/ 3414
620. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VI, « Le Mariage de Figaro » »

De Jean-Jacques surtout procède cet enthousiasme, cet attendrissement universels qui embellissent les derniers jours de l’ancien régime, et semblent fondre toutes les haines, tous les égoïsmes dans une commune ardeur de réforme et de philanthropie ; la vie mondaine devient plus intime, moins cérémonieuse, élimine la représentation au profit du plaisir574. […] Mais à mesure que l’on sort du grand monde, et que l’on descend vers le peuple, les choses deviennent plus sérieuses. […] Il avait eu la chance devenir à point : on lui savait un gré infini d’avoir été si amusant contre les juges du chancelier Maupeou, et les nouveaux Conseils en restèrent absolument déconsidérés. […] Devenue aveugle, elle prit pour lectrice Mlle de Lespinasse, à qui elle ne pardonna point d’avoir charmé par son esprit beaucoup de ses amis. […] Il acquiert en 1755 une charge de contrôleur dans la maison du roi. devient maître de harpe de Mesdames filles de Louis XV, puis s’anoblit en achetant le titre de secrétaire du roi (1761).

621. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

Darwin surtout — plus mal compris à mesure qu’il était moins directement étudié — est devenu presque populaire. Un grand nombre de traductions d’ouvrages étrangers sont devenues matières de lecture courante : avec le naturaliste Darwin, l’Angleterre nous a fourni ses philosophes, Stuart Mill, Herbert Spencer, Alexandre Bain922. […] De moralistes à l’ancienne mode, nous n’en avons plus : les Maximes sont devenues un jeu innocent, sans conséquence et sans portée. […] Gréard : il a mis sa clairvoyance de moraliste dans la rédaction des rapports et documents administratifs ; et c’est la première fois, je crois, que des « écritures » de cet ordre sont devenues œuvres littéraires932. […] L’histoire elle-même a subi depuis le milieu du siècle les mêmes influences que nous avons retrouvées dans toutes les parties de la littérature : romantique effrénément avec Michelet, elle est devenue objective, c’est-à-dire ou scientifique ou réaliste, souvent les deux à la fois.

622. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

La vaine satisfaction qu’on tirait de ces faciles victoires contribuait à augmenter l’ignorance ; et c’est ainsi que la scolastique, après avoir été un expédient pour quelques intelligences d’élite, devint pour le plus grand nombre un empêchement et un obstacle. […] » A ces étranges paroles, raconte Mathieu Paris28, il perdit tout à coup la voix et devint non-seulement muet, mais idiot. […] Du reste, plus le moyen âge s’avance vers sa fin, plus le romanesque s’affaiblit, et plus l’esprit satirique devient général. […] En la rendant impatiente du présent, ils l’ont rendue curieuse du passé ; or c’est par l’effet de ce double esprit qu’elle est devenue capable de concevoir à son tour et d’inspirer à ses écrivains des idées générales. […] La civilisation n’est-elle pas le travail d’un peuple particulier pour réaliser un certain idéal de la vie sociale qui serve d’exemple et de type aux autres peuples, de même que la littérature n’est que l’effort suprême de l’esprit particulier de cette nation pour devenir l’esprit humain ?

623. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — I. » pp. 441-459

C’est qu’il s’est déjà accoutumé à prendre la religion surtout par le côté pratique et moral : « La religion ne détruit point l’homme, mais elle établit le vertueux. » Ainsi acheminé, dès ses premiers pas, dans une voie de prudence et de droiture, le jeune homme devint, à dix-neuf ans, avocat au parlement d’Aix, et s’y concilia aussitôt l’estime. […] On avait vu, sous le chancelier Maupeou, la monarchie administrative tenter hardiment de briser ce qui restait de corps à demi indépendants, qui devenaient un obstacle de tous les jours. […] Je n’insiste pas davantage sur ces premiers écrits à demi politiques, pleins de vues libérales ou même déjà législatrices entremêlées dans l’esprit de corps, et où la doctrine des anciens parlements se retrouve dans toute sa plénitude et sa beauté en expirant : mais Portalis ne s’y montrait encore que comme l’avocat d’une province, et j’ai hâte de l’atteindre au moment où il devient le conseiller et la lumière de toute la France. […] « Toute révolution est une conquête, pensait Portalis ; la Constitution, dans laquelle on se repose, devient un véritable traité de paix. » C’est cette paix qu’il avait hâte de pratiquer et de féconder, en substituant graduellement aux mesures hostiles, partiales, éversives, l’action bienfaisante et concertée des lois. […] » Au point de vue politique toujours, il fait sentir les inconvénients d’un tel système pour le rôle de la France au-dehors et dans les relations internationales : Nos alliés, nos voisins, sont catholiques ou chrétiens ; chez les peuples modernes, la conformité des idées religieuses est devenue, entre les gouvernements et les individus, un grand moyen de rapprochement et de communication.

624. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Seconde partie. Des mœurs et des opinions » pp. 114-142

Dans un pays où le bien-être social consiste en des choses de délicatesse et de goût, où l’existence intime repose sur l’honneur, où les discours légers ont tant de gravité, où les interprétations d’une conduite exempte de tout reproche peuvent être si fatales, ou les femmes sont tellement mêlées à la société, et y mêlent tellement toutes les sortes de susceptibilités, et j’oserais dire toutes les sortes de pudeur, où tous les amours-propres sont toujours éveillés et si facilement irritables ; dans un tel pays, avouons-le, la médisance devient de la calomnie, les écrits indiscrets feront des blessures profondes que nulle puissance au inonde ne pourra guérir, la censure deviendra un tribunal public dont les arrêts justes ou injustes seront trop souvent des outrages. […] Les hommes, devenus tout à coup désoccupés de grands intérêts et de nobles travaux, étaient descendus à une décadence honteuse, dans laquelle ils voulurent entraîner les femmes. […] Il en est de même du savant : les réputations, chez nous, sont des engouements qui ne peuvent devenir populaires ; et les succès ressemblent toujours à des succès de coteries. […] L’esprit de société, à mesure que le régime féodal s’affaiblissait parmi nous, créait une aristocratie factice et arbitraire, qui tend à son tour à devenir moins exclusive, et qui doit finir par s’éteindre, puisqu’elle n’est pas assise sur la force des choses. […] Nos anciennes dames, lorsqu’elles devenaient veuves, apportaient à leur fils aîné les clefs du château, et le reconnaissaient comme chef de la famille.

625. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre premier. Le problème des genres littéraires et la loi de leur évolution » pp. 1-33

Ce poème, cette ode des temps primitifs c’est la Genèse… Peu à peu cependant la famille devient tribu, la tribu devient nation… L’instinct social succède à l’instinct nomade… Les nations se gênent et se froissent ; de là les chocs d’empires, la guerre… La poésie reflète ces grands événements ; des idées elle passe aux choses. […] Elle devient épique ; elle enfante Homère… L’épopée prendra plusieurs formes, mais ne perdra jamais son caractère. […] Au fond, j’apporte surtout une méthode, d’analyse et de synthèse ; pour l’appliquer avec fruit, il faudra se débarrasser peu à peu de certaines habitudes de l’histoire littéraire, qui sont devenues des procédés superficiels. Plusieurs des grands auteurs se présenteront alors dans une lumière nouvelle ; et l’étude des sources, qu’on pratique aujourd’hui avec une érudition trop facile, cessera d’être un simple rapprochement de textes, pour devenir une analyse psychologique et esthétique. […] Aux « genres tranchés » on ajouta des genres intermédiaires, des sous-genres, auxquels correspondaient des formes précises (par exemple : l’ode, la chanson, le sonnet, le chant royal, la ballade.. ; les lois se précisèrent également et devinrent des règles, des recettes de cuisine littéraire.

626. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Dardées par ce visage net et par cette bouche expressive, les pensées prenaient un corps, devenaient visibles, pénétraient dans l’auditeur, le domptaient, le possédaient, le livraient aux coups de théâtre, aux effets de style, aux mouvements de passion, aux surprises de méthode. […] Il a raconté lui-même sa conversion, et comment de chrétien il devint philosophe. […] Les conversions complètes, quand elles se font tard, laissent l’âme à jamais malade ; à vingt ans on est déjà trop vieux pour devenir philosophe ; celui qui quitte sa religion doit la quitter de bonne heure ; après ce moment, on ne peut plus la déraciner sans ébranler tout le sol. […] Jouffroy avait trop de gravité dans le style ; à force d’être digne, il devenait monotone. […] Le célèbre morceau sur le pouvoir personnel ne renferme pas un seul fait ; c’est un tissu de considérations générales, de métaphores, d’abstractions qui agissent et finissent par devenir des êtres et des personnes.

627. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Entre leurs mains l’éclectisme ou spiritualisme est devenu de moins en moins philosophique et de plus en plus correct. […] Le parti du sentiment devint celui de tout le monde. […] Cousin fut ministre ; l’éclectisme devint la philosophie officielle et prescrite, et s’appela désormais le spiritualisme. […] On devint à peu près cartésien, plus volontiers encore partisan de Leibnitz, par cette raison excellente que Leibnitz est le plus loin possible de Spinoza. […] La chose n’est guère probable ; car la science s’agrandissant chaque jour, chaque jour il devient plus difficile d’être universel, et Humboldt lui-même n’a fait qu’un catalogue des faits acquis. — Il se peut aussi que le goût de l’analyse reparaisse.

628. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

A partir du 18 brumaire, un intérêt plus vif s’y mêla ; l’opposition de Benjamin Constant au Tribunat devint un dernier nœud de rapprochement. […] Votre expression a souvent de l’éclat, de l’élévation… Mais, malgré tous ces avantages, votre ouvrage est bien loin d’être ce qu’il aurait pu devenir. […] Mais à partir de là tout devient plus âpre. […] L’air écossais, l’air brillant du début devint bientôt un hymne grave, sanctifiant, austère. […] Lemercier ; elle a été perdant continuellement de sa limite, sans devenir moins absolue, moins négative.

629. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

L’est-il jamais devenu depuis lors dans le sens positif qu’on lui impute ? […] Les dépêches de M. de Maistre étaient soigneusement recueillies par les ministres étrangers résidant à Turin, et devenaient de la sorte un document européen. […] Qu’est-elle devenue ? […] Si la parole éternellement vivante ne vivifie l’écriture, jamais celle-ci ne deviendra parole, c’est-à-dire vie. […] ce n’est pas à nous de connaître le temps, etc. » Cette perspective d’une explosion prochaine était devenue son idée fixe.

630. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion statique »

Les morts vont alors devenir des personnages avec lesquels il faut compter. […] Par le double effet de la répétition et de l’exagération, l’irrationnel devient de l’absurde, et l’étrange du monstrueux. […] Le fantôme d’intention deviendrait alors une intention vivante. […] Telle aussi celle de Nisaba, en Babylonie, qui présida aux céréales avant de devenir la déesse de la Science. […] La guerre devenait une lutte entre divinités rivales.

631. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

Chaque soir le même glas sonnait sous son crène : l’hérédité, l’effrayante hérédité, la peur de devenir fou. […] Si cette maison-là disparaissait, je ne sais pas ce que nous deviendrions. […] Une jeune fille, douée d’assez mauvais instincts qu’une éducation négligée n’a fait qu’aggraver, devient la maîtresse du mari de son amie. […] Devenue l’institutrice des enfants de Mme de Montespan, elle n’eut là aucune lâche faiblesse. […] Il est vrai que c’est sur la même claie, devenue splendide, qu’il a étendu le corps rayonnant de Louis XIV !

632. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

» — Et la fusion, que devient-elle ? […] Il l’oublie, se marie, fait un beau et rapide chemin dans la magistrature et devient veuf. […] Un homme de haute valeur intellectuelle a abandonné, pour se marier, une femme devenue mère. […] Heureusement, celui-ci profita de ce mode d’étude et devint vite un distingué officier du génie. […] Le grand-duc, étant devenu Empereur, prit un grand intérêt au sort des Condé durant la Révolution.

633. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Un batelier du Bosphore, Djérid, devient amoureux de la belle Aïna. […] Dieu l’a détruit et tout est devenu petit et joli. […] J’ai vu l’amour se dépouiller, s’épurer, devenir religion, culte et prière. […] A force de nous plaindre, nous deviendrons vraiment malheureux. […] L’immeuble Vabre devient on ne sait quelle vision énorme et symbolique.

634. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

Malheur au faible devenu leur convive ! […] poète parfois, ému jusqu’à devenir superstitieux, comme un Allemand lyrique. […] La destinée était devenue clémente, et, après une vie très dure, lui donna la plus douce mort. […] Bien souvent, en devenant très célèbre, un homme devient presque incapable d’écouter la vérité. […] Déjà écrivain, il devint en outre professeur, et, jusqu’à la fin, il ne vécut que de son travail.

635. (1896) Les idées en marche pp. 1-385

L’absence de méthode devient une méthode. […] Il devient plus dur, implacable. […] L’alentour devient scélérat. […] Il devient une exception momentanée de la nature. […] Je me demande avec angoisse ce que devient dans ce cas M. 

636. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Comment a-t-elle pu devenir ce que M. de Balzac, dans sa langue, eût appelé une femme si forte ? […] Autran commença à prendre possession de son originalité et à devenir tout à fait lui-même. […] Cependant il permet à Méganyre de ne pas le suivre et de devenir l’épouse de Sophocle : que fera-t-elle ? […] À dater de cet instant décisif, sa vie devient un peu plus profane, et son historien se fait profane avec elle. […] Que devient alors le penseur révolutionnaire ?

/ 3414