/ 3617
1970. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre III. Poëtes françois. » pp. 142-215

Jamais les nuances des passions ne furent exprimées avec un coloris plus naturel & plus vrai ; jamais on ne fit des vers plus coulans & en même tems plus exacts. […] Il est vrai que ces sentences détachées ne sont pas favorables à l’attendrissement, & qu’elles sont proscrites par le goût. […] Je vois pour un seul vrai Poëte Vingt futiles décorateurs. […] Ses peintures sont si vraies, quoique chargées quelquefois, qu’on y reconnoît sans peine les originaux de tous les pays. […] Cette idée nous paroît plus subtile que vraie.

1971. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

Le roi d’Angleterre lui ayant envoyé faire des compliments sur la mort de Louvois, il répondit à celui qui venait de sa part : « Monsieur, dites au roi d’Angleterre que j’ai perdu un bon ministre, mais que ses affaires et les miennes n’en iront pas plus mal pour cela. » Vraies paroles et vrai sentiment de roi ! […] Il nous en coûte quelques vaisseaux ; cela sera réparé l’année qui vient, et sûrement nous battrons les ennemis. » Parole encore de vrai roi, qui n’a ni l’humeur du despote, irrité que les choses lui résistent, ni la versatilité du peuple, dont les jugements varient selon le bon ou le mauvais succès.

1972. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Appendice » pp. 453-463

Ces portraits et caractères composés si savamment, mais composés et concertés, auraient pris plus de naturel et de vie ; les originaux vrais auraient apparu, se seraient développés avec ampleur, abandon, et je ne sais quel charme qui leur manque ; je le suppose toujours à l’abri du trop de facilité et du laisser-aller. […] Il y a bien des couches dans la profondeur d’un vrai talent ; la première couche peut être riche : qui nous dit que la seconde ou la troisième ne le serait pas davantage, si le chercheur d’or, stimulé par un maître sévère, creusait sans cesse et allait plus à fond ? […] Oscar Honoré, de la Société des gens de lettres. — La nouvelle qui a obtenu le second accessit a pour scène les bords de la mer sur les côtes de Normandie, et pour sujet un épisode de la vie de pêcheur : au milieu de figures simplement vraies se détache celle de Pierre, qui donne son nom au récit, et qui est pleine d’idéal et de sensibilité.

1973. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

Il a fait un livre d’une teinte grise, livre le plus dénué de poésie et de couleur, mais d’une observation générale des plus vraies et tristement éternelle. […] L’histoire est-elle vraie ? […] Quelques autres prétendent que le cas de Roger est trop singulier et trop poussé à bout pour être tout à fait vrai, que l’impitoyable rigueur logique avec laquelle procède sa passion est plus logique que la vérité même, ou du moins que la vraisemblance en pareil cas ; que cette impression se prononce surtout en avançant, et qu’on y croit sentir un parti pris ; que ce n’est que quand on invente que l’on est tenté ainsi d’exagérer, et que tout s’expliquerait pour la critique s’il n’y avait de tout à fait observés que les trois quarts de l’histoire de Roger, le reste étant inventé et composé.

1974. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers (tome xviie ) » pp. 338-354

On avait eu toutes les gloires ; il en restait une dernière à acquérir qui complète toutes les autres et les surpasse, celle de résister à la mauvaise fortune et d’en triompher ; après quoi on se reposerait dans ses foyers, et on vieillirait tous ensemble dans cette France qui, grâce à ses héroïques soldats, après tant de phases diverses, aurait sauvé sa vraie grandeur, celle des frontières naturelles, et de plus une gloire impérissable. — En disant ces nobles paroles, Napoléon se montrait serein, caressant, rajeuni… Il n’y avait, malheureusement, de vrai dans sa conclusion que la gloire. […] Thiers appelle un grand acte militaire, un vrai phénomène de guerre, montre tout ce qu’on peut et jusqu’où l’on peut, et sert à couvrir une retraite devenue nécessaire devant des forces si démesurées ; elle nous laissait dans un immense péril.

1975. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — II » pp. 107-121

Si on ne se mêlait que de celles où l’on serait sûr de faire tout ce qu’on croit bien ou vrai sans transaction, on ne ferait pas même ses propres affaires ; il faudrait se renfermer dans l’inaction. […] Que ferais-je si j’apercevais que j’ai pris des inspirations vagues pour des idées précises, des notions vraies mais communes pour des pensées originales et neuves ? […] Cette méthode, qui est singulière et toute personnelle, une vraie méthode a priori, est chez lui invariable et inflexible ; il n’a pas l’idée de la modifier selon les sujets, il faut que les sujets s’y accommodent et arrivent bon gré mal gré sous sa prise.

