant les noms des nations. […] Nous ne pouvons sortir de la réalité, ni nous satisfaire avec elle : « Dieu parle, il faut qu’on lui réponde ; » la vérité nous adresse ainsi un grand appel, destiné à n’être jamais ni complètement entendu, ni tout à fait trahi.
Pour l’instant, on n’entend guère que lui. […] Les temps du naturalisme sont venus ; une voix a été entendue annonçant que le règne des faux dieux était passé et que le grand Pan est mort. […] Ce n’était pas la peine de forger un mot nouveau dans une langue déjà trop riche de mots pour redire ce que tout le monde entendait fort bien. […] J’entends bien ce que l’on nous dit : nous vivons dans une démocratie, et la France est une république. […] Aussi ai-je entendu sans grande émotion la sommation hautaine qui nous a été récemment adressée : « La république sera naturaliste ou elle ne sera pas. » Non, le naturalisme n’est point le jeune officier d’avenir destiné à être bientôt général.
C’est ce qu’avait montré Rœderer, et c’est ce que Victor Cousin a feint de ne pas voir ou de ne pas entendre. […] J’entendrai tout maintenant, j’accepterai tout du prédicateur qui m’a su présenter ainsi son sujet. […] Monsieur, ayez la bonté de m’entendre. […] Si l’on écrit, c’est pour être entendu ; si l’on parle, c’est pour être écouté. […] Voilà comme on entendait alors le sujet.
Pour cela, d’un seul mot, il suffit de s’entendre. […] Les hommes forcés de s’entendre, forcés d’agir harmonieusement ! […] C’est l’office du moraliste et ç’a été fait, bien entendu, très lentement. […] Ainsi l’entend Bossuet, ainsi l’entendent tous ceux qui suivent l’esprit de Bossuet. […] A lire Ballanche, on devait s’entendre.
Ce qui lui fait défaut c’est, bien entendu, le style. […] Lemaître qu’il serait un jour « la vieille bête » : entendons cela en tout bien tout honneur. […] Entendu. […] Cela est musulman, c’est entendu, et l’Islam en a tiré un secret de paix intérieure. […] Une pièce mal faite est une mauvaise pièce, j’entends une mauvaise pièce pour le spectateur.
Il faut des paroles pour penser ses idées, comme il faut des idées pour parler et être entendu. […] Fiévée pour lui expliquer la manière dont l’empereur entend les droits et les devoirs des journaux. […] Il y avait peu de place pour l’histoire dans l’enseignement, on le comprend à la manière dont l’empereur entendait qu’elle fût écrite. […] Je ne puis entendre un clavecin sans me sentir attristé. […] Pendant ce rapide séjour, il a déjà entendu la voix de la poésie ; mais cette voix, trompeuse comme celle de l’écho, l’a appelé vers la tragédie.
Il fallait au nouveau roman un précédent ; un précédent artistique, cela s’entend. […] Maeterlinck, j’entends au seul point de vue dramatique. […] Non que le lyrisme lui manque, mais il l’entend différemment. […] Il nous faut donc en reparler encore… Puisse-t-on nous mieux entendre cette fois ! […] Qu’il le soit devenu depuis, il ne me suffit pas, pour y croire, de l’entendre dire.
J’entends le son des armes et des chars, et des voix et des timbales ; dans les contrées étrangères tes fils combattent. […] Voilà que loin de toi, quand le plus beau de notre âge nous sourit, inconnus du monde entier, nous mourons pour cette nation qui te tue. » — « Et leur plainte, ajoute le poëte, ne fut entendue que du désert boréal et des forêts sifflantes. […] « Mais ta vie était alors avec les astres et avec la mer, audacieux enfant de Ligurie, quand au delà des Colonnes d’Hercule, et par de là les rivages où l’on croyait sur le soir entendre frémir l’onde au plonger du soleil, te confiant aux flots infinis, tu retrouvas le rayon de ce soleil qu’on croyait tombé et le jour qui naît quand pour nous il a disparu. […] Lorsque nouvellement au sein d’un cœur profond Naît un germe d’amour, du même instant, au fond, Chargé d’une fatigue insinuante et tendre Un désir de mourir tout bas se fait entendre. […] Cette veine-là nous plaît moins chez Leopardi ; elle nous est d’ailleurs peu accessible, par la difficulté d’entendre ces sortes d’allusions.
Nul élan, rien de naturel ou de viril ; il n’a pas plus d’idées que de passions, j’entends de ces idées qu’on a besoin d’écrire et pour lesquelles on oublie les mots. […] Remarquez les coups de grosse caisse, j’entends les grands moyens ; on appelle ainsi tout ce que dit un personnage qui veut délirer et ne délire pas ; par exemple, parler aux rocs et aux murailles, prier Abeilard absent de venir, s’imaginer qu’il est présent, apostropher la Grâce, la Vertu, « la fraîche Espérance, riante fille du ciel, et la Foi, notre immortalité anticipée1110 », entendre les morts qui lui parlent, dire aux anges de « préparer leurs bosquets de roses, leurs palmes célestes et leurs fleurs qui ne se flétrissent pas1111. » C’est ici la symphonie finale avec modulation de l’orgue céleste : je suppose qu’en l’écoutant Abeilard a crié bravo. […] Est-ce qu’il est bien agréable de s’entendre dire : « Vous avez les plus beaux yeux du monde, mais vous vivez de fadaises ? […] Évidemment, elle n’était pas difficile ; c’est qu’elle en avait entendu bien d’autres. […] Il se vante « de les avoir tempérés » l’un par l’autre, et d’avoir « navigué contre les extrêmes. » La vérité est qu’il ne les a point entendus, et qu’il mêle à chaque pas des idées disparates.
Son plus grand désir était que je pusse devenir un jour un excellent joueur de flûte ; et mon plus grand chagrin était de lui entendre dire que, si je le voulais, je serais dans cet art le premier homme du monde. […] Il me répétait sans cesse, en me tâtant le pouls, car il s’entendait un peu en médecine, qu’il lui semblait que je ne serais jamais en assez bonne santé pour m’entendre jouer de la flûte ; et, quand mon pouls ne répondait pas à ses désirs, il me quittait en versant des larmes ; si bien qu’un jour, désespéré de son chagrin, je priai une de mes sœurs de m’apporter ma flûte, persuadé que, le jeu de cet instrument étant peu fatigant, je n’en serais pas plus malade. […] Ces paroles furent entendues par Antoine de Saint-Marin, le premier orfèvre de Rome. […] « Il parla ainsi, parce qu’il était devant ces cardinaux qui avaient entendu les paroles hardies de cette dame généreuse. […] J’entendis le capitaine Monaldi qui disait : Malheureux homme !
Mais l’auditeur n’a pas le loisir de se faire répéter une phrase trop compliquée pour être vite entendue ; sa bibliothèque n’est pas là pour lui offrir les vers de tel poète que l’orateur invoque. Peut-être, avec le temps, les pensées parlées germeront dans son esprit : pour l’heure, il veut entendre et voir clairement et instantanément. […] Quand donc nous parlons d’expression humaine de la notion divine, nous entendons une idée analogue à celle que Shelley a radieusement exprimée : Ô terre heureuse, réalité de ciel ! […] Nous pouvons le constater en regardant autour de nous — et c’est un mot que j’emprunte à M. de Goncourt : « L’humanité s’en va des choses », entendons : l’humanité personnelle. […] Toutefois, l’accent religieux de l’art, tel que nous l’entendons, oblige le poète à des fonctions en quelque sorte sacerdotales.
Il n’y avait ni canaux, ni routes, et les loups (j’entends ceux des bois) venaient flairer insolemment le pavé de nos villes. […] Or, si par condottiere il faut bien entendre ce qu’on a entendu toujours, c’est-à-dire un homme qui met sa vie ou sa pensée au service de tous ceux qui peuvent les payer ce qu’il les estime, pourquoi donc n’a-t-on jamais vu Cassagnac au service des partis révolutionnaires, plus populaires et plus puissants que les gouvernements qu’ils ont détruits ? […] Car, lui aussi, comme tout le monde, du reste, trouve son compte d’enseignement et d’humilité dans le récit des événements qu’il raconte, de ces événements qui ont éclaté comme une surprise, et qui n’étaient pourtant qu’une vieille leçon mal entendue qui recommençait. […] Seul en France, peut-être, Granier de Cassagnac, dont la voix porte quand il parle, pouvait dire de ces choses qui n’auraient été perdues pour personne et qu’on eût entendues au-dessus et au-dessous de lui. […] La haine des partis, qui se bouche les yeux pour ne pas voir et les oreilles pour ne pas entendre, l’a-t-elle assez appelé le Bravo de tous les pouvoirs ?
» Traduction : le bûcher. » De même par cette expression d’allure pacifique, alors usitée, la « réunion des religionnaires », il faut entendre le plus souvent leur extermination par la force armée, la roue, le gibet, la mutilation, les galères et les outrages de toute nature. […] N’est-il pas stupéfiant d’entendre dire à tel de ces critiques « membre du conseil supérieur de l’instruction publique » que « sa gloire si pure doit toujours rester une des religions de la France » ? N’est-il pas plus prodigieux encore qu’un tollé d’indignation et de mépris ne couvre pas pour toujours la voix d’un homme que nous venons d’entendre condamner, quoique à regret, la Révocation, et qui ne craint pas cependant de prononcer d’aussi dérisoires paroles que celles-ci : « Partout où j’ai passé, j’ai pu constater que le catholicisme c’était la France, et la France c’était le catholicisme. Je l’avais souvent entendu dire, et j’étais assez disposé à le croire. […] N’est-il pas profondément burlesque en un mot, d’entendre les admirateurs de l’homme néfaste parler, sans rire, de patrie et de nationalisme ?
» Tout le monde, dans la bonne société, vers 1760, entendait ce que cela voulait dire. […] jamais je n’aurai eu un plaisir plus vif que de m’entendre réciter mot pour mot. […] En effet, dans le Discours de M. de Morville, nous lisons, et les assistants purent entendre ces paroles : Il y a longtemps, monsieur, que votre amour pour les lettres est célèbre dans cette compagnie ; les applaudissements que vous y recevez aujourd’hui ne vous sont pas inconnus ; vous y devez être accoutumé, et vous les avez obtenus dans un âge auquel on ferait un mérite d’en concevoir l’espérance. […] Je n’oserais répondre qu’un peu d’épicuréisme bien entendu ne s’y soit point glissé à l’origine.
Le roi était défiant ; les malintentionnés lui insinuaient que l’archevêque pouvait bien le tromper et s’entendre sous main avec Rome. […] M. l’archevêque, pour être vu et entendu plus commodément, était sur un amphithéâtre, ayant à droite et à gauche les docteurs qui devaient parler. […] Le 3 février 1671, l’Académie extraordinairement assemblée devant le chancelier Séguier, son protecteur, avait entendu le remerciement de M. de Harlay et la réponse du directeur Pellisson. […] » Mme de Coulanges parle déjà comme si elle avait entendu le Père Gaillard, dont le sermon ne fut prononcé que cinq semaines après (23 novembre).
La voici en propres termes : « Monsieur de Montaigne, pour ce que j’ai en estime grande votre fidélité et zélée dévotion à mon service, ce m’a été plaisir d’entendre que vous avez été élu major de ma ville de Bourdeaux, ayant eu très agréable et confirmé ladite élection, et d’autant plus volontiers qu’elle a été sans brigue et en votre lointaine absence. […] En accordant toute autorité à son témoignage, à sa déposition concernant lui-même, il ne s’agit que de le bien entendre et de ne pas le prendre au mot sur tous ses aveux. […] C’est songer à sa réputation personnelle plus qu’au bien de la chose, que « d’attendre à faire en place publique ce qu’on peut faire en la chambre du Conseil, et de venir étaler en plein midi ce qu’on eût mieux fait la nuit précédente. » Il n’est pas de ceux qui pensent « que les bons règlements ne se peuvent entendre qu’au son de la trompette. » Et puis il s’exagère si peu l’honneur de ces postes secondaires ! […] Lui et Montaigne devaient naturellement s’entendre.
Cuvier était opposé à la rhétorique ; il est bon de l’entendre là-dessus : « M. […] Il a l’habitude, on rentrant le soir, de noter brièvement ce qu’il a entendu de plus remarquable ; il nous livre aujourd’hui ces notes ; il y joint les lettres qu’il a reçues de ces personnages célèbres ou de ces femmes d’esprit. […] Elle lui répondit comme une personne qui n’entend rien à tous ces mystères et qui, dans tout son procédé, y va bon jeu bon argent (octobre 1821) : « Savez-vous bien que cette dernière lettre, à laquelle vous ne pensez peut-être déjà plus, m’a fourni bien des réflexions, et que je ne sais vraiment comment y répondre ? […] Nous venons de voir et d’écouter en Béranger le Tallemant des Réaux de Benjamin Constant : il est juste maintenant d’entendre Sismondi, qui en est l’historien et l’apologiste équitable : 13 décembre 1830.
M. de Cayrol, qui n’entend pas contradiction sur son héros, traite fort mal M. de Feletz, pour avoir osé mettre en doute l’agrément de Gresset en prose ; il me semble qu’au moment où il plaidait pour les agréments d’un autre, le digne biographe l’aurait pu faire en un style plus persuasif et mieux assorti ; pour moi, en ces matières d’urbanité, je suis accoutumé à reconnaître M. de Feletz comme un excellent juge. […] Elle a d’assez beaux yeux, Pour des yeux de province……… On ne vit qu’à Paris, et l’on végète ailleurs… Tout le monde est méchant, et personne ne l’est… L’aigle d’une maison n’est qu’un sot dans une autre… L’esprit qu’on veut avoir gâte celui qu’on a… Et c’est là qu’on entend le cri de la nature… Et cent autres. […] et est-il bien vrai alors qu’on en ait eu réellement auparavant, j’entends du vrai goût, du franc, du meilleur, de celui qui tient à la première nature ? […] Galiani y fait une espèce de gazette de théâtre, à l’occasion des représentations qu’une troupe de comédiens français donnait à Naples : « Dix-septième représentation : le Méchant, pièce qu’on n’entendit point du tout, parce qu’elle n’est que parlée.
…………………… J’entends un vieux garde, Qui de loin regarde Fuir l’éclair, Qui chante et s’abrite, Seul en sa guérite, Contre l’air. […] Bertrand nourrissait à cette époque d’autres projets plus étendus, et il n’entendait que préluder ou peloter, comme on dit, par ces sortes de bambochades. […] Et quel plaisir, la nuit, à l’heure douteuse et pâle qui précède le point du jour, d’entendre mon coq s’égosiller dans le gelinier et le coq d’une ferme lui répondre faiblement, sentinelle lointaine juchée aux avant-postes du village endormi ! […] Désert qui n’entends plus la voix de Jean-Baptiste !
