Marc Monnier, autant que sa personne, ont laissé parmi vous un profond souvenir. […] Les écrivains se laissent prendre à toutes les idées qui flottent dans l’air, sans, hélas ! […] Il va sans dire qu’elle laisse le champ libre à ces aimables feuilletons qui renseignent au jour le jour le public sur les écrits contemporains.
Il écrit à Racine les vers suivants : Et qu’importe à nos vers que Perrin les admire, Que l’auteur du Jonas s’empresse pour les lire ; Qu’ils charment de Senlis le poète idiot127, Ou le sec traducteur du français d’Amyot, Pourvu qu’avec éclat leurs rimes débitées Soient du peuple, des grands, des provinces goûtées, Pourvu qu’ils puissent plaire au plus puissant des rois, Qu’à Chantilly Condé les souffre quelquefois, Qu’Enghien en soit touché, que Colbert et Vivonne, Que La Rochefoucauld, Marsillac et Pomponne, Et mille autres qu’ici je ne puis faire entrer, À leurs traits délicats se laissent pénétrer ! […] Quand on a lu avec intérêt les lettres de madame de Sévigné, on peut concevoir que quelque chose rem péchait de se laisser aller au pathétique des premiers ouvrages de Racine, excepté à celui d’Andromaque. […] Il n’aurait pas dit qu’elle manquait de goût, car il a laissé échapper ce mot dans les notes qui ne paraissent pas avoir été destinées à l’impression.
Mais dès l’abord, ce me semble, on ne laisse pas de reconnaître en Pline un homme éclairé de son temps, un de ceux avec lesquels un homme éclairé du nôtre pourrait entrer en commerce immédiat et s’entendre, profiter et mettre du sien sans être choqué en rien d’essentiel et sans choquer à son tour ; avec qui, en un mot, on causerait de plain-pied comme avec un de ses pairs. […] Savez-vous bien qu’on se moquait de Pline dans son temps, qu’on le raillait, lui amiral, général d’armée, de se livrer à ces recherches qui semblaient parfois minutieuses et frivoles, de s’en aller demander à l’étude des herbes et des simples je ne sais quelles recettes qu’il fallait laisser à Caton l’Ancien ? […] Lysandre, ayant demandé alors les noms des citoyens nouvellement morts dans Athènes, y reconnut aussitôt celui que le dieu voulait désigner, et laissa faire en paix ses funérailles.
À peine revenu d’Italie, et tandis qu’il lisait Cicéron et s’étudiait à sa forme oratoire, le beau Patru ne laissait pas de faire des ravages aux environs du Palais et du Châtelet. […] Le Maistre, avant de laisser imprimer ses plaidoyers (1656), les a remplis de citations de Pères de l’Église. […] Il s’y refusait sans faste, avec une dignité simple et qui laissait voir la hauteur naturelle de l’âme.
Il ne se laisse point prendre au beau langage de Rousseau, ni à ses fastueux dehors qui affichent la vertu : selon lui, « cet étrange alliage de bien et de mal rend le mal plus dangereux en le déguisant ». […] Louis XVI, après avoir rendu aux grands corps judiciaires et aux compagnies souveraines leur pouvoir de résistance, s’en repentait, et laissait son ministère essayer de les briser de nouveau ; le garde des Sceaux Lamoignon imposait militairement, le 8 mai 1788, les édits qui renversaient par toute la France la vieille magistrature, restreignaient les ressorts des parlements, établissaient des circonscriptions nouvelles, multipliaient les tribunaux, et constituaient à Paris une cour plénière à laquelle tout ressortissait. […] Le mépris que nous affectons pour un culte commun à tant de nations pourrait nuire à nos intérêts politiques et à nos relations commerciales ; car il n’est rien à quoi les hommes soient plus sensibles qu’au mépris qu’on laisse éclater contre leurs coutumes ou leur religion.
« La douceur des mœurs démocratiques est si grande que les partisans de l’aristocratie eux-mêmes s’y laissent prendre, et que, après l’avoir goûtée quelque temps, ils nesont point tentés de retourner aux formes respectueuses et froides de la famille aristocratique. […] Autrefois on s’en prenait à la Providence, on laissait les gouvernements tranquilles ; aujourd’hui on n’importune plus la Providence, mais on s’en prend aux gouvernements. […] Il faut donc louer Tocqueville précisément à cause de la généralité de ses vues, qui ne nous enchaînent pas à telle application plutôt qu’à telle autre, et qui, mettant à notre disposition des principes excellents, nous laissent libres de juger de la mesure et des moyens de l’exécution.
Ils éliminent les faux amis de la littérature, ceux qui ne liraient que s’il n’y avait pas d’autre distraction, ni d’autre passe-temps, gens par conséquent de très peu de goût, n’ayant pas la vocation et qui alimenteraient autant la basse littérature que la bonne et plutôt celle-là que celle-ci ; et ils laissent intacte la troupe de ceux qui sont véritablement nés pour lire. […] La Bruyère a très bien indiqué pourquoi l’on a honte de pleurer au théâtre, tandis que l’on n’a point honte d’y rire : « Est-ce une peine que l’on sent à laisser voir que l’on est tendre, et à marquer quelque faiblesse surtout en un sujet faux et dont il semble que l’on soit là dupe ? » Assurément c’est cela, tandis que, pour ce qui est de rire, on s’y laisse aller plus facilement parce qu’on est moins dupe et l’on fait moins figure de dupe en riant qu’en pleurant, le rire vous laissant toute liberté d’esprit et les pleurs marquant qu’on l’a perdue, et qu’on est pénétré jusqu’au fond et possédé par le sujet et par l’auteur.
Plus d’une fois, sans doute et surtout en dernier lieu, on a voulu dénaturer cet esprit militaire, en le faisant servir à la conquête ; mais il sera toujours l’amour de la gloire acquise par le danger, car le Français ne se laisse pas conduire seulement par le sentiment du devoir, trop sec et trop métaphysique pour lui ; enfin cet esprit militaire est protecteur avant tout ; il doit donc toujours tendre à redevenir de la chevalerie. […] La révolution a fait perdre aux femmes de leur influence, mais elle leur a laissé l’empire de nos mœurs, que rien ne pourra leur arracher. […] Autant que, je puis le croire, du temps de Henri IV les peuples se laissaient encore guider par les affections.
Ce rude travailleur en choses éphémères, ce bénédictin de robe… trop courte, avec ses vastes connaissances, son encyclopédisme littéraire, son amour des idées et de tout ce qui ressemblait à une idée, son besoin plus pressant que sûr de généraliser, son style fringant, piquant, brillant et trempé aux sources de tous les idiomes, Philarète Chasles, n’a pas laissé, en somme, un grand livre pense et voulu, construit avec art, ferme sur sa base, une œuvre centrale, enfin, qui eût donné exactement sa mesure et qui aurait empêché de la chercher confusément, ainsi qu’on le fait aujourd’hui, dans des travaux éparpillés, — disjecta membra poetæ . Il faudra des curieux et des travailleurs comme il l’était, des espèces de Tallemant des Réaux dans l’avenir, pour pouvoir parler, en science de cause, de cet homme qui fut un très éblouissant feu follet littéraire, lequel, comme les feux follets, errait et ne se fixait pas, et qui a oublié de laisser derrière lui le livre un, profond et complet, qu’il était très capable de faire, — le livre qui eût été un fût de colonne sur sa tombe effacée, et qui en eût marqué la place aux yeux de la Postérité ! […] Le lion s’est laissé rogner les ongles, par son amour de l’Angleterre, dans cette suite d’articles de revue ou de journal, réunis sous un titre commun après avoir été écrits et dispersés à des dates différentes.
Et, dans ce cas-là, il y aurait encore la question de la ressemblance et de la vérité à débattre… Mais si cette Rolande, qui est la reine de ce roman et qui doit emporter avec elle l’intérêt humain du livre, au lieu d’être un monstre social n’est plus qu’une exception, un fait particulier de tératologie, enfin un monstre individuel, le chêne n’est pas responsable des champignons vénéneux qui croissent sur ses racines et je n’ai plus rien à dire à des romanciers qui ont — selon ma poétique, à moi — le droit de tout peindre, s’ils sont vraiment des peintres puissants… Seulement, il reste ceci entre nous : ont-ils peint leur monstre individuel avec le sentiment qu’ils auraient dû mettre dans leur peinture pour qu’une telle horreur fût sauvée par la beauté de la peinture et par l’impression, tragiquement morale, qu’elle devrait laisser dans les cœurs ? […] Donc, cette cocotte à blason, qui se laisse mener, comme toutes ces filles-là, par sa femme de chambre (son habilleuse) et par son coiffeur, prend pour de l’argent comme amant son beau-frère, qu’elle vole à sa sœur, et, maîtresse impure d’un cabotin, devenu communard, finit par se marier à un Prussien, pendant que Paris flambe encore ! […] Mais laissons cette prophétie.
Même après cette élimination, il restera assez d’œuvres littéraires qui semblent difficiles à classer ; qu’on en considère l’esprit, le tempérament, l’intention, sans se laisser dérouter par leur forme ; et l’on verra quelles se rattachent, ne fût-ce que de loin, au genre lyrique, ou épique, ou dramatique. […] Laissons de côté l’idylle, le poème héroï-comique, et ce « nouveau genre d’épopée » que la subtilité de Chapelain découvrait dans l’Adone de Marini ; ce sont là des catégories trop évidemment factices ; mais arrêtons-nous à la satire pour laquelle on a voulu monopoliser certaines formes, et dont on fait un « genre » bien à tort. […] Ce qui importe avant tout, dans l’étude d’une œuvre littéraire, c’est l’élément générateur ; qu’on ne se laisse dérouter ni par les éléments accessoires ni par la forme qui, souvent, n’est pas adéquate, mais simplement empruntée à la tradition ou à la mode3.
Non pas qu’il soit tenu à les calculer par avance avec une précision implacable qui ne laisse aucun champ à la fantaisie de l’acteur : cet excès figerait l’ouvrage. […] Il manqua aux auteurs dramatiques du Moyen-Âge, avec une langue plus mûre, un métier dramatique suffisamment évolué : ils ne nous ont laissé qu’un embryon de drame. […] la tradition gréco-latine ne s’était jamais laissé interrompre et notre Moyen-Âge s’en était nourri ? […] L’intrigue le captive, le verbe l’étourdit ; le jongleur ne lui laisse pas le temps de se reprendre. […] En principe, le public n’a pas de préférences ; il se laisse prendre par où l’on veut le prendre, à condition qu’on le prépare à être pris.
Dirons-nous que l’auteur se laisse mener par les mots ? […] Laissons de côté la question de savoir si Valéry écrit facilement. […] Plus que tout autre, chacun de ces poèmes nous laisse croire qu’il a été fait sans but, pour obéir à cette vis a tergo qui se confond avec l’inspiration. […] L’éternité qui fond dans le néant pour laisser sur son passage la trace aiguë d’un moment. […] Les images se suivent avec une perfection logique et une suite musicale qui ne laissent rien à désirer.
Sa pensée, toujours déchirée par de laborieux enfantements, n’emplissait qu’à grand-peine les sinuosités du rythme et y laissait souvent des lacunes partout.
Pour n’être pas neuve, cette petite fête ne laisse pas d’être agréable, et nous ne serons jamais las de retourner aux Trianons jolis, où nous passons tous, inévitablement, comme nous passâmes, jadis, par les chevaliers et les départs pour la Terre-Sainte.
Son éloquence fut plus célebre dans son temps, qu’elle n’est estimée aujourd’hui, d’après les Ouvrages qu’il nous a laissés.
Né avec de l’ardeur pour l’étude des Lettres, & formé par l’Abbé Desfontaines, il se seroit fait plus de réputation, si les devoirs de son état (il étoit Cheveau-Léger) lui eussent laissé plus de loisir pour cultiver son esprit & épurer son goût.
