C’est le concours des philosophes et des poètes qui perfectionne les langues ; c’est aux philosophes qu’elles doivent cette universalité de signes qui rend une langue le tableau de l’univers ; cette justesse qui marque avec précision tous les rapports et toutes les différences des objets ; cette finesse qui distingue tous les progrès d’actions, de passions et de mouvements ; cette analogie qui dans la création des signes les fait naître les uns des autres, et les enchaîne comme les idées analogues se tiennent dans la pensée, ou les êtres voisins dans la nature ; cet arrangement qui, de la combinaison des mots, fait sortir avec clarté l’ordre et la combinaison des idées ; enfin cette régularité qui, comme dans un plan de législation, embrasse tout et suit partout le même principe et la même loi. […] L’orateur, en louant ce grand homme, nous dit Cicéron, « remercia les dieux de ce qu’ils avaient fait naître Scipion dans Rome, plutôt que partout ailleurs, parce qu’il fallait que l’empire du monde fût où était Scipion ».
Vous semblez assis en paix ; et la guerre est partout en votre pays, etc. […] Partout le suivent le découragement et le chagrin.
Partout le souffle est vibrant, la langue sonore, le rythme mouvementé et varié.
Autre vice de ces compositions, c’est qu’il y a trop d’idées, trop de poésie, de l’allégorie fourée partout, gâtant tout, brouillant tout, une obscurité presque à l’épreuve des légendes.
Jusqu’ici ce mouvement sympathique et honorable du cœur des nations s’était produit partout, en Angleterre, en Irlande, en France, toutes les fois qu’on avait fait appel à leurs sentiments ou à leur honneur en faveur d’un de leurs contemporains quelconque, serviteurs du pays, hommes d’État, orateurs, écrivains, poètes. […] Ces terres sont affichées partout et tous les jours ; eh bien ! […] L’iniquité est partout ; la mémoire humaine n’est pas démocratique, ou plutôt elle est trop étroite et trop fragile pour contenir et pour garder les peuples tout entiers dans ses annales ; elle s’attache à quelques figures grandioses, pittoresques, pathétiques, culminantes, qui sortent à ses yeux de la foule, et elle en fait l’aristocratie privilégiée de l’espace et du temps. […] Mais, ce qui ne sera peut-être pas au goût de toute l’Europe, il prétend que les hommes ont trop de besoins et trop peu de force pour que le superflu des uns ne soit pas le nécessaire des autres ; en conséquence il peint le luxe des couleurs les plus odieuses, le montre partout comme l’écueil du bonheur public, et affecte de prouver, par les événements, que la décadence des mœurs, qui en est la suite nécessaire, a entraîné celle des deux dynasties Hia et Chang. […] la religion recevra des hommes les temps qu’ils doivent au Tien (Dieu). » Les cinquante-huit chapitres du livre de Confucius sont partout pleins de ces maximes de religion rationnelle et de ces règles de gouvernement par la conscience.
Le contrecoup de la république de 1848, à son tour, eut son retentissement naturel et non artificiel partout : Vienne, Berlin, Francfort, Milan, Venise, Naples, Florence, Rome, se soulevèrent d’elles-mêmes ; les souverains et le pape se hâtèrent de jeter des constitutions plus populaires pour amortir le choc des peuples contre les trônes. […] Pendant la servitude alternative de l’Italie aux Français et aux Allemands, les Vénitiens continuent à rester libres et à triompher tantôt de la France, tantôt de l’Allemagne, sans s’avilir jamais jusqu’à la neutralité, cet égoïsme honteux des nations inertes ; on les voit partout où il y a un équilibre à rétablir en Italie, de la tyrannie étrangère à combattre, de la gloire navale ou militaire à conquérir au nom de Venise ; leur trésor paye les Suisses, qui pèsent la justice des causes au poids de leur solde ; la victoire de Marignan laisse les Vénitiens inébranlables dans leur patriotisme italien. […] Ils avaient deux religions dans leur cœur, leurs princes et leurs prêtres ; superstitieux chez eux, héroïques dehors, bons et honnêtes partout, aussi propres à subir le joug de la conquête sans le secouer qu’à imposer ce joug à leurs voisins, quand l’inquiétude de la maison de Savoie les mettait à la solde des grands alliés auxquels on inféodait leur sang pour des causes toutes personnelles à ces princes. […] L’Autriche est toujours la première à intervenir à main armée pour le statu quo, car c’est sa nature, et c’est son intérêt de représenter partout le passé. […] Nous prenons nos précautions contre ce danger enfin aperçu, et nous faisons bien ; la Savoie et le comté de Nice sont deux sûretés légitimes, mais deux sûretés bien insuffisantes contre la création d’une sixième grande puissance dans le monde, création qui enceindra la France d’une ceinture de périls partout, et même du seul côté où elle avait de l’air pour ses mouvements et rien à craindre.
