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1059. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — II. (Fin.) » pp. 109-130

L’auteur se crut obligé, dans la préface de la seconde édition (1789), de donner quelque explication en manière d’apologie, une espèce de satisfaction au sexe ; mais il en sut faire une piqûre de plus28. […] La question qui se présente aujourd’hui au philosophe est de savoir si l’on peut suivre une marche rétrograde, passer d’un régime absolu à celui de la liberté, de la hiérarchie des rangs à l’égalité toujours combattue par la richesse, qui n’aspire pas moins aux distinctions qu’aux jouissances. […] Aladin a un vif désir de savoir et de connaître ; la morale a surtout un grand attrait pour son esprit vif et observateur ; il en voudrait posséder la clef : « Ne pourriez-vous pas, dit-il au Kalender, m’apprendre à connaître les hommes ?  […] On y reconnaît à chaque page l’homme qui parle de ce qu’il sait et de ce qu’il a pratiqué ; on y lit quantité d’anecdotes qui sont de source et d’original, et qui méritent d’entrer dans l’histoire. […] Enfin, monsieur, on sait quelle est ma confiance en vous, et celle de mon père l’avait devancée.

1060. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

Porchat attendent, l’un ou l’autre, le signal : l’honorable éditeur qui est leur ami a différé jusqu’ici de le donner et de croire l’instant propice ; et il sait mieux que personne ces sortes d’instants. […] Il y a des gens qui ne sauraient parler de lui sans le faire quelque peu grotesque et ridicule ; il ne l’est pas. […] Je voudrais que vous voulussiez bien examiner avec soin ces travaux de jeunesse, pour me dire ce que vous en pensez ; je désire savoir s’ils méritent d’entrer dans la prochaine édition de mes Œuvres. […] Ce défaut a été le mien aussi, et je sais le mal qu’il m’a fait. […] Sur ce terrain, qui est tout nôtre, il ne saurait nous être indifférent de le voir venir et se développer.

1061. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. (suite et fin) »

C’est là, on le sait, par où elle périt. […] Sa souplesse, dont on a trop parlé, avait ses limites, et il savait très-bien retirer sa main à M. de Villèle pour lui avoir manqué de foi, dans le même temps que le duc de Richelieu refusait la sienne au comte d’Artois pour la même cause. […] Dans sa haute et suprême situation publique de président de la Chambre des pairs, il retrouva toute sa valeur un peu dispersée jusqu’alors, il la rassembla pour ainsi parler, et l’accrut encore au su et vu de tous. […] A la tribune, s’il eut le mérite d’apporter de prime-abord un talent d’improvisation véritable, chose alors très-neuve, maître d’ailleurs de sa parole, il la gouverna toujours et sut la tenir également éloignée de la passion on du système. […] Il savait, en chaque discussion, les raisons appropriées qui pouvaient agir le plus sur les adversaires, et il les employait au bon moment.

1062. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. »

La création de l’Institut qui assemblait dans un même lien toutes les branches de l’esprit humain, tous les ordres de savoir et de talents, consacra le fait en principe ; mais qu’il restait encore à faire en pratique et dans la réalité ! […] Revenu à Paris, il continuait de faire des dessins de diverses sortes et des aquarelles, lorsqu’un jour Susse, qui lui en achetait une, exigea une signature : « Le public, disait l’éditeur, aime des œuvres qui soient signées. » Gavarni, mis en demeure d’écrire un nom, se souvint alors de la vallée de Gavarnie qu’il avait habitée et de la cascade qu’il aimait, et, sur le comptoir de Susse, il signa son dessin de ce nom d’affection qu’il mit seulement au masculin. […] sait-on ce que dit le rossignol ? […] C’est une grande avance, je le sais, à qui veut passer pour un homme de génie auprès du vulgaire que de manquer absolument de bon sens dans la pratique de la vie ou dans la conduite du talent. […] Gavarni a de cette élégance dans le crayon, avec la verve en sus et l’inépuisable facilité.

1063. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier. »

On sait Musset par cœur, et c’est à qui renchérira en louanges ; je ne m’en plains pas. […] je ne sais pas à quoi il ne croyait pas, tout esprit fort qu’il était : il est vrai qu’il ne croyait pas en Dieu ; mais, en revanche, il croyait en Jupiter, en M.  […] On ne distingue plus, on ne sait plus où l’on en est, et si aguerri, si peu bourgeois et classique qu’on soit, on est tenté de dire en se frottant les yeux : « Ah çà ! […] C’est une suite d’évocations lugubres, après une promenade au cimetière le jour des Morts ; tour à tour Raphaël, Faust, Don Juan, Napoléon lui-même, apparaissent aux yeux du poète qui demande à la vie et à la tombe son secret ; nul de ces grands revenants ne le sait, chacun renvoie à l’autre. […] Je sais que M. 

