/ 1743
482. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

« Réveillé du coup, mais ne sentant point la douleur, je ne m’aperçus de ma blessure qu’à mon sang. […] Il est toujours malade ; il tousse, il a des sueurs et des crachements de sang. […] Le sang d’un père, d’une mère, est garant des vœux que j’ai faits. […] Il y a Chateaubriand lui-même et la plus rare fleur de son sang. […] Si l’amour dans toute sa puissance parlait au cœur de l’Abencérage, d’une autre part il ne pensait qu’avec épouvante à l’idée d’unir le sang de ses persécuteurs au sang des persécutés.

483. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

cette planche terrifique, comme une épouvante rencontrée la nuit, par un clair de lune, au coin d’un bois : un homme empalé à une branche d’arbre, nu, saignant, les pieds contractés de souffrance, l’agonie de sa torture sur la face, et dans le hérissement des cheveux… le bras coupé net, comme un bras cassé de statue… Et puis, tournez la feuille : des bouches qui crachent la vie, des mourants vomissant le sang sur des cadavres ; et tournez encore la feuille : l’Espagne mendiant, les pieds dans la voirie d’une ambulance… Le génie de l’horreur, c’est le génie de l’Espagne. […] » Et j’entends à propos de l’éloge de l’Angleterre, repris par Taine, Sainte-Beuve lui confier son dégoût d’être Français : « Je sais bien qu’on vous dit : être Parisien ce n’est pas être Français, c’est être Parisien ; mais on est toujours Français, c’est-à-dire qu’on n’est rien, compté pour rien… un pays où il y a des sergents de ville partout… Je voudrais être Anglais, un Anglais c’est au moins quelqu’un… Du reste, j’ai un peu de ce sang. […] Le tabac, ce stupéfiant, la bière, cette boisson d’engourdissement, finiraient-ils par endormir, dans les veines de la France, le sang du bourgogne ? […] Mlle Aimée me dit, en traversant les pièces du rez-de-chaussée : « Vous savez, il est très malade… Quand on lui a appris la décision du jury, il a eu une tache de sang à l’œil, comme à la suite d’un coup de sang. » Nous entrons, et nous trouvons Gavarni dans son grand salon, au milieu de l’espèce d’obscurité, que font des persiennes fermées en plein jour. […] Et nous le quittons très alarmés, effrayés de cette maigreur que nous touchions dans cette main, pleine de cordes ; que nous devinions sous cette robe de laine blanche, sous ces deux ou trois paires de chaussettes roulées autour de ses pieds ; effrayés de ce lent dépérissement, de cet épuisement, de cet appauvrissement du sang et de la vie, de cette anémie amenée par les longues souffrances, et peut-être encore par tant d’années d’une alimentation insuffisante, où cette pure intelligence ne voulait pas manger, se refusait à manger, trouvait de l’ennui à manger.

484. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

Quand son corps affaibli réclamait quelque repos, il le frappait jusqu’au sang, en l’appelant gaiement : Frère âne. […] Fernand Vandérem est plein de jeunesse, et ce qui s’est éteint en lui, ce n’est pas l’ardeur du sang, mais la faculté passionnelle d’aimer. […] Ils admirent la pourpre du sang versé, ils notent la musique des cris du martyr !  […] Une sueur de sang mêlée à du pus coule de l’énorme plaie livide ! […] … « Mon sang ne fit qu’une vire-passe.

485. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LI » pp. 198-202

Il crache le sang et continue jusqu’au bout, jusqu’à ce qu’il ait gravi tout son calvaire.

486. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXII » pp. 286-290

Amédée Pommier, nous dit-on, a déjà publié beaucoup de recueils de vers et plusieurs ouvrages, le Livre de sang, les Océanides, etc., dans lesquels il y avait de grands excès du mot propre et des descriptions impitoyables de crudité : c’est un converti qui revient à mieux et qui s’amende, qui se fait satirique un peu dans le genre, mais dans un meilleur sens que Barthélemy. — Quoi qu’il en soit, c’est moins par des satires directes, ce nous semble, qu’il faut combattre l’ennemi, que par des exemples plus calmes et en continuant de marcher de plus en plus, et chacun de son mieux, dans sa direction littéraire, sans s’en laisser détourner.

487. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution française, depuis 1756 jusqu’à nos jours — II »

Madame de Montesson eut le premier prince du sang ; M. de Guines, l’ambassade de Berlin ; ces dames, une société ; et madame de Genlis, une place près de la duchesse de Chartres.

488. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 2. Caractère de la race. »

Il ne nous appartient pas — et il serait sans doute infructueux — de rechercher ce qui nous est parvenu du sang ou de l’humeur de nos aïeux celles et gaulois, dans quelle mesure précise, de quelle façon la conquête romaine et l’immigration franque ont modifié le tempérament de la race, où s’étaient déjà mêlés plusieurs éléments.

489. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Daudet, Alphonse (1840-1897) »

La bouche voluptueuse, songeuse, empourprée de sang, la barbe douce et enfantine, l’abondante chevelure brune, l’oreille petite et délicate, concourent à un ensemble fièrement viril, malgré la grâce féminine.

490. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Deroulède, Paul (1846-1914) »

Tout ce qu’il y a de sang gaulois dans le cœur du petit livre de M. 

491. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 240-246

Comme on voit quelquefois dans l'Ardenne fameuse, Et dans les prés herbus où le Rhin joint la Meuse, Deux furieux taureaux par l'amour courroucés, Se heurter fiérement de leurs fronts abaissés : Le troupeau plein d'effroi regarde avec silence ; Le nombre des Pasteurs cede à leur violence : Les deux vaillans rivaux se pressant rudement Des cornes l'un sur l'autre appuyés fortement, Redoublent, sans cesser leurs cruelles atteintes ; De longs ruisseaux de sang leurs épaules sont teintes ; Ils mugissent des coups d'un cri retentissant, Et toute la forêt répond en mugissant…… Ajoutons encore ce morceau sur la briéveté de la vie, & nous ne serons point étonnés que l'Auteur du Lutrin & celui de la Henriade n'aient pas dédaigné de s'approprier plusieurs traits de ce Poëte, injustement oublié.

492. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre II. Vue générale des Poèmes où le merveilleux du Christianisme remplace la Mythologie. L’Enfer du Dante, la Jérusalem délivrée. »

Les ouvrages des anciens se font reconnaître, nous dirions presque à leur sang.

493. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre VI. La Mère. — Andromaque. »

Lorsque la veuve d’Hector dit à Céphise, dans Racine : Qu’il ait de ses aïeux un souvenir modeste : Il est du sang d’Hector, mais il en est le reste, qui ne reconnaît la chrétienne ?

494. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

Mais cela ne le troublait pas ; il avait en lui du sang d’émigré et le dédain inné pour les faveurs plébéiennes souvent aussi mal acquises que les faveurs de cour. […] Le Père et lui récitèrent les psaumes ; il les disait avec une ardeur de séraphin, comme si son âme eût emporté son corps vers le ciel ; puis, s’agenouillant, il baisa le sang de Cinq-Mars, comme celui d’un martyr, et devint plus martyr lui-même. […] Sa sensibilité est devenue trop vive ; ce qui ne fait qu’effleurer les autres le blesse jusqu’au sang ; les affections et les tendresses de sa vie sont écrasantes et disproportionnées ; ses enthousiasmes excessifs l’égarent ; ses sympathies sont trop vraies ; ceux qu’il plaint souffrent moins que lui, et il se meurt des peines des autres. […] Et je suis sûr que dans ton cœur tu regrettes plus le ressort de fer que le ressort de chair et de sang : va, ton cœur est d’acier comme tes mécaniques. — La Société deviendra comme ton cœur, elle aura pour Dieu un lingot d’or et pour Souverain-Pontife un usurier. — Mais ce n’est pas ta faute, tu agis fort bien selon ce que tu as trouvé autour de toi en venant sur la terre ; je ne t’en veux pas du tout, tu as été conséquent, c’est une qualité rare. — Seulement, si tu ne veux pas me laisser parler, laisse-moi lire. […] En eux est le sang de votre sang, l’âme de votre âme : aimez-les, madame, uniquement et par-dessus tout.

495. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1867 » pp. 99-182

Quand je compare ce peuple aux peuples de progrès et de liberté, marqués au signe de ce sinistre affairement moderne, en lutte avec le budget de chaque jour, massacrés d’impôts, y compris celui du sang, je trouve vraiment que les mots se payent bien cher. […] * * * La beauté du sang ne se fait que dans la prodigalité de la procréation humaine. […] Puis toute la palette des teints de jaunisse et de la bile dans le sang, depuis la pâleur hépatique jusqu’au bronze vert, depuis le bronze vert jusqu’à la jaunisse nègre, et des têtes de femmes, où la maladie de foie semble avoir développé une répugnante pilosité. […] … On n’a jamais pu faire de moi, de ces gens qui pleurent, et se font payer leurs dettes, tous les six mois… » Cela sort d’elle avec une indignation et une montée de sang qui lui empourprent le teint. […] On causait ce soir des puissances et des effets de la transmission du sang.

496. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

Vergniaud, Danton, Camille Desmoulins, Bailly, Condorcet, Lavoisier, Roucher, Chénier et cent autres avaient éteint dans leur sang les dernières voix. […] Il voulait l’honnêteté et la liberté affermies l’une par l’autre sur les ruines de son pays dans les Bourbons régénérés par le sang de Louis XVI. […] « Notre sang, disent-ils, pourquoi l’épargnas-tu ? […] … et point de sang !… Nous ne voulons pas de sang !

497. (1895) La science et la religion. Réponse à quelques objections

Le sang qui coule dans nos veines n’est-il pas en effet pour eux celui qui coulait, aux temps préhistoriques, dans les veines de nos premiers ancêtres, et n’y charrie-t-il pas toujours en quelque sorte le feu de leurs instincts lubriques ou féroces ? […] C’est ainsi que nous-mêmes nous ne devenons pas les viandes ni les herbes dont nous faisons notre nourriture ; mais nous nous les assimilons ; et « par la vertu de l’idée directrice » qui maintient en nous notre type, nous nous les convertissons en sang et en humanité. […] L’horreur en augmentait tous les jours par les nouvelles qu’on recevait des provinces. » Et un peu plus loin, à l’endroit de la mort de Charles IX : « La manière dont il mourut fut étrange : il eut des convulsions qui causaient de l’horreur, et les pores s’étant ouverts par des mouvements si violents le sang lui sortait de toutes parts. On ne manqua pas de dire que c’était avec justice qu’on voyait nager dans son propre sang un prince qui avait si cruellement répandu celui de ses sujets. […] D’un côté tous les crimes, de l’autre toutes les satisfactions : de ce côté les bonnes œuvres de tous les hommes, le sang des martyrs, les sacrifices et les larmes de l’innocence s’accumulant sans relâche pour faire équilibre au mal qui, depuis l’origine des choses, verse dans l’autre bassin ses flots empoisonnés ».

498. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

Une belle femme pâle et noire, visiblement de sang sicilien, songeait à sa fenêtre. […] Du Sang, de la Volupté et de la Mort, enivre et parfume. […] ouvrage d’un dieu, maudit est celui qui te traverse d’un souffle mêlé de sang. […] Que ma chemise soit tachée de sang, que votre épée ruisselle de mon sang ! […] Votre chemise sera tachée de sang ; mon épée ruissellera de votre sang.

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