L’évidence est dans la raison seule. […] La raison vous appartient-elle ? […] Cette solution est la distinction de la raison spontanée et de la raison réfléchie. […] La raison se développe de deux manières. […] Et l’humanité a toujours raison.
Or, elle n’aurait aucune raison de se lever, si Œnone était assise et elle en a une grande raison si Œnone est debout, parce qu’à une personne qui est debout on parle de plus près, plus directement, plus intimement, si l’on est debout soi-même. […] Cela veut dire : « Cléante a raison, non seulement parce qu’il raisonne bien ; mais parce qu’Orgon ne trouve pas un mot à lui répliquer ; et donc Orgon n’obéit qu’à sa passion et Cléante obéit à son jugement ». […] C’est pour cela que, de son temps, on a accusé Molière de donner raison à l’athéisme de Don Juan. […] La raison de Corneille est avec Sévère, son cœur avec Pauline, sa foi avec Polyeucte ; les meilleures parties de lui sont partout répandues dans cette pièce et, par parenthèse, c’est une des raisons pourquoi cette pièce est si admirable. […] On voit aussi que cette recherche est difficile et qu’il n’y manque pas de chances de se tromper ; ce n’est qu’une raison de plus pour la faire, quand il s’agit de plaisir, et, dans le petit livre que j’écris, il n’est question que de cela ; le risque de se tromper aiguise le désir de voir juste et relève le plaisir d’avoir probablement raison, et il y a un plaisir, je ne dirai pas plus grand, mais plus piquant, à être à peu près certain qu’on a raison, qu’à en être pleinement sûr.
Les problèmes métaphysiques et les ardeurs mystiques ne le tourmentent point : il est toute raison, il a le bon sens le plus positif et le plus pratique. […] On est revenu aujourd’hui de leur confusion, et l’on reconnaît que leur distinction est fondée en raison. […] Toutes les pensées et les expressions des pensées doivent avant tout satisfaire la raison : Aimez donc la raison : que toujours vos écrits Empruntent d’elle seule et leur lustre et leur prix. La raison fait donc la beauté : donc encore, la beauté sera quelque chose d’absolu, de constant, d’universel ; car ce sont là les trois caractères par lesquels les choses satisfont à la raison. […] Dans son naturalisme, Boileau trouve le moyen de fonder en raison l’admiration, l’imitation des anciens.
Si cette science venait à établir rigoureusement les rapports que vous trouvez si incertains, s’ensuivrait-il que le matérialisme eût raison, et que l’âme fût une chimère ? […] car s’il n’a pas tout à fait raison encore, il peut espérer qu’il aura de plus en plus raison, et que la physiologie apportera chaque jour de nouvelles preuves de la dépendance de l’âme à l’égard du corps ? […] Oui, l’âme se prouve par des raisons morales et psychologiques indépendantes de la physiologie. Oui, ces raisons subsisteraient encore dans toute leur force, lors même que la physiologie viendrait à bout d’établir avec précision et d’une manière infaillible certaines relations rigoureuses entre l’intelligence et le cerveau. […] En un mot, pour parler scolastiquement, l’argument des matérialistes repose sur deux prémisses, dont la majeure peut être ainsi exprimée : Si la pensée est en raison directe de l’état du cerveau, elle n’est qu’une propriété du cerveau ; et la mineure est : Or, il est de fait que la pensée est en en raison directe de l’état du cerveau.
Ces idées sont alors les raisons conscientes de nos actes, leurs motifs. […] On a appliqué avec raison ce principe à l’hypnotisme. […] Non seulement, avant d’agir, nous trouvons de bonnes ou mauvaises raisons pour faire ce qui nous plaît, mais, alors même que nous avons agi sans connaître les vraies causes de nos actes, nous leur imaginons encore telles et telles raisons. […] Souvent une idée traverse la tête sans apporter ses raisons avec elle. […] Il croit alors avoir agi spontanément, en vertu de ces raisons mêmes.
