Coquet et cancanier, gourmand de ragoûts, de confitures et de bonbons (son chef-d’œuvre s’appelait le Cordon-Bleu et c’était un livre tellement monumental que l’auteur est mort avant de l’achever), surchargé d’édredons, entouré de crachoirs, roulé comme une momie dans les châles les plus extravagants, regrettant ses dents, son estomac, la vie et le pouvoir de faire encore des mensonges, au demeurant chrétien grabataire, détestant les doctrines canailles qui font déroger un homme, et sur le chapitre de l’éternité se décidant à la courte-paille, d’après l’argument de Pascal, il s’éteignit pauvre et vieux dans ses coiffes (car il en portait) chez les frères de Saint-Jean-de-Dieu, rue Plumet, où mourut si saintement Ourliac. […] En voyant s’éteindre, elles et leur langage, des femmes comme la marquise de Créqui et les sociétés auxquelles ces femmes appartenaient, l’auteur, trop attique lui-même pour définir l’atticisme, s’est demandé si l’atticisme, cette chose ineffable, mais facile à sentir et qui n’a de grec que le nom, mourait et disparaissait avec elles, et il s’est répondu que tout le temps « qu’il y aura partout une femme spirituelle douée de charme, à côté de l’aïeule souriante et qui n’invoque pas à tout propos son expérience, — (pourquoi pas ?)
Le hasard lui avait donné jusqu’à un titre, pour qu’il pût l’oublier… Il mourut jeune, c’est vrai, — mais il ne vit point baisser ce qu’il put très bien prendre pour de la gloire, et d’ailleurs il ne croyait pas mourir.
Il a fini par mourir joueur… Comme dans Richard III, Richard redevint lui-même… Il se reprit et il se retrouva comme il était avant la catastrophe de son amour. […] Comment ne voyez-vous pas que c’était l’humble supplique d’un malheureux qui se meurt et qui avait besoin d’un pauvre soulagement qu’il implorait ?
L’atroce ennui qui s’échappe de sa logique, et sa logique est tout son système, ne servira pas de bouclier à Hegel contre les Heine de l’avenir, qui l’attendent, car comme Kant tué par un Allemand, il ne mourra pas d’une plaisanterie française. […] Il est plus digne de l’esprit de la Providence, qu’il meure sous une plaisanterie de son pays.
quelle que soit la différence de ton de ces deux ouvrages, ils ont cela de commun qu’ils montrent très bien, chacun à sa façon, l’état actuel de la philosophie, et sur quel pauvre grabat d’idées la malheureuse se sent mourir. […] Tel est le fond de ce livre dans lequel un esprit, fait pour mieux que cela, se remue puissamment dans le vide et finit par mourir faute d’air, comme un robuste oiseau pris sous la machine pneumatique.
Ce médecin, de par le spiritualisme, ne tue pas le corps au profit de l’âme, ce que font très bien les ascètes et les grands mortifiés religieux, mais il guérit le corps par la vertu médicinale de l’âme et l’empêche de mourir, — quoiqu’il soit très bien mort, lui, à la fleur de son âge, ou en plein fruit, si vous aimez mieux, et très inconséquemment aux préceptes du catéchisme de santé dont il vient de doter l’Allemagne ! […] Pour combattre l’hypocondrie, une maladie qui fut toujours la tête de Méduse pour sa perruque de médecin, il n’y avait qu’à méditer « l’idée de Dieu et ses lois éternelles », et il les avait méditées, et s’il eût pu devenir brahmane, il n’eût plus eu même une colique ; car on sait que jamais les brahmanes ne meurent du choléra-morbus !
Il vit, je crois, quoique très avancé dans la vie, et s’il ne vit plus, il a cette supériorité de la vieillesse qui donne à l’expérience le calme et la certitude… et, avant de mourir, il a eu la jeune curiosité de savoir si ce siècle, justement méprisé par l’auteur des Ruines, comprendrait quelque chose à un ouvrage non moins impopulaire que le sien. […] IV Mais si la psychologie de Descartes a fait fléchir la rigueur d’une définition qui devait être rigoureuse sous la plume d’un aussi fort chrétien que l’auteur des Philosophes et la Philosophie, n’oublions pas que partout ailleurs, dans son livre, il reste l’homme irréprochable de ce Spiritualisme qui meurt actuellement sous l’étreinte du plus brutal Matérialisme, et que le Christianisme peut, seul, ressusciter, en l’en arrachant !
pour ne pas mourir de ce dédoublement. […] Elle lui apprend que la poésie se fait avec de la douleur comme la vie, et que les plus grands poètes furent les plus vieux, depuis Homère jusqu’à Milton, — et même Byron, qui mourut à trente-neuf ans, date menteuse !
Il y arriva comme eux, robuste, armé, prêt à tout, se distinguant comme un des premiers et des plus solides de cette Légion de romantiques qu’on pourrait appeler : « les forts en Israël », et dont il ne restait plus guères, quand il mourut, que Victor Hugo, lequel nous semblait — comme le Louis XIV qu’il haïssait certainement, mais qu’il n’eut peut-être pas été fâché de rappeler — devoir fermer probablement le cortège de son siècle. […] Il avait une femme et une fille que le monde connaît, car il les lui a apprises dans cette poésie, qui fut la dernière qu’il ait écrite, et qu’il consacra, sous le titre de : Quelques vers pour Elle à sa femme, morte depuis à peine quelques mois.
J’ajouterai encore à ce nom celui de ce célèbre Gustave-Adolphe, qui, au commencement du dix-septième siècle, fit trembler le Danemark, la Pologne et la Russie, parcourut ensuite l’Allemagne en conquérant, ébranla le trône de Ferdinand second, vengea la liberté germanique écrasée, donna à la Suède l’ascendant sur l’empire, créa plusieurs grands hommes, fit tous ces prodiges en deux ans, et mourut dans une victoire. […] Mais leur plus grand obstacle, c’était la prétention d’être éloquents dans une langue morte.
