Voltaire lui-même, dans son temps, qui était le bon, n’avait pas trouvé cela. Voltaire n’a jamais dit que Jésus-Christ, qu’il se contentait d’appeler l’infâme, fût un fou, en marche vers l’idiotisme pur, et n’en a décrit la folie avec une exécrable volupté. […] Ceci était réservé à un écrivain du xixe siècle, — un animalcule d’écrivain, en comparaison de Byron et de Voltaire, — et, selon moi, pour qu’on dise cela hautement et avec impunité en plein xixe siècle, il faut que le siècle dans lequel on le dit soit aussi perdu d’esprit et aussi perverti que l’écrivain !
Il eût ressemblé à Voltaire. […] le Curé d’Ars ressemble à Voltaire comme saint Vincent de Paul ressemble à un satyre, mais chez tous les deux, le Saint a tué la bête, — chez l’un, luxurieuse certainement, chez l’autre, peut-être cruelle. En effet, pour l’observateur qui étudie cette étrange figure du Curé d’Ars, avisé, futé, très fin au fond, malgré la sublimité des vertus que son âme avait contractée ; pour qui lit ces réparties spirituellement vengeresses de son humilité, qu’il adressait à ceux qui le persécutaient de leurs compliments et de leurs hommages, et dont l’abbé Monnin, qui n’oublie rien, a égayé doucement son récit, il est hors de doute qu’elle ne mentait pas, cette physionomie de Voltaire, et que, sans Jésus-Christ, le Curé d’Ars aurait été un de ces esprits charmants et mordants comme les aime le monde, au lieu d’être une âme angélique devant Dieu.
Sacy, qui nous vante Nicole (nous avons dit pourquoi), met sous la garde des éloges de Voltaire le traité des Moyens de conserver la paix avec les hommes, mais Voltaire avait bien de la grâce pour se soucier de Nicole, lui qui ne croyait ni à l’humaine ni à la divine !
Voltaire, qui faisait de tout, fit aussi de la critique : on en trouve, et d’excellente, dans ses lettres, dans ses préfaces, dans son Dictionnaire philosophique, dans son Temple du goût, partout dans ses œuvres, comme de l’esprit, comme du bon sens : critique acérée et légère, railleuse et sensée, causerie sans prétention, mille fois interrompue et reprise, étincelle capricieuse qui court dans un tissu à demi consumé. Ce n’est pas Voltaire qui aurait pu composer la Rhétorique de Voltaire 7. […] L’Allemagne, si peu connue jusqu’alors, et à qui Voltaire souhaitait plus d’esprit et moins de consonnes, nous ouvrit sa forêt hercynienne. […] La langue française a été trop clarifiée par l’école de Voltaire ; « on l’a gênée et appauvrie depuis environ cent ans en voulant la purifier28 ». […] La Rhétorique de Voltaire, par Éloi Johanneau ; recueil d’observations, de jugements, de conseils littéraires empruntés aux différents ouvrages de Voltaire.
Il est probable que Voltaire n’a pas lu Mélicerte, ce qui, tout compte fait, est pardonnable. […] Déjà du temps de Molière, selon Voltaire, qui a la tradition, « quelques personnes se révoltèrent ». […] Je le soupçonne d’être de Voltaire lui-même. […] Mais ceci rentre précisément dans les bienséances et Voltaire a encore raison. […] C’est-à-dire que le caractère satanique de Don Juan a complètement échappé à Voltaire, que Voltaire ne s’est pas aperçu que Don.
Ça vous connaît, rien que parce que votre berceau a posé sur cette terre qui a avalé depuis cent ans de la mitraille au quintal et bu du sang à la barrique. » C’est Jules Vallès, le grand écrivain croquemitaine, qui saluait ainsi, dans une retentissante préface, l’élégant Homme masqué du Voltaire. […] Il chroniquait à l’Événement, au Soir, au Bien public et dans cinq ou six autres feuilles, quand il commença au Voltaire la campagne de l’Homme masqué.
Voltaire, à chaque page de « ce diable de Jean Racine », s’écrie : Sublime ! […] Le plus aveugle ne saurait méconnaître la puissance de destruction que les écrits de Montesquieu et de Voltaire ont eue sur la croyance au dogme catholique.
