En maint endroit de cette libre et charmante Correspondance elle a des gaietés, des élans et des entrains à ravir, — quand elle parle de la vie des champs, de ses occupations au Clos, de ses différentes manières d’être à Villefranche, à Lyon, à la campagne : « A la campagne, je pardonne tout…, à Lyon, je me moque de tout…, à Villefranche, je pèse tout… » La campagne surtout l’inspire : « Pends-toi, friand Crillon, nous faisons des confitures, du raisiné et du vin cuit, des poires tapées et du bonbon, et tu n’es pas ici pour les goûter ! […] Elle confesse à Buzot qu’elle n’a pas été très fâchée d’être arrêtée, puisque Roland est parvenu à se dérober aux poursuites ; mais il faut l’entendre ici dans un langage qui est bien le sien et qu’elle n’emprunte à personne, pas plus que le sentiment compliqué et très élevé qui l’inspire : « Ils en seront moins furieux, moins ardents contre Roland, me disais-je ; s’ils tentent quelque procès, je saurai le soutenir d’une manière qui sera utile à sa gloire ; il me semblait que je m’acquittais ainsi envers lui d’une indemnité due à ses chagrins : mais ne vois-tu pas aussi qu’en me trouvant seule, c’est avec toi que je demeure ?
Pendant le xve siècle, l’Italie avait eu des drames latins, fort inspirés de Sénèque, et depuis 1515 elle avait une tragédie nationale en langue vulgaire : en 1515, Trissino donna sa Sofonisba. […] Mais la nature de ces sujets, par malheur, n’a inspiré aux poètes que de l’éloquence ou du lyrisme : elle n’a pas pu leur faire créer un drame.
Il la connut infiniment trop, la loi, et aussi la procédure, celui que ce verbe inspiré aurait dû transformer. […] La froideur parnassienne, même quand elle recouvre le néronisme d’un histrion impuissant, reste distinguée et inspire aux foules un respect étonné et hostile.
Ce qui n’en est pas un, à coup sûr, c’est le caractère général de sa piété, de celle qu’il ressent et de celle qu’il inspire. […] Il se dérobe des moments pour lire ; il aime le mérite, il s’accommode à toutes les nations ; il inspire la confiance : voilà l’homme que vous allez voir.
En ce qui touche ses amours, par exemple, les amours qu’il a inspirés et les caprices ardents qu’il a ressentis (car il n’a guère jamais ressenti autre chose), il est très discret, par soi-disant bon goût, par chevalerie, par convenance demi-mondaine, demi-religieuse, parce qu’aussi, écrivant ses Mémoires sous l’influence et le regard de celle qu’il nommait Béatrix et qui devait y avoir la place d’honneur, de Mme Récamier, il était censé ne plus aimer qu’elle et n’avoir jamais eu auparavant que des attachements d’un ordre moindre et très inégal ou inférieur. […] dans cet épisode de Charlotte, il a osé dire, voulant faire honneur à cet amour de la jeune Anglaise : « Depuis cette époque, je n’ai rencontré qu’un attachement assez élevé pour m’inspirer la même confiance. » Cet attachement unique, pour lequel il fait exception, est celui de Mme Récamier.
Ils étaient noirs, brillants, doux, passionnés et pleins d’esprit ; leur éclat avait je ne sais quoi qu’on ne saurait exprimer : la mélancolie douce y paraissait quelquefois avec tous les charmes qui la suivent presque toujours ; l’enjouement s’y faisait voir à son tour avec tous les attraits que la joie peut inspirer. […] Il n’y eut pas un seul moment d’abandon de cœur dans toute la vie de Mme de Maintenon ; là est le secret de l’espèce de froideur qu’elle inspire.
Les Montausier, les Huet, les Pellisson, les Scudéry en frémirent ; mais il suffit que Colbert comprît, qu’il distinguât entre tous le judicieux téméraire, qu’il se déridât à le lire et à l’entendre, et qu’au milieu de ses graves labeurs, la seule vue de Despréaux lui inspirât jusqu’à la fin de l’allégresse. […] … Et encore, parlant de la vérité dans la satire : C’est elle qui, m’ouvrant le chemin qu’il faut suivre, M’inspira, dès quinze ans, la haine d’un sot livre… ; la haine des sots livres, et aussi l’amour, le culte des bons ouvrages et des beaux.
S’il a pu souvent paraître accorder trop à l’esprit gaulois et à la gausserie gaillarde de toutes choses, il sait ici s’élever à un sentiment digne du spectacle qu’il a sous les yeux, et il s’inspire des mânes d’autrefois. […] C’est ainsi que, dans son Histoire des navigations aux terres australes (1756), il tracera le plan d’un voyage de circumnavigation qui inspirera Bougainville.
