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406. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Gères. Le Roitelet, verselets. »

Malgré l’incontestable talent d’école de l’homme qui a écrit, sans changer de plume, et en trois manières, Le Linceul des forts et Le Dernier soupir du Maure, égaux pour le moins en beauté aux plus belles Orientales de M.  […] Il n’est point pour la Beauté stérile. […] Par l’aube éternelle guidée, Entrevoyant d’autres beautés, L’âme, au sort commun décidée, S’acclimate aux vives clartés Et se fait à la grande idée, Voit la terre avec d’autres yeux, Se prépare au voyage étrange, Laisse à tout d’intimes adieux, S’observe, s’écoute, se range, Se tourne souvent vers les cieux ; Se concentre dans elle-même Laissant déborder par moments Dans l’amitié de ceux qu’elle aime Les précurseurs épanchements De la fin prochaine et suprême !

407. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Ranc » pp. 243-254

C’est Léon Gozlan qui disait, je crois, avec cet éclair et cette pointe de diamant qu’il mettait en ses moindres mots : « La beauté de la femme, c’est d’être un ornement. La beauté de l’homme, c’est d’être une arme. » Eh bien, Ranc a cette incontestable beauté-là !

408. (1875) Premiers lundis. Tome III « M. de Latena : Étude de l’homme »

La bienveillance habituelle qui règne dans son observation générale de l’homme, et qui ne permet point à l’amertume de se glisser sous le fruit de son expérience, n’empêche pourtant pas qu’il ne dise des choses assez vives à ce sexe qu’il paraît avoir bien connu : « Il n’est pas adroit de se montrer très-clairvoyant avec les femmes, à moins que ce ne soit pour deviner ce qui leur plaît. » « Il n’est pas rare de voir une femme, miraculeusement échappée aux dangers de la jeunesse et de la beauté, perdre le fruit de ses sacrifices en se donnant dès qu’on cesse de l’attaquer. C’est une citadelle qui a courageusement repoussé les assauts, et que la famine force enfin de se rendre. » « Une femme nous semble un peu moins jolie quand nous avons entendu contester sa beauté. » Je ne sais si l’auteur a raison de refuser aux femmes la faculté d’être amies entre elles ; il ne la leur refuse du reste que dans leur première jeunesse et quand une autre sorte de passion plus vive est en jeu.

409. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — Q — Quillard, Pierre (1864-1912) »

Lisez ses belles élégies héroïques : le Dieu mort, Ruines, les Vaines Images, qui sont Psyché, Hymnis et Chrysarion, le Jardin de Cassiopée, la Chambre d’amour, et goutez-en la beauté amère et sereine, l’âcre et doux parfum, la cadence sonore. […] C’est pendant ce séjour en Orient, où il devait retourner, en 1897, suivre, pour le compte du journal l’Illustration, les opérations de la guerre gréco-turque, qu’il écrivit l’Errante, poème dialogué et qui fut représenté au Théâtre de l’Œuvre, en mai 1896, et la plupart de ces pièces sous le titre général : Les Vaines Images, si pures, si harmonieuses, d’une beauté tout ensemble orgueilleuse et désabusée.

410. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre VIII. Des Églises gothiques. »

Ces deux monuments, changés de place, auraient perdu leur principale beauté, c’est-à-dire leurs rapports avec les institutions et les habitudes des peuples. […] L’ordre gothique, au milieu de ces proportions barbares, a toutefois une beauté qui lui est particulière140.

411. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

La passion, la beauté, le merveilleux, le romanesque, voilà le monde qu’il s’est composé à son insu. […] Ni enseignement ni poème, c’est-à-dire ni vérité, ni beauté ; qu’est-ce donc ? […] Il comprend et il célèbre la beauté comme elle n’a jamais été ni comprise ni célébrée ; et, lorsque la beauté prend le nom d’une femme, il est tellement sanctifié par l’admiration, qu’il ne peut devenir coupable. […] Esclave soumise, sa beauté ne lui donnait qu’un empire de quelques instants. […] Il révère la beauté comme l’œuvre de Dieu.

412. (1778) De la littérature et des littérateurs suivi d’un Nouvel examen sur la tragédie françoise pp. -158

Croyoit-il par des tendresses fades remplacer les beautés du Poëte Grec ? […] C’est la beauté de tous les siècles qui subsistera indépendante des modes & des variations. […] On chérira encore cette beauté conventionnelle qui détruit des beautés plus vives, plus précieuses & plus naturelles. […] La plus hazardée, par comparaison, offriroit nécessairement quelques beautés neuves. […] Les beautés de l’Art sont sublimes & variées, simples & touchantes.

413. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Je vous accorde que votre poète doit de grandes beautés d’art à cette merveilleuse abondance d’émotions diverses. […] Disons, si vous voulez, que l’essence a nécessairement revêtu la substance, et que cette substance a revêtu la beauté extérieure, comme une expression de la beauté immatérielle de l’idée. […] va-t’en dans ton musée, pédant de beauté, tu m’ennuies !  […] Julie lui objecta la beauté du temps. […] Il adorait les enfants, il en avait en un, un garçon prodigieux d’intelligence et de beauté, m’a-t-on dit.

414. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

L’admiration de toutes les grandes beautés qui s’offrirent sur sa route troubla cet enthousiaste jeune homme. […] Parler de beauté à propos de M.  […] Ceux-là du moins se faisaient pardonner leur laideur à force d’expression, quelquefois même de beauté morale. […] Beautés entrevues à l’aide des Mousquetaires d’opéra-comique. […] Triste beauté que celle qui n’a que la puissance de faire oublier la toilette.

415. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

On a, avec raison, expliqué cette influence de Mallarmé, en plus de la beauté de son œuvre, par sa prestigieuse conversation, souple, signifiante, chatoyante, colorée. […] Moréas est arrivé au classicisme pur, non sans le parer de beauté — si M.  […] Elsa, la petite Elsa, n’est qu’une jeune fille de la foule, parée seulement de beauté. […] Ils admiraient la beauté verbale de ses poèmes et sa didactique lorsqu’il esthétisait, et son exégèse du beau difficile, du rare, de l’absolu. […] Pratique l’art pour l’art tout artiste occupé à développer son rêve de beauté, beauté faite de ce que l’on appelle, sans équivoque possible, la beauté, beauté physique, plastique, sculpturaire, architecturale, etc., puis beauté dans le sens plus abstrait, des musiques, des tendresses, des émotions, des parfums.

416. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre V. Swift. » pp. 2-82

En les décomposant, il montre leur laideur réelle et leur ôte leur beauté fictive. […] Toute la beauté de ces pamphlets est dans l’accent. […] La musique involontaire dont la pensée s’enveloppe cache la laideur et dévoile la beauté. […] … C’est l’habit qui fait l’homme, et lui donne la beauté, l’esprit, le maintien, l’éducation, l’importance. […] Qu’est-ce que la beauté, puisque le plus beau corps regardé avec des yeux perçants paraît horrible ?

417. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

Elle était elle-même d’une beauté candide et pure, comme le rêve d’un philosophe sur le berceau d’un enfant ; la mélancolie de sa bouche et la fraîcheur de ses joues imprimaient les grâces de l’innocence sur le sérieux de ses pensées. […] Enfin, l’aimable Agnès a su m’assujettir, C’est un joli bijou, pour ne vous point mentir, Et ce serait péché qu’une beauté si rare Fût laissée au pouvoir de cet homme bizarre. […] Je voudrais, m’en coûtât-il grand’chose, Pour la beauté du fait, avoir perdu ma cause. […] L’amour qui nous attache aux beautés éternelles N’étouffe pas en nous l’amour des temporelles : Nos sens facilement peuvent être charmés Des ouvrages parfaits que le ciel a formés. […] (A.) — Quiconque lit doit sentir ces beautés, lesquelles mêmes, toutes grandes qu’elles sont, ne seraient rien sans le style.

418. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Outre l’existence du moi conscient, volontaire, qui lui paraît impliquer un grand moi, une grande conscience, une volonté universelle, Hugo trouve encore dans le inonde la beauté, qui lui paraît la forme visible et la révélation du divin. […] Dans Ibo, la beauté est appelée sainte, et elle est rapprochée de l’Idéal et de la Foi. Enfin, comme Aristote, Hugo identifie la beauté, l’harmonie éternelle des choses, avec une volonté élémentaire du bien répandue en tout. […] II. — Quand on s’est familiarisé avec les idées philosophiques de Victor Hugo, — ce poète « sans idées », — alors, et alors seulement bien des pièces, dont on ne faisait que sentir vaguement la beauté ou la sublimité, prennent tout leur sens, produisent la plénitude de leur effet esthétique. […] Sans chercher un but extérieur à elle, sans prétendre à l’utilité proprement dite, la grande poésie ne saurait pourtant être indifférente au fond des idées et des sentiments, elle ne saurait être une forme pure : elle doit être l’indivisible union du fond et de la forme dans une beauté qui est en même temps vérité.

419. (1913) Les livres du Temps. Première série pp. -406

Dans cette caducité universelle, la beauté survit. […] Ce fondateur du romantisme a profondément senti la beauté des terres classiques. […] Barrès, on ignore la beauté aimée pour elle-même, comme l’aime l’Italie. » Et à notre tour, combien nous aimons l’Italie pour cet amour de la beauté ! […] Il manquait de mesure et blasphémait contre la beauté. […] Cet instant de surhumaine beauté suffirait à la gloire de son nom.

420. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Madeleine, Jacques (1859-1941) »

Dans un autre livre qu’il publie concurremment, il chante la beauté grecque avec une certitude d’érudition qui, moins stricte, serait des plus intéressantes. […] Il sied de garder la mesure quand je veux avouer quel délice fut, imprimé pour un trop petit nombre d’élus par un artiste de Fontainebleau, À l’orée de la forêt, ce volume exquis entre tous ; et cependant, à ne point mentir, il faut affirmer que jamais, sauf par les compagnons de la Pléiade et André Chénier, Hellas ne revécut ainsi en syllabes françaises, avec son sourire et sa grâce « plus belle encor que la beauté ».

421. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 532-537

Les Poésies sacrées de M. de Pompignan seront vengées du froid ridicule d’un bon mot, par quiconque est capable de reconnoître les vraies beautés par-tout où elles se trouvent ; ou, pour mieux dire, elles le sont déjà par l’empressement qu’on met à les rechercher. […] Nous ne citerons rien de ses Discours philosophiques, parce que tout y est d’une égale beauté ; nous dirons seulement qu’ils suffiroient pour faire la réputation d’un grand Poëte, & qu’ils passeront à la Postérité, malgré les cris de l’Envie, comme un des plus beaux monumens de la Littérature de ce Siecle.

422. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 51-56

Rapin prit sur lui de traiter ce sujet, & il l’a fait avec une supériorité de talent qui prouve la beauté de son génie. […] L’élégant Traducteur de Virgile étoit bien capable de juger du mérite du Poëte qui a le plus approché de ce même Original, dont personne n’a mieux senti ni mieux rendu que lui toutes les beautés.

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