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1810. (1897) Aspects pp. -215

Même dans ce triste livre ; Confessions, il s’attarde là, il se complaît à rappeler les seuls moments heureux qu’il connut. […] Et, tout au fond, la petite ville, à peine estompée, quiète sous ses toits obscurs, allume des feux tremblotants… Ce paysage est triste et tranquille comme la résignation. […] Non, mais lorsque on est triste — et on a le droit de l’être souvent puisque la vie nous vaut autant de souffrances que de joies — pourquoi ne pas expliquer les causes de cette tristesse au lieu de s’y complaire vaguement, lâchement ?

1811. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

La cour s’y dévoile avec un magique intérêt ; lisez: Les eunuques s’étant présentés au logis des ministres, comme venant de la part de Sa Majesté, les obligèrent de sortir de l’appartement de leurs femmes, et alors ils les informèrent également tous deux de la mort d’Abas II (A’bbâs), et leur en firent un rapport assez exact, qui était que le jour précédent, vers le soir, après que ces ministres se furent retirés, ce monarque avait mangé de bon appétit des confitures que ses femmes lui avaient apprêtées ; ensuite de quoi il avait paru se porter mieux qu’à l’ordinaire, jusque sur les neuf heures du soir, qu’il était tout à coup tombé en pâmoison ; qu’eux y étaient accourus, et l’avaient mis sur son lit ; qu’il était revenu à soi sur les onze heures, mais avec quelque altération de sa raison ; que sa douleur après cela s’était augmentée, et que deux remèdes réitérés qu’il avait pris par l’ordonnance des médecins ne l’avaient point soulagé ; que, vers les deux heures après minuit, la violence de son mal sembla s’être un peu apaisée, mais qu’elle l’avait ressaisi sur les trois heures et lui avait causé une frénésie demi-heure durant ; qu’une autre demi-heure il avait joui de quelque repos ; mais que, enfin, vers les quatre heures, ses yeux, par de tristes roulements, avaient fait connaître les approches de sa mort ; qu’en même temps, il avait rendu l’esprit sans autre agitation, et l’on peut dire sans s’être senti mourir.

1812. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre deuxième. Troubles et désagrégations de la conscience. L’hypnotisme et les idées-forces »

L’un d’eux, qui n’avait aucune raison d’inquiétude sur son frère, le voit assis sur son lit, l’air triste.

1813. (1895) La science et la religion. Réponse à quelques objections

Ç’a été la chimère de Taine, nous le rappelions plus haut, que de vouloir à tout prix, comme il disait, les « souder » les unes aux autres, et rien n’est plus laborieux, ni plus triste en un sens, dans ses derniers écrits, que la peine qu’il se donne pour se persuader à lui-même qu’il y a réussi.

1814. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

Nous laissons à d’autres le triste plaisir d’opposer les odes royalistes de M.  […] Il y a dans la peinture de ce caractère une fidélité, une âpreté, qui révolteront peut-être les cœurs ignorants, mais que nous croyons pouvoir louer sans réserve ; car l’amour est assurément de toutes les passions la plus égoïste, la plus cruelle, et le personnage de George Bussy exprime très bien cette triste vérité.

1815. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

Ainsi ardent et vermeil, pâle et glacé, tantôt triste, tantôt joyeux, je t’ai conduit jusqu’ici sain et sauf, bien que las. […] que tu es changée, puisque, par lâcheté, tu renies le bon sens de nos pères et que tu montres du doigt le triste septentrion !

1816. (1884) Cours de philosophie fait au Lycée de Sens en 1883-1884

Cette doctrine a de tristes conséquences : si le plaisir n’est que l’absence de la douleur, s’il nous faut acheter la moindre jouissance par une souffrance préalable, la vie est bien sombre, et il ne vaut guère la peine de rechercher ce plaisir qu’il faut pour ainsi dire payer comptant. […] Laissant de côté les tristes conséquences métaphysiques et morales de la doctrine de Hartmann, on peut facilement faire voir que ce système ne repose pas sur une base bien solide. […] Mais elle n’a pas le triste privilège de nous tromper plus que les autres.

1817. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

qu’il est cruel pour un solitaire, malade et triste, d’avoir une imagination déréglée, et de ne rien apprendre de ce qui l’intéresse ! […] Mais ils avaient une façon bouffonne et terrible à la fois de frapper le journaliste, qu’il s’appelât Fréron ou l’abbé de La Porte : « Je méprise souverainement la critique de l’abbé de La Porte, écrivait le chirurgien Morand, l’ami de d’Alembert, mais… je réclame une punition141. » Et ce triste sire de Marmontel : « Je me présentai hier chez vous pour avoir l’honneur de vous rendre mes devoirs et de vous porter mes plaintes sur un article de la douzième feuille de Fréron, que vous ne lirez pas sans indignation. […] C’est pourquoi nous ne nous refuserons pas à plaindre la triste situation de l’écrivain sous l’ancien régime, mais aussi nous permettra-t-on de ne pas nous apitoyer plus qu’il ne faudrait, et de dégager, du milieu des exagérations où l’on se laisse aller si naturellement en pareil sujet, l’opinion moyenne. […] C’est qu’à vrai dire l’homme est un étrange animal, mais le Français surtout, pour la facilité qu’il a de s’accommoder aux circonstances, ou plutôt, d’adapter ces circonstances elles-mêmes, si tristes qu’elles puissent être, à son éternel besoin de jouir.

