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1244. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Horace Walpole »

Son esprit est un fruit brillant, amer et glacé. […] Pâté d’ortolans, en fait d’esprit, dont les manies faisaient la croûte, il est mort enveloppé dans ses manies comme une momie (qu’il était devenu) en ses bandelettes. […] Sa supériorité, très réelle, était toute en esprit, mais, sentimentalement, il n’avait nul charme. […] Elles arrachent au xviiie  siècle, dont la philosophie et les mœurs sont maintenant estimées ce qu’elles valaient, sa dernière loque de considération intellectuelle, — la considération de l’esprit qu’il avait encore ! […] il y a dans tout homme d’esprit un tendon d’Achille, et nous ne sommes jamais trempés assez avant dans le Styx du mépris pour qu’il n’y ait pas toujours en nous une petite place où ne puisse atteindre la flèche d’une bêtise.

1245. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Le roi Stanislas Poniatowski et Madame Geoffrin »

Maintenon bourgeoise, qui se maintint toujours ce qu’elle était, comme l’autre, elle avait toutes les qualités d’esprit qui empêchent de faire une folie ou une sottise, et elle n’en fit pas une. […] Le problème de cœur et de nature humaine posé par la correspondance de Madame Geoffrin, et qu’aurait agité certainement Stendhal, par exemple, l’auteur du traité De l’amour, s’il avait lu cette correspondance, ne préoccupe pas beaucoup l’esprit calme de cet éditeur sans enthousiasme, de ce peintre scrupuleux (est-ce de couleur ou de moralité ? […] Il n’entend point du tout que cette vieille d’esprit et de monde, cette expérimentée de la vie, cette âme de salon qui n’est jamais sortie de son salon avant de s’en aller en Pologne, pour faire un pèlerinage à Stanislas-Auguste, puisse, par impossible, avoir été amoureuse comme sa contemporaine, cette folle octogénaire de Madame Du Deffand, qui, elle, positivement l’était, quoique M. de Mouy, dans une de ses notes, en ait fait la Sévigné de l’athéisme et de l’insensibilité… Madame Geoffrin, qu’il rapetisse pour qu’on ne soit pas tenté d’en faire la paire avec Madame Du Deffand, qu’il trouve compliquée, était, dit-il, « seulement une femme de beaucoup d’esprit, une bourgeoise aimant la société des gens de lettres et des grands seigneurs, — (rien de plus que cela ?)  […] L’essentiel, c’est qu’elle n’aimât point ; c’est qu’elle ne se permît pas l’indécence d’une adoration hors d’âge, qui dérangerait l’idéal de raison et de sens commun que M. de Mouy a dû se faire de cette femme dont Voltaire aurait dit : Qui n’a pas l’esprit de son âge, De son âge a tout le malheur ! […] , et il ajoute, pour l’excuser, cette atténuation à la Sainte-Beuve : « On poussait alors à l’extrême l’expression des sentiments. » Inconcevable disposition d’esprit !

1246. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Hector de Saint-Maur »

, ce Roger Bontemps de l’esprit, qui jeta le sien, comme sa fortune, par la fenêtre, sous laquelle personne ne l’a ramassé ! […] Esprit ouvert, cœur ouvert, main ouverte à tous les amis ! […] Elle aurait dû le dépasser, — Si paresseuse à se lever, cette aurore, attardée jusqu’au crépuscule, a souvent montré combien, dans les vrais poètes, immortels d’esprit et de cœur, le couchant ressemble à l’aurore. […] Il ne monte pas, il est vrai, cet esprit de provenance gauloise, jusqu’à la hauteur audacieuse de Rabelais, et il ne descend pas jusqu’à la profondeur de Molière ; mais il se tient dans l’entre-deux. […] Poète même pour moi, esprit absolu et borné parce que je suis absolu, poète pour moi qui n’aime que les intenses, Saint-Maur n’en est pas un, cependant.

1247. (1868) Curiosités esthétiques « VIII. Quelques caricaturistes étrangers » pp. 421-436

Le seul défaut qu’on puisse lui reprocher est d’être souvent plus homme d’esprit, plus crayonneur qu’artiste, enfin de ne pas toujours dessiner d’une manière assez consciencieuse. […] Toute la hideur, toutes les saletés morales, tous les vices que l’esprit humain peut concevoir sont écrits sur ces deux faces, qui, suivant une habitude fréquente et un procédé inexplicable de l’artiste, tiennent le milieu entre l’homme et la bête. […] Tout le monde a de l’esprit, chacun devient artiste comique ; Marseille et Bordeaux pourraient peut-être nous donner des échantillons de ces tempéraments. — Il faut voir, dans la Princesse Brambilla, comme Hoffmann a bien compris le caractère italien, et comme les artistes allemands qui boivent au café Greco en parlent délicatement. […] Au total, c’est un artiste français, c’est Callot qui, par la concentration d’esprit et la fermeté de volonté propres à notre pays, a donné à ce genre de comique sa plus belle expression. […] On voit que Pinelli était de la race des artistes qui se promènent à travers la nature matérielle pour qu’elle vienne en aide à la paresse de leur esprit, toujours prêts à saisir leurs pinceaux.

