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567. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

La marquise de Raigecourt I Aymond de Virieu, qui m’aimait comme un frère, parlait souvent de moi dans les maisons de la haute noblesse où sa naissance et ses relations de famille le rendaient familier. […] Mais, si l’attachement à la Charte vous paraît dangereux pour mon avenir, condamnez-moi dès à présent, car j’ai cru cette conciliation nécessaire entre l’ancien régime et l’avenir de la France ; et si c’est vous offenser que de le dire tout haut dans une occasion solennelle, soyons ennemis dès aujourd’hui ; je ne vous en aimerai pas moins comme un de mes premiers amis. » Nous nous fîmes ces adieux. […] Quelque temps après, Charles X nomma M. de Montmorency gouverneur du duc de Bordeaux, emploi qui lui convenait parfaitement, qui honorait son royalisme et qui unissait dans sa personne la fidélité aux Bourbons et la haute intelligence de la Charte. Ce fut dans ces hautes fonctions que la mort le surprit et parut mettre le sceau à la sainteté de sa vie.

568. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

Claretie avait contre lui (dans Monsieur le Ministre) d’abord son sujet, vrai sujet de haute comédie. » Voilà qui va bien. « — Seul sujet de haute comédie, avec Rabagas et Dora, auquel les gens du métier aient songé dans ces douze dernières années. » On se demande : Est-il donc décidément impossible d’en trouver un quatrième, en cherchant bien   « M.  […] Mais personne ne le cria plus haut que M.  […] On fait de la peinture intransigeante, de la statuaire récalcitrante, de la musique insociable, des romans réfractaires, sans pieds ni tête, où les ateliers du haut de Montmartre et les capharnaüms du boulevard Saint-Michel reconnaissent avec exaltation la vie comme elle est, exactement, superbement comme elle est !

569. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Qu’est-ce qu’un classique ? » pp. 38-55

La poésie italienne a pu se bien rétrécir depuis, mais, quand elle l’a voulu, elle a retrouvé toujours, elle a conservé de l’impulsion et du retentissement de cette haute origine. […] Son Avare, où le vice détruit toute affection entre le père et le fils, est une œuvre des plus sublimes, et dramatique au plus haut degré… Dans une pièce de théâtre, chacune des actions doit être importante en elle-même, et tendre vers une action plus grande encore. […] Dès le commencement tout a une haute signification, et fait pressentir quelque chose de bien plus important. […] Ayons la sincérité et le naturel de nos propres pensées, de nos sentiments, cela se peut toujours ; joignons-y, ce qui est plus difficile, l’élévation, la direction, s’il se peut, vers quelque but haut placé ; et tout en parlant notre langue, en subissant les conditions des âges où nous sommes jetés et où nous puisons notre force comme nos défauts, demandons-nous de temps en temps, le front levé vers les collines et les yeux attachés aux groupes des mortels révérés : Que diraient-ils de nous ?

570. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Les Gaietés champêtres, par M. Jules Janin. » pp. 23-39

ce n’était pas ainsi que Montaigne envisageait le monde du haut de sa tour de Montaigne, ni La Fontaine dans ses rêveries de tout un jour, à la lisière des blés, à l’ombre des bois. […] Elle reçoit au passage plus d’un mot galant, plus d’un fichu brodé, plus d’une épingle de diamants et d’une croix de Malte, qui lui pleut du haut de la folle terrasse qu’une gageure soudaine a mise en gaieté. […] Le capitaine entend de grands bruits du côté de la haute mer comme si une grosse flotte arrivait à force de rames, et la terre, d’un autre côté, lui paraît tout en feu. […] Ce royaume que j’avais sauvé, cette monarchie que j’avais fondée, et que le grand roi avait portée au plus haut degré des respects et des obéissances que pouvait espérer une couronne mortelle, qu’en avez-vous fait, Monsieur le Régent ?

571. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Les regrets. » pp. 397-413

Cette irritation, qui, je le répète, n’était pas née après la chute même et dans l’intervalle anarchique qui a duré près de quatre ans ; cette irritation, qui était alors paralysée et par la peur très permise et par des retours d’espérance, s’est développée au plus haut degré depuis l’établissement d’un régime qui annule ces espérances en même temps qu’il rassure contre les craintes extrêmes. […] M. de Chateaubriand éclatait tout haut avec rage et menaces ; M. de Martignac avait des bons mots et des soupirs. […] Si la partie élevée de nous-même ne nous parle pas assez haut, consultons du moins la partie sensée dans le silence. […] Il est permis à l’un de ceux qui se tiennent debout à regarder, de leur répondre : Non, le monde n’est pas en train d’aller plus mal depuis hier seulement ; s’il dégénère, c’est de votre temps et du temps de vos pères que cela a commencé, non pas du jour où vous n’y avez plus la haute main.

572. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Th. Dostoïewski »

Ces spectacles et ces récits, brouillés encore de l’incohérence, et de l’oppression des rêves qui les interrompent, forment la matière d’étranges livres ; dénués de toute poésie expresse, sombres, tristes, sales et bas, ils évoquent sourdement comme une haute fantasmagorie où les rues, les maisons et les êtres, d’abord stables ou marchants, vacillent tout à coup et planent, ombres ou noirs profils de songes. […] Il n’est rien de plus haut, de scène écrite en phrases plus nobles, plus pénétrantes en tout cœur, que cet incident final d’Humiliés, où Natacha, ayant consommé son martyre et consenti à ce que son faible amant la quittât, succombe enfin à ses forces brisées, et cependant encore éprise, dit amèrement et comme en rêve, la honte et la délicieuse humiliation de son attachement. […] Comme, au bout du compte, la raison hésite à condamner celui qui, étant mauvais et complaisant sans inquiétude pour tout ce que ses instincts l’incitent à assouvir, sourd, aveugle, insensible, fut triste cependant, puis étonné à de plus hauts appels, sut payer de sa vie sa tentative vaine d’être noblement heureux. […] Et si l’on considère l’étendue et la pénétration de leur enquête, la façon neuve dont ils parlent de l’homme et à l’homme, leur art sincère et haut, la sérieuse ferveur de l’évangile de pitié qu’ils proposent, le plus déterminé partisan de l’art pour l’art peut se sentir hésiter et réfléchir, jusqu’à ce qu’il recomprenne que le problème de la société, de la vie de l’homme ne peut être résolu par le cri de passion des détracteurs d’intelligence, que l’évangile que prêchent les romanciers slaves a précédé de dix-huit cents ans les maux qu’ils dénomment, que l’enseignement fut la marque même de sa fausseté dans son emportement, que la vérité est paisible, persuade en paraissant et n’a nul besoin d’apôtres, que l’erreur seule parle violemment, que les œuvres d’art ne doivent pas tenter de tromper, qu’il leur suffit de contenir les préceptes latents et obéis, ceux-là du monde dont elles sont la lumineuse image.

573. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une croisade universitaire » pp. 107-146

Champfleury, — ont crié à tous les échos des brasseries, voilà que vous, l’ennemi « des grands hommes d’estaminet », vous le reprenez, et sur une note encore plus haute. […] III J’ai, quelques lignes plus haut, écrit le nom d’Edmond About. […] Tu auras beau monter sur des échasses aussi hautes que celles de Maître Pierre, et proclamer de là ton dévouement aux intérêts des nationalités opprimées ; tu feras en même temps quelque cabriole grotesque, et personne ne te croira. […] Bien plus, il se gaussait tout haut, l’imprudent !

574. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre II. Marche progressive de l’esprit humain » pp. 41-66

Mais cette haute doctrine, qui fait la base de toutes les religions, qui a été si admirablement perfectionnée dans le christianisme, qui a toujours subsisté comme sentiment primitif parmi les hommes, qui est si morale, puisqu’elle explique à la fois le sacrifice, le dévouement et le malheur, cette haute doctrine ne doit pas, en ce moment, attirer notre attention. […] Les hommes de choix, qui marchent en avant, ne sont point cependant créateurs, car l’homme n’a pas reçu la puissance de créer ; mais ils ont, au-dessus des autres, une haute faculté de lire dans le fond des choses : ils ne sont que précurseurs. […] Dieu, qui s’est réservé le haut domaine sur les peuples, n’a pu leur abandonner le choix de ceux par qui il veut diriger leurs destinées.

575. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — [Introduction] » pp. 132-142

Cette argumentation, si l’on peut appeler ainsi une haute conversation littéraire, n’a pas duré moins de six heures, à peine interrompues par un léger repos, et le jour seul, en tombant, a mis fin, non au combat, mais au très agréable conflit. […] Chaque génération à son tour est au haut de l’arbre, voit tout le pays au-dessous, et n’a que le ciel au-dessus d’elle. […] Quand le petit abbé de Pons élevait sa voix pointue, et dardait contre les adhérents de Mme Dacier son mot favori, le parti des érudits, il avait l’air de monter au Capitole… Ce qui achève de peindre l’abbé de Pons et le public demi-lettré qu’il représente, c’est qu’il se donnait un air de philosophe et faisait sonner bien haut les grands mots d’indépendance et d’émancipation de l’esprit humain.

576. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IV. Mme Émile de Girardin »

Un matin, lassée de son esprit d’auteur, elle que sa beauté même a lassée, elle voulut respirer de tous ses succès de bel esprit, de Muse de salon, de femme de lettres, et elle prit ce masque de jeune homme à la mode que son magnifique front a fini par crever et qui, bien loin d’étouffer son frais et moqueur éclat de rire, le fit, je crois, vibrer plus haut ! […] C’est une belle couleur de victime. » Comme les causeurs charmants dont le monde a gardé la mémoire, Rivarol, Boufflers, et surtout ce prince de Ligne, auquel elle fait penser sans cesse, elle pousse la gaieté jusqu’à la folie et même quelquefois jusqu’à la bêtise, ce genre de bêtises dont le prince de Ligne écrivait : « Je me les dis tout bas, pour me faire rire tout haut », et qu’il se disait tout haut aussi, l’indisciplinable aimable homme !

577. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIV. L’auteur de Robert Emmet »

ne trouva derrière lui, au jour de l’action, que cinquante personnes qui prirent la fuite devant les Habits Rouges et le laissèrent pendre haut et court. […] Bélise de cette maison, mais qui n’a pas vieilli fille, comme l’autre Bélise, elle est devenue une madame Philaminte de haut parage qui a dégourdi son mari Chrysale, lui a appris Villemain, l’a voué à la littérature et l’a fait académicien, en attendant qu’elle devienne académicienne à son tour ! […] Je me trompais donc et je m’en aperçois à temps, lorsque je disais plus haut qu’il n’y avait pas, en ces deux volumes publiés sur Byron, une seule idée nouvelle.

578. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Tallemant des Réaux »

Ce livre rouge d’une police secrète faite par un homme qui s’était donné la mission redoutable de tout écrire de ce qu’il entendait dire tout haut ou tout bas dans les sociétés où on avait la bonté de le recevoir, ce livre, qui pouvait être quelque chose de grand, d’imposant, disons plus, de terrible, est tellement froid et le bavardage en est si visqueux, qu’on se demande en vain, quand on l’a lu, quel but autre que celui d’apaiser sa soif de sornettes eut des Réaux en l’écrivant ? […] Très certainement nous nous attendions à un coup d’œil plus mâle, plus haut, plus désintéressé, surtout, jeté sur le xviie  siècle par un homme comme Paulin Paris à travers les Historiettes de Tallemant des Réaux. […] Nous avons dit plus haut ce dont il se préoccupe et ce qu’il admire, les innocentes contemplations auxquelles il se livre sur la beauté de ces compagnies qui charment aussi la grave raison de Cousin dans sa Madame de Longueville.

579. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

Mais les succès de Bossuet à Navarre furent assez grands pour préoccuper les plus hautes compagnies d’une des plus hautes époques qui planent dans l’histoire. […] Ce n’est plus là le grand portail officiel que l’imagination idéalise, cette apothéose du plafond que la postérité regarde d’en bas et admire ; ce n’est plus le Bossuet de Versailles dont la main, brillant de l’émeraude donnée dans la mort par Madame Henriette, s’étend haut de la chaire sur le front pensif ou pénitent de Louis XIV ; ni ce prélat majestueux, ce grand artiste en dignité extérieure, qui ordonnait qu’on changeât dans ses jardins de Meaux un escalier en pente adoucie, pour que les flots moirés de sa robe violette traînassent derrière lui avec une décence plus grandiose.

580. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Mme de Girardin. Œuvres complètes, — Les Poésies. »

Il est peut-être, pour la Critique aux besognes routinières, plus piquant de tourner le dos à l’œuvre dernière, qui n’est bien souvent qu’une redite de ce qu’on avait mieux dit déjà, quand le génie, qui monte à chaque œuvre dans une assomption plus haute, n’y est pas, et de s’avancer à travers les succès équivoques et les œuvres laborieusement manquées, vers le premier instant du début heureux, cette fleur d’amandier qui n’a qu’un jour, la première fraîcheur de la source ! […] Théophile Gautier, qui grave sur acier mieux que Flameng, a gravé, comme nous le disions plus haut, sur le velours… Sa Notice sur Mme de Girardin est un modèle d’adoucissement, d’euphémismes, de nuances très-fines, oh ! […] Mais moi, par exemple, qui n’ai point de reconnaissance à garder envers la mémoire de Mme de Girardin, moi qui n’ai pas été reçu chez elle et qui n’ai pas bu dans les verres à champagne de ses soupers cette décoction de lotus qui fait oublier la Critique, j’oserai très bien écrire qu’en somme Mme de Girardin, cette Philaminte, mais sans le bourgeois, le cuistre et le grammatical de la Philaminte de Molière, Mme de Girardin, l’auteur des Deux amours, du Lorgnon, de La Canne de M. de Balzac, et dont les deux meilleures chosettes, La Joie fait peur et Le Chapeau d’un horloger, sont des comédies de paravent, ne fut guère qu’un talent de salon qui ne s’élevait pas beaucoup plus haut que les corniches.

581. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Auguste Barbier »

Ici, au contraire, c’était aussi du patriotisme, mais d’une inspiration plus haute, parce qu’elle était moins collective, exprimé dans des vers qui n’avaient pas besoin de musique pour paraître beaux, et comme, avant eux, la langue française n’en connaissait pas. […] Comme jamais on n’avait vu d’ascension plus haute et plus rapide, on ne vit guères non plus de prostration plus soudaine, de renversement plus à fond… Jamais manque de transition plus complet entre la grandeur et la petitesse, et, que Dieu me pardonne de tels mots en parlant d’un tel homme ! […] Il nous suffira, pour en donner une idée, de citer des vers comme ceux-ci, que nous trouvons dans sa traduction du Jules César de Shakespeare : Octave a devant moi dit tout haut à Lépide Que, tels que des gens fous, troublés, anéantis, Brutus et Cassius de Rome étaient sortis.

582. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Donec eris felix… »

Il est impossible, faute de documents sérieux (car on n’a que ses proclamations, qui sont insignifiantes), de dire si Boulanger fut un ambitieux de haute intelligence et capable de grands desseins, ou s’il ne fut qu’un aventurier vulgaire, servi un moment par des circonstances exceptionnelles, et, finalement, inégal à sa fortune. » J’espère que l’on sentira plus de pitié que de raillerie dans ces faciles horoscopes. Car, à moins qu’il ne soit devenu un grand sage pour avoir vu les hommes de près ou qu’il n’ait été secouru par une heureuse frivolité de caractère, cet homme si rudement tombé, et de si haut, doit, à l’heure qu’il est, souffrir infiniment.

583. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Une petite revue ésotérique » pp. 111-116

Avec Épictète, l’idéal s’amoindrit tout en restant très haut. […] Bazalgette termine son article en reprenant à Joséphin Péladan le type abstrait du mage pythagoricien : « C’est la suprême culture, la synthèse supposant toutes les analyses, le plus haut résultat combiné de l’hypothèse unie à l’expérience, le patriciat de l’intelligence et le couronnement de la science à l’art mêlé. » Dans la critique des livres, Psyché fait un sort à part à Pelléas et Mélisande de Maurice Maeterlinck, à la Fin des Dieux de Henri Mazel, à Lilith de Remy de Gourmont, à Ombres et Mirages de Robert Scheffer, au Miroir des légendes de Bernard Lazare.

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