Il cherche à édifier plutôt qu’à plaire ; il vient annoncer que tout est fini, afin de ramener à Dieu qui ne finit point ; il nous fait souvenir de la fatale nécessité de mourir, pour nous inspirer la sainte résolution de bien vivre71. […] « Turenne meurt, tout se confond, la fortune chancelle, la victoire se lasse, la paix s’éloigne, le courage des troupes est abattu par la douleur et ranimé par la vengeance ; tout le camp demeure immobile ; les blessés pensent à la perte qu’ils ont faite et non aux blessures qu’ils ont reçues ; les pères mourants envoient leurs fils pleurer sur leur général mort, etc. » Cependant, malgré l’éloquence générale et les beautés de cette oraison funèbre, peut-être n’y trouve-t-on point encore assez le grand homme que l’on cherche ; peut-être que les figures et l’appareil même de l’éloquence le cachent un peu, au lieu de le montrer ; car il en est quelquefois de ces sortes de discours comme des cérémonies d’éclat, ou un grand homme est éclipsé par la pompe même dont on l’environne.
Rodolphe Töpffer est né à Genève, le 17 février 1799, en nonante-neuf, comme on y dit encore ; il se trouve antérieur de quelques années, par la date de sa naissance, à cette génération romantique qui, vers 1828, se remua à Genève ou à Lausanne, à laquelle appartiennent les deux poëtes Olivier de là-bas, et d’où nous sont venus ici Imbert Galloix pour y mourir, et M. […] L’année suivante, son aïeul meurt, et l’enfant, qui suit le convoi sans trop savoir, se retrouve tout ému aux mêmes lieux. […] Dans le second moment, qui s’intitule la Bibliothèque de mon Oncle, c’est de la jeune juive, si docte et si belle, qu’il est épris mystérieusement ; elle meurt. […] La plupart des hommes célèbres en France, s’ils n’y prennent garde, meurent au moral, dans un véritable état de dilapidation, j’allais dire pis. […] Je n’ai jamais qu’à faible haleine Et d’un accent serré de peine Laissé tomber le mot Adieu ; Malade du mal de la terre, Tout bas soupirant après l’ère Où ce mot doit mourir en Dieu.
Il mourut en lâche après avoir vécu en bourreau. […] XII Machiavel commençait à rentrer en grâce auprès des Médicis quand Léon X mourut. […] « L’Italie antique est morte, disait-il, le jour où l’empire a été transporté à Constantinople ; la Rome des Césars est morte le jour où le christianisme est né. […] La reine Caroline était morte de douleur à Vienne, où elle avait cherché un asile contre l’humiliation du patronage impérieux des Anglais.
… et penser à tant de belles choses modernes qui mourront, mon cher, sans un homme, sans une main qui les sauve ! […] Mme Gervaisais, jeune veuve riche, intelligente et d’esprit indépendant, vient à Rome avec son petit enfant, s’éprend de la Rome païenne, puis s’en détache, subit ensuite dans son imagination et dans son cœur la Rome chrétienne, est décidément convertie par une maladie de son petit garçon et sa guérison miraculeuse, est prise d’une dévotion exigeante et insatiable, se livre à un directeur féroce, s’enfonce dans un ascétisme sombre, renonce à tout, même à l’amour maternel, s’éveille pourtant de cette folie à la voix de son frère, un soldat, qui l’éclairé brusquement sur son mal et qui veut la sauver ; mais elle tombe morte avant de quitter Rome, sous la bénédiction du pape Près d’elle, un autre malade, le petit Pierre-Charles, un bel enfant idiot, d’une sensibilité violente et qui aime furieusement sa mère. « La musique et son cœur, c’était tout cet enfant, un cœur où semblait avoir reflué, l’élargissant, ce qui lui manquait de tous les autres côtés. […] En voulant empêcher ce mariage, elle devient la cause involontaire de la mort de Henri et, brisée par de si fortes émotions, meurt lentement d’une maladie de cœur. […] Cependant une ancienne maîtresse de Barnier, qu’il a beaucoup aimée, vient mourir à l’hôpital. […] Lorsque Romaine, amenée à l’hôpital, reconnaît dans Barnier son ancien amant, est opérée par lui d’un cancer au sein et meurt désespérée et blasphémante, ce qui se passe chez la sœur Philomène, ce qui s’éveille et se glisse d’inconsciente jalousie de femme sous ses scrupules et ses effrois de sainte, tout cela est profondément observé et nuancé à ravir Anatole (dans Manette Salomon) n’est pas seulement supérieur aux bohèmes de Mürger par la variété et la vérité souvent douloureuse de ses aventures : la nature complexe de cet étourdissant et très sympathique raté est merveilleusement démêlée.
Nous lui demandions s’il ne croyait pas notre pièce, telle qu’elle était, appelée à plus de représentations que la pièce qu’il avait jouée cette semaine-là, et qui était morte au bout de trois soirées : il nous laissait entendre, d’ailleurs très poliment, qu’il ne le croyait pas. […] Et pour notre bonheur, il ne faut pas qu’on se l’exagère tant : nous avons, l’un une maladie de nerfs, l’autre une maladie de foie, qui doivent assurer nos ennemis de nos souffrances dans la cruelle bataille des lettres ; deux maladies qui finiront peut-être un jour par nous faire mourir, — à moins que nous ne mourions d’autre chose, tous les deux ensemble, selon des promesses qu’une menace a bien voulu nous faire. […] La mort du héros, un écrivain qui mourrait des attaques de la presse, on la rejetait « comme la mort d’une sensitive ». […] Voici la route de Bellevue, et, sur cette route, nous rencontrons tenant par la main un joli enfant, la jeune fille, jeune femme aujourd’hui, que l’un de nous a eu, au moins pendant huit jours, la très sérieuse pensée d’épouser… et qui nous rappelle du vieux passé… Il y a des années qu’on ne s’est vu… On s’apprend les morts et les mariages… et l’on nous gronde doucement d’avoir oublié d’anciens amis… Puis nous voilà dans la maison de santé du docteur Fleuri, causant avec Banville, et croisant dans notre promenade, le vieux dieu du drame, le vieux Frédérick Lemaître… « … Dans tout cela, par tous ces chemins, en toutes ces rencontres, au milieu de toute notre vie morte que le hasard ramène autour de nous et qui semble nous mener à une vie nouvelle, nous roulons, les oreilles et les yeux aux bruits et aux choses comme à des présages bons ou mauvais, et prêtant à la nature le sentiment de notre fièvre… En rentrant : rien. » Une semaine après, nous apprenions que notre pièce n’était ni reçue ni refusée, que Beaufort voyait un danger dans la mise à la scène de la petite presse… qu’il attendait.
