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342. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Corneille »

— mais aussi dans cette vie étouffante, bourgeoise et pauvre, qui en est une troisième, — paraît plus idéal et plus grand. […] Lui, l’homme des héros et d’un Idéal trop haut pour n’être pas étroit, l’homme à qui on a reproché de pousser la nature humaine jusqu’à l’abstraction, à la plus impossible des abstractions, sentit sur le tard de sa vie combien cette malheureuse nature humaine est concrète.

343. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Caze, Robert (1853-1886) »

… celui d’un sincère artiste réellement épris de l’idéal.

344. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Vernet » p. 100

Vernet Nous avons eu une foule de Marines de Vernet ; les unes locales, les autres idéales ; et dans toutes, c’est la même imagination, le même feu, la même sagesse, le même coloris, les mêmes détails, la même variété.

345. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Valandré, Marie de (1861-19..) »

On peut dire qu’un frais atticisme est répandu sur toutes les pièces du recueil, parfois éloquentes de l’accent convaincu d’idéal des œuvres saines de la jeunesse, parfois délicieuses et fraîches comme une première rosée de mai ; c’est à ces dernières qu’il faut demander le secret de la personnalité de l’auteur.

346. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (2e partie) » pp. 5-80

En contemplant bien ce magnifique tableau, et en entrant, par tous les pores, dans la pensée du peintre, c’est la poésie du bonheur, c’est l’idéal de la paix des champs, c’est l’infini dans la calme jouissance de la nature, c’est l’idylle de l’humanité, dans son premier Éden, devant le Créateur : idylle transposée aujourd’hui sous le soleil, dans ce monde de travail et de sueur, mais pleine encore de toute la félicité que cette terre corrompue peut offrir à l’homme. […] Il n’a pas eu besoin de dénaturer le costume moderne pour peindre des hommes et des femmes d’hier en habits antiques ; son œil groupe la toile, le drap, le cuir, comme il groupe les personnages ; en restant vrai il transfigure tout en beau : le vulgaire devient idéal sous sa touche. […] Son âme n’était pas responsable de sa main ; la nature ne l’avait pas doué ou il n’avait pas exercé en lui la force nécessaire à ces grands hommes, destinés à lutter avec ce qu’on nomme l’idéal ; l’idéal fait plus de victimes qu’on ne pense : c’est la maladie des grandes imaginations qui ont un faible cœur. […] et, ajoutons, sur des traits toujours beaux ; car, dans Léopold Robert comme dans la statuaire grecque, l’expression n’enlève jamais rien au beau, cette première condition de l’idéal dans l’art. […] Ce ne sera pas un peintre si vous voulez, dirai-je à ces critiques, mais ce sera le plus lyrique, le plus pathétique, le plus dramatique, le plus idéal des écrivains à l’huile !

347. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

Le grand succès de Bourdaloue est d’un temps où la critique proposait aux auteurs, pour idéal commun à tous les ouvrages d’esprit, la raison. Un peu avant lui, l’idéal avait été la nature. […] Ce doit être en effet l’idéal des lettres, puisqu’on ne peut s’y élever qu’avec un esprit et un cœur droits. […] C’est au beau milieu de ces chercheurs d’énigmes, de ces faiseurs d’épigrammes, c’est dans ce cliquetis de traits ingénieux que Vauvenargues arrive avec la passion du vrai, lequel apparaît en même temps à son esprit comme un idéal, à son cœur comme une règle de conduite. […] » C’est un chant qui lui échappe en contemplant l’idéal même de « la simplicité charmante. » Rien de plus vrai que ses vives esquisses de La Fontaine, de Montaigne, de Pascal, de La Bruyère, où, n’en déplaise à la Harpe, il a si fort raison de trouver du pathétique.

348. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — I. » pp. 409-426

Les femmes manquent toujours leur vocation quand elles veulent sortir des soins du ménage, de l’aiguille et du fuseau. » Dans ces dispositions si naturelles et si sincères, on conçoit l’embarras de Léopold Robert pour mettre un éclair au front de sa Corinne idéale ; de guerre lasse, il s’en était tenu à copier, en l’arrangeant pour ce rôle, une des belles brigandes de Sonnino, lorsqu’il se décida enfin, pour plus de sécurité, à effacer de sa toile la fausse muse, et il y substitua selon son cœur un Improvisateur populaire, qu’il avait vu et bien vu de ses yeux (1822). […] Malgré l’accident funeste qui brisa sa carrière et qui l’arrêta dans son développement, et quoique son dernier tableau (celui des Pêcheurs) ait pu paraître empreint de quelque affectation mélancolique, il est certain, à lire ses lettres nombreuses, que sa pensée s’élevait et aspirait chaque jour plus haut avec l’âge ; il devenait plus hardi, ou du moins d’un horizon plus agrandi, en vieillissant ; il avait commencé par copier la nature, il ne cessait de vouloir s’y conformer, et il visait en même temps à un idéal, impossible peut-être à concilier avec cette reproduction sévère et scrupuleuse, mais que, dans son ardeur opiniâtre, il concevait toutefois en accord avec l’exacte vérité. […] Ingres, duquel on le rapprochait assez naturellement, qu’il admirait comme le modèle des artistes, comme l’artiste de ce siècle le plus classique, et à qui il ne se laissait comparer qu’avec résistance et réserve, il marquait cependant la différence essentielle qui les séparait : Ingres plein de science, d’étude de l’Antiquité, cherchant l’idéal même par le souvenir historique, surtout par la poésie et par l’imagination, et dans la trace de Raphaël, de Phidias ou d’Homère ; et lui, Léopold, n’y voulant arriver, si c’était possible, que par la nature.

349. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

L’idéal de Rohan, une fois hors des guerres civiles, aurait été de commander un corps d’armée à part, opérant avec indépendance. […] Qu’on l’aide un peu du côté de France, qu’on le renforce d’infanterie et de cavalerie pour garder les passages, qu’on le secoure surtout d’argent, ce nerf de la guerre, et plus nécessaire encore au pays des Grisons ; que le duc de Savoie aussi veuille bien l’épauler, et Rohan, à la tête de 4000 hommes de pied et de 500 chevaux, son idéal de petite armée, répond d’entrer dans le Milanais avec des desseins tout mûris, de s’emparer de Lecco et de Côme, et maître de tout le lac, ruinant le fort de Fuentes qui en est la porte du côté de la Valteline, de condamner les Allemands à n’avoir plus que le passage du Saint-Gothard pour entrer dans le nord de l’Italie. […] Quoi qu’il en soit, il est, par le rare assemblage de ses mérites, une des figures originales de notre histoire ; et, quand pour le distinguer des autres de son nom et pour caractériser ce dernier mâle de sa race, quelques-uns continueraient de l’appeler par habitude le grand duc de Rohan, il n’y aurait pas de quoi étonner : à l’étudier de près et sans prévention dans ses labeurs et ses vicissitudes, je doute que l’expression vienne aujourd’hui à personne ; mais, la trouvant consacrée, on l’accepte, on la respecte, on y voit l’achèvement et comme la réflexion idéale de ses qualités dans l’imagination de ses contemporains, cette exagération assez naturelle qui compense justement peut-être tant d’autres choses qui de loin nous échappent, et on ne réclame pas.

350. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

quand on vit beaucoup aux champs, qu’on sent si bien cette nature et qu’on la sait si bien peindre, c’est pour l’aimer en général, c’est du moins pour la présenter en beau après surtout qu’on l’a quittée ; on est porté à en faire un cadre de bonheur, de félicité plus ou moins regrettée, parfois idyllique et tout idéale. […] L’idéal a cessé ; le lyrique est tari. […] Il faudrait peu de chose, à certains moments de ces situations, pour que l’idéal s’ajoutât à la réalité, pour que le personnage s’achevât et se réparât en quelque sorte.

351. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Idéal pour idéal, chimère pour chimère, j’aimais autant l’autre. […] Et toutefois il a exprimé, en plus d’un endroit de ses écrits, des vœux de méditation individuelle et de hauteur solitaire, si fervents, si profondément sentis, il a marqué un tel désir d’idéal et une telle prédilection élevée pour les sommets infréquentés de la foule, que l’on conçoit très-bien qu’il ait pu, par moments, regretter aussi de ne pas vivre en des temps où cette lutte sur un terrain commun et public, cette bataille à livrer en plaine, ne lui aurait point paru nécessaire.

352. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite.) »

De même, la première leçon qu’un père prévoyant devrait donner à son fils, si ce fils se destinait à devenir un critique journaliste, ce serait, selon moi : « Mon fils, n’ayez pas le goût trop dégoûté ; apprenez à manger de tout. » Or, imaginez un poète, c’est-à-dire un être accoutumé à cultiver et à chérir un idéal, à le caresser dès l’enfance sur l’aile de la fantaisie, imaginez ce poète subitement mis à pied par la fortune et obligé par métier d’essayer de toutes les combinaisons, de déguster tous les breuvages et toutes les boissons à leur entrée, ou, si vous aimez mieux, de tremper le doigt dans toutes les sauces. […] Il a dans la pensée un type de théâtre à lui, une scène idéale de magnificence et d’éclat, de poésie en vers, de style orné et rehaussé d’images, de passion et de fantaisie luxuriante, d’enchantement perpétuel et de féerie ; il y admet la convention, le masque, le chant, la cadence et la déclamation quand ce sont des vers, la décoration fréquente et renouvelée, un mélange brillant, grandiose, capricieux et animé, qui est le contraire de la réalité et de la prose : et le voilà obligé de juger des tragédies modernes qui ne ressemblent plus au Cid et qui se ressemblent toutes, des comédies applaudies du public, et qui ne lui semblent, à lui, que « des opéras-comiques en cinq actes, sans couplets et sans airs » ; ou bien de vrais opéras-comiques en vogue, « d’une musique agréable et légère, mais qui lui semble tourner trop au quadrille. » Il n’est pas de l’avis du public, et il est obligé dans ses jugements de compter avec le public. […] Voilà donc, diront-ils, où en viennent ces désespérés et ces forcenés de l’idéal comme d’Albert, tous ces petits-neveux de René !

353. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

Mais, du moment qu’on n’avait plus affaire au simple amant d’Elvire, et qu’on était décidément en face d’un poëte, force était d’aller au delà, de recommencer avec lui la vie et les chants : on eut peine à s’y résigner d’abord, et même, pour bien des cœurs épris de l’amant et qui bientôt se crurent dupés par le poëte, l’idéal, dès ce moment, fut rompu. […] Mais, selon cette idée que se fait le bon public, on n’est pas défiguré toujours, on est idéalisé quelquefois : n’en faudrait-il pas prendre son parti alors, composer avec cet idéal, et ne le pas secouer avec ce sans façon ? […] Racine, au contraire, c’est-à-dire le poëte d’alors, dérobait chastement tout ce qui était de sa personne et de son domestique, pour n’offrir ses sentiments même et ses larmes qu’à travers des créations idéales et sous des personnages enchantés.

354. (1890) L’avenir de la science « XVI »

Sans accepter dans toute son étendue le reproche que l’Allemagne adresse à notre patrie, de n’entendre absolument rien en religion ni en métaphysique, je 342] reconnais que le sens religieux est très faible en France, et c’est précisément pour cela que nous tenons plus que d’autres en religion à d’étroites formules excluant tout idéal. […] La pure religion idéale, qui, en Allemagne, a tant de prosélytes, y est profondément inconnue 157. […] Ce tour, particulier au génie allemand, explique la marche singulière des idées en ce pays depuis un quart de siècle environ, et comment, après les hautes et idéales spéculations de la grande école, l’Allemagne fait maintenant son XVIIIe siècle à la française ; dure, acariâtre, négative, moqueuse, dominée par l’instinct du fini.

355. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

J’aime à croire que Franklin, s’il n’avait suivi que son penchant, et s’il avait dû choisir parmi nous son personnage de prédilection et son idéal, serait plutôt allé embrasser M. de Malesherbes, « ce grand homme », comme il l’appelle, qui venait le voir à Passy, et qui, renonçant à la vie publique et s’amusant à de grandes plantations, désirait obtenir par lui les arbres du Nord de l’Amérique non encore introduits en France. […] Se peut-il un idéal plus monstrueux de société future ? […] C’est le beau idéal de la promiscuité.

356. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre III. Zoïle aussi éternel qu’Homère »

Leurs allées et venues dans l’idéal donnent le vertige. […] vous avez un trépied, l’idéal ! […] Vous ne vous attendiez qu’à des hommes, ils ne peuvent pas entrer dans votre chambre, ce sont des géants ; vous ne vous attendiez qu’à une idée, baissez la paupière, ils sont l’idéal ; vous ne vous attendiez qu’à des aigles, ils ont six ailes, ce sont des séraphins.

357. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

S’il eût vécu en ce temps-là, Boileau l’eût rendu peut-êtreplus difficile sur la correction ; mais en retour il eût appris à Boileau un idéal de l’élégie et de l’idylle bien autrement aimable que celui de l’Art poétique. » Cependant, quelque agrément et quelque intérêt que puisse avoir la littérature proprement dite au xviiie  siècle, il est clair que ce grand siècle n’est pas là, il est tout entier dans la philosophie et dans ces quatre hommes illustres : Voltaire, Buffon, Montesquieu et Rousseau. […] J’accorde donc qu’il y a de grandes époques littéraires, que le goût a ses révolutions et, ses décadences, que les époques politiques, scientifiques, industrielles, sont peu favorables à la beauté pure, que les langues se gâtent avec le temps, et qu’en général il n’y a qu’un temps où se rencontre une parfaite harmonie entre la forme et le fond, que ce sont ces époques que l’on appelle classiques, et que les autres s’approchent d’autant plus de la beauté qu’elles s’approchent de cet idéal. […] Nisard et les efforts qu’il fait pour nous donner une image idéale et fidèle de l’esprit français ; mais, malgré tout, la vérité est la vérité.

358. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Delthil, Camille (1834-1902) »

. — Les Martyrs de l’idéal, poème (1882). — Les Lambrusques (1884).

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