Ainsi, le Monde Littéraire a toujours été partagé en différentes factions, sans cesse occupées à se faire la guerre, sans laisser aucun résultat qui pût fixer les idées du Public.
Cet Auteur a laissé des Mémoires sur la Vie du Cardinal de Retz, très-recherchés, malgré l'originalité de ceux que le Cardinal a écrits lui-même.
Ce Poëte n'a travaillé que pour les Histrions de la Foire, ce qui l'a fait surnommer le Voltaire des Boulevards : aussi est-il, dit-on, fort célebre parmi les Danseurs de corde & tout le petit peuple baladin, qui le regardent comme un Grand Homme, & qui l'ont néanmoins laissé mourir dans un Hôpital.
Il n’y avait point d’art pour eux en dehors des modèles laissés par les admirables artistes de la Grèce et par leurs disciples de la grande période italienne. […] Bravement, Tolstoï se laissa entraîner au théâtre, où il ne va que très rarement. […] Sa composition laissera une impression tout autre que celle qu’il en attendait ; elle fera rire. […] Nietzsche se laisse égarer ici par ses aspirations personnelles : il cesse d’être objectif, il ne tient plus compte de ce que l’auteur avait en vue. […] C’est un singulier travers chez Nietzsche de ne rien laisser subsister de ceux qu’il a surmontés.
Ces soi-disant observateurs ne vivent pas, pour cette raison très simple qu’ils ne se laissent pas vivre. […] La morale disparaît, pour laisser la place au seul jeu des énergies, soumises à un unique principe, celui de la concurrence vitale. […] Ce sont pourtant des valeurs, et que l’intérêt vital du pays est de ne pas les laisser se perdre, inutilisées. […] Imaginez qu’Alfred de Musset, mort en 1857, ait laissé un fils né en 1856. […] Or, plus elle sera dure, plus elle laissera cet adversaire brisé pour longtemps.
Maxime Gaucher Le poète de Cris d’amour admire les grands lutteurs qui ne se sont pas laissés terrasser dans le combat de la vie.
Ses Poèmes de la mort attestent sa fidélité à un art sévère, au culte respectueux de la rime, à un procédé qui ne laisse rien au hasard.
de Thou, commencée par du Ryer, & laissé une excellente Traduction de la Rhétorique d’Aristote.
Il auroit poussé plus loin le génie de l’invention, si sa pétulance naturelle lui eût laissé le temps de combiner & de perfectionner ses découvertes.
Durival, que les Articles qu’il a fournis au Dictionnaire Encyclopédique, ne laissent rien à désirer du côté de l’ instruction.
Hermant a laissé beaucoup d’autres Ecrits, tels que les Vies de S.
La Traduction qu’en a donnée l’Abbe Bosquillon, sans en faire sentir tout le mérite, ne laisse pas d’être élégante & de donner une idée des beautés qu’elle contient.
Sans avoir rien laissé d’achevé & de capable de lui faire une réputation solide, tout ce qui est sorti de sa plume décele le germe des plus heureux talens.
Elle étoit niece du fameux Poëte Bertaud, Evêque de Séez, & nous a laissé des Mémoires pour servir à l’Histoire d’Anne d’Autriche, mere de Louis XIV.
Les Ouvrages qu’il a laissés sur les Médailles, tous écrits en Latin, ont servi & peuvent servir encore à éclaircir plusieurs points d’Histoire.
Soucieux de conserver tout ce qu’a produit ce rare esprit, nous n’avons pas cru devoir nous laisser arrêter par les considérations qui l’auraient arrêté lui-même, et il nous a semblé que, prise isolément, chacune des études que nous présentons aujourd’hui offrait un assez haut intérêt pour honorer encore la mémoire d’Émile Hennequin et pour entretenir les regrets de ceux qui ont vu disparaître avec lui une des plus belles intelligences et l’un des plus purs talents de la jeune génération.
Les facultés et qualités qu’il réunit, et dont quelques-unes peuvent se masquer l’une l’autre étant serrées comme en faisceau, se dédoublent quelquefois, se divisent chez de proches parents moins complets, et se laissent mieux mesurer isolément. […] Racine fut bien au-dessus de Pradon, il ne laissait pas de le regarder comme une espèce de concurrent, surtout quand il sut que Pradon composait en même temps que lui la tragédie de Phèdre par émulation, et qu’il avait doublé celle de M. […] Le récit qu’on vient de lire et qui ne laisse rien à désirer, ce me semble, pour la précision et l’exactitude, nous permet aujourd’hui de faire à chacun sa part. […] Puis il se mit à publier une édition de ses Œuvres : « J’ai longtemps résisté, disait-il dans sa préface, aux sollicitations d’amis trop prévenus en ma faveur, qui me pressaient de faire imprimer ces mélanges ; mais à mon âge de quatre-vingts ans, on perd la force de résistance comme toutes les autres, et je me suis laissé persuader. » On put mieux juger de ses Fables, lorsqu’on les lut enfin recueillies. […] Vous avez des amis qui vous suppléeront dans la besogne de vos affaires personnelles ; et, quant à celles d’autrui, laissez-les dormir en dormant vous-même.
Car alors, au lieu de voir en elle une usurpatrice qu’il fallait expulser, elle eût reconnu en elle une sœur aînée à qui l’on doit laisser sa part. […] Ce qu’on peut dire de mieux en faveur « d’une nation policée394 », c’est que ses lois, coutumes et pratiques se composent « pour moitié d’abus, et pour « moitié d’usages tolérables » Mais sous ces législations positives qui toutes se contredisent entre elles et dont chacune se contredit elle-même, il est une loi naturelle sous-entendue dans les codes, appliquée dans les mœurs, écrite dans les cœurs. « Montrez-moi un pays où il soit honnête de me ravir le fruit de mon travail, de violer sa promesse, de mentir pour nuire, de calomnier, d’assassiner, d’empoisonner, d’être ingrat envers son bienfaiteur, de battre son père et sa mère quand ils vous présentent à manger. » — « Ce qui est juste ou injuste paraît tel à l’univers entier », et, dans la pire société, toujours la force se met à quelques égards au service du droit, de même que, dans la pire religion, toujours le dogme extravagant proclame en quelque façon un architecte suprême Ainsi les religions et les sociétés, dissoutes par l’examen, laissent apercevoir au fond du creuset, les unes un résidu de vérité, les autres un résidu de justice, reliquat petit, mais précieux, sorte de lingot d’or que la tradition conserve, que la raison épure, et qui, peu à peu, dégagé de ses alliages, élaboré, employé à tous les usages, doit fournir seul toute la substance de la religion et tous les fils de la société. […] Une masse insensible, un fluide inerte. » Ajoutez-y de la chaleur, tenez le tout dans un four, laissez l’opération se faire : vous aurez un poulet, c’est-à-dire « de la sensibilité, de la vie, de la mémoire, de la conscience, des passions, de la pensée ». […] » Toutes les souillures qu’il a contractées lui viennent du dehors ; c’est aux circonstances qu’il faut attribuer ses bassesses et ses vices : « Si j’étais tombé dans les mains d’un meilleur maître…, j’aurais été bon chrétien, bon père de famille, bon ami, bon ouvrier, bon homme en toutes choses. » Ainsi la société seule a tous les torts Pareillement, dans l’homme en général, la nature est bonne. « Ses premiers mouvements sont toujours droits… Le principe fondamental de toute morale, sur lequel j’ai raisonné dans mes écrits, est que l’homme est un être naturellement bon, aimant la justice et l’ordre… L’Émile en particulier n’est qu’un traité de la bonté originelle de l’homme, destiné à montrer comment le vice et l’erreur, étrangers à sa constitution, s’y introduisent du dehors et l’altèrent insensiblement… La nature a fait l’homme heureux et bon, la société le déprave et le fait misérable412. » Dépouillez-le, par la pensée, de ses habitudes factices, de ses besoins surajoutés, de ses préjugés faux ; écartez les systèmes, rentrez dans votre propre cœur, écoutez le sentiment intime, laissez-vous guider par la lumière de l’instinct et de la conscience ; et vous retrouverez cet Adam primitif, semblable à une statue de marbre incorruptible qui, tombée dans un marais, a disparu depuis longtemps sous une croûte de moisissures et de vase, mais qui, délivrée de sa gaine fangeuse, peut remonter sur son piédestal avec toute la perfection de sa forme et toute la pureté de sa blancheur. […] Si nous n’intervenions pas, si nous ne leur imposions pas de contrainte, si nous laissions toutes ces sources vives couler sur leur pente, si nous ne les emprisonnions pas dans nos conduits artificiels et sales, nous ne les verrions jamais écumer ni se ternir.
Yanini, brûlé à Toulouse en 1619, laissa des disciples dans notre midi : Théophile l’y a connu. […] A douze ans, le petit Blaise, dont on ménageait la délicatesse, donne de telles marques de son goût pour les mathématiques, que son père se décide à le laisser s’y appliquer librement : à seize ans, un de ses travaux, un traité des sections coniques, étonnait Descartes ; puis il s’occupe d’applications pratiques ; il construit une machine à calculer. […] Il y travailla tant qu’il put, au milieu de souffrances aiguës : la maladie maintenant ne le laissait plus. […] Mais doit-on oublier que c’est là un des expédients nécessaires par lesquels s’est faite l’adaptation du christianisme à son rôle de religion universelle, et que ces subtilités de procédure théologique qui aboutissent à tourner la loi par la considération des espèces, ont l’avantage de laisser théoriquement entier l’idéal chrétien ? […] L’Église laissait à la liberté des fidèles l’option entre les systèmes qui concilient le libre arbitre et la grâce, celui de saint Thomas, où domine la grâce, et celui du jésuite Molina, où domine la liberté.
L’histoire littéraire du temps laisse une lugubre impression de vide. […] Comment laisser de côté Lamennais, qui, vers la même époque, faisait entrer dans ses ardentes tirades : l’évangile, la liberté, la démocratie, la Pologne, éléments bien divers qu’unissait pourtant un grand souffle de fraternité, un amour sincère et violent des petits et des opprimés ? […] Ils ne sont pas toujours les plus laborieux ; comme il leur est permis de produire peu, ils sont enclins à une certaine nonchalance ; ils laissent volontiers leurs facultés naturelles s’arrêter au demi-talent des amateurs ; mais en revanche ils peuvent se payer le luxe d’une indépendance de pensée qui décèle leur sécurité et d’un raffinement de forme qui prouve leur loisir. […] Il a laissé subsister côte à côte de grands seigneurs de la littérature et des affamés. […] Les titulaires des charges lucratives que l’Eglise laisse s’égarer sur la tête de mondains plus recommandés que recommandables croient devoir, tout au moins sur la fin de leur vie, rimer une paraphrase des psaumes, et de là ces milliers de vers dévots qui ont trop souvent l’air d’avoir été composés pour la pénitence des lecteurs autant que des auteurs.
Michel Abadie « de qui l’œuvre illustre en nos rêves demeure inconnue28 », est tour à tour grandiloquent, emphatique, pathétique et fastueux, comme on disait jadis, mais il vaut mieux que les lourdes louanges de ses amis ne tendent à le laisser croire. […] Et lorsqu’elle laisse à découvert sa gorge brune et nue, qui donc songerait à ses vêtements disparates ou à son geste incorrect. […] André Lebey traduisit les poésies de Sappho et se laissa gagner à toutes les formes successives que voulurent revêtir pour lui plaire, les Muses. […] Il semble avoir dérobé à chaque maître son secret pour en composer de longues laisses de vers d’une harmonieuse souplesse sans monotonie. […] Vous me jurez votre bonheur initial, Et que de moi vous vient la force et la noblesse Du génie, et qu’en vous mon seul sourire laisse Comme un dépôt sacré tout l’espoir nuptial.