IX Mais vous approchez des Alpes, les neiges violettes de leurs cimes dentelées se découpent le soir sur le firmament profond comme une mer, l’étoile s’y laisse entrevoir au crépuscule comme une voile émergeant sur l’Océan de l’espace infini ; les ombres glissent de pente en pente sur les flancs des rochers noircis de sapins, des chaumières isolées et suspendues à des promontoires, comme des nids d’aigles, fument du feu du soir, et leur fumée bleue se fond en spirales légères dans l’éther ; le lac limpide, dont l’ombre ternit déjà la moitié, réfléchit dans l’autre moitié les neiges renversées et le soleil couchant dans son miroir ; quelques voiles glissent sur sa surface, chargées de branchages coupés de châtaigniers, dont les feuilles trempent pour la dernière fois dans l’onde ; on n’entend que les coups cadencés des rames qui rapprochent le batelier du petit cap où sa femme et ses enfants l’attendent au seuil de sa maison, ses filets y sèchent sur la grève, un air de flûte, un mugissement de génisse dans les prés interrompent par moment le silence de la vallée ; le crépuscule s’éteint, la barque touche au rivage, les foyers brûlent çà et là à travers les vitraux des chaumières, on n’entend plus que le clapotement alternatif des flots endormis du lac, et de temps en temps le retentissement sourd d’une avalanche de neige dont la fumée blanche rejaillit au-dessus des sapins ; des milliers d’étoiles, maintenant visibles, flottent comme des fleurs aquatiques de nénuphars bleus sur les lames, le firmament semble ouvrir tous ses yeux pour admirer ce coin de terre, l’âme la quitte, elle se sent à la hauteur et à la proportion de s’approcher de son Créateur presque visible dans cette transparence du firmament nocturne, elle pense à ceux qu’elle a connus, aimés, perdus ici-bas et qu’elle espère, avec la certitude de l’amour, rejoindre bientôt dans la vallée éternelle, elle s’émeut, elle s’attriste, elle se console, elle se réjouit, elle croit parce qu’elle voit, elle prie, elle adore, elle se fond comme la fumée bleue des chalets, comme la poussière de la cascade, comme le bruissement du sable sous le flot, comme la lueur de ces étoiles dans l’éther, avec la divinité du spectacle. […] XVIII Il y a un morceau de poésie nationale dans la Calabre que j’ai entendu chanter souvent aux femmes d’Amalfi en revenant de la fontaine. […] La Grèce s’ouvre devant mes pas ; l’islamisme recule, le Péloponèse redevient libre, l’Église de Corinthe refleurit, la voix de l’apôtre s’y fait encore entendre.
Duruy, avec une incorruptible fidélité de mémoire, se souvint d’avoir entendue. […] Il le vit, et tout de suite ces deux hommes s’entendirent. […] Et ce qu’il fit, on peut dire, en un sens, qu’il le fit seul ; j’entends sans autre secours que celui de collaborateurs dont le zèle, communiqué et échauffé par lui, était son ouvrage encore. […] Duruy en était énergiquement d’avis ; mais il eût nié que la science, à l’entendre bien, puisse être sans conscience.
Sur l’éclosion de l’œuvre d’art, les théoriciens sont en désaccord, bien entendu. […] Nous entendons souvent dire que « l’on fait trop de politique ». […] On le reconnaît volontiers : mais il est plaisant d’entendre toutes les mauvaises raisons qu’on avance. […] — heureusement pour vous, car pour nous, nous ne voyons pas en quoi il est plus fâcheux de contempler des exercices ingénieux, en fumant des cigares blonds, parmi les cohues voluptueuses, que de sécher sur le velours des fauteuils des Nouveautés, pour entendre des Burâneries.
Sur l’éclosion de l’œuvre d’art, les théoriciens sont en désaccord, bien entendu. […] Nous entendons souvent dire que « l’on fait trop de politique ». […] On le reconnaît volontiers mais il est plaisant d’entendre toutes les mauvaises raisons qu’on avance. […] — heureusement pour vous, car pour nous, nous ne voyons pas en quoi il est plus fâcheux de contempler des exercices ingénieux, en fumant des cigares blonds, parmi les cohues voluptueuses, que de sécher sur le velours des fauteuils des Menus-Plaisirs, pour entendre des Burâneries.
Donnons cette recette à notre animal. » Dans la dernière lettre qu’elle avait adressée à Rousseau, cette Claire, qui avait peut-être plus d’esprit, ou du moins l’esprit plus dégagé et plus malin que Mme de La Tour, avait lâché à l’éloquent bourru le mot le plus cruel qu’il pût entendre : « Allez, lui avait-elle dit, vous êtes fait tout comme les autres hommes. » La Dorine de Molière n’eût pas mieux trouvé. […] Mais je ris de ma simplicité, de prétendre faire entendre raison sur une situation si différente à une femme de Paris, oisive par état, et qui, n’ayant pour toute occupation que d’écrire et recevoir des lettres, entend que tous ses amis ne soient occupés non plus que du même objet… Je sais, lui dit-il encore avec autant de vérité que d’amertume, je sais qu’il n’est pas dans le cœur humain de se mettre à la place des autres dans les choses qu’on exige d’eux. […] Elle attendait avec anxiété qu’il la prévînt de son arrivée par un mot, peut-être même qu’il la visitât : « J’ai entendu dire que vous étiez à Paris, mon cher Jean-Jacques ; je n’ai pu le croire, puisque je ne le savais pas par vous-même. » Mais le cher Jean-Jacques, ce jour-là, n’était pas dans une veine aimable : J’ai reçu vos deux lettres, madame ; toujours des reproches !
On pouvait plus que prévoir dès lors en Mallet du Pan un de ces esprits qui sauraient concilier des idées et des qualités de diverse nature, ne pas verser tout d’un côté, se donner sur les pentes diverses des limites précises, quelqu’un enfin à qui Mme de Staël un jour écrira qu’elle aurait désiré le voir et l’entretenir, ne fût-ce que pour entendre causer des choses avec raison et justice, et pour se reposer « de ces opinions extrêmes, ressource de ceux qui ne peuvent embrasser qu’une idée à la fois ». […] « J’ai entendu en 1788, dit quelque part Mallet, Marat lire et commenter le Contrat social, dans les promenades publiques, aux applaudissements d’un auditoire enthousiaste65. » Un Journal intime de Mallet, dont on nous donne des extraits et qui contient ses observations sur Paris, de 1785 à 1789, nous transporte au milieu des mœurs du temps et dans les scènes les plus vives de la guerre de la Cour contre les parlements. […] Aujourd’hui il n’y a plus d’inconvénient à le dire, ces séances si orageuses ont été moins des combats d’opinions que des combats de passions ; on y entendait des cris beaucoup plus que des discours ; elles paraissaient devoir se terminer par des combats plutôt que par des décrets. […] Il disait un jour de quelqu’un de ses proches : « Un tel n’est point menteur, mais il n’a qu’un défaut, c’est qu’il ne peut dire les choses comme elles sont. » C’est aussi ce qu’il faisait lui-même, on vient de l’entendre ; et c’est de cette façon dramatique, et à travers ce prisme trompeur, que nous sont apparus trop souvent les spectacles de cette orageuse époque, et que la vue de ceux qui n’étaient point contemporains a été surprise et abusée.
Lainé, Gallois, Flaugergues et Maine de Biran, faire entendre hautement, en face de l’Empereur, une parole de liberté et de plainte. […] — « C’est très bien, dit-il après l’avoir entendu, c’est très bien, mais il n’y a pas le coup de fouet. […] Homme plein d’adresse et de finesse dans le détail et dans la pratique des mots, plein de force et de constance dans l’ensemble du labeur, Raynouard, bon grammairien et avec des éclairs du génie philologique, manquait, j’ose le dire, par l’idée philosophique élevée qui embrasse, qui lie naturellement tous les rapports d’un sujet, et que Fauriel et Guillaume de Schlegel, comme savants, entendaient bien autrement que lui. […] On le disait parcimonieux à l’excès : le temps a révélé le secret de ses générosités envers sa famille, et plus d’un acte de bonté sobre et bien entendue.
Voilà bien Gourville, le plus honnête des domestiques entendus, dévoué et ne séparant point son intérêt de celui du maître qu’il sert. […] Il fit part de son envie à divers officiers et seigneurs du lieu, au marquis de Sillery, gouverneur, à M. de La Mothe, lieutenant de roi et homme fort entendu : Je leur dis que je croyais que l’on pourrait prendre M. […] Il est curieux à entendre sur ce que c’est que la cavalerie des Hollandais, comme sur les fortifications de Pampelune. […] On conçoit au reste très bien qu’un ministre fît toujours entrer Gourville ; car avec lui on faisait entrer un esprit à idées et à expédients : il était bon à entendre sur n’importe quel sujet, qu’il s’agît de la marque d’or et d’argent, ou de la conversion des protestants.
Et cette méthode, que je n’adoptai pas d’abord sans faire quelque violence à mon inclination naturelle, me devint à la longue aisée et si habituelle que, peut-être, depuis ces cinquante dernières années, personne n’a jamais entendu une expression dogmatique échapper de ma bouche. […] Benjamin, qui le voyait faire, qui entendait causer ceux qui y contribuaient de leur plume, et qui lui-même travaillait à l’imprimer, eut l’idée de donner quelques articles ; mais, sentant bien qu’on les refuserait avec dédain à cause de sa jeunesse, si on l’en savait l’auteur, il les fit arriver d’une manière anonyme et en déguisant son écriture. […] Il entra chez un des deux imprimeurs de la ville, et reconnut bientôt que ces deux imprimeurs entendaient peu leur métier. […] Cet homme judicieux, ferme, fin, entendu, honnête, sera inébranlable quand l’injustice l’atteindra lui et ses compatriotes.
Il est donc faux de dire qu’il ne faut point avoir de goût exclusif, si l’on entend par là qu’il faut supporter dans les ouvrages de l’art la médiocrité, et même tirer parti du mauvais. […] Le simple, le naturel, le vrai sublime ne le touchaient point : c’était une langue qu’il n’entendait point. […] On le voit, on l’entend gardant jusque dans les salons cette voix de gourdin qu’il tenait de sa première hantise dans les cafés ; homme d’esprit d’ailleurs, mais qui n’a point su s’élever au-dessus d’un certain niveau, qui s’est avisé de publier ses Considérations sur les mœurs, un an ou deux après la première édition de L’Esprit des lois, c’est-à-dire « au moment où l’arène était occupée par deux ou trois athlètes de la première vigueur, ou d’une grâce et d’une agilité merveilleuses : il fallait venir cinquante ans plus tôt ». […] » Dans sa doctrine essentiellement aristocratique, il pensait encore que la vérité et la liberté, telles qu’il les entendait, n’appartiennent en ce monde qu’à un petit nombre, à une élite, et encore « sous la condition expresse d’en jouir sans trop s’en vanter ».
Bonaparte, qui en avait entendu un soir la lecture avant son départ pour l’Égypte, et qui avait pleuré un moment, dit à l’auteur : Je regrette mes larmes. […] L’auteur de La Feuille était fait pourtant, ce semble, pour s’entendre avec le chantre du Buste de Vénus, avec l’auteur de plus d’une ode délicate et exquise. […] Le consul en entendit la lecture avec froideur et dit à Arnault pour tout compliment : « Arnault, votre Laboureur est un tribun. » La pièce avait retardé et venait à contretemps. […] Un jour, causant avec un de ses amis, dans les coulisses, pendant qu’on jouait la première fois une de ses tragédies, il vit que cet ami n’était plus à la conversation et paraissait inquiet ; on venait d’entendre les sifflets du parterre.
Par ce mot d’intelligible, il ne faut pas entendre le compréhensible, ni même une chose vraiment saisissable à l’intelligence par quelque moyen que ce soit : c’est, au contraire, ce qui dépasse l’intelligence proprement dite, ce qui est en dehors d’elle et de ses formes. […] Descartes se contente de répondre : « Encore que ma connaissance s’augmentât de plus en plus, je ne laisse pas de concevoir qu’elle ne saurait être actuellement infinie : or je conçois Dieu actuellement infini. » — Mais il ne suffit pas de remarquer ainsi qu’un être qui passe de la puissance à l’acte et qui se perfectionne n’est pas et ne sera jamais l’infinie perfection : c’est là chose entendue. […] Spencer, d’ailleurs, ne sait lui-même ce qu’il entend par la persistance de la force : il interprète ce postulat de diverses manières qui sont contradictoires entre elles. […] Par la persistance de la force, nous entendons la persistance d’un pouvoir qui dépasse notre connaissance et notre conception.
On cherchoit, non ce qui orne la vérité, mais ce qui la farde ; & l’on croyoit n’avoir ni esprit, ni délicatesse, si ce qu’on disoit pouvoir s’entendre facilement, & sans avoir besoin d’interprêtes. […] “C’est lui rendre justice, dit l’Abbé Desfontaines, que de reconnoître qu’il posséde Aristote, Hermogene, Ciceron, Quintilien ; qu’il entend la matiere qu’il traite ; qu’il entend la matiere qu’il traite ; que les principes de ses grands maîtres sont bien expliqués, & qu’il y a de la dialectique dans ce qu’il a écrit sur l’art oratoire, où l’imagination a tant de part. […] On sçait que Ciceron avoit eu pour maître Clodius Esopus, le plus grand acteur qu’ayent eu les Romains dans le tragique ; & j’ai entendu dire que le Pere de la Rue avoir quelquefois consulté le célébre Baron.
Je ne sais ce qu’ils entendent par une manière de faire lourde, qu’ils appellent allemande ; faciuntne nimis intelligendo, … etc. . […] Lorsque je dis à Cochin : cette terrasse ne serait pas plus chaude quand Loutherbourg ou quelque autre paysagiste de profession l’aurait faite… il me répond : il est vrai, mais c’est tant pis… ami Cochin, vous pouvez avoir raison, mais je ne vous entends pas. […] Tout en écrivant l’endroit du discours de Diomède que je viens de citer, je recherchais la cause des différens jugements que j’en ai entendu porter. […] Ce dont il aime surtout à s’entendre louer, c’est de son faire, qui n’est d’aucun attelier moderne.
On croirait entendre un de ces myriologues où se plaisait le poétique génie de la Grèce, mais que la mâle douleur d’un guerrier et d’un ami empreint cette fois d’un pathétique plus attendrissant que les larmes. […] « Et moi », s’écrie le poëte, « moi qui, dans ce divin langage, entends la consolation et la plainte de si nobles bannies, je tiens à honneur l’exil qui m’est imposé. […] Mais elle, dans sa béatitude, n’entend pas de tels cris. […] Mais, par là même, sous cette voûte resplendissante que le poëte élève au-dessus de vos têtes, vous entendrez mieux la voix de l’admiration et de la foule monter en majestueux accents jusqu’à Dieu.
Il ne parle pas en historien, mais en contemporain ; il semble que sa vie et son honneur sont en jeu, qu’il plaide pour lui-même, qu’il est membre du Long Parlement, qu’il entend à la porte les mousquets et les épées des gardes envoyés pour arrêter Pym et Hampden. […] Il était membre du parlement, et parlait si bien, dit-on, qu’on l’écoutait pour le seul plaisir de l’entendre. […] Mille après mille, le voyageur cherche en vain des yeux la fumée d’une hutte, ou une forme humaine enveloppée dans un plaid ; il écoute en vain pour entendre les aboiements d’un chien de berger ou le bêlement d’un agneau. […] On entendit, à ce que l’on prétend, deux hommes chuchoter : « Je n’aime pas cette besogne. » Un d’entre eux murmura : « Je serais content de combattre les Macdonalds. […] Sans doute, il l’est en plusieurs points ; s’il entend mal Racine, il admire Pascal et Bossuet ; ses amis disent qu’il faisait de Mme de Sévigné sa lecture journalière.
On a entendu les vers de madame Colet, couronnés, sur Molière. […] Mais comment s’accoutumer à entendre une élève de ce beau siècle et de ce beau lieu dire de ces mots comme impressionner, animation, etc. ?
