Polyeucte, par exemple, n’eut jamais autant de faveur à aucune époque, je le pense, ni jamais même à son début, que dans cette mémorable soirée où Pauline, néophyte, fut vue si simple et si sublime, où l’acteur aussi, près d’elle, parut si chrétiennement passionné, où le rôle de Félix lui-même fut compris. […] La tentative du moins était bonne, et elle demeure en vue comme une tête de pont qui n’aurait pas été continué. […] Quant à moi, devenu plus sage Et dans mes désirs satisfait, Peu redoutable au voisinage, Je ne demande à ce village De lot que celui qu’il m’a fait ; Content si, m’assurant la vue De la rivière et du coteau, J’y puis seulement, sur la rue, Joindre la place étroite et nue Que borne, en fleurs, le vieux sureau. […] » Et Camoëns, dans son admirable cançao écrite en mer, durant une longue croisière pénible, en vue de l’Afrique et de l’Arabie, a dit : « Je demande de vos nouvelles, madame, aux vents amoureux qui soufflent de la contrée où vous habitez ; je demande aux oiseaux qui volent au-dessus de moi s’ils vous ont vue, ce que vous faisiez, ce que vous disiez ; où ?
Anatole de Montaiglon pour le xve siècle, M. d’Héricault pour l’entrée du xvie et même pour des branches et des séries antérieures, se sont partagé ce riche domaine et y ont porté leurs vues, leur courant d’études dès longtemps accumulées. […] Je ne puis, après tant de collaborateurs autorisés et curieux qui ont tout dit, qui ont dit plus et même autrement que je n’aurais su trouver pour mon compte sur chaque sujet en particulier, je ne puis faire ici qu’une chose : présenter une vue générale et, en me tenant au point de vue du goût, qui doit se combiner avec le point de vue historique et non s’y confondre, indiquer les belles saisons, les bons siècles, les vraiment heureux moments de cette poésie française qui a si souvent brisé avec son passé, qui s’est si peu souvenue d’elle-même, et à qui il était bon d’offrir une fois ses titres au complet, pour lui rendre tout son orgueil et son courage. […] Au lieu de se créer un moyen âge de fantaisie et presque tout d’imagination, on aurait pu, par une érudition précise combinée avec une vue d’imagination ferme et nette, sauver, ressaisir, reproduire et remettre en circulation bien des beautés caractéristiques, sobres et mâles. […] Mais l’excuse est dans les dates mêmes : comment, de 1825 à 1830, les poètes, même les plus doués de seconde vue, auraient-ils pu savoir et lire couramment ce que les érudits alors déchiffraient, épelaient à peine, et qui ne devait sortir que quelques années plus tard de la poussière des bibliothèques ?
Quoi qu’il en soit, à table, à la vue d’un mets dont elle a envie, elle dit plusieurs fois de suite oua-oua ; elle dit aussi, le même mot, quand, après en avoir mangé, elle veut en manger encore ; mais c’est toujours en présence d’un mets et pour désigner quelque chose de mangeable. […] » Ses exclamations ne finissaient pas (vingt mois). — Un peu plus tard (deux ans et demi), elle a été extrêmement frappée par la vue de la lune. […] Ainsi le pli est déjà pris ; une famille de sensations conduit à une autre. — Même opération au jardin sur des fleurs et branches d’arbustes qu’il avait vues depuis longtemps, mais non touchées ; aussitôt qu’il a pu diriger ses mains, on le soulevait à portée de l’arbuste, et il touchait, empoignait les fleurs et les branches, avec une attention et un intérêt très visibles. […] Il les regardait avec un grand plaisir, puis les perdait de vue, puis les cherchait, les découvrait et criait : Bête !
