C’est ainsi que, dans quelques pièces, si l’idée de Dieu se lève tout à coup au milieu de tous ces vers de voluptueux, comme, par exemple, dans ses Victimes, ce n’est pas notre Dieu à nous, c’est celui des lâches rêveurs qui demandent un paradis sur la terre, et auquel le poète crie : Et suspends le travail du mal et du malheur ; Fais qu’à la loi d’amour l’humanité réponde !
Or, voilà que Vacquerie, si c’est lui qui, en ce livre des Premières années de Paris, hugotise avec cette perfection, ébréche sa divinité du coup de sa petite humanité travailleuse, à lui, Vacquerie !
Catulle Mendès est, comme Bug-Jargal et Han d’Islande, une de ces monstrueuses créatures qui violent dans tous les sens les proportions et les cadres de l’humanité.
— Vous rappelez-vous ces deux cités de saint Augustin, — la Cité de Dieu et la Cité du Diable, — ces deux camps tranchés et retranchés dont l’idée, à part la vérité théologique, serait encore une simplification sublime de l’histoire de l’humanité ?
En général, ces grandes vues du ministère, qui s’occupent de projets d’humanité, et qui, par des établissements utiles, cherchent à tirer le plus grand parti possible et de la terre et des hommes, semblent lui avoir été peu connues.
Cet orateur, si connu par son éloquence, tantôt persuasive et douce, tantôt forte et imposante, qui développait si bien les faiblesses de l’homme et les devoirs des rois, et qui, à la cour d’un jeune prince, parlant au nom des peuples comme au nom de Dieu, fut digne également de servir à tous d’interprète ; cet orateur, qui sut peindre les vertus avec tant de charmes, et traça de la manière la plus touchante le code de la bienfaisance et de l’humanité pour les grands, n’a pas, à beaucoup près, le même caractère dans ses éloges funèbres.
Trois sources d’inspiration semblent intarissables chez Mme Sand : l’amour, la passion de l’humanité, le sentiment de la nature. […] Occupons-nous moins d’aimer l’humanité de l’avenir que les hommes qui sont près de nous, à la portée de notre main et de notre cœur. […] Elle aura sa place marquée dans la renaissance infaillible du roman, du théâtre et de la poésie idéalistes qui conserveront longtemps une clientèle considérable dans l’humanité de demain et d’après-demain, quoi qu’on fasse pour comprimer cet élan de l’esprit. […] C’est une des rares circonstances où les droits de l’humanité l’emportaient soit sur l’orgueil des partis irréconciliables, soit sur l’orgueil du pouvoir infaillible. […] Pas d’isolement orgueilleux en dehors de l’humanité !
Je pense que l’humanité est finie, usée, pourrie, expirante. […] Il n’y a peut-être que deux choses dans l’humanité qui ne méritent pas le mépris : le Génie et la Bonté, et ces deux choses divines, il ne les respecta pas toujours. […] Ils supposent toujours une humanité bonasse et modeste, satisfaite de progresser avec lenteur et dédaigneuse des souterraines intrigues dont on l’accuse. […] Nous sommes devenus une bien horrible, bien lâche humanité et toute grande parole comme toute grande chose, a l’infaillible don de nous faire bien venimeusement écumer ! […] En réalité, le mysticisme est l’activité suprême et les Mystiques sont les vrais clairvoyants de l’humanité.
Je vous ai prouvé par des exemples que La Fontaine, Fléchier, Saint-Simon, n’ont pas ce sens de « l’égalité » ; ils n’ont pas davantage le sens de ce que nous appelons « l’humanité ». […] Il peut vouloir dire chez celui qui le prononce : Cet écu, je ne te l’aurais pas donné pour l’amour du ciel, d’une Providence, je te le donne pour l’amour des hommes, parce que l’Humanité est divine. […] Vous n’avez qu’à ouvrir le Dictionnaire philosophique, le mot humanité n’y est pas. Il y a l’article homme, dans lequel vous trouvez encore les expressions genre humain, espèce humaine, famille humaine ; vous n’y trouvez pas le mot humanité. […] Étudiées dans l’histoire de l’humanité et dans la suite des siècles, elles paraissent parfaitement susceptibles de culture et de développement tout comme un rosier.