Il est curieux de la voir, dans cette correspondance, protester à tout propos contre l’idée qu’on pouvait avoir de son crédit : « Je ne suis qu’une particulière assez peu importante ; je ne sais pas les affaires, on ne veut point que je m’en mêle, et je ne veux point m’en mêler. » Tantôt elle se compare avec pruderie à une ingénue de quinze ans : « Je suis un peu comme Agnès, je crois ce qu’on me dit, et ne creuse pas davantage. » Tantôt elle se vieillit avec une complaisance qui fait sourire : « Si vous me voyiez, madame, vous conviendriez, que je fais bien de me cacher : je ne vois presque plus ; j’entends encore plus mal ; on ne m’entend plus, parce que ma prononciation s’en est allée avec mes dents, la mémoire commence à s’égarer ; je ne me souviens plus des noms propres, je confonds tous les temps, et nos malheurs joints à mon âge me font pleurer comme toutes les vieilles que vous avez vues. » Sans croire tout à fait à ce renoncement absolu au monde, on est pourtant forcé de reconnaître qu’il y a dans ce langage de madame de Maintenon plus de manie que d’hypocrisie, et qu’à force de se faire, en paroles, insignifiante et inactive, elle l’était sur la fin réellement devenue.
Il y a des figures qui consistent dans une impropriété voulue d’expression : les mots, soit individuellement, soit assemblés en un groupe, sont détournés de leur sens, et donnent à entendre plus, moins, ou autre chose qu’il ne résulterait de leur interprétation littérale, parfois même tout le contraire15. […] Ainsi parfois, on interroge, sachant très bien ce qu’on demande ; on doute, étant certain ; on interpelle son lecteur, sans avoir besoin qu’il réponde ; on fait des questions, pour faire soi-même les réponses ; on s’écrie, voulant affirmer ; on n’achève pas sa pensée, pour la faire mieux entendre ; on dit qu’on ne parlera pas d’une chose, et l’on en parle.
C’est peut-être le seul (j’entends des fournisseurs habituels de nos grands quotidiens) qui ne soit pas assommant et qui ne se croie point obligé de pontifier, avec des phrases solennelles. […] Je vous entends : il faut vivre ; mais quelle étrange aberration est-ce de vouloir faire de la poésie un métier !
Dire que la chasteté du langage ne doit pas aller au-delà de celle des mœurs, quelque corrompues qu’elles soient, c’est prétendre que la société de mœurs honnêtes est condamnée à entendre et à parler un langage qui respire le mépris de l’honnêteté et de la morale ; c’est avancer que le langage peut mettre à découvert des mœurs que la morale oblige à cacher ; c’est aussi établir en principe que des esprits délicats et polis n’ont pas le droit d’exclure de leur langage des expressions grossières et brutales, et j’observe ici que si la décence est une loi de la morale, c’est aussi une loi du goût. […] « Agnès, si l’on en croit Molière, ne dit pas un mot qui de soi ne soit fort honnête, et si vous voulez entendre dessous quelque chose, c’est vous, dit-il, qui faites l’ordure et non pas elle, puisqu’elle parle seulement d’un ruban qu’on lui a pris. » Il y a peu de bonne foi dans cette réponse.
. — Vraiment, pas possible d’entendre la lecture de votre pièce. […] * * * Mardi 23 décembre Assis sur une banquette de l’escalier du théâtre et palpitants et tressaillants au moindre bruit, nous entendons, à travers une porte qui se referme sur elle, Mme Allan jeter de sa vilaine voix de la ville : « Ce n’est pas gentil, ça !
et j’entendais sous mes pieds, dans le gouffre, Sangloter la misère aux gémissements sourds, Sombre bouche incurable et qui se plaint toujours. […] * Tandis que je songeais, l’œil fixé sur ce mur Semé d’âmes, couvert d’un mouvement obscur Et des gestes hagards d’un peuple de fantômes, Une rumeur se fit sous les ténébreux dômes, J’entendis deux fracas profonds, venant du ciel En sens contraire au fond du silence éternel ; Le firmament que nul ne peut ouvrir ni clore Eut l’air de s’écarter.
Quelle solitude n’a point entendu les soupirs de ces rivaux qui se disputaient entre eux l’objet des adorations des Séraphins et des Anges ! […] Tout beau, Pauline, il entend vos paroles ; Et ce n’est pas un Dieu comme vos dieux frivoles, Insensibles et sourds, impuissants, mutilés, De bois, de marbre ou d’or, comme vous le voulez ; C’est le Dieu des chrétiens, c’est le mien, c’est le vôtre ; Et la terre et le ciel n’en connoissent point d’autre.
Si l’on n’entend que moi, on me reprochera d’être décousu, peut-être même obscur, surtout aux endroits où j’examine les ouvrages de Sénèque ; et l’on me lira, je ne dis pas avec autant de plaisir, comme on lit les Maximes de La Rochefoucauld, et un chapitre de La Bruyère : mais si l’on jette alternativement les yeux sur la page de Sénèque et sur la mienne, on remarquera dans celle-ci plus d’ordre, plus de clarté, selon qu’on se mettra plus fidèlement à ma place, qu’on aura plus ou moins d’analogie avec le philosophe et avec moi ; et l’on ne tardera pas à s’apercevoir que c’est autant mon âme que je peins, que celle des différents personnages qui s’offrent à mon récit. […] Je l’entends, il vous dit : ; « Celui qui renferme dans une urne la cendre négligée d’un inconnu, fait un acte pieux ; celui qui élève un monument à son ami, donne de l’éclat à sa piété : que ne vous dois-je pas, à vous qui vous occupez de ma gloire !
Au moment où je vous parle, je suis à côté de son lit ; je le vois, j’entends sa plainte, je touche ses genoux froids ; je pense qu’un jour… ah ! […] Les mouvements souples, gracieux, délicats qu’il donnait aux membres, écartaient l’animal des actions simples, réelles, de la nature, auxquelles il substituait des attitudes de convention, qu’il entendait mieux que personne au monde.
Quels comédiens, dit-il, ont la voix assez forte pour s’y faire entendre ? […] On y entend paisiblement de mauvaises pieces, et quelquefois des comédiens qui ne valent pas mieux.
En principe, il a raison, et il est parfaitement entendu qu’à tout écrivain de moyen ordre, c’est-à-dire à quatre-vingt-dix-neuf sur cent, c’est-à-dire à quasi nous tous, je donnerai très exactement le même conseil. » Je pourrais m’arrêter là. […] En principe, il a raison et il est parfaitement entendu qu’à tout écrivain de moyen ordre, c’est-à-dire à quatre-vingt-dix-neuf sur cent, c’est-à-dire à quasi nous tous, je donnerai très exactement le même conseil. » Nous voilà donc d’accord, et ceci est bien la conclusion, non seulement de M.
Ces chants se conservaient par la mémoire, et passaient d’âge en âge ; on les répétait dans les familles ; on les chantait dans les fêtes ; la veille des batailles ils servaient de prélude aux combats ; ils animaient le guerrier et servaient de consolation aux vieillards ; le héros qui ne pouvait plus combattre, assis sous le chêne, entendait chanter les exploits de sa jeunesse, et il était entouré de ses fils et de ses petits-fils, qui, appuyés sur leur lance, écoutaient en pleurant les actions de leurs pères. […] N’entends-je pas les déesses de la mort qui m’appellent ?
Cette manière d’entendre la nature, la bonne nature, cette chambrière de Dieu, comme elle se qualifie (véritable chambrière en effet d’un Dieu des bonnes gens), a eu, depuis Jean de Meun, sa continuation par Rabelais, Regnier, La Fontaine lui-même, Chaulieu. […] Combien il est touchant d’entendre ce voyageur aventureux, qui a tant couru le monde, prier M. […] On pourrait dire de Bernardin qu’il entend la nature de la même manière qu’il entend Virgile, son poëte favori, admirablement tant qu’il se tient aux couleurs, aux demi-teintes, à la mélodie et au sens moral ; le lacrymae rerum est son triomphe ; mais il devient subtil, superstitieux et systématique quand il descend au menu détail et qu’il cherche, par exemple, dans le conjugis infusus gremio une convenance entre cette fusion (infusus) et le dieu des forges de Lemnos. […] Et Jean-Jacques lui-même, ce roi des prosateurs, qui a donné quelques jolis vers dans le Devin, n’est-il pas convenu nettement qu’il n’entendait rien à cette mécanique-là ? […] Michel-Ange traitait volontiers Raphaël d’efféminé ; Corneille parlait de Racine comme d’un blondin ; Buffon répondait à Hérault de Séchelles qui le questionnait sur le style de Jean-Jacques : — « Beaucoup meilleur que celui de Thomas ; mais Rousseau a tous les défauts de la mauvaise éducation ; il a l’interjection, l’exclamation en avant, l’apostrophe continuelle. » On vient d’entendre Bernardin de Saint-Pierre, visiblement impatienté, prononcer sur l’auteur de René : « Imagination trop forte !
En ce temps-là on ne relègue pas la conversation dans les heures tardives et nocturnes ; on n’est pas forcé comme aujourd’hui de la subordonner aux exigences du travail et de l’argent, de la Chambre et de la Bourse : causer est la grande affaire « Arrivés à deux heures, dit Morellet, nous y étions encore presque tous de sept à huit heures du soir…496 C’est là qu’il fallait entendre la conversation la plus libre, la plus animée et la plus instructive qui fut jamais… Point de hardiesse politique ou religieuse qui ne fût mise en avant et discutée pro et contrà… Souvent un seul y prenait la parole et proposait sa théorie paisiblement et sans être interrompu. […] C’est là que j’ai entendu Roux et Darcet exposer leur théorie de la terre, Marmontel les excellents principes qu’il a rassemblés dans les Éléments de la Littérature, Raynal nous dire à livres, sous et deniers, le commerce des Espagnols à la Vera-Cruz et de l’Angleterre dans ses colonies », Diderot improviser sur les arts, la morale, la métaphysique, avec cette fougue incomparable, cette surabondance d’expression, ce débordement d’images et de logique, ces trouvailles de style, cette mimique qui n’appartenaient qu’à lui, et dont trois ou quatre seulement de ses écrits nous ont conservé l’image affaiblie. […] Pour les aimables « oisifs » que décrit Voltaire502, pour « les cent mille personnes qui n’ont rien à faire qu’à jouer et à se divertir », elle est le pédagogue le plus déplaisant, toujours grondeur, hostile au plaisir sensible, hostile au raisonnement libre, brûlant les livres qu’on voudrait lire, imposant des dogmes qu’on n’entend plus. […] Pour eux, ils sont architectes et ils ont des principes, à savoir la raison, la nature, les droits de l’homme, principes simples et féconds que chacun peut entendre et dont il suffit de tirer les conséquences pour substituer aux informes bâtisses du passé l’édifice admirable de l’avenir. — La tentation est grande pour des mécontents, peu dévots, épicuriens et philanthropes. […] , I, 151. « J’entendis toute la cour, dans la salle de spectacle du château de Versailles, applaudir avec enthousiasme Brutus, tragédie de Voltaire, et particulièrement ces deux vers : Je suis fils de Brutus et je porte en mon cœur La liberté gravée et les rois en horreur. » 540.
— Je souhaiterais, lui dit la reine, que ma parole pût agir sur vous, comme la vôtre agit sur l’Écosse, nous nous entendrions, nous serions amis, et notre bonne intelligence serait la paix et le bonheur du royaume ! […] Il y a dans la musique une langue sans paroles, qui permet à ceux qui l’exercent ensemble de tout dire sans rien exprimer ; le sentiment vague et passionné de la voix ou de l’instrument, qui s’adresse à tous, ne peut offenser personne en particulier, mais il peut, au gré de celle qui l’entend, s’interpréter comme un hommage timide ou comme un soupir brûlant, auquel il ne manque que son nom pour devenir un aveu ; deux regards qui se rencontrent dans ce moment d’extase musicale achèvent la muette intelligence ; de là à une passion mutuelle, devinée ou avouée, il n’y a qu’un moment d’audace ou un moment de faiblesse. […] Tandis que les conjurés la menaçaient, si elle appelait, de la tuer et de la jeter par-dessus les murs, d’autres conjurés disaient aux bourgeois que tout allait bien, que seulement on avait dagué le favori piémontais, qui s’entendait avec le pape et le roi d’Espagne pour détruire la religion du saint Évangile. […] Ils se récrient, comme elle devait s’y attendre, et font entendre contre Darnley des menaces significatives de mort : « Nous vous délivrerons de ce compétiteur, lui disent-ils ; Murray ici présent, mais protestant comme nous, ne participera pas à nos mesures ; mais il nous laissera faire et regardera entre ses doigts ! […] on l’ignore ; ce qu’on sait seulement, c’est qu’une explosion terrible, entendue avant le crépuscule du matin à Holyrood et à Édimbourg, avait fait sauter la maison dont les débris devaient recouvrir la victime ; mais que, par un étrange oubli des assassins, les deux cadavres de Darnley et du page, au lieu de se retrouver sous les décombres, se retrouvèrent le lendemain dans un verger attenant au jardin, portant sur leurs corps non les marques de la poudre, mais les marques de la lutte et de la strangulation.
Retiré à Twickenam, dans le voisinage de Londres, aux bords arcadiens de la Tamise, ce grand poëte, lié avec toute l’aristocratie politique et lettrée de son temps, rappelait Horace à Tibur ; comme Horace, il entendait de là le bruit de la Rome britannique ; favori de la cour, consulté par les orateurs du Parlement, oracle des hommes de génie dans ses Épîtres, fléau des médiocrités littéraires dans ses Satires, philosophe dans l’Essai sur l’homme, distrait par le badinage classique dans la Boucle de cheveux enlevée, Pope, centre d’une société d’hommes de lettres secondaires mais excellents, fut évidemment le modèle d’élégance attique sur lequel Voltaire aurait voulu mouler sa vie, si la France eût été libre dans ses opinions comme l’était l’Angleterre. […] Entends, Dieu que j’implore, entends du haut des cieux Une voix plaintive et sincère ; Mon incrédulité ne doit pas te déplaire, Mon cœur est ouvert à tes yeux ; L’insensé te blasphème et moi je te révère ; Je ne suis pas chrétien, mais c’est pour t’aimer mieux. […] ………… ………… Il s’élève jusqu’à la prière dans les derniers vers du poëme : Ô Dieu qu’on méconnaît, ô Dieu que tout annonce, Entends les derniers mots que ma bouche prononce ! […] Il eut seulement la faiblesse de poursuivre trop tard les vains succès de la scène, et de s’acharner après les applaudissements de Paris qu’il n’entendait plus de si loin. […] Le jour où cette indépendance, qui ne peut pas être éloignée et que les hommes de philosophie libre désirent ardemment, sera venue, ce jour-là seulement l’influence définitive de Voltaire sera fixée, et il ne restera de son nom et de son œuvre que ce qui doit en rester pour l’immortalité, c’est-à-dire : Un poëte lyrique sans flammes, sans ailes, sans enthousiasme ; Un poëte dramatique doué d’une certaine illusion théâtrale, mais d’un style au-dessous de Corneille, de Racine, style de parterre, qu’on peut entendre avec plaisir, mais qu’on ne peut relire avec admiration ; Un poëte badin au-dessous d’Arioste ; Un poëte familier égal à Horace ; Un historien inférieur à Thucydide, à Tacite, à Gibbon, à Montesquieu, sans profondeur dans les jugements, sans pathétique dans les sentiments, sans couleur et sans chaleur dans le récit, mais clair, rapide, sensé, judicieux, élégant, sincère, instruisant beaucoup, amusant toujours, ne trompant jamais son lecteur ; Un écrivain de lettres familières, tel qu’il n’en parut jamais dans l’antiquité ou dans les temps modernes, supérieur à Cicéron en facilité de style, égal en charme, en souplesse, en naturel à madame de Sévigné elle-même, féminin par la grâce, viril par le grand sens de ses lettres ; c’est là qu’il faut le chercher tout entier, ses imperfections sont dans ses œuvres, son génie est dans sa correspondance ; homme à la toise de beaucoup d’autres hommes si on le mesure quand il est vêtu, homme incommensurable en déshabillé ; Un polémiste dont on ne peut comparer l’éloquence aux éloquences de Cicéron, de J.