» XXX Il continua à me parler ainsi de cette société morte, en m’en faisant apprécier l’inestimable supériorité sur la société des vivants, jusqu’au moment où les rayons du soleil du soir, qui se retiraient un à un par les ouvertures du volet grillé, laissèrent ce cimetière intellectuel dans une silencieuse obscurité. […] Et encore ces cœurs souffrent par moi, et ces héritages, je ne suis pas sûr de n’en être pas dépossédé demain pour aller mourir sur quelque chemin de l’étranger, comme dit le Dante. […] N’ai-je pas vu mourir avant moi toutes mes pensées ? […] Heureux les hommes qui meurent à l’œuvre, frappés par les révolutions auxquelles ils furent mêlés ! […] Mourir, c’est fuir !
demande au bourreau le malheureux enfant dont on ne peut ajuster le cou sous la lunette. — Elles sont trop belles pour mourir ! […] Elvire est morte, Don Juan a compris son crime, a regardé sa conduite, l’a trouvée odieuse et s’est condamné à la retraite. […] … Mais le Grand Esprit eut pitié d’elle, et une dernière décharge la jeta à terre, morte cette fois. […] Comme je le disais plus haut, nous mourions de faim. […] Méda devint sous-lieutenant, puis colonel en 1806, fut créé baron en 1808, et mourut tué par un boulet à la bataille de la Moskowa.
Il mourut préfet de la Corse. […] Entre temps, on a distribué des drapeaux neufs, dont la soie présentement meurt de vieillesse sans avoir vu le feu. […] C’est pourquoi on meurt communément de maladies intestinales sous le soleil de l’Indo-Chine. […] Elle meurt, ayant toujours aux lèvres l’énigme de son demi-sourire enfantin et dolent. […] C’est là-bas, sur la Sibylle (vous vous en souvenez) que mourut la « perruche » de « mon frère Yves ».
Son mari le laisse entrer, et elle meurt en le regardant. […] Elle lui confesse sa faute, et Aubenas pardonne, sans trop de peine, à celle qu’il croit morte. […] Il est donc fort naturel qu’Aubenas pardonne à sa femme morte. […] Meurs, sans avoir le temps de l’oraison dernière ! […] Il a la souffrance si inventive, si fertile en images, qu’il la doit aimer, bien qu’il en meure.
La poésie ne mourra pas tant qu’il y aura sur la terre un homme et une femme. […] Comment naissent, croissent et meurent les littératures, les religions, les arts, les sociétés politiques ? […] J’ai perdu toute ma joie, et je ne puis mourir. […] Une Floridienne, morte en couches, confirme le témoignage de ce Polynésien. […] Ici on se regarde mourir.
Celle qui ose braver les dieux, ne doit pas craindre de mourir.
Tu dis que c’est mourir. — Soit, et c’est plus encore, Mais quand on aime, enfant, c’est vivre que mourir. […] Il va mourir. […] Celui-ci meurt en 1662, l’autre était mort en 1642. […] Ces Français des hautes classes savaient admirablement mourir. […] Celui-là ne mourrait pas comme il meurt, en écrivant à son fils une lettre dont on devine qu’elle sera le contraire du sinistre testament de son propre père, si une émanation morale ne lui était pas arrivée, venue de cette femme qu’il a rêvé un jour de séduire.
Et si vous chantez, chantez jusqu’au bout, comme les cigales qui en meurent ! […] De temps en temps, on nous sert dans les feuilles le dernier romantique qui vient de mourir. […] D’ailleurs, je vous le dis en gémissant, la poésie populaire, la vraie, est bien morte, et je doute qu’elle renaisse jamais, sinon chez quelques lettrés. […] — La poésie populaire ne peut mourir. […] De sorte que l’école parnassienne, issue du procédé, meurt par le procédé… L’évolution parnassienne est terminée ; elle n’a donné aucun jeune poète de valeur depuis une dizaine d’années.
Mais peut-on s’étonner si cela échappe et si le gazouillement meurt sous la feuillée où il se dérobe.
L’édition qu’il a donnée de Tacite, est la meilleure réfutation du sentiment de ceux qui prétendent qu’on ne sauroit bien écrire dans une langue morte ; non seulement elle offre la connoissance la plus profonde de la Langue Latine, mais encore l’imitation la plus heureuse du meilleur Historien qu’aient eu les Romains.
GOURNAY, [Marie Jars de] morte à Paris en 1645, âgée de 80 ans, fut en haute considération parmi nos premiers Académiciens.
Sévigné, [Marie de Rabutin, Marquise de] née en 1626, morte en 1696.
Tencin, [Claudine-Alexandrine Guerin de] sœur du Cardinal de ce nom, née à Grenoble, morte à Paris en 1749.
Note préliminaire Le Constitutionnel, dans les derniers jours de septembre 1849, publia la note suivante : La littérature ne saurait mourir en France.
Ce Roseau est un malin, c’est le cousin du Renard ; il nargue le Chêne, — le Chêne qui va mourir ! […] Elle était sans verbe ni sentiment, sans rhythme ni rime, une chose morte et sans nom, un idéal perdu. […] Nous avons vu comme on meurt sur le théâtre classique : des âmes qui s’évaporent. […] Mais ils constituent avec la véritable (qui est fausse) religion actuelle et vivante (qui est morte) un anachronisme dont elle s’épouvante. […] Dans cet effort magnifique et insensé les plus grands s’épuisent et meurent.