1976. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Dans un temps où notre pays est infesté de tant de fausses doctrines mortelles aux vraies méthodes, et traversé d’un détestable esprit où les charlatanismes et les timidités se combinent, sachons au moins les noms de ceux qui forment l’élite scientifique et philosophique, qui marchent à l’avant-garde de la pensée et demeurent l’espoir de l’avenir. […] Et c’est cet homme, enchevêtré, il est vrai, par son éducation, par sa naissance, par ses alentours (son Journal en fait foi) et tous ses liens originels de famille, de paroisse, de cléricature, dans l’idée ecclésiastique la plus étroite, c’est cet homme religieux, d’ailleurs, et qui se croit charitable, qui a des pratiques vraiment chrétiennes, qui chaque fois qu’il lui naît un enfant, par exemple, le fait tenir sur les fonts baptismaux « par deux pauvres », c’est lui qui va devenir un persécuteur acharné, subtil, ingénieux, industrieux, impitoyable, de chrétiens plus honnêtes que lui, un tourmenteur du corps et des âmes, et le bourreau du Béarn. […] Mais ce ne sont là que des préludes et des roses dans sa carrière de persécuteur : il marquera bientôt par des moissons entières de lauriers, par de vrais exploits et des conquêtes.

1977. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine »

Vuillart est d’autant plus à écouter en cette occasion, que ce fut lui qui ménagea le parti le plus sortable à la fille de son illustre ami : « Mais voici, dit-il (31 décembre 1698), une nouvelle particulière qui va vous faire un vrai plaisir : c’est le mariage de Mlle Racine avec le fils du bonhomme99 M. de Moramber. […] Je m’acquitterai du devoir de l’offrir à Dieu et en même temps tous ceux qui y ont part, afin qu’il daigne se trouver à ces noces chrétiennes et y apporter de ce bon vin que lui seul peut donner, qui met la vraie joie dans le cœur, et qui donne aux vierges une sainte fécondité en plus d’une manière : Vimim germinans virgities, comme parle un prophète. » Vous éprouvez sans doute, monsieur, qu’il n’est besoin de vous nommer l’auteur, ni de vous le désigner plus clairement. » Ainsi échangeaient de loin leurs bénédictions, ainsi s’exprimaient entre eux avec une prudence mystérieuse ces hommes de piété et de ferveur dont le commerce semblait un crime, et en qui l’esprit de parti prétendait découvrir de dangereux conspirateurs. […] La patience et la douceur du malade, naturellement prompt et impatient, est un vrai ouvrage de la miséricorde du Seigneur.

1978. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite et fin.) »

Le spectacle d’une folle jeunesse qui se noie dans les plaisirs et dans l’orgie au sortir de l’enfance est de tous les temps : il est vrai qu’ici ces circonstances caractéristiques d’être colonel presque à la jaquette et de faire sa première communion de raccroc à la dernière heure, grâce à un prince-abbé aussi édifiant, impriment à l’historiette une variété piquante et y mettent en plein la signature du xviiie  siècle. […] Et osera-t-on bien comparer aussi, du plus loin qu’on veuille s’y prendre, à cette dame plus que vulgaire de Tourvoie, Mme de Montesson, qui tenait dans les dernières années la Cour du duc d’Orléans et qui réussit à être épousée ; celle-ci, une vraie madame de Maintenon en diminutif, un parfait modèle de maîtresse de maison dans la plus haute société, faible auteur de comédies sans doute, mais actrice de salon excellente, ingénieuse dans l’art de la vie et dans la dispensation d’une fortune princière, personne « de justesse, de patience et de raison », qui ne pouvant, sur le refus du roi, être reconnue pour femme légitime, sut par son tact sauver une position équivoque, éviter le ridicule et désarmer l’envie, saisir et observer, en présence d’un monde malin et sensible aux moindres nuances, le maintien si délicat d’une épouse sans titre ? […] J’écrivais alors dans le Moniteur, et cela eût été vrai de tout autre journal.

1979. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

Quant à moi, n’est-ce rien que d’avoir été sauvé des dernières extrémités et d’être parvenu jusqu’à ce jour sans flatteries, sans bassesses, sans dépendance, même en général, et sans dettes, ayant reçu des services, mais en ayant rendu, ayant des amis (et choisis) et n’ayant eu ni chefs ni maîtres ; n’ayant pu, il est vrai, remplir ma destination, mais enfin n’ayant rien fait qui en soit précisément indigne ; connu d’un très-petit nombre (ce qui est fort selon mes goûts), mais un peu aimé ou estimé, un peu triste sur la terre et humilié de mes faiblesses, mais sans remords et sans déshonneur, très-mécontent de moi et déplorant le cours rapide d’une vie si mal employée, mais n’ayant point à la maudire ? […] Si à peine je puis voir dans un autre temps les motifs qui m’ont décidé alors, comment savons-nous les vrais motifs des actions des autres ? […] En vain on cherche le vrai, on veut faire le bien, on renonce à d’autres désirs, et on se dévouerait pour lutter contre l’erreur, contre le désordre ; en vain on demande à la nature ce qu’on doit être, ce qu’on doit faire ; en vain on dit : Sagesse, ne te connaîtrai-je point ? 