Ce bien, vous l’entendiez d’une manière un peu étroite. […] J’entendais toujours mes camarades parler avec une rare estime de cette petite servante, qui était en effet un modèle de vertu et joignait à cela la figure la plus agréable et la plus douce. […] Le catholique ne l’entend pas ainsi. […] Le dernier Angélus du soir que j’avais entendu rouler sur nos chères collines et le dernier soleil que j’avais vu se coucher sur ces tranquilles campagnes me revenaient en mémoire comme des flèches aiguës. […] La première fois que mes condisciples m’entendirent argumenter en latin, ils furent surpris.
En parcourant la liste de ses surnoms, on croit entendre les cris d’une foule enthousiaste acclamant un triomphateur. […] Déposons-le aussitôt sur la terre ferme, et ne portez pas les mains sur Iui de peur qu’il ne soulève sur nous le tourbillon des grands vents. » — Mais le chef ne veut rien entendre : — « Malheureux ! […] Le bon Plutarque est curieux à entendre dans ses Symposiaques, sur ces analogies chimériques. — Qu’est-ce que la Fête des Tabernacles, sinon une Bacchanale judaïque ? […] Les Titans, masqués de plâtre, pénètrent dans la grotte où les Curètes le gardent, en frappant de l’épée sur le bouclier, pour qu’on n’entende pas ses cris enfantins. […] On entendait bien, la nuit, près du Tibre, d’étranges hurlements sortir du bois sacré, Stimula. — Prodige sans doute, danse de dieux nocturnes : les passants hâtaient le pas en balbutiant une formule de conjuration.
On parle, bien entendu, à ceux qui savent l’histoire ; on ne parle point à ceux qui l’ignorent. […] J’entends aussi bien les choses de la vie terre à terre que les plus positifs : pour bien écrire l’histoire du xvie siècle, il ne faut rien moins que de croire au Saint-Esprit. […] Mais Forneron n’a pas assez dégagé la Cause des hommes qui l’ont souillée ou trahie ; il n’a rien entendu à la grandeur divine de la Cause. […] Ces malheureux anarchistes de l’Émigration n’avaient pas l’échafaud à leur service, comme les anarchistes révolutionnaires, pour se débarrasser entre eux des inimitiés et des compétitions rivales ; mais s’ils ne se guillotinèrent pas entre eux, ils ne s’entendirent pas davantage, et le même Saturne révolutionnaire les dévora. […] Les rois, qui auraient dû s’entendre entre eux pour conjurer un danger qui les menaçait tous ; les rois, dont pas un seul en Europe ne savait son métier quand la Révolution éclata, ne s’entendirent pas plus que les émigrés et les révolutionnaires.
Sans les indiscrétions de quelques amis qui ont entendu la lecture des Frères Zemganno avant leur publication, le lecteur ne se serait jamais douté, en les lisant, qu’il allait y être question, à la fin, d’amour fraternel. […] M. de Goncourt, pour être plus vrai, sans doute, comme on entend la vérité maintenant, a fait ses frères Zemganno platement vulgaires. Voilà comme ce poétique entend l’idéal !!! […] Les naturalistes entendent peu, en général, la gradation des nuances. […] Ainsi l’absurde visite de la Faustin à ce maniaque de professeur de grec, pour entendre lire Phèdre dans une langue qu’elle ne comprend pas !
Avec ce dédain qui lui est propre des choses de l’expérience extérieure ou intérieure, il parle de tout ce qu’elles attestent dans un langage auquel ni la conscience ni le sens commun n’entendent rien, mais qu’il donne pour l’expression de l’absolue vérité. […] La liberté ainsi entendue n’est plus que la spontanéité des actes ; elle a perdu son caractère psychologique pour en prendre un tout métaphysique, supérieur, si l’on veut, quant au résultat, mais qui n’a plus rien de commun avec le libre arbitre. […] Il est enfin une autre philosophie de la nature qui s’entend encore moins que les deux autres avec la conscience : c’est cette haute spéculation qu’on appelle la philosophie de l’unité, et dont Spinoza, Goethe, Schelling, Hegel, ont été les plus éminents organes dans les temps modernes. […] Seulement l’entend-elle de manière à respecter toujours les vérités de la conscience ? […] C’est ce qui fait que nulle théologie ne s’entend bien à la justice, cette chose morale qui a pour mesure propre le degré de mérite proportionnel à l’effort de volonté.
on peut s’entendre. […] Il entendait vraiment trop peu la plaisanterie. […] Émile n’apprendra rien par cœur, pas même les fables de La Fontaine, parce qu’il n’est pas capable de les entendre. […] Mais qui décidera ce qui est conforme, sur tel point, à la volonté générale ainsi entendue ? […] Entendons-nous bien.
Elle entend ne se donner aucune peine, ne subir aucun ennui. […] Il ne s’agit que de s’entendre. […] Entendez les audaces. […] Il faudrait s’entendre. […] J’entendais bien qu’il y mettait quelque ironie.
À l’entendre, c’est là qu’est la force, c’est de ce côté qu’est l’avenir1. […] et entend-elle toujours retentir à son oreille la terrible question d’Hamlet : Au-delà qu’y a-t-il ? […] Qu’on ne se hâte pas de s’indigner il faut entendre l’auteur exposer sa théorie jusqu’au bout. […] Et n’entendez-vous pas d’ici les applaudissements de la foule qui lui donnent raison ? […] À entendre le drame, la société est sans entrailles.
À laquelle me faut-il entendre ? […] L’artiste entendait bien l’y mettre lui-même, il l’y a mise en effet, et nous ne faisons que l’y retrouver. […] Pourrait-on dire que j’ai vraiment entendu un opéra, si j’ai fait seulement attention aux voix, m’efforçant, pour les mieux entendre, de les isoler du vain bruissement de l’orchestre ? […] Un tel appel à l’imagination du spectateur ne peut manquer d’être entendu. […] Il ne faut entendre par là que la préférence que nous avons pour certain genre de beauté.
Mais lui n’entendait qu’à une chose : agir. […] Mais les Doux n’entendent à rien ; la violence les attriste — du moins ils l’affirment. […] On entend bruire les scies vivaces. […] Les résines débordent des branches vertes et l’on entend grincer les haches. […] Bien entendu, je me gardais bien d’y mettre l’ombre d’une idée.
Un critique spirituel et sensé le remarquait à propos de la musique d’Auber, en parlant d’un de ses derniers opéras qui avait fort réussi : « Pour remporter ce succès avec une œuvre si élégante et si claire, un style si aimable et si charmant, il a fallu, disait-il, un très grand talent et un très grand bonheur ; car aujourd’hui, par la pédanterie qui court, par les doctrines absurdes qu’on voudrait accréditer, par l’ignorance et l’outrecuidance de quelques prétendus savants, la clarté, la grâce et l’esprit sont un obstacle plutôt qu’un avantage… Le beau mérite que d’entendre et d’admirer ce que tout le monde admire et comprend ! […] je ne vous la donne pas pour une création profonde et neuve : c’est un lieu commun qui recommence sans cesse aux approches de quinze ans pour toutes les générations de Chloé et de Daphnis ; mais ici le lieu commun a passé par le cœur et par les sens, il est redevenu une émotion, il est modulé d’une voix pure ; il continue de chanter en nous bien après que le livre est fermé, et le lendemain au réveil on s’étonne d’entendre d’abord ce doux chant d’oiseau, frais comme l’aurore. […] C’est du parfait Tibulle retrouvé sans y songer, et la flûte de Sicile n’a rien fait entendre de plus doux.
si ce n’est assez de ces grandes épreuves Pour m’élever à toi sur ton divin Thabor, Fais entendre ta voix et dis-moi sur quels fleuves Je dois aller pleurer encor ; Sur les saules de quelle rive Je pendrai ma harpe plaintive ; Sur quels tombeaux chéris j’irai m’agenouiller. […] Dieu vengeur, entends-moi ! […] Je n’entends pas, hélas !
Choisir son critique de sa propre main, entendez-vous bien ? […] L’âme, l’inspiration de toute saine critique, réside dans le sentiment et l’amour de la vérité : entendre dire une chose fausse, entendre louer ou seulement lire un livre sophistique, une œuvre quelconque d’un art factice, cela fait mal et blesse l’esprit sain, comme une fausse note pour une oreille délicate ; cela va même jusqu’à irriter certaines natures chez qui la sensibilité pénètre à point dans la raison et vient comme aiguiser celle-ci en s’y tempérant.
8 Il a l’air, comme Agnès, de « ne point entendre mal aux choses qu’il fait », tant il les fait naturellement. […] C’est à peu près de cette façon qu’il a toujours entendu ses intérêts. […] Lorsqu’il cause, il suit son idée avec une préoccupation si grande, qu’il n’entend pas Boileau tout à côté de lui qui l’injurie pour s’amuser.
Donc la querelle, qui venait ensuite, si elle n’était plus une vive entrée en matière, devenait un coup de théâtre émouvant : intéressés à la passion des jeunes gens, nous sommes plus touchés de la dispute des pères ; mais voir entrer deux hommes, qu’on ne connaît pas, dont on ne sait rien, qui ne nous sont rien, et les entendre échanger des insolences et des injures, c’est vif, si l’on veut : mais d’effet dramatique, je n’en vois pas. […] J’entends qu’on peut être amené à évoquer en divers endroits une même idée, parce qu’en ces divers endroits elle est nécessaire à l’enchaînement exact de la pensée, parce qu’il y aurait, si on ne l’y rapportait, une lacune, un vide, que rien d’autre ne saurait combler ou couvrir. […] » Il continue sa harangue, répétant encore diverses fois que Brutus est un homme honorable ; mais à mesure qu’il se sent plus maître de la populace qui l’entend, à mesure qu’il peut louer César sans ameuter contre lui toutes les fureurs, il espace le retour de l’éloge donné à Brutus, jusqu’à ce qu’enfin cet éloge ne serve plus qu’à provoquer contre lui les mêmes injures dont le nom de César était couvert tout à l’heure.
Pendant qu’il a l’air d’écouter, il a pris le point de départ ou l’a placé l’auteur, et il voyage pour son compte : quand vous avez fini, il vous dit le livre qu’il aurait fait à votre place, et c’est sa façon d’entendre la critique. Dans la conversation, il est le même : de tout ce que vous lui dites en deux heures, il entend une chose, une seule ; il la prend, la travaille, la grandit ; votre toute petite pensée devient un gros système, et qui vous révolte parfois, ou vous épouvante. […] J’entends par son art les intentions d’art qu’il exprime.
Il y a quelque chose que le Cid, Phèdre, les Méditations, la Légende des Siècles, les Forces tumultueuses, disent également pour tout le monde : celui qui ne l’entend pas est un sourd ; au moins est-il atteint de surdité partielle et momentanée. […] La base, bien entendu, de toute explication française est l’étude : grammaticale du texte. […] J’irais plus hardiment vers l’actualité, entendue au sens le plus général et le plus élevé.
C’est en ce sens qu’un homme de goût déclarait qu’aux soirs de gaîté, quand l’envie le prenait d’entendre de l’esprit, au lieu, comme vous et moi, d’aller au Palais-Royal ou d’acheter Le Tintamarre, c’est dans sa bibliothèque qu’il montait, lire les métaphysiciens allemands. […] Sardou se trompe : il faut lui faire entendre que telle ou telle ficelle est décidément trop visible ou trop usée ; mais avec quels ménagements on l’avertira, comme on protestera du respect qu’on a pour son talent ! […] Le ministre qui a conquis la Tunisie et le Tonkin a été mille fois plus maltraité que le général qui a livré Metz et la France à l’ennemi ; on les a mis en parallèle comme La Bruyère a fait pour Corneille et Racine, et leurs crimes bien pesés et compensés, ce n’est pas le ministre qui a été trouvé le moins coupable… Il ne s’agit pas d’introduire ces gracieusetés dans les mœurs des lettres, de revenir au seizième siècle où, pour Scaliger, quiconque entendait autrement que lui Tite-Live était au moins un scélérat.
Les actions réflexes, les actes habituels sont de cette nature, « Les actes volontaires se distinguent des actions réflexes par l’intervention d’une conscience, et le phénomène est très remarquable, en ce qu’il nous introduit, pour ainsi dire, dans un nouveau monde Nous sommes même libres, si cela nous plaît, de dire que l’esprit est une source de puissance ; mais nous devons alors entendre par esprit la conscience jointe à tout le corps, et nous devons aussi être prêts à admettre que l’énergie physique est la condition indispensable ; la conscience, la condition accidentelle187. » V « Tout ce qui a été exposé jusqu’ici188 relativement aux actions volontaires des êtres vivants, implique la prédominance d’une uniformité ou d’une loi dans cette classe de phénomènes, en supposant toutefois une complication de nombreux antécédents qui ne sont pas toujours parfaitement connus. » La pratique de la vie s’accorde en général avec cette théorie : nous prédisons la conduite future de chacun d’après son passé ; nous appelons Aristide un juste, Socrate un héros moral, Néron un monstre de cruauté. […] Par liberté de choix, nous n’entendons qu’une chose, nier toute intervention étrangère. […] Maintenant que faut-il entendre par la spontanéité, par la self-détermination (la détermination qui vient de nous-même) ?
que Racine fils, nourri dans la pureté et la religion du foyer domestique, s’entendait mieux à cette pudeur qui accompagne toute vraie piété ! […] J’entends par bon sens, remarquez-le, non pas le bon sens vulgaire, mais le tact, l’esprit de conduite, le bon goût, bien des choses à la fois, en un mot, la justesse d’esprit dans ses applications les plus variées et les plus délicates. […] Si le poète rouvre ses manuscrits de famille, c’est qu’il veut retrouver, revoir, entendre l’âme de sa mère.
Tant qu’il peut croire que c’est sa ruine que l’on exige, il peut se refuser à tout entendre, comme un peuple ne peut pas consentir à traiter avec qui ne commence point par reconnaître son indépendance ; mais dès que l’on accepte de part et d’autre les droits de la discussion et de la pensée, le débat est possible, il est légitime, il est nécessaire. […] Guizot même nous donne à entendre que, si nous n’étions pas dans une période de crise, il pourrait bien, lui aussi, dire ce que dans la théologie chrétienne il ne défend pas, il n’accepte pas ; mais il ne convient à aucun chrétien de toucher aux parois extérieures du temple lorsque les fondements mêmes sont ébranlés. […] Ce sentiment mal entendu a entraîné souvent des conséquences odieuses, les sacrifices humains sont une de ces conséquences ; pourquoi cependant le sacrifice volontaire de l’innocent pour le coupable n’aurait-il pas une vertu qui nous échappe ?
De sorte que lire le critique avant l’auteur, c’est m’empêcher de comprendre l’auteur moi-même ; c’est me forcer à ne l’entendre que d’une oreille préparée et presque formée par un autre ; c’est bien travailler à me mettre dans l’impossibilité d’être touché directement, et c’est-à-dire c’est bien travailler à me rendre incapable de jouissance. […] » Cependant il faut s’entendre. […] Nous n’avions pas, bien entendu, ni de Sadolet, ni d’Érasme lu un mot.
