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32. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre III. De la survivance des images. La mémoire et l’esprit »

Elle repose, en dernière analyse, sur une fausse idée de la nature et de l’objet de la perception extérieure. […] Mais d’autre part, que peut être un objet matériel non perçu, une image non imaginée, sinon une espèce d’état mental inconscient ? […] En réalité, l’adhérence de ce souvenir à notre état présent est tout à fait comparable à celle des objets inaperçus aux objets que nous percevons, et l’inconscient joue dans les deux cas un rôle du même genre. […] Mais pour que le mot s’étende et néanmoins se limite ainsi aux objets qu’il désigne, encore faut-il que ces objets nous présentent des ressemblances qui, en les rapprochant les uns des autres, les distinguent de tous les objets auxquels le mot ne s’applique pas. […] Au lieu de considérer chaque genre comme comprenant en acte, une multiplicité d’objets, on veut au contraire maintenant que chaque objet renferme, en puissance, et comme autant de qualités qu’il retiendrait prisonnières, une multiplicité de genres.

33. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

L’impression que l’organisme reçoit de chaque objet devient de plus en plus hétérogène. […] C’est l’objet de la synthèse spéciale. […] Tandis que les phénomènes qui sont l’objet de la physiologie, se produisent sous la forme d’un nombre immense de séries différentes liées ensemble, les phénomènes qui sont l’objet de la psychologie, au contraire, ne se produisent que sous la forme d’une simple série. […] Et ce qui le prouve, c’est que cet objet peut être une simple imitation, un trompe-l’œil : en ce cas, le goût, le toucher, l’odorat rectifient mon inférence et l’objet n’est plus classé parmi les oranges. […] Dans ce tableau, les états de la première classe représentent l’objet, ceux de la seconde classe le sujet.

34. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre I : Rapports de cette science avec l’histoire »

On le voit, le fond de toutes ces objections consiste à écarter le passé comme indigne d’être l’objet de la science, ou du moins comme un objet inutile ou spéculatif, bon pour les érudits, non pour les hommes. […] Ainsi le passé est entré comme objet dans les sciences de la nature, et elles sont devenues historiques sans cesser d’être des sciences. […] Et si le passé de notre globe est pour le géologue un légitime objet de recherches, pourquoi le passé de notre espèce ne le serait-il pas également ? […] En un mot, l’accidentel, qu’Aristote rejetait de la science, est bien près d’en devenir au contraire ici le principal objet ; mais pour quelle raison ? […] C’est l’esprit humain qui de part et d’autre est l’objet de notre étude.

35. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

La croyance aux événements ou existences réelles peut avoir pour objet le présent, le passé, le futur. 1° Commençons par la croyance qui a pour objet un fait présent. […] Mais croire aux objets externes, ce n’est pas simplement croire à mes sensations présentes. […] C’est ce quelque chose qui est l’objet de notre recherche. […] 2° La croyance qui a pour objet un fait passé se ramène à la mémoire.

36. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre premier. La perception extérieure et les idées dont se compose l’idée de corps » pp. 69-122

. — Après la perception, il y a en nous, avec l’image de la sensation éprouvée, un simulacre de l’objet perçu, et cette représentation tend à devenir hallucinatoire. — En beaucoup de cas, l’objet apparent diffère de l’objet réel. — Trois indices du simulacre. — Confondu ou non confondu en totalité ou en partie avec l’objet réel, il suit toujours la sensation. […] Je ne parle pas seulement de celles qui proviennent des sensations purement subjectives ; il est trop clair qu’ici l’objet apparent se distingue de l’objet réel, puisque l’objet réel n’est pas. Je parle de celles qui proviennent de sensations mal interprétées ; en ce cas, il y a un objet réel, mais il diffère de l’objet apparent. […] Un pouvoir n’est donc rien d’intrinsèque et de personnel à l’objet auquel on l’attribue. […] Voilà ce qui pour nous constitue l’objet.

37. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 1, de la necessité d’être occupé pour fuir l’ennui, et de l’attrait que les mouvemens des passions ont pour les hommes » pp. 6-11

Il faut alors que l’ame fasse des efforts continuels pour suivre l’objet de son attention ; et ces efforts rendus souvent infructueux par la disposition présente des organes du cerveau, n’aboutissent qu’à une contention vaine et sterile. Ou l’imagination trop allumée ne présente plus distinctement aucun objet, et une infinité d’idées sans liaison et sans rapport s’y succedent tumultueusement l’une à l’autre ; ou l’esprit las d’être tendu se relâche ; et une rêverie morne et languissante, durant laquelle il ne joüit précisement d’aucun objet, est l’unique fruit des efforts qu’il a faits pour s’occuper lui-même. […] On acquiert à force de mediter l’habitude de transporter à son gré sa pensée d’un objet sur un autre, ou de la fixer sur un certain objet. […] La premiere maniere de s’occuper dont nous aïons parlé, qui est celle de se livrer aux impressions que les objets étrangers font sur nous, est beaucoup plus facile. […] Ainsi nous courons par instinct après les objets qui peuvent exciter nos passions, quoique ces objets fassent sur nous des impressions qui nous coutent souvent des nuits inquietes et des journées douloureuses : mais les hommes en general souffrent encore plus à vivre sans passions, que les passions ne les font souffrir.

38. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre cinquième. Genèse et action des principes d’identité et de raison suffisante. — Origines de notre structure intellectuelle »

Pour qu’il y ait conscience, le sujet et l’objet doivent se différencier ; en même temps, cette différenciation ne doit pas exclure une certaine unité, sans quoi le sujet ne pourrait rien juger de l’objet : le propre du jugement, c’est la différenciation aboutissant à l’union. […] Le sujet et l’objet ne sont pas primitivement dans la conscience à l’état de termes purement intellectuels, l’un représentatif et l’autre représenté : le sujet est un vouloir, qui ne se contente pas de représenter les objets, mais tend à les modifier en vue de lui-même. Par la volonté, au lieu de se disperser dans les objets représentés, le sujet se fait centre et tâche de tout ramener à soi. […] En repoussant de soi la contradiction, la pensée la repousse par là même de ses objets ; car, pour concevoir la contradiction dans les objets, il faudrait qu’elle la reçût d’abord en elle-même, ce qui est de fait impossible. […] Là encore, la transition et la relation n’ont rien d’abstrait ni de proprement intellectuel : ce ne sont pas des objets d’entendement ni de logique, ce sont les objets d’un sentiment aussi immédiat que celui de la vie, dont il est d’ailleurs partie intégrante.

39. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre II. De la rectification » pp. 33-65

. — La représentation faiblit et cesse de paraître objet réel. — Même lorsque la représentation demeure nette et colorée, elle cesse de paraître objet réel. — Mécanisme général de cette dernière rectification. — Elle consiste en une négation. — Elle se fait par l’accolement d’une représentation contradictoire. — Divers points sur lesquels peut porter la contradiction. […] Par cet accolement, la première se trouve affectée d’une négation, en d’autres termes niée à tel ou tel titre, tantôt comme objet extérieur et réel, tantôt comme objet actuel ou présent, et cette opération la fait apparaître tantôt comme objet interne et imaginaire, c’est-à-dire comme simple représentation et pur fantôme, tantôt comme événement passé ou futur, c’est-à-dire comme souvenir ou prévision. […] Tant qu’on n’a pas fait cette remarque, on le dédouble, en acte intérieur et en objet connu. Dans cette opération, l’acte perd tout ce que l’objet gagne ; il se fait un transvasement de caractères, au détriment du premier, au profit du second. […] Cette science ou connaissance s’appelle conscience, parce que son objet est interne et présent ; elle s’oppose ainsi aux connaissances dont l’objet n’est point présent ou n’est point interne ; à ce titre, on la sépare de la perception extérieure et de la mémoire, et l’on fait d’elle un département distinct, auquel on prépose une faculté distincte.

40. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre premier. De l’illusion » pp. 3-31

Nous percevons les objets extérieurs, nous nous souvenons de leurs changements, nous en prévoyons beaucoup. […] Nous faisons des abstractions et des généralisations précises, nous jugeons, nous raisonnons, nous construisons des objets idéaux. […] Cherchons maintenant un cas où l’antécédent soit l’objet lui-même ; c’est ce qui arrive dans l’hallucination. […] Ce sont des simulacres, des fantômes, ou semblants2 de ces objets, des hallucinations le plus souvent vraies, et, par un artifice de la nature, arrangées de façon à correspondre aux objets, toutes plus ou moins avancées, retardées et altérées dans leur développement. […] Représentez-vous tel objet que vous connaissez bien, par exemple telle petite rivière entre des peupliers et des saules.

41. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre I : Des sens, des appétits et des instincts. »

La digestion, comme la respiration, offre toutes les conditions d’un sens ; un objet externe, la nourriture ; un organe propre, le canal alimentaire. […] La forme dépend des mouvements musculaires, faits pour suivre les contours d’un objet matériel. […] Comment se fait-il que l’image de chaque objet se peignant au fond de chaque œil, sur chaque rétine, l’objet cependant est perçu comme simple et non comme double ? […] Quand nous regardons un objet éloigné, dit ce physicien, les deux axes visuels sont sensiblement parallèles, et les images qui se peignent dans chaque œil sont semblables ; dans ce cas, il n’y a aucune différence entre l’apparence visuelle d’un objet en relief et sa projection sur une surface plane ; c’est là-dessus qu’est fondé le diorama. […] Seulement la différence ou la ressemblance des images nous apprennent que l’objet est distant ou rapproché.

42. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre II : Termes abstraits »

L’étendu (extended), c’est-à-dire l’objet étendu, opposé à l’étendue. […] Dans ce cas, il y a deux choses : l’objet touché, le doigt touchant. Autre cas : j’imprime une action à mon doigt, tout en touchant l’objet. Cette action implique certaines sensations ; je les combine avec l’objet et avec mon doigt, et j’ai ainsi deux idées : objet étendu, doigt mû. […] On dit qu’il y a un rapport entre deux objets, lorsqu’il y a un fuit simple ou complexe saisi par les sens ou autrement, dans lequel tous deux figurent.

