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1883. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

Sous le titre de métal, qui les comprend tous comme genre, sont renfermées toutes leurs espèces dont chacune a son degré de valeur et de pureté particulière. […] Poussez en couleur, enfoncez le trait le plus avant possible, chargez vos pinceaux ; à peine atteindrez-vous au ton saillant de la simple réalité : les travers ont cela d’inconcevable qu’on n’en n’imagine jamais le dernier degré ; et que, par une extrême complaisance pour nos propres manies, leur influence glisse autour de nous et sur nous, sans que nous nous en apercevions nous-mêmes. […] Mais la nature, qu’il veut partout contraindre en elle, échappe de tous côtés à ses efforts ; et l’amour, bientôt maître habile de cette ignorante, lui enseigne furtivement et si bien ce qu’on lui cache, que, lui ouvrant l’esprit par degrés, il confond la science expérimentée de son Argus par les aveux d’une ingénue qui le désole sans le vouloir, et qui, par un étonnant prodige d’invention comique, le poignarde coup sur coup de ses traits de candeur et de naïveté.

1884. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Et, puisque nous parlons ici du miracle, j’avoue que, sans l’admettre à quelque degré que ce soit, je comprends mal les raisons des savants qui le nient. […] J’eus pour professeur, en mon temps, un prêtre très honnête, mais un peu farouche, qui punissait les fautes des écoliers non pour elles-mêmes, mais pour le degré de malice qu’il jugeait qu’on y mettait. […] Théodore de Banville, qui plaçait ainsi un clown dans le ciel comme une constellation nouvelle, à côté d’Andromède et de Persée, estimait en ces virtuoses de la dislocation des qualités de souplesse et de fantaisie qu’il possédait lui-même au plus haut degré, comme poète funambule.

1885. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

Le public sait comme moi jusqu’à quel degré de perfection il l’a élevé : mais ce n’est pas le seul endroit par lequel il nous ait fait voir qu’il a su profiter des leçons d’un si grand maître.

1886. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1885 » pp. 3-97

Jeudi 6 août Nous en sommes arrivés avec Daudet à ce degré d’intimité, où l’on reste à côté l’un de l’autre, sans se parler, silencieusement, heureux d’être ensemble, et n’éprouvant pas le besoin de le témoigner, et de remplir les vides de la conversation.

1887. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Il affirmait que Baudelaire était un sublimé de Musset, mais faisant mal les vers, n’ayant pas l’outil du poète ; il ajoutait qu’en prose, il était un prosateur difficile, laborieux, sans ampleur, sans flots, que l’auteur impeccable n’avait pas la plus petite chose de l’auteur impeccable, — mais ce qu’il possédait, ce Baudelaire, au plus haut degré, et ce qui le faisait digne de la place qu’il occupait : c’était la richesse des idées.

1888. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1892 » pp. 3-94

» Avant de s’en aller, Gruby, pour se rendre compte du degré de paralysie des muscles de la bouche du malade, le questionna s’il pouvait siffler, alors le poète, soulevant avec les doigts ses paupières inertes, jeta au docteur : « Pas même la meilleure pièce de Scribe ! 

1889. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Ce n’est, à aucun degré, œuvre parisienne et digestive, à voir après un fort dîner. […] Très peu d’hommes enfin ont eu au même degré que lui le don précieux de s’amuser à être triste. […] De l’ouvrage « bien faite » à ce degré-là, c’est de l’art.

1890. (1924) Souvenirs de la vie littéraire. Nouvelle édition augmentée d’une préface-réponse

Le thermomètre depuis une semaine marquait huit ou dix degrés de froid et la Seine commençait à geler. « Je suppose, me dit-il, que vous n’allez pas faire vos kilomètres par un froid pareil ?  […] Parfaitement. » II se mit à rire et refusa de discuter. « Laissez-moi donc tranquille. » Or, j’allai précisément ce jour-là à pied jusqu’aux abattoirs, par la rue de Flandre ; et, pour bien lui montrer que je n’avais pas menti, je m’amusai à lui envoyer heure par heure des cartes postales, mises aux boites des débits de tabac que je rencontrai, avec un mot signé  : « Deux heures, temps vif… » « Trois heures, brise fraîche… Quatre heures, 10 degrés… » Moréas reçut tout le paquet le lendemain au café. […] Ce degré de difficulté dans le travail me paraît surnaturel.

1891. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Chaque écrivain est psychologue à un degré plus ou moins intense proportionné au développement de ses facultés de pénétration, mais de ce que beaucoup d’entre eux, soit par scepticisme, soit par système, soit encore par défaut d’esprit philosophique, ne transforment pas leurs observations en lois générales, il ne s’ensuit pas pour cela qu’ils ne soient psychologues au même titre que les psychologues de profession. […] Ses romans ont, à un degré rare, l’odeur, le goût et le sens de la vie.