Une traduction comme l’entend M. l’abbé Cazalès, c’est presque un autel, et dans le désert, un autel est sublime encore ! […] C’est de là qu’il entendait vibrer cette harpe humaine de l’extase, aux cordes tordues, qui, à chaque vibration, saignaient comme des veines coupées au couteau ! […] Brentano, l’ardent et hautain Brentano n’avait jamais beaucoup plié ; mais ici il alla jusqu’à effacer sa rebelle personnalité, jusqu’à n’être plus que le secrétaire qui écrit sous la dictée d’un maître difficile à comprendre, et il fit bien plus que d’écrire cette dictée fidèlement, il la transposa, sans y rien changer, et la mit ainsi à la portée de ceux qui, à cette élévation, ne l’eussent jamais entendue.
S’il en est ainsi, vous avez le droit de vous plaindre de moi, lorsque vous ne m’entendez pas ; et je n’aurais le droit de me plaindre de vous, que si vous ne me donniez pas une attention santé. Mais vous me l’accordez toujours, et vous voulez bien me dire souvent que vous m’avez entendu. […] Comme, dans bien des têtes, les mots métaphysique, obscurité, difficulté, se trouvent confondus, il se pourrait que, si j’ai quelquefois eu le bonheur de m’expliquer avec clarté, on ait cru entendre autre chose que de la métaphysique.
Les Italiens vont entendre un discours à peu près comme ils entendent un concert. […] Thompson, après avoir décrit toutes les découvertes de ce grand homme sur la gravitation, sur les comètes, sur la lumière, sur la chronologie, après avoir peint la douceur de ses mœurs et l’élévation tranquille et calme de son caractère, s’interrompt tout à coup : « N’entends-je pas, dit-il, une voix semblable à celle qui annonce les grandes révolutions sur la terre ?
Par province j’entends ici, et aussi, la rive gauche. […] Qu’on m’entende d’ailleurs bien. […] Il est entendu que le terme d’Orient s’entend de tous les pays chauds qui vont de l’Inde au Maroc. […] J’entends le style fait, achevé, poussé dans la grande voie traditionnelle de la prose française. […] Ayant saisi farouchement Madeleine, Dominique lâche prise lorsqu’il l’entend pousser un cri d’agonie, le cri d’un être qui va mourir.
L’odieux et l’ignoble disparaissent de la vie ainsi entendue. […] On ne s’étonne plus d’entendre le comte de Kœnigsmark traiter « de peccadille » un assassinat qu’il avait commis avec guet-apens. […] Dire qu’il a vu une vision ou entendu une voix, c’est dire qu’il a eu un rêve qui tenait du sommeil et de la veille. […] Le lecteur se réjouit intérieurement quand il entend un témoin oculaire conter des détails intimes sur de si grands personnages. […] Chez Molière, la vérité est au fond, mais elle est cachée ; il a entendu les sanglots de la tragédie humaine, mais il aime mieux ne pas leur faire écho.
Entendus en un sens idéaliste, les concepts dont se composent les lois mécaniques échappent aux contradictions qui apparaissent quand on les entend dans un sens réaliste. […] Qu’est-ce à dire, sinon que la physique ne peut faire abstraction de la qualité, au moins de la qualité ainsi entendue ? […] Un tel langage indique assez que l’on n’entend pas, au nom de la science, ériger l’atomisme en vérité absolue. […] Mais cette dépendance peut s’entendre de deux manières. […] Il ne suffit pas, pour s’entendre, de ne pouvoir se comprendre.
Dans tous ces cas, les choses se passent comme lorsqu’un ébranlement spontané du nerf acoustique nous fait entendre et placer à telle distance et dans telle direction un son que nulle vibration de l’air extérieur n’a produit. […] Je n’arrive là qu’en insistant, en me demandant tout bas ce que j’entends par cette distance et par cette forme. […] Ils pouvaient dire les noms de plusieurs pigeons apprivoisés avec lesquels ils s’amusaient dans un petit jardin, rien qu’à les entendre voler au-dessus de leurs têtes. » (Abercrombie, ibid. […] « L’ouïe atteint, dit-il, une telle acuité, qu’une conversation peut être entendue à un étage inférieur. Le bruit d’une montre est entendu à 25 pieds de distance. » — De même pour l’odorat, le goût, les sensations de température et les autres.
En 1839, après un voyage qu’il avait fait en Italie, passant par Lausanne, Sainte-Beuve alla entendre Vinet, que peut-être il n’avait pas entendu, faute de loisirs, l’année d’avant. […] M. ne le fait entendre. […] Sainte-Beuve et lui se rencontrent sans s’entendre. […] l’entendez-vous ? […] » Mais personne n’ajoutera : « On l’entend bien, du moins ».
Aglaé signifie splendeur, qu’il faut entendre pour celle grâce d’entendement qui consiste au lustre de vérité et de vertu. […] Pourtant, dans cette Sicile heureuse, bien que tant de fois bouleversée, il avait été témoin d’une vie réellement pastorale ; il avait, dans sa jeunesse, entendu de vrais chants qu’accompagnait la flûte de vrais bergers, et il n’en fallut pas davantage à son génie inventif pour saisir l’occasion d’une poésie neuve. […] Dès le premier vers, on entend le bruissement du pin qui chante près des sources : le berger Thyrsis, s’adressant à un chevrier dont on ne dit pas le nom, l’engage aussi à chanter. […] Il y a là un enfant terrible qui entend tout et qui pourra bien tout redire. […] Nos Syracusaines finissent aussi par bien voir, par entendre le chant en l’honneur d’Adonis.
. — Nous n’entendons par ces propriétés que le pouvoir d’exciter en nous telle ou telle sorte de sensation. — Corps solides ou résistants. — Analyse de Stuart Mill. — Primitivement, la résistance n’est pour nous que le pouvoir d’arrêter une série commencée de sensations musculaires. — Corps lisses, rudes, piquants, unis, durs, mous, collants, humides. — Nous n’entendons par ces propriétés que le pouvoir de provoquer tel mode ou modification d’une sensation ou d’une série de sensations musculaires et tactiles. […] En effet, la perception extérieure laisse après elle un simulacre ; quand nous avons vu quelque objet intéressant, entendu un bel air, palpé un corps d’un grain singulier, non seulement l’image de notre sensation survit à notre sensation, mais encore elle est accompagnée par une conception, représentation, fantôme plus ou moins énergique et net de l’objet senti. […] Nous entendons simplement par ce mot que tels effets sont possibles, futurs, prochains, nécessaires à telles conditions. Nous entendons simplement, dans le cas présent, que telles sensations sont possibles, futures, prochaines, nécessaires à telles conditions. […] Quand il voit un bâton levé ou entend un fouet sifflant, il a, par réviviscence et association, l’image d’une sensation douloureuse de contact, et cette image le porte à fuir.
Quelques groupes de curieux et d’hommes de lettres de Dijon, instruits de son passage, obstruaient la rue et les escaliers pour apercevoir son visage ou pour entendre sa voix à travers les fenêtres ou les portes. […] Je suis un peu inquiet de Ladvocat, dont je n’entends plus parler ; ferait-il banqueroute ? […] Hier, mercredi des Cendres, j’étais à genoux, seul, dans cette église de Santa-Croce, appuyé sur les murailles en ruine de Rome, près de la porte de Naples ; j’entendais le chant monotone et lugubre des religieux dans l’intérieur de cette solitude. […] Cette fois je n’écris pas directement à notre excellente amie ; mais dites-lui, de ma part, que je compte aller la rejoindre à Paris du 15 au 20 de ce mois, pour m’entendre avec elle et vendre ma maison. […] Le talent du peintre de mœurs abondait dans ces pages, mais la convenance et la piété manquaient ; nous souffrions profondément à ces lectures d’entendre ridiculiser le trône, la table et le foyer, par celui qui avait été appelé pour en relever la sainteté et la considération devant l’Europe.
Il entendit pour la première fois prononcer le nom de Goethe, et un volume de ses Poésies et Chansons lui tomba entre les mains. […] Il aima Goethe dès lors, et sentit un vague désir de se donner à lui ; mais il faut l’entendre lui-même : « Je vécus des semaines et des mois, dit-il, absorbé dans ses poésies. […] Goethe vivait encore devant moi ; j’entendais de nouveau le timbre aimé de sa voix, à laquelle nulle autre ne peut être comparée. […] — Non, répliqua Goethe, il n’y a rien de meilleur que d’être obligé de voir et d’entendre aussi le mauvais ; on prend ainsi contre le mauvais une bonne haine, et on sent mieux ensuite ce qui est bon. […] » « Lorsque Goethe se retira, on entendit Napoléon dire encore à Berthier et à Daru, avec un accent réfléchi : « — Voilà un homme !
Chacun, de nos jours, est ce qu’il est par la façon dont il entend l’histoire. […] Cela est vrai, parfaitement vrai, pourvu qu’on sache l’entendre. […] Je ne sais : il est sûr au moins que, ces systèmes renfermant des atomes plus ou moins précieux de nature humaine, c’est-à-dire de vérité, celui qui saurait les entendre y trouverait une solide nourriture. […] Ceci ne nuit pas, bien entendu, à l’originalité de ce produit divin. […] J’entendais, il y a quelques mois, un orateur admiré classer ainsi les religions du haut de la chaire de Notre-Dame : il y a trois religions : le christianisme, le mahométisme et le paganisme.
Le tribunal se lève et confère quelques secondes, puis le président lit encore à l’accusé, à mi-voix, les articles d’un code ouvert, et l’on entend vaguement la phrase : tête tranchée. […] Il nous prévenait qu’il nous demandait d’en accepter le plaisir et le déplaisir, que d’ailleurs il entendait que nous répondions, dans le journal même, à ses sévérités. […] Mais à peine était-il entré dans sa chambre, que je m’entendis appeler, et le trouvai bégayant avec une voix qui me dit : « Je veux qu’on me lève ! […] — Il n’y a plus, à l’heure qu’il est, de médecin, j’entends de médecin de famille qui suive son malade et s’y intéresse ! […] * * * — J’ai entendu une haine de mère remonter à ce que lui pesait déjà sa fille dans sa grossesse, et disant : « Elle était si lourde !
Il admet toujours le péché originel, mais il entend par là le triomphe originel des penchants égoïstes et brutaux. […] On veut juger par soi ; on n’aime pas à s’entendre dire magistralement que tel passage est beau. […] On entendait rouler dans ses moindres mots des chevaux et des voitures. […] Sa pauvre femme malade meurt de ce mot qu’elle entend, et la cuisinière devient baronne. […] Une colonne de feu apparut au-dessus du temple, et des bruits surnaturels furent entendus.
Il entendait par là imposée comme un châtiment par la justice divine. […] C’est la nature commentée. » Et qu’entend-il par ce mot « nature » ? […] Je crois l’entendre me dire : « Si j’ai valu quelque chose, c’est par mes livres. […] Je n’ai jamais entendu un de ses cours. […] Je lui ai souvent entendu dire qu’il n’y avait là encore qu’une géographie mentale, sans légitime mise à nu des causes.
Il faut s’adresser à Montaigne pour entendre une plainte, pour apprendre que son ami était si loin d’être à la place où l’appelait son mérite, et pour être informé de cette supériorité en tout point qu’il était fier de lui décerner. […] D’après cette version, La Boétie voulant voir un jour la salle du bal au Louvre, un archer de la garde, qui lui trouva l’air d’un écolier, lui laissa tomber sa hallebarde sur le pied : « De quoi celui-ci criant justice par le Louvre, n’eut que des risées des grands qui l’entendirent. » Du ressentiment de cet affront serait né le pamphlet vengeur. […] Ne dirait-on pas, dans cette idée anticipée de l’Amérique, qu’il devançait le cours des révolutions et des âges, et ne croirait-on pas entendre en 1793 ou en 1795, et dans les années suivantes, un Volney, un Dupont de Nemours ou quelque autre fugitif des orages politiques et de l’anarchie, s’en allant demander aux États-Unis un asile qu’ils y trouveront en passant ? […] Mais à d’autres arbres la même greffe réussit aussitôt par un secret accord de nature ; en un rien de temps les bourgeons se gonflent et s’unissent, et les deux ensemble s’entendent à produire à frais communs le même fruit… Il en est ainsi des âmes : il en est telles, une fois unies, que rien ne saurait disjoindre ; il en est d’autres qu’aucun art ne saurait unir.
Le genre d’observations qui est propre à Duclos est sensé, rapide, mais d’une nature très sobre : J’ai cru devoir donner, dit-il, une idée de l’état de la France et de la cour de Charles VII, pour faire mieux entendre ce qui regarde son successeur : on verra que Louis XI, né et élevé au milieu de ces désordres, en sentit les funestes effets. […] L’adroite Chausseraye saisit le moment et répondit au roi « qu’il était bien bon de se laisser tourmenter de la sorte à faire chose contre son gré, son sens, sa volonté ; que ces bons messieurs ne se souciaient que de leur affaire et point du tout de sa santé, aux dépens de laquelle ils voulaient l’amener à tout ce qu’ils désiraient ; qu’en sa place, content de ce qu’il avait fait, elle ne songerait qu’à vivre et à vivre en repos, les laisserait battre tant que bon leur semblerait, sans s’en mêler davantage ni en prendre un moment de souci, bien loin de s’agiter comme il faisait, d’en perdre son repos et d’altérer sa santé, comme il n’y paraissait que trop à son visage ; que, pour elle, elle n’entendait rien ni ne voulait entendre à toutes ces questions d’école ; qu’elle ne se souciait pas plus d’un des deux partis que de l’autre ; qu’elle n’était touchée que de sa vie, de sa tranquillité, de sa santé… ». […] — Tu as raison, répondit le roi, j’ai quelque chose qui me tracasse ; on veut m’engager dans une démarche qui me répugne, et cela me fâche… — Je respecte vos secrets, Sire, poursuivit-elle ; mais je parierais que c’est pour cette Bulle où je n’entends rien ; je ne suis qu’une bonne chrétienne qui ne m’embarrasse pas de leurs disputes.
J’ignorais ce que je sentais, mais cette voix se faisait entendre à chaque occasion ; je sentais un ver rongeur quand j’avais eu soupçon de honte, et je ne me consolais pas quand je n’avais rien de bon à répondre à ce soupçon. […] Lui, il était plutôt un adversaire de la noblesse, bien que la sienne fût bonne, et il n’entrait pas dans les doléances qu’il entendait faire autour de lui : « Les gentilshommes, disait-il, qui se plaignent en leur qualité de n’être pas assez accommodés des biens de la fortune, sont de pauvres brochets de l’étang qui n’ont pas assez de carpes à manger ; non, il n’y a à plaindre que ceux qui manquent selon la nature. » D’Argenson aimait à la fois la royauté et le peuple ; il voulait le bien du public, sans être pour cela républicain : « Les républiques n’ont point de tête ; les monarchies n’ont bientôt plus de bras, car la tête les énerve. […] mais de dessous une aristocratie odieuse, — non une aristocratie de noblesse qui penserait plus généreusement, — mais une satrapie de roture qui a tout mis en formes, en mauvaises règles, en méchants principes et en ruine. » Il avait donc pensé que, « pour mieux gouverner, il ne s’agissait que de gouverner moins », et d’organiser la monarchie elle-même à l’aide d’une démocratie bien entendue, très divisée, non périlleuse, c’est-à-dire d’un système municipal et cantonal ; il en forme le plan détaillé, essayant en quelque sorte de provoquer un second établissement des communes par le bienfait direct de la royauté. […] J’ai entendu le roi parler légèrement de la vertu qu’on nomme bravoure.