La raison de cette supériorité n’est pas difficile à trouver ; elle est toute à sa gloire. […] De là ces raisonnemens en faveur & contre le duel : l’apologie du suicide & la condamnation de cette frénésie ; la facilité à pallier le crime de l’adultere, & les raisons les plus fortes pour en faire sentir l’horreur. […] Les Adversaires de l’Auteur pouvoient avoir raison ; mais on ne prévoyoit pas alors que l’état actuel de notre Littérature viendroit à l’appui des sentimens du Citoyen de Geneve. […] Pascal étoit misanthrope comme lui ; mais guidé par la Religion, ses pensées ont le mérite de la profondeur & de la sublimité, joint à celui de la raison. […] Ce Traité d’éducation, le plus chimérique qu’un homme ait pu concevoir, est un assemblage continuel de sublime & de sublimités, de raison & d’extravagance, d’esprit & de puérilité, de Religion & d’impiété, de philanthropie & de causticité.
La raison, dans ce cas, est impersonnelle. […] Mais ce qu’est cet être la raison ne le dit pas. […] Il y a toujours une raison pour que deux idées s’appellent. […] Impuissance de la raison à se prouver elle-même. […] Il n’y a pas de raison de croire que non.
Raisons du succès de Malherbe. […] Mais ici se découvre un autre principe, que .Malherbe extrait de ce qu’il estime être la fonction littéraire de la langue : il veut qu’on satisfasse à la raison, ainsi qu’à l’usage ; et l’usage même tire son autorité de la raison. Car si l’on parle pour se faire entendre, c’est raison qu’on parle comme tout le monde. Et pareillement, c’est raison qu’on élimine de sa parole tout ce qui nuit ou ne sert pas à l’intelligence des choses ; l’expression parfaite est celle qui met la pensée en pleine lumière. […] Et voilà la raison de son goût pour la mythologie : elle est un répertoire d’images raisonnables, c’est-à-dire universellement intelligibles.
Mais on a beau ne pas donner au soldat de raison, il en imaginera une. […] Jamais la raison n’aura été placée plus haut. […] La raison ne peut qu’alléguer des raisons, auxquelles il semble toujours loisible d’opposer d’autres raisons. […] Bref, et pour tout résumer, il ne peut être question de fonder la morale sur le culte de la raison. — Resterait alors, comme nous l’annoncions, à examiner si elle pourrait reposer sur la raison en tant que celle-ci présenterait à notre activité une fin déterminée, conforme à la raison mais s’y surajoutant, une fin que la raison nous enseignerait à poursuivre méthodiquement. […] La raison en est bien simple.
Conception purement négative, car cette raison ne se définit que par la suppression de toute particularité mentale individuelle. — Mais la raison existe-t-elle jamais à l’état pur ? […] Draghicesco a-t-il raison ou bien l’idée de race répond-elle à une réalité ? […] Draghicesco a parfaitement raison de faire du cantonnier le juge de Renan. […] — Ce sont des raisons sentimentales, non des raisons scientifiques qui ont jusqu’ici servi à trancher ces questions. […] Renan ne croit pas à la religion révélée ; mais il croit à la raison, à la science.
Le pouvoir exécutif a surtout cette raison d’être. […] C’est, en un mot, l’exercice intégral de la raison. […] La raison triomphe. […] Même sur le cœur la raison doit prédominer. […] Rien ne se fait sans raison parmi les hommes.
Cependant cette raison n’est pas décisive. […] On a eu raison de soutenir, et c’est l’honneur de l’école doctrinaire, que le seul souverain légitime, le seul souverain absolu, ce n’est pas le prince, ce n’est pas le sénat, ce n’est pas la multitude, mais la justice et la raison, non pas la raison de tel ou tel homme, mais la raison en elle-même, telle qu’elle prononcerait si elle parlait et se manifestait tout à coup parmi les hommes. […] Or il y a, si je ne me trompe, un abîme entre la souveraineté de la raison et la souveraineté des plus raisonnables. […] La raison et l’expérience nous disent que les hommes sont à la fois égaux et inégaux. […] Il peut se faire entre la raison et la foi une lutte généreuse à l’avantage de l’une et de l’autre.