1064. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.) »

Je ne sais quel jugement fera le public de cette campagne ; mais je t’assure qu’à la suivre de près, j’ai plus de mérite que de celle de l’année passée. […] Il était, du reste, alors dans sa meilleure veine, et sa prudence savait se relever au besoin d’actions de vigueur. […] Louis XIV, qui devait savoir mieux que personne à quoi s’en tenir, était content de Catinat et mettait cette fin de campagne au nombre de ses bons services. […] « Ce prince, disait Tessé qui le connaissait bien, en sait plus à 27 ans en subtilités, en mauvaises finesses et en indécisions que le vieux duc de Lorraine n’en savait à 60. » Les faibles qui ont de l’esprit apprennent vite la ruse. […] Il sait qu’il y a cinquante manières d’échouer et qu’il n’y en a qu’une de réussir ; mais, s’il voit celle-ci à sa portée, il ne la manque pas.

1065. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite et fin.) »

Maiouet, dans cette affaire et pour cette petite pièce montée à loisir, ne sut donc point se placer au vrai point de vue du public et du théâtre. […] Cet épisode des Mémoires, sans rien apprendre de bien nouveau, est curieux et s’ajoute, pour le confirmer, à ce que l’on connaît de Barnave : « Je savais, dit Malouet, où il en était vis-à-vis du roi ; je savais qu’il y avait de sa part conviction de ses erreurs, désir sincère de les réparer ; mais il ne convenait pas de paraître instruit de ses projets, s’il évitait de s’en expliquer avec moi. […] Souvent consulté par la Cour, il sait mieux que personne à quoi s’en tenir sur cette fluctuation d’idées à laquelle elle s’abandonne, sur cette suite de projets et de contre-projets éphémères. […] » — « Certainement, je le servirai de tout mon cœur ; il me connaît, il sait que je suis incapable de lui manquer de parole. […] L’histoire de sa vie, en ces années de l’Empire, est dévolue à son digne petit-fils, qui saura s’acquitter de cette pieuse tâche dans un esprit de vérité et avec mesure.

1066. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

Le critique, qui sait très-bien se prendre aux vers les plus hasardeux du classique novateur, nous semble pourtant méconnaître le principe et le droit d’une tentative qui reste légitime dans de certaines mesures, mais dont nous-même avons peut-être, hélas ! […] Il fit de bonnes études, je ne sais où ni comment, mais il était plein de grec et de latin, d’Horace et de Philétas, si Philétas il y a ; au reste toute sa vie ne semble qu’une longue école buissonnière. […] Ces deux vers sont volontiers cités, sans qu’on sache de qui. […] On sait de ses vers ; on en a la vague réminiscence dans l’oreille, comme des vers de Jean-Baptiste Rousseau on de quelque autre ancien. […] Pline le Jeune, parlant d’un poëte de son temps (Lettres, I, 16), dit qu’il sait mêler avec art, dans ses élégies, à des vers doux et coulants, d’autres vers un peu durs (duriusculos quosdam), et qu’eu cela il fait comme Calvus ou comme Catulle.

1067. (1892) Boileau « Chapitre II. La poésie de Boileau » pp. 44-72

n’en revenait-il pas toujours, pour faire admirer un passage de la Genèse, à « la douceur majestueuse des paroles », et ne demandait-il pas seulement, pour que tous les esprits en reconnussent la beauté, « une bouche qui les sût prononcer », et « des oreilles qui les sussent entendre » ? […] Tous ces vers que l’on sait par cœur, et qui ont immortalisé leurs victimes, d’où en est venue la force ? […] Et entendons bien ce que veut dire ici le mot de réaliste : Boileau sait voir et rendre. […] Boileau ne sut pas non plus maintenir son style purement et franchement réaliste. […] Soudain le trait devient plus net et plus vigoureux, la couleur plus vive ; on sent je ne sais quelle flamme où se trahit l’allégresse de l’artiste qui sait ce qu’il veut faire et est sûr de le faire.

1068. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

De foi intacte et fraîche encore, mais mondaine, assez enthousiaste pour se croiser, il ne saurait se désintéresser longtemps : il a des pensées positives dans le cœur, tandis que le service de Dieu est sur ses lèvres. […] Je ne sais s’il y a une anecdote dans son livre : il faut qu’il s’agisse du marquis de Montferrat, pour qu’il nous détaille les circonstances de sa mort. […] Mais c’est aussi, et surtout, la réserve d’un politique qui ne veut pas dire tout ce qu’il sait. […] Aussi ce soldat « qui ne mentit jamais », est-il souvent à demi sincère : il sait l’art de ne pas faire connaître la vérité sans rien articuler de faux. […] Faits passés, depuis le commencement du monde, faits contemporains, jusqu’aux extrémités de la terre alors connue, on veut tout savoir, il se rencontre des gens pour tout écrire.