On entendit du canon. « Le roi sort de l’hôtel de ville ; ils doivent être bien las. » On soupe ; propos interrompus. […] Le temps fait perdre de leur prix non seulement aux pensées des hommes, mais à leurs actions, à mesure que des actions semblables se multiplient ; des exemples de valeur héroïque, des mots sublimes inspirés par l’héroïsme militaire ou patriotique, qu’on admirait chez les anciens, sont devenus des lieux communs ; dès qu’on entend commencer l’histoire, on en devine la fin et le trait, comme on devine souvent l’hémistiche d’un vers ; l’esprit se blase ainsi sur tout ; l’amour-propre même s’use ; les triomphes, les honneurs, les applaudissements multipliés n’offrent plus le même attrait, et l’homme, de jour en jour, doit être moins avide de succès qu’il voit prodiguer à un grand nombre de personnes, et souvent à des hommes méprisables. […] Il y avait, dans la première édition des Considérations sur les mœurs, quelques passages assez peu honnêtes qu’elle n’avait pas bien compris : « Ce que j’entends le moins dans ce recueil, disait-elle en lui en renvoyant le manuscrit, c’est ce qui touche mon sexe ; mais pour le reste, je l’ai souvent pensé. » Mme de Créqui, malgré sa longue expérience du monde et son esprit mordant, avait l’âme neuve et par certains endroits assez naïve. […] » Qu’on réduise la chose autant qu’on le voudra, qu’on la déguise sous forme d’intellect, qu’on n’y voie qu’un besoin de causer, de trouver qui vous entende et vous réponde, il est certain que la connaissance de M. de Meilhan introduisit un mouvement et un attrait dans la vie de Mme de Créqui : elle s’occupe de lui, elle désire son avancement, elle le souhaite plus proche d’elle, elle épouse sa réputation, elle a besoin qu’il soit loué et approuvé.
Pour nous expliquer toute la vérité sur Villars, sans lui faire injure, et pour nous expliquer en même temps le jugement indigné de Saint-Simon sans faire à ce dernier trop de tort, nous n’avons qu’à nous figurer (ce qui arrivait en effet) Villars dans quelque retour à Versailles, Villars déjà comblé et se présentant comme à moitié délaissé et déçu, parlant avec ostentation de sa malheureuse petite fortune à peine commencée, et de son peu de faveur en Cour, disant tout haut qu’il voyait bien que c’était une des maximes favorites des rois qu’on retient plus les hommes par l’espérance que par la reconnaissance, qu’ils font espérer beaucoup et accordent peu, et donnant par là à entendre qu’à lui, on lui promettait plus qu’on ne tenait. […] Avec un prince souverain qui était son allié et à qui il écrivait Mon frère, Louis XIV n’entendait pas que même son général le prît sur un autre ton que celui du respect. […] Un courtisan ayant dit, de manière à être entendu du roi : « Le maréchal de Villars fait bien ses affaires. » —, « Oui, mais il fait bien aussi les miennes », repartit Louis XIV. […] Je vous le donne pour officier général très entendu et des meilleurs.
Qui pourra sur autrui ses douleurs limiter, Celui pourra d’autrui les plaintes imiter : Chacun sent son tourment et sait ce qu’il endure, Chacun parla d’amour ainsi qu’il l’entendit. […] Enfin, il y a ce dernier sonnet d’elle, qui est également un vœu de mort, non plus de mort au sein du bonheur, mais de mort plus triste et plus terne, quand il n’y a plus pour le cœur de bonheur possible, plus un seul reste de jeunesse et de flamme : Tant que mes yeux pourront larmes épandre, A l’heur65 ; passé avec toi regretter, Et qu’aux sanglots et soupirs résister Pourra ma voix, et un peu faire entendre ; Tant que ma main pourra les cordes tendre Du mignard luth pour tes grâces chanter ; Tant que l’esprit se voudra contenter De ne vouloir rien fors que toi comprendre ; Je ne souhaite encore point mourir : Mais quand mes yeux je sentirai tarir, Ma voix cassée et ma main impuissante, Et mon esprit en ce mortel séjour Ne pouvant plus montrer signe d’amante, Prierai la mort noircir mon plus clair jour. […] La trompette finale a sonné : tous les morts se réveillent, mais il y en a parmi eux (et ce ne sont pas les coupables) qui s’obstinent à rester sourds au clairon de l’Ange et à ne pas vouloir se lever ; on entend seulement leur voix et leur refus monter en paroles déchirantes jusqu’au trône de Dieu : Quoi ! […] tu frappas trop fort en ta fureur cruelle, Tu l’entends, tu le vois, la Souffrance a vaincu.
« On rapporte qu’un jour où il lui faisait le récit de ses entreprises de guerre, il le trouva si attentif qu’il en éprouva un plaisir extrême ; il s’émerveilla surtout lorsque, lui ayant dit la nécessité où l’électeur Maurice le mit de s’enfuir (à Inspruck), le jeune prince lui déclara qu’il était content de ce qu’il venait d’entendre, mais que, pour lui, il n’aurait jamais pris la fuite. […] En égard à son âge de dix-sept ans75, il s’entend très-bien aux choses du monde, et quoique les Espagnols, qui ont coutume d’exagérer leurs faits et de s’émerveiller de tout, exaltent quelques questions qu’il adresse indistinctement à tous ceux qui l’approchent, d’autres, avec plus de fondement peut-être, tirent de l’inopportunité de ces questions un argument peu favorable a son intelligence. » Voilà la triste vérité que notre bon compagnon et compatriote Brantôme vient confirmer et relever de sa manière gaillarde et piquante, ne fut-ce que par ce seul petit trait : « Moi, étant en Espagne, il me fut fait un conte de lui, que son cordonnier lui ayant fait une paire de bottes très mal faites, il les fit mettre en petites pièces et fricasser comme tripes de bœuf, et les lui fit manger toutes devant lui, en sa chambre, de cette façon. » Quand un prince de dix-neuf ans en est là, il me semble qu’il est jugé à jamais et que son avenir est écrit plus clairement que dans les astres. […] Don Carlos, irrité de cette décision qui contrariait ses désirs, profita d’une absence de Philippe, alors en retraite à l’Escurial pour les fêtes de Noël ; il se fit ouvrir la salle du palais où les cortès étaient réunies et lança, à la stupéfaction de tous, l’allocution suivante : « Vous devez savoir que mon père a le dessein d’aller en Flandre et que j’entends de toute manière y aller avec lui. […] Passe encore quand ce sont des femmes comme Marie Stuart que vous mettez en scène, il y a place jusqu’à un certain point au roman ; mais les hommes d’État, mais les caractères connus, définis, ceux dont on a pu lire dans la matinée quelque parole ou acte mémorable, quelque dépêche mâle et simple, peut-on raisonnablement les entendre déclamer, rêver, rimer, métaphoriser, même en beaux vers, le soir ?
. — Le petit recueil que nous réclamons, avec un résumé sensé et simple, sans exagération ni faveur, aurait pour avantage, toutes dépositions entendues, de clore le débat sur une question déjà bien avancée ; le fait de la glorieuse bataille du 1er juin et de la part honorable qu’y prit Jean-Bon se présenterait désormais aussi entouré d’explications et aussi appuyé de témoignages qu’un fait de guerre peut l’être32. […] Nous faisions entendre qu’en notre qualité d’otages l’aga devait veiller à notre sûreté et qu’il était responsable de notre conservation ; ces représentations produisaient si peu d’effet qu’un jour que le citoyen Majastre se présenta à lui la tète ensanglantée d’une pierre qu’il venait de recevoir à côté de l’œil et qui lui avait fait une blessure large et profonde, il n’en obtint pas un signe d’intérêt. […] Il écrivait au ministre de l’intérieur, Chaptal, le 26 fructidor an X (12 septembre 1802), déterminant lui-même le sens dans lequel il entendait ¡’accomplissement de ses devoirs : « Citoyen ministre, Votre lettre du 19 de ce mois me rappelle l’époque fixée par les Consuls pour la cessation des fonctions du commissaire général dans ces départements, et me trace la marche que je devrai suivre dans l’exercice de celles de préfet du Mont-Tonnerre. […] On retrouvait dans le préfet de Mayence le vieux conventionnel du Comité de salut public, avec sa frugalité et sa laboriosité toute républicaine. » Au dîner de l’Empereur où le préfet était invité et en attendant que le maître eût paru, il faut entendre Jean-Bon sous son costume de préfet le plus modeste possible, et, sauf l’habit, tout en noir, bas noirs, cravate noire, rendre raillerie pour raillerie à la troupe dorée qui souriait de sa tenue et de son peu de cérémonie.
(Rouen), bien près de toi, comme tu vois, chez de vieilles amies et parfaitement ignoré, bien doucement, bien choyé, tel qu’il faut qu’il soit pour que je n’aie point à m’inquiéter, mais dans un état moral si triste, si accablant, que je ne puis sortir d’ici que pour me rendre à ses côtés. » C’est en ce sens qu’elle entend les fers qu’il lui faudrait reprendre et dont elle ne ferait que changer, — les chaînes du devoir ! […] Elle donne à entendre qu’il ferait une assez triste figure s’il avait à comparaître en personne. […] Arrivant à Lyon par la Saône, et se faisant débarquer un peu avant l’île Barbe, il entend nommer les jolies maisons de campagne devant lesquelles on passe et dont est bordée cette rive, et il ajoute : « C’est, je pense, dans les environs de ce pays-ci, qui probablement s’appelle Neuville, que la femme que je respecte le plus au monde avait un petit domaine. […] « Après ce grand caractère sont venues les dames de l’Empire, qui pleuraient dans leurs calèches au retour de Saint-Cloud, quand l’Empereur avait trouvé leurs robes de mauvais goût ; ensuite les dames de la Restauration, qui allaient entendre la messe au Sacré-Cœur pour faire leurs maris préfets ; enfin les dames du juste-milieu, modèles de naturel et d’amabilité.
Napoléon, d’ailleurs, avait l’œil sur Jomini au même moment, non pas que Ney lui eût communiqué le mémoire de son aide de camp ; mais on allait combattre les Prussiens, et Jomini avait étudié à fond dans son livre la méthode et la tactique du grand Frédéric et de ses lieutenants : il pouvait être bon à entendre et à employer. […] À côté de Jomini et non pas en contradiction avec lui, un témoin secondaire de cette campagne est à entendre, M. de Fezensac, qui, tout jeune, venait aussi d’être attaché à l’état-major du maréchal Ney et qui faisait le service d’officier d’ordonnance. […] J’ai moi-même entendu raconter au marquis de Saint-Simon, qui était de cet état-major, combien ces jeunes officiers brillants, étourdis autant que braves, s’isolaient de Jomini, de ce confident du maréchal : il avait à leurs yeux le tort d’être à la fois étranger, savant et non viveur. […] » Caulaincourt, qui entendit le mot proféré à deux pas de l’Empereur, l’en gronda amicalement.
Non pas seulement assister d’une bonne place à ce savant et terrible jeu à combinaisons non limitées qu’on appelle la grande guerre, non pas seulement être appelé à donner en quatre ou cinq occasions des conseils plus ou moins suivis, mais être une bonne fois à même d’appliquer son génie, ses vues, sa manière d’entendre et de diriger les mouvements d’un corps d’armée, être compté, en un mot, lui aussi, dans la liste d’honneur des généraux qui ont eu leur journée d’éclat, qui ont combiné et agi, qui ont exécuté ce qu’ils avaient conçu. […] Cette lettre est adressée à l’un de ses amis, négociant et nullement militaire, qu’il avait connu à Paris dans le temps où lui-même était dans les affaires, et qui habitait en dernier lieu à Saint-Pétersbourg63 : « 16/28 mars 1822. — Mon cher Pangloss, j’ai reçu votre aimable et philosophique épître du 8/20 février, et après l’avoir lue et savourée, je me suis bien demandé lequel de nous deux était le coupable du silence de 900 jours… Vous broyez donc décidément du noir sur les bords de la Newa, et, à vous entendre, il ne faut s’occuper ni du passé, ni du présent, ni de l’avenir. […] Il fallait faire entendre, sans le dire, qu’Alexandre, sous ses dehors séduisants, était une nature glissante et fuyante, assez peu sûre. […] J’ai donc tâché d’y apporter toute lumière et, sans rien voiler, rien qu’en exposant, de faire en sorte que tous ceux qui sont et seront plus ou moins ses disciples puissent l’apprécier, le voir tel qu’il était en effet, le bien comprendre dans ses vicissitudes de sentiments et de destinée, le plaindre, l’excuser s’il le faut, pour tout ce qu’il a dû souffrir, l’aborder, l’entendre, le connaître enfin de près et comme il sied, d’homme à homme, et peut-être l’affectionner
Mais, quant à la méthode à apporter dans cette province de l’histoire littéraire, elle ne se dessine que depuis assez peu de temps : et, par méthode, j’entends une étude comparée, coordonnée, qui cherche les classements justes, le degré de mérite appréciable, et qui tient à mesurer positivement les progrès ou changements introduits soit dans la versification, soit dans le vocabulaire poétique et dans la langue. […] Il était dans ces dispositions, et toutefois il s’était mis à l’étude du droit, lorsque, revenant un jour de Poitiers, il rencontra dans une hôtellerie Ronsard, jeune également, un peu son aîné, je crois, encore inconnu, et méditant lui-même sa réforme et révolution poétique : les deux jeunes gens s’entendirent à première vue et se lièrent. […] Aussi, Du Bellay, de même que tes ancêtres se sont entendus appeler patriotes pour avoir défendu la terre de la patrie, de même, toi qui plaides pour la langue paternelle, tu auras à jamais un renom aussi comme bon patriote. » Le mot de patrie revient souvent. […] Et il est bien entendu que nous ne voulons ici nous placer qu’au point de vue strictement littéraire ; nous n’aborderons à dessein ni la politique, ni la philosophie, ni la religion.
Et ici je ne ferai qu’exprimer une idée, un regret qu’on me suggère, mais que je sais partagé par les personnes les mieux entendues de la Comédie-Française elle-même67. […] On se retranchait moins habituellement dans l’ancien répertoire ; les pièces nouvelles, les noms d’auteurs nouveaux abondaient ; le chant d’opéra-comique osait s’y faire entendre. […] J’y relèverais plutôt bien des plaisanteries un peu banales, des bons mots tout faits et déjà entendus sur les députés, les grandes dames, les maris, les amoureux, les banquiers. […] Quand on lui avait raconté ce détail, elle n’avait pas écouté, ce semble, tant sa pensée était ailleurs ; mais voilà que sa jalousie en éveil a intérêt à s’en ressouvenir, et il se trouve qu’elle a entendu comme après coup ; elle se ressouvient.
Entendons bien sa doctrine de la rime asservie à la raison ; cela veut dire que la forme doit réaliser avec fidélité, avec précision l’idée, et que la rime raisonnable est la rime expressive. […] Cependant Boileau donnait nettement à entendre ses préférences. […] puisqu’aussi bien l’une était un éloge : c’est quand Pradon lui donne le talent de peindre « en vers frappants » la réalité vulgaire ; — et l’autre exprimait bien ce qu’il était et voulait être : c’est quand tous, successivement, lui reprochaient de n’être qu’un bourgeois, et de n’entendre rien au sublime des ruelles. […] Il n’a pas vu que la source vive, inépuisable, où s’alimente la comédie, toute la comédie, même la plus haute, c’était la farce populaire, et non la plaisanterie moderne : de là sa rigueur contre Molière, qu’il trouve trop peuple, entendez trop chaud, trop franc, trop grossièrement vivant.