1248. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXI. De Mascaron et de Bossuet. »

Telle est peut-être la marche nécessaire des esprits dans tous les arts : telle fut celle de l’oraison funèbre. […] En général, Mascaron était né avec plus de génie que de goût, et plus d’esprit encore que de génie. […] Trop souvent il retombe dans la métaphysique de l’esprit, qui paraît une espèce de luxe, mais un luxe faux qui annonce plus de pauvreté que de richesse. […] Il a, dans ce genre, des choses senties avec esprit et rendues avec finesse. […] Ce défaut, comme on voit, tient à de grandes beautés ; car l’esprit humain est borné par ses perfections mêmes.

1249. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

Esprit juste, il voit clair en lui comme dans la nature. […] Telle est la logique particulière de ce brillant esprit. […] Les « excréments d’un vieil esprit » fument la vigne la plus précieuse de l’esprit qui ne vieillit pas, son Yquem, sa Romanée. […] Amiel est porté et nourri par les esprits de la cité calviniste. […] N’est-ce pas là la définition de l’esprit ?

1250. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Sur l’École française d’Athènes »

Nous ne dirons quelque chose ici que de l’idée elle-même et des avantages qui en pourraient résulter, si elle est, comme nous l’espérons, interprétée dans sa vraie mesure et exécutée conformément à l’esprit. Cette idée d’aller rechercher à sa source la connaissance, le goût et l’inspiration la plus sûre de l’antiquité grecque a dû naître dans plusieurs esprits, du jour où le Gouvernement de la Grèce offrait toutes les garanties de sécurité, de civilisation renaissante et d’avenir. […] Il est temps que cette mésintelligence cesse, ou plutôt elle a déjà cessé auprès des esprits éclairés, et il n’y a plus qu’un pas à faire pour régler l’union. […] Nous n’avons pas à rédiger ici de projet, mais simplement à appeler l’attention sur une idée que l’esprit élevé de M. […] L’important serait bien moins d’abord dans tel ou tel règlement de détail que dans l’esprit qui animerait la fondation, et dans le choix de l’homme appelé à la diriger sur les lieux, et qui devrait savoir l’approprier, l’étendre, la modifier selon l’expérience même.

1251. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre III. Buffon »

Quand on lit ses lettres, on est saisi de cette sérénité imperturbable, de cette indifférence aux polémiques et aux passions du temps, de cette régularité laborieuse, de cet esprit d’ordre, qui permirent à Buffon de mener à bonne fin le grand ouvrage qu’il avait conçu. […] On peut en croire Cuvier : Buffon est un grand esprit de savant. Il a la netteté et la précision de l’esprit scientifique : il hait les abstractions, les classifications, les causes finales, trois sources inépuisables d’erreur. […] Son esprit de savant accoutumé à considérer l’immensité des périodes géologiques et la lenteur des transformations de l’univers n’avait pas la fièvre, l’impatience, les révoltes, les illusions puériles, les faciles espérances qui échauffaient les esprits de ses contemporains : il ne croyait pas aux brusques renversements qui renouvellent le monde, il ne croyait pas surtout toucher de la main l’ère de la raison universelle et du bonheur parfait. […] Le châtelain de Montbard n’aimait pas la terre improductive, qui ne donne pas de revenu, ni la vie désordonnée, dont l’épanouissement n’est pas réglé par la géométrie de l’esprit humain : il avait, je l’ai dit, la passion de l’ordre.

1252. (1898) Inutilité de la calomnie (La Plume) pp. 625-627

André Gide est un noble esprit. […] La bénédiction de la terre se fit sentir dans son esprit. […] Il représente notre esprit. […] Je crois que le doute consume trop d’esprits. […] La forte patience de l’esprit me soutient.

1253. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Alaux. La Religion progressive » pp. 391-400

C’est un éclectique de tendance, d’éducation et d’habitude, mais valant mieux, par les exigences de son esprit, que ces faiseurs de mosaïques et de petits recollages. […] Alaux croit, avec juste raison, que le besoin d’une religion est au plus profond de l’esprit humain. […] C’est un esprit analytique d’une grande précision, dont l’expression dit toujours ce qu’elle veut dire, fait vraiment pour mieux que le livre qu’il nous a donné-là. […] Semblable à tous les esprits qui n’ont pas une assez ferme et assez complète possession d’eux-mêmes, l’auteur de la Religion progressive va de préférence aux natures qui lui ressemblent. On ne trouve dans son livre que des esprits religieux plus ou moins révoltés.