Elle est morte et bien morte, en effet ! […] Non, elle se contente de mourir à l’antique ! […] Mais toi, tu les as oubliées, et tu veux me faire mourir… Ne me fais pas mourir ! […] Cousin mourra comme le bonhomme Hulot ! […] Viennet, qui doit forcément croire à son existence, puisqu’il se croit lui-même un classique… Mais elle est morte et bien morte !
Quelques semaines après, il mourut à Louveciennes. […] Le jeune Lacouture, épuisé de maladie, se mourait. […] Ce fut chez elle qu’il mourut le 12 octobre 1835, au château d’Entre-deux-Monts. […] Il mourut le 24 janvier 1837. […] Le testateur ne mourut qu’en 1849, âgé de quatre-vingt-six ans.
On ne pouvait vraiment pas nous condamner à mourir toutes les deux ; il fallut bien céder. […] La mère Sainte-Trinité est morte dans la nuit. […] La nuit, quelques-unes des grandes, les plus pieuses, obtiennent la faveur de veiller la morte, avec les religieuses. […] … — La sœur Anaïs se meurt ! […] — Parce qu’elle est morte.
Si cela continue, il ne me restera seulement pas la réponse que fit, au moment de mourir, ce bon M. de Lagny, à notre illustre Confrere Maupertuis.
On sait qu’après avoir épuisé l’indulgence de Louis XI, perdu les bonnes graces d’Edouard V, Roi d’Angleterre, il mourut en pays étranger, accablé de chagrins, déchiré de remords, & détesté de tous les honnêtes gens.
Robert de la Fresnaye est au désespoir ; en mourra-t-il ? […] D’où il suit qu’une très honnête femme, qui a le malheur d’aimer deux hommes à la fois, n’a qu’un moyen de se tirer d’affaire avec honneur : c’est de mourir. […] Le faible et imbécile Fédor vint à mourir sur ces entrefaites, et l’on ne manqua pas de dire que c’était Boris qui l’avait empoisonné. […] Malade déjà, affaibli par la souffrance, assailli de pressentiments sinistres, Boris meurt, tué par une ombre : — « Il a régné comme un renard, il meurt comme un chien », disait le peuple, et le mot est resté proverbial dans l’histoire de Russie. […] Mais elle ne meurt pas, elle ne peut pas mourir ; ou, si elle mourait, c’est que le cœur de l’homme cesserait de battre, qu’une fibre se briserait dans les entrailles mêmes de l’humanité, que le dialogue immortel entre l’âme et la nature s’interromprait tout à coup, ou plutôt que l’univers s’écroulerait pour faire place à je ne sais quel chaos immobile et taciturne.
amour d’enfant, tu nous ferais mourir ! […] Dès qu’ils ont pondu, l’agitation cesse ; les voilà tranquilles, ils peuvent mourir. […] Et tout cela mourra ! […] On meurt très bien avec un chef-d’œuvre de diction. On meurt très bien en affirmant sa personnalité et son style dans un écrit fortement original.
. — Bénis Dieu, lui dit-elle, et meurs. […] Thomas Morus sut mourir pendant une année et mourir en aimant la vie, ce qui redouble encore la grandeur du sacrifice. […] Il mourut, parce qu’il le voulait, immolant à sa conscience le bonheur avec la vie ; sacrifiant toutes les jouissances à ce sentiment du devoir, la plus grande merveille de la nature morale, celle qui féconde le cœur comme dans l’ordre physique le soleil éclaire le monde. […] Et cet homme qui voulait mourir, n’avait-il pas de patrie, ne pouvait-il pas combattre pour elle ? […] Si je me dérobais au malheur éclatant qui m’est destiné, je ne fortifierais point par mon exemple l’espérance de ceux que mon sort doit émouvoir ; les anciens élevaient leur âme par la contemplation de leurs propres forces, les chrétiens ont un témoin et c’est devant Lui qu’il faut vivre et mourir ; les anciens voulaient glorifier la nature humaine, les chrétiens ne se regardent que comme la manifestation de Dieu sur la terre ; les anciens mettaient au premier rang des vertus la mort qui soustrait au pouvoir des oppresseurs, les chrétiens estiment davantage le dévouement qui nous soumet aux volontés de la Providence.
Ce matin, allant dîner chez Goethe, j’appris en route que la grande-duchesse mère venait de mourir. […] — Une petite amourette, a-t-il dit, voilà la seule chose qui puisse rendre supportable un séjour aux eaux, autrement on mourrait d’ennui. […] Goethe s’enferme pendant des années entières dans l’ombre de ses méditations pour y trouver le mot de Dieu que les hommes ne comprennent pas tout entier encore, parce qu’il n’en dit que la moitié ; l’autre moitié, mystique et réparatrice, il passe vingt-cinq années de son âge mûr et de sa vieillesse à la trouver, et il n’en donne qu’une partie avant de mourir. […] Le duc de Weimar meurt après cinquante ans d’amitié, mais sa femme et son fils survivent, et la faveur du grand homme revit tout entière en eux jusqu’à son dernier jour. […] La reine, adorée de l’Allemagne et du monde, meurt d’humiliation ; l’espoir de la venger court dans tous les cœurs de l’Allemagne.
Les anciens l’ont bien connu ; ils adoraient la patrie, et c’est un de leurs poètes qui a dit qu’il était doux de mourir pour elle. […] Elle proclame la liberté, réclame l’égalité, et réconcilie ces deux sœurs ennemies en leur rappelant qu’elles sont meurs, en mettant au-dessus de tout la fraternité. […] Que l’étranger n’accepte plus leurs produits, ou qu’il ne leur fournisse plus les moyens de fabriquer, les voilà condamnés à mourir de faim. […] Et il en est qui meurent de faim. Si la terre produisait beaucoup plus, il y aurait beaucoup moins de chances pour qu’on ne mangeât pas à sa faim 26, pour qu’on mourût de faim.