Je n’en donnerai, pour aujourd’hui, qu’une seule raison. […] Il pourrait être amusant d’en chercher les raisons. […] Tout homme a tant de raisons de ne se servir de l’écriture que pour déguiser sa pensée ! […] Mais surtout sa grande raison contre la raison est la confiance même qu’il met en elle, dans la fécondité de ses ressources, dans l’étendue de son pouvoir, dans la subtilité de sa dialectique. […] On peut lui opposer d’excellentes raisons, et j’en indiquerai tout à l’heure une ou deux.
Ils énoncent ce qui est et, pour cette raison, on les appelle jugements d’existence ou de réalité. […] À plus forte raison en est-il ainsi des valeurs esthétiques qui sont lettre morte pour le plus grand nombre. […] S’il était le produit de la raison individuelle, d’où lui pourrait venir cette impersonnalité ? Invoquera-t-on l’impersonnalité de la raison humaine ? […] Si les raisons communient à ce point, n’est-ce pas qu’elles viennent d’une même source, qu’elles participent d’une raison commune ?
À leur tête, le roi, qui a fait la France en se dévouant à elle comme à sa chose propre, finit par user d’elle comme de sa chose propre ; l’argent public est son argent de poche, et des passions, des vanités, des faiblesses personnelles, des habitudes de luxe, des préoccupations de famille, des intrigues de maîtresse, des caprices d’épouse gouvernent un État de vingt-six millions d’hommes avec un arbitraire, une incurie, une prodigalité, une maladresse, un manque de suite qu’on excuserait à peine dans la conduite d’un domaine privé Roi et privilégiés, ils n’excellent qu’en un point, le savoir-vivre, le bon goût, le bon ton, le talent de représenter et de recevoir, le don de causer avec grâce, finesse et gaieté, l’art de transformer la vie en une fête ingénieuse et brillante, comme si le monde était un salon d’oisifs délicats où il suffit d’être spirituel et aimable, tandis qu’il est un cirque où il faut être fort pour combattre, et un laboratoire où il faut travailler pour être utile Par cette habitude, cette perfection et cet ascendant de la conversation polie, ils ont imprimé à l’esprit français la forme classique, qui, combinée avec le nouvel acquis scientifique, produit la philosophie du dix-huitième siècle, le discrédit de la tradition, la prétention de refondre toutes les institutions humaines d’après la raison seule, l’application des méthodes mathématiques à la politique et à la morale, le catéchisme des droits de l’homme, et tous les dogmes anarchiques et despotiques du Contrat social Une fois que la chimère est née, ils la recueillent chez eux comme un passe-temps de salon ; ils jouent avec le monstre tout petit, encore innocent, enrubanné comme un mouton d’églogue ; ils n’imaginent pas qu’il puisse jamais devenir une bête enragée et formidable ; ils le nourrissent, ils le flattent, puis, de leur hôtel, ils le laissent descendre dans la rue Là, chez une bourgeoisie que le gouvernement indispose en compromettant sa fortune, que les privilèges heurtent en comprimant ses ambitions, que l’inégalité blesse en froissant son amour-propre, la théorie révolutionnaire prend des accroissements rapides, une âpreté soudaine, et, au bout de quelques années, se trouve la maîtresse incontestée de l’opinion À ce moment et sur son appel, surgit un autre colosse, un monstre aux millions de têtes, une brute effarouchée et aveugle, tout un peuple pressuré, exaspéré et subitement déchaîné contre le gouvernement dont les exactions le dépouillent, contre les privilégiés dont les droits l’affament, sans que, dans ces campagnes désertées par leurs patrons naturels, il se rencontre une autorité survivante, sans que, dans ces provinces pliées à la centralisation mécanique, il reste un groupe indépendant, sans que, dans cette société désagrégée par le despotisme, il puisse se former des centres d’initiative et de résistance, sans que, dans cette haute classe désarmée par son humanité