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358. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

Il faut se souvenir de quelle profondeur de désordre Louis XIV tira la France, en prenant en main les affaires. […] C’est que la royauté seule pouvait donner à la France ce dont elle avait soif, la stabilité, l’ordre, l’unité. […] Un autre mal, non moins profond, affligeait la France. […] L’esprit français fit comme le roi ; il revendiqua enfin son droit de préséance, en France, sur l’esprit espagnol. […] « Sous lui, dit-il, la France a appris à se connaître.

359. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — III. (Suite et fin.) » pp. 454-472

Les malheurs qui fondirent sur la France, à partir de 1812, vinrent mettre à l’épreuve les hommes. […] Sans qu’il soit besoin de plus de détails, il suffit de savoir que le ministre de la Police générale, le duc de Rovigo, transmit de Paris, pendant la campagne de Russie et vers le moment de la bataille de la Moskova, une note dressée par l’habile préfet de police de Paris100, exposant tout un nouveau système relatif aux subsistances des grandes villes, et contenant des aperçus sur ce qu’il conviendrait de faire en France pour arriver à une bonne administration des grains. […] Sur la liberté de la presse, une ou deux fois peut-être, il introduit des réflexions qui semblent plutôt se rapporter à la France de 1819 qu’au gouvernement vénitien en aucun temps (t.  […] Le but de l’auteur était de préparer ainsi et de commencer l’histoire générale de France par une histoire particulière de chacune des provinces prise jusqu’à l’époque de sa réunion. […] Il n’a donc point prétendu se cantonner dans la Bretagne, la traiter au point de vue local et dans ses oppositions avec la France, mais tout au contraire faire une histoire de la Bretagne considérée dans ses rapports avec la France, la Normandie et par conséquent l’Angleterre.

360. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens. par M. Le Play, conseiller d’État. (Suite et fin.) »

La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens. […] Il avait d’ailleurs des vues, des idées originales et bien des termes de comparaison, ayant habité l’Angleterre, visité l’Espagne, le Portugal ; il connaissait même l’étranger beaucoup mieux que la France, d’où il avait émigré et où il semblait craindre de remettre les pieds depuis que la Charte en avait empoisonné l’air et le sol. […] Ce mot de La Fontaine : Notre ennemi, c’est notre maître, mot terrible et décisif s’il était réversible sur tout l’ancien régime de la France, lui a paru un cri particulier à la Champagne, et qui s’expliquait, selon lui, par les circonstances propres à cette province. […] Le cœur d’un homme vaut tout l’or d’un pays, ce beau vers d’un poète du Moyen-Age lui a paru avoir dû se réaliser et avoir trouvé son écho en bien des provinces de notre France. […] Voir notamment son livre : Du Mécanisme de la Société en France et en Angleterre : un vol. in-8°, 1833.

361. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre II. Du goût, de l’urbanité des mœurs, et de leur influence littéraire et politique » pp. 414-442

Le peuple se moque du peuple tant qu’il n’a point reçu l’éducation de la liberté, et l’on n’aurait fait que se rendre ridicule en France si, même avec des idées fortes, on eût voulu s’affranchir du ton qui était dicté par l’ascendant de la première classe. […] En France surtout, il semble que le pouvoir, non seulement influe sur les actions, sur les discours, mais presque sur la pensée intime des flatteurs qui entourent les hommes puissants. […] Ce qui renouvelait en France le même esprit, c’était le ton, les manières de ce qu’on appelait la bonne compagnie. […] La littérature se perdra complètement en France, si l’on multiplie ces essais prétendus gracieux qui ne nous rendent plus que ridicules : on peut encore trouver de la vraie gaieté dans le bon comique ; mais quant à cette gaieté badine dont on nous a accablés presque au milieu de tous nos malheurs, si l’on en excepte quelques hommes qui se souviennent encore du temps passé, toutes les tentatives nouvelles en ce genre corrompent le goût littéraire en France, et nous mettent au-dessous de tous les peuples sérieux de l’Europe. […] Il importe de créer en France des liens qui puissent rapprocher les partis, et l’urbanité des mœurs est un moyen efficace pour arriver à ce but.

362. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « De la retraite de MM. Villemain et Cousin. » pp. 146-164

Guizot, qui eut lieu à la suite de la révolution de Février, achève et clôt une belle et brillante époque, la plus belle qu’ait eue l’enseignement public en France. […] L’Histoire de la civilisation en France, avec l’Histoire générale de la civilisation en Europe, qui y sert d’introduction, appartient aux trois dernières années de son cours (1827-1830), et l’Histoire des origines du gouvernement représentatif en France remonte aux années 1820-1822. […] Il a fait paraître l’Histoire des origines du gouvernement représentatif en France dans un moment où l’on était bien peu disposé à en goûter les fruits, et où l’arbre, à force de monter en folles branches, compromettait toutes ses racines. […] Guizot voulait, en effet, moins encore enseigner l’histoire que constituer et professer le gouvernement moderne de la France ; M.  […] Il y a convenance et obligation à tout régime qui s’affermit dans notre France, et qui la rend calme et prospère, de susciter bientôt sa propre génération d’esprits et de talents.

363. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Seconde partie. Des mœurs et des opinions » pp. 114-142

Pour apprécier au juste ce qu’une telle cause a pu jusqu’à présent produire de modifications, il faudrait remonter aux époques et aux modes des différentes réunions à la couronne de France, ce qui nous mènerait beaucoup trop loin. […] Si le jury n’était pas établi ailleurs pour les délits de la presse, il faudrait l’inventer pour la France. […] La légitimité est en France au nombre des nécessités sociales ; c’est le seul frein à l’impétuosité de notre esprit et à la mobilité de notre imagination. […] Ne soyons plus étonnés de ce que la conservation de l’Europe soit tellement liée à la couronne de France, puisque la France est encore à la tête de la civilisation actuelle. […] Louis XVIII, en fondant la monarchie constitutionnelle, a ressaisi pour la France la direction des destinées de l’Europe.

364. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

Quelques bas-bleus fidèles à son cours du Collège de France, à ce professeur qui avait, disons-le (c’était son défaut), un peu de bas-bleu dans l’esprit ; puis parfois un article, çà ou là, une ébullition attardée d’un talent qui avait régulièrement et vastement déferlé longtemps sur la plage du Journal des Débats, voilà tout ce qui restait de Philarète Chasles, l’Impossible à l’Académie ! […] Depuis Mme de Staël, il ne fut peut-être pas, en France, de critique plus vivant. […] Le critique en voyage à travers les littératures emporte autre chose que Sterne lui-même, qui n’emportait, quand il partit pour la France, que trois chemises, une culotte de soie noire et la résolution de partout sentimentaliser… Le critique, lui, doit avoir un paquet d’idées faites en vertu desquelles il va juger les choses et les hommes, et il ne va pas se les faire, ces idées, en voyage. […] J’y trouve le reviewer que Chasles avait rapporté d’Angleterre dans sa personne ; car il fut le premier des reviewers en France et il est demeuré le plus fort de tous. […] Il est vrai que dans l’Angleterre Whig l’un a écrit une histoire whig de ce whig couronné, Guillaume III, auquel il sacrifie Marlborough et toutes les grandes figures de l’époque ; tandis que le pauvre Philarète Chasles a continué de faire de la critique et de la littérature inutiles en ce beau pays de France où Chateaubriand se plaignait de ne pouvoir rester ministre, où le grand Balzac n’aurait jamais pu l’être, quand Disraëli, un mauvais romancier que nous mépriserions en France, l’est en Angleterre à plus de soixante-dix ans !

365. (1902) Propos littéraires. Première série

M. Anatole France. […] M. Anatole France se révèle à nous, et que M.  […] M. France. […] M. France ; et jamais M.  […] M. France.

366. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVIII » pp. 313-315

Nous n’y voulons voir qu’un fait, c’est qu’en France on arrive désormais à tout par son esprit et par son talent, même quand ce talent n’a été appliqué qu’aux choses d’imagination pure et de poésie. — Un autre fait que nous nous permettrons de rapprocher du précédent, c’est que le poëte coiffeur d’Agen, l’aimable Jasmin, vient, dit-on, de recevoir la croix de la Légion d’honneur : autre preuve qu’avec de l’esprit et même par la poésie seule, on triomphe aujourd’hui de toutes les difficultés et de tous les préjugés, qu’on se classe à son rang, et qu’on se fait finalement reconnaître et honorer des puissances sociales officielles. […] Ces croix d’ailleurs, en France, sont tellement prodiguées qu’elles ont perdu leur prix et leur vrai sens de distinction ; nous ne signalons cette marque d’honneur pour Jasmin qu’à cause du contraste que cela fait avec sa profession ; cette nouvelle sera bien accueillie dans le midi de la France qui voit en lui son poëte populaire.

367. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

En effet, il y a à peine quelques années que vous êtes passé d’un service étranger au service de France, où vous avez débuté comme officier supérieur. […] Officier étranger, me dévouant à la France et au grand capitaine qui la gouverne, servant l’un et l’autre avec enthousiasme, sans aucun lien ni avantage national, je recevrais pour prix de mon zèle des injures et l’infamie ! […] Il avait connu la France, il connaissait maintenant l’Europe. […] C’est ce qui le fit raccourir au quartier général à Francfort, et de là suivre ce quartier général en France, pour ne quitter de nouveau l’armée qu’à Troyes avant l’entrée à Paris. […] Les Français, ceux qui n’ont habité que la France, ne savent pas ce que c’est que la Suisse ni qu’un Suisse.

368. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

Dans son enthousiasme pour Jean-Jacques, ce représentant imagina un institut d’enfants d’après les maximes du citoyen-philosophe : plusieurs villes de France en créaient alors de semblables. […] Proscrit quelques mois après et ayant dû quitter la France, il envoya de Rome sa procuration pour le payement de cette pension que Béranger toucha jusqu’en 1812. […] Or, des douleurs de la France épuisée, De sa chère aigle aux mains des rois brisée, Des morts d’hier, des mânes d’autrefois. […] notre France est là… France d’alors, chantant sous le tonnerre Plus d’un refrain qui depuis s’envola, Vive et rétive, assez peu doctrinaire, Encore en sang des caresses des rois ; Oui, cette France est toute dans ta voix. […] Laffitte, et par d’autres moyens, l’homme de France qui a rendu dans sa vie le plus de services efficaces.

369. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre troisième »

Enfin, il est également vrai que le premier qui ait popularisé en France, non dans la langue des savants, comme Érasme, mais dans la langue de tous, les premières vérités de la philosophie chrétienne, c’est Calvin. […] Il parcourut la Saintonge et quelques provinces de l’ouest et du midi de la France, prêchant secrètement, mais avec peu de résultat. […] C’est ce qui arriva en France, sous la minorité de Charles IX ; en Ecosse sous le règne si troublé de Marie Stuart ; dans les Pays-Bas, lors de la révolte des Provinces-Unies, et en Angleterre, sousCharles Ier. […] L’image de cet esprit pénétrant et audacieux par lequel Calvin s’éleva principalement en France, au-dessus de Luther, reluit dans la hardiesse et la subtilité de sa langue. […] L’esprit du radicalisme, dans les autres pays, paraît être l’effet du malaise de la société qui aigrit ceux qui en souffrent, et les emporte au-delà des bornes ; en France, ce n’est que l’esprit logique poussé jusqu’à l’absurde.

370. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « André Chénier, homme politique. » pp. 144-169

Né en 1762 à Constantinople, d’une mère grecque, nourri d’abord en France sous le beau ciel du Languedoc, après ses études faites à Paris au collège de Navarre, il essaya quelque temps de la vie militaire ; mais, dégoûté bientôt des exemples et des mœurs oisives de garnison, il chercha l’indépendance. […] … élevez donc la voix, montrez-vous… Ce moment est le seul qui nous reste : c’est le moment précis où nous allons décider de notre avenir… La perte d’un poste est peu de chose, mais l’honneur de la France a été plus compromis par de détestables actions qu’il ne l’avait été depuis des siècles. […] Un des points les plus importants de la polémique d’André Chénier est la dénonciation qu’il fit de la Société des Jacobins, dans l’article intitulé : « De la cause des désordres qui troublent la France et arrêtent l’établissement de la liberté », et inséré dans le Supplément au Journal de Paris, du 26 février 1792. […] Il suppose à tous ceux qui pensent comme lui autant de courage qu’à lui : Que tous les citoyens dont les sentiments sont conformes à ceux que contient cet écrit (et il n’est pas douteux que ce ne soit la France presque entière) rompent enfin le silence. […] Voilà en quelles mains ce charmant génie (comme toute la France) était tombé, voilà à quels hommes il eut affaire.

371. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française. IXe et Xe volumes »

Chez lui, cette portion de notre histoire politique, jusqu’à présent si ténébreuse et si compliquée, s’éclaircit, se dénoue d’elle-même ; tout y devient simple et lucide ; ici encore on sent l’historien qui est toujours placé au cœur de son sujet, c’est-à-dire au cœur de la France. […] Le Directoire, par le 18 fructidor, prévint donc la guerre civile et lui substitua un coup d’État exécuté avec force, mais avec le calme et la modération possibles dans les temps de révolution. »Le 18 fructidor tua en France le parti royaliste en tant que conspirateur, et il ne reparut plus désormais qu’en 1814, la Charte en main, avec des paroles d’amnistie et de liberté. […] S’il concluait la paix, il avait toujours consulté trop peu la dignité République, il avait sacrifié des alliés fidèles ; s’il poursuivait la guerre, il épuisait la France et méconnaissait les besoins du peuple. […] L’action de la France contre l’Europe était si violente qu’elle devait détruire rapidement tous ses ressorts. […] « Elle n’est pas venue, dit-il : elle viendra. » Espérons-le avec lui : il est de ceux qui ont le plus droit de la promettre ; car il la sert, il en hâte le triomphe ; et certes, lorsqu’à la lecture de son livre nous voyons ce que nos pères ont souffert pour elle, et que nous sentons en nos cœurs ce que nous serions prêts à souffrir nous-mêmes, quand il nous semble qu’à travers les larmes, le sang et d’innombrables douleurs, tout a été préparé par une providence attentive pour son mystérieux enfantement, nous ne pouvons imaginer que tant de mal ait été dépensé en pure perte, que tant de souffrances aient été vainement offertes en sacrifice ; et dût-il nous en rester encore quelque part à subir, nous croyons plus fermement que jamais au salut de la France.

372. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques, extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil — II »

Les jugements de Jefferson sur la France et sur la Révolution qu’il avait vue commencer, sont dignes d’être médités et portent à un haut degré l’empreinte du caractère judicieux, circonspect et persévérant que tout nous signale en lui. […] La France pourtant fut alors étudiée de Jefferson beaucoup mieux que de tout autre étranger. […] Dans un voyage qu’il fit à travers la Bourgogne et les provinces du Midi, il est touchant de le voir « rôder par les champs et dénicher les habitants dans leurs chaumières, regarder dans leur pot-au-feu, manger leur pain, se coucher sur leurs lits sous prétexte de se reposer, mais, dans le fait, pour s’assurer s’ils sont assez doux. » De retour en Amérique, après des adieux bien vifs à la France, pour laquelle il garda toujours une prédilection vraiment tendre, Jefferson suivit jusqu’au bout les vicissitudes et les progrès de ce grand et bon peuple, qu’il considérait comme l’initiateur du vieux monde. […] Quoi qu’il en soit, sa chute et la révolution qu’elle amena sont proclamées par Jefferson heureuses pour la France et pour le monde. Dans une lettre de février 1815, adressée à M. de La Fayette, on voit en abrégé toute l’opinion de Jefferson sur les événements de notre Révolution, avec les changements qu’y avait apportés l’expérience ; il y rétracte son ancienne idée d’un accommodement possible en 89 ; il croit reconnaître, avec M. de La Fayette, que la France de 91 était mûre pour la constitution qu’on lui avait faite, si on n’avait voulu la pousser encore plus avant, au-delà de la monarchie.

373. (1874) Premiers lundis. Tome II « Quinze ans de haute police sous Napoléon. Témoignages historiques, par M. Desmarest, chef de cette partie pendant tout le Consulat et l’Empire »

Ce qui est certain, c’est que, quand Georges remit le pied en France sur la falaise de Biville, en août 1803, il n’avait plus pour but unique la mort du Consul et l’assassinat à tout prix ; cette mort était résolue évidemment ; il la fallait comme condition première de l’entreprise ; mais le coup se liait à des projets immédiats de remplacement : le 3 nivôse, comme le dit avec concision M.  […] Il n’est pas juste que la France souffre, tiraillée entre deux hommes… Moi dans sa position et lui dans la mienne, je serais son premier aide de camp… s’il se croit en état de gouverner… (Pauvre France !) […] Il conçut en ce moment l’idée de faire constater exactement l’état de la croyance religieuse et superstitieuse en France. […] Il en résulta que la France presque en masse vivait sur des croyances abondantes, qu’elles fussent ou non grossières.

374. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lessing »

La France possédait encore le maigre Voltaire, plus maigre, comme génie dramatique, que sa statue de squelette par Pigalle. […] Si nous voyons figurer parmi elles Rodogune, Mérope, et le Comte d’Essex, c’est que décemment on ne pouvait omettre ce qu’il y avait de plus français en France : — des tragédies françaises, — mais le gros du lot qui passa sur ce théâtre fut des pièces de Destouches comme la Fausse Agnès et le Tambour nocturne ; la Mélanide de La Chaussée ; le Sidney de Gresset ; les Fausses confidences de Marivaux ; Zelmire et le Siège de Calais par de Belloy ; Cénie de madame de Graffigny ; l’Avocat Patelin, etc., etc., etc. […] Il abattit souvent mainte tête qu’il eut la cruauté de relever pour bien montrer qu’elle était vide… » Ironique et spirituel, il tournait dans ses feuilletons contre la France, les théâtres et les influences françaises, les deux qualités françaises qui le rendent si cher à Heine, lequel les avait aussi ! […] Il y avait dans Diderot quelque chose de béat, de pédant, de mystique, d’yeux fermés (on dit qu’il parlait les yeux fermés et je le crois), qui ne pouvait jamais être dans Lessing, cet homme qui n’est jamais dupe de rien, pas même de lui, et dont l’œil attentif est ouvert comme celui d’un archer qui vise… Avec Henri Heine, qui l’a jugé, Lessing est peut-être le seul allemand d’esprit comme nous entendons l’esprit en France, où on ne l’entend que là… Il était le seul qui pût se mesurer avec Voltaire et que Voltaire ne faisait pas trembler. […] C’était Shakespeare, sans lequel rien n’existerait : ni Goethe, ni Schiller en Allemagne, ni même Victor Hugo en France !

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