Le sentiment de la vie, de l’effort contraire, de l’action et de la réaction, remplace la conception de l’idée abstraite et subtile, et morte pour ainsi dire, puisqu’elle n’est pas incarnée dans le monde… On va, on sent avec la foule ; on a failli parce qu’on a vécu, et l’on se prend d’indulgence pour les fautes des autres. […] Du reste, pourvu que les formes en soient nobles et pures, il importe peu que ce soit Apollon ou Hercule, la Diane chasseresse ou la Vénus de Praxitèle. » « Voyageur, annonce à Sparte que nous sommes morts ici pour obéir à ses saints commandements. » « Ils moururent irréprochables dans la guerre comme dans l’amitié79. » « Ici reposent les cendres de don Juan Diaz Porlier, général des armées espagnoles, qui a été heureux dans ce qu’il a entrepris contre les ennemis de son pays, mais qui est mort victime des dissensions civiles. » Peut-être, après tout, ces nobles épitaphes de héros ne lui revinrent-elles à l’esprit que le mardi, dans l’intervalle des Ordonnances à l’insurrection, et comme un écho naturel des héroïques battements de son cœur. […] Une fois seulement, à un bruit plus violent qui se faisait dans la rue, il parut craindre que le peuple n’eût le dessous et ne fût refoulé ; on le rassura ; ce furent ses dernières paroles ; il mourut calme et grave, recueilli en lui-même, sans ivresse comme sans regret. (29 juillet 1830.) […] Son stoïcisme se serait réfugié encore plus avant dans la contemplation silencieuse des choses ; la réalité pratique, indigne de le passionner, ne lui apparaîtrait de jour en jour davantage que sous le côté médiocre des intérêts et du bien-être ; il s’y accommoderait en sage, avec modération ; mais cela seul est déjà trop : la tiédeur s’ensuit à la longue ; fatigué d’enthousiasme, une sorte d’ironie involontaire, comme chez beaucoup d’esprits supérieurs, l’aurait peut-être gagné avec l’âge : il a mieux fait de bien mourir !
je l’ai vu mourir avant son malade, à la fleur de ses années, d’une maladie de trois ans, tête à tête avec un crucifix d’ivoire suspendu par un chapelet de femme au bois de son lit. […] Le pauvre malade mourait d’amour contenu, pour ne pas faillir à l’amitié et à la vertu ; que l’éternité lui soit douce ! […] Il sera de plus un poète sérieux, ayant le respect de ceux qui l’écoutent, et non un de ces poètes moqueurs et siffleurs, tels que nous venons d’en voir vivre et mourir deux ou trois, qui mêlent le fifre au concert des anges, et qui soufflent la froide ironie dans l’âme de la jeunesse, au lieu du saint enthousiasme, seul thème véritable des chants immortels ! […] Idéale union, pourquoi, pourquoi mourir ?
Plus vous me montrez de chances de succès, s’il me convenait de vivre, plus beau et plus méritoire, à moi, me sera-t-il de mourir ! […] La meilleure preuve que je puisse vous donner de la liberté réfléchie de ma résolution, c’est que je ne me plains de personne ; car maudire les Dieux ou accuser les hommes, c’est le signe d’un homme qui répugne à mourir et qui voudrait vivre encore. » Quelle grandeur de civisme, même dans ses vices, étale ce peuple romain ! Othon était un criminel, mais il était Romain ; il parle comme Socrate, il meurt comme un martyr. […] Que Néron ensuite ait contemplé sa mère morte, et qu’il ait loué les formes de son corps, il y en a qui l’affirment, il y en a qui le nient.
Ils y verront par quelles séries d’événements et de dégoût de la monarchie d’Orléans et du gouvernement à suffrage restreint dit parlementaire, je fus induit à composer cette Histoire des Girondins si violemment et souvent si injustement accusée, et dans quel esprit je la juge, je la justifie ou je la condamne aujourd’hui où l’âge qui apaise tout et où la mort qui n’a plus d’ambition sur la terre laissent parler la conscience de l’écrivain et de l’homme politique, comme la postérité parlera de lui si elle daigne en parler, car nos œuvres et nos livres meurent souvent avant nous. […] Je touche à peine à ma pleine maturité ; j’ai vu de mes yeux d’enfant la première république sans la comprendre et sans me souvenir d’autre chose que des sanglots qu’elle faisait retentir dans les familles décimées par les prisons ou les échafauds ; j’ai vu l’empire sans entendre autre chose que les pas des armées allant se faire mitrailler sur tous les champs de bataille de l’Europe, et les chants de victoire mêlés au deuil de toutes ces familles du peuple qui payaient ces victoires du sang prodigué de leurs enfants ; j’ai vu l’Europe armée venir deux fois, sur les traces de nos armées envahissantes, envahir à son tour notre capitale ; j’ai vu les Bourbons rentrer avec la paix humiliante mais nécessaire à Paris et y retrouver la guerre des partis contre eux au lieu de la guerre étrangère éteinte sous leurs pas ; j’ai vu Louis XVIII tenter la réconciliation générale, dans le contrat de sa charte entre la monarchie et la liberté ; je l’ai vu manœuvrer avec longanimité et sagesse au milieu de ces tempêtes de parlement et d’élection qui ne lui pardonnaient qu’à la condition de mourir ; j’ai vu Charles X, pourchassé par la meute des partis parlementaires, ne trouver de refuge que dans un coup d’État désespéré qui fut à la fois sa faute et sa punition. […] VII Toutes ces tendances exigeaient évidemment, pour être graduellement obéies, un élargissement immense du régime électoral, étroit, privilégié, et par conséquent dangereux à un jour donné pour la société elle-même, qui ne vit que de justice et qui meurt toujours de privilège. […] Il n’était pas féroce, mais encore ivre de l’ivresse des champs de bataille du 9 thermidor, où Robespierre, qui n’avait pas voulu combattre, avait préféré mourir désarmé.