1254. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame Sand ; Octave Feuillet »

pour l’honneur de l’esprit français ? […] Des œuvres posthumes comme celle de Maurice et d’Eugénie de Guérin, ces esprits enchanteurs dont j’ai appris le premier les noms au public, n’appartiennent pas davantage à la génération actuelle. Elles ne lui appartiennent ni par la date ni par l’inspiration, qui fut la grande inspiration du xixe  siècle, l’inspiration de 1830, désormais épuisée ; car l’Esprit qui renouvelle les littératures, et qui ne souffle qu’à son heure, varie ses manières de souffler et ne descend point sur deux têtes ou sur deux époques sons la même forme de langue de feu… Il nous faut donc laisser là les réimpressions d’œuvres anciennes et d’œuvres posthumes qui ont aussi leur ancienneté. […] … Des esprits attardés, les traînards des questions résolues, peuvent parler encore du livre, comme Jocrisse, dans la pièce, se met à battre les brigands quand il sait qu’ils sont des hommes de paille ; mais, pour tout ce qui n’a pas à l’esprit les pieds et sur l’esprit l’écaille de la tortue, la Vie de Jésus, qui a été les Misérables de 1863, aura le sort des Misérables, dont les flatteurs d’Hugo eux-mêmes n’osent plus parler !

1255. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre III. De la comédie grecque » pp. 113-119

Mais cette délicatesse de goût, cette philosophie supérieure, que Molière a montrée dans ses comédies, il faut des siècles pour y amener l’esprit humain ; et quand un génie égal à celui de Molière eût vécu dans Athènes, il n’aurait pu deviner la bonne comédie. […] Le peuple athénien n’avait point cette moralité délicate qui peut suppléer au tact le plus fin de l’esprit ; il se livrait aux superstitions religieuses : mais il n’avait point d’idées fixes sur la vertu, et ne reconnaissait aucun principe, aucune borne, aucune pudeur dans les objets de ses amusements. […] Ces masques, ces porte-voix, toutes ces bizarres coutumes du théâtre des anciens disposaient l’esprit, comme les caricatures dans le dessin, à l’invention grotesque, et non à l’étude de la nature. […] Si votre mémoire ne se retrace pas le sujet des allusions, votre esprit ne vous suffit pas pour comprendre la gaieté de ces écrits ; et s’il faut réfléchir à une plaisanterie pour en découvrir le sens, tout son effet est manqué. […] La comédie des Nuées prépara les esprits à l’accusation de Socrate.

1256. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre III. Du meilleur plan. — Du plan idéal et du plan nécessaire. »

C’est en marquant leur place sur ce premier plan qu’un sujet sera circonscrit et que l’on en connaîtra l’étendue ; c’est en se rappelant sans cesse ces premiers linéaments qu’on déterminera les justes intervalles qui séparent les idées principales, et qu’il naîtra des idées accessoires et moyennes qui serviront à les remplir… « C’est faute de plan, c’est pour n’avoir pas assez réfléchi sur son objet qu’un homme d’esprit se trouve embarrassé et ne sait par où commencer à écrire. […] Mais lorsqu’il se sera fait un plan, lorsqu’une fois il aura rassemblé et mis en ordre toutes les pensées essentielles à son sujet, il s’apercevra aisément de l’instant auquel il doit prendre la plume, il sentira le point de maturité de la production de l’esprit, il sera pressé de le faire éclore, il n’aura même que du plaisir à écrire….. […] Dans une composition littéraire, la sensibilité de l’écrivain, celle de l’auditeur ou lecteur, l’occasion, mille circonstances, l’information plus ou moins complète, le penchant de l’esprit vers tel ou tel genre de preuves, interviennent sans cesse et font que, sur chaque sujet, il y a autant de plans possibles qu’il y a de gens pour le traiter, et que le même homme, à deux moments différents, peut suivre deux différents plans. […] Cet effort exaltera l’esprit, l’empêchera de se satisfaire à bon compte et de poursuivre par les petits moyens le succès du moment. […] Impérieusement salutaires, elles résultent de la nature des choses et de la forme immuable de l’esprit humain.