Me laisser éponger mon Moi par l’Absolu. […] Dans une flache laissée par l’inondation du mois précédent, elle me fit remarquer de très petits poissons. […] Une voyageuse que… Jacques frôle dérobée dans sa fourrure, lui laisse une fuyante luisance. […] Aux fleurs marcescentes du minuscule parterre, elle laisse un pitoyant regard. […] La ternissure du jour choit vers les trottoirs où la pluie a laissé des marbrures sombres.
Quand un homme se lève de grand matin pour nous annoncer que l’Église éternelle est morte, il est tenu de mettre à la place, dans ce vide profond qu’elle va laisser, quelque chose qui remplisse mieux que cette pancarte : La Déclaration des droits ! […] IX Un point de vue qu’on promène partout ou qu’on retrouve partout, tant on s’en est laissé frapper, ne constitue pas une philosophie. […] Il n’y a dans le démocrate Proudhon rien qui rappelle ce bel oiseau aristocratique, qu’il faut laisser, pour objet de comparaison, aux reines et aux impératrices. […] Il n’eût pas été, comme saint Jérôme, hanté du fantôme des femmes qu’il aurait laissées dans les villes, et dont les images, plus puissantes que la réalité, l’eussent fait se tordre de désirs et d’épouvante sur l’arène de sa caverne. […] Il ne se serait jamais vautré dans les bras sacrilèges de la religieuse de Luther, Et toujours plus tard, plus tara encore, au xviie siècle, par exemple, il eût été très bien l’abbé Proudhon, un théologien qui aurait passé, haut la main, de magnifiques thèses en Sorbonne, comme, au xixe siècle, il concourait pour des prix à l’Académie des sciences morales et politiques, et il eût laissé derrière lui quelques traités de droit canon et d’érudition religieuse.
Il vaut mieux laisser les Productions étrangeres dans l’oubli, quand on ne sait pas en faire un choix éclairé ou leur donner une nouvelle vie, que de les exposer à l’opprobre d’une seconde mort ; ce qui est arrivé précisément à tout ce dont M.
Deux fils qu’il laissa, furent aussi Ministres, & écrivirent des Controverses, sans y mettre autant d’emportement que leur pere.
La maniere de ce Romancier moraliste n'est pas de la premiere élégance, ni d'une énergie bien frappante ; mais elle est simple, naturelle ; elle va droit au cœur, & y laisse de douces impressions.
Un homme comme Lycurgue, qui sait se posséder dans un pareil instant, s’arrête tout court, laisse tomber ses bras, a les deux jambes parallèles, et se laisse voir plutôt qu’il ne se montre.
Laissez-nous prendre comme lui le chemin des écoliers et des philosophes, raisonner à son endroit comme il faisait à l’endroit de ses bêtes, alléguer l’histoire et le reste. […] C’est à la science à prendre l’œuvre au point où la nature l’a laissée. […] Tant d’autres meurent sans laisser une trace dans la construction de la tour infinie ! […] On m’a dit que vous possédez même un biais pour rendre concevable l’immortalité des individus. » Nous ne pouvons pas laisser, même pour aujourd’hui, cette immortalité des individus ; car ce dogme de l’immortalité individuelle fait le point critique de presque toutes les doctrines ; c’est là que le critique attend le métaphysicien ; car c’est là que se révèlent les arrière-plans de l’espérance ; particulièrement ici le dogme de l’immortalité individuelle fera le point critique de la doctrine ; c’est à ce dogme en effet que nous allons reconnaître comment, dans les rêves de ce Théoctiste, l’humanité ou la surhumanité Dieu obtient sa mémoire totale ; nous y voyons dès les premiers mots qu’elle ne l’obtient point par une réelle résurrection des individus réels, qu’elle ne l’obtient point proprement par ce que nous nommons tous la résurrection des morts, mais que la surhumanité Dieu, dans les rêves de ce Théoctiste, obtient la totalisation de sa mémoire par une reconstitution historique, par une totalisation de l’histoire, par la résurrection des historiens, par le règne et par l’éternité de l’Historien. […] Mais, si on l’ouvre pour examiner l’arrangement intérieur de ses organes, on y trouve un ordre aussi compliqué que dans les vastes chênes qui la couvrent de leur ombre ; on la décompose plus aisément ; on la met mieux en expérience ; et l’on peut découvrir en elle les lois générales, selon lesquelles toute plante végète et se soutient. » Je me garderai de mettre un commentaire de détail à ce texte ; il faudrait écrire un volume ; il faudrait mettre, à chacun des mots, plusieurs pages de commentaires, tant le texte est plein et fort ; et encore on serait à cent lieues d’en avoir épuisé la force et la plénitude ; et je ne peux pas tomber moi-même dans une infinité du détail ; d’ailleurs nous retrouverons tous ces textes, et souvent ; c’était l’honneur et la grandeur de ces textes pleins et graves qu’ils débordaient, qu’ils inondaient le commentaire ; c’est l’honneur et la force de ces textes braves et pleins qu’ils bravent le commentaire ; et si nul commentaire n’épuise un texte de Renan, nul commentaire aussi n’assied un texte de Taine ; aujourd’hui, et de cette conclusion, je ne veux indiquer, et en bref, que le sens et la portée, pour l’ensemble et sans entrer dans aucun détail ; à peine ai-je besoin de dire que ce sens, dans Taine, est beaucoup plus grave, étant beaucoup plus net, que n’étaient les anticipations de Renan ; ne nous laissons pas tromper à la modestie professorale ; ne nous laissons d’ailleurs pas soulever à toutes les indignations qui nous montent ; je sais qu’il n’v a pas un mot dans tout ce Taine qui aujourd’hui ne nous soulève d’indignation ; attribuer, limiter Racine au seul dix-septième siècle, enfermer Racine dans le siècle de Louis XIV, quand aujourd’hui, ayant pris toute la reculée nécessaire, nous savons qu’il estime des colonnes de l’humanité éternelle, quelle inintelligence et quelle hérésie, quelle grossièreté, quelle présomption, au fond quelle ignorance ; mais ni naïveté, ni indignation ; il ne s’agit point ici de savoir ce que vaut Taine ; il ne s’agit point ici de son inintelligence et de son hérésie, de sa grossièreté, de son ignorance ; il s’agit de sa présomption ; il s’agit de savoir ce qu’il veut, ce qu’il pense avoir fait, enfin ce que nous voyons qu’il a fait, peut-être sans y penser ; il s’agit de savoir, ou de chercher, quel est, au fond, le sens et la portée de sa méthode, le sens et la portée des résultats qu’il prétend avoir obtenus ; ce qui ressort de tout le livre de Taine, et particulièrement de sa conclusion, c’est cette idée singulière, singulièrement avantageuse, que l’historien, j’entends l’historien moderne, possède le secret du génie.
Ces Lettres, qui donnent de Diderot philosophe l’idée la plus juste, montrent à quel point ce diable d’homme, abstracteur de quintessence comme pas un, malgré l’animalité de son esprit, et fait pour mieux que pour la doctrine à laquelle il s’est laissé aller comme on se laisse aller au libertinage, cherchait à mettre l’idéalisme dans un matérialisme affreux. […] Richardson et son admirable livre passèrent, sans y laisser de trace, à travers cet esprit ouvert, cette bouche de Gargantua littéraire qui avalait tout et qui ne s’assimilait rien. […] Sa plume, rapide comme sa parole, ne laissait pas plus de trace que des mots évanouis. […] Mais les directions mises en demeure ont refusé net une exhumation qui eût laissé le mort par terre. […] Il faisait des vers, en effet, comme il faisait toutes choses, mais moins bien qu’une foule de choses qui, dans ses œuvres, laissent pourtant beaucoup à désirer.
« J’ai laissé venir à moi, dit-il, toutes les sensations et toutes les images ; puis je fus guidé dans mon choix par l’instinct de mon cœur, comme je le suis dans l’obscurité par mes doigts habiles à reconnaître les objets familiers.
Plus sûr de sa forme, l’auteur a vu Paris et puisé à de nouvelles sources d’inspiration sans laisser tarir les anciennes.
En souvenir et en reconnaissance de cette constante harmonie qui m’a rendu facile et douce la carrière de professeur en pays étranger, j’ai voulu laisser à ceux et à celles dont je fus le maître un instrument de travail que j’eusse éprouvé par un long usage et qui leur permit de se passer de moi.
M. le Président Bouhier pensoit très-sagement qu’on ne devoit traduire qu’en vers les anciens Poëtes ; mais il auroit dû en laisser à d’autres l’exécution.
Tel est encore le sujet de l’Honnête Criminel, qui, à la faveur du sentiment qui y regne, n’a pas laissé de réussir sur des Théatres de Société.
JACOB, [Louis] Carme, Bibliothécaire du Cardinal de Retz, né à Châlons-sur-Saone, en 1608, mort à Paris en 1670 ; un de ces Ecrivains laborieux, qui n’ont d’autre mérite que celui des recherches, & dont les Ouvrages ne laissent pas d’être quelquefois très-utiles.
L’Histoire universelle, supérieurement envisagée, vient à l’appui de ces raisons, & ne laisse rien à désirer dans sa démonstration.
Ce qui la rend plus estimable encore, c’est de ne s’être point laissé corrompre par le faux air du Bel-Esprit, ou le ton précieux de sentence, si fort en vogue aujourd’hui.
Ses Ouvrages, sans le placer parmi les Auteurs du premier ordre, ne laissent pas d’avoir leur genre d’utilité.
Les onze volumes qui font de lui, contiennent quatorze Vies ; &, sans qu’on puisse les comparer à des Ouvrages du premier mérite, ils ne laissent pas d’annoncer des talens.
« Laissez-moi me féliciter, Général, de la bienveillance que je trouve en vous, et agréez l’expression de mon profond respect, « Sainte-Beuve. »
En disant cela, il tirait son propre horoscope ou plutôt il était lui-même la preuve de ces paroles… Assurément, c’était une forte génération que celle qui pouvait, sans se diminuer, laisser perdre de telles choses et oublier de tels talents.
Ces divers Ouvrages offrent cependant des traits qui laissent entrevoir que ce Poëte auroit pu beaucoup mieux faire, s’il se fût moins livré à sa facilité.
Quoique le style en soit fort négligé, ils ne laissent pas d’être fort recherchés.
Harduin ne laisse rien échapper ; il discute des points essentiels que nos Grammairiens les plus célebres avoient oubliés, & releve les fautes dans lesquelles ils étoient tombés.
Le moyen de ne pas s’échauffer quelquefois, quand on se laisse conduire par une imagination sans frein, ou par un esprit enthousiaste !
Pasquier laissa trois enfans, qui écrivirent tous trois, pour le venger des critiques du P.
Ce que nous savons certainement, c'est que, quoiqu'il ait beaucoup écrit en Prose & en Vers, il n'a pas laissé un seul Ouvrage qui vaille aujourd'hui la peine d'être lu.
Voilà pourquoi elle a été tant regrettée ; cependant, dans la réalité, elle ne fit que les ébaucher, tels que nous les avons trouvés dans les fables ; ces germes féconds nous ont laissé voir dans l’imperfection de sa forme primitive la science de réflexion, la science de recherches, ouvrage tardif de la philosophie.
Comme si elle avait voulu s’excuser par avance de laisser un testament durable de sa pensée — peut-être soupçonnait-elle que son lecteur en deviendrait un jour l’historien ? […] Laissons dire : il n’est rien comme les esprits brouillons pour mettre sur le compte de l’impuissance ce qui n’est qu’ordre et méthode dans l’art de composer. […] Son unique désir, c’est de la recommencer au point même où ses malheurs l’ont laissée. […] Il y a, dans ces strophes, tels visages aux contours suaves, telles lignes pliantes du corps, qui ne laissent aucun doute sur la vraie complaisance de l’artiste. […] Il ne se laisse pas éblouir, il ne perd pas un instant la tête.