Je ne savais pas en naissant que je devais mourir ; l’expérience me l’a enseigné. […] Mille autres besoins de mes sens et de mon âme se partagent mon existence ; puis je meurs, c’est-à-dire que cette existence cesse ici-bas, que mon âme, mon souffle, mon principe d’être, s’évanouit dans la douleur, la douleur mortelle, preuve que l’immortalité est mon premier besoin, et que je vais chercher ma vie nouvelle et supérieure, avec des conditions parfaites ou meilleures, avec ceux ou celles que je quitte en pleurant et regrette dans ce monde. XIII Mais, avant de mourir, le besoin de penser et de conclure me travaille incessamment. […] Il en est venu à ses fins ; il s’est couvert de fleurs et de fruits, il a reproduit et disséminé son espèce ; il va mourir avec le tronc pourri dont il a causé la mort, il va tomber avec le support qui se dérobe sous lui. » XVIII « Le sipo matador n’est, après tout, qu’un emblème parlant de la lutte forcée des formes végétales dans ces forêts épaisses où l’individu est aux prises avec l’individu, l’espèce avec l’espèce, dans le seul but de se frayer une voie vers l’air et la lumière, afin de déployer ses feuilles et de mûrir ses organes de reproduction.
Ce tribut payé à la douleur conjugale, elle se souvient du commandant, à qui elle vient de donner des droits en acceptant la démission qu’il lui offrait tout à l’heure ; et vite elle lui écrit de partir « pour respecter son veuvage. » Si Louis Guérin ne lit pas entre les lignes de ce billet doux le conseil de se faire tuer au Mexique ou d’y mourir de fièvre jaune, c’est qu’il a la vue basse, comme tous les amants. […] La scène est cruelle, un peu forcée peut-être ; elle nous fait haïr cette Célimène, glacée et glaciale, qui fait la morte pour faire reculer l’amour, et qui distille par ses regards, par ses paroles, par ses gestes, par l’indifférence insultante de toute sa personne, le froid poison qui glace les illusions et perce le coeur. […] Mais, comme j’ai fait imprimer ma tragédie avec les deux dénouements, les directeurs des théâtres seront les maîtres de choisir celui qu’il leur conviendra d’adopter. » Ainsi, les directeurs endurcis laissaient impitoyablement le More poignarder l’innocente Hédelmone : Eh bien, meurs ! […] Ce n’est pas tout : il l’abandonne, durant toute une scène, à son enquête malveillante ; il lui permet, en quittant la chambre, de constater la régularité de son pouls, la coloration normale de son teint et l’égratignure à fleur de peau dont il « se fait mourir », comme dirait, en son argot, mademoiselle Navarette !
Jules Claretie Le Vavasseur, qui meurt septuagénaire, avait eu ses heures de poésie en sa jeunesse verdoyante comme les haies de son pays normand.
En effet, il y a des morceaux dans les Odes de Racan, qui ne le cedent point aux plus beaux Vers de Malherbe ; telles sont les deux Strophes que voici : Que te sert de chercher les tempêtes de Mars, Pour mourir tout en vie au milieu des hasards Où la gloire te mene ?
Il se réfugia alors dans l'Hôtel de Montmorency, où il mourut, repentant de ses fautes, entre les bras de Mairet, son ami.
Le procès funèbre de la bouche (Gourmantié) Quand la bouche fut morte, on consulta les autres parties du corps pour savoir d’elles laquelle se chargerait de l’enterrement.
Cet homme qui, dans sa modération et son égalité habituelle, était loin d’être insensible, mourut en partie victime de son zèle pour l’amitié. Il apprit, au printemps de 1793, que la femme de son ami lord Sheffield venait de mourir ; il n’hésita pas à voler vers lui, à se mettre en route pour l’Angleterre par l’Allemagne, et à faire ce voyage depuis quelque temps différé, que les circonstances présentes et la guerre engagée rendaient alors plus difficile. Ses infirmités s’en augmentèrent, et, après quelques mois de séjour dans son pays natal, il y mourut le 16 janvier 1794, à l’âge de près de cinquante-sept ans.
J’étais alors plus gaie qu’aujourd’hui. » Cet air vif de Heidelberg lui est encore présent après plus de cinquante ans comme au premier jour ; elle le recommande, quelques mois avant de mourir, à la demi-sœur à laquelle elle écrit (30 août 1722) : Il n’y a pas au monde un meilleur air que celui de Heidelberg, et surtout celui du château où est mon appartement ; rien de mieux ne saurait se rencontrer. […] Madame, se croyant sûre d’elle-même, protesta de son innocence : Mme de Maintenon, avec un grand sang-froid, la laissa dire jusqu’au bout, puis tira de sa poche une lettre, comme Madame en écrivait journellement, adressée à sa tante l’électrice de Hanovre, et dans laquelle il était parlé en termes outrageants du commerce du roi et de Mme de Maintenon : « On peut penser si, à cet aspect et à cette lecture, Madame pensa mourir sur l’heure. » Ce n’était là que la première partie de la scène si admirablement décrite par Saint-Simon, de cette espèce de duel entre les deux femmes. Quand le nom du roi fut hors de cause, Mme de Maintenon eut bientôt à parler pour son propre compte et à répondre aux reproches que lui faisait Madame d’avoir varié de sentiments à son égard : l’ayant laissée dire comme la première fois, l’ayant laissée s’avancer jusqu’au bout et s’enferrer en quelque sorte, elle lui découvrit tout d’un coup des paroles secrètes, particulièrement offensantes pour elle-même, qu’elle savait depuis dix ans et plus, qu’elle avait gardées sur le cœur, et que Madame avait dites à une princesse, morte depuis, laquelle les avait répétées dans le temps mot pour mot à Mme de Maintenon : « À ce second coup de foudre, Madame demeura comme une statue ; il y eut quelques moments de silence. » Puis ce furent des pleurs, des cris, des pardons, des promesses, et un raccommodement qui, fondé sur un triomphe froid pour Mme de Maintenon et sur une humiliation intime pour Madame, ne pouvait être de bien longue durée.
Cowper vécut encore quinze années après la publication de La Tâche ; il ne mourut que le 25 avril 1800. […] Il avait l’âme comme morte. […] Pourtant je n’ai souci ni de la bise amère, Ni des lampes d’argent dans le blanc firmament, Ni de la feuille morte à l’affreux sifflement, Ni même du bon gîte où tu m’attends, mon frère ; Car je suis tout rempli de l’accueil de ce soir, Sous un modeste toit où je viens de m’asseoir, Devisant de Milton, l’aveugle au beau visage ; De son doux Lycidas par l’orage entraîné ; De Laure en robe verte, en l’avril de son âge.