1892. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Quant à moi, si j’avais à écrire, à parler du bon Jean-Paul ou d’un quelconque de ses compatriotes, si je me mettais seulement à lire ses pareils ou lui pour mon propre plaisir, je commencerais par oublier quelques-uns des goûts de ma patrie, notre amour pour les idées générales nettes, moyennes, accessibles, pour les lieux communs de morale mondaine, les sentences fines et brèves, l’unité, la rapidité, la précision, la mesure, la délicatesse et la logique ; j’oublierais notre aversion pour le vague et pour toute fantaisie qui n’est point réductible à une idée claire ; je me ferais allemand ; je m’échaufferais, je m’élèverais par enthousiasme à la hauteur de ces imaginations poétiques et philosophiques tout ensemble, qui jettent à la raison vulgaire de superbes défis, et je mesurerais l’altitude de leurs pensées et de leurs œuvres d’après leur degré de mystère et de vénérable obscurité.

1893. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

Ou souffrir, Seigneur, ou mourir , était l’aphorisme de cette femme qui porta l’amour divin au plus haut degré dont le cœur humain soit capable.

1894. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1865 » pp. 239-332

… Désire-t-on une robe de chambre pour la toilette de l’eau… Prenez ceci, c’est très avantageux. » C’est la devinaille de toute une maison, et de la situation, et de l’âge des domestiques, et du degré de douleur à ménager chez les parents, et d’un merveilleux bagou approprié à la qualité du chagrin de chacun.

1895. (1884) La légende du Parnasse contemporain

Mais c’avait été peu de temps avant la première représentation de Tannhäuser à l’Opéra ; tourmenté par mille tracasseries, par des « misérabilités », comme il disait, il en était arrivé au dernier degré de l’exaspération nerveuse. […] Une ombre par degrés baigne ces formes vagues ; Et sur les bracelets, les colliers et les bagues Qui chargent les poignets, les poitrines, les doigts, Avec le luxe lourd des femmes d’autrefois, Du haut d’un ciel profond d’azur pâle et sans voiles L’étoile qui s’allume, allume mille étoiles.

1896. (1890) Le massacre des amazones pp. 2-265

Cette Cassot possède, à un degré éminent, toutes les admirables qualités du bas-bleu. […] Et les types conventionnels, créés par notre ignorance qui croit savoir, peuvent être amusants à quelque degré : héroïques dans Barbey d’Aurevilly comme des cuirasses vides que ferait cliqueter un ouragan ; saugrenus et bêtes dans Cherbuliez comme des costumes de carnaval qu’un bourgeois de Genève voulut dessiner élégants ; gentils parfois dans Henry Gréville comme des femmes presque spirituelles qui papottent presque ivres.

1897. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

Pour Alexandre, on l’accorde à Tolstoï, s’il y tient : il y a quelques particularités qui différencient Napoléon et quelques objections en sa faveur… « La dignité humaine, insiste Tolstoï, nous démontre que chacun de nous est homme au même degré que Napoléon. » Chacun est juge de sa dignité, mais la mienne souffrirait de penser qu’il n’y a point de grands hommes, infiniment supérieurs à moi, et que l’espèce humaine à laquelle j’appartiens est vouée à une éternelle médiocrité. […] Des nuits froides et des journées torrides, avec des écarts de plus de quarante degrés au thermomètre !

1898. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

Si, dès les premières pages, il eût représenté Henry Pelham comme insensible et indifférent ; si, à seize ans, il lui eût donné cette langueur fastueuse et apathique que les dandies admirent comme le plus haut degré du ton ; s’il l’eût créé dès son début avec ces vices complets qu’on n’achète jamais qu’au prix de plusieurs passions désastreuses ; s’il lui eût fait un front d’airain, des joues incapables de rongeur, des yeux sans larmes, toutes choses qu’on ne peut espérer qu’après avoir passé par la débauche, le jeu et l’ambition, on aurait eu le droit, en achevant le premier chapitre, de lui dire : « Votre héros est une nature perverse, que nous n’avons vue nulle part. […] Il possède au plus haut degré une qualité merveilleuse, dont le conteur ne peut se passer, mais qui, dans la vie, porte souvent plus de préjudice que de profit ; il a passé en revue une profusion si incroyable de faits et d’idées, il a thésaurisé tant de souvenirs qui se croisent comme la soie d’une broderie d’Orient, qui s’enfouissent mutuellement comme les couches géologiques de notre planète, qui se recouvrent comme les empâtements d’une vieille peinture flamande ; il a tant vu et tant su, il se rappelle tant et de si lointaines choses, qu’il n’est plus capable que de la foi d’imagination, don rare et précieux ! […] n’essayez pas d’aller plus loin que l’ouvrier, maintenant que le métal sort du feu, solide, éclatant et sonore ; un degré de plus, et tout va se briser et se résoudre en ruines.

1899. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

Essai sur les règnes de Claude et de Néron. Livre premier. I. Lucius Annæus Sénèque naquit à Cordoue, ville célèbre de l’Espagne ultérieure, agrandie, sinon fondée par le préteur Marcellus, l’an de Rome 585 ; colonie patricienne qui donna des citoyens, des sénateurs, des magistrats à la république, privilége dont les provinces de l’Empire jouissaient encore sous le règne d’Auguste. Le surnom d’Annœa signifie ou la vieille famille, ou la famille des vieillards, des bonnes gens, dont la rencontre était d’un heureux augure.

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