1980. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Léonard »

C’est la gloire propre de Bernardin de Saint-Pierre d’avoir, le premier, reproduit et comme découvert ce nouveau monde éclatant, d’en avoir nommé par leur vrai nom les magnificences, les félicités, les tempêtes, dans sa grande et virginale idylle. […] De plus, ses vers à chaque instant la rappellent et en empruntent une teinte mélancolique, une note plaintive et bien vraie. […] plus sincère, plus vrai.

1981. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Gaston Paris et la poésie française au moyen âge »

Il est vrai qu’il y en a de plusieurs sortes, et ce n’est peut-être pas de la même que je vais parler maintenant. […] Gaston Paris, c’est que ce culte absolu du vrai s’allie chez lui avec les plus beaux et les plus délicats des sentiments humains. […] Il est vrai que, après tout, cette infusion nous a enrichis, que, tout ayant fini par se fondre, tout est bien, et que nous n’avons donc pas à nous plaindre.

1982. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VII. L’antinomie pédagogique » pp. 135-157

Mais il n’en reste pas moins vrai que cette unité morale est le desideratum de toute société constituée, desideratum qu’elle exprime par l’organe de ses sociologues, de ses moralistes et de ses pédagogues. […] Durkheim semble faire, il est vrai, certaines concessions à la diversité individuelle. […] Il insiste sur l’importance d’une « exposition esthétique du monde », en d’autres termes d’une conception intellectuelle et synthétique du monde, qui « place l’individu à sa vraie place dans le monde et dans l’humanité et doit provoquer en lui des sentiments correspondants68 ».

1983. (1890) L’avenir de la science « XII »

Les rares savants et penseurs, qui, à cette époque, ont cherché par la vraie méthode, alors inaperçus ou per-sécutés, sont à nos yeux sur le premier plan ; car seuls ils ont été continués ; seuls ils ont eu de la postérité. […] Et, quand l’humanité ne sera plus, Dieu sera, et l’humanité aura contribué à le faire, et dans son vaste sein se retrouvera toute vie, et alors il sera vrai à la lettre que pas un verre d’eau, pas une parole qui auront servi l’œuvre divine du progrès ne seront perdues. […] On se fait souvent des conceptions très fausses sur la vraie manière de vivre dans l’avenir ; on s’imagine que l’immortalité en littérature consiste à se faire lire des générations futures.

1984. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 janvier 1887. »

Lamoureux comprendra que ce n’est pas avec Lohengrin que peut être livrée la vraie bataille Wagnérienne. […] Mais jamais, en aucun cas, ils n’ont blasphémé nos vraies gloires, et leur patriotisme se révolte lorsqu’ils voient des ouvrages inférieurs, médiocres, détestables, sots poèmes et ignobles musiques, donnés en tous pays comme des productions très excellentes de notre art national. […] Franck excelle à développer de larges pensées musicales — qui sont parfois de vraies pensées philosophiques et de sublimes élans religieux — dans ces dialogues d’un petit nombre d’instruments, qui peuvent ainsi traduire, avec la plénitude de leurs ressources individuelles, tout ce qui s’y trouve de poésie intime.

1985. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

« Il est très vrai », écrit-elle, le 6 février, à madame de Coulanges, « que le roi m’a nommée madame de Maintenon et que j’ai eu l’imbécillité d’en rougir, et tout aussi vrai que jamais de plus grandes complaisances pour lui que de porter le nom d’une terre qu’il m’a donnée. » Ce nom échappé au roi comme un mot dès longtemps usité, cette rougeur de celle qui le reçoit pour la première fois, cette expression d’étonnement et de reconnaissance, qu’aucun autre bienfait antérieur ne paraît avoir excité dans madame de Maintenon, montrent qu’elle sentit à l’instant tout ce que renfermait de bon pour elle cette substitution d’un nom nouveau à celui qu’elle portait. […] « Il est vrai que j’ai été dans une extrême tristesse les premiers joins que j’ai été ici.

1986. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre XI. Quelques philosophes »

Il est vrai qu’il reproche au « darwinisme anglais 8 » je ne sais quelle « odeur de petites gens, misérablement à l’étroit ». […] Elles sourient en s’apercevant qu’elles sont les vraies créatrices du bleu que les naïfs croient lointain et que les imbéciles scientifiques, parmi des ricanements, déclarent ne point voir. […] La réputation et la gloire, qu’on peut voler à l’écrivain, sont de faux biens qui ne sauraient s’additionner avec les vrais biens : la pensée et la beauté.

/ 3617