En lisant les vers de Marot, on a pour la première fois, ce me semble, le sentiment bien vif et bien net qu’on est sorti des amphigouris de la vieille langue, si mal employée par les derniers rimeurs, qu’on est sorti des broussailles gauloises ; nous sommes en France, en terre et en langue françaises, et en plein esprit français, non plus rustique, non plus écolier, non plus bourgeois, mais de Cour et de bonne compagnie.
… Je vis des divinités célestes et charmantes, et, parmi ces nymphes et ces sirènes… je restai frappé de stupeur, et je me sentis tout à coup grandir moi-même à la hauteur de ce que j’admirais… Rempli d’une vie inconnue, inondé d’une divinité intérieure toute nouvelle… je chantais les exploits et les héros, dédaignant désormais les humbles idylles… » XVI Cependant, soit que la distance et le respect eussent intimidé l’aveu de ces sentiments pour Léonora d’Este, soit qu’il eût voulu dérober sous un autre nom les hommages poétiques secrets qu’il adressait dans son cœur à Léonora, le Tasse affecta de célébrer quelque temps dans ses vers une autre beauté de la cour de Ferrare.
CXXXVIII Je descendis d’abord comme un tourbillon de feuilles sous un vent d’hiver qui les roule de précipices en précipices, sans autre sentiment et sans autre idée que de me rapprocher d’Hyeronimo.
Il m’a bien grondé de ces sentiments, qui lui ôtaient tout droit de m’absoudre avant la dernière heure, puisqu’il ne pouvait, au nom du Christ, pardonner à ceux qui n’avaient pas pardonné ; il m’a bien prêché, bien tourné et retourné de toutes les façons pour me faire désavouer ma haine et ma vengeance ; mais c’était comme s’il avait parlé à la pierre du mur ou au fer de la grille : j’ai été inexorable dans ma résolution d’emporter mon ressentiment dans mon âme, à moins d’emporter dans l’autre monde l’anneau du mariage qui nous unirait au moins dans l’éternité.
Accusons-en le préjugé de l’époque, plutôt que le sentiment du poète.
Les tentatives variées qui se sont multipliées de plus en plus depuis, un siècle, particulièrement dans ces derniers temps, pour répandre et pour augmenter sans cesse l’instruction positive, et auxquelles les divers gouvernements européens se sont toujours associés avec empressement quand ils n’en ont pas pris l’initiative, témoignent assez que, de toutes parts, se développe le sentiment spontané de cette nécessité.
Quant au milieu et au corps même de la thèse, il est curieux et instructif par les faits et les extraits qui y sont rassemblés ; s’animant d’un souffle sincère, d’un sentiment d’humanitarisme parfois éloquent (voir notamment certaine page, la page 43), ce corps tout médical de la thèse s’appuie, d’ailleurs, et s’autorise des expériences et des observations les plus complètes et les plus récentes qui ont été faites sur les nerfs et sur le cerveau.
. — Je jugeai dès lors qu’il avait raison de parler de la sorte, et le temps ne m’a pas fait changer de sentiment.
» Des malignités féminines impardonnables, faites par Marie Stuart à Élisabeth, aigrirent encore les sentiments et les rapports entre les deux reines.
C’est-à-dire : Il y a une immense tourbe d’hommes qui sentent par sentiments tout faits, dans la même proportion qu’il y a une immense tourbe d’hommes qui pensent par idées toutes faites, et dans la même proportion il y a une immense tourbe d’hommes qui veulent par volontés toutes faites, dans la même proportion qu’il y a une immense tourbe de « chrétiens » qui répètent machinalement les paroles de la prière.
Bacchus, s’il s’en absentait un instant pour venir visiter ses premiers fidèles, devait éprouver le sentiment du pâtre arabe devenu vizir, lorsque, vêtu d’un caftan de soie et l’aigrette au front, il ouvrait la cassette où il avait renfermé son savon de poil et son chalumeau.