43. (1901) L’imagination de l’artiste pp. 1-286

L’objet que je veux représenter est là, devant moi. […] Ce qu’il prend plaisir à modifier et transfigurer, ce ne sont pas les objets réels : c’est la simple représentation de ces objets. […] Et comment copier un objet mobile ? […] Il marquera par exemple le contour des objets par un trait. […] Elle est très déterminée en ce sens qu’elle se porte vers un objet très précis ; mais de cet objet elle ne nous donne d’avance aucune idée.

44. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre II : Règles relatives à l’observation des faits sociaux »

Mais les faits n’interviennent alors que secondairement, à titre d’exemples ou de preuves confirmatoires ; ils ne sont pas l’objet de la science. […] Les sentiments qui ont pour objets les choses sociales n’ont pas de privilège sur les autres, car ils n’ont pas une autre origine. […] Le sentiment est objet de science, non le critère de la vérité scientifique. […] L’objet de chaque problème, qu’il soit général ou particulier, doit être constitué suivant le même principe. […] Les caractères extérieurs en fonction desquels il définit l’objet de ses recherches doivent être aussi objectifs que possible.

45. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Japonisme » pp. 261-283

La petite bimbeloterie fabriquée de deux morceaux de bambou représentait des jeux d’enfants gravés en noir sur le jaune fauve du bois, des jeux d’enfants n’ayant rien de bien remarquable, mais le bibelot avait pour moi l’intérêt d’un objet usuel, ancien, et j’étais confirmé dans cette supposition par une longue inscription gravée sous le petit seau, et par un raccommodage, — un de ces raccommodages naïfs et francs, ainsi qu’on a l’habitude de les faire, là-bas, aux objets d’une certaine valeur. […] Marquis, le chocolatier, collectionneur d’un goût supérieur dans l’exotique, et qui a été un des premiers à posséder les plus beaux et les plus curieux objets japonais. […] Afin de se renseigner le mieux possible, il se déguisa en marchand d’objets de bambou58, et de balais, qu’il offrait naturellement dans les meilleures conditions, et fréquenta la résidence de Kira. […] La date de la fabrication de l’objet, 1683, si elle est juste, — l’exécution du prince d’Akô ayant eu lieu en 1690, — semblerait indiquer que la petite écritoire fut exécutée, avant que Otaka fût ronin et marchand d’objets de bambou, mais ainsi qu’au Japon, les gens, qui ne font pas profession d’être artistes, sculptent des netzkés pour leur plaisir. Otaka, plus tard, comme marchand d’objets de bambou, aurait utilisé le talent d’agrément de sa jeunesse.

46. (1884) Cours de philosophie fait au Lycée de Sens en 1883-1884

Reste à la définir par son objet. […] Elles ont pour objet la famille. […] Toute idée représente un objet. […] Ce sera l’objet de notre métaphysique. […] Tel est l’objet de l’art.

47. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Note I. De l’acquisition du langage chez les enfants et dans l’espèce humaine » pp. 357-395

Quand il avait acquis sur un objet un ordre de renseignements, il éprouvait le besoin d’acquérir un autre ordre de renseignements sur le même objet. […] À plusieurs reprises, je l’ai mis dans la même position vis-à-vis du même objet, sans pouvoir rien découvrir de constant dans les sons et articulations que cet objet et cette position lui suggéraient. […] Quand un animal, ou un enfant qui ne sait pas encore parler, voit un chien ou un arbre, il en a l’intuition, il ne va pas au-delà, il ne range pas cet objet dans une classe d’objets semblables. Quand un homme, voyant ce chien ou cet arbre, prononce en outre mentalement que l’un est un chien et l’autre un arbre, outre l’intuition et perception simple, il a un concept ; il range l’objet dans une classe d’objets semblables. […] Quelque trait détaché fut saisi comme la caractéristique d’un objet ou d’une classe d’objets ; une rapine se trouva là pour exprimer le trait » ; une base pronominale s’y ajouta, puis des suffixes s’y accolèrent, y apportant la précision, et les distinctions.

48. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

D’abord ils sont capables d’exprimer d’autres objets que ceux auxquels ils correspondent par définition. […] Je n’ai point à m’arrêter ici sur ces métaphores inconscientes et effacées, qui sont l’expression pure et propre des objets. […] Généralement elle contient en germe une comparaison, et manifeste une certaine communauté de nature ou d’état entre les deux objets qu’elle accouple. […] Souvent la métaphore se continue en plusieurs mots, dont l’un exprime la comparaison des deux objets, et les autres ce que l’on compare en eux. […] Pour que la figure soit bonne, il faut qu’éveillant instantanément l’idée de l’objet sans que l’esprit sente le besoin de repasser par le mot propre qui le désigne, elle le présente accompagné et comme enrichi de tout ce que peuvent suggérer et l’objet signifié et l’expression figurée.

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