Si on traduisait mot à mot ces idiotismes dans une langue universelle, on cesserait d’être compris ; il faudrait donc modifier non plus son langage, mais sa manière même de penser, écarter de soi tout ce qu’il y a d’individuel, généraliser ses impressions mêmes et leur enlever leur précision. […] La puissance lyrique d’un génie se mesure souvent à la fréquence de la reprise de l’idée, ramenée sans cesse sous une forme nouvelle et plus frappante, au moment où on la croyait abandonnée ; c’est l’ondulation de la vague, ne quittant ce qu’elle porte qu’après l’avoir soulevé jusque sur sa crête aiguë, pour le laisser reprendre ensuite par une vague nouvelle. […] Tout effet musical n’est bon qu’à deux conditions : être approprié au but et ne être pas sans cesse répété. […] Il y a là une leçon donnée par un grand musicien et dont nos versificateurs pourraient profiter : la rime riche revenant sans cesse et coûte que coûte, c’est le Dimora casta e pura, c’est l’exclusion des demi-teintes et des nuances, c’est la lumière toujours crue, c’est la parole toujours gonflée et la bouche toujours arrondie : ore rotundo. […] Et d’ailleurs, le relief même disparaît par cela même qu’il veut sans cesse paraître.
Toutes les classes d’esprits y apprendront à régler, les uns leurs prétentions, les autres leur enthousiasme ; ceux qui s’érigent en maîtres, à ne pas sacrifier la reconnoissance à la vanité, à savoir rendre hommage à leurs prédécesseurs, à ne pas regarder comme un bien propre & personnel ce qu’ils ont recueilli sur des fonds étrangers ; ceux qui les admirent trop facilement, comprendront qu’il est essentiel de ne pas croire sur parole, de se tenir en garde contre les manéges de la présomption, & de s’instruire avant de vouloir assigner les rangs & fixer les réputations ; le vrai Philosophe enfin en tirera de nouveaux motifs de s’éclairer & d’être modeste, en apprenant que le cercle des idées humaines est étroit, & que l’agiter sans cesse, n’est ni l’étendre, ni le renouveler.
L’âme et la liberté morale sont d’un autre ordre, et quand même il s’en approcherait sans cesse par une sorte d’asymptote indéfinie, il ne les atteindra jamais.
Ces grandes émotions qu’inspire la nature sauvage n’ont point cessé d’exister, et les bois conservent encore pour nous leur formidable divinité.
Font-ils des décombres, elle y sème des fleurs ; entrouvrent-ils un tombeau, elle y place le nid d’une colombe : sans cesse occupée à reproduire, elle environne la mort des plus douces illusions de la vie.
Il fait cesser pour un tems l’affection qu’on avoit prise pour le personnage.
Une ligne plus haut et le comique cesse, et on a un personnage purement généreux, presque héroïque et tragique. […] Durant les quatorze années qui suivirent son installation à Paris, et jusqu’à l’heure de sa mort, en 1673, Molière ne cessa de produire. […] Dans les intérêts de sa troupe, il lui fallut souvent dépêcher l’ouvrage, comme quand il fournit son théâtre d’un Don Juan, parce que les comédiens de l’hôtel de Bourgogne et ceux de Mademoiselle avaient déjà le leur, et que cette statue qui marche ne cessait de faire merveille […] La Bruyère et les peintres critiques font des portraits, patiemment, ingénieusement, ils collationnent les observations, et, en face d’un ou de plusieurs modèles, ils reportent sans cesse sur leur toile un détail à côté d’un autre. […] Sans cesse agrandie de la sorte, la réputation de Molière (merveilleux privilège !)
On s’en assure par deux expériences. — S’il est comprimé, lié, coupé dans un point quelconque situé entre les centres nerveux et l’endroit excité, il n’y a plus de sensation ; or les centres nerveux sont intacts, le bout terminal du nerf agit comme auparavant, c’est donc le bout central qui a cessé d’agir ; il agissait donc auparavant ; donc, lorsque à la suite d’une excitation terminale une sensation s’est produite, le nerf a fonctionné dans tous ses segments et sur tout son trajet. — D’autre part, sur toutes les parties de son trajet, cette action aboutit au même effet111. […] Dès que la pression cesse, dès que la pièce d’os est relevée, la connaissance et la mémoire reviennent fréquemment ; on a même vu des malades reprendre la série de leurs idées au point juste où la lésion l’avait interrompue. » Après une commotion cérébrale129, « il y a parfois perte complète de l’intelligence. […] — D’autre part, le tissu fonctionne pour établir cette communication ; car, sitôt que sa continuité est rompue, la communication cesse entre le tronçon inférieur et le tronçon supérieur ; les impressions du premier n’arrivent plus au second ; les impulsions du second n’arrivent plus au premier. — On peut même désigner la portion du tissu dans laquelle les impressions sensitives se transforment en impulsions motrices ; c’est l’axe de la moelle, long cordon de substance grise. […] En premier lieu, après que la sensation a cessé, son image dure plus ou moins longtemps, eu s’effaçant par degrés, comme un écho indéfiniment répété et de plus en plus lointain. […] Pendant ce temps, les mouvements respiratoires ont complètement cessé.
