La réflexion qui termine et que l’auteur ne fait pas en son nom, mais qu’il place dans la bouche des chevaliers présents, ce pronostic tout flatteur et favorable sur l’avenir du prince-roi, s’il lui est donné de vivre pour y atteindre, rappelle dans une perspective éloignée l’instabilité des choses humaines et les compensations du sort, qui ne permet pas aux plus heureux d’accomplir tout leur bonheur :-ce prince si brillant, et à qui tous souhaitent vie, ne régnera pas en effet, et mourra plein de gloire, mais avant le temps. […] Cette édition est quelquefois de nature à en faire souhaiter une autre, mais aussi elle permet de l’attendre28.
Malgré cette humble et confiante prière, je ne répondrais point que sa religion fût aucunement orthodoxe : il se permettait souvent des réflexions assez libres, qui ont un certain air théophilanthropique, et l’on sent que le souffle du xviiie siècle arrivait. […] Quand la langue est restée pure, elle permet de ces acceptions heureuses et justes, trouvées en passant et sans qu’on appuie trop. — Il y a bien des années, un jeune écrivain, depuis célèbre, M.
Je me suis permis d’exposer ce détail qui laisse voir en une sorte de conflit deux noms célèbres, ou du moins j’ai voulu l’indiquer en renvoyant aux vraies sources, aux Mémoires de la guerre de la succession, pour qu’on ne dise pas en deux mots que Villars a miné et supplanté Catinat à l’armée du Rhin, tandis que réellement Catinat, quelque respect que l’on doive à son caractère, s’y mina lui-même par une inaction et une circonspection excessive qu’il n’avait sans doute pas toujours eue à ce degré, mais qui s’était accrue avec l’âge, au point de devenir elle-même un danger. « Il y a des temps où les Fabius sont de bon usage, et des temps où les Marcellus sont nécessaires. » Le mot est de M. des Alleurs, un des amis de Villars, lequel l’accepte volontiers et s’en décore. […] si vous me permettez de sortir un peu du sérieux qui convient quand on a l’honneur d’écrire à son ministre, j’aurai l’honneur de vous dire que vous vous y prenez très mal.
» Le roi, en effet, à qui cette demande imprévue tire une terrible épine du pied, se hâte de consentir ; il envoie des lettres à don Diègue et à Rodrigue par un messager pour les mander incontinent auprès de lui, et sans faire dire autre chose, sinon que Rodrigue, si Dieu le permet, sera bientôt en haut rang. […] Ici le Cid se permet une bien forte ruse.
On n’en permit point la réimpression chez nous, et on en interdit même l’entrée, ce dont Bayle ne fut point trop fâché tant pour Battrait qu’a toujours le fruit défendu que pour des raisons moitié commerciales, moitié politiques : il évitait du même coup la contrefaçon et aussi de paraître en Hollande trop peu protestant et trop favorable à la France. […] Pellisson distinguait jusqu’à quatre manières d’alléguer un passage, et dans ces manières il en compte une où il est permis, selon lui, de détourner légèrement le passage cité de sa signification première : c’est lorsque la citation est plutôt d’ornement et d’élégance que de nécessité et de rigueur, comme c’est ici le cas.
Malherbe et Voiture pensèrent le gâter, il le dit lui-même ; mais, à la fin, il vit le faux des brillants, il trouva la nature au gîte et la prit, et elle ne l’a point quitté depuis. » Du moment qu’il s’agit des Fables, il ne plaisante plus, et parlant de celles de La Motte, il devient même trop sévère et trop méprisant quand il dit : « Il vient de faire des Fables à l’envi de La Fontaine, et a montré qu’il ne peut écrire que pour les cafés, et qu’il n’est pas permis de travailler après les grands hommes qui ont emporté la palme en certain genre. » Marais ne veut pas (et c’est là sa limite) qu’on essaye de rouvrir la carrière après les maîtres. […] Un autre vieux classique de ce temps-là, M. de La Rivière, le gendre de Bussy-Rabutin, a jugé non moins sévèrement que Marais le salon de Mme de Lambert et son monde, quoiqu’il fût l’ami particulier de cette femme distinguée, sur laquelle nous nous permettons de différer d’opinion avec lui ; mais tous ces jugements et contre-jugements sont curieux, en ce qu’ils nous aident à comprendre le mouvement et les divisions de la société d’alors.
