Quand une concierge, qui semblait sentir la dignité et la responsabilité de gardienne du repos d’un philosophe favori du peuple, vous avait indiqué sa demeure, vous tourniez, à droite en entrant dans la cour, sous une petite voûte conduisant à des écuries ; vous rencontriez sous la voûte le premier degré d’un escalier de bois ; cet escalier vous conduisait de palier en palier, par des marches douces, comme il convient à l’âge essoufflé, jusqu’au dernier palier, sous les toits, où vous n’aviez plus au-dessus de vous que les tuiles et le ciel. […] Enfin un buste de moi sur une planche de noyer, dans un coin de la chambre, buste qui n’était pour Béranger ni celui d’un poète, ni celui d’un orateur, mais tout simplement le buste d’un ami de la dernière heure : ces amis sont souvent les plus chers, parce qu’ils sont les plus inattendus, et que, s’étant rencontrés tard, ils se donnent rendez-vous dans l’éternité pour s’aimer plus longtemps qu’ici-bas. […] Ces trois génies, le génie fin et classique du sous-entendu et du ridicule, le génie patriotique et martial du corps de garde, le génie élégiaque et pastoral de la chaumière, étaient difficiles à rencontrer dans un même homme. […] Ce prodige et cette bonne fortune se rencontrèrent, à l’heure où cela était nécessaire, dans Béranger.
C’est surtout dans les gens de lettres, c’est même uniquement parmi eux que ces hommes se rencontrent : c’est aux personnes seules de l’art qu’il est réservé d’apprécier les vraies beautés d’un ouvrage, et le degré de difficulté vaincue ; s’il appartient aux grands d’en porter un jugement sain, ce n’est qu’autant qu’ils seront eux-mêmes gens de lettres dans toute la rigueur Rarement un simple amateur raisonnera de l’art avec autant de lumières, je ne dis pas qu’un artiste habile, mais qu’un artiste médiocre. […] On arrive à ce vaste temple par une forêt immense, une espèce de labyrinthe semé de petits sentiers tortueux et fort étroits, où deux voyageurs ne peuvent se rencontrer sans que l’un des deux renverse l’autre. […] Si les talents sont justement choqués de ce partage, c’est à eux seuls qu’ils doivent s’en prendre ; qu’ils cessent de prodiguer leurs hommages à des gens qui croient les honorer d’un regard, et qui semblent les avertir par les démonstrations de leur politesse même qu’elle est un acte de bienveillance plutôt que de justice ; qu’ils cessent de rechercher la société des grands malgré les dégoûts visibles ou secret qu’ils y rencontrent, d’ignorer les avantages que la supériorité du génie donne sur les autres hommes, de se prosterner enfin aux genoux de ceux qui devraient être à leurs pieds. […] Ce n’est pas que j’approuve le fanatisme de quelques-uns de ses admirateurs ; l’estime du sage est plus tranquille ; mais c’est le propre des grands talents de faire des fanatiques, et il faut s’attendre à en rencontrer dans un siècle ou c’est une espèce d’héroïsme que de célébrer les génies supérieurs ; comme on doit s’attendre à faire naître des enthousiastes, des flagellants et des convulsionnaires dans les sectes qu’on persécute.
Un jour que Bernis sortait de chez Mme de Pompadour, emportant sous son bras une toile de perse qu’elle lui avait donnée pour meubler son nouvel appartement, le roi le rencontra dans l’escalier, et voulut absolument savoir ce qu’il portait ; il fallut le montrer et expliquer le pourquoi : « Eh bien, dit Louis XV en lui mettant dans la main un rouleau de louis, elle vous a donné la tapisserie, voilà pour les clous. » Pourtant l’impatience vint à Bernis, et, suivant la spirituelle remarque de Duclos, voyant qu’il avait tant de peine à faire une petite fortune, il résolut d’en tenter une grande : cela lui fut plus facile. […] En attendant, il cause avec son ami, il lui parle de ce qui l’intéresse le plus, de sa chère fondation, de cette École militaire, pour laquelle Duverney rencontrait à l’origine tant d’obstacles.