Là-dessus une statue comme le Méléagre ou le Thésée du Parthénon, ou bien encore la vue de cette Méditerranée lustrée et bleue comme une tunique de soie et de laquelle sortent les îles comme des corps de marbre, avec cela vingt phrases choisies dans Platon et Aristophane vous instruiront beaucoup plus que la multitude des dissertations et des commentaires. — Pareillement encore, pour entendre un Pourana indien, commencez par vous figurer le père de famille qui, « ayant vu un fils sur les genoux de son fils », se retire selon la loi, dans la solitude, avec une hache et un vase, sous un bananier au bord d’un ruisseau, cesse de parler, multiplie ses jeûnes, se tient nu entre quatre feux, et sous le cinquième feu, c’est-à-dire le terrible soleil dévorateur et rénovateur incessant de toutes les choses vivantes ; qui, tour à tour, et pendant des semaines entières, maintient son imagination fixée sur le pied de Brahma, puis sur le genou, puis sur la cuisse, puis sur le nombril, et ainsi de suite jusqu’à ce que, sous l’effort de cette méditation intense, les hallucinations paraissent, jusqu’à ce que toutes les formes de l’être, brouillées et transformées l’une dans l’autre, oscillent à travers cette tête emportée par le vertige, jusqu’à ce que l’homme immobile, reprenant sa respiration, les yeux fixes, voie l’univers s’évanouir comme une fumée au-dessus de l’Être universel et vide, dans lequel il aspire à s’abîmer. […] Il y a une cause intérieure qui a tourné l’esprit des fidèles vers ces graves et monotones mélodies, une cause plus large que son effet, je veux dire l’idée générale du vrai culte extérieur que l’homme doit à Dieu ; c’est elle qui a modelé l’architecture du temple, abattu les statues, écarté les tableaux, détruit les ornements, écourté les cérémonies, enfermé les assistants dans de hauts bancs qui leur bouchent la vue, et gouverné les mille détails des décorations, des postures et de tous les dehors. […] Tout ce qui développe la crédulité en même temps que les vues poétiques d’ensemble engendre la religion. […] Les vues métaphysiques d’Aristote sont isolées ; d’ailleurs chez lui, comme chez Platon, elles ne sont qu’un aperçu.
La nature entière se réveille ; de nouvelles feuilles, de nouvelles fleurs poussent à vue d’œil. […] Si on est affligé par la vue des ruines qu’accumule une inévitable rivalité, on est amplement dédommagé par l’intensité de la vie individuelle. […] Douze cents pieds d’espace ouvrent à l’œil la vue nécessaire pour embrasser la masse et la beauté de l’église. […] Vue générale de l’intérieur de Saint-Pierre « On pousse avec peine une grosse portière de cuir, et nous voici dans Saint-Pierre.
Là on le perd de vue. […] Enfin, frôlant la mort à chaque pas de son aventureuse existence, faut-il s’étonner qu’il l’ait vue, qu’elle l’ait obsédée, en ce siècle où elle était présente à toutes les âmes ? […] Des corps, il n’en aurait cure : les âmes, il les aurait vues au ciel, devant la face de Dieu. […] Encore ne sais-je pas s’il se tait par conscience du mal ou par crainte de gens actuellement puissants, dont son habileté trop grande avait contrarié les vues.
Garnier faisait observer qu’après tout pareille chose s’était vue, et que « mademoiselle de Lenclos » inspira des passions, causa des duels à soixante-dix ans. […] Le Hir rappelle, à beaucoup d’égards, Dœllinger par son savoir et ses vues d’ensemble ; mais sa docilité l’eût préservé des dangers que le concile du Vatican a fait courir à la foi de la plupart des ecclésiastiques instruits. […] Ses vastes vues m’enchantaient, et je me disais avec un vif regret : « Ah ! […] Ces messieurs de Saint-Sulpice, habitués à une plus large vue des choses, ne furent pas trop surpris.
C’est de la nature que tu reçus cette sensibilité prompte qui réfléchit tous les objets qui l’ont frappée, ce tact délicat, ces vues justes et fines, ce discernement si sûr, ce sentiment des convenances, ce goût enfin cultivé par les leçons de port-royal, nourri par le commerce assidu des anciens, fortifié par les conseils de Boileau ; ce goût, qualité rare et précieuse, qui peut-être est au génie ce que la raison est à l’instinct, s’il est vrai que l’instinct soit le mobile de nos actions, et que la raison en soit le guide ; ce goût qui attache aux productions vraiment belles le sceau d’une admiration éclairée et durable ; qui sépare, par un intervalle immense, les Virgile, les Cicéron, les Horace, des Lucain, des Stace et des Sénèque ; qui seul enfin élève les ouvrages de l’homme à ce degré de perfection qui semblait au dessus de sa foiblesse. […] L’homme, revenu de son premier étonnement, relève la vue et ose fixer d’un regard attentif ce que d’abord il n’avait admiré qu’en se prosternant. […] Les autres sont moins aimables, d’un effet moins sûr et moins étendu, beaucoup plus dépendantes du mérite de l’exécution, des combinaisons de l’art, et de la sagacité des juges : tels sont les ouvrages dont l’objet est plus éloigné de la classe la plus nombreuse des spectateurs, dont le but est plus détourné et plus réfléchi, dont l’intérêt nous est moins cher et nous attache sans nous transporter, dont la morale, développant de grandes et utiles vérités, et supposant des vues profondes, parle moins à la multitude, mais frappe les yeux des connaisseurs et les esprits distingués. […] Comment peut-on sans injustice méconnaître dans Andromaque , dans Britannicus , dans Bérénice , la variété de vues, de tons et de caractères ?