M. de Chateaubriand ne paraît pas assez croire à cet à-propos, à cet intérêt actuel de ce qu’il écrit, à cette avide et affectueuse vénération de tous, et c’est le seul reproche que nous nous permettrons de lui adresser. […] S’il était permis, sans rien profaner, de saisir l’ensemble et de tout mettre en compte dans le tableau, nous dirions que cette heure de 1672 fut sans doute la plus complète d’un règne si merveilleux.
Nisard, l’un de nos amis, et, s’il nous permet de le dire, notre rival en plus d’une rencontre, qui nous a témoigné souvent dans ses écrits une faveur de louange (ou de clémence après l’attaque) que nous ne lui avons pas assez rendue, que nous craignons de ne pas assez lui rendre aujourd’hui encore. […] Nisard n’y aurait pas aspiré, par ambition grave, quand la nature de son esprit lui eût permis le badinage.
Un vieil amour ne sauroit plaire ; On voudroit déjà qu’il fût mort : Quand il languit ou qu’il s’endort, Il est permis de s’en défaire. […] La destinée posthume de Mme Des Houlières ne manqua pas de vicissitudes ; elle semblait d’avance s’y attendre en se disant : Tandis que le soleil se lève encor pour nous, Je conviens que rien n’est plus doux Que de pouvoir sûrement croire Qu’après qu’un froid nuage aura couvert nos yeux, Rien de lâche, rien d’odieux Ne souillera notre mémoire ; Que, regrettés par nos amis, Dans leur cœur nous vivrons encore, Pour un tel avenir tous les soins sont permis ; C’est par cet endroit seul que l’amour-propre honore : Il faut laisser le reste entre les mains du sort.
Je me proposais aussi la plus grande retenue dans mes propos, et de ne rien faire paraître de l’envie que j’avais de tout ce qui pouvait amener le renvoi de la maîtresse et du ministre, sans cependant me permettre d’affecter jamais aucun sentiment contraire. […] Quoique ce sentiment fût le même à Versailles, l’air d’inquiétude y était plus général ; c’est d’abord le pays du déguisement, et si le déguisement est permis dans un cas, c’est bien dans celui où quand on peut, sans blesser l’honneur, cacher ce qu’on pense, on ne peut pas le faire paraître sans étourderie et sans courir le risque à peu près sûr d’une Bastille éternelle.
Elle ne permet plus aux mots de se suivre selon l’ordre variable des impressions et des émotions ; elle les dispose régulièrement et rigoureusement selon l’ordre immuable des idées. […] Il n’est plus permis d’écrire au hasard et selon le caprice de la verve, de jeter ses idées par paquets, de s’interrompre par des parenthèses, d’enfiler l’enfilade interminable des citations et des énumérations.
Pour acquérir l’intelligence des mots abstraits et l’habitude des déductions suivies, il faut au préalable une préparation spéciale, un exercice prolongé, une pratique ancienne, outre cela, s’il s’agit de politique, le sang-froid qui, laissant à la réflexion toutes ses prises, permet à l’homme de se détacher un instant de lui-même pour considérer ses intérêts en spectateur désintéressé. […] Sa loi « ne prêche que servitude et dépendance… il est fait pour être esclave », et d’un esclave on ne fera jamais un citoyen. « République chrétienne, chacun de ces deux mots exclut l’autre. » Partant, si la future république me permet d’être chrétien, c’est à la condition sous-entendue que ma doctrine restera confinée dans mon esprit, sans descendre jusque dans mon cœur Si je suis catholique, (et sur vingt-six millions de Français, vingt-cinq millions sont dans mon cas), ma condition est pire.
