/ 2696
820. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Victor Hugo »

Les deux volumes que voici n’ajoutent pas un iota à ce génie que j’ai suivi, reconnu, décrit et jugé tant de fois dans ses œuvres. […] il faut le reconnaître, elle est souvent interdite à la poésie de Victor Hugo. […] Reconnu par tous ses amis pour avoir dans l’esprit quelque chose d’immense qui sentait son chef, ils l’enlevèrent sur le pavois romantique, et les premiers retentissements de sa renommée furent mieux que les premiers bruits du talent : ils furent des scandales. […] Quant aux vers qui entrelardent cette maigreur, ils ne sont pas différents des autres vers de leur auteur que par leur faiblesse, mais on les reconnaît encore, à une multitude de traits, pour être de cette inépuisable fabrique qui a peut-être trop fabriqué… Vous en jugerez : … Dieu ne nous a pas confié sa maison La Justice, pour vivre en dehors d’elle… Cette justice qui est une maison… Celui qu’on nomme un Pape est vêtu d’apparences !

821. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

Mais, il faut bien le reconnaître, c’est la charcuterie, cette spécialité de la charcuterie, qui trône sur toutes les autres mangeailles étalées ici avec un luxe de couleurs qui fait venir vraiment par trop d’eau à la bouche… Oui ! […] Ils s’y reconnaîtront ! […] J’ai reconnu le talent à deux places. J’ai reconnu le tempérament de l’homme qu’était l’auteur de L’Assommoir avant que le réalisme l’eût pris tout entier et jeté dans le fond de son trou d’immondices !

822. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XIV » pp. 58-60

Il a tort (page 753) de ne pas reconnaître dans Lucrèce de l’âme ; c’est ce qui a pris le spectateur.

823. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 128-130

Religion, Morale, Politique, Histoire, Géographie, Chimie, tout a été de son ressort, & par-tout on y reconnoît l’Homme érudit, mais sans jugement, sans principes, & sans goût.

824. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 188-189

S’il n’a pas eu le prix de l’Académie pour lequel il a concouru, il a obtenu celui de l’estime du Public, qui y a reconnu des talens aussi sages que distingués.

825. (1913) Le bovarysme « Deuxième partie : Le Bovarysme de la vérité — I »

Mais le fait que la vie phénoménale persiste, l’ardeur dont témoigne l’humanité à la conserver et à la perfectionner interdisent de reconnaître la valeur d’une loi générale au vœu de cette sensibilité épuisée qui, pensant abolir la vie, n’abolit avec elle-même, dans l’effort de renoncement où elle se rétracte, qu’une maladie de la vie !

826. (1763) Salon de 1763 « Peintures — De Machy » pp. 242-243

Celui des Ruines de la foire Saint-Germain où le peintre a choisi le moment qui succède au danger ; où les braises ardentes éclairent les débris de l’édifice et les lieux circonvoisins ; où les hommes épuisés se reposent de leurs fatigues, et se remettent de leur effroi ; où les uns sont spectateurs oisifs, et les autres éteignent dans une mare d’eau des poutres, des solives à demi consumées ; où chacun travaille à reconnaître ses effets entassés pêle-mêle ; cette ruine, dis-je, a de l’effet.

827. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XIV. Le procès funèbre de la bouche »

Ainsi la bouche trouva tout de même son fossoyeur mais, il faut le reconnaître, ce n’avait pas été sans peine.

828. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

On sait qu’il fut un des grands protecteurs de Beaumarchais à ses débuts : ici on le voit tendrement lié avec Bernis, en qui il a reconnu talent et avenir. […] La première commotion passée, il se dit avec ce bon sens et cette réflexion sans amertume dont il était pourvu et qui formait la base de son caractère : « Je n’ai plus de fortune à faire : je n’ai qu’à remplir honnêtement la carrière de mon état, et à m’acquérir la considération qui doit accompagner une grande dignité : pour cela la retraite est merveilleuse. » C’est sous cette dernière forme, non plus politique, non plus tout à fait mondaine, non pas absolument ecclésiastique, mais agréablement diversifiée et mélangée ; c’est dans cette retraite suivie et couronnée bientôt d’une grande ambassade, qu’il nous sera possible de l’étudier désormais en sa qualité de cardinal, et que nous aimerons à reconnaître de plus en plus en lui le personnage considérable, d’un esprit doux, d’une culture rare et d’un art social infini. […] [NdA] J’ai dit là une grande légèreté ; j’ai reconnu depuis, en ouvrant les Œuvres de Nivernais, que Délie n’est autre que la duchesse de Nivernais elle-même, célébrée par son mari sous ce nom élégiaque ; elle était née de Pontchartrain et sœur du comte de Maurepas.

829. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — I. » pp. 325-345

Pourtant, comme il avait au fond l’esprit pratique, il ne fut pas sans reconnaître que ces soins d’intérêt, de fortune et d’avancement, qui étaient tout aux yeux de la plupart, avaient aussi quelque fondement, et qu’il ne s’agissait que de les mettre à leur place, de les réduire à leur valeur. […] Ainsi, dans son audace première il voulait d’abord en tout et partout le triomphe du principe électif ; il voulait l’élection des juges, celle des dépositaires du Trésor et du corps même des finances : ces dépositaires du Trésor eussent été nommés par l’Assemblée et responsables devant elle ; il voulait que l’armée fût assermentée à la nation, toutes conditions reconnues depuis incompatibles avec la Constitution monarchique. […] Dans mes rapports avec la Commune de Paris, je reconnus que c’était un énorme contresens de faire conférer par le peuple aux administrateurs l’investiture de fonctions instituées pour l’exécution des ordres du gouvernement, comme si on avait voulu que les ordres venant du centre aux extrémités heurtassent pour l’exécution contre les oppositions naturelles aux extrémités contre le centre.

830. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — I. » pp. 301-321

Beyle, et qui ont le plus goûté son esprit, sont heureux d’avoir à reparler de cet écrivain distingué, et, s’ils le font quelquefois avec moins d’enthousiasme que les critiques tels que M. de Balzac, qui ne l’ont vu qu’à la fin et qui l’ont inventé, ils ne sont pas disposés pour cela à lui rendre moins de justice et à moins reconnaître sa part notable d’originalité et d’influence, son genre d’utilité littéraire. […] On reconnaît en lui tout le contraire de ce provincial dont il s’est moqué, et dont la plus grande crainte dans un salon est de se trouver seul de son avis. […] Cela dit, il faut, pour être juste, reconnaître que le théâtre moderne, pris dans son ensemble, n’a pas été sans mérite et sans valeur littéraire ; les théories ont failli ; un génie dramatique seul, qui eût bien usé de toutes ses forces, aurait pu leur donner raison, tout en s’en passant.

831. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — I. » pp. 473-493

Accoutumée d’ailleurs à révérer l’Antiquité sous toutes ses formes, à reconnaître aux grands hommes, aux grands écrivains du paganisme des qualités et des vertus qui étaient un acheminement vers la morale chrétienne, elle trouvait mieux à concilier les objets de son admiration et de son culte dans la pleine et large doctrine de l’ordre catholique, dans cette voie latine qui ramène encore au Capitole, que dans ces autres voies plus strictes et particulières où la Réforme prise au sens de Calvin l’eût tenue confinée113. […] Et, dans une comparaison spirituelle, elle suppose qu’Hélène, cette beauté sans pareille chez Homère, est morte en Égypte, qu’elle y a été embaumée avec tout l’art des Égyptiens, que son corps a été conservé jusqu’à notre temps et nous est apporté en France ; ce n’est qu’une momie sans doute : On n’y verra pas ces yeux, pleins de feu, ce teint animé des couleurs les plus naturelles et les plus vives, cette grâce, ce charme qui faisait naître tant d’amour et qui se faisait sentir aux glaces mêmes de la vieillesse ; mais on y reconnaîtra encore la justesse et la beauté de ses traits, on y démêlera la grandeur de ses yeux, la petitesse de sa bouche, l’arc de ses beaux sourcils, et l’on y découvrira sa taille noble et majestueuse… C’est en ces termes véridiques et modestes que Mme Dacier annonçait sa traduction, et elle n’a rien dit de trop à son avantage. […] Il ne m’a point fait autant de plaisir ; mais dans la sagesse du plan, l’économie des détails, le rapport des épisodes, l’adresse des narrations, on reconnaît toujours Homère, et Homère plein de vigueur, d’âme et de sens.

832. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — I » pp. 139-158

En les lisant, on n’y retrouve pas seulement l’affectueuse émotion qui serait dans le cœur de bien des fils à la vue de ce qui ramène vers les années heureuses, mais on y reconnaît aussi ce qu’il y avait de particulièrement sensible, de tendrement sensitif et douloureux dans cette nature de Cowper, qui avait avant tout besoin de la tiédeur et de l’abri du nid domestique : En recevant le portrait de ma mère Oh ! […] Il n’y avait point de monsieur dans tout le pays qui pût se vanter d’avoir mieux fait que moi des loges d’écureuils, des niches de lapins ou des cages d’oiseaux ; et en ce qui est de faire des filets (de pêche ou de chasse), je ne reconnaissais point de supérieur. […] En voici une, par exemple : Le rossignol et le ver luisant Un rossignol qui, tout le long du jour, avait réjoui le village de son chant et n’avait suspendu ses notes ni au crépuscule ni même lorsque la soirée fut finie, commença à ressentir autant qu’il le pouvait les appels aigus de la faim ; lorsque, regardant avidement à l’entour, il avisa tout à coup au loin sur la terre quelque chose qui brillait dans l’ombre, et il reconnut le ver luisant à son étincelle.

833. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Visiter l’Angleterre pour elle, c’était abdiquer tout le passé de son rôle de reine, et en sacrifier désormais jusqu’au rêve et à la gloriole ; c’était reconnaître les faits accomplis et couronnés. On voyait, il y a quelque trente ans, à Paris, un de ces malheureux fous qui se croyaient le dauphin Louis XVII : celui-ci était parfaitement doux, paisible et nullement incommode ; seulement lorsqu’il lui arrivait, en compagnie de quelqu’un, d’être près du jardin des Tuileries et à l’entrée d’une des grilles, il quittait son monde pour faire le grand tour. — « Vous sentez bien, Mesdames, disait-il un jour d’un air mystérieux à deux dames qu’il avait accompagnées jusque-là, que je me dois à moi-même de ne pas traverser ce jardin. » Pour lui, traverser les Tuileries, c’eût été sanctionner l’usurpation et reconnaître l’intrus qui logeait au château. […] Je suis fâché que ce cœur, fortifié et soutenu par Alfieri, ait eu besoin d’un autre appui. » M. de Chateaubriand ne tient aucun compte, dans ce portrait dénigrant, d’un certain « air majestueux » que d’autres ont reconnu jusqu’à la fin à Mme d’Albany.

834. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Ce qu’il faut reconnaître, c’est qu’il fit de son mieux pour servir le gouvernement et le monarque qui lui avaient remis leurs intérêts, et pour rendre à la France dignité et influence dans les conseils de l’Europe. […] Telle est, messieurs, la liberté de la presse. » Il y disait encore : « La société, dans sa marche progressive, est destinée à subir de nouvelles nécessités ; je comprends que les gouvernements ne doivent pas se hâter de les reconnaître et d’y faire droit ; mais quand ils les ont reconnues, reprendre ce qu’on a donné, ou, ce qui revient au même, le suspendre sans cesse, c’est une témérité dont, plus que personne, je désire que n’aient pas à se repentir ceux qui en conçoivent la commode et funeste pensée.

835. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Boileau »

Quand il s’agit de juger la vie, les actions, les écrits d’un homme célèbre, on commence par bien examiner et décrire l’époque qui précéda sa venue, la société qui le reçut dans son sein, le mouvement général imprimé aux esprits ; on reconnaît et l’on dispose, par avance, la grande scène où le personnage doit jouer son rôle ; du moment qu’il intervient, tous les développements de sa force, tous les obstacles, tous les contrecoups sont prévus, expliqués, justifiés ; et de ce spectacle harmonieux il résulte par degrés, dans l’âme du lecteur, une satisfaction pacifique où se repose l’intelligence. […] Au collège, Boileau lisait, outre les auteurs classiques, beaucoup de poëmes modernes, de romans, et, bien qu’il composât lui-même, selon l’usage des rhétoriciens, d’assez mauvaises tragédies, son goût et son talent pour les vers étaient déjà reconnus de ses maîtres. […] La métaphore, je suis venu à le reconnaître, n’a pas besoin, pour être légitime et belle, d’être si complètement armée de pied en cap ; elle n’a pas besoin d’une rigueur matérielle si soutenue jusque dans le moindre détail.

836. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

Il imite souvent : soyez sûr que s’il imite, c’est qu’il a reconnu dans la nature l’objet que son modèle lui offrait, et que son imitation, tout spontanément, rectifiera le modèle littéraire sur la réalité vivante. […] Bien assurée de ce côté, la raison, mûrie dans les agitations du siècle et l’étude des anciens, se reconnaît juge souveraine de la vérité qu’on peut connaître, et la littérature s’imprègne d’un rationalisme positif et scientifique. […] La littérature où la raison tend à dominer, s’oriente vers l’universel : elle reconnaît pour son objet ce dont chacun trouve en soi, la vérité et l’usage ; rien ne lui sera plus propre que la vie humaine, que les faits moraux, les forces et les freins que met en jeu dans Taine l’existence de chaque jour.

/ 2696