Quand la neige est molle, on les voit en troupes immenses, aux bords des grands lacs sur lesquels ils se retirent dès qu’on les poursuit, parce que la première couche y est bien plus résistante que partout ailleurs ; mais, si la neige vient à durcir, ils se jettent dans les bois. […] Partout où ces sortes de rochers existent, j’ai vu ou entendu de ces oiseaux durant la saison des œufs. […] Un parfum éthéré embaume l’air ; partout des fleurs, des grappes mûrissantes, des corymbes vermeils, une atmosphère tiède et enivrante. […] La générosité se retrouve partout. […] Partout où j’ai rencontré de ces vénérables patriarches des forêts, que la décadence et l’âge avaient ainsi rendus habitables, j’ai toujours trouvé des nids d’hirondelles qui elles-mêmes continuaient d’y vivre jusqu’au moment de leur départ.
« Ce courtisan de D…, il est partout. Professeur suppléant à l’École de droit, long, mince, l’échine courbée, toujours saluant, présenté à tout le monde, faufilé partout, assidu partout, le parfait intrigant… » Quels tristes bonshommes ! […] Des livres partout. […] On voudrait s’arrêter partout, pour se réjouir ou pour s’indigner. […] Il en mettait partout.
Ne point suivre le génie de la France partout où il s’est porté, c’est le premier tort de ceux qui négligent trop l’étranger. […] Mais il n’est point possible qu’un vice public reste contenu dans l’espace où il domine ; il faut l’extirper partout ou partout le subir. […] Partout, dans les œuvres parues depuis quelques années, « Sa Majesté l’Argent », ainsi qu’on l’a appelé, joue le rôle de deus ex machina. […] Là plus que partout ailleurs, sous le dépit du gentilhomme, couvent les espérances du « patriote ». […] Partout le propos soudain et la main prompte ; et pour chef de chœur, Crispin lui-même.
Tous les arts qui, comme l’éloquence, ont pour but dernier de produire la conviction, n’ont pas en somme de moyen plus simple pour cela que d’être véridiques ; l’éloquence la plus sincère a toujours et partout chance d’être la plus haute. […] Qui ne connaît le mot de Mme Necker : « Quand M. de Buffon voulait mettre sa grande robe sur de petits objets, elle faisait des plis partout. » Ces petits objets, c’était précisément l’essentiel dans l’art ; c’était ce qui fait la vie, la tendresse et la force à la fois. […] disait à Fontenelle Mme de Tencin : ce n’est pas un cœur que vous avez là dans la poitrine ; c’est de la cervelle. » Tous les hommes du dix-huitième siècle ont eu ainsi de la cervelle partout, et ce n’est pas avec de la cervelle qu’on sent la nature. […] Animer la nature, c’est être dans le vrai, car la vie est en tout, — la vie et aussi l’effort ; le vouloir vivre, tantôt favorisé, tantôt contrarié, apporte partout avec lui le germe du plaisir et de la souffrance, et nous pouvons avoir pitié même d’une fleur. […] Si, en vertu de cette loi d’évolution, la vie pénètre et ondoie partout, son niveau ne monte pourtant que par degrés, suivant un étiage régulier.
Des graines peuvent donc ainsi être transportées à de grandes distances ; car un grand nombre de faits prouvent que le sol est presque partout mélangé de graines. […] Quand la chaleur sera complétement de retour, les mêmes espèces arctiques qui auront vécu ensemble en grandes masses sur les basses terres du vieux monde et de l’ancien, après avoir été exterminées partout jusqu’à une certaine altitude, ne se trouveront plus qu’isolées sur les sommets des montagnes éloignées, et dans les régions arctiques des deux hémisphères. […] Une fois ceci admis, il est difficile de s’empêcher de croire que pendant toute cette période la température du monde entier a été partout à la fois plus froide qu’elle n’est aujourd’hui. […] Il n’est pas douteux qu’avant la période glaciaire les montagnes intertropicales ne fussent peuplées de formes alpines indigènes ; mais celles-ci ont dû presque partout céder en grande partie la place à des formes plus dominantes, produites dans les contrées plus vastes, et dans les ateliers plus actifs du nord. […] Si, au contraire, comme les astronomes le pensent aujourd’hui, d’après les irrégularités et les retards de la course des comètes périodiques, une matière éthérée très subtile remplit l’espace interplanétaire, cette matière subtile ne doit-elle pas, depuis l’infini des temps qu’elle existe, être arrivée à peu près partout à l’équilibre de température ?