Si le spectacle des troubles et des émotions civiles où elle a été mêlée a semblé servir quelquefois à la fortifier et à l’élever même, un tel spectacle la contriste encore plus, et l’égarerait à coup sûr en se prolongeant : c’est surtout à l’heure où ces troubles s’apaisent et où ils sont encore à l’état de récent et de vif souvenir, que la littérature peut heureusement s’en inspirer pour jouir du calme rétabli, du sentiment de la civilisation reconquise, pour y porter un zèle ému, une ardeur trop longtemps contrainte et retardée, pour y signaler et pour y produire à quelque degré l’effet d’une renaissance. […] Cette jeune femme, sur laquelle tous les portraits s’accordent, était, dès l’âge le plus tendre, une perfection mignonne de bon sens, de prudence, de grâce et de gentillesse : Mme de Stainville, à peine âgée de dix-huit ans, nous dit l’abbé Barthélemy, jouissait de cette profonde vénération qu’on n’accorde communément qu’à un long exercice de vertus : tout en elle inspirait de l’intérêt, son âge, sa figure, la délicatesse de sa santé, la vivacité qui animait ses paroles et ses actions, le désir de plaire qu’il lui était facile de satisfaire, et dont elle rapportait le succès à un époux digne objet de sa tendresse et de son culte, cette extrême sensibilité qui la rendait heureuse ou malheureuse du bonheur ou du malheur des autres, enfin cette pureté d’âme qui ne lui permettait pas de soupçonner le mal.
Tout l’œuvre du poète qui vient de mourir est inspiré par cette double pensée : relever, à ses propres yeux, le bourgeois défaillant et décadent par l’exemple des hautes vertus bourgeoises ; flétrir, comme on flétrissait la forfaiture d’un gentilhomme, les défaillances des bourgeois indignes d’être inscrits au livre d’or de la bourgeoisie. […] L’appareil dont on entoure le départ de cette vie lui avait inspiré de tout temps une crainte insurmontable.
Elle blâme ceux qui jugent des choses morales d’après des principes différents de ceux qu’elle prescrit ; elle ridiculise ceux qui s’inspirent d’une autre esthétique que la sienne. […] Il n’est pas d’être, si humble soit-il, pas d’objet vulgaire qui, à un moment donné de l’histoire, n’ait inspiré des sentiments de respect religieux.
Ce ne sont pas des moralistes ordinaires, quel que soit l’extraordinaire de leur talent, ce n’est ni Montaigne, par exemple, ni La Rochefoucauld, ni Vauvenargues, ni Chamfort, ni madame de Staël (la madame de Staël du sombre livre de l’Influence des passions sur le bonheur individuel), ni même le religieux et platonicien Joubert, qui auraient pu écrire ce traité de « la Douleur », tracé d’une main si attendrie, mais si ferme, pour nous la faire comprendre et pour nous la faire accepter… On sent, en le lisant, qu’on n’a plus affaire ici à un moraliste au détail, inspiré par le spectacle isolé de la misère humaine, étudiée peut-être sur son âme, mais à une tête d’ensemble qui a une nette et transcendante conception de la vie et de la destinée, et qui fait rentrer la douleur dans la notion la plus profonde des choses et dans le pian providentiel de la Création. […] Il explique aussi l’amour, et le sacrifice, et la prière, et le renoncement toujours et nécessairement inspirés par l’amour, — cet amour dont la douleur, « l’auxiliaire de la création depuis le malheur de la chute », est « le levier » dans le cœur de l’homme, — et tout ce mysticisme d’accent qui semble couronner le livre d’une auréole de sainteté (surnaturel à part) ne le rend pas plus vrai, mais plus éloquent, plus touchant, plus pénétrant, plus chaud aux âmes et plus maître d’elles, si, dans ce triste temps, il y en avait !
Enfin Jésus fut surtout inspiré par le paysage. […] Chef-d’œuvre du Charpentier divin et de ses coopérateurs, Édifice ultra-mondain, Royaume sur lequel il est plus vrai de dire que le soleil ne se couche pas que sur l’empire de Charles-Quint, l’Église inspirerait au Génie et à l’Amour de magnifiques et inépuisables litanies !
De là, la création du Grand-Livre, qui ne faisait qu’une dette uniforme et républicaine de toutes les dettes vieilles et récentes, et fondait le crédit public en rattachant la destinée des créances à celle de l’État ; institution profonde, inspirée au génie de Gambon par les circonstances, et qui leur devait survivre.
Le sauvage de l’Amérique, dont les sens ont été exercés dès l’enfance, excelle à saisir à travers l’immensité des forêts mille traces invisibles pour nous, à distinguer dans l’espace des bruits qui n’arrivent pas à nos oreilles ; sa pénétration est presque de la magie ; on est tenté de croire à une divination d’inspiré.
On n’y relèvera que ce qu’y remarquait Napoléon lui-même, c’est-à-dire l’amour qu’il avait inspiré à sa noble épouse, et dont elle lui donna des preuves par son dévouement absolu.
Si l’on pouvait sur tous les points de la France, à commencer par nous-mêmes au centre, inspirer un esprit d’union qui ne soit point de servilité, mais d’affection à une chose commune, à une seule et même chose qui soit nôtre, et qu’on n’aspire qu’à améliorer, à perfectionner, oh !