Préparez-vous donc à supporter avec courage toutes les traverses et difficultés que vous rencontrerez dans le monde, et, en les surmontant généreusement, acquérez-vous l’estime des gens d’honneur et particulièrement celle du maître à qui je veux vous donner, au service duquel je vous commande de vivre et mourir. […] C’est un tableau raccourci des remords et angoisses de Charles IX après la Saint-Barthélemy, de la résistance que rencontrent les ordres sanguinaires du roi chez quelques gouverneurs généreux de places et de provinces, et du ressort que reprend, le parti après le premier effroi, au lieu d’être écrasé et atterré comme on l’avait cru.
Heureusement pour lui, ces sentiments se rencontrèrent juste avec l’heure mémorable où la vieille société, minée d’abus et incapable de se réparer elle-même, allait demander des remèdes absolus et une simplification dans toutes les branches ; l’occasion était prochaine où il pourrait les appliquer. […] [NdA] J’ai peine à m’expliquer comment Étienne Dumont de Genève, en ses Souvenirs, parlant de Roederer qu’il rencontrait dans le groupe des Girondins, a pu dire de lui : « Roederer, homme d’esprit, mais fort ignorant, avait un fonds de légèreté dans le caractère qui lui donnait un rôle subalterne, quoique par sa capacité il l’emportât sur presque tous. » Quand on a eu sous les yeux les extraits en masse des lectures de Roederer dès sa première jeunesse, et quand on a vu l’ensemble de ses travaux sous la Constituante, on ne saurait admettre que cette ignorance dont parle Dumont, et dont les plus instruits eux-mêmes ne sont pas exempts sur les points étrangers à leurs études, ait porté le moins du monde sur la science politique et économique qui était l’essentiel ici.
Guizot, en étant venu à un examen plus particulier sur quelques points, avoue qu’il eut des mécomptes ; il y rencontra quelques erreurs soit dans les citations, soit dans les faits, mais surtout, par places, des veines et des teintes générales de partialité qui l’amenèrent presque à une conclusion toute rigoureuse. […] Dans les volumes suivants, l’historien s’est un peu détendu et de plus en plus développé : il ne s’est refusé aucune des branches d’événements et de faits qui se rencontraient sur son chemin dans son champ immense.
Il y a plaisir pourtant à rencontrer ce coin de saine et heureuse littérature conservé à la fin du xviiie siècle, et qui se transmet d’un maître indulgent dans un élève vigoureux. […] Il croyait n’obéir qu’à l’impérieux devoir, il allait rencontrer une part plus belle et une palme plus haute.
Ce dernier, au milieu de ses folâtreries, ne laissait pas sans doute de se préparer à la carrière de travaux positifs où ses talents rencontrèrent bientôt leur utile et illustre emploi. […] Cowper, en causant avec ce jeune homme, rencontra avec une joie inexprimable une âme nourrie des plus vives notions du christianisme, tel qu’il le concevait lui-même ; il fut introduit bientôt dans la famille, et dès lors une amitié s’engagea qui décida de toute la vie, et, l’on peut dire, de toutes les facultés et des talents du poète.
. — Il eût désiré parfois plus de résistance et de rencontrer une sérieuse action de guerre, afin de pouvoir rétablir dans ses troupes un peu de discipline ; car lui-même ne parvenait plus à être obéi. […] La perte de Lille, où Bouflers avait rencontré l’occasion de faire éclater sa vertu personnelle, avait été un grand et fatal exemple d’impuissance et de faiblesse de la part de nos généraux : on n’avait rien fait, avec une armée toute voisine, pour secourir une place de cette importance.
Le Tourneux, on n’avait jamais trouvé à redire à la traduction du même bréviaire faite autrefois par Marolles ; mais la raison en était simple, c’est que le travail de celui-ci n’avait pas mérité qu’on s’y arrêtât : « Car il faut l’avouer à la honte de ce siècle, disait Arnauld, quand les livres ne sont pas assez bien faits pour exciter la jalousie de certaines gens, ils sont hors d’atteinte à la censure. » De ce côté aussi, avec plus de modération dans les termes, nous rencontrons le même fonds de mésestime. […] À côté d’une faculté qui dévie et qui divague, il peut, dans le même homme, s’en rencontrer une autre où il excelle et où il mérite d’être considéré ; et tel qui le raille aisément pour des défauts qui sautent aux yeux, aurait tout profit d’aller à son école pour la qualité qu’il a.