Et en effet, dans cette période d’entreprise encore confuse et de méditation ardente où il se trouvait, il s’était dit, pour un temps, de s’affranchir par l’esprit de tout élément et ascendant étranger, de donner un libre cours à sa faculté intérieure, à ses impulsions et à ses impressions, de se laisser faire naïvement à tous les êtres de la nature, à commencer par l’homme, et d’entrer par là dans une sorte d’harmonie et d’intimité avec tout ce qui vit. […] Quoi qu’il en soit, il se fit Werther, ou, si vous aimez mieux, il se laissa être Werther pendant quelques saisons, sans l’être au fond véritablement. […] Attendez, laissez passer la saison, allez vous figurer qu’ainsi, selon le vieux précepte, vous les laisserez mieux mûrir et que vous saurez les perfectionner en les retardant : erreur et oubli de la fuite rapide des heures, de ces heures qui s’appellent aussi les grâces ! […] La fin de Werther laissait en vue et livrait aux regards du public un faux Goethe au lieu du vrai, un fantôme creux et trompeur après lequel la foule allait courir, comme Turnus dans le combat s’acharne à poursuivre le fantôme d’Énée qui l’égare, tandis que le véritable héros est ailleurs et dans le lieu de l’action.
C’est bien moins d’après tel ou tel mot détaché, que d’après l’habitude entière de son jugement, qu’il se laisse voir ainsi. […] La réception de La Bruyère à l’Académie donna lieu à des querelles, dont lui-même nous a entretenus dans la préface de son Discours et qui laissent à désirer quelques explications149. […] Il nous a tracé une courte histoire de la prose française en ces termes : « L’on écrit régulièrement depuis vingt années ; l’on est esclave de la construction ; l’on a enrichi la langue de nouveaux tours, secoué le joug du latinisme, et réduit le style à la phrase purement françoise ; l’on a presque retrouvé le nombre que Malherbe et Balzac avoient les premiers rencontré, et que tant d’auteurs depuis eux ont laissé perdre ; l’on a mis enfin dans le discours tout l’ordre et toute la netteté dont il est capable : cela conduit insensiblement à y mettre de l’esprit. » Cet esprit, que La Bruyère ne trouvait pas assez avant lui dans le style, dont Bussy, Pellisson, Fléchier, Bouhours, lui offraient bien des exemples, mais sans assez de continuité, de consistance ou d’originalité, il l’y voulut donc introduire. […] On se demande seulement si les effets de la tabatière avalée au souper de la veille ont bien pu retarder jusqu’au lendemain onze heures du matin ; c’est un cas de médecine légale que je laisse aux experts.
Chaque sensation tendant à renaître dans son image, la sensation deux fois répétée laissera après elle une tendance double, à cette condition pourtant que l’attention soit aussi grande la seconde fois que la première ; d’ordinaire elle ne l’est pas, parce que, la nouveauté diminuant, l’intérêt diminue ; mais si d’autres circonstances renouvellent l’intérêt, ou si la volonté fait son office, la tendance incessamment accrue accroîtra incessamment pour l’image les chances de résurrection et d’intégrité. […] Combes mentionne le cas d’un Irlandais, porteur commissionnaire d’une maison de commerce, qui, étant ivre, laissa un paquet à une fausse adresse, et, revenu à lui, ne put se rappeler ce qu’il en avait fait. Mais, s’étant enivré de nouveau, il se souvint de l’endroit où il l’avait laissé et y alla. » M. […] « Un homme de soixante ans et bien portant laisse se fermer un ulcère qu’il avait depuis longtemps à la jambe.
. — Lorsque seul, dans le silence, demi-couché dans un fauteuil, je me laisse aller à la rêverie, et que, par l’effacement des sensations ordinaires, la fantasmagorie interne devient intense, si le sommeil approche, mes images précises finissent par provoquer des hallucinations véritables. […] » — En d’autres termes, on l’imagine comme désolée et un instant après comme calme ; les deux représentations se contredisent, et, comme la seconde est munie de plus de soutiens, mieux liée à la somme de notre expérience antérieure, appuyée par l’ensemble de tous nos jugements généraux, c’est la première qui est niée, altérée, réprimée, jusqu’au moment où les incidents et souvenirs qui sont les promoteurs de sa rivale, disparaissant avec sa rivale, lui laisseront prendre à elle-même une autre minute d’ascendant. […] Or, si on laisse de côté l’entremise des nerfs, on trouve deux cas dans lesquels fonctionnent les centres sensitifs. — Tantôt ayant été mis en action une première fois par le nerf, ils persistent spontanément dans cette action et la répètent d’eux-mêmes, à plusieurs reprises, après que le nerf a cessé d’agir ; ce qui arrive notamment dans les illusions qui suivent l’usage prolongé du microscope, lorsque le micrographe, reportant les yeux sur sa table ou sur son papier, voit à un pied de lui de petites figures grises qui persistent, s’effacent et renaissent encore à quatre ou cinq reprises, toujours en pâlissant et en s’affaiblissant. — Tantôt les centres sensitifs fonctionnent par un choc en retour, lorsque des images proprement dites les provoquent à l’action. […] En effet, ce qui constitue le souvenir ou acte de mémoire, c’est l’image présente qu’a laissée en nous une sensation passée, image qui se trouve affectée d’un recul apparent et qui nous semble la sensation elle-même.
Mais ceci nous amène à la théorie de la vraisemblance, qui joue un rôle considérable dans l’ensemble de la doctrine de Boileau, et qui ne laisse pas d’en être une partie délicate et dangereuse. […] La science des artistes s’est étendue, l’intelligence du public s’est raffinée ; les uns cherchent à susciter, l’autre aime à ressentir des impressions plus complexes, qui doivent se fondre sans se confondre, et laisser subsister l’unité esthétique de l’œuvre. […] Même qui veut tout dire, ne fait rien voir et ennuie : il faut savoir se borner, et laisser faire à l’imagination du lecteur, en la touchant vivement au point qu’il faut. […] Enfin, voici le passage décisif, et qui ne laisse subsister aucun doute : Les grands mots, selon les habiles connoisseurs, font en effet si peu l’essence entière du sublime, qu’il y a même dans les bons écrivains des endroits sublimes dont la grandeur vient de la petitesse énergique des paroles, comme on le peut voir dans ce passage d’Hérodote, qui est cité par Longin : « Cléomène étant devenu furieux, il prit un couteau dont il se hacha la chair en petits morceaux, et s’étant ainsi déchiqueté lui-même, il mourut. » Car on ne peut guère assembler des mots plus bas et plus petits que ceux-ci : se hacher la chair en morceaux, et se déchiqueter soi-même.
Pour prendre la place qu’il laissait vide, deux hommes se présentèrent : l’année 1656 vit débuter dans la tragédie Thomas Corneille et Quinault. […] Tragédie passionnée et vraie Racine n’apporte point de formules nouvelles au théâtre ; et c’est pour cela que, comme Molière, il ne se laissera guère imiter. […] Il laissa la tragédie politique, la psychologie des sentiments médiocres et des caractères froids ; mais il chassa de la scène la fade galanterie On lui a reproché d’avoir modernisé tous ses sujets, et l’on n’a voulu voir en lui que le peintre des moeurs de cour, affinées et polies : il est vrai que quelques-uns de ses jeunes premiers, Xipharès ou Bajazet, Tendres, galants, doux et discrets, ont un peu l’air de courtisans français, très idéalisés. […] Il prit des sujets légendaires, historiques : sous le merveilleux ou le grandiose des fables et des noms, il aperçoit, montre le fait commun, ni héroïque, ni royal, humain : une femme délaissée qui fait assassiner son amant par un rival, voilà Andromaque ; une femme trompée se vengeant sur sa rivale et son amant, voilà Bajazet : un homme qui, pour un intérêt ou un devoir, laisse une femme aimée, voilà Bérénice ; un vieillard rival de ses fils, voilà Mithridate ; une belle-mère amoureuse de son beau-fils, et le haïssant, le persécutant pour ne pouvoir s’en faire aimer, voilà Phèdre.
sans doute, Valentin veut persuader à Geneviève qu’elle doit fuir, le laisser expirer seul ; mais n’a-t-elle pas trop beau jeu à lui dire : Toi ! […] Catulle Mendès, soucieux de ne pas laisser les lecteurs de l’Écho de Paris privés de poésie, après leur avoir offert exceptionnellement G. […] Honneur à ceux dont l’œuvre nous accable, nous pétrit, laisse notre mémoire bouillonnante et même fatiguée ! […] Niais laissez-moi tranquille.
Les traductions et les travaux de seconde main en sont des copies affaiblies et laissent toujours subsister de nombreuses lacunes que l’imagination se charge de remplir. […] Les moyens de comparaison manquaient aux anciens ; partout où ils ont eu sous la main des matériaux suffisants, comme dans la question homérique, ils nous ont laissé peu à faire, excepté pour la haute critique à laquelle la comparaison des littératures est indispensable. […] Rien de plus insipide que ce que Racine et Corneille nous ont laissé en fait de critique. […] Ici, comme en tant d’autres choses, on s’est laissé prendre à ce sophisme : Nos pères ont fait merveille avec des méthodes médiocrement régulières.
Et combien, profanes comme moi, l’aiment comme je l’aime, pour les sentiments nouveaux qu’il découvre, pour les îlots de belles idées que déchaînent ses harmonies comme des baguettes enchantées, pour toutes les révélations de son art souverain, — pour les grandioses souvenirs qu’il laisse à jamais derrière lui ! […] Mais nous, la multitude, que tient une héréditaire ignorance du technique, une héréditaire paresse intellectuelle, qu’une éducation primitive et rustique laisse grossiers, nous qui ne savons pas entendre les partitions seulement lues, — car de même qu’il fallait aux hommes, il y a dix siècles, parler le poème, il nous faut encore, aujourd’hui, que des voix et des instruments nous chantent et nous jouent la symphonie ; — ne pouvant pas lire le Livre de musique et de paroles, nous avons besoin, pour connaître l’Œuvre d’art, du théâtre matériel. […] laissez l’Anneau ! […] Mais il se borne à imiter ses prédécesseurs en les surpassant selon ses moyens ; et bientôt un autre le laissera loin derrière lui en renversant toute la boutique des opéras à clinquant et en elevant un monument lyrique dans lequel la Poésie, la Musique, l’action et les decors seront combinés en vue d’un effet commun. » Mais c’est avec Hegel que sont les rapprochements les plus nombreux et les plus importants.
Il a laissé un nom et bien des mots qu’on répète. […] On n’est pas embarrassé de savoir dans quelle classe il rangeait Rulhière quand on a lu le portrait presque odieux qu’il nous en a laissé. […] D’autre part, ses instincts sérieux, réfléchis, se développaient avec les années ; il y avait bien des points où il atteignait à la profondeur ; il se flattait d’arriver à la sagesse, au stoïcisme, à l’indifférence supérieure qui ne laisse plus de prise aux choses. […] Il laissait exécuter aux autres et se contentait de donner le stimulant.
Voici un morceau qui porte la date de 1772 et qui est inscrit sous le titre d’Économie politique ; tout le dédain des faits existants, tout ce premier dessein de politique idéale qui occupa et passionna si longtemps l’intelligence de Sieyès, s’y déclarent et s’y accusent sans détour : Je laisse les nations formées au hasard. […] Cependant on n’est pas du Midi impunément, et un coup d’œil positif et pratique, prompt à saisir les occasions, ne laisse pas de se mêler chez Sieyès à ce qui, chez un philosophe du Nord, deviendrait aisément du rêve. […] Ceci m’explique encore comment plus tard Sieyès rendit si aisément les armes à Bonaparte, et (sous forme de récompense nationale) se laissa enrichir et combler par lui. […] Quand l’Assemblée constituante, en proie aux passions et aux intrigues, s’égare décidément dans son œuvre, il laisse échapper ce mot qui constate l’ère des déviations : « Ils veulent être libres, et ils ne savent pas être justes !