Leurs phrases, encore compassées sous Balzac, se dégagent, s’allégent, s’élancent, courent, et sous Voltaire ont pris des ailes. […] La philosophie de Voltaire petille en millions d’étincelles. […] Pour un Français, pour Voltaire, qui les lit, car il lit tout, quelle étrange lecture ! […] À la cour de Louis XIV, on l’eût pris pour un échappé de séminaire ; Voltaire l’appellerait curé de village. […] C’est cette pensée qui rallie autour du christianisme toutes les forces que Voltaire tourne contre lui en France.
« L’âme de la France, écrivait-il, c’est celle dont des poètes comme Racine et La Fontaine, des peintres comme Fragonard, des écrivains comme Montaigne, Montesquieu, Voltaire ont à jamais exprimé l’idéal. […] Ce qui est étrange, c’est que M. de Goncourt se réclame du xviiie siècle ; s’il ne représente point son temps, il ne tient pas non plus d’une époque spirituelle, galante et vivante comme celle de Voltaire. […] Il lui arrivera ce qui est arrivé à Voltaire, ce qui arrive à Wagner, c’est que ses disciples empêcheront de l’admirer. Les voltairiens sont morts, et les bons esprits peuvent recommencer à lire Voltaire sans avoir la grotesque vision de cet homme ennemi de la poésie et des religions, liberâtre et déiste, solennel et riant jaune, qui de 1725 à 1730 faisait la guerre aux jésuites, aux préjugés, défendait la Charte et respectait les mœurs en caressant sa bonne. […] non — car Nietzsche a des maîtres qu’il est facile de connaître et qu’on peut lui préférer, depuis Aristippe jusqu’à Voltaire, depuis Machiavel jusqu’à Hobbes et La Rochefoucauld.
II, chap. 6] On se refuse presque à croire que quelques-unes de ces notes soient de Voltaire, tant elles sont au-dessous de lui. […] Par exemple, lorsqu’il dit que la raison de l’homme seule ne peut arriver à une démonstration parfaite de l’existence de Dieu, on triomphe, on s’écrie qu’il est beau de voir Voltaire prendre le parti de Dieu contre Pascal. […] Ceint de tous les lauriers, fait pour tous les succès, Voltaire a de son nom fait un titre aux François. […] IV, chap. 5] Voltaire, que j’aime à citer aux incrédules, pensait ainsi sur le siècle de Louis XIV, et sur le nôtre. […] Enfin, Voltaire a dit dans sa belle Lettre à milord Hervey, tout ce qu’on a répété moins bien et redit mille fois, depuis, sur le siècle de Louis XIV.
De là des écrits nombreux, des diatribes amères contre Racine, Voltaire et Boileau ; et si, dans votre guerre à nos immortels génies, vous avez épargné Corneille et Molière, les plus classiques de tous nos auteurs, c’est que, par pitié pour la France, vous n’avez pas voulu lui enlever toutes ses gloires. […] Voltaire, enfoncé ! […] Sobriquet donné à Voltaire ; aussi appelle-t-on ses vers, des vers à talon rouge. Ce mépris de ce grand homme est si bien répandu parmi les sectaires du romantisme, que j’ai entendu leur chef dire devant moi que Voltaire n’avait pas fait dix bons vers dans sa vie. […] Pauvre Voltaire !
Trois ou quatre hommes tout au plus ont su se développer en restant gaulois ; ce sont ceux qui, en prenant un genre gaulois, la chanson, le pamphlet, la farce, la comédie, l’ont élargi et relevé jusqu’à le faire entrer dans la grande littérature : Rabelais, Molière, La Fontaine, Voltaire et peut-être quelquefois Béranger. […] Presque tous les vers de Voltaire, ceux qu’il estimait le plus, sont des parades officielles. […] C’est par cette réflexion supérieure que La Fontaine, comme Rabelais ou Voltaire, surpasse les purs Gaulois et sort de la foule des simples amuseurs.