En religion, le mot de don Juan lui suffit : « Je te le donne pour l’amour de l’humanité. » Et, comme la politique est absente du théâtre de Molière, M. […] L’auteur a machiné, autour de Blandinet et pour son usage personnel, une humanité spéciale. […] Evidemment l’idée qu’il a de l’humanité serait de nouveau bouleversée, et la pièce recommencerait ; elle ne pourrait pas ne pas recommencer. […] Dès lors, l’humanité m’est apparue plus variée qu’auparavant ; je me suis intéressé à un plus grand nombre de choses, et il m’a semblé que je cessais d’être un spécialiste, un lettré de Chine, un pédant. […] Autrement dit, le progrès se fait peut-être par les coïncidences des égoïsmes individuels avec l’intérêt de l’humanité.
Jamais l’humanité n’a été plus mêlée à la nature, ni à une nature plus riche, plus douce et plus belle. […] Claude, c’est l’Humanité dans le cas de légitime défense. […] Mais si, pour lui, Jane de Simerose est une honnête femme et Ryons un homme de bien, jugez de ce qu’il doit penser de l’humanité ! […] Jésus dit : « Jacques et Jean, fils de Zébédée, suivez-moi et laissez votre père », et au jeune homme dont le père vient de mourir : « Laisse les morts ensevelir les morts ; et toi, va annoncer le royaume de Dieu. » L’homme doit à ses parents avant de devoir à l’humanité ; mais il doit à l’humanité plus qu’à ses parents. […] L’humanité est méprisable à la fois et misérable : qu’importe donc le sang versé ?
En 89 on faisait tout pour la patrie et pour l’humanité ; sous l’Empire, on faisait tout pour la gloire : c’étaient là des sources de grandeur. […] CLII Lamartine a appelé Rabelais « ce grand boueux de l’humanité. » — Et d’autre part : « Rabelais de qui découlent les lettres françaises », a dit Chateaubriand. […] J’irai plus loin : tout artiste à la longue, tout grand artiste est hypocrite, comédien, en ce sens qu’il se domine et se possède en se livrant ; et aussi en cet autre sens qu’il juge et connaît par les deux bouts cette humanité qu’il charme. […] CXC Le bonheur moral et la vérité sous trois formes : Platon au Sunium (l’humanité un jour de jeunesse et de soleil), — Lucrèce ou Épicure sur le promontoire de la sagesse (un grand naufrage dont, tôt ou tard, on fera soi-même partie) : « Edita doctrina, etc. » — Saint Paul ou Jésus, le sermon sur la montagne (circoncision des cœurs, — médiocrité de la forme, beauté rentrée et du fond). — Une quatrième forme, le scepticisme qui comprend tout, qui se métamorphose tour à tour en chacun, et qui conçoit la pensée humaine comme le rêve de tout et comme créant l’objet de son rêve (Montaigne, Hume)… CXCI (Du temps que j’étais bibliothécaire). — À la Mazarine, j’ai sous les yeux deux sortes d’objets qui me font continuellement l’effet d’un memento mori : cette multitude de livres morts et qu’on ne lit plus, vrai cimetière qui nous attend ; et cet énorme globe terrestre où l’Europe et la France font une mine si chétive en regard de ces immenses espaces de l’Afrique et de l’Asie, et de cette bien plus immense étendue d’eau qui couvre presque tout un hémisphère. […] L’humanité passe son temps à détruire, à raser le passé, à tâcher de l’abolir ; puis, quand on en est bien loin et qu’il est trop tard, à tâcher de le retrouver, de le déterrer et à vouloir s’en ressouvenir.
Sur la religion Le titre de cette note ne signifie rien, mais je n’ai pu trouver de mots qui synthétisent brièvement ce que je veux dire, qui indiquent clairement que, pour l’humanité presque tout entière, la religion n’est qu’une variété supérieure de la médecine et même quelque chose comme un bureau de secours universel. […] C’est ce que fait l’humanité civilisée et c’est ce qu’elle fera toujours, en se moquant des pédagogues scientifiques, qui ont à peu près la mentalité d’un médecin de Molière. […] Le courant d’air On peut diviser l’humanité de bien des manières, selon les qualités, selon les défauts les plus répandus. […] L’humanité, d’ailleurs, est peut-être mieux ainsi. […] À moins qu’on ne considère comme une épidémie permanente la tuberculose, ce philoxéra de l’humanité.