Parce que ses vibrations ont, entre autres caractères, le pouvoir de se propager à travers le milieu ambiant jusqu’à notre nerf acoustique ; en effet, ôtez-leur cette propriété, ce que l’on fait par la suppression du milieu et en mettant le corps dans le vide : les vibrations continuent ; mais, comme elles cessent de se propager, la sensation ne se produit plus. […] Voilà le second intermédiaire demandé. — Si le refroidissement provoque la liquéfaction de la vapeur ambiante, c’est qu’il rapproche ses molécules au-delà d’une certaine limite ; si, au-delà de cette limite, les molécules rapprochées arrivent à l’état liquide, c’est que, passé cette limite, l’excès des forces répulsives sur les forces attractives cesse sans se renverser en sens contraire, et qu’en vertu de cet équilibre les molécules n’ont l’une par rapport à l’autre ni adhérence notable ni répulsion, ce qui est proprement l’état liquide. […] En ce cas, les couches successives des facteurs de plus en plus simples seraient différentes comme les chiffres successifs d’une fraction non périodique. — Peut-être, au contraire, à un certain point de décomposition, toute différence cesse entre le composé et les facteurs, et les propriétés du composé ne sont que la somme de celles de ses facteurs, de même que la pesanteur totale d’un corps n’est que la somme des pesanteurs de ses molécules ; auquel cas la limite serait atteinte, puisque, connaissant les propriétés du composé, nous connaîtrions par cela même celles de ses derniers éléments. […] Tous les jours, à mesure que la science se précise et s’augmente, nous voyons la première série croître aux dépens de la seconde, et l’analogie nous porte à croire que les cas encore compris dans la seconde sont pareils à ceux qui ont cessé d’y être compris. […] Par suite, si à un moment donné le caractère cesse d’exister, c’est qu’une ou plusieurs de ses conditions auront cessé d’être.
Que l’on cesse d’accabler tous les jeunes écrivains sous le prétexte futile qu’ils sont cosmopolites et embrumés. […] Le Poète cessa d’être un sage et un Pontife pour devenir un dilettante, l’art d’être un sacerdoce pour être un jeu. […] Zola qui, pourtant, cessa de se contempler pour regarder autour de soi, a laissé parler et agir ses héros selon leurs conditions et leurs instincts. […] Il cesse, en réalité, d’être un homme, pour devenir, à la fois, un ange, un symbole et une force. […] Les querelles et les turbulences littéraires, ici, n’ont point cessé.
On va, on va, et cette incessante voix de la forêt ne cesse point de gémir ; et le cœur commence à gémir lui-même, et l’on désire arriver plus vite à l’espace et à la lumière. […] dis-je à Kondrate, qui ne cessait de secouer la tête comme s’il se fût parlé à lui-même. […] Les exclamations de joie des petites filles retentissaient sans cesse ; Maria Dmitriévna poussa une ou deux fois un petit cri de satisfaction préméditée. […] Elle s’arrêta tout à coup et se tut à la vue d’un étranger ; mais ses yeux limpides, fixés sur lui, gardèrent leur expression caressante ; les frais visages ne cessèrent point de rire. […] Il avait vraiment cessé de penser à son bonheur, à son intérêt.
Pourtant le débat se poursuivit avec une ardeur furieuse, et, pendant vingt ans, on ne cessa, entre littérateurs, de se jeter le classique et le romantique à la tête. […] La théologie cessa de tout comprendre et de plonger dans le sol immense qui la nourrissait : elle se dessécha peu à peu et ne poussa plus que des ronces. […] En parlant sans cesse de ces objets, quand il parle des grands poètes du romantisme, Sainte-Beuve a, au total, fait de ceux-ci la plus belle des louanges. […] On y goûte un maître du rythme et du pittoresque, aux combinaisons sans cesse renouvelées, à l’écriture d’une souplesse, d’une ingéniosité simples et d’une limpidité sans égales. […] Nous ne cessions d’en agiter les problèmes.