Votre justice ne peut être que cette justice immanente, dont on parle sans y croire, parce qu’en effet les hommes sont quelquefois punis par où ils ont péché ; mais ce n’est qu’un hasard, qui n’a jamais effrayé les coquins ; ils n’ont pas plus peur de la justice immanente que de la justice éternelle ; peut-être même, dans son mystère, l’éternelle leur inspire-t-elle plus d’effroi que l’immanente, et c’est bien le cas de rappeler ce fameux dîner où Voltaire avait convié ses amis, Diderot, Helvétius, d’Alembert, d’Holbach, toute l’Encyclopédie. Ces messieurs se mirent à causer de leur marotte, et conclurent assez vite qu’il n’y avait pas de Dieu : — Je le veux bien, dit Voltaire, mais éloignons les domestiques. […] « Sur le rivage, dit encore Voltaire, je vis une potence et reconnus que j’étais dans un pays civilisé. » Vous ferez mieux, vous essayerez de persuader aux hommes qu’ils ont intérêt à être bons et sociables.
Emmanuel Rhoïdis s’imagine avoir deux bras droits, armés chacun d’une arme terrible : l’une, petit pistolet de poche, péniblement travaillé pour être léger, et d’une balle plus meurtrière que celle du plus fort calibre, — et c’est le pistolet du romancier, qui veut faire rire ni plus ni moins que Rabelais et Voltaire ! […] Je sais bien qu’il est difficile d’être impie, spirituel et nouveau, après Voltaire. […] Est-ce que le plus fort, par le talent, des livres de Voltaire, n’est pas le plus grand de ses crimes ?
La consigne actuelle n’est plus celle de Voltaire, qui du moins était franc ! […] Martin, que par le matérialisme hideux de Voltaire. […] Henri Martin, si druidant qu’il soit, n’a pas été assez hardi pour affronter son propre ridicule en promenant des Druides à travers les temps modernes, quoique pourtant Fénelon, Voltaire, Rousseau, Montesquieu, etc., soient au fond aussi des druides, mais des druides de robe courte comme nous avons des jésuites de robe courte, — d’anciens druides déguisés !
C’était précisément l’époque où Voltaire et le Roi de Prusse se brouillaient, comme deux femmes ! […] L’essentiel, c’est qu’elle n’aimât point ; c’est qu’elle ne se permît pas l’indécence d’une adoration hors d’âge, qui dérangerait l’idéal de raison et de sens commun que M. de Mouy a dû se faire de cette femme dont Voltaire aurait dit : Qui n’a pas l’esprit de son âge, De son âge a tout le malheur ! […] Madame Geoffrin fut de celles-là… Le don de séduction qui était en Poniatowski, ce séducteur d’impératrice, ne rencontra pas d’obstacle à sa toute-puissance dans la raison de cette femme dont le mâle esprit, inaccessible aux engouements de son époque, toisait, toute petite bourgeoise qu’elle fût, et le grand Frédéric, et Catherine-le-Grand, et Voltaire, avec une toise d’une telle précision que les plus forts de ce temps-ci (Joseph de Maistre, par exemple, sur le grand Prussien Frédéric de Prusse), n’ont eu besoin ni de la raccourcirai de l’allonger… Stanislas Poniatowski n’était pas, en effet, un séducteur des temps corrompus où il vivait et dont Madame Geoffrin aurait pu dire, comme de la politique de ces temps : « Ce sont les profondeurs de Satan !
Spinosa, Voltaire, Hegel, tous ces insectes humains, enivrés de la goutte de génie que Dieu leur versa dans la télé et qu’ils ont rejetée contre Dieu, jouent leur rôlet de Titans-Myrmidons jusqu’au bout et visière levée. Même quand Voltaire se fait capucin, il rit, le sacrilège ! […] En effet, c’est l’opposition et la caricature de ces Soirées de Saint-Pétersbourg, dans lesquelles l’auteur esquive aussi la difficulté d’une exposition méthodique par cette forme trop aisée du dialogue, mais, du moins, en sait racheter l’infériorité par l’éclat de la discussion, le montant de la répartie, la beauté de la thèse et de l’antithèse et une charmante variété de tons, depuis la bonhomie accablante du théologien jusqu’à la sveltesse militaire ; depuis l’aplomb du grand seigneur qui badine avec la science comme il badinerait avec le ruban de son crachat, jusqu’au génie de la plaisanterie, comme l’avait Voltaire !