même, il se trouve un politique exempt d’illusion et capable d’action, sans que tant de bonnes volontés et de belles intelligences puissent se défendre contre les deux ennemis de toute liberté et de tout ordre, contre la contagion du rêve démocratique qui trouble les meilleures têtes et contre les irruptions de la brutalité populacière qui pervertit les meilleures lois. […] De là un déluge de plaisanteries sur la religion ; l’un citait une tirade de la Pucelle ; l’autre rapportait certains vers philosophiques de Diderot… Et d’applaudir… La conversation devient plus sérieuse ; on se répand en admiration sur la révolution qu’avait faite Voltaire, et l’on convient que c’était là le premier titre de sa gloire. « Il a donné le ton à son siècle, et s’est fait lire dans l’antichambre comme dans le salon. » Un des convives nous raconta, en pouffant de rire, qu’un coiffeur lui avait dit, tout en le poudrant : « Voyez-vous, monsieur, quoique je ne sois qu’un misérable carabin, je n’ai pas plus de religion qu’un autre » On conclut que la révolution ne tardera pas à se consommer, qu’il faut absolument que la superstition et le fanatisme fassent place à la philosophie, et l’on en est à calculer la probabilité de l’époque et quels seront ceux de la société qui verront le règne de la raison Les plus vieux se plaignaient de ne pouvoir s’en flatter ; les jeunes se réjouissaient d’en avoir une espérance très vraisemblable, et l’on félicitait surtout l’Académie d’avoir préparé le grand œuvre et d’avoir été le chef-lieu, le centre, le mobile de la liberté de penser. « Un seul des convives n’avait point pris de part à toute la joie de cette conversation… C’était Cazotte, homme aimable et original, mais malheureusement infatué des rêveries des illuminés. […] Qu’est-ce que tout cela peut avoir de commun avec la philosophie et le règne de la raison ? « C’est précisément ce que je vous dis : c’est au nom de la philosophie, de l’humanité, de la liberté, c’est sous le règne de la raison qu’il vous arrivera de finir ainsi ; et ce sera bien le règne de la raison, car elle aura des temples, et même il n’y aura plus dans toute la France, en ce temps-là, que des temples de la raison… Vous, monsieur de Chamfort, vous vous couperez les veines de vingt-deux coups de rasoir, et pourtant vous n’en mourrez que quelques mois après. […] Vous, monsieur de Nicolaï, sur l’échafaud ; vous, monsieur Bailly, sur l’échafaud ; vous, monsieur de Malesherbes, sur l’échafaud ; … vous, monsieur Roucher, aussi sur l’échafaud Mais nous serons donc subjugués par les Turcs et les Tartares Point du tout ; je vous l’ai dit, vous serez alors gouvernés par la seule philosophie et par la seule raison.
En un mot, je rapproche les deux vérités, parce que ce sont les mêmes raisons qui nous les font aimer et parce que ce sont les mêmes raisons qui nous les font redouter. Si nous ne devons pas avoir peur de la vérité morale, à plus forte raison il ne faut pas redouter la vérité scientifique. […] Et ce serait là une raison de défiance. […] Si nous nous arrêtions là, nous trouverions dans ces pages quelques raisons d’avoir confiance dans la valeur de la Science, mais des raisons beaucoup plus nombreuses de nous en défier ; il nous resterait une impression de doute ; il faut maintenant remettre les choses au point. […] Non, les lois scientifiques ne sont pas des créations artificielles ; nous n’avons aucune raison de les regarder comme contingentes, bien qu’il nous soit impossible de démontrer qu’elles ne le sont pas.
C’est le dernier mot de la morale, comme la logique est le dernier mot de la raison. […] Mais le péril où j’étais ne m’a pas paru une raison de rien faire qui fût indigne d’un homme libre. […] C’est la sainteté de la raison. […] L’unité de Dieu est aussi ancienne que la raison elle-même. […] La raison révèle aujourd’hui ce qu’elle révélait hier, car elle est le Verbe intérieur qui parle en nous.