Si j’avais à personnifier quelques-uns des grands siècles de l’histoire de l’humanité, il me semble que je ne chercherais pas longtemps. […] C’est leur faute, suivant nous, bien plus que celle de la nature, qui n’a jamais manqué aux grandes époques de l’humanité ; alors les hommes de génie naissent en foule. […] Le conquérir est plus sûr, et je le lui conseille ; car la civilisation et l’humanité n’ont qu’à gagner à cette conquête. […] George Sand veut introduire dans le code civil de l’humanité. […] Soyez persuadés que mes compatriotes, fiers comme moi de l’amitié de l’Angleterre, comme moi convaincus que l’union de la France et de la Grande-Bretagne, ces deux reines de la civilisation moderne, sera pour nos deux pays une source de prospérité, qu’elle encouragera tous les généreux efforts de la liberté, qu’elle hâtera dans toute l’Europe les progrès de l’ordre social, et assurera le bonheur de l’humanité ; croyez, Messieurs, que tous mes concitoyens se lèveraient avec moi, s’uniraient à mon enthousiasme pour soutenir le toast que je demande la permission de proposer : la France et l’Angleterre pour le bonheur du monde !
On peut réduire à cinq chefs l’éducation publique ; les humanités, la rhétorique, la philosophie, les mœurs et la religion. Humanités. […] Il faut pourtant convenir que dans l’Université de Paris, où chaque professeur est attaché à une classe particulière, les humanités sont plus fortes que dans les collèges de réguliers, où les professeurs montent de classe en classe, et s’instruisent avec leurs disciples, en apprenant avec eux ce qu’ils devraient leur enseigner. […] Nous ne pouvons lire sans être attendris les péroraisons touchantes de Cicéron, pro Fonteio, pro Sextio, pro Plancio, pro Flacco, pro Syllâ : qu’on imagine la force qu’elles devaient avoir dans la bouche de ce grand homme ; qu’on se représente Cicéron au milieu du barreau, animant par ses pleurs et par une voix touchante le discours le plus pathétique, tenant le fils de Flaccus entre ses bras, le présentant aux juges, et implorant pour lui l’humanité et les lois ; on ne sera point surpris de ce qu’il nous rapporte lui-même, qu’il remplit en cette occasion le barreau de pleurs, de gémissements et de sanglots. […] Ces fades harangueurs peuvent se convaincre par la lecture réfléchie des sermons de Massillon, surtout de ceux qu’on appelle le Petit-Carême, combien la véritable éloquence de la chaire est opposée à l’affectation du style ; nous ne citerons ici que le sermon qui a pour titre de l’Humanité des Grands, modèle le plus parfait que nous connaissions en ce genre ; discours plein de vérité, de simplicité et de noblesse, que les princes devraient lire sans cesse pour se former le cœur, et les orateurs chrétiens pour se former le goût.
L’humanité a son histoire intime dans chaque homme. […] À dix-sept ans, elle aspira à s’isoler de l’humanité et à vivre dans un désert champêtre en face des grands tableaux de la nature. […] La première chose à faire quand on se trouve en face de l’humanité souffrante, c’est de lui expliquer pourquoi elle souffre. […] La seconde chose à faire en face de l’humanité souffrante, c’est de chercher et de découvrir des remèdes qui diminuent et adoucissent ses maux. […] « La révolution française, ajoutez-vous, y compris 93, est le sacre de l’humanité. » Avez-vous dit sacre ou massacre ?
Chacun vit à son instant toute l’humanité ; chacun est un fragment sensible d’un être éternel. […] Ce fut un beau spectacle, au siècle dernier, de voir ainsi l’humanité revenir à la santé et donner elle-même son sens à la vie, car l’homme est « créateur de valeurs ». […] Celui-ci n’a pas échoué dans sa tâche en célébrant le Bazar, la Bourse, le Chemin de fer, car il ne s’est pas attaché à décrire minutieusement les effets de l’électricité à la manière de Sully-Prudhomme : Un disque de cire ou de verre Ose imiter le bras du dieu En qui l’humanité révère L’auteur du tonnerre et du feu ! […] Mais les froids ciseaux de l’analyse se refuseront toujours à disséquer une méditation vivante, une foi active où plongent les racines d’un être en qui l’humanité se ramifie. […] Nos vrais poètes ne sacrifient pas ceci à cela, mais, dans une intuition profonde, s’efforcent de dire toute leur âme et d’ordonner leurs poèmes selon l’instinct de notre race qui assume le plus possible d’humanité, je veux dire qui marie joyeusement la logique du cœur et la spontanéité de l’esprit.