1069. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre II »

Ma remarque pourra paraître minutieuse, mais ce n’est pas une petite chose pour un poète de savoir donner à son héroïne un nom qui aille à son caractère comme une guirlande à son front. « S’il te naît une fille, — disent les livres sacrés de l’Inde, — donne-lui un nom doux, facile à prononcer, et qui résonne harmonieusement à l’oreille. » Molière, Shakespeare, et tous les grands poètes ont suivi, sans le savoir, le conseil des brahmes ; Shakespeare surtout, qui, pour parer ses filles de prédilection, va cueillir on ne sait où, dans la lune, sur les nuées, des noms inouïs, éthérés, célestes, des auréoles de pudeur, des étoiles de couronnement. […] Le Raymond, calqué sur le Fulgence de madame Sand, est honnête, mais désagréable ; sa loyauté est toute en pointes, on ne sait par quel bout la prendre. […] Le sacrifice est beau, il est trop beau, pour tout dire ; il étonne plus qu’on ne l’admire, et je ne sais quel sentiment secret proteste en vous contre tant d’héroïsme. […] Mais, lorsqu’un digne objet a pu nous enflammer, Qui le cède est un lâche et ne sait pas aimer. […] Savez-vous ce qu’aurait fait votre Frantz, tel que vous nous l’avez montré, abruti et perverti par la fortune ?

1070. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

Ses études littéraires et classiques paraissent avoir été excellentes, très variées, et il savait de l’Antiquité tout ce qu’un jeune homme instruit, un des bons élèves de l’Université, pouvait en savoir alors. […] Il est très amusant sur certaines gens, mais il en est un trop grand nombre sur lesquels il est odieux et infâme : je ne sais pas un meilleur mot. […] Il sait bien ce qu’il fait ; il a le génie du journal ; il sait quelle est la puissance de l’instrument qu’il emploie, et auquel à la longue, dit-il, rien ne peut résister. […] On sait ce qu’ils devinrent. […] Il n’y a pas à discuter un tel témoignage : Mirabeau savait à fond son Desmoulins.

1071. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame Necker. » pp. 240-263

On ne saurait mieux définir l’effet que produit ce genre d’esprit à part, élevé, isolé et peu sympathique, l’esprit doctrinaire, pour l’appeler par son nom, dont M.  […] Mais y renoncer lui eût trop coûté ; son mérite est d’avoir su concilier ce goût extrême pour l’esprit avec l’intégrité de ses principes dans un si périlleux voisinage. […] Pigalle fut choisi pour faire la statue du patriarche ; mais quand elle sut que le statuaire voulait le faire absolument nu, Mme Necker poussa les hauts cris. […] Elle semblait ne voir certains objets qu’à travers un brouillard qui les grossissait à ses yeux ; et alors son expression s’enflait tellement, que l’emphase en eût été risible, si l’on n’avait pas su qu’elle était ingénue. […] L’éditeur a essayé, dans des notes, de tirer des interprétations subtiles, et désavantageuses à Mme Necker, que je ne saurais y voir.

1072. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. Anecdotes. » pp. 123-144

Pope, en son temps, en sut quelque chose. […] Faudra-t-il donc que je mange encore quelque compote, des massepains, des fruits : que sais-je, moi ? […] On savait que La Harpe avait beaucoup aimé de tout temps les dames, et que ç’avait été un de ses grands faibles. […] Vous savez que je suis un peu prophète ; je vous le répète, vous la verrez. » Ici les convives se récrient ; on plaisante Cazotte ; on le harcèle, on le force à dire qu’il sait, dans cette Révolution future, ce qui en arrivera pour chacun. […] On sait qu’après avoir professé les principes du plus exagéré républicanisme, La Harpe en devint l’un des plus fougueux adversaires.

1073. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

Il a créé des personnages qui ont vécu leur vie de nature et de société : « Mais qui sait combien cela durera ? […] En fait d’esprit, il a été un grand rajeunisseur, ce qui est le plus aimable bienfait dont sache gré cette vieille société qui ne craint rien tant que l’ennui, et qui y préfère même les périls et les imprudences. […] qui sait si le monde durera encore trois semaines ?  […] Je sais que dans une troisième pièce, dans La Mère coupable, il se corrigera et que l’auteur essaiera de l’ennoblir ; mais laissons ce Figaro final vertueux et dégénéré, qui ne se ressemble plus à lui-même. […] Après cette fameuse tirade sur la politique : « Feindre d’ignorer ce qu’on sait, de savoir tout ce qu’on ignore, etc. », quand le comte répond à Figaro : « Eh !

1074. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

Philologue, grammairien, philosophe, professeur de littératures comparées, que sais-je, moi ? […] Il a même traduit Jean-Paul et Carlyle, qui en sont deux monstres, comme on sait. […] Qui sait ? […] sait mieux pleurer sur les misères humaines. […] Philarète Chasles ne saurait être le héros de cette comédie-là.

1075. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — La rentrée dans l’ordre »

On sait que les étapes spirituelles douloureusement franchies par l’abbé Pierre Froment, forment la trame des Trois Villes.‌ […] Le séminaire est, comme on le sait, une institution qui a pour but de transformer les êtres humains confiés à ses soins en êtres dénaturés. […] Pour diriger, il faut savoir ; pour savoir, il faut vivre ; or, le prêtre ne vit pas. […] Ils ne savent pas ou feignent de ne pas savoir ce qu’est en réalité le lieu de perdition où tu vas t’enclore. […] Je sais combien est infime le nombre des rachetés.

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