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877. (1925) Portraits et souvenirs

N’est-il pas naturel que l’île lointaine veuille, à son tour, rendre hommage à l’un de ses fils les plus illustres ? […] Aussi est-il naturel que son enseignement devienne vite tout machinal. […] Et tout cela est si naturel, si exact qu’il nous semble que nous nous souvenions ! […] Boylesve que d’avoir l’air de le louer de ce qui lui est naturel ? […] Barrès s’est astreint sur lui-même, à la discipline où il a plié ses dons natifs et ses aspirations naturelles.

878. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « AUGUSTE BARBIER, Il Pianto, poëme, 2e édition » pp. 235-242

Antony Deschamps avait composé sur Rome et Naples plusieurs pièces de vers intitulées Italiennes, dont on vantait le ton grandiose, naturel, même un peu cru : mais ces morceaux ne sont pas encore maintenant publiés. […] — Or, voilà que depuis peu, à trente-cinq ans d’intervalle, ses amis se sont avisés, un matin, de réveiller son nom comme celui d’un poëte candidat naturel à l’Académie : il a certes pour cela les titres suffisants ; c’est un général qui, au début de sa carrière, a remporté une victoire : comme Jourdan devenu bonhomme en vieillissant, il a eu sa journée de Fleurus.

879. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVIII. Pourquoi la nation française était-elle la nation de l’Europe qui avait le plus de grâce, de goût et de gaieté » pp. 366-378

Chaulieu, La Fontaine, madame de Sévigné, furent les écrivains les plus naturels, et se montrèrent doués d’une grâce inimitable. […] La gaieté ramène à des idées naturelles ; et quoique le bon ton de la société de France fût entièrement fondé sur des relations factices, c’est à la gaieté de cette société même qu’il faut attribuer ce qu’on avait conservé de vérité dans les idées et dans la manière de les exprimer.

880. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre I. La poésie »

Mais surtout le vice radical de leurs descriptions, c’est qu’ils donnent ou suggèrent les noms des objets naturels : ils n’en procurent jamais la vision. […] — Voltaire, la Henriade (la Ligue, Genève [Rouen], 1723, in-8), Londres, 1723, in-4 ; Discours sur l’homme, 1738 (éditions séparées), 1739 (recueil) ; Poème sur la loi naturelle, Genève, 1756, in-8 et in-12. — Bernis, Œuvres, 2 vol. in-12, 1770 et 1781

881. (1897) La crise littéraire et le naturisme (article de La Plume) pp. 206-208

Et puis efforçons-nous vers un art ingénu, naturel. […] De cette esthétique naturelle et populaire, il semble que M. 

882. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre V : Rapports du physique et du moral. »

Il n’y a donc rien que de naturel à considérer les forces mentales comme convertibles en forces nerveuses et celles-ci en forces physiques. […] Une grande intelligence universelle n’est pas souvent unie à une riche sensibilité naturelle.

883. (1897) Manifeste naturiste (Le Figaro) pp. 4-5

Nous les souhaitons naturels. […] Il est vrai que nous réclamons l’occasion d’offrir à notre énergie un emploi plus naturel, où nous pourrions la dépenser magnifiquement.

884. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Greuze » pp. 234-241

Ils disent aussi que cette attention de tous les personnages n’est pas naturelle ; qu’il fallait en occuper quelques-uns du bonhomme, et laisser les autres à leurs fonctions particulières ; que la scène en eût été plus simple et plus vraie, et que c’est ainsi que la chose s’est passée, qu’ils en sont sûrs… Ces gens-là faciunt ut nimis intelligendo nihil intelligant. […] Que le traversin est tout neuf, et qu’il serait plus naturel qu’il eût déjà servi… Cela se peut.

885. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 16, objection tirée du caractere des romains et des hollandois, réponse à l’objection » pp. 277-289

Or, ces canaux ne sont pas si avant sous terre, que la chaleur qui est très-grande à Rome durant la canicule, n’en éleve des exhalaisons empestées, qui s’échappent d’autant plus librement que les crévasses des voûtes ne sont bouchées qu’avec des décombres et des gravas qui font un tamis bien moins serré que celui d’un terrain naturel ou d’un sol ordinaire. Secondement, l’air de la plaine de Rome, qui s’étend jusqu’à douze lieuës dans les endroits où l’Appennin se recule le plus de cette ville, réduit durant les trois mois de la grande chaleur les naturels mêmes du païs qui doivent y être accoutumez dès l’enfance, en un état de langueur incroïable à ceux qui ne l’ont pas vû.

886. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 14, de la danse ou de la saltation théatrale. Comment l’acteur qui faisoit les gestes pouvoit s’accorder avec l’acteur qui récitoit, de la danse des choeurs » pp. 234-247

Comme les gens de théatre ne devoient gueres se servir des gestes d’institution, en un mot, comme leur saltation étoit d’une espece particuliere, il étoit naturel qu’ils eussent des écoles et des professeurs à part. […] Ils avoient de grandes dispositions naturelles pour y réussir, à en juger par leurs compatriotes, qui sont nos contemporains.

887. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Jules Levallois » pp. 191-201

Il tient de Bernardin de Saint-Pierre l’humeur charmante, la sérénité platonicienne, la poésie naturelle, la science venue, pour eux deux, — ou la science à laquelle ils sont allés tous les deux de la même manière, — l’un avec son fraisier, l’autre avec ses fourmis ! […] Croire que la contemplation des choses naturelles, que la solitude dans les bois ou sur les rivages a cette puissance de retremper la volonté, viciée en son principe, dans l’homme, et de le rendre un être moral plus fort et plus profond qu’avant de se promener sur ce rivage et dans ces bois, s’imaginer qu’on devient vertueux par l’influence du paysage, c’est la rêverie et l’illusion de quelqu’un qui aime mieux la nature qu’il ne comprend l’humanité.

888. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Erckmann-Chatrian » pp. 95-105

Erckmann-Chatrian est même tellement l’homme de la réalité, qu’il touche au réalisme et qu’il pourrait y entrer… par la porte du cabaret qu’il aime… Mais c’est un réaliste que voilà averti maintenant et qui prendra garde ; car il ne nous produit pas l’effet d’avoir le parti pris de ceux-là qui se sont fait un système avec les objections naturelles de leur esprit. […] Telles sont, au vrai, les facultés naturelles, premières, développées déjà, et qu’il doit développer davantage.

889. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre premier. De la louange et de l’amour de la gloire. »

Mais quelquefois aussi c’est l’hommage que l’admiration rend aux vertus, ou la reconnaissance au génie ; et sous ce point de vue, elle est une des choses les plus grandes qui soient parmi les hommes : d’abord, par son autorité, elle inspire un respect naturel pour celui qui la mérite et qui l’obtient ; par sa justice, elle est la voix des nations qu’on ne peut séduire, des siècles qu’on ne peut corrompre ; par son indépendance, l’autorité toute-puissante ne peut l’obtenir, l’autorité toute-puissante ne peut l’ôter ; par son étendue, elle remplit tous les lieux ; par sa durée, elle embrasse les siècles. […] On a beaucoup déclamé contre la gloire ; cela est naturel : il est beaucoup plus aisé d’en dire du mal que de la mériter.

890. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre I. Les Saxons. » pp. 3-71

Ce n’est pas avec de tels instincts qu’on atteint vite à la culture ; pour la trouver naturelle et prompte, il faut aller la chercher dans les sobres et vives populations du Midi. […] Nul art, nul talent naturel pour décrire une à une et avec ordre les diverses parties d’un événement ou d’un objet. […] L’enthousiasme est leur état naturel, et leur Dieu nouveau les remplit d’admiration comme leurs dieux anciens les pénétraient de fureur. […] Alourdies et figées, ses idées ne savent pas s’étaler aisément, abondamment, avec une suite naturelle et une régularité involontaire. […] Si le christianisme y est entré, c’est par des affinités naturelles et sans altérer le génie natif.

891. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

Ce nouveau monde de paix, de justice et de charité qui va surgir n’est que la floraison progressive et naturelle de l’ancien monde. […] Chez tous les sages primitifs, la science naturelle est complètement fille de la théosophie. […] Un front échevelé, un cerveau de fantasque humeur, une poitrine phtisique, furent un moment réputés pour le sanctuaire naturel des grandes pensées. […] Le mode d’expression le plus naturel, le plus complet de la pensée, c’est donc la figure. […] Le style du dix-huitième siècle est naturel ; mais autre chose est le naturel de la conversation et de la vie commune, et le naturel de l’œuvre écrite, de tout ce qui aspire à durer comme œuvre d’art.

892. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

« Je me plains de moi-même, « Qui ai dissipé mon temps, affaibli mes forces, rejeté ma pudeur naturelle, tué en moi la foi et l’amour. » Non, Farcy, ton regret même l’atteste, non, tu n’avais pas rejeté ta pudeur naturelle ; non, tu n’avais pas tué l’amour dans ton âme ! […] Quoi qu’il en soit, le tableau que Farcy a tracé de souvenir est un chef-d’œuvre de délicatesse, d’attendrissement gracieux, de naturel choisi, d’art simple et vraiment attique : Platon ou Bernardin de Saint-Pierre n’auraient pas conté autrement. […] Du reste, pourvu que les formes en soient nobles et pures, il importe peu que ce soit Apollon ou Hercule, la Diane chasseresse ou la Vénus de Praxitèle. » « Voyageur, annonce à Sparte que nous sommes morts ici pour obéir à ses saints commandements. » « Ils moururent irréprochables dans la guerre comme dans l’amitié79. » « Ici reposent les cendres de don Juan Diaz Porlier, général des armées espagnoles, qui a été heureux dans ce qu’il a entrepris contre les ennemis de son pays, mais qui est mort victime des dissensions civiles. » Peut-être, après tout, ces nobles épitaphes de héros ne lui revinrent-elles à l’esprit que le mardi, dans l’intervalle des Ordonnances à l’insurrection, et comme un écho naturel des héroïques battements de son cœur. […] Sa poésie a une ingénuité de sentiments et d’émotions qui s’attachent à des objets pour lesquels le grand nombre n’a guère de sympathie, et où il y a plutôt travers d’esprit ou habitudes bizarres de jeune homme pauvre et souffreteux, qu’attachement naturel et poétique.

893. (1860) Cours familier de littérature. X « LXe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 401-463

» V Tantôt on la poussait, par je ne sais quel engouement contre nature, à s’armer pour le démembrement de l’empire ottoman en faveur d’un pacha d’Égypte, ci-devant marchand de tabac à Salonique, ami des Anglais, révolté contre le sultan son maître ; à donner ainsi, aux dépens de la Turquie, notre alliée naturelle, un empire arabe aux Anglais, pour doubler ainsi leur empire des Indes, et à livrer, d’un autre côté, l’empire ottoman, affaibli d’autant, à la Russie ; politique à contresens de tous les intérêts de la France, que M.  […] XXIII Or ces systèmes d’alliances sont-ils (comme on le dit si mal à propos) naturels, éternels, permanents entre les mêmes peuples ? […] Il n’y a donc point de système d’alliance naturel et permanent pour un peuple ; les alliances sont dépendantes des circonstances, des avantages, des dangers, des groupements de forces qui résultent pour les nations alliées de la situation des choses en Europe. […] C’était naturel : les effets, en diplomatie comme en mécanisme, subsistent longtemps après la cause ; les traditions sont les idées de ceux qui n’en ont pas dans les négociations et dans les cabinets. […] L’Espagne, autrefois si militaire, si navale, si terrible par son infanterie et par ses flottes, n’existait plus, comme Espagne, qu’en Amérique ; en Europe, elle était notre alliée à tout prix contre la maison d’Autriche dépossédée du midi ; les Pays-Bas autrichiens n’étaient pour ainsi dire qu’une colonie continentale, trop séparée de l’Autriche pour tenir longtemps à l’Empire ; les Italiens des papes étaient les ennemis naturels et invétérés de l’Autriche, vieux Italiens de souche, détestant le joug des Germains, toujours pour eux des barbares ; le beau royaume de Naples et de la Sicile était devenu espagnol bourbonien, et par conséquent français ; la Toscane appartenait encore à un dernier des Médicis, Parme à l’Espagne, Venise et Gênes s’appartenaient à elles-mêmes ; le Piémont, puissance alors insignifiante, oscillait entre l’Autriche et nous, toujours plus entraîné vers le plus fort.

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