» * * * — Un volume qui est sous presse, et qui n’a point encore paru, laisse son auteur, dans un état vague, dans une résolution singulière de l’activité et du travail. […] Et le sergent de ville de lui apprendre, que mon voisin est un ancien saltimbanque d’origine irlandaise, auquel un oncle a laissé quelque chose comme un héritage de cent mille livres de rente, qu’il est en train de manger… et qu’il a fait revenir son ancienne voiture de saltimbanque pour y remonter, quand il sera arrivé à son dernier billet de mille. […] Le vieux, le procréateur du jeune, la figure turgide, boursoufflée, un œil clos, laisse par instants entrevoir, dans un demi-éveil clignotant, la prunelle perfide de son bon œil. […] Il sent qu’un nouveau livre le laisse où il est, ne le porte plus en avant.
Ce célébre Ecrivain laissa son ouvrage au vingtiéme volume. […] Cette histoire est enrichie de connoissances de l’antiquité, & l’auteur entre dans des détails qui ne laissent rien à désirer. […] Il y a pourtant des recherches curieuses ; mais les lecteurs qui ne sont pas prévenus par l’esprit de parti auroient souhaité que l’auteur en parlant d’un certain Corps qui ne subsiste plus en France, eût moins laissé voir de passion. […] Ignace ; il n’a pas laissé pourtant de raconter bien des choses puériles.
Et ici je demande la permission de laisser de côté le chef de l’école lui-même pour jeter un regard sur ses disciples. […] Un oncle leur a laissé par testament à chacune 50,000 francs. […] Mais à supposer même qu’en effet l’homme ne soit rien qu’un animal, et que nos sentiments, nos désirs, nos pensées mêmes et nos convictions soient uniquement les résultats nécessaires du jeu de nos organes, de notre constitution, je répondrai que la physiologie doit être laissée aux physiologistes ; méfions-nous de la physiologie littéraire autant que de la musique d’amateurs. […] Qu’il laisse en paix cette grande mémoire.
Aujourd’hui que l’auteur est mort, j’ajoute que ce charmant petit poème était d’André Gill, le grand caricaturiste, qui a laissé d’exquises poésies manuscrites.
Ces deux Ouvrages, qui, malgré leurs défauts, n’ont pas laissé d’avoir du débit, viennent d’être réimprimés avec des corrections & des suppressions qui en rendent la lecture plus supportable.
Ces Pieces ne laissent pas de supposer beaucoup d’esprit & même un certain talent dans M.
On dit que la mort l’a empêché d’exécuter le plan de défense de la Religion, dont Pascal a laissé les riches matériaux.
Sans projets, sans envie, Ne cherchons désormais que l’oubli de la vie : Que chaque objet qui passe, ou noble ou gracieux, Nous attire, et sur lui laissons aller nos yeux ; Vivons hors de nous-même ; il est dans la nature, Dans tout ce qui se meut, et respire, et murmure, Dans les riches trésors de la création, Il est des baumes sûrs à toute affliction : C’est de s’abandonner à ces beautés naives, D’en observer les lois douces, inoffensives, L’arbre qui pousse et meurt où nos mains l’ont planté, Et l’oiseau qu’on écoute après qu’il a chanté. […] Il faut en conclure seulement, peut-être, que par moments, dans le détail de l’expression, il s’est laissé aller en pur artiste à un caprice d’énergie exorbitante qui distrait et donne le change sur l’ensemble de sa pensée ; mais l’intention générale, la philosophique moralité de son inspiration n’est pas douteuse ; elle ressert manifestement de ses compositions les plus importantes, de la Curée, de la Popularité, de l’Idole, de Melpomène ; elle est écrite en termes magnifiques, au début et à la fin du volume, dans les pièces intitulées Tentation et Desperatio ; car ce livre, né de la révolution de Juillet, pour plus grande analogie avec elle, entr’ouvre le ciel d’abord et nous leurre des plus radieuses merveilles ; puis de mécompte en mécompte, il tourne au désespoir amer et crève sur le flanc comme un chien.
La vie de société ne laisse pas aux émotions profondes de l’individu le droit de s’exprimer, et élimine de plus en plus rigoureusement par la tyrannie des formes les réalités de sentiment et d’action qui pourraient servir de modèle à la tragédie. […] L’objet, le don, le goût de l’observation psychologique s’évanouissent également ; et cette connaissance de l’homme qui avait fait l’intérêt de la tragédie au siècle précédent disparaît sans laisser de traces.
Telles quelles, dans leur hâte assez distinguée, ces chroniques se laissaient parcourir, au chocolat, et parfois, une fois par colonne, un trait d’observation piquante — c’est-à-dire une invention heureuse, car observe-t-on ? […] (Même, chacun en son genre, ils laissent voir d’étranges défaillances, inaperçues semble-t-il de leur annaliste : Voici le spécialiste du linge, celui qui se fait blanchir en Dauphiné ; il étale son trousseau, et M.
Le littérateur chez les peintres Denis Diderot, qui fut homme de lettres à un degré incroyable, a laissé aux hommes de lettres la tradition d’écrire des choses de la peinture. […] Et toutes les fâcheuses impressions que peuvent laisser des visites aux Champs de Mars ou Élysées ne tiennent pas contre ce bon raisonnement : il est louable de présenter gratuitement les œuvres des artistes au public à qui elles sont destinées.
Marthe et Marie vinrent au-devant de Jésus, et, sans le laisser entrer dans Béthanie, le conduisirent à la grotte. […] Laissé libre, Jésus se fût épuisé dans une lutte désespérée contre l’impossible.
La politesse passa du sénat aux ordres inférieurs, voire au plus bas étage du menu peuple ; et si en leur cause, on doit croire leur témoignage, ils ont effacé ensuite toutes les grâces et toutes ces vertus de la Grèce, et ont laissé son atticisme bien loin derrière leur urbanité. » Ici Balzac nous apprend que de son temps ce mot d’urbanité n’était pas encore reçu en France : il pense que quand l’usage l’aura mûri, et aura corrigé l’amertume de la nouveauté, nous nous y accoutumerons , comme à d’autres que nous avons empruntés de la même langue. […] Le maréchal de Beauvau, le chevalier de Boufflers, son neveu, à qui l’on ne reproche pas sans doute la pédanterie, ni la préciosité, ne laissaient jamais passer dans leur société une faute contre la langue, ni une locution douteuse, sans les relever.
Ce serait donc vers le milieu de l’année 1667, que Montespan se serait laissé aller à la fougue de sa jalousie, et aux plus violents outrages envers la duchesse de Montausier, comme complice de la séduction exercée par le roi sur sa femme. […] La reine y laissa aller le roi, pour aller diner aux Carmélites de la rue du Bouloir.
Elles furent imprimées après sa mort dans l’état où il les avoit laissées. […] Ainsi quoique ces personnes ne soient point capables de contribuer à la perfection d’un ouvrage par leur avis, ni même de rendre methodiquement raison de leur sentiment, leur décision ne laisse pas d’être juste et sûre.
Mais laissons ces vétilles. […] On ne veut pas s’en occuper ; on le laisse, dans son mystère », et il faut renoncer à le connaître, par la raison que nous ne sommes pas des Grecs.
La parole écrite a été une première matérialisation de la pensée, car l’écriture hiéroglyphique avait laissé à la pensée humaine toute son énergie primitive et toute son élasticité, si l’on peut parler ainsi ; mais l’imprimerie a achevé la matérialisation. […] Autrefois il suffisait de gouverner avec l’opinion ; à présent il faut gouverner par elle, sous peine de la laisser gouverner elle-même, ce qui constituerait une vraie anarchie.
Impossible de nous laisser faire ! […] Quinet qui se laisse aimer par sa femme avec la certitude impassible d’un vétéran de la fatuité, n’a pas la grâce des préfaces.
Nous sommes tous plus ou moins bas-bleus, à cette heure, même, nous les hommes, qui nous laissons ôter nos bottes par les femmes, non plus comme Lauzun, mais comme l’Ogre par le petit Poucet. Et c’est pourquoi lorsqu’un livre vient à couper ce flot pesant du bas-bleuisme, par lequel l’esprit français se laisse entraîner, le livre fait tout à coup lumière d’éclair et, comme l’éclair, peut ne pas durer, mais c’est le succès !
On ne l’a point assez remarqué, c’est sous la solive blasonnée du château féodal que la société française est née ; c’est là qu’elle a commencé sa première causerie, cette causerie charmante, cette maîtresse de maison qui faisait si adorablement les honneurs de chez elle à l’univers ensorcelé ; c’est là qu’elle a dit son premier mot et laissé son premier sourire, entre quelque châtelaine oisive, quelque vieux prêtre savant et aimable, et le troubadour qui passait ! […] Des mémoires dont nous avons déjà parlé, les Mémoires de la Baronne d’Oberkirch 15, tant d’autres oubliés dans la chiffonnière de nos grand’mères et de nos tantes, ne laissent sur ce point aucun doute.
Voilà, en aussi peu de mots que possible, le sujet touché par Blaze de Bury, la tragédie mise par lui en camée et à laquelle il fallait laisser ses colossales proportions. […] On a retrouvé les faits matériels de la chronique de Kœnigsmark, le Disparu de l’Histoire sans laisser derrière lui, quelque part, comme le dernier des Ravenswood, la plume noire de sa toque, pour dire : « C’est là qu’il a passé et qu’il fut englouti. » Mais les causes de ces faits, étudiées à leur sinistre clarté, dans ces âmes d’une énergie presque fabuleuse en ces temps où, pour le bien comme pour le mal, l’âme humaine se ramollissait, pouvons-nous dire que nous les ayons ?
Nous la laisserons telle qu’elle est en toutes les imaginations, dans la grandeur de sa double force, imposante comme la bonté grave, et charmante comme la toute-puissance qui sourit. […] … Tout cela est incontesté aujourd’hui et demain sera incontestable, et nous le laisserons à qui fait la cour à la gloire en lui faisant écho, pour prendre seulement un détail de ces lettres, un détail entre mille, parce que ce détail donne à leur publication une spécialité de saveur morale et une nuance de beauté littéraire que nous n’avons jamais trouvées à un égal degré dans les autres Correspondances de Joseph de Maistre, et sur lequel, pour cette raison même, nous demandons la permission d’insister.
Je pourrais écrire un mot plus vif, mais je veux être poli et je laisse « traditions ». […] Par simplification, il laisse l’idée du droit se dégager toute seule du spectacle des choses, et il ne comprend pas, ce Grec qui n’est dirigé que par la raison, que la beauté de son histoire — à ne regarder que la seule beauté !
C’est un ferme esprit, qui se contente d’être sensé et qui laisse aux autres le tapage, cet agent provocateur de la gloire. […] On a toujours l’air de lui dire : « Tu prêches pour ton saint et pour l’autel dont tu vis ; laisse-nous tranquille !
Je laisse à M. […] Il ne nous l’a pas dit, même dans ce Journal qu’il a laissé, et qu’il appelait, avec une modestie si gaie, sa conversation avec son bonnet !
Mais à l’adresse elle reconnut l’écriture, et elle laissa la lettre sans l’ouvrir… Et c’est encore plus beau peut-être que d’avoir écrit toutes les siennes, — d’avoir laissé cachetée celle-là.