On entend assez ce que je veux dire, et c’est fort heureux qu’on l’entende sans autre explication, car le romanesque n’est pas chose commode à définir. […] Jeanne, qui est « une belle fleur », avec des « yeux magnifiques », est « souverainement intelligente », encore qu’elle entende sans rire les tirades de Jacques de Lerne. […] Au bout de six mois, elle déclare posément à son mari qu’elle ne l’aime plus et qu’elle entend vivre à sa guise et avoir des amants si cela lui plaît.
Il est entendu que nous supposons accompli le long travail préliminaire dont nous ne donnons que les conclusions. […] La Fontaine, si original dans sa manière, met ses fables sous la protection d’Esope et de Phèdre ; on dirait, à l’entendre, qu’il se borne à les traduire, à les interpréter. […] Les anciens mis à part, ils n’entendent relever que d’eux-mêmes. […] La vie intérieure est également laissée dans l’ombre, et j’entends par là aussi bien la vie du cœur que la vie domestique, l’expression des sentiments en chaque individu aussi bien que dans l’intimité du. foyer.
une éternité dont l’amant compte les minutes, attendant une lettre qui n’arrive pas, croyant entendre, à chaque instant, ce frémissement d’une robe de soie qui fait sur l’escalier de la jeunesse un bruit plus doux que le battement des ailes de l’ange sur l’échelle du songe de Jacob. […] Ni oubli ni rédemption pour elles, pas plus après les avoir dites qu’après les avoir entendues. […] Au besoin, il partira seul, avec cent francs dans sa poche et son fusil sur l’épaule, si son appel n’est pas entendu. […] Son mâle esprit est fait pour l’entendre, et il ne m’était pas permis d’être moins sévère.
Les sonnets, les odes et les autres ouvrages qui veulent du sublime, ne s’accommodent pas du simple et du naturel ; c’est l’obscurité qui en fait tout le mérite ; il suffit que le poète croie s’entendre… Nous sommes cinq ou six novateurs hardis qui avons entrepris de changer la langue du blanc au noir ; et nous en viendrons à bout, s’il plaît à Dieu, en dépit de Lope de Vega, de Cervantes… Sachons bien qu’en écrivant ces choses, Lesage avait en vue Fontenelle, Montesquieu peut-être, certainement Voltaire, qu’il trouvait trop recherchés et visant à renchérir sur la langue de Racine, de Corneille, et des illustres devanciers. […] Il était obligé, pour converser, de se servir d’un cornet ; il appelait ce cornet son bienfaiteur, en ce qu’il s’en servait pour communiquer avec les gens d’esprit, et qu’il n’avait qu’à le poser pour ne pas entendre les ennuyeux et les sots25. […] Voici de lui un mot que cite Spence et qui rentre bien dans la philosophie de Gil Blas : quelqu’un faisait de grands récits des doléances qu’on entend perpétuellement en Angleterre, en dépit de tous les droits et des avantages dont on jouit : « Certainement, dit Lesage, le peuple anglais est le plus malheureux peuple de la terre, avec la liberté, la propriété, et trois repas par jour. » 21. […] [NdA] Sa surdité presque complète ne l’avait nullement empêché, durant des années, de suivre la représentation de ses pièces : il n’en perdait presque rien, et disait même qu’il n’avait jamais mieux jugé du jeu et de l’effet que depuis qu’il n’entendait plus les acteurs.
Il faut entendre Mme de Caylus raconter cette première aventure : « À peine ma mère fut-elle partie de Niort, que ma tante, accoutumée à changer de religion, et qui venait de se convertir pour la seconde ou la troisième fois, partit de son côté et m’emmena à Paris. » Sur la route on rencontre d’autres jeunes filles d’un âge plus fait, et que Mme de Maintenonréclamait aussi pour les convertir. […] Je pleurai d’abord beaucoup ; mais je trouvai le lendemain la messe du roi si belle, que je consentis à me faire catholique à condition que je l’entendrais tous les jours, et qu’on me garantirait du fouet. […] Avoir de l’urbanité, comme Gédoyn l’entend, c’est avoir des mœurs, non pas des mœurs dans le sens austère, mais dans le sens antique : Horace et César en avaient. […] C’est ainsi qu’il faut entendre cet autre passage de l’éloge, où il est dit : « Dès qu’on avait fait connaissance avec elle, on quittait sans y penser ses maîtresses, parce qu’elles commençaient à plaire moins ; et il était difficile de vivre dans sa société sans devenir son ami et son amant. » Ces expressions vives du peintre platonique ne sont que pour mieux rendre cette joie de l’esprit et cette pure ivresse de la grâce qu’on ressentait insensiblement près d’elle.
Fleury, et les abondants extraits qu’il donne des journaux et des pamphlets de Camille Desmoulins depuis 1789 jusqu’en 93, sont peu faits pour l’honorer et le grandir aux yeux de la postérité, j’entends auprès des gens sensés de tous les régimes et de tous les temps. […] Il était un peu étrange qu’un écrivain qui prétendait s’adresser avant tout au peuple parlât ainsi latin à tort et à travers, et lâchât à tout moment des allusions qui ne pouvaient être entendues que de ceux qui avaient fait leurs classes. […] On n’a plus, il est vrai, le plaisir d’y entendre Piron, Voltaire, etc. » Piron et Pindare ! […] Necker au moment de l’ouverture des États généraux ; c’est dans le ton solennel de l’Ode à Namur, et des pièces de Jean-Baptiste Rousseau : Qu’entends-je ?
Il s’agissait de faire entendre à une Altesse Sérénissime qu’on était amoureux d’elle sans prononcer le mot d’amour, de retourner cette idée galante en tous sens, de simuler une ardeur contenue encore dans les termes du respect, d’obtenir d’elle des faveurs enfin. […] Le jeu de La Motte était de dire que ce Louise-Bénédicte de Bourbon ne lui durait guère, donnant à entendre qu’il le dévorait de baisers quand il était seul. […] Son catéchisme et la philosophie de Descartes sont deux systèmes qu’elle entend également bien. […] L’auteur du portrait continue de nous montrer ainsi tous les vices naïfs de sa princesse, toutes ses qualités sans âme et sans lien, sa religion sans piété, sa profusion sans générosité, beaucoup de connaissances sans aucun vrai savoir, « tous les empressements de l’amitié sans en avoir les sentiments », pas le moindre soupçon de la réciprocité et de la sympathie humaine : « On n’a point de conversation avec elle ; elle ne se soucie pas d’être entendue, il lui suffit d’être écoutée. » Et à la voir ainsi se montrer à nu non par franchise, mais parce qu’elle n’a en elle aucun principe d’égards et d’attention pour autrui, Mlle de Launay conclut en citant ce mot qui exprime le résultat de toute son étude, et qu’elle aurait bien trouvé d’elle-même : Elle (la duchesse du Maine) a fait dire à une personne de beaucoup d’esprit que les princes étaient en morale ce que les monstres sont dans la physique ; on voit en eux à découvert la plupart des vices qui sont imperceptibles dans les autres hommes.
Il faut l’entendre décrire ses toilettes et ajustements dans le plus grand détail ; il s’y délecte, il s’y étend, il y excelle. […] Il vit la mort de près, il entendit les médecins dire de lui : « Il n’en a pas pour deux heures. » L’image de sa vie passée lui apparut sous son vrai jour ; rapproche des jugements de Dieu le jeta dans l’épouvante. […] « Nous faisons bien ce voyage-ci à la française », dit-il quelque part, donnant à entendre qu’on n’avait rien prévu à l’avance ; et il a raison. […] L’abbé de Choisy écrit comme il cause, comme il entend causer ; il aime à ouvrir des parenthèses, et quand un nouveau sujet l’intéresse, il interrompt et laisse le précédent.
N’a-t-elle donc pas eu raison plus tard de dire en s’accusant, dans ses Réflexions sur la miséricorde de Dieu, que sa gloire et son ambition (il faut entendre son ambition et sa joie d’être aimée et préférée) avaient été comme des chevaux furieux qui entraînaient son âme dans le précipice ? […] Parlant de la première, de la Cananée, elle s’écrie : « Regardez-moi quelquefois en m’approchant de vous comme cette humble étrangère, j’entends, Seigneur, comme une pauvre chienne, qui s’estime trop heureuse de ramasser les miettes qui tombent de la table où vous festinez vos élus. » L’expression est franche jusqu’à la crudité, mais elle est sincère, et, en reproduisant le texte de Mme de La Vallière, il ne fallait pas la supprimer, surtout quand on assure qu’on ne s’est pas permis d’y changer un seul mot 43. […] Le lendemain, 20 avril 1674, elle entendit la messe du roi qui partait pour l’armée ; au sortir de la messe, elle demanda pardon à genoux à la reine pour ses offenses, puis monta en carrosse et se rendit aux Carmélites du faubourg Saint-Jacques, où une grande foule de peuple rangée sur son passage l’attendait. […] Ce qu’il voulait avant tout, en prêchant devant elle, c’était de porter à cette âme une bonne parole, et non de briller aux yeux des mondains par un de ces miracles d’éloquence qui lui étaient si faciles et si familiers : Mais prenez bien garde, messieurs, qu’il faut ici observer plus que jamais le précepte que nous donne l’Ecclésiastique : « Le sage qui entend, dit-il, une parole sensée, la loue et se l’applique à lui-même. » Il ne regarde pas à droite et à gauche, à qui elle peut convenir ; il se l’applique à lui-même, et il en fait son profit.
Cependant elle marquait de bonne heure le goût de l’esprit, du bel et fin esprit, de celui qui sert à la conversation ; son père y excellait : elle raconte comment à Tours, chaque soir, elle aimait à entendre Monsieur l’entretenir de toutes ses aventures passées, « et cela fort agréablement, comme l’homme du monde qui avait le plus de grâce et de facilité naturelle à bien parler ». […] Mazarin dit que ces coups de canon tirés par ordre de Mademoiselle avaient tué son mari, donnant à entendre qu’elle ne pouvait plus désormais prétendre à épouser le roi. […] Il y avait des jours pourtant où l’on aurait dit qu’il commençait à entendre ; mais il s’échappait toujours à temps « par des manières respectueuses qui étaient pleines d’esprit », et qui achevaient d’enflammer l’innocente princesse. […] Il entend bien ne pas cesser de coucher au Louvre.
L’écriture, l’orthographe, la danse, à dessiner, à peindre, à travailler de l’aiguille, elle apprit tout, nous dit Conrart, et elle devinait d’elle-même ce qu’on ne lui enseignait pas : Comme elle avait dès lors une imagination prodigieuse, une mémoire excellente, un jugement exquis, une humeur vive et naturellement portée à savoir tout ce qu’elle voyait faire de curieux et tout ce qu’elle entendait dire de louable, elle apprit d’elle-même les choses qui dépendent de l’agriculture, du jardinage, du ménage, de la campagne, de la cuisine ; les causes et les effets des maladies, la composition d’une infinité de remèdes, de parfums, d’eaux de senteur, et de distillations utiles ou galantes pour la nécessité ou pour le plaisir. […] Dans ce portrait de Sapho, qui est en si grande partie le sien, elle insiste beaucoup sur ce que Sapho ne sait pas seulement à fond tout ce qui dépend de l’amour, mais sur ce qu’aussi elle ne connaît pas moins tout ce qui est de la générosité ; et toute cette merveille de science et de nature, selon elle, se couronne encore de modestie : En effet, sa conversation est si naturelle, si aisée et si galante, qu’on ne lui entend jamais dire en une conversation générale que des choses qu’on peut croire qu’une personne de grand esprit pourrait dire sans avoir appris tout ce qu’elle sait. […] Il est certain, disait Mlle de Scudéry, qu’il y a des femmes qui parlent bien, qui écrivent mal, et qui écrivent mal purement par leur faute… C’est, selon moi, une erreur insupportable à toutes les femmes, ajoute-t-elle, de vouloir bien parler et de vouloir mal écrire… La plupart des dames semblent écrire pour n’être pas entendues, tant il y a peu de liaison en leurs paroles, et tant leur orthographe est bizarre. […] Il n’est pas rare d’entendre dire que les romans de Mlle de Scudéry sont détestables et illisibles, mais qu’il n’en est pas ainsi de ses Conversations.
La monarchie, comme il l’entendait, n’était certes pas la monarchie constitutionnelle ni à l’anglaise : pourtant « soyez persuadé, écrivait-il à ce même ami, que, pour fortifier la monarchie, il faut l’asseoir sur les lois, éviter l’arbitraire, les commissions fréquentes, les mutations continuelles d’emplois et les tripots ministériels ». […] Je crois entendre pleurer à Turin ; je fais mille efforts pour me représenter la figure de cette enfant de douze ans, que je ne connais pas. […] Prêtez l’oreille, vous entendrez l’écho de la Neva qui répète : Quels souvenirs ! […] M. de Maistre, comme un homme qui parle seul et de loin, et dont la voix monte pour être entendue, prête à la vérité même l’air du paradoxe et l’accent du défi.
On croit entendre à l’avance un conseil de Vauvenargues à quelque jeune ami, dans la bouche de cette mère issue d’une bourgeoisie riche et licencieuse. […] Quoi qu’il en soit, il est bon à entendre sur elle, et il fait sans s’en douter l’éloge de Mme de Lambert, en remarquant que, malgré toutes les critiques un peu rudes qu’il lui adressait, elle lui conserva toujours son amitié et son indulgence. […] Elle est aussi l’un des premiers moralistes qui, au sortir du xviie siècle, soient revenus à l’idée très peu janséniste que le cœur humain est assez naturellement droit, et que la conscience, si on sait la consulter, est le meilleur témoin et le meilleur juge : « Par le mot conscience, j’entends, dit-elle à son fils, ce sentiment intérieur d’un honneur délicat, qui vous assure que vous n’avez rien à vous reprocher. » Elle donne, à sa manière, le signal que Vauvenargues, à son tour, reprendra, et qui, aux mains de Jean-Jacques, deviendra un instrument de révolution universelle. […] Mme de Lambert, comme Mlle de Scudéry, pense que rien n’est si mal entendu que l’éducation qu’on donne aux jeunes personnes : « On les destine à plaire ; on ne leur donne des leçons que pour les agréments. » Elle, au contraire, fille d’une mère telle que nous l’avons dite, elle a senti de bonne heure le besoin qu’ont les femmes d’être raisonnables et d’être fortifiées contre leurs passions.
Et moi je dirai, et tous ceux qui ont connu et habité ce pays diront : Oui, cherchez-y sinon des Julie et des Saint-Preux, du moins des femmes du genre de Claire ; j’entends par là un certain tour d’esprit mêlé de sérieux et de gaieté, naturel et travaillé à la fois, très capable de raisonnement, d’étude, de dialectique même, vif pourtant, assez imprévu, et non du tout dénué d’agrément et de charme. […] Ce n’était pas ainsi que l’avait entendu sa pudeur. […] Tout d’abord j’y trouve cette pensée, par exemple : « Il ne faut pas seulement s’acquitter de ses devoirs particuliers, mais il faut aussi s’acquitter de ses talents et de ses circonstances envers sa conscience et la société. » S’acquitter de ses talents est ingénieux et neuf, et se comprend ; mais s’acquitter de ses circonstances, pour dire : faire ce qu’on doit dans une grande situation et avec une grande fortune, cela ne s’entend plus. […] La sienne est véritable ; elle est puisée aux sources morales les plus pures, et, dès qu’il s’agit d’élévation, nous aurons plaisir et profit à l’entendre.