Avec cela beaucoup d’esprit, de sens, de conduite, de hauteur et de sentiment, sans gloire et sans arrogance, de la politesse, mais avec beaucoup de dignité ; et par mérite et sans usurpation, le dictateur perpétuel de ses amis, de sa famille, de sa parenté, de ses alliances, qui tous et toutes se ralliaient à lui.
(C’est le même sentiment). […] Nous les supposerons animés de ce certain sentiment qui les fait également et profondément et pour ainsi dire mutuellement respectueux de la pensée. […] Un noble sentiment de la noblesse du jeu garde de ces faiblesses la force et le génie. […] Ni l’honneur n’est estimé ou maigrement aimé d’une maigre estime et d’un maigre amour de morale, s’il y a des amours de morale, ni l’amour n’est honoré ou flétri d’un maigre et livresque sentiment de morale ou d’immorale. […] L’amour, (je dis dans son système de pensée, dans son système de sentiment, et dans sa poétique, et dans son système de la vie), l’amour est un honneur, et l’honneur est aimé.
Voilà une phrase qui n’était pas construite de son temps, et dont il se serait bien moqué lui-même ; il aimait cet art de la comédie pour les larmes que le cœur y verse, pour les éclats de rire que l’esprit y rencontre ; il aimait cette façon de parler aux hommes assemblés et de leur imposer tous les sentiments poétiques ; enfin, je vous le dis tout bas, il était de ces hommes qui croient encore que le théâtre est l’école des mœurs : belle école vraiment ! […] De ce gueux-là, Térence a fait un digne valet, hâbleur, mais dévoué, imprudent, mais capable d’un bon sentiment au fond de l’âme. […] Faites-vous donc violence, vous tous qui avez été habitués à la retenue de Molière, qui avez toujours rencontré, dans la vieille comédie, les plus honnêtes sentiments cachés sous le rire ; faites-vous violence, vous qui avez crié si haut quand Molière vous a montré, dans Le Bourgeois gentilhomme, le comte Dorante, chevalier d’industrie, et la marquise Dorimène, entretenue par le marquis, vous en verrez bien d’autres, je vous jure, avec l’ami Regnard ! […] Je ne sais pas si vous pensez comme moi, mais ces trois femmes qui paient le même homme, qui courent après lui, sans amour et sans passion, et qui le quittent sans regret et sans remords, aussi prêtes à le reprendre qu’à le laisser là ; ces trois femmes, sans esprit et sans cœur, qui n’ont même pas leur passion pour excuse, me paraissent aussi loin d’être dramatiques que d’être vraies ; le dégoût est l’unique sentiment que l’on éprouve à leur aspect. […] Pas un mot du cœur, pas un tendre sentiment, pas une parole humaine dans les reproches de Lucinde à son cher Moncade.
Au point où la civilisation est parvenue, l’exact est un élément nécessaire du splendide, et le sentiment artiste est non-seulement servi, mais complété par l’organe scientifique ; le rêve doit calculer.
Or, à moins d’admettre l’opinion cartésienne des bêtes machines, qui n’a plus de partisan que je sache, il faut bien reconnaître que les animaux ont leurs sensations, leurs sentiments, leurs désirs, leurs plaisirs et leurs douleurs, leur caractère, tout comme nous ; qu’il y a là un ensemble de faits psychologiques qu’on n’a aucun droit de retrancher de la science.
comme si celui qui possède toutes les durées et tous les espaces s’était complu à accumuler des myriades d’êtres animés et aimants dans un cirque étroit et muré de ses éternités et de ses mondes, afin de jouir de cette affreuse mêlée de sang, de ce combat sans trêve et sans fin de gladiateurs acharnés tous armés d’une arme mortelle pour tuer, tous pourvus du sentiment de leur conservation et de l’horreur de la mort pour bien savourer la douleur et l’agonie de la mort !