Malheureusement le temps est un peu passé où l’imagination occidentale voyait en Orient les splendeurs amoncelées de je ne sais combien de civilisations finies, mais qui avaient laissé derrière elles aux chercheurs de trésors trois ou quatre terrains d’alluvions de poudre de perles et de fragments d’escarboucles. […] À cette époque, un homme qui cachait parfois la critique de son temps sous de la critique littéraire, un homme qui en contait souvent aux autres, mais qui ne s’en laissait jamais conter, écrivait, de sa plume la plus moqueuse, de ces choses inouïes sur les.
Il n’a ni la verve brûlante, ni la redoutable force d’expression qu’il faudrait pour faire, détaillée ou sommaire, une terrible exécution de l’Erreur, et pour la laisser sur la place, foudroyée ou déshonorée à jamais ! […] L’un, — celui du grotesque mysogine Schopenhauer, — par la suppression de l’amour, avec ou sans opération ; c’est la philosophie de la chanson fameuse : Oui, pour un rien, Oui, pour un rien, Nous laisserions finir le monde, Si nos femmes le voulaient bien !
Laissons dire les hommes sans bonne foi ! […] nous sommes arrivés à une époque où ceux qui aiment, vénèrent et se dévouent à propager les vérités du catholicisme, peuvent laisser là les argumentations inutiles, qui n’imposent plus au scepticisme même quand elles l’étonnent, et se contenter de reproduire les textes sacrés, d’où la lumière jaillit sur le monde des anciens sophistes et doit rejaillir de la même force sur les nouveaux.
Laissons-la donc passer aussi ! […] Dans ce livre, où tout est en vers, jusqu’à la préface, on trouve une note en prose qui ne peut laisser aucun doute non seulement sur la manière de procéder de l’auteur des Fleurs du mal, mais encore sur la notion qu’il s’est faite de l’art et de la poésie ; car M.
On a dit que l’auteur des Courbezon et de Julien Savignac était un des plus vigoureux romanciers sortis de l’école de Balzac ; car tout homme de génie comme Balzac — qu’il l’ait voulu ou non — laisse derrière lui une École. […] Je n’ai point à refaire ici, en la racontant, cette histoire… Il faut en laisser toute la sensation, qui en vaut la peine, au lecteur.
Enfin, de douze mille francs qu’il avait par mois, il en employait onze à secourir des malheureux ; et, dans sa dernière maladie, peu de temps avant d’expirer, voulant honorer encore une fois l’infortune qu’il laissait sur la terre, il ordonna qu’on vendît ses pierreries pour la soulager. […] « Vous avez goûté assez longtemps, lui dit-il, le plaisir de votre modestie, laissez-nous rompre le silence que votre austérité nous imposait.
Les chefs-d’œuvre qu’elle avait laissés, ces marbres antédiluviens que la génération moderne ne pouvait reproduire, n’en étaient que plus admirés ; et on sait quelle gloire obtenait, en les interprétant, l’esprit encyclopédique d’Aristote. […] Ecrit en majestueux hexamètres, sans les détours impétueux de la strophe et les variétés du rhythme, avec des paroles simples et de grandes images, cet hymne, chanté sans doute sur les tons de quelque ancienne et austère mélodie, nous semble le plus beau démenti des abaissements où se laissait réduire la Grèce, comme des erreurs brillantes qui l’avaient jadis égarée.
André nous développe ce principe avec un ordre, un discernement, une clarté, qui ne laissent rien à désirer.
Martin du Bellay, frere du Cardinal, a laissé des Mémoires historiques depuis 1513 jusqu’au regne de Henri II.
Nous ne laisserons jamais passer l’occasion de rendre de semblables témoignages, & par-là nous croirons remplir notre but.
Remond de Saint-Mard a composé aussi une Poétique, mais une de ces Poétiques arbitraires, qui, dérogeant aux vrais principes, ne laissent voir que les idées de l'Auteur, contre lesquelles le bon goût doit se tenir sagement en garde.
La vivacité, l’esprit, l’imagination, & le goût, qui aiguisent ces petits Pamflets, donnent une idée avantageuse du talent de ce jeune Auteur, & laissent entrevoir qu’avec plus de suite dans le travail, il seroit en état d’entreprendre & de bien traiter des Ouvrages considérables.
Son Année chrétienne a subi ce sort, parce qu’elle laisse transpirer des opinions que l’Auteur avoit puisées dans un commerce intime avec MM. de Port-Royal.
Il est tout grognonnant, traite familièrement les garçons de « canaille », se plaint de n’avoir plus de dents et trop de cheveux, dit à Magny au sujet de son fils, qu’il s’est toujours refusé la satisfaction d’être père, et un peu allumé par un Bourgogne capiteux, se mâchonne à lui-même des choses cyniques, qui laissent comprendre que c’est un vieil accoucheur. […] J’entre, et dans un fouillis, un désordre qui ne laisse rien distinguer, je suis reçu par Barbey d’Aurevilly, en manches de chemise, et en pantalon gris perle décoré d’une bande noire, devant une de ces anciennes toilettes, au grand rond de glace basculant. […] On peut trouver ça très joli, mais n’est-ce point, au fond, de la très petite couleur, bonne à laisser à la peinture à la gouache ? […] Là-dedans un coup de sonnette, et dans ma boîte à lettres, une lettre qui m’apprend que le marchand de cuirs qui me doit 80 000 francs ne m’a pas payé le trimestre de la rente qu’il me doit, et me laisse supposer que des mois, des années peuvent se passer dans l’absence de presque toute la moitié de mon revenu, et les tracas d’un procès. […] La chambrière maîtrisée fait obtenir un rendez-vous à d’Artagnan, mais au moment de ce rendez-vous, le ressentiment de la victime, soudainement enragée de vengeance, le laisse, en hiver, vingt-quatre heures sans feu et sans nourriture dans le froid glacial d’un cabinet, au sortir duquel la duchesse lui ouvrant les bras, le rejette bientôt hors du lit, d’un coup de pied.
Lundi 30 janvier Le docteur Blanche, qui fait, ce soir, une visite rue de Berri, vient causer avec moi de Maupassant, et nous laisse entendre qu’il est en train de s’animaliser. […] Montesquiou, invité dernièrement à dîner, a assisté à un spectacle qui a laissé chez lui la plus grande impression. […] Il faut songer à l’éventualité d’une mort subite, et laisser des instructions. […] Mme Daudet racontait alors, que veillant son fils, menacé d’une fièvre typhoïde, elle avait le sentiment que le monde surnaturel, dont elle se voyait séparée, comme par un cristal ondulé, s’ouvrait et laissait sa grand’mère s’approcher d’elle, — d’elle, qui toute frissonnante, le bras étendu, criait : « Non ! […] Puis, Sarah vient s’asseoir à côté de moi, me dit que la pièce est pleine de passion, que le dernier tableau lui paraît superbe, et me demande de lui laisser, pour lire le quatrième et le cinquième tableau, qui n’ont pas été lus.
Mais laisse-moi du moins regarder dans ton âme, Comme un enfant plaintif se penche vers les eaux ; Toi, si plein, front pâli sous des baisers de femme, Moi, si jeune, enviant ta blessure et tes maux.
C’est un Ecrivain sensé qui ne court pas après les ornemens ; qui, sans rien omettre d’intéressant, écarte les détails minutieux ; qui, ne prodiguant pas les portraits, les laisse, pour ainsi dire, se former sous la plume d’eux-mêmes, & sait sur-tout les arranger, de maniere que la confusion & la surcharge sont également proscrites de la galerie des tableaux qu’il présente aux yeux de son Lecteur.
Il seroit capable de l’honorer par ses travaux, si ses importantes occupations lui en laissoient le temps, comme il en a le goût.
de la] Ce Littérateur, sans avoir des talens supérieurs, ne laisse pas d’être fort au dessus de sa réputation.
Quoique la plupart des Pieces que ce jeune Poëte a publiées sous le titre trop peu modeste de Bibliotheque des Amans, ne roulent que sur des sujets d’amour ou de galanterie, elles ne laissent pas de se faire lire avec une sorte d’intérêt, par l’adresse qu’il a eue d’en varier les peintures & les cadres, & de répandre beaucoup de naturel, de grace & de délicatesse dans ses expressions.
Le Poëme de Saint Louis, ou la Couronne reconquise sur les Infideles, offre des richesses, qui, quoique barbares, ne laissent pas de faire naître la surprise & l’admiration.
. ; tout cela a disparu comme de légers éclairs qui ne laissent aucune trace de leur existence.
Prétendre égayer un Lecteur, en faisant dire par un Sultan à son premier Ministre : Taisez-vous, Visir, vous raisonnez comme un Abbé ; & en faisant répondre au Visir : Votre Hautesse me fait trop d’honneur ; peindre une Reine, en lui donnant des yeux qui ne finissoient pas, des yeux chargés de tendresse, des éternels bras dont elle ne savoit que faire; ajouter à cela des gentillesses que la plume d’une femme ne devroit jamais laisser échapper ; c’est manquer tout à la fois au costume, à la Langue, & à la décence.
Palissot n'a pas laissé de leur donner six pages de louanges dans ses Mémoires Littéraires ; mais tout le monde sait que M.
Qu’il faut se promener, méditer, laisser là les pinceaux et demeurer en repos jusqu’à ce que la grande idée soit trouvées.
Trois filles pas trop belles, pas trop jeunes, passant des guirlandes de fleurs autour des bras et des pieds d’un innocent qui les laisse faire.
Laisse-les rire.
Auguste Barbier Ses vingt chants du Dante que personne n’a surpassés, comme expression du style et du caractère poétique du grand maître, quelques paysages italiens vrais et colorés, trois ou quatre vigoureuses satires politiques et surtout ses élégies, cris de souffrances pendant des heures de maladie, et qu’on a si bien nommées un requiem de la douleur, laisseront certainement trace dans la mémoire des vrais lettrés.
On retrouvera sans doute quelque chose de ce charme dans les pages de prose si délicate et dans les exquis poèmes qu’il a laissés.
Eugène Crépet Il a, dans ses volumineuses œuvres, laissé d’admirables vers que les plus illustres contemporains signeraient hardiment, et cependant c’est à peine si son nom est sorti de cette pénombre qui confine à l’oubli… Entre toutes ces pièces, une surtout fut remarquée c’est celle qui a pour titre : Hommage aux mânes d’ André Chénier , et qui se termine par ces vers : Adieu donc, jeune ami, que je n’ai pas connu un de ces vers-proverbes qui profitent plus au public qu’à leur auteur, car tout le monde s’en souvient et les cite, sans que personne puisse dire qui les a écrits.
Ami de Ronsard, il se laissa d’abord éblouir par le faux brillant de sa Poésie ; mais il reconnut bientôt son erreur, pour s’attacher à la maniere de Desportes, qui étoit aussi son ami, & qui pouvoir lui servir de modele pour la douceur & le naturel de ses vers ; il le surpassa même par la pureté de son style & la sagesse de sa Muse.
M. l’Abbé de Voisenon a laissé des jugemens sur la plupart des hommes célebres de France.
Bruys, [François] né à Serrieres dans le Mâconnois, en 1708, mort à Dijon en 1738, Auteur qui a beaucoup écrit, mais qui, pour avoir écrit avant de former son esprit & son style, n’a rien laissé que de médiocre.
Dieu laisse-t-il jamais ses enfans au besoin ?
Elle étoit de la Cour de Madame la Duchesse du Maine, & a laissé plusieurs Ouvrages qui font conjecturer qu’elle devoit en être l’ornement par les charmes de son esprit.
Il a laissé peu de Poésies.
Si le style de ces différentes Productions n'est pas toujours noble & élégant, il a du moins le mérite d'être toujours clair, précis, & correct, qualité qu'on chercheroit vainement dans les Ecrits de plusieurs Littérateurs de profession, qui ne laissent pas de se croire d'excellens Ecrivains.