Il mourut subitement, le 6 août 1695, à sa belle maison de Conflans, dont il avait fait un lieu de délices. […] Il y était seul, l’après-midi qu’il mourut, avec son amie la duchesse de Lesdiguières, nièce du cardinal de Retz, et qui était sa dernière liaison ; quoique cette dame ne fût plus jeune, on n’avait pas laissé, par habitude, d’en médire. […] Mais une particularité qu’il ne faut pas omettre à son sujet, c’est que, lorsqu’il mourut en 1733, il laissa par son testament des fondations bizarres, d’une exécution impossible, et qui furent appliquées par l’autorité civile, pour une distribution solennelle de prix dans l’Université, c’est-à-dire pour la fondation du Concours général.
Tous les ans, il en a été malade à mourir, et puis il a succombé. […] « Je vis parce que je ne puis pas mourir », disait-elle. […] Mme d’Albany, mourant en 1824, nomma Fabre son légataire universel, et Fabre, à son tour, étant revenu mourir dans sa ville natale, a légué à celle-ci, en 1837, tous ses trésors, tableaux, livres et manuscrits.
Sa mère, qui avait du sang irlandais, était, dit-on, « une femme d’une haute raison, d’une instruction solide et d’une piété éclairée » ; elle mourut quand il n’avait que cinq ans. […] J’étais né pour vivre et mourir dans une cellule, et encore des plus étroites : in angulo cum libello. […] Il avait ses raisons pour penser et dire, comme il fit dans la suite : « Trop de littérature effémine l’esprit, qui finit par mourir phtisique. » Il n’eut guère jamais que la littérature nécessaire, celle qui lui servait d’arme et d’argument, non pas celle qui est agrément, douceur, oubli, passe-temps et délices.
Vous aurez fait de beaux et légitimes raisonnements sur les races ou les époques prosaïques ; mais il plaira à Dieu que Pindare sorte un jour de Béotie, ou qu’un autre jour André Chénier naisse et meure au xviiie siècle. […] Cependant Boileau vieillit, ses infirmités augmentent, ses amis meurent : La Fontaine et Racine lui sont enlevés. […] Ce qu’on a peine à concevoir, c’est qu’il vendit sur ses derniers jours sa maison d’Auteuil et qu’il vint mourir, en 1711, au cloître Notre-Dame, chez le chanoine Lenoir, son confesseur.
Sais-je ce que je ferais si d’aventure je découvrais qu’au temps où j’étais enfant un fort galant homme a fait tuer mon père étant donné que le meurtier, aimé de ma mère et follement épris d’elle, l’a épousée et rendue parfaitement heureuse, et qu’il va du reste mourir sous peu d’une maladie de foie ? […] L’Irréparable, c’est l’histoire d’une jeune fille qui meurt du souvenir d’une souillure. […] Mais cette anxiété, c’est déjà le commencement de la rédemption morale, c’est le signe que toute vertu n’est pas morte en nous.
Car (pour ramener la complexité des choses à des expressions toutes simples) on aurait presque tout dit en disant que si la Grèce s’éleva par sa générosité charmante, elle périt par quelque chose d’assez approchant de ce que nous nommons le dilettantisme ; et de même, si c’est en somme par la vertu que grandit la république romaine, dire que, avant de mourir par les barbares, l’Empire mourut du mensonge initial d’Auguste et de n’avoir pas eu les institutions qui en eussent fait une patrie au lieu d’un assemblage de provinces, et à la fois de la corruption païenne et de l’indifférence chrétienne à l’égard de la cité terrestre, et encore de l’abus de la fiscalité qui amena la disparition de la classe moyenne, c’est dire, au fond, qu’il périt faute de franchise ou de bon jugement chez ses fondateurs, faute de liberté et d’égalité, faute de communion morale entre ses parties et, finalement, faute de bonté. — Et toutefois le sévère historien sait gré à Rome d’avoir eu quelque chose de ce qu’il lui reproche de n’avoir pas eu assez. […] Et il mourut doucement, malgré tout, une invincible espérance au cœur.
Elle s’était laissé asservir, et dans son engourdissement impuissant, en même temps que mourait sa vie nationale, l’image de cette vie — l’art de son théâtre s’évanouissait. […] … Cependant que se meurt notre théâtre, notre littérature, reste forte. […] Ceux qui, résistant à l’évidence, crieraient qu’un art ne meurt pas, un illustre membre de la Société des Auteurs dramatiques, c’est M.
Elle s’était laissé asservir, et dans son engourdissement impuissant, en même temps que mourait sa vie nationale, l’image de cette vie — l’art de son théâtre s’évanouissait. […] J’attends les arrière-héritiers de Fiorentino et de Saint-Victor, pour savourer l’art avec lequel ils rendront compte, en leurs cinq cents lignes hebdomadaires, des productions véreuses d’un art enterré… VI … Cependant que se meurt notre théâtre, notre littérature reste forte. […] Ceux qui, résistant à l’évidence, crieraient qu’un art ne meurt pas, un illustre membre de la société des Auteurs dramatiques, c’est M.
M. de Chateaubriand, après Atala et René, a eu ses admiratrices passionnées, nobles, tendres, délicates, dévouées jusqu’à en mourir : on eût vu marcher en tête la pâle et touchante Mme de Beaumont. […] Il reçut, à la fin de septembre 1761, une lettre non signée, dans laquelle on lui disait : « Vous saurez que Julie n’est point morte et qu’elle vit pour vous aimer ; cette Julie n’est pas moi ; vous le voyez bien à mon style : je ne suis tout au plus que sa cousine, ou plutôt son amie, autant que l’était Claire. » C’était l’amie de Mme de La Tour, qui faisait ici le rôle de Claire, et qui dénonçait à Jean-Jacques l’admiratrice nouvelle, digne elle-même d’être admirée. […] Elle n’avait point d’enfants ; elle vieillit dans la tristesse, et mourut le 6 septembre 1789, retirée au couvent des Religieuses hospitalières à Saint-Mandé.