Jeune homme, qui vous destinez aux lettres et qui en attendez douceur et honneur, écoutez de la bouche de quelqu’un qui les connaît bien et qui les a pratiquées et aimées depuis près de cinquante ans, — écoutez et retenez en votre cœur ces conseils et cette moralité : Soyez appliqué dès votre tendre enfance aux livres et aux études ; passez votre tendre jeunesse dans l’etude encore et dans la mélancolie de rêves à demi-étouffés ; adonnez-vous dans la solitude à exprimer naïvement et hardiment ce que vous ressentez, et ambitionnez, au prix de votre douleur, de doter, s’il se peut, la poésie de votre pays de quelque veine intime, encore inexplorée ; — recherchez les plus nobles amitiés, et portez-y la bienveillance et la sincérité d’une âme ouverte et désireuse avant tout d’admirer ; versez dans la critique, émule et sœur de votre poésie, vos effusions, votre sympathie et le plus pur de votre substance ; louez, servez de votre parole, déjà écoutée, les talents nouveaux, d’abord si combattus, et ne commencez à vous retirer d’eux que du jour où eux-mêmes se retirent de la droite voie et manquent à leurs promesses ; restez alors modéré et réservé envers eux ; mettez une distance convenable, respectueuse, des années entières de réflexion et d’intervalle entre vos jeunes espérances et vos derniers regrets ; — variez sans cesse vos études, cultivez en tous sens votre intelligence, ne la cantonnez ni dans un parti, ni dans une école, ni dans une seule idée ; ouvrez-lui des jours sur tous les horizons ; portez-vous avec une sorte d’inquiétude amicale et généreuse vers tout ce qui est moins connu, vers tout ce qui mérite de l’être, et consacrez-y une curiosité exacte et en même temps émue ; — ayez de la conscience et du sérieux en tout ; évitez la vanterie et jusqu’à l’ombre du charlatanisme ; — devant les grands amours-propres tyranniques et dévorants qui croient que tout leur est dû, gardez constamment la seconde ligne : maintenez votre indépendance et votre humble dignité ; prêtez-vous pour un temps, s’il le faut, mais ne vous aliénez pas ; — n’approchez des personnages le plus en renom et le plus en crédit de votre temps, de ceux qui ont en main le pouvoir, qu’avec une modestie décente et digne ; acceptez peu, ne demandez rien ; tenez-vous à votre place, content d’observer ; mais payez quelquefois par les bonnes grâces de l’esprit ce que la fortune injuste vous a refusé de rendre sous une autre forme plus commode et moins délicate ; — voyez la société et ce qu’on appelle le monde pour en faire profiter les lettres ; cultivez les lettres en vue du monde, et en tâchant de leur donner le tour et l’agrément sans lequel elles ne vivent pas ; cédez parfois, si le cœur vous en dit, si une douce violence vous y oblige, à une complaisance aimable et de bon goût, jamais à l’intérêt ni au grossier trafic des amours-propres ; restez judicieux et clairvoyant jusque dans vos faiblesses, et si vous ne dites pas tout le vrai, n’écrivez jamais le faux ; — que la fatigue n’aille à aucun moment vous saisir ; ne vous croyez jamais arrivé ; à l’âge où d’autres se reposent, redoublez de courage et d’ardeur ; recommencez comme un débutant, courez une seconde et une troisième carrière, renouvelez-vous ; donnez au public, jour par jour, le résultat clair et manifeste de vos lectures, de vos comparaisons amassées, de vos jugements plus mûris et plus vrais ; faites que la vérité elle-même profite de la perte de vos illusions ; ne craignez pas de vous prodiguer ainsi et de livrer la mesure de votre force aux confrères du même métier qui savent le poids continu d’une œuvre fréquente, en apparence si légère… Et tout cela pour qu’approchant du terme, du but final où l’estime publique est la seule couronne, les jours où l’on parlera de vous avec le moins de passion et de haine, et où l’on se croira très clément et indulgent, dans une feuille tirée à des milliers d’exemplaires et qui s’adresse à tout un peuple de lecteurs qui ne vous ont pas lu, qui ne vous liront jamais, qui ne vous connaissent que de nom, vous serviez à défrayer les gaietés et, pour dire le mot, les gamineries d’un loustic libéral appelé Taxile Delord.
Cette économie a manqué peut-être à Nodier : esclave du caprice, pressé souvent par la nécessité, il travaillait au jour le jour, cédant sans cesse aux sollicitations des libraires, qui osent tout demander à un homme dont la bonté ne savait rien refuser.
L’écrivain religieux peut seul découvrir ici un profond conseil du Très-Haut : Si les puissances coalisées n’avaient voulu que faire cesser les violences de la Révolution, et laisser ensuite la France réparer ses maux et ses erreurs ; peut-être eussent-elles réussi.
Ce qu’il y a de pis dans les fatras, dont il a inondé le public, c’est qu’il s’avise de faire le plaisant, & qu’il entretient sans cesse ses lecteurs de ses plates productions & de celles de sa femme.
Il n’en est pas ainsi de l’instruction publique ; embrassant toutes les conditions d’un empire, répandant la lumière de toute part, son dernier effet est la formation des académies qui durent, renouvelées sans cesse par le fonds national.