1818. (1939) Réflexions sur la critique (2e éd.) pp. 7-263

Le Chevalier de la triste figure pense à l’espagnole, déforme toutes choses. » (P. 163.) […] Elle a favorisé, contre les sommets de l’âme et de la pensée, les rancunes, la malice, la triste ironie des classes moyennes. […] Le Purgatoire, c’est une abjuration d’erreurs, le passage d’un tempérament romantique, maladie que l’enfant du siècle trouve dans sa triste hérédité, à une raison et à une forme classiques, dont la poésie de Mistral apparaît comme la Béatrice ou la Lucie. […] Ce maréchal de la littérature est un triste modèle.

1819. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

Quelle est cette blanche théorie qui s’avance, là-bas, triste et incolore ?

1820. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre IV. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire. » pp. 87-211

Les annales des Pontifes périrent dans cette triste conjoncture ; & cette perte a obligé quelques savans de tenir pour suspect tout ce qui se trouve antérieur à cette datte.

1821. (1910) Rousseau contre Molière

C’est que c’est une comédie triste. […] C’est une chose incroyable qu’avec l’agrément de la police on joue publiquement, au milieu de Paris, une comédie où, dans l’appartement d’un oncle qu’on vient de voir expirer, son neveu, l’honnête homme de la pièce, s’occupe, avec son digne cortège, de soins que les lois payent de la corde et qu’au lieu des larmes que la seule humanité fait verser en pareil cas aux indifférents mêmes, on égaye à l’envi de plaisanteries barbares le triste appareil de la mort. […] Brisez les tristes fers du honteux esclavage Où vous tient du péché le commerce honteux, Et venez recevoir le glorieux servage Que vous tendent les mains de la Reine des cieux, L’un sur vous à vos sens donne pleine victoire.

1822. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

Des brouillards et des orages pèsent sur elle pendant la plus grande partie des beaux étés ; et même dans les jours rares où le soleil est brillant, quand il n’y a aucun nuage dans le ciel, l’impression que laisse le paysage est triste et accablante.

1823. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre V. La philosophie. Stuart Mill. »

Dans ce grand vide inconnu que vous placez au-delà de notre petit monde, les gens à tête chaude ou à conscience triste peuvent loger tous leurs rêves, et les hommes à jugement froid, désespérant d’y rien atteindre, n’ont plus qu’à se rabattre dans la recherche des recettes pratiques qui peuvent améliorer notre condition.

1824. (1864) Le positivisme anglais. Étude sur Stuart Mill

Dans ce grand vide inconnu que vous placez au-delà de notre petit monde, les gens à tête chaude ou à conscience triste peuvent loger tous leurs rêves, et les hommes à jugement froid, désespérant d’y rien atteindre, n’ont plus qu’à se rabattre dans la recherche des recettes pratiques qui peuvent améliorer notre condition.

1825. (1927) Approximations. Deuxième série

Voilà la faculté par laquelle, dans la critique d’art d’aujourd’hui, François Fosca me semble à peu près sans rival, — j’entends qu’il est le seul à en user, car les dégustateurs de tableaux, je le répète, sont gens volontiers silencieux, et il serait trop triste de penser que Fosca fût l’unique détenteur de ce précieux privilège. […] Telles paroles semblent proférées, du fond de sa gigantesque langueur, par l’Adam de Michel-Ange élevant un triste regard vers l’Esprit qui est porté sur les eaux. […] Je suis assez grand pour faire mes affaires tout seul… Je suis un homme digne et éclairé, parfaitement pur de toute illusion… Peut-être le monde tel que je le conçois, est-il plus triste, moins réconfortant.

1826. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

Il a quelque part un mot profond, digne de Pascal : « La vie est une sorte de mystère triste, dont la foi a le secret ». — Mystère et tristesse, c’est bien ce qu’il a vu dans la vie, seulement mystère et tristesse que le doute redoublerait, que la foi dissipe, une foi, celle de l’Église d’abord, celle de Lamennais ensuite, mais une foi toujours, une affirmation ardente, entêtée et fougueuse, seule capable, même orageuse, et si mêlée de tempêtes et si douloureuse qu’elle puisse être, d’arracher l’âme au tourment morne, à l’anxiété silencieuse, à l’effroi dans la nuit, où nous plongerait, où nous retiendrait l’incertitude. […] Il est amusant, ou il est triste, selon l’humeur dont on est, de voir un homme raconter ainsi avec horreur une histoire qui tout à l’heure sera la sienne. […] Sa mère, protestante convaincue, tout en lui laissant faire sa première communion catholique, nourrit discrètement, mais constamment et d’instinct, d’autant plus fortement par conséquent, cette avide jeune âme de religion grave, triste et énergique.

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