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538. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre V. Harmonies de la religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain. — Chapitre II. Harmonies physiques. — Suite des Monuments religieux ; Couvents maronites, coptes, etc. »

Je préfère ces lieux où l’âme, moins distraite, Même au sein de Paris, peut goûter la retraite : La retraite me plaît, elle eut mes premiers vers. […] Ces chars tumultueux où s’assied l’opulence, Tous ces travaux, ce peuple à grands flots agité, Ces sons confus qu’élève une vaste cité, Des enfants de Bruno ne troublent point l’asile ; Le bruit les environne, et leur âme est tranquille. […] Le son sous cette voûte expire lentement ; Et quand il a cessé l’âme en frémit encore. […] Et toi dont le nom seul trouble l’âme amoureuse, Des bois du Paraclet vestale malheureuse, Toi qui, sans prononcer de vulgaires serments, Fis connoître à l’amour de nouveaux sentiments ; Toi que l’homme sensible, abusé par lui-même, Se plaît à retrouver dans la femme qu’il aime, Héloïse ! […] L’imagination, vers tes murs élancée, Chercha le saint repos, leur long recueillement ; Mais mon âme a besoin d’un plus doux sentiment.

539. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Le Conte de l’Isle. Poëmes antiques. »

Il se fait, autant qu’il le peut, l’âme indienne, et devient, de parti pris et travaillé, métaphysicien et mystique à la façon de ces grands peuples fous, qui portent, comme la peine des races favorisées, et par conséquent plus coupables, le poids sur leur intelligence de quelque colossale insanité ! […] Parfois, comme un soupir de leur âme brûlante, Du sein des épis lourds qui murmurent entre eux Une ondulation majestueuse et lente S’éveille… et va mourir à l’horizon poudreux. […] Or, l’âme est plus grande qu’un soleil. […] Le sentiment qui a inspiré tant de poésies à tant de poètes et qu’on retrouve à travers tout dans le cœur des hommes, l’amour, l’âme du lyrisme humain, il ne le connaît pas, il ne l’a jamais éprouvé. […] On juge, à le voir rouler en se débattant dans cette vacuité de pensées, dans ce vortex du rien où il meurt, de la solidité d’articulations qui était en lui et qui eût pu l’élever dans l’éther du ciel poétique, s’il avait eu seulement un peu d’âme, — un peu d’âme qui est l’haleine du poète et qui lui permet de monter haut !

540. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « Mme DESBORDES-VALMORE. (Pauvres Fleurs, poésies.) » pp. 115-123

Elle n’est pas de ces âmes pour qui la poésie n’a qu’un âge, et qui, en avançant dans cette lande de plus en plus dépouillée qu’on appelle la vie, s’enferment, se dérobent désormais, se taisent. […] le tendre poëte nous remet sur la mort de sa mère, sur ce legs de sensibilité douloureuse qui lui vient d’elle, et qui, d’abord obscur, puis trop tôt révélé, n’a cessé de posséder son cœur : Comme le rossignol, qui meurt de mélodie, Souffle sur son enfant sa tendre maladie, Morte d’aimer, ma mère, à son regard d’adieu Me raconta son âme et me souffla son Dieu Triste de me quitter, cette mère charmante, Me léguant à regret la flamme qui tourmente, Jeune, à son jeune enfant tendit longtemps sa main, Comme pour le sauver par le même chemin. […] En effet, le tourment de l’âme a passé souvent dans l’accent de la muse. […] A travers les monts et les nues Où l’exil se traîne à genoux, Dans nos épreuves inconnues, Ame de feu, plane sur nous ! […] Ainsi, page 281, dans la piece intitulée les Deux Chiens, au lieu de : laissez-leur ce bazar, il faudrait : laissez-leur ce hasard ; et page 321, dans l’Ame en peine, au lieu de : je ne peux m’étendre, il faudrait : je ne peux m’éteindre.

541. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Dierx, Léon (1838-1912) »

donnent l’impression d’un deuil d’âme occulte et glaçant. Ses vers, pareils à des diamants pâles, respirent un tel détachement de vivre, qu’en vérité… ce serait à craindre quelque fatal renoncement chez ce poète, si l’on ne savait pas que, tôt ou tard, les âmes limpides sont toujours attirées par l’espérance. […] Et, se promenant dans cette allée de hauts arbres qui se rouillent, le poète évoque le grand accord des choses, non leurs larmes, il sait qu’elles n’en ont point, mais leur grand et unanime consentement à la langueur, leur appétit de nirvâna, leur désir de fusion dans la nuit, qu’y lisent ou que leur prêtent les grandes âmes teintées de tristesse contemplative. […] Et cette âme de la nuit est encore une femme aux beautés magnifiques, mais un spectre silencieux. […] Ce poète, ce pur parleur aux âmes, c’est Léon Dierx.

542. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Lettre, à Madame la comtesse de Forbach, sur l’Éducation des enfants. » pp. 544-544

Je l’aime mieux pour lui, pour moi, pour tous ceux qui l’environneront, avec une belle âme, qu’avec un beau génie. […] Quand un méchant pourrait être véritablement grand, comme il serait du moins incertain s’il ferait le malheur ou le bonheur de sa nation, je voudrais encore qu’il fût bon. » Je me suis demandé comment je le rendrais bon ; et je me suis répondu : En lui inspirant certaines qualités de l’âme qui constituent spécialement la bonté. […] Je me suis demandé comment on inspirait la fermeté à une âme naturellement pusillanime ; et je me suis répondu : En corrigeant une peur par une peur ; la peur de la mort, par celle de la honte. […] Avec une âme juste et ferme, j’ai désiré que mon enfant eût un esprit droit, éclairé, étendu. […] Conduite de la considération des individus à celle des masses, l’âme s’habitue à s’occuper de grandes choses, à s’en occuper sans effort et sans négliger les petites.

543. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Il est complet ; il est beau par la peinture de l’âme violente de Rita, de l’âme incertaine d’Allmers et de leur souffrance à tous deux. […] Ma vraie complémentaire, c’est l’âme sublime d’Hélène. […] Est-ce pour la qualité de leur âme ? […] Le premier Dumas était une âme naïve. […] Paul Déroulède a évidemment une âme excellente.

544. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

Elle est trop jeune pour pouvoir porter deux âmes. […] Pour converser avec l’infini, il ne faut que de la bonne volonté, du silence et une âme. […] Il s’en est écarté et il est entré en lui-même, seule demeure digne d’une âme délicate. […] Charbonnel parle à beaucoup d’âmes et qu’il fut salutaire à beaucoup d’inquiétudes. […] Une odeur de violettes excite mon âme à se défaire !

545. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre IV. Shakspeare. » pp. 164-280

une action pareille — arrache l’âme du corps des contrats, —  et fait de la douce religion — une rapsodie de phrases. […] C’est alors que l’âme passionnée, incapable de se maîtriser, telle que Shakspeare sait la peindre, éclate tout entière. […] Hamlet est une âme délicate, d’une imagination passionnée comme celle de Shakspeare. […] L’âme délicate de Shakspeare, froissée par les chocs de la vie sociale, s’est réfugiée dans les contemplations de la vie solitaire. […] Quelle âme !

546. (1869) Philosophie de l’art en Grèce par H. Taine, leçons professées à l’école des beaux-arts

Concevez des âmes neuves et primitives qui, pour toute éducation et pour éducation incessante, ont de pareils spectacles. […] C’est un beau pays qui tourne l’âme vers la joie et pousse l’homme à considérer la vie comme une fête. […] Les trois traits principaux que nous avons démêlés dans leur caractère sont justement ceux qui font l’âme et l’intelligence de l’artiste. […] On peut le comparer à une contraction violente qui a infléchi l’attitude primitive de l’âme humaine. […] A ce stade et dans cette forme de la culture, on s’intéresse au corps ; l’âme ne l’a pas subordonné, rejeté au dernier plan ; il vaut par lui-même.