Il a écrit quelque part dans un de ses derniers articles, ces paroles qui, bien qu’ayant un sens plus général là où il les dit, expriment évidemment l’impression qu’ont dû lui laisser les années pénibles de l’apprentissage : Aujourd’hui la lutte est partout, et aussi le sérieux triste. […] L’auteur ici, pas plus qu’ailleurs, ne procède au hasard, et ne se laisse aller à son impression sans la juger et la commander. […] Une lutte éternelle contre le sol a rabougri les femmes comme les plantes ; elle leur a laissé dans le regard une vague expression de mélancolie et de réflexion.
Malgré ces taches odieuses et les pénibles impressions qu’elles laissent, quiconque aura lu le chapitre que M. […] C’est le duel éternel de tout ce qui finit et de ce qui succède, de ce qui se survit et de ce qui doit vivre ; cela s’est vu de tout temps, en grand, en petit, dans tous les genres et dans tous les ordres : César et, Pompée, Malherbe et le vieux Desportes, Descartes et Voët, Franklin et l’abbé Nollet… Le chevalier de Glerville sent désormais son maître dans celui qui fut longtemps son diacre, comme le disait plaisamment Vauban : « Il est fort chagrin contre moi, ajoutait celui-ci, quelque mine qu’il fasse ; c’est pourquoi il ne me pardonnera rien de ce qui lui aura semblé faute ; mais je loue Dieu de ce que lui et moi avons affaire à un ministre éclairé qui, en matière de fortification, ne prend point le change, et qui veut des raisons solides pour se laisser persuader et non pas des historiettes. » Une dernière rencontre a lieu entre les deux rivaux, au sujet des fortifications de Dunkerque ; elle est décisive. […] Je vous supplie donc de vous laisser persuader, et de vous souvenir que, la citadelle de Lille ayant l’honneur d’être votre fille aînée dans la fortification, il est juste que vous lui fassiez quelque prérogative. — Rien, disait-il encore en ouvrier amoureux de son ouvrage, rien n’est mieux conduit ni plus beau que toute cette maçonnerie ; l’on n’y voit pas le moindre défaut. » La maçonnerie était belle, mais on menait les maçons un peu rudement : « Pour empêcher la désertion des maçons, qui me faisait enrager, j’ai pris, sous votre bon plaisir, deux gardes de M. le maréchal (d’Humières), des plus honnêtes gens, qui auront leurs chevaux toujours sellés dans la citadelle, avec chacun un ordre en poche et un nerf de bœuf à la main ; les soirs, on verra ceux qui manqueront ; après quoi, dès le matin, ils les iront chercher au fond de leur village, et les amèneront par les oreilles sur l’ouvrage. » Est-il besoin d’avertir qu’il y a quelque plaisanterie dans cette rudesse un peu grossière ?
Lorsqu’un secrétaire d’État arrivait pour le travail à l’heure indiquée, son sac rempli de dossiers et de dépêches, il avait eu soin de laisser dans chaque affaire un point sans importance à résoudre, dans chaque dépêche un ou deux mots à suppléer ou à changer ; le secrétaire d’État suggérait : le roi résolvait, suppléait, changeait et signait. […] Mais ayant appelé la prudence à mon secours, et considéré que je n’avais ni le nombre de troupes, ni la qualité des alliés requis pour une pareille entreprise, je dissimulai ; je conclus la paix à des conditions honorables, résolu de remettre la punition de cette perfidie à un autre temps. » Depuis cette paix, conclue un peu trop tôt, cette paix brusquée, il le sent, et contre laquelle étaient Turenne, même Vauban, et tous les militaires, si bien qu’il fallut donner à son armée et à la jeunesse guerrière la diversion immédiate de l’expédition de Candie, Louis XIV n’a qu’une idée, celle de se venger ; tout ce qu’il veut, il le veut avec suite, et sans se laisser distraire ; de 1668 à 1671, pendant trois années, il n’est occupé qu’à fortifier ses places, à augmenter ses troupes peu à peu, sans donner ombrage au dehors, à disposer ses alliances du côté de l’Angleterre, du côté de l’empereur et des princes de l’Empire, pour obtenir de ces derniers au moins la neutralité : « Je ne faisais pas un grand fonds sur la solidité de ces alliances que je prévoyais bien ne devoir pas durer longtemps, comme on le verra dans la suite ; mais je comptais pour un grand avantage de pouvoir châtier en liberté, pendant quelque temps, l’insolence des Hollandais, et j’espérais les réduire à souscrire à une paix honteuse, avant que les puissances, mes alliées, pussent être en état de les secourir. » Louis XIV est franc, il ne dissimule pas son motif : il a été blessé et il prétend en avoir raison. […] Je connais cette rivière ; elle est très difficile à passer : il y a des places qu’on peut rendre bonnes ; je compterais aller à Péronne ou à Saint-Quentin, y ramasser tout ce que j’aurais de troupes, faire un dernier effort avec vous, et périr ensemble ou sauver l’État ; car je ne consentirai jamais à laisser approcher l’ennemi de ma capitale » ; celui qui dira cette parole est bien le même qui, quarante ans auparavant, a honoré et loué les Hollandais d’avoir tout fait pour lui fermer l’accès d’Amsterdam.
Le roi fut mécontent de ces airs d’incertitude, et de tous ces revirements ; il le lui fit savoir, et le ministre de la guerre lui écrivait de Fontainebleau, à la date du 23 juillet : « Toutes vos lettres sont pleines de réflexions sur le hasard d’une bataille ; mais peut-être n’en faites-vous pas assez sur les tristes conséquences de n’en point donner et de laisser pénétrer les ennemis jusque dans le royaume, en prenant toutes les places qu’ils veulent attaquer. […] Les troupes ne laissèrent pas de murmurer, lorsqu’elles virent qu’on les menait à gauche comme pour tourner le dos à l’ennemi ; on crut d’abord à un mouvement rétrograde. […] Il avait retrouvé la veine ; il ne la laissa point refroidir, et toute la fin de cette campagne, qui influa sur la conclusion de la paix, fut marquée par des éclairs de fortune glorieux et des sourires consolateurs.
En les lisant, il a des regrets à bien des mots qui passent ; s’il les rejette et s’il se voit forcé de constater leur déclin ou leur décès, son sentiment d’homme de goût ne laisse pas de souffrir en les sacrifiant. […] Tous ses magasins et tous ses trésors sont dans les œuvres de ce grand homme ; et encore aujourd’hui nous n’avons guère de façons de parler nobles et magnifiques qu’il ne nous ait laissées ; et bien que nous ayons retranché la moitié de ses phrases et de ses mots, nous ne laissons pas de trouver dans l’autre moitié presque toutes les richesses dont nous nous vantons et dont nous faisons parade. » .
Quand elle parle d’un tapis de vert uniforme « où s’emboit la lumière », des profondeurs d’un vert intense « où s’emboit le soleil », c’est-à-dire où il est tout entier absorbé, sans laisser jour ni reflet à aucune des nuances du prisme, il y a certainement une intention : ne se marque-t-elle pas trop expressément ? […] Un colloque insignifiant s’engage à l’occasion des petits objets à acheter ; laissons Mme de Gasparin continuer son récit, où la protestante tient absolument à planter son drapeau devant le camp catholique : « Que faire, se disent les visiteuses, d’escargots et de saintes ? […] « Ses livres, laissons-les de côté, voulez-vous ?
Il semble que ce prince est en grande partie cause lui-même de cette négligence : il n’est pas prévenant ; sa contenance est très-mauvaise ; il parle peu et mal, et reconnaît la supériorité de la reine et le lui laisse trop apercevoir. […] Il est arrivé de là qu’elle s’est laissée aller à passer une couple d’heures chez Mme de Guemené, où on ne parle que d’objets à sa portée, où il y a peu de personnes qui soient ou qui fassent paraître qu’elles sont plus instruites qu’elle, où on est fort occupé de la flatter et de l’amuser, et où elle croit se dédommager de l’ennui qu’elle croit avoir pris pendant tout le reste de la journée. » Si ce n’est pas pure négligence, c’est assez finement dit. […] On pourrait l’accuser même d’avoir, par un calcul adroit, mais coupable, laissé son élève dans l’ignorance.
A une certaine heure du jour, où il est un peu plus libre, il laisse avec joie le vêtement du matin, et retiré dans sa petite chambre monastique, où nous l’a montré M. […] Dans une jolie pièce de vers, adressée à un riche agriculteur de Toulouse qui lui donnait ce conseil, il réfute agréablement les raisons flatteuses par un tableau de ses goûts et de ses simples espérances : « Dans ma ville, où chacun travaille, laissez-moi donc comme je suis ; chaque été, plus content qu’un roi, je glane ma petite provision d’hiver, et après je chante comme un pinson, à l’ombre d’un peuplier ou d’un frêne, trop heureux de devenir cheveux blancs dans le pays qui m’a vu naître. […] qu’il travaille toujours ses vers ; qu’il les laisse venir naturels toujours.
En attendant, il doit, pour bien comprendre la sensation, la séparer de cet accompagnement, laisser de côté tous les appendices que le temps vient souder sur elle, la considérer simple et brute. — Enfin, il faut la distinguer, au moins provisoirement, de l’état du nerf et des centres nerveux qui, par leur ébranlement, la font naître. […] La rigueur de la méthode exige donc qu’en ce moment nous le laissions à part pour étudier d’abord la sensation à part. — Ainsi circonscrite, elle est ce premier événement intérieur, connu sans intermédiaire, accompagné d’images associées qui le situent, excité par un certain état des nerfs et des centres nerveux, état inconnu et qui d’ordinaire est provoqué en nous par le choc des objets extérieurs. […] Il en est de même pour les groupes secondaires compris dans les groupes principaux ; toute sensation spéciale, celle de l’amer, du chatouillement, du bleu, a un maximum et un minimum au-delà desquels elle cesse ou entre dans une autre espèce. — Mais chacune d’elles est une sorte de corps simple qui, capable en lui-même d’augmentation et de diminution, ne se laisse ramener à aucun des autres.
Son absolution est pire que le forfait lui-même : c’est le forfait rétrospectif, le forfait de sang-froid, le meurtre de la conscience publique, seul refuge que la fortune triomphante laisse ici-bas à la justice et à la vertu ! […] Il laisse transpirer, plutôt qu’il ne le témoigne, son mépris intérieur contre un peuple assez vil pour regretter son tyran : « La vile multitude, dit-il, celle qui assiège le cirque et les théâtres gratuits, et la lie des esclaves, et tous ceux qui, ayant dévoré leur patrimoine, vivaient des honteuses munificences de Néron, se montraient tristes et avides de nouvelles. […] Il ne rêve que prostitution, débauches et orgies de femmes ; il pense que ce sont là les privilèges de la souveraineté, privilèges qui lui assurent pour lui seul la satisfaction de ses caprices et de ses excès, et qui ne laisseront aux autres que la rougeur et l’infamie.
Bien au contraire, à qui lira attentivement les tragédies de Hardy, ou la Mélite de Corneille, il apparaîtra que le drame français tendait à se concentrer, et que, laissé à lui-même, il se fût, un peu plus tard peut-être, mais un jour certainement, régularisé. […] II obligea l’Académie à juger et Corneille à laisser juger le Cid. […] Il n’avait laisse autour des deux amants que les personnages nécessaires à l’explication de leur fortune : s’il a gardé l’infante, c’est par une erreur imputable aux préjugés mondains de son temps.