Le Brun, dans l’orgueil de sa conscience solitaire, souriait de pitié lorsqu’il entendait dire que La Harpe avait en vers quelque chose du « style de Jean Racine » ; mais, si La Harpe, s’autorisant de Voltaire, en venait à parler à la légère de ce grand Corneille, « le raisonneur ampoulé », comme on le voit qualifié dans la correspondance de Ferney, oh ! […] Voici une histoire très vraie que j’ai entendu plus d’une fois raconter de la bouche même de l’aimable personne qui en avait été témoin et un peu complice. […] Mais celle-ci essaya en vain de balbutier quelques mots de son rôle, M. de La Harpe y coupa court, lui représentant que ce n’était ni l’heure ni le lieu de l’entendre, et il la remit au lendemain en la reconduisant poliment. […] La Harpe lui dit : « Je ne suis pas si loin que vous le croyez de m’entendre avec vous.
Ici commença, dans l’esprit du maréchal, une lutte morale sur laquelle il faudrait lui-même l’entendre : d’un côté, un ami, un bienfaiteur, le plus grand capitaine dont il avait été de bonne heure l’aide de camp et l’un des lieutenants préférés, mais ce grand capitaine, auteur lui-même de sa ruine, qui semblait déjà consommée ; de l’autre, un pays qui criait grâce, une situation politique désastreuse dont, plus éclairé que beaucoup d’autres, il avait le secret, et dont il envisageait toutes les extrémités. […] Ce qu’on peut dire après avoir écouté Marmont, et ce que diront tous ceux qui l’entendront un jour, c’est que, dans la résolution qu’il prit, il n’entra rien de cet égoïsme qui songe avant tout à soi et non au bien public, et qui déshonore. […] Arrivés à Petit-Bourg, où était le quartier général, dans la soirée du 4 avril, pendant que les maréchaux parlementaient, Marmont vit le prince de Schwarzenberg, qui lui dit que ses propositions étaient acceptées ; mais Marmont, lui expliquant le nouvel état de choses résultant de l’abdication, demanda à être dégagé ; ce qui fut entendu et convenu à l’instant. […] Le maréchal ajouta : « Vous entendez bien que vous ne devez tirer que si on engage sur vous une fusillade, et je définis une fusillade non pas quelques coups de fusil, mais cinquante coups de fusil tirés sur les troupes. » On est bien revenu depuis de ces délicatesses.
M. de Humboldt, dans le voyage aux régions équinoxiales qu’il entreprit au commencement de ce siècle avec son ami le botaniste Bonpland, et qui est une date mémorable dans la science, a reconnu en mainte rencontre cette vérité intime et pittoresque de Bernardin et le charme pénétrant de ses observations naturelles : Que de fois, dit le savant voyageur, nous avons entendu dire à nos guides dans les savanes de Venezuela ou dans le désert qui s’étend de Lima à Truxillo : « Minuit est passé, la Croix commence à s’incliner ! […] quand pourrai-je, s’écrie-t-il, respirer le parfum des chèvrefeuilles, me reposer sur ces beaux tapis de lait, de safran et de pourpre que paissent nos heureux troupeaux, et entendre les chansons du laboureur qui salue l’aurore avec un cœur content et des mains libres ! […] Ils s’entendaient véritablement et pensaient tous deux à l’unisson sur des points élevés. […] Comme il s’en faut bien que ma fortune approche de sa médiocrité d’or, je ne vous donnerai que des fraises et du lait dans des terrines ; mais vous aurez le plaisir d’entendre les rossignols chanter dans les bosquets des Dames-Anglaises, et de voir leurs pensionnaires et leurs jeunes novices folâtrer dans leur jardin.
Il a fallu trois cents ans pour que l’Angleterre commençât à entendre ces deux mots que le monde entier lui crie à l’oreille : William Shakespeare. […] J’ai entendu un évêque anglican discuter sur l’Iliade, et tout condenser dans ce mot pour accabler Homère : Ce n’est point vrai. […] » Luc a beau répéter : Venerunt autem ad illum mater et fratres ejus. » Jean a beau recommencer : « Ipse et mater ejus et fratres ejus… Neque enim fratres « ejus credebant in eum… Ut autem ascenderunt fratres ejus. » Le catholicisme n’entend pas. […] Entendons-nous, c’est l’esprit français jusqu’à la Révolution exclusivement.
Partout où cette musique se fait entendre, elle est d’un charme si puissant qu’elle entraîne et le musicien qui compose, au sacrifice du terme propre, et l’homme sensible qui écoute, à l’oubli de ce sacrifice. […] Je n’entends pas par une bataille une escarmouche de pandours ou de hussards ; j’en ai une plus grande idée. […] Sur un troisième plan plus sur la gauche, et tout à fait sur le devant, c’était un homme accroupi, mais il commence à se lever et à jetter ses regards mêlés d’inquiétude et de curiosité vers la gauche et le devant de la scène ; il a entendu. […] En lui pardonnant sa manière de pyramider, sa disposition est bien entendue, les groupes s’y multiplient sans confusion ; sa couleur est forte, les effets d’ombres et de lumières sont grands ; ses figures noblement et naturellement dessinées, leurs attitudes variées ; ses combattans bien en action, ses morts, ses mourans, ses blessés bien jettés, bien entassés sous les pieds de ses chevaux ; ses animaux vrais et animés ; ce sont des bataillons rompus, des postes emportés, un feu perçant à travers les rougeâtres tourbillons de la poussière et de la fumée ; du sang, du carnage, un spectacle terrible. à l’une de ses tempêtes sa mer est trop agitée aux parties éloignées du tableau.
Les hommes se donnent à entendre les uns aux autres par des sons artificiels et par des sons naturels. […] Un mot françois n’a de signification que pour ceux qui entendent cette langue. […] Ils se donnent à entendre en contrefaisant le bruit que fait la chose, ou en mettant dans le son imparfait qu’ils forment, quelque ton qui ait le rapport le plus marqué qu’il soit possible, avec la chose qu’ils veulent donner à comprendre sans pouvoir la nommer. […] Du moins si les sons par lesquels les hommes marquent leur surprise, leur joïe, leur douleur et leurs autres passions ne sont pas entierement les mêmes dans tous les païs, ils y sont si semblables que tous les peuples les entendent.
Cette définition convient à l’éloquence même du silence, langage énergique et quelquefois sublime des grandes passions ; à l’éloquence du geste, qu’on peut appeler l’éloquence du peuple, par le pouvoir qu’elle a pour subjuguer la multitude, toujours plus frappée de ce qu’elle voit que de ce qu’elle entend ; enfin, à cette éloquence adroite et tranquille, qui se borne à convaincre sans émouvoir, et qui ne cherche point à arracher le consentement, mais à l’obtenir. […] Aucune langue sans exception n’est plus sujette à l’obscurité (lue la nôtre, et ne demande dans ceux qui en font usage pins de précautions minutieuses pour être entendus. […] Les musiciens m’entendront, et il faudrait trop de paroles pour me faire entendre aux autres.
Dans un sens, elle l’était ; on l’avait éprouvé, mais ce n’est pas dans ce sens-là qu’on l’entendit… On fit bien vite un plomb de ce très fin acier. […] Et qui se révoltait, comme toutes les bégueules se révoltent, parce qu’elles n’entendent rien, ces pauvres diablesses, indigentes d’imagination, à la grâce de certaines faiblesses qui font le bonheur de la vie ! […] Nisard sur Tocqueville, ce Montesquieu du Journal des Débats, où le blâme cependant se joint à l’éloge, on en entend la note quoique adoucie, et que la leçon finit par arriver, mais elle arrive à travers les spirales de la politesse. […] mais indulgent et charmant, qui n’aime pas tout mais qui goûte tout, et qu’on n’entend jamais parler du haut de la tête comme il l’a dit lui-même si bien de Boissonnade, M.
Esprits qui s’entendent comme des cœurs ! […] Elle ne lui avait nullement nié sa découverte ; mais elle n’entendait pas, comme c’était son droit, à elle, qu’il mêlât de la théologie à son enseignement. […] Dans sa Virginie de Leyva, ce n’est qu’un libertin par la pensée et un précieux dans le langage, et, dans son impossibilité d’être énergique, parce qu’il n’est pas passionné, il nous déteint l’indécente Religieuse de Diderot, ce vermillon obscène, et nous raconte, avec des chatteries de style comme il en a, même dans les sujets les plus graves, une histoire de la Gazette des Tribunaux d’Italie qui, pour faire balle dans nos âmes et y éveiller l’écho de haine qu’on y voudrait entendre, ne demandait qu’une poignante simplicité. […] Par exemple, l’État libre dans une confédération d’États libres, emprunté à Proudhon et à Girardin ; une apothéose du juste-milieu, comme l’entendait Victor Cousin dès 1828.
Les clairons des archanges sonnent, Les morts entendent et frissonnent, Et tous leurs poils se hérissonnent D’un subit épouvantement. […] On entend claquer les squelettes. […] L’ironie de sa parole, la revanche de Dieu y vibre si fort que c’est plus terrible à entendre que l’enfer n’est hideux à voir ! […] Et jamais cette ironie divine ne se lasse, et d’un bout de ce poëme à l’autre on l’entend rugir dans ces strophes aux rimes redoublées et dociles, dans ces vers maniés, courbés, assouplis par cet impérieux Maître du rythme.
Le procureur, muni du billet, ne veut rien entendre. […] Entendons-nous. […] Nous ne nous entendrons jamais. […] Dès que vous sortez du bon sens, vous voyez et vous entendez qu’on se moque de vous. […] J’entends la clameur qui s’élève contre moi.
Bien entendu ! […] Il nous les donne à voir, à entendre. […] Entendez-vous quelque part, là-haut, piler dans une coupe d’or des morceaux de cristal ? […] Non : tous se comprenaient, s’entendaient fraternellement ! […] Et ces voix d’autrefois font entendre à Justin-Charles les voix d’aujourd’hui, il les entend dans la bâtisse neuve comme dans l’édifice chargé d’années.
Il est bien entendu qu’en ces jours de solennité oratoire, il ne faut pas demander un jugement tout à fait exact et définitif sur l’homme qu’on célèbre. […] Est-il donc bien vrai que, si ç’eût été à recommencer, M. de Tocqueville, éclairé par l’expérience, se fût mieux entendu avec M.
Je me rappelle qu’à l’Académie où nous entendions M. de Vigny plus souvent et plus longuement que nous ne l’aurions désiré (car il s’obstinait la plupart du temps à des choses ou impossibles ou inutiles ou déjà résolues,), il m’arriva plus d’une fois de laisser voir mon impatience ; sur quoi notre doux et indulgent confrère, M. […] J’ai entendu plusieurs personnes soutenir que la peinture de cet orage n’était pas réelle, que c’était de pure imagination.
Il entend au dedans de lui une voix secrète qui lui dit : « Puisque l’ombre redouble, que le froid de la nuit se fait sentir, et que tu as marché tout te jour, prends courage, c’est que tu n’es pas loin d’arriver. » Dès lors la chaîne des saintes idées se renoue ; le souvenir de Dieu redescend, de ce Dieu fait homme, dont le dernier soupir, la dernière voix fut aussi une plainte à son père, un pourquoi sans réponse. […] Au bord de quelque golfe d’Italie, à l’entrée de quelque villa dont la blancheur contraste avec les bosquets de citronniers qui l’entourent, on entend le son d’une harpe, et une voix, voix si douce que l’amour s’y devine : Le portique au soleil est ouvert : une enfant Au front pur, aux yeux bleus, y guide en triomphant Un lévrier folâtre aussi blanc que la neige, Dont le regard aimant la flatte et la protège ; De la plage voisine ils prennent le sentier Qui serpente à travers le myrte et l’églantier ; Une barque non loin, vide et légère encore, Ouvre déjà sa voile aux brises de l’aurore, Et berçant sur leurs bancs les oisifs matelots, Semble attendre son maître, et bondit sur les flots..
On poursuit les métaphores musicales, quand on n’entend rien à la musique. […] N’allez point, bien entendu, affecter de dire : je suis tel ; il faut que cela se voie sans le dire.
Vielé-Griffin n’a usé que discrètement de la poésie populaire — cette poésie de si peu d’art qu’elle semble incréée — mais il eût été moins discret qu’il n’en eût pas mésusé, car il en a le sentiment, et le respect… Je ne parle pas de la part très importante qu’il a eue dans la difficile conquête du vers libre ; mon impression est plus générale et plus profonde, et doit s’entendre non seulement de la forme, mais de l’essence de son art : il y a, par Francis Vielé-Griffin, quelque chose de nouveau dans la poésie française. […] Ce livre procure une grande ivresse qui n’est point amère ni voluptueuse ; qu’on l’approche de son âme, on y entendra l’immense respiration de la vie : ainsi le coquillage redit à l’oreille l’immortel murmure de la mer.
Fulvio invoque l’appui de son valet Scapin, le roi des fourbes ; ce dernier fait une première démarche auprès de Celia et de Mezzetin, le maître de Celia ; mais Fulvio survient après lui, et dit tout le contraire de ce que le valet vient de dire, de sorte que Mezzetin s’écrie : Signor, ho inteso il tuono della canzone, ma la musica non fa melodia, « j’ai entendu la chanson, mais votre musique n’est point d’accord24 ». […] Scapin, qui a entendu les conventions que l’étudiant vient de faire avec Mezzetin, feint d’être brouillé avec Fulvio son maître qui l’a battu ; il entre au service de Cintio, qui l’envoie demander l’argent à Beltrame, et qui lui confie l’anneau à la vue duquel on lui délivrera Celia.
Sans l’histoire, il est difficile d’entendre les auteurs anciens ; sans la morale universelle, il est impossible de fixer les règles du goût : et, sous ces deux points de vue, l’enseignement de ce second cours reflète encore sur l’enseignement du premier. […] Sans la mythologie, on n’entend rien aux auteurs anciens, aux monuments, ni à la peinture, ni à la sculpture, même modernes, qui se sont épuisées à remettre sous nos yeux les vices des dieux du paganisme, au lieu de nous représenter les grands hommes.
Il s’avance ; il voudrait bien aussi entendre son grand-papa, le voir et le servir ; les enfants sont officieux. […] Elle a cessé son ouvrage, et elle avance de côté sa tête pour entendre.
Partout où vous verrez une poignée de terre recueillie dans la plaine, portée dans un panier d’osier, aller couvrir la pointe nue d’un rocher, et l’espérance d’un épi l’arrêter là par une claie, soyez sûr que vous verrez peu de grands édifices, peu de statues, que vous trouverez peu d’orphées, que vous entendrez peu de poëmes divins… et que m’importe ces monumens fastueux ? […] La vertu, la vertu, la sagesse, les mœurs, l’amour des enfans pour les pères, l’amour des pères pour les enfans, la tendresse du souverain pour ses sujets, celle des sujets pour le souverain, les bonnes loix, la bonne éducation, l’aisance générale ; voilà, voilà ce que j’ambitionne… enseignez-moi la contrée où l’on jouit de ces avantages, et j’y vais, fût-ce la Chine… mais là… je vous entends.
Certainement Seneque n’entend point parler ici d’un homme qui parle et qui fait les gestes en même-temps. […] L’homme de génie dont je viens de parler avoit conçû par la seule force de son imagination que le spectacle pouvoit tirer du pathetique, même de l’action muette des choeurs, car je ne pense pas que cette idée lui fut venuë par le moïen des écrits des anciens, dont les passages qui regardent la danse des choeurs n’avoient pas encore été entendus, comme nous venons de les expliquer.
Vous concevez que je ne puis vous entendre tous à la fois. […] Vos griefs sont entendus, monsieur Cascaret. — Créancier Poupardot, approchez sans crainte.
et il entend à merveille le petit ménage de sa poire à poudre ! […] Comme écrivain (uniquement comme écrivain, bien entendu), Vallès est le jeune homme dont Proudhon est l’homme fait.