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499. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre II. Attardés et égarés »

Il est protestant, et non pas du petit troupeau qui paît à l’écart, pacifique et docile ; il a dans l’âme le feu des guerres civiles, et continue de ne voir dans la France apaisée que des bourreaux on des martyrs. […] Ces convertis et ces convertisseurs qu’il écrase dans la Confession de Sancy, ce sont les ouvriers de la restauration monarchique et catholique, qui en somme avaient refait la France. […] On est dur en France parfois pour les minorités, et pour le génie maladroit qui ne s’habille pas à la mode. […] Ce goût eut pour premier effet de soumettre de nouveau la France aux influences étrangères. […] Au total, l’Espagne, comme l’Italie, recommandait à la France le goût effréné de l’esprit, le culte des formes les plus raffinées de sentir et de parler.

500. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

Le Beau, professeur d’éloquence latine au Collège de France, l’appela à professer, comme suppléant d’abord, la poésie qui était comprise dans cette chaire. […] A son retour en France, il reprit sa vie mi-partie studieuse et distraite, et la Révolution seule la vint troubler. […] Il ne rentra en France que deux ans après, en 1802, pendant l’impression du poème de la Pitié. […] S’il paraissait à l’Académie pour y réciter quelque morceau ; si, au Collège de France où M.  […] Son corps resta exposé plusieurs jours au Collège de France, sur un lit de parade, la tête couronnée de laurier et le visage légèrement peint.

501. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

Le roi de Prusse avait entraîné avec lui le duc de Weimar et son armée dans la campagne d’invasion en France, de 1792. […] Le plaisir, en France, court plus vite que le temps ; il n’attend personne, pas même le génie. […] Madame de Staël, fuyant la tyrannie de Napoléon, qui l’avait reléguée hors de France, s’arrête quelques semaines à Weimar, et cherche à répandre autour d’elle, sur Goethe et Schiller, l’éblouissement de son esprit. […] Nous n’avons rien de pareil en France. […] On déclame beaucoup en France depuis quelques années contre la centralisation.

502. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (2e partie) » pp. 81-159

Le premier consul, qui voulait gouverner en souverain et non en perturbateur de l’Europe, lui fit des ouvertures de paix ; il témoigna au cardinal Martiniani, évêque de Verceil, le désir d’entrer en négociation pour les affaires religieuses de France. […] Je ne lui laissai rien ignorer de ce qui s’était dit et répondu entre le plénipotentiaire de France et moi. […] En changeant la religion en France, je la changerai dans presque toute l’Europe, partout où s’étend l’influence de mon pouvoir. […] Mais il suffisait à l’ambassadeur de France de voir que le Pontife résistait pour inculper résolument son ministre. La douceur du caractère de Pie VII l’avait mal fait juger en France.

503. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

Les revenants eux-mêmes de l’émigration y contribuent, dont on aurait tort de croire qu’ils n’aient te rien oublié ni rien appris » dans leur exil : ils y ont appris l’anglais ou l’allemand ; et que la France n’était pas l’univers. […] Antoine ou Le Compagnon du Tour de France sont à peine des romans ; — et à coup sûr n’en sont point de bons. […] Il a continué dans les derniers volumes de son Histoire de France, à ne retenir et à ne traduire dans sa prose que le frisson lyrique, si l’on peut ainsi dire, dont les faits l’avaient remué. […] Histoire de France, t.  […] Dowden, Literary Criticism in France, Boston, 1895 ; — G. 

504. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Pauvre France, chère patrie, que ne puis-je contribuer à te relever de tes désastres !  […] « Elle est plus cruelle que la barbarie », répond France, par la bouche de M.  […] Mais comment servir la France dans la Lorraine ? […] Piété envers les Lettres — piété envers l’Église, — piété envers la France. […] — à 1830 son effort de destruction de l’ancienne France, en vue de lui substituer une France, construite d’après une idéologie toujours la même, sous des formules différentes.

505. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VI » pp. 50-55

Il est cependant fort remarquable qu’à l’époque où Anne fut accusée de conspirer avec Monsieur contre le roi, les mémoires du temps lui imputent une intrigue galante avec le duc de Buckingham, ambassadeur du roi d’Angleterre en France et son favori. […] Selon Voltaire, Anne d’Autriche avait apporté à la cour de France une galanterie noble et fière qu’elle tenait du génie espagnol, et y avait joint les grâces, la douceur et une liberté décente qui n’était qu’en France : l’anecdote des férets d’aiguillettes en diamants qu’elle avait reçus du ici, et qu’elle donna presque aussitôt au duc de Buckingham, les vers où Voiture lui parle à découvert de son amour pour ce charmant Anglais et le plaisir qu’elle prit à les lire, le soin qu’elle mit à les garder, ces détails attestés par madame de Motteville annoncent dans la reine toute l’inconsidération d’un goût très vif, et sortent des bornes de cette galanterie noble et fière et de cette liberté décente que Voltaire lui attribue.

506. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre V. Histoire littéraire. » pp. 212-219

On peut donc se contenter de l’Histoire littéraire de la France depuis quelques années avant J. […] Goguet trop tôt enlevé à la république des lettres, avoit commencé un grand traité sur l’Origine & les progrès des loix, des arts & des sciences en France depuis le commencement de la Monarchie jusqu’à nos jours. […] Un autre ouvrage qui peut servir de guide à quiconque voudra connoître l’état présent des sciences & de la littérature, est la France littéraire.

507. (1857) Cours familier de littérature. III « XIIIe entretien. Racine. — Athalie » pp. 5-80

C’est un règne mal étudié de l’histoire de France, c’est une histoire écrite par l’opposition de la Fronde et par des factieux en robe du parlement. […] La maison de Médicis, si souvent confondue avec la maison régnante de France sous les Valois, avait régné au Louvre et aux Tuileries autant qu’à Florence par ses artistes et par ses poètes presque naturalisés français. […] Corneille était la contre-épreuve de ce génie espagnol en France. […] C’est cette heureuse coïncidence de bonnes fortunes littéraires qui vit et qui fit naître Racine, c’est-à-dire la perfection incarnée de la langue poétique en France ! […] Ce genre de composition avait été inventé par les poètes italiens du seizième siècle et importé en France par les Médicis.

508. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. […] Causes de cette différence. — L’art d’écrire en France. — À cette époque il est supérieur. — Il sert de véhicule aux idées nouvelles. — Les livres sont écrits pour les gens du monde. — Les philosophes sont gens du monde et par suite écrivains […] Et je ne parle pas seulement de la littérature secrète, des livres extraordinaires que lit Mme d’Andlau, gouvernante des enfants de France et qui s’égarent aux mains des filles de Louis XV460, ni d’autres livres plus singuliers encore461 où le raisonnement philosophique apparaît comme un intermède entre des ordures et des gravelures, et que des dames de la cour ont sur leur toilette avec ce titre : Heures de Paris. […] Ses Persans jugent la France en Persans, et nous sourions de leurs méprises ; par malheur, ce n’est pas d’eux, mais de nous qu’il faut rire ; car il se trouve que leur erreur est une vérité464. […] — Prenons-y garde pourtant : la gaieté est encore un ressort, le dernier en France qui maintienne l’homme debout, le meilleur pour garder à l’âme son ton, sa résistance et sa force, le plus intact dans un siècle où les hommes, les femmes elles-mêmes, se croyaient tenus de mourir en personnes de bonne compagnie, avec un sourire et sur un bon mot475.

509. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

Toutes deux d’une beauté célèbre, quoique différente, et d’un esprit cultivé, elles rassemblaient dans leur personne la grâce de la France et la passion de l’Italie. […] Un second départ du cardinal d’Este pour la France, où il possédait d’immenses terres de l’Église appelées bénéfices, interrompit encore cette félicité. […] La médiocrité sage, personnifiée dans Boileau, triompha comme toujours en France des nobles témérités du génie. Sur la foi d’un vers de Boileau, le seul poème épique moderne digne de ce nom passa pendant deux siècles, en France, pour une fausse dorure sur un vil métal. […] C’était l’année où se tramait le massacre de la Saint-Barthélemy ; tout était trouble, lutte et dissimulation, en France, entre les catholiques et les protestants.

510. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

Il y a eu, il y a, il y aura des femmes illustres par le talent littéraire, sans que cette célébrité ait coûté rien aux vertus de leur sexe, témoins Vittoria Colonna en Italie et madame de Sévigné en France. […] La France qui n’a d’aristocratie que dans l’intelligence, et où par conséquent l’aristocratie est personnelle, ne pouvait reconstituer d’une main les priviléges politiques qu’elle détruisait de l’autre. Aristocratie et France moderne sont deux mots qui se nient l’un à l’autre. La force ou l’idée, voilà alternativement le gouvernement de la France ; mais il n’y a point de place pour le gouvernement de convention et de préjugé. […] L’on pourrait tout au plus s’en décourager pour la France ; mais si ce pays avait le malheur de ne savoir posséder le plus noble des biens, il ne faudrait pas pour cela le proscrire sur la terre.

511. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

Il n’aimait rien tant que la France, Paris, son chez soi, les thèses de la Faculté aux grands jours, et le collège de Cambrai, où il réussissait si bien. […] IL faut que je vous avoue ma faiblesse ; je le baisai même, et son beau-père Louis Xll, qui a été le Père du peuple, et le meilleur roi que nous ayons jamais eu en France ». […] Il fut soupçonné d’avoir introduit en France des libelles contraires au roi ou aux personnes royales. […] Il trouva d’ailleurs hors de France mainte compensation pour sa fortune : son père seulement n’en trouva point à son absence. […] Ii appréciait Balzac et estimait la grande édition posthume qu’on préparait de ses Œuvres (1665) capable de faire honneur à la France et à notre langue.

512. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — II » pp. 57-80

Ils sont à Vienne, et les miens sont à Versailles. » C’est ainsi que plus tard, quittant Louis XIV pour aller à l’armée, il dira : « Sire, je vais combattre les ennemis de Votre Majesté, et je la laisse au milieu des miens. » De retour en France, Villars fut bien reçu du roi, mais se plaignit de ce qu’on ne faisait rien pour lui : au bout de chaque action, il voulait son salaire. […] Catinat, chargé de former et de commander un corps d’armée en état de tenir tête au prince Louis de Bade sur cette frontière, et qui d’ailleurs ne fut instruit par sa cour de l’alliance avec la Bavière qu’au dernier moment et lorsqu’elle fut déclarée, se trouva trop faible dès le début pour s’opposer au siège de Landau, qui était alors à la France, et se résigna tout d’abord à la perte de cette place. […] La France a eu un succès ; la victoire revient sous nos drapeaux, elle console le cœur d’un roi qui, en cela du moins, est patriote : que leur importe ! […] Même quand il était le plus populaire en France et dans l’armée, il était raillé à Versailles. […] [NdA] Dans la « Collection des documents inédits de l’histoire de France ». — Neuf volumes (et plus) de ces Mémoires militaires (de 1701 à 1709) ont paru.

513. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

Vue hors de France, et pourtant en pays français encore de langue et de littérature, cette littérature française est comme un ensemble de montagnes et de vallées, observées d’un dernier monticule isolé, circonscrit, lequel, en apparence coupé de la chaîne, y appartient toujours, et sert de parfait balcon pour la considérer avec nouveauté. […] Le pays de Vaud, pour m’y borner en ce moment, eut pourtant un développement ancien, suivi, tantôt plus particulier et plus propre, tantôt plus dépendant du nôtre, et réfléchissant, depuis deux siècles, la littérature française centrale, mais, dans tous les cas, resté beaucoup plus distinct que celui d’une province en France. […] Par Du Perron, né en son sein, mais qu’il renvoya à la France, le pays de Vaud fut pour quelque chose dans l’établissement littéraire qui suivit, et ne demeura pas inutile à l’introduction de Malherbe, qui eut, comme on sait, le célèbre cardinal pour patron3. […] Arago, à propos des classiques grecs et latins ; et, s’il déploie dans la discussion moins de prestesse sémillante, ou de riche et poétique abandon, que nos champions de France, il y porte des raisons encore mieux enchaînées, une politesse ingénieuse non moindre. […] Vinet, la régularité du raisonnement, la propriété un peu étudiée de l’expression, laissent place à tout un atticisme véritable, qui, à la fois, étonne hors de France, et qui pourtant ne paraît pas dépaysé.

514. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Ce n’est certes pas de nos jours que Voltaire aurait droit de dire : « La France fourmille d’historiens et manque d’écrivains72. » Car, si la France n’a jamais été plus fertile en historiens dignes de ce nom par la science et par la pensée, plusieurs se trouvent être à la fois des écrivains éminents. […] L’Académie des Inscriptions avait proposé d’examiner quel était, à l’avénement de saint Louis, l’état du gouvernement et de la législation en France, et de montrer, à la fin du même règne, ce qu’il y avait d’effets obtenus et de changements opérés par les institutions de ce prince. […] L’étude particulière sur saint Louis et ses Institutions n’était pour lui qu’une occasion de traverser et de repasser dans toute son étendue l’histoire de France, de la ranger et de la coordonner par rapport à ce grand règne. […] la Hollande aux abois et son héros le prince d’Orange tourneront à la longue toute l’Europe contre la France. […] La série des Historiens modernes de la France dans la Revue des Deux Mondes.

515. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Le cardinal Jean de Médicis se retira de Rome en France ; après la bataille de Ravenne, il rentra à Rome et s’étudia à capter les Florentins. […] Catherine de Médicis et Marie de Médicis régnèrent en France ; l’Italie poétique et artistique émigra avec elles, les arts les suivirent ; elles bâtirent le Louvre et le charmant château des Tuileries ; leur règne fut le règne de quelques vices et de beaucoup de génie. C’est par elles que la France toucha à l’Italie et à la Grèce. […] Leur argent négociait pour eux, et ils prêtèrent plus d’une fois des sommes considérables au roi de Naples, à l’Espagne, à l’Angleterre, à la France, pour équilibrer le monde et pour se faire des clients des rois. […] Nous vous traduisons cette lettre, qui fit pleurer l’Italie et qui est écrite pour faire pleurer la France.

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