Il n’a le temps de rien finir de ce qu’il ose entreprendre, et c’est ce qui le plonge si souvent dans le découragement et la tristesse, parce qu’il est trop souvent porté à douter des vues de la Providence à son égard. […] Ainsi nous pouvons nous abstenir, dans cette discussion, d’étendre notre vue plus loin que notre existence actuelle. […] Nous trouverions de plus, dans cette simple considération, une forte présomption pour croire que, par le langage, l’homme a le plus souvent voulu s’adresser à deux sens, celui de l’ouïe et celui de la vue. La langue de l’ouïe et la langue de la vue ont été tantôt très distinctes, tantôt confondues ; mais elles ont fourni l’une et l’autre des tropes différents qui se sont mêlés dans la langue écrite et dans la langue parlée, et qui les ont enrichies toutes les deux.
« On m’appelle souvent un fantaisiste, me disait-il un jour, et pourtant, toute ma vie, je n’ai fait que m’appliquer à bien voir, à bien regarder la nature, à la dessiner, à la rendre, à la peindre, si je pouvais, telle que je l’ai vue. » Qu’il y ait eu des excès dans le rendu des choses réelles, je le sais et je l’ai dit quelquefois. […] Mais étendons notre vue et songeons un peu à ce qu’a été la poésie lyrique moderne, en Angleterre, de Kirke White à Keats et à Tennyson en passant par Byron et les lakistes, — en Allemagne, de Burger à Uhlandet à Ruckert en passant par Goethe, — et demandons-nous quelle figure nous ferions, nous et notre littérature, dans cette comparaison avec tant de richesses étrangères modernes, si nous n’avions pas eu notre poésie, cette même école poétique tant raillée.
Il ne serait pas juste de juger la pensée, de l’auteur sur une première partie qui attendait son développement ; il est permis pourtant de dire que cette vue des deux sociétés et des deux régimes fut conçue trop exclusivement sous une inspiration de circonstance. […] La préoccupation de l’auteur en faveur de la liberté de l’individu et de ses garanties est, d’ailleurs, des plus honorables et des plus généreuses ; mais sous cette impression il était en train, dans cet ouvrage, de maîtriser l’histoire et de lui imposer une vue fixe, exclusive.
Il appartint comme élève à la première génération de l’École normale en 1811 ; il fit partie de ce qu’on pourrait appeler sans exagération l’avant-garde intellectuelle du jeune siècle : toutes les idées et les vues nouvelles qui flottaient depuis quelques années dans l’air et qui émanaient du mnonde de Mme de Staël, — qu’elle-même devait au commerce de l’Allemagne, — devinrent pour la première fois chez nous, dans cette haute École, des études précises et bien françaises. […] Villemain, et je ne puis m’empêcher de croire qu’il n’ait en vue un moyen, bien simple pour lui, de rendre une convenable justice à votre travail sans en écrire pour les journaux.
Toutes les vérités que nous leur devons, les grandes vues fécondes et suggestives qu’il nous ont laissées, ne valent peut-être pas la leçon qu’ils nous ont donnée par l’erreur et par l’échec de leur prétention scientifique. […] Nous avons en commun, les savants et nous, toute l’infirmité humaine, la courte vue, l’attention vacillante, les passions aveugles, l’impuissance à sortir de soi, le risque perpétuel de se tromper et d’être trompé.
Cinthio, entrant dans les vues de son ami, parla du capitaine à sa sœur qui montra des sentiments favorables. […] Flaminia apparaît également, de l’autre côté, à la fenêtre du docteur et accuse la lenteur de l’aurore qui lui fait attendre la vue de Flavio.
* * * Nous arrivons au terme de l’analyse à laquelle nous nous sommes proposé de soumettre l’intelligence, la sensibilité et la volonté, en vue d’y relever les conflits entre le moi et le nous, entre la personnalité et la sociabilité. […] Le Dantec dont les vues se rapprochent beaucoup de celles de Stirner, ne nient la différenciation des moi.
Quand l’œil plonge dans la dépression de la mer Morte, la vue a quelque chose de saisissant ; ailleurs elle est monotone. […] Après la mort de Jésus, il exprima sur la secte nouvelle des vues très modérées 627.
Sans doute on ne doit jamais perdre de vue ni déprécier les rapports de cette science avec la physiologie. […] Les enfants, les jeunes animaux, les personnes privées de quelque sens, ceux qui nés aveugles ont recouvré la vue, les gens élevés dans la séquestration, comme Gaspard Hauser76 : ce sont là de nombreuses sources d’information dont malheureusement on a fait très rarement usage.