1257. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VI » pp. 50-55

En 1620 on y voit la marquise de Sablé, dame d’un grand esprit et d’un rare mérite , dit Vigneul de Marville ; Voiture était particulièrement lié avec elle et elle lui disait avec une certaine supériorité de raison qu’il avait un amour-propre de femme . […] Mais il eut le bon esprit, dès son entrée dans le monde, d’être simple et naturel avec les personnes qu’il savait être ennemies du bel esprit et des pointes, sauf à se dédommager avec les autres. […] Non seulement il eut le bon esprit de se conformer au ton de mesdames de Rambouillet dans ce qu’il leur disait ou leur écrivait, mais il céda même à leur exemple et à leurs leçons dans ce qu’il écrivit à la suite a d’autres. […] Le corbeau de Voiture est mort… » Les lettres des dernières années de Voiture sont incomparablement plus simples, plus naturelles, et de plus d’esprit véritable que celles de sa jeunesse. […] Il attaque une phrase qu’il croit être de Pline le jeune, dont il se moque comme d’un écrivain affecté. « Ne m’avouerez-vous pas, dit-il, que cela est d’un petit esprit de refuser un mot qui se présente et qui est le meilleur, pour en aller chercher avec soin un moins bon et plus éloigné : Pline est de ces éloquents dont Quintilien dit : illis sordent omnia quæ natura dictavit ? 

1258. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » pp. 489-496

Tout le monde connoît le sort de son Livre de l’Esprit, où une Métaphysique téméraire a répandu tant d’erreurs & enfanté tant d’assertions insoutenables. […] Quoique les esprits judicieux & vraiment éclairés, les seuls dont l’homme sage doive ambitionner l’estime, sachent démêler la calomnie à travers les artifices de la malignité, il ne sera pas inutile de réfuter celle-ci, moins pour notre justification, que pour faire connoître avec quelles armes on a repoussé nos critiques. […] Lisez, M., je vous prie, l’article Helvétius dans les différentes éditions des Trois Siecles, & vous verrez si je l’ai outragé, je ne dis pas avec fureur, mais d’aucune maniere ; vous verrez si, dans un Ouvrage spécialement dirigé contre les principes dangereux de la nouvelle Philosophie, il étoit possible de s’exprimer avec plus de modération sur le Livre de l’Esprit. […] Il n’ignoroit pas que je m’étois élevé contre eux dans la Ratomanie, dès 1767, & dans le Tableau Philosophique de l’Esprit de M. de Voltaire, au commencement de 1771. […] lui qui a attendu sa mort pour relever les erreurs du Livre de l’Esprit, avec une sévérité & une amertume qui décelent plus de haine pour l’Auteur, que d’amour & de zele pour la vérité.

1259. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 17, s’il est à propos de mettre de l’amour dans les tragedies » pp. 124-131

En premier lieu l’esprit n’est gueres piqué par la peinture d’une passion dont il ne connoît pas les symptômes, il craint d’être la dupe d’une imitation infidelle. Or l’esprit connoît mal les passions que le coeur n’a pas senties ; tout ce que les autres nous en racontent ne sçauroit nous donner une idée juste et précise des agitations d’un interieur qu’elles tirannisent. […] Le coeur a bien plûtôt acquis toutes ses forces que l’esprit, et il me paroît presqu’impossible qu’un homme de cet âge n’ait pas encore senti les mouvemens de toutes les passions ausquelles son temperament le condamne. […] Comment un homme dont l’esprit est insensible à la gloire militaire, et qui ne regarde ce qu’on appelle vulgairement un conquerant que comme un furieux à charge au genre humain, peut-il être vivement interessé par les mouvemens inquiets de l’impetueux Achile quand il imagine qu’on conspire pour l’empêcher de s’aller immortaliser en prenant Troye. […] Les transports forcenez d’un ambitieux, au desespoir qu’on lui ait préferé pour remplir un poste éminent et l’objet de ses desirs, celui de ses rivaux qu’il méprisoit davantage, peuvent donc bien interesser vivement ceux qui sçavent par leur propre experience que la passion que le poëte dépeint peut exciter dans le coeur humain ces mouvemens furieux : mais toutes ces agitations, que quelques écrivains nomment la fievre d’ambition, toucheront foiblement les hommes à qui leur tranquillité naturelle a permis de se nourrir l’esprit de reflexions philosophiques, et qui plusieurs fois se sont dit à eux-mêmes que les personnes qui distribuent les emplois se déterminent souvent dans tous les païs et dans tous les tems par des motifs injustes ou frivoles.

1260. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Remarque finale. Le Temps de la Relativité restreinte et l’Espace de la Relativité généralisée »

Elle révélerait que la théorie de la Relativité restreinte et celle de la Relativité généralisée ne sont pas animées exactement du même esprit et n’ont pas tout à fait la même signification. […] Telle est la contradiction que notre esprit devine, quand il ne l’aperçoit pas clairement. […] À cette contradiction notre esprit ne peut pas se faire. […] Cette fois les particularités découvertes et définies par la physique appartiennent à la chose et non plus à une vue de l’esprit sur elle. […] Une étude de la Relativité généralisée, parallèle à celle que nous avons faite de la Relativité restreinte, montrerait que la réduction de la gravitation à l’inertie a justement été une élimination des concepts tout faits qui, s’interposant entre le physicien et son objet, entre l’esprit et les relations constitutives de la chose, empêchaient ici la physique d’être géométrie.

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