Le christianisme nous montre partout la vertu et l’infortune, et le polythéisme est un culte de crimes et de prospérité.
Tout ceci est pour dire que, comme Shakspeare et Cervantes, comme trois ou quatre génies supérieurs dans la suite des âges, Molière est peintre de la nature humaine au fond, sans acception ni préoccupation de culte, de dogme fixe, d’interprétation formelle ; qu’en s’attaquant à la société de son temps, il a représenté la vie qui est partout celle du grand nombre, et qu’au sein de mœurs déterminées qu’il châtiait au vif, il s’est trouvé avoir écrit pour tous les hommes. […] Molière prit plus tard au Pédant joué de Cyrano deux scènes qui ne déparent certainement pas les Fourberies de Scapin : c’était son habitude, disait-il à ce propos, de reprendre son bien partout où il le trouvait ; et puis, comme l’a remarqué spirituellement M. […] Molière, le plus créateur et le plus inventif des génies, est celui peut-être qui a le plus imité, et de partout ; c’est encore là un trait qu’ont en commun les poëtes primitifs populaires et les illustres dramatiques qui les continuent. […] S’il s’applique au dehors, il est tenté à chaque pas de se mirer dans les choses, de se sentir dans les personnes, d’intervenir et de se substituer partout en se déguisant à peine ; il est le contraire de la diversité. […] C’est dans ce Commentaire qu’à propos du vers des Femmes savantes : On voit partout chez vous l’ithos et le pathos, M.
a dit un ancien. — Tant que vous tiendrez table ouverte, vous serez cité partout comme un grand poète, mais votre génie suivra votre dernière obole. — C’est ce qui est arrivé à l’auteur de Sapho. […] Baudelaire les avait naturellement choisis ignorants et bavards, — allaient promenant partout la frénésie de leur admiration et élevant petit à petit l’édifice de sa renommée. […] Nous retrouvons partout la même inspiration puérilement prétentieuse, et se battant les flancs jusqu’à étouffer partout le même entassement d’allégories ambitieuses pour dissimuler l’absence d’idées ; partout aussi la même langue ignorante, glaciale, sans couleur, et çà et là pittoresquement émaillée « de vermines, de charognes, de monstres assassins et de vers du tombeau ». […] À cette heure, elle règne à peu près partout : au théâtre, dans le roman, dans la nouvelle, dans la poésie ; — et voilà, Dieu me pardonne ! […] Détaillez sa physionomie, partout vous voyez flotter une âme.
Partout on entend, autour de soi, des gens s’abordant avec cette parole : « Ça y est ! […] Partout la guerre… Et à chaque instant les plus charmants motifs pour la peinture. […] De la place d’Italie jusqu’au Jardin des Plantes, partout on revêt de toile cirée les étables à bestiaux, partout on travaille à des baraquements, dont les traverses servent de trapèzes à des enfants, et partout des évolutions militaires de blousiers, que des essaims de petites filles dépenaillées, aux cheveux frisottés, aux yeux brillants de bohémiennes, imitent, armées d’échalas. […] Partout la fumée emplissant le creux des terrains, et faisant comme une assise de brouillard à la pierre des maisons. […] Partout l’envahissement des soldats, et les nombreux pensionnats de demoiselles et les établissements pour les young ladies, ont des mobiles roux en faction à leurs portes.
Quand ces nations viennent à se rasseoir sur les débris du monde antique, un autre phénomène arrête l’historien : tout paraît subitement réglé, tout prend une face uniforme ; des monarchies partout ; à peine de petites républiques qui se changent elles-mêmes en principautés, ou qui sont absorbées par les royaumes voisins.
Tout bien considéré, l’état de savant est doux ; on s’y portera naturellement partout où la science sera un peu récompensée et fort honorée.