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731. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

On l’oublie et on croit à la force causatrice des hommes. […] Est-ce dans l’individualité restée inconnue ou dans les impressions des hommes qui en parlent ? […] Attila, cet élément et non cet homme à notre façon, déchaîné à travers le monde, ne saurait se décomposer comme les autres hommes. […] Thierry, la transformation de cet homme, à propos duquel la légende continuera toujours de battre la petite chronique. […] La conquête de l’Angleterre par une poignée d’hommes, fussent-ils normands !

732. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

quelle sueur mortelle aux flancs des coursiers et au front des hommes ! […] Une haine endormie, mais immortelle, subsiste entre le vulgaire et l’homme de génie. […] L’homme qui les chantait ainsi était-il un débauché ou un véritable amant ? […] C’était, malgré tout son esprit, ce que nous appelons un homme de bon cœur. […] Ce poète est votre homme ; ce n’est pas le mien.

733. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

C’est un politique expliquant tous les faits qu’il raconte par la nature des institutions, par le rôle des partis, par le conflit des intérêts et le jeu des passions, par l’éloquence des hommes d’État et la tactique des hommes de guerre. […] L’héroïsme d’un homme a tout fait dans cette merveilleuse conquête de l’Asie. […] Les Vies des hommes illustres sont un véritable livre de psychologie historique. […] Les orateurs, les hommes d’État, les hommes de guerre, avaient donc une action très-grande sur les destinées de la république. […] L’homme reste toujours le héros du drame historique ; mais il n’en est plus le seul acteur.

734. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome II

de quel front oserais-je me montrer, pour ainsi dire, aux yeux de ces grands hommes de l’antiquité que j’ai choisis pour modèles ? […] Prétendrait-on que ce vieux Mithridate, plein de passions et de vices, fût un homme parfait ? […] Oui, sans doute, il est fou comme le sont tous les hommes possédés d’une passion violente. […] monsieur, quel homme que Racine ! […] Quand il parlait ainsi, il était encore poète, homme de lettres, homme de goût, et n’était rien autre chose ; il avait encore de la conscience en littérature, et ne pouvait mentir à son cœur.

735. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

Dieu ne tire pas plus rapidement les hommes du néant. […] On en saisit peut-être maintenant la raison, qui est que les encyclopédistes ne se sont point souciés d’étudier l’homme, ni les hommes, mais seulement les « rapports des hommes » ; et quand on n’étudie que les « rapports des hommes », ce que l’on perd le plus promptement de vue, c’est la diversité de nature qui distingue les hommes entre eux. […] Mais ce n’est pas tout encore, et l’homme n’étant pas à lui seul toute la nature, il reste à voir quels sont les rapports de la nature et de l’homme. Qu’est-ce donc que l’homme dans la nature ? […] 2º L’Homme et l’Écrivain.

736. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VII. De la littérature latine, depuis la mort d’Auguste jusqu’au règne des Antonins » pp. 176-187

Il faut donner de l’amusement à l’esprit pour être lu par des hommes isolés entre eux, et dont l’ambition ne peut rien faire ni rien attendre de la pensée. […] La philosophie de Sénèque pénètre plus avant dans le cœur de l’homme. […] Les hommes de lettres d’alors n’ont point décoré la tyrannie ; et la seule occupation à laquelle on se soit livré sous ces maîtres détestables, c’est l’étude de la philosophie et de l’éloquence ; on s’exerçait aux armes qui pouvaient servir à renverser l’oppression même. […] Une des causes de la destruction des empires dans l’antiquité, c’est l’ignorance de plusieurs découvertes importantes dans les sciences ; ces découvertes ont mis plus d’égalité entre les nations, comme entre les hommes. […] Mais avant que toute l’Europe fût civilisée, avant que le système politique et militaire et l’emploi de l’artillerie eussent balancé les forces, enfin avant l’imprimerie, l’esprit national, les lumières nationales devaient être aisément la proie des barbares, toujours plus aguerris que les autres hommes.

737. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Bayle, et Jurieu. » pp. 349-361

Toute l’Europe fut indignée de voir le plus fougueux & le plus déraisonnable des hommes s’acharner contre un philosophe, contre un sage, un homme doux, simple, modéré, plus admirable encore par le caractère de sa belle ame que par celui de son génie & de ses écrits. […] Le silence de Bayle à cette occasion, silence dont il fut la victime est une des choses qui fait le plus d’honneur à la mémoire de ce grand homme. […] Cette femme, de beaucoup d’esprit & de mérite, se prit, dit-on, de passion pour l’homme qui avoit le plus de génie. […] On étoit étonné qu’un homme qui disoit voir tant de choses dans l’apocalypse, ne vît pas ce qui se passoit dans sa maison. […] Tout l’esprit de ce grand homme peut être mis dans un seul volume.

738. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Topffer »

Il n’est ni assez profond, ni assez élevé, ni assez original, — cette cause d’isolement parmi les hommes, — pour dépayser cette moyenne des esprits et des âmes qui font les succès immédiats et travaillent à la gloire d’un homme comme les ouvriers des Gobelins à leur morceau de tapisserie, — sans voir ce qu’ils font. […] il y a mieux que cela dans cet homme. […] Sterne va des moindres traits, des moindres linéaments de la Nature jusqu’au fond de l’homme. Il éclaire l’homme par la Nature, la Nature par l’homme, et on ne sait qui des deux est le mieux éclairé, le plus vivant, le mieux peint ! […] Si Topffer, cet instituteur d’enfants, enfant lui-même, charmant d’innocence, pénétrait l’homme davantage, il serait plus triste, soyez-en sûr !

739. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre VII. De la physique poétique » pp. 221-230

De la physiologie poétique Les poètes théologiens, dans leur physique grossière, considérèrent dans l’homme deux idées métaphysiques, être, subsister. […] Les premiers hommes réduisaient toute la machine du corps humain aux solides et aux liquides. […] Ces hommes encore stupides ne pensaient aux choses qu’ils avaient à faire, que lorsqu’ils étaient agités par les passions. De là les Latins appelaient les sages cordati, les hommes de peu de sens, vecordes. […] Les premiers hommes étant presque ainsi incapables de généraliser que les animaux, pour qui toute sensation nouvelle efface entièrement la sensation analogue qu’ils ont pu éprouver, ils ne pouvaient combiner des idées et discourir.

740. (1888) Portraits de maîtres

Cette antithèse de l’homme du fait et de l’homme de l’idée est donc réelle, fréquente, mais elle n’est ni universelle, ni absolue, ni surtout fatale. […] Tout y respire, tout se passionne, tout aime avec l’homme. […] Il a, vers la fin de sa vie, parlé au Sénat du second Empire, écrit au Temps en homme libre, en homme courageux. […] L’ignorer, c’est ne pas être homme, c’est n’avoir pas vécu. […] Mais que de déceptions pour l’homme et le patriote !

741. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIIe entretien. Fior d’Aliza » pp. 177-256

C’était un homme modeste, timide, ayant peur du son de sa propre voix, mais plein de bon sens et d’aperçus justes, un des hommes qui n’aiment pas à paraître en scène, mais qui ont, comme spectateurs, le sens le plus parfait des situations. […] Je n’avais pas connu à Paris cet homme illustre autrement que par mon admiration à distance. […] Il me parut un homme qui posait pour le grand homme incompris, qu’il ne fallait voir que de loin, en perspective. […] Des hommes, et non pas de la poussière humaine ! […] Des hommes, et non pas de la poussière humaine !

742. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Un clubman, un industriel sont des hommes sérieux. […] On a dit que l’homme était le roi de la création. […] Voilà une œuvre et voilà un homme. […] Elles ensorcellent, vêtues et parées, l’homme des salons. […] Zola, c’était un des hommes les plus aptes à voir.

743. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

Voltaire a été l’homme le plus éminemment spirituel de son siècle. […] Voyez comme l’homme qui n’a point exercé son âme se courbe avec l’âge. […] Prenez quelque cours de littérature, si vous trouvez quelque homme qui en soit digne. […] Rien de plus bête que l’homme qui vit sans but. […] [NdA] Dans L’Homme du Midi et l’homme du Nord, 1824.

744. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Bussy-Rabutin. » pp. 360-383

Il donna, dès ses débuts, dans tous les vices et tous les travers de son temps : duelliste, joueur, débauché, un raffiné en toute chose : avec cela un tour d’esprit qui sentait l’homme poli jusque dans l’homme de guerre et qui sauvait ses actions de la brutalité. […] Il se passait tout d’abord l’épigramme comme un homme d’esprit, et il aimait encore à en tenir registre comme un homme de lettres33. […] Il triomphe de ses mécontentements et de ses rancunes personnelles dans le jugement qu’il fait des hommes. […] Jamais homme n’a eu l’âme plus belle sur l’intérêt que lui : il comptait l’argent pour rien. […] J’avais donc pu croire Bussy moins malicieux et moins mal disposé qu’il ne le fut d’abord envers ce grand homme.

745. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

L’homme ne s’arrête pas. […] Et sur deux chemins parallèles qui coupaient la vallée, au bas de la colline, deux hommes passèrent. […] Un homme de génie a essayé chez nous quelque chose de semblable. […] Dès l’origine, cela fut proclamé par de tout autres hommes que les admirateurs aveugles du poète. […] disant : « L’art est un moyen d’union parmi les hommes, … une activité qui a pour but de transmettre d’homme à homme les sentiments les plus hauts de l’âme humaine. » De tout temps, de très grands artistes ont considéré de la sorte leur mission dans le monde.

746. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 109-114

Selon lui, l'amour-propre est le mobile universel de toutes les actions de l'homme. […] Nous ne craignons pas de le dire, l'homme ne naît ni orgueilleux ni méchant, comme M. de la Rochefoucauld le pense & voudroit le faire croire. […] D'ailleurs, donnons à la méchanceté des hommes toute l'étendue possible : cette méchanceté, cet orgueil, infecteront-ils tous les mouvemens de leur ame ? […] Il a vu que la plupart des hommes étoient méchans : sans réfléchir sur les causes de cette dépravation, il a conclu qu'elle leur étoit naturelle, & a appliqué à l'espece les vices de l'individu. […] L'homme est assez fragile pour le mal, assez prompt & assez habile pour l'excuser, sans lui en applanir la route, & lui fournir des subterfuges pour se justifier de l'avoir commis.

747. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre IV. Si les divinités du paganisme ont poétiquement la supériorité sur les divinités chrétiennes. »

Des personnes impartiales pourront nous dire : « On vous accorde que le christianisme a fourni, quant aux hommes, une partie dramatique qui manquait à la mythologie ; que de plus il a produit la véritable poésie descriptive. […] Les dieux des anciens partageant nos vices et nos vertus, ayant, comme nous, des corps sujets à la douleur, des passions irritables comme les nôtres, se mêlant à la race humaine, et laissant ici-bas une mortelle postérité ; ces dieux ne sont qu’une espèce d’hommes supérieurs qu’on est libre de faire agir comme les autres hommes. […] Le Dieu de l’Écriture se repent, il est jaloux, il aime, il hait ; sa colère monte comme un tourbillon : le Fils de l’Homme a pitié de nos souffrances ; la Vierge, les saints et les anges sont émus par le spectacle de nos misères ; en général, le Paradis est beaucoup plus occupé des hommes que l’Olympe. […] Ce n’est pas tout ; car si l’on voulait absolument que le Dieu des chrétiens fût un être impassible, on pourrait encore avoir des divinités passionnées aussi dramatiques et aussi méchantes que celles des anciens : l’Enfer rassemble toutes les passions des hommes. Notre système théologique nous paraît plus beau, plus régulier, plus savant que la doctrine fabuleuse qui confondait hommes, dieux et démons.

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