Une femme avec deux enfants au maillot, « sans lait, sans un pouce de terre », à qui l’on a tué ainsi deux chèvres, son unique ressource, une autre à qui l’on a tué sa chèvre unique et qui est à l’aumône avec son fils, viennent pleurer à la porte du château ; l’une reçoit douze livres, l’autre est admise comme servante, et désormais « ce village donne de grands coups de chapeau, avec une physionomie bien riante » En effet, ils ne sont pas habitués aux bienfaits ; pâtir et le lot de tout ce pauvre monde. « Ils croient inévitable, comme la pluie et la grêle, la nécessité d’être opprimés par le plus fort, le plus riche, le plus accrédité, et c’est ce qui leur imprime, s’il est permis de parler ainsi, un caractère de souffre-douleur. » En Auvergne, pays féodal, tout couvert de grands domaines ecclésiastiques et seigneuriaux, la misère est égale. […] Le marquis de Mirabeau décrit « la fête votive du Mont-Dore, les sauvages descendant en torrents de la montagne650, le curé avec étole et surplis, la justice en perruque, la maréchaussée, le sabre à la main, gardant la place avant de permettre aux musettes de commencer ; la danse interrompue un quart d’heure après par la bataille ; les cris et les sifflements des enfants, des débiles et autres assistants, les agaçant comme fait la canaille quand les chiens se battent ; des hommes affreux, ou plutôt des bêtes fauves, couverts de sayons de grosse laine, avec de larges ceintures de cuir piquées de clous de cuivre, d’une taille gigantesque rehaussée par de hauts sabots, s’élevant encore pour regarder le combat, trépignant avec progression, se frottant les flancs avec les coudes, la figure hâve et couverte de longs cheveux gras, le haut du visage pâlissant et le bas se déchirant pour ébaucher un rire cruel et une sorte d’impatience féroce Et ces gens-là payent la taille !
Je vous en écris une qu’il m’a été permis de savoir : « Les citoyens te reconnaîtront pour mon successeur, je n’en doute pas. […] Si je ne poursuis pas à présent sur les qualités des autres enfants, je ne puis cependant me retenir sur le sujet de Pierre et sur le témoignage que son père lui a rendu dans une affaire récente. — Deux mois environ avant sa mort, Laurent, assis sur son lit, selon sa coutume, causant avec nous philosophie et littérature, me disait qu’il voulait consacrer le reste de sa vie à des études qui nous étaient communes, à lui, à moi et à Pic de la Mirandole, et cela loin du bruit et du fracas de la ville. « Mais, lui dis-je, les citoyens ne vous le permettront pas, parce que, de jour en jour, ils aiment davantage vos conseils et votre autorité. » Souriant alors, il me dit : « J’ai déjà délégué mes fonctions à votre élève et je l’ai chargé de tout le poids des affaires. — Mais, avez-vous, lui répondis-je, surpris assez de force dans ce jeune homme pour que nous puissions avec confiance nous reposer sur lui ?
Marianne, ne vous comparez pas à moi, je ne suis qu’un malheureux pécheur fort en peine de son salut ; vous, vous êtes une sainte, et, je vous le dis en vérité, un jour vous verrez Dieu ») ; le voyage des Aires à Lignières, par la montagne, derrière la voiture de déménagement, un humble exode et qui a pourtant je ne sais quoi parmi sa simplicité, d’auguste et de biblique ; le déjeuner du bon ermite Adon Laborie au presbytère ; le pèlerinage de Saint-Fulcran ; la joie et l’orgueil du bon vieux prêtre quand son doyen lui permet de dire la messe dans la chapelle miraculeuse…, tout cela est délicieux, d’une franche poésie, familière et pénétrante. […] Or le prêtre peut se permettre un autre orgueil, mais non celui-là.
Les engins, dont le bris illumine les parlements d’une lueur sommaire, mais estropient, aussi à faire grand’pitié, des badauds, je m’y intéresserais, en raison de la lueur — sans la brièveté de son enseignement qui permet au législateur d’alléguer une définitive incompréhension ; mais j’y récuse l’adjonction de balles à tir et de clous. […] Je m’interromps, d’abord en vue de n’élargir, outre mesure pour une fois, ce sujet où tout se rattache, l’art littéraire : et moi-même inhabile à la plaisanterie, voulant éviter, du moins, le ridicule à votre sens comme au mien (permettez-moi de dire cela tout un) qu’il y aurait, Messieurs, à vaticiner.
Quoique Calvin pût laisser voir, dès ce temps-là, par quelques marques, la dureté qu’on devait lui reprocher un jour, les éloges que firent tous ses maîtres successivement, de son assiduité au travail et de sa docilité, ne permettent pas de douter que Wolmar ne l’entendit d’une certaine souplesse d’esprit, qui ne regarde pas le moral. […] Le prodigieux travail de sa jeunesse lui avait donné la facilité de la parole et de la plume, une conception nette et rapide à laquelle l’expression ne manquait jamais ; outre une mémoire incroyable qui lui permettait de reprendre une dictée longtemps interrompue à l’endroit même où il l’avait laissée, et une sobriété pour le sommeil, qui doublait la longueur de sa vie.