547. (1884) Cours de philosophie fait au Lycée de Sens en 1883-1884

On peut presque dire que rien ne s’y passe qui n’ait son écho dans l’âme. […] De la sensation pour lui dépend toute l’âme. […] Les limites de l’âme et du moi coïncident exactement. […] Quoi qu’on pense de la question de l’immatérialité de l’âme, il faut reconnaître que des modifications physiologiques sont toujours nécessaires aux modifications de l’âme. […] Il n’y a donc jamais de cas où l’âme dorme complètement.

548. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Marion, Joseph »

Marion, Joseph [Bibliographie] Le Poème de l’âme (1896). […] Charles Fuster C’est toute la vie d’une âme, d’une âme de poète assoiffée d’idéal, débordant de tendresse ; — ce sont ses aspirations, ses rêves, ses douleurs.

549. (1926) La poésie pure. Éclaircissements pp. 9-166

Comment se peut-il qu’une âme immortelle dépende étroitement de l’argile qui l’emprisonne, et qui ne vit que par elle ? […] C’est là un de ces pièges que tend le dictionnaire aux âmes simples. […] » les seconds, de toute leur bienveillance, de toute leur âme, voudraient me donner raison. […] Souday, n’y aurait-il pas une " âme de vérité ? […] Lui seul inspire les arguments, il en est l’âme, et ce sont eux qui, abandonnés à eux-mêmes, travaillent tout de travers.

550. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

La réalité de l’âme ne réside donc pas pour Balzac dans la seule pensée. […] C’est la loi commune de toute âme qui grandit. […] Mon âme en est toute déchirée. […] Conciliez, si vous le pouvez, ces tendances follement disparates d’une même âme ! […] C’est son amour, avec ses joies, ses peines, ses espérances, ses regrets qu’il incarne dans ces symboles, et, tout d’un coup, l’autre moitié de cette âme étrange, « âme malade reniant Dieu et reniant les anges, âme maudite et damnée », apparaît à son tour.

551. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Coppée ne se donne pas toujours la peine d’en dégager l’âme. […] » demande le Sauveur des âmes à toutes deux. […] Je puis faire maintenant quelques modestes réserves d’une âme plus tranquille. […] Zola simplifie les âmes. […] L’âme d’une pareille masse, ce sont des instincts fort simples.

552. (1895) Hommes et livres

Un vers suffit à la transformation d’une âme. […] Ils ont décrit l’un et l’autre une fermeté d’âme commune en leur temps, et l’idéal où cette forme d’âme tendait. […] Le climat ne peut influer sur les âmes, que s’il influe d’abord sur le corps, et le corps ensuite sur l’âme. […] Ce qui n’était que le frein des âmes en est devenu le ressort. […] Voilà la disposition des âmes françaises qui se révèle avec Figaro.

553. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Mon âme en est toute déchirée. […] Ils se sont reconnus et aimés dans cette âme double. […] Je ne connais point son âme ; mais sa beauté rétablirait la balance. […] Et de même, l’âme inquiète de Serenus et l’âme désenchantée du vieil Abd-er-Rhaman nous racontent les âmes plus voisines de nous, de M.  […] Eux aussi, on dirait qu’ils « ne savent que leurs âmes ».

554. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre premier. Que le Christianisme a changé les rapports des passions en changeant les bases du vice et de la vertu. »

Un de nos plus doux sentiments, et peut-être le seul qui appartienne absolument à l’âme (les autres ont quelque mélange des sens dans leur nature ou dans leur but), c’est l’amitié. […] Le principe de nos amitiés n’est point dans ce monde : deux êtres qui s’aiment ici-bas sont seulement dans la route du Ciel, où ils arriveront ensemble, si la vertu les dirige ; de manière que cette forte expression des poètes, exhaler son âme dans celle de son ami, est littéralement vraie pour deux chrétiens. En se dépouillant de leur corps, ils ne font que se dégager d’un obstacle qui s’opposait à leur union intime, et leurs âmes vont se confondre dans le sein de l’Éternel. […] Cette curiosité conduit peu à peu à douter des choses généreuses ; elle dessèche la sensibilité, et tue pour ainsi dire l’âme : les mystères du cœur sont comme ceux de l’antique Égypte : le profane qui cherchait à les découvrir sans y être initié par la religion, était subitement frappé de mort.

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