J’ai presque entendu dire à ce digne prêtre, qui fut ensuite si admirable, qu’il n’avait jamais rien vu de plus grand, de plus incroyable que la constance et l’imperturbabilité de Laurent en face de la mort, sa mémoire de son passé, sa façon de disposer les choses présentes, et le soin si sage, si religieux qu’il montra dans sa prévoyance de l’avenir. […] votre bénédiction, mon père, avant de me quitter. » Aussitôt, courbant la tête, abaissant son regard et offrant la plus parfaite image de la piété, il répondit de mémoire et sacramentalement aux paroles et aux prières du prêtre, nullement ému de l’expression de la douleur de ses familiers qui éclatait et ne se dissimulait plus.
La mémoire de Louis XIV avait toutes sortes d’adversaires. […] Je n’empêche pas qu’un autre n’analyse longuement les dépêches et qu’il n’entrecoupe le récit par des extraits ; — mais alors il fait une histoire diplomatique ; — qu’il ne s’étende sur les dissensions intérieures de la Hollande et sur la fin tragique des De Witt ; mais c’est entreprendre sur l’histoire de la Hollande ; — qu’il ne raconte au long les combats qui en si peu de jours mettent la Hollande aux abois, et la forcent à se noyer pour se sauver ; — mais ce sont là des mémoires militaires.
La mémoire de Ganelon est restée flétrie à jamais. […] Faute de mieux, les biographies des hommes célèbres, les mémoires où ils ont conté la genèse de leurs convictions sont fort utiles à consulter.
L’Auteur de la Dunciade, moins touché des éloges que je lui avois départis, qu’offensé de ce que je n’avois pas trouvé assez de gaieté dans son Poëme, a cru m’humilier, en cherchant à m’enlever la partie la moins foible de mon travail ; il termine l’article dont il m’a gratifié dans la derniere édition de ses Mémoires Littéraires, par dire que les morceaux des Trois Siècles qu’on trouve mieux travaillés que les autres, ne sauroient être de la même main qui a rédigé le reste de l’Ouvrage, comme s’il y avoit d’autre différence que celle qu’exigeoit naturellement la diversité des sujets. […] Pour qu’on ne m’accuse point, comme on l’a déjà fait sans raison, d’outrager la mémoire de M.
[NdA] Un témoin dont on ne saurait récuser le patriotisme et l’impartialité, Gouvion Saint-Cyr, qui servait alors dans l’armée du Rhin (1793), n’a pu s’empêcher de parler incidemment de la mission de Saint-Just et de Lebas auprès de cette armée, et il le fait en ces termes (Mémoires sur les campagnes des armées du Rhin, t. […] La femme et le fils de Lebas, personnes très honorables et que nous avons tous connus, ont, pendant soixante ans, plaidé ou directement ou insensiblement pour la mémoire de ces représentants terribles et qui, pour leur famille, n’étaient que d’intègres et purs citoyens, immolés et calomniés par une faction.
14 mai Charles Edmond, qui a vécu partout et connu tout le monde, et qui, de temps en temps, dans la causerie, entrouvre ses mémoires, et en tire une curieuse figure, un souvenir caractéristique, nous conte ceci, à propos de la susceptibilité nationale des Italiens. […] Nous étions plongés, ces journées-ci, dans les Mémoires de Mme de Larochejacquelein.
Il est très possible que ce soit un souvenir que La Fontaine ait gardé dans la mémoire et dont il ait fait ce petit épisode où, du reste, je le reconnais, il n’y a pas d’imagination bien extraordinaire. […] L’image de ces biens rend mes maux cent fois pires ; Ma mémoire me dit : « Quoi, Psyché, tu respires, Après ce que tu perds ?
