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303. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

Je dois dire avec reconnaissance, au nom des critiques de Paris absents qui se sont autrefois occupés de l’abbé Prévost, qu’ils n’y furent point oubliés. […] Combien de fois ne s’est-il pas dit dans sa jeunesse comme son chevalier Des Grieux, en rêvant aux moyens de fixer son âme et d’apaiser ses inquiétudes : « Je mènerai une vie sainte et chrétienne ; je m’occuperai de l’étude et de la religion, qui ne me permettront point de penser aux dangereux plaisirs… !  […] S’il y manquait encore quelque chose, au moins du côté du public, je suis prêt à me retirer pour quelque temps dans une communauté de Paris, ou dans ma famille qui demeure au pays d’Artois, et je m’y occuperai à composer quelque livre utile qui puisse être regardé comme un surcroît de satisfaction.

304. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres de François Arago. Tome I, 1854. » pp. 1-18

L’âge mûr est âpre, aride, occupé ; les rivalités et les ambitions, les passions sèches nous envahissent ; les haines nous troublent ; les injustices laissent des traces qui creusent et qu’on s’exagère : mais la jeunesse a échappé à tout cela ; ses douleurs même et ses infortunes ont revêtu je ne sais quel charme. […] Tout remplis de la seule idée qui nous occupait, nous ne songions, nous ne pouvions songer qu’à nos travaux et aux invincibles obstacles qui, nous arrêtant au commencement de notre entreprise, nous ôtaient les moyens et jusqu’à l’espoir de la terminer. […] Le célèbre physicien de Genève, M. de La Rive, raconte dans un intéressant article sur Arago, qu’étant allé le voir un jour à l’Observatoire, en 1846, il le trouva occupé à lire un article d’une revue anglaise, où il était assez maltraité.

305. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — II. (Fin.) » pp. 427-443

Le sort en est jeté ; mon ébauche va être faite, et si je ne me décourage pas, mon tableau viendra à sa fin. » Dans les premiers temps de son essai, il est tout occupé de surmonter cette difficulté, selon lui non insoluble : Je suis impatient de savoir ce que vous penserez de mon sujet, écrivait-il à M.  […] Ils seront vus en même temps avec plus d’intérêt que si je les expose séparément ; car le caractère de celui qui m’occupe paraîtrait triste et monotone, si on ne pouvait faire de comparaison avec un autre où j’aimerais à exprimer le bonheur. […] Quand, au contraire, je suis content, je suis autant occupé, mais d’une autre manière. » Ainsi se passa, tant qu’il fut maître de lui et que sa volonté tint les rênes, cette vie laborieuse et exemplaire.

306. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. (Tome XII) » pp. 157-172

Il me serait facile de m’occuper d’abord et uniquement de cette préface, qui, pareille à une conversation rapide, impétueuse, familière, touche à mille points, soulève mille questions, fait dire oui et non à la fois, dessine l’auteur et le livre, et dispense jusqu’à un certain point le critique qui n’a qu’un moment d’aller au-delà. […] Sire, et j’ose dire votre gloire, ne vous permettent pas de prolonger davantage l’ignominieuse agonie d’un frère sur le trône d’Espagne, exposé, dans un lieu si élevé, aux risées de vos ennemis et à la déconsidération de ses amis… Toute entrave qui nuirait au but que doit se proposer tout prince honnête homme me rend la place que j’occupe insoutenable. Je ne trouve pas mauvais que l’empereur la fasse occuper par un autre ; je resterai son ami et son frère dans la retraite, comme si la grandeur n’eût jamais existé.

307. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

Alors qu’ils semblent penser le plus profondément, c’est encore l’effet extérieur qui les occupe. […] L’emploi de leur vie est d’arranger des phrases, et ils tournent toujours leurs pensées dans le moule grammatical ou logique, bien plus occupés des formes que du fond. […] Ma sensibilité réagit peu au dehors ; elle est occupée, ou par des impressions internes confuses, et c’est là l’état le plus habituel, ou par des idées qui me saisissent, que je renferme, que je creuse au dedans, sans éprouver aucun besoin de les répandre au dehors.

308. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

Le père de Bonstetten, qu’on désignait du nom de sa charge le trésorier de Bonstetten, ne démentait pas en lui ce caractère ; c’était un homme instruit qui, dans sa jeunesse, avait étudié en Allemagne sous le philosophe Wolf, et il s’occupa avec sollicitude de l’éducation de son fils. […] Il trouva moyen d’y conserver sa liberté d’études, sa spontanéité d’éducation. « Le peu de leçons qu’on me donnait, dit-il, n’avaient pas d’attrait pour moi ; mais, comme on me voyait sans cesse occupé et que ma conduite était irréprochable, on me laissait faire ». […] Alors apparaissent Shakespeare et le vieux Linné (Gray s’occupait beaucoup de botanique et de Linné) luttant ensemble comme feraient deux esprits pour l’âme d’un damné : tantôt c’est l’un qui a le dessus, tantôt c’est l’autre.

309. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Ce qui l’occupait d’abord, comme il est naturel, c’était ce qu’il y avait de plus récent et le désastre de la veille, c’était Waterloo et cette dernière campagne ; il en était encore possédé et obsédé ; il ne revenait pas, lui, l’homme du calcul, d’une telle série de contretemps et de malencontres, et il apostrophait les absents. […] La France y trouvera les monuments de sa gloire, et, si elle en est jalouse, qu’elle s’occupe elle-même à les préserver de l’oubli… » — Puis, dans son âme engourdie, une flamme d’orgueil jaillissant tout à coup : « J’ai confiance dans l’histoire !  […] C’est une immense impertinence que de prétendre occuper si longuement les autres de soi, c’est-à-dire de son style.

310. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine. (suite et fin.) »

Il n’en était pas ainsi de Boileau, et puisqu’on ne sépare guère les deux amis, et que, lorsqu’on a à parler de l’un, on est conduit inévitablement à s’occuper de l’autre, je mettrai ici tout ce que la même Correspondance de M.  […] Comme il est sourdaud et qu’il ne pouvait prendre plaisir, avec toute la nombreuse et belle assemblée, à écouter le répondant qui se fit admirer, il se dédommageait en parlant d’une chose qui lui tient fort au cœur : car ce silence lui paraît très-malhonnête et très-offensant, et s’il n’était aussi occupé qu’il l’est d’un déménagement (car il quitte le logis du cloître Notre-Dame où il était près le Puits, pour un autre qui a vue sur le jardin du Terrain), il aurait déjà produit quelque chose de vif : car il n’est pas aussi mort à lui-même sur pareil cas qu’on a sujet de croire que l’aurait été M.  […] N’est-ce pas un hors-d’œuvre que je suis venu offrir devant des générations ailleurs occupées, et dont la faculté d’admiration est engagée dans des voies toutes différentes ?

311. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

Les Discours en vers de Millevoye, ses Dialogues rimés d’après Lucien, ses tragédies, ses traductions de l’Iliade ou des Églogues selon la manière de l’abbé Delille, nous semblent, chez lui, des thèmes plus ou moins étrangers, que la circonstance académique ou le goût du temps lui imposa, et dont il s’occupait sans ennui, se laissant dire peut-être que la gloire sérieuse était de ce côté. […] Les poëtes particulièrement (notons ceci) sont très-sujets à rencontrer d’honnêtes personnes, d’ailleurs instruites et sensées, mais qui ne semblent occupées que de les détourner de leur vrai talent. […] On évite de s’occuper de Parny comme de Laclos.

312. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre II »

Son métier, dont il a été longtemps préoccupé après sa cessation de travail, ne l’occupe plus, ses livres sont pour lui comme s’il ne les avait pas écrits… » Vers le 30 mai : « Comme un petit enfant, il s’occupe seulement de ce qu’il mange, de ce qu’il met. […] Aujourd’hui que l’on s’occupe beaucoup de cette question dans notre monde médical, j’ai trouvé intéressant de signaler ce fait, auquel n’ont probablement pas songé les auteurs du roman, ils ont fait mourir leur héroïne d’un rhume négligé, mais ils ont tracé les caractères et la marche du mal d’une manière que ne renierait pas l’auteur du meilleur Traité de clinique médicale que nous possédions. » Questionné à ce sujet précis par le Dr Cabanès, Ed. de Goncourt répondit textuellement dans une lettre : « Pour Germinie38 ça s’est passé ainsi dans la nature, la pleurésie a précédé la tuberculose », et une autre fois « … j’ai décrit un cas de pleurésie prétuberculeuse, c’est bien l’expression technique ?

313. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre X. De la littérature italienne et espagnole » pp. 228-255

Ajoutez à ces réflexions générales, que les longues et patientes recherches qu’exigeaient le dépouillement et l’examen des anciens manuscrits, convenaient particulièrement à la vie monastique ; et ce sont les moines, en effet, qui se sont le plus activement occupés des études littéraires. […] Il écrit comme pour lui seul ; l’effet qu’il doit produire ne l’a jamais occupé. […] Ils s’occupaient cependant des sciences et de la poésie ; mais ils cultivaient les sciences en astrologues, et la poésie en guerriers.

314. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

En 1848, à la fatale journée du 15 mars, où le peuple fit invasion dans l’Assemblée constituante et la dispersa par un acte de démence, j’y rentrai avec un bataillon de gardes mobiles et nous dispersâmes les séditieux, maîtres du palais de la Chambre ; je haranguai les députés au son d’un tambour, et je montai à cheval pour marcher contre l’Hôtel de ville, occupé par six cents hommes et six pièces de canon braquées sur nous. […] IV Une autre aile du château était occupée par une chapelle vaste, décorée, desservie par des aumôniers, et dont on sentait que le duc faisait ou comptait faire la pièce principale de son palais. […] Il était devenu ministre, le congrès de Vérone l’occupait ; M. de Chateaubriand, qui s’ennuyait à Londres et qui pensait déjà, de concert avec M. de Vitrole, à remplacer M. de Montmorency au ministère, parvint à se faire nommer plénipotentiaire à Vérone.

315. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

Chez tous les philosophes qui nous occupent ici, le phénomène de l’association est considéré comme l’une des lois les plus générales de la psychologie, et même comme le fait fondamental, auquel ils s’efforcent de tout ramener dans notre vie mentale. […] Elles sont autres chez le marchand occupé d’achat et de ventes que chez le légiste occupé de juges, de clients, de témoins ; autres chez le médecin que chez l’homme d’État ; autres chez le soldat que chez le métaphysicien.

316. (1889) Méthode évolutive-instrumentiste d’une poésie rationnelle

Et paraissent Gautier, plus pur et mesuré formiste encore — sans pensée du reste ; et Baudelaire, maître puissant et sobre, dont le mot correct par la place voulue qu’il occupe s’entoure dès maintenant d’atmosphère musicale et lumineuse — et dont la pensée est comme un ferment invincible de doute détruisant la splendeur sans souci d’antan ; mais qui égoïstement disant ses angoisses, ne dit aucun vocable salutaire qui les épargnera à ceux qui viennent. […] S’il fut de cette école, une plus large fatalité de refléter tout ce qui l’environne, d’accaparer inconsciemment toutes les tendances a fait de lui (c’est sa personnalité, si l’on veut) un candide et très sérieux incohérent : symboliste par Mallarmé, impressionniste par sa fréquentation des peintres pointillistes, scientifique, philosophique, et même teinté du socialisme puéril qui court les rues, lorsque s’avérèrent scientifiquement mes Théories de philosophie et d’art, et aussi parce qu’un de ses amis s’occupe de sciences transcendantes — en même temps qu’il est pénétré inéluctablement de son hérédité sémite compliquant encore l’hétérogénéité, Il arrive enfin, après de prolixes et diffus articles, à cette déclaration éminemment neuve que le Rythme est en tout, à cette erreur scientifique que tout est cyclique, — et pour œuvre, il donna ce livre, les Palais nomades, qui trahit ses velléités de lui donner un lien méthodique, et où ce moderniste à outrance fait à chaque page surgir des souvenirs de Palestines et des Tribus, de Babylones et d’Afriques, parmi des gestes de Mages : et, pour le développement des Rythmes, en pressant les images en chaos et les mots et les phrases sans nul effet à satiété répétés, simplement il allongeait ou raccourcissait extraordinairement l’alexandrin, dont il a sainte horreur pour n’en comprendre pas la mathématique savante. […]   Étant donné tel état de l’esprit à exprimer, il n’est donc pas seulement à s’occuper de la signification exacte des mots qui l’exprimeront, ce qui a été le seul souci de tout temps et usuel : mais ces mots seront choisis en tant que sonores, de manière que leur réunion voulue et calculée donne l’équivalent immatériel et mathématique de l’instrument de musique qu’un orchestrateur emploierait à cet instant, pour ce présent état d’esprit : et de même que pour rendre un état d’ingénuité et de simplesse, par exemple, il ne voudrait pas évidemment dès saxophones ou des trompettes, le poète instrumentiste pour ceci évitera les mots chargés d’O, d’A et d’U éclatants.

317. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse psychologique »

Nous nous occuperons d’abord des premiers. On a vu par l’exposé historique du début que la plupart des critiques n’ont essayé de montrer la nature des écrivains dont ils s’occupaient que pour mieux apprécier leurs œuvres. […] Elle servira donc à préciser ces lois et fournira de plus des matériaux précieux à l’un de ses départements les moins explorés, celui des fonctions supérieures de l’intelligence, auquel ne contribue ni la psychophysique qui occupe des fonctions élémentaires, ni la pathologie mentale, ni les données de l’hypnotisme qui étudient des esprits ou délabrés ou dégénérésda.

318. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre onzième. »

Madame la duchesse du Maine, occupée d’idées plus ambitieuses, lui disait : Vous apprendrez au premier moment que M. le duc d’Orléans est le maître du royaume, et vous de l’académie française. […] Il les pleure, il s’occupe du soin d’honorer leur mémoire, il leur élève un cénotaphe : ce qui suppose un intérêt tendre, car enfin leurs corps étaient dispersés.

319. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Louis Nicolardot » pp. 217-228

C’est un roi excessivement occupé. Mais occupé des infiniment petits d’un règne où il y avait des infiniment grands terribles !

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