Souvent même il s’y laisse prendre, mais rarement tout entier ; et toujours il se reprend. […] La plus belle vie, la plus intelligente et la plus spirituelle, ce n’est peut-être pas celle des écrivains, même de ceux qui ont laissé de beaux livres : c’est celle des grands curieux qui ont vécu leur vie sans l’exprimer, et dont personne aujourd’hui ne sait les noms. […] Tout cela ne laisse pas de faire à M.
non, j’étudie Virgile et j’apprends le latin. » Nous ferons ici comme elle, nous laisserons la politique de côté avec tous ses méchants propos et ses sots contes : ce sont légendes qui ne sont pas à notre usage. […] Il laisse échapper son inquiétude qu’une épouse nouvelle ne soit pas, pour ces enfants d’un autre lit, telle qu’il faudrait. […] Le moment, pour la critique, d’embrasser ce puissant talent dans son cours, et de le pénétrer dans sa nature, n’est pas venu, selon moi ; il faut le laisser courir encore.
« Si j’étais encore maître de ces Mémoires, écrit-il dans la préface, ou je les garderais en manuscrit, ou j’en retarderais l’apparition de cinquante années. » En se mettant, en effet, dans l’obligation de laisser publier, le lendemain de sa mort, des Mémoires où tant d’hommes vivants sont jugés, et le sont en général sans aucune indulgence, tandis qu’il se donne toujours à lui-même le beau rôle, M. de Chateaubriand s’est exposé à des représailles sévères. […] Écrire de cette sorte ce qu’on a vu et ce qu’on a senti, ce serait, en effet, laisser un de ces livres simples et rares comme on en compte à peine quelques-uns. […] La vanité d’abord et surtout, inimaginable à ce degré dans un aussi noble esprit, une vanité d’enfant ou de sauvage ; une personnalité qui se pique d’être désabusée et qui se fait centre de toute chose, que l’univers englouti n’assouvirait pas, que tout gêne, que Bonaparte surtout importune ; qui se compare, chemin faisant, atout ce qu’elle rencontre de grand pour s’y mesurer et s’y égaler ; qui se pose à tout moment cette question, qu’il faudrait laisser agiter aux autres : « Mes écrits de moins dans le siècle, qu’aurait-il été sans moi ?
Mais si vous n’aviez pas eu affaire à un fou amoureux de votre beau génie, vous ne vous en seriez pas tiré aussi bien chez tout autre… » Cependant, après ces paroles sévères et trop fermes pour ne pas être justes, après ces paroles de roi, comme le fou, amoureux du brillant esprit, se laisse voir encore aisément, quand il ajoute : Vous faut-il des douceurs ? […] Il faut tout dire : quelques années après, Frédéric communiquait, un soir, de ses vers au professeur Thiébault, bon grammairien et académicien que lui avait procuré d’Alembert, et il se laissa aller par mégarde à montrer une épigramme très mordante qu’il avait faite contre d’Alembert lui-même : ce roi caustique n’avait pu se refuser au malin plaisir de noter quelque ridicule qu’il avait saisi dans ce caractère honorable. […] Laissons, au sujet de Frédéric, ces noms tant redits et qui veulent être injurieux ou flatteurs, ces noms trop contestables de l’empereur Julien et de Marc Aurèle ; n’allons pas, d’un autre côté, chercher le nom de Lucien, dont il n’offrirait que des parodies et des travestissements étranges ; et, si nous voulons le désigner classiquement, définissons-le dans ses meilleures parties un écrivain du plus grand caractère, dont la trempe n’est qu’à lui, mais qui, par l’habitude et le tour de la pensée, tient à la fois de Polybe, de Lucrèce et de Bayle.
À côté de ces figures rudes et mâles, une femme nous apparaîtrait, la reine Marguerite, sœur des Valois, qui nous laisse entrevoir dans ce qu’elle écrit un personnage élégant, fin, délicat, exquis, perfide, un type qui n’était point rare dans cette famille et dans ce cortège de Catherine de Médicis. […] Il avertit Ronsard, dès l’année 1555, de ne pas se prêter comme il fait à cette pente facile par où tout périt, de ne pas courtiser et flatter ses disciples, de ne pas laisser dégénérer enfin une œuvre élevée, en un tumulte et une ovation de coterie. […] Les premiers livres, pourtant, sont d’un intérêt moindre ; il s’amuse visiblement à imiter parmi nous Pline le Jeune ou Politien, qui ont laissé des recueils de ce genre ; il se propose des sujets, des thèmes, auxquels il se joue.
Voltaire le plus souvent cédait et criait de sa place, en s’apercevant du changement : « Le petit a raison ; c’est mieux comme cela. » Tel il était jeune à Ferney près de Voltaire, tel près de Chateaubriand à la fin de sa carrière, quand il disait à l’auteur du Génie du christianisme : « Enfermez-vous avec moi pendant quelques matinées, et nous ôterons tous ces défauts qui les font crier, pour n’y laisser que les beautés qui les offensent. » Je tiens à bien marquer en La Harpe cette nature essentielle de critique qui, à travers tous ses écarts, est son titre respectable ; qui fait que Voltaire a pu l’appeler à un certain moment « un jeune homme plein de vertu » (ce que les Latins auraient appelé animosus infans), et qui fait aussi que Chateaubriand l’a défini, « somme toute, un esprit droit, éclairé, impartial au milieu de ses passions, capable de sentir le talent, de l’admirer, de pleurer à de beaux vers ou à une belle action ». […] N’importe ; il est bon que cette première impression se donne, dût-on ensuite la pousser plus loin ; il est bon de se laisser faire avec lui, d’accueillir et de ressentir ce premier jugement, situé, si je puis dire, dans le vrai milieu de la tradition française ; il est bon en un mot d’avoir passé par La Harpe, même quand on doit bientôt en sortir. […] Cette conversion soudaine de La Harpe, ce qu’elle laissa subsister du vieil homme en lui, ce qu’elle y modifia peut-être par endroits, mériterait toute une étude morale.
En allant visiter les îles Borromées, il nous parle du saint si vénéré, de Charles Borromée, ce grand personnage, bienfaiteur du pays, et qui a partout laissé sa trace : « Il est singulier qu’un homme qui a si peu vécu ait pu faire tant de choses de différents genres, toutes exécutées dans le grand, et marquant de hautes vues pour le bien public. » Il traite assez lestement ce petit faquin de lac Majeur qui s’avise de singer l’Océan et d’avoir des tempêtes : Les bords du lac, dit-il, sont garnis de montagnes fort couvertes de bois, de treilles disposées en amphithéâtre, avec quelques villages et maisons de campagne, qui forment un aspect assez amusant. […] Ils sont à Rome depuis des mois, lorsque le pape (Clément XII) se laisse mourir ; un conclave se forme. […] En même temps, et si son style laisse à désirer pour un certain poli, nul plus que lui n’eut le goût fin et délicat des arts, la sensibilité italienne unie à la malice et à la naïveté gauloise.
Baudelaire connut l’œuvre wagnérienne, l’illustra de belles pages, et Mendès très longtemps orna le wagnérisme. » On répondra que Baudelaire en 1862 — date de sa connaissance du Tannhauser et de son étude critique — était âgé de quarante ans, fatigué de son bel effort, qu’il pouvait éprouver des plaisirs esthétiques nouveaux, et les traduire, admirablement, sans que cela l’induisît à modifier une formule de vers qui était déjà une conquête sur le passé ; et si la même raison ne peut valoir pour Mendès, quoi d’étonnant à ce que celui-ci soit, car son éducation poétique, quoique moins avancée, était déjà faite, resté fidèle à un idéal technique, dont il ne pouvait encore percevoir la caducité, puisqu’elle n’existait pas encore, et qui lui laissait toute la place pour ses réalisations encore neuves. […] L’instruction que nous laissèrent les romantiques est pleine de choses excellentes, apprises du xvie siècle, et aussi découvertes au xixe ; mais comme les règles des trois unités, excellentes en certains cas, elle ne peut s’appliquer à tous. […] La rime ou l’assonance doivent donc être des plus mobiles, soit que le poème soit conçu en strophes fermées, ou qu’on utilise la formule dénommée depuis les laisses rythmiques, dont le premier exemple se trouve dans les Palais Nomades p. 129, celle qui se rapproche le plus des discours classiques, la plus propre à un long énoncé de sentiments, ou bien qu’on emploie la brève évocation des lieds.
En général, ces dieux sont des souverains débonnaires et qui tiennent à l’homme de très près : Outênou pardonne aux méfaits de ce sacripant de Fountinndouha et s’en fait même le complice puisqu’il se laisse corrompre par la promesse d’un bounia67. […] De temps à autre il se venge des mineurs qui violent sa retraite en provoquant un éboulement meurtrier puis, apaisé pour quelque temps, il les laisse en paix pendant une période plus ou moins prolongée. […] Sitôt en effet que, manquant au pacte consenti, les habitants de ce pays laissent Mamadou Saké tuer le serpent fétiche à qui l’on consentait des sacrifices périodiques, on cesse de trouver de l’or dans la région.
Mais laissons cette fatigante logomachie, et continuons d’examiner s’il y a quelque réalité au fond des fières prétentions du romantisme, toujours accompagnées de reproches non moins superbes. […] Ils savent que, dans les arts, la partie la plus noble de nous-mêmes veut autre chose que l’imitation de ce qui tombe sous nos sens ; que, dans la poésie particulièrement, l’âme et l’imagination demandent, pour aliment de leur dévorante activité, ces sentiments profonds et en quelque sorte infinis, dont la religion et l’amour sont les deux principales sources ; et que l’esprit même ne saurait être entièrement captivé qu’à l’aide de cet art délicat, qui consiste à ne pas arrêter avec trop de fermeté les formes de certains objets, et à étendre sur quelques autres un voile qui les laisse entrevoir ou seulement soupçonner. […] Si je pouvais me croire le droit de leur adresser quelques avis, je leur dirais : Laissez enfin pour morts ces héros de la Grèce et de Rome, que nos poignards tragiques ont épuisés de sang ; faites revivre les personnages des âges chrétiens et chevaleresques : mais gardez-vous d’appliquer à ces sujets d’un temps barbare, les règles d’une poétique plus barbare encore, et n’imitez pas ce peintre de nos jours, qui voudrait représenter les princes et les guerriers du dixième siècle, dans le style gothique des vitraux de leurs chapelles, ou du marbre de leurs tombeaux.
Il y avait là une grave erreur qu’il importe de ne pas laisser s’accréditer. […] Il laisse à son tailleur une autonomie complète. […] Mais ceux-ci eurent, cette fois, le bon esprit de s’abstenir et de le laisser rôtir tout seul dans le four brûlant qu’il leur avait préparé.
Il laissa M. […] Jouffroy ne dit rien d’utile ; il embrassait le vague avec une grande force ; et le nuage en vain pressé laissait à peine une goutte de mauvaise eau dans sa main. […] Vous n’avez laissé dans la science que des constructions chancelantes, incomplètes et provisoires, et dans le monde qu’un long souvenir de sympathie et d’admiration. » 67.
Dans ce dessein, il laisse à part les traits qui appartiennent à l’Histoire profane, & se contente d’indiquer ceux qui ont des rapports nécessaires avec les événemens qu’il raconte.
On y voit un Ecrivain zélé pour les vrais principes, qui les développe & les défend avec une supériorité d’esprit & de raison qui ne laisse rien à désirer.
Les Littérateurs qui ne se laissent point aller au torrent de la mode & du Bel-esprit, y trouveront cependant des morceaux qui, du côté de la force & de l’imagination, sont infiniment supérieurs aux morceaux prétendus choisis dans nos anciens Poëtes, qui figurent dans tant de Recueils.
Monsieur, lui répondit l’Auteur, voulez-vous permettre que je laisse ces Livres dans votre anti-chambre ?
Le rapport établi entre les époques des diverses Nations, depuis le commencement du monde jusqu’à Jésus-Christ, a bien pu lui donner l’idée de cette liaison d’événemens dont il nous a laissé un tableau si sublime.