Ces formes de bâtiments, qui contrariaient d’abord son œil académique (tout peuple est académique en jugeant les autres, tout peuple est barbare quand il est jugé), ces végétaux inquiétants pour sa mémoire chargée des souvenirs natals, ces femmes et ces hommes dont les muscles ne vibrent pas suivant l’allure classique de son pays, dont la démarche n’est pas cadencée selon le rythme accoutumé, dont le regard n’est pas projeté avec le même magnétisme, ces odeurs qui ne sont plus celles du boudoir maternel, ces fleurs mystérieuses dont la couleur profonde entre dans l’œil despotiquement, pendant que leur forme taquine le regard, ces fruits dont le goût trompe et déplace les sens, et révèle au palais des idées qui appartiennent à l’odorat, tout ce monde d’harmonies nouvelles entrera lentement en lui, le pénétrera patiemment, comme la vapeur d’une étuve aromatisée ; toute cette vitalité inconnue sera ajoutée à sa vitalité propre ; quelques milliers d’idées et de sensations enrichiront son dictionnaire de mortel, et même il est possible que, dépassant la mesure et transformant la justice en révolte, il fasse comme le Sicambre converti, qu’il brûle ce qu’il avait adoré, et qu’il adore ce qu’il avait brûlé. […] Le public retrouvera tous ces tableaux d’orageuse mémoire qui furent des insurrections, des luttes et des triomphes : le Doge Marino Faliero (salon de 1827
qu’il nous pardonne en mémoire du livre que tous les deux nous avons aimé !
C’est dans cette conviction qu’en livrant ces pages au public, nous sommes assuré de ne manquer en rien ni à la mémoire ni à la pensée de celui qui les a écrites.
Sa vie se passa de la sorte, à penser d’abord, à penser surtout et toujours, puis à parler de ses pensées, à les écrire à ses amis, à ses maîtresses ; à les jeter dans des articles de journal, dans des articles d’encyclopédie, dans des romans imparfaits, dans des notes, dans des mémoires sur des points spéciaux ; lui, le génie le plus synthétique de son siècle, il ne laissa pas de monument.
Heine est plutôt celui d’un poète que celui de tout le monde ; il n’a pas seulement de ces traits inattendus, saisissants, courts, de ces rapports neufs et piquants qu’un mot exprime et enfonce dans la mémoire ; il a, à un haut degré, l’imagination de l’esprit, le don des comparaisons singulières, frappantes, mais prolongées, mille gerbes, à tout instant, de réminiscences colorées, d’analogies brillantes et de symboles.
Il faut distinguer cette première et profonde impression de toutes les autres qui vont suivre. » — En effet, dans ce premier stade, les sensations nouvelles étaient trop nouvelles ; elles n’avaient pas été répétées un assez grand nombre de fois pour faire dans la mémoire un groupe distinct, une série cohérente, un second moi ; telle est la chenille dont nous avons parlé, dans le premier quart d’heure qui suit sa métamorphose en papillon ; son nouveau moi n’est pas encore formé, il est en train de se former ; l’ancien, qui n’éprouve que des sensations inconnues, est conduit à dire : Je ne suis plus, je ne suis pas. — « Plus tard et dans une seconde période, dit notre observateur, lorsque par un long usage j’eus appris à me servir de mes sensations nouvelles, j’avais moins d’effroi d’être seul et dans un pays que je ne connaissais pas ; je pouvais, quoique avec difficulté, me conduire ; j’avais reformé un moi ; je me sentais exister, quoique autre. » Il faut du temps pour que la chenille s’habitue à être papillon ; et, si la chenille garde, comme c’était le cas, tous ses souvenirs de chenille, il y a désormais un conflit perpétuel et horriblement pénible entre les deux groupes de notions ou impressions contradictoires, entre l’ancien moi qui est celui de la chenille, et le nouveau moi qui est celui du papillon. — Dans le second stade, au lieu de dire : Je ne suis plus, le malade dit : Je suis un autre.
Moi, je ne sais plus, ayant la mémoire la plus capricieuse du monde.
Tel paysage, qui nous a charmés, parce que nous l’avons traversé dans une heureuse disposition d’humeur, parce qu’il s’est trouvé ce jour-là en harmonie avec notre état d’esprit, se grave dans notre mémoire avec une énergie singulière et garde dans nos souvenirs une importance disproportionnée avec la durée pendant laquelle il a frappé nos regards.
Il n’aura jamais de succès à la cour, parce qu’il inspira au Roi un mouvement de jalousie et que le Roi a une mémoire tenace des visages même fugitivement aperçus.
On y voit l’imagination la plus vive & la plus féconde, un esprit flexible pour prendre toutes ses formes, intrépide dans toutes ses idées, un cœur pétri de la liberté Républicaine, & sensible jusqu'à l’excès, une mémoire enrichie de tout ce que la lecture des Philosophes Grecs & Latins peut offrir de plus réfléchi & de plus étendu ; enfin une force de pensées, une vivacité de coloris, une profondeur de morale, une richesse d’expressions, une abondance, une rapidité de style, & par-dessus tout une misanthropie qu’on peut regarder comme le ressort principal qui a mis en jeu ses sentimens & ses idées.