Mais pour l’exécution d’une telle pensée, il avait besoin d’auxiliaires de choix : un hasard heureux les lui faisait rencontrer, déjà réunis en groupe. […] Car en France, notez-le bien, on ne veut pas surtout s’amuser et se plaire à un ouvrage d’art ou d’esprit, ou en être touché, on veut savoir si l’on a eu droit de s’amuser et d’applaudir, et d’être ému ; on a peur de s’être compromis, d’avoir fait une chose ridicule ; on se retourne, on interroge son voisin ; on aime à rencontrer une autorité, à avoir quelqu’un à qui l’on puisse s’adresser dans son doute, un homme ou un corps.
Des hommes d’esprit et d’intelligence se rencontraient pourtant au milieu de cette vie de bombance, et quelques-uns savaient concilier leurs devoirs extérieurs avec leurs aises au dedans. […] Qui se serait attendu à rencontrer en lui un rival de Granet pour la peinture d’un couvent ?
Sa maxime était « de tourner les choses de manière qu’en donnant gain de cause à celui qui avait raison, son adversaire eût cependant lieu, par quelques endroits, de se consoler d’être vaincu. » Aux difficultés qu’il rencontrait en cette tâche ingrate d’arbitre et de pacificateur des couvents, il lui arriva cependant de dire plus d’une fois qu’il était moins aisé de remettre la paix parmi les religieux et les réguliers que de ramener au devoir les prêtres séculiers. […] Ses Mémoires, quoiqu’il n’y ait pas lieu de soupçonner la véracité de l’auteur, renferment pourtant des inexactitudes évidentes, comme lorsqu’il dit (page 173) avoir rencontré à Auteuil, chez Boileau, Mme Des Houlières : c’est tout simplement impossible, Mme Des Houlières et Boileau étant brouillés à mort depuis la querelle de Phèdre ; et de plus, il est peu exact de dire, comme il le fait, que la vertu de Mme Des Houlières avait essuyé bien des assauts, et sans que la médisance y pût mordre.
Sa famille méconnut ses goûts ; au sortir du collège, on l’envoya à Lyon dans une des premières maisons, pour y être commis ; il s’y rencontra avec son compatriote Eynard, le futur philhellène. […] Il publia en 1801 son Tableau de l’Agriculture toscane, dans lequel, à côté des détails précis, techniques et tels que les peut désirer tout lecteur propriétaire rural, se trouvent des peintures véritables inspirées par la beauté des lieux, et qui ne se rencontreront plus jamais ensuite sous sa plume.
Dans ses premières lettres elle insiste beaucoup sur ce qu’elle est Française, sur ce qu’elle l’est devenue « jusqu’au bout des ongles. » Elle ne demandait pas mieux que de l’être ; sa bonne envie est évidente : « Il faut avoir, disait-elle, les vertus de son état. » Mais à la contradiction, à l’incrédulité qu’elle rencontra sans cesse sur ce point irritant, il ne faudrait pas s’étonner si elle se redressait quelquefois et si elle redevenait en définitive la pure fille de Marie-Thérèse. […] C’est ici le passage où je me suis rencontré tout à fait avec M.
Il s’était fait d’abord connaître dans le monde littéraire par des écrits d’une compilation utile et agréable ; mais ce ne fut que lorsqu’il eut choisi le vaste sujet de l’Histoire du commerce qu’il crut véritablement avoir rencontré sa veine et embrassé sa vocation. […] Voici ses propres paroles : « A Lausanne, je rencontrai l’abbé Raynal, mais il ne me laissa aucune admiration, soit de ses talents, soit de son caractère.
. — Nous nous portons tous bien dans notre petit rayon ; mais quand nous voulons l’étendre, nous rencontrons des maladies dont ce pays-ci est plein, etc. » La révolution de juillet 1830 n’étonna point M. de Talleyrand, qui l’avait vue venir. […] Gaëtan, marquis de La Rochefoucauld, celui qui avait composé des fables à douze ans et qui, les faisant imprimer, disait, pour s’excuser de s’être rencontré dans un sujet avec le grand fabuliste, qu’il n’avait lu que depuis « les Fables de M. de La Fontaine ».