La reine Anne venait de mourir ; Chesterfield salua l’avènement de la maison de Hanovre dont il allait être un des champions déclarés. […] Mais sa santé, de tout temps délicate, s’était altérée avant l’âge, et son père eut la douleur de le voir mourir avant lui, à peine âgé de trente-six ans (1768). […] Lord Chesterfield mourut le 24 mars 1773.
Villemain dans la séance publique du 8 août, quand il allait mourir le 23. […] Les connaisseurs pourtant ont retenu et me signalent du doigt dans ces volumes un vrai bijou, la vie et la mort de Mayeux, le fameux Mayeux (le type grotesque de notre versatilité politique), venu au monde à Paris le 14 juillet 1789, et qui s’est successivement appelé Messidor-Napoléon-Louis-Charles-Philippe Mayeux, selon les noms des divers régimes qu’il a, tour à tour, épousés ou répudiés, Mayeux un moment porté sur le pavois après 1830, et qui meurt, vers 1833, de douleur et de honte d’avoir été renvoyé des rangs de la Garde nationale et rayé des contrôles comme coupable de faire rire. […] Voulant expliquer, par exemple, pourquoi le connétable de Luynes, pour le moins aussi digne d’être haï et méprisé que le maréchal d’Ancre, n’a pas encouru la même impopularité dans sa mémoire, il dira énergiquement : « C’est qu’il mourut au sein de sa grandeur, qui se continuait dans une famille riche et puissante ; et il faut toujours au vulgaire l’autorité d’un revers pour lui faire mépriser tout à fait les enfants de la fortune : il ne comprend guère que les dénouements. » Mais le plus souvent sa malice se recouvre, et plus d’un lecteur qui parcourrait le livre avec bonhomie pourrait la laisser échapper.
Après quoi il eut temporairement une ambassade honorifique en Espagne ; puis il entra dans la retraite, où il ne mourut qu’en 1755, à l’âge de quatre-vingts ans. […] Tandis que Monseigneur se meurt à Meudon, « Versailles, dit Saint-Simon, présentait une autre scène. […] Enfin le malade, qui semblait mieux, a une rechute et meurt.
Leibniz, son concurrent, mourut riche aussi, quoique beaucoup moins, et avec une somme de réserve assez considérable. […] Fontenelle, exténué de vieillesse et aussi spirituel que jamais, mourut le 11 janvier 1757, à l’âge de cent ans moins un mois, uniquement parce qu’il fallait mourir.
Puisqu’on en peut causer comme d’une chose morte, et que le poison a péri avec le parfum, parlons-en donc sans complicité, sans pruderie, et comme d’un des témoignages les plus curieux des mœurs d’une époque qui a commencé par être frivole et qui a fini par être sanglante. […] Sa mère, qui était morte en le mettant au monde, était sœur de la duchesse de Choiseul, femme du Premier ministre. […] On ajoute que, dans un sentiment plus élevé, il s’écria à l’instant de la mort : « J’ai été infidèle à mon Dieu, à mon Ordre et à mon Roi : je meurs plein de foi et de repentir39. » On aime à penser qu’en ce moment de suprême équité, un autre nom, une autre infidélité lui serait revenue encore en mémoire, et qu’il se serait dit quelque chose de plus à lui-même s’il avait pu prévoir que, quelques mois après, sa femme, cette modeste, charmante et vertueuse femme dont il a si indignement parlé, et dont tous, excepté lui, ont loué l’inaltérable douceur, la raison calme et soumise, et les manières toutes pleines de timidité et de pudeur, monterait à son tour sur l’échafaud.
la belle destinée de ne pouvoir plus mourir, sinon avec un immortel ! […] François Ier fut informé des premiers travaux d’Amyot et de ses projets : il vit la traduction du roman de Théagène et Chariclée, qui fut imprimée l’année même de sa mort (1547) ; il eut connaissance de quelques Vies de Plutarque qu’Amyot lui présenta comme essai : il lui commanda de poursuivre une si généreuse entreprise, et, pour l’y encourager, il le nomma abbé de Bellozane : ce fut le dernier bénéfice que conféra ce roi ami des lettres, car il mourut peu après. […] Il mourut le 16 février 1593, dans sa quatre-vingtième année, sans avoir entrevu le retour au mieux et le salut ici-bas.
Dans la troisième partie, l’Ombre de Mme de Buffon, morte à la fleur de l’âge et de la beauté, nous est représentée s’adressant à la Parque pour la fléchir, et obtenant la guérison de son époux. […] Le Brun mourut le 2 septembre 1807, à l’âge de soixante-dix-huit ans. […] « Je ne meurs pas, disait-il, je sors du temps ».
On l’a laissé mourir, il y a une douzaine d’années, en mai 1839, sans lui accorder assez d’attention : il avait, deux ans auparavant, en 1837, réglé en quelque sorte ses comptes avec le public en faisant imprimer les lettres et notes adressées par lui, dans le cours de onze années, à Bonaparte premier consul et empereur ; il y a joint une Introduction qui est un des meilleurs et des plus piquants morceaux d’histoire contemporaine. […] Plutôt mourir que de vivre sans toi ! […] Fiévée ne mettait de différence que celle qui se trouve entre tuer et laisser mourir.
Auguste-Frédéric-Louis Viesse de Marmont, qui vient de mourir à Venise le 3 mars 1852, le dernier et le plus jeune d’âge des maréchaux de l’Empire, était né le 20 juillet 1774 à Châtillon-sur-Seine, d’une famille toute militaire. […] Il en eut deux enfants : une fille, morte à douze ans, et un fils dont l’éducation devint son occupation principale. […] Il aurait dû mourir ce jour-là pour sa gloire, disent des historiens que j’estime, mais qui ne voient que le côté brillant et purement militaire de la destinée ; et peut-être bien que lui-même, à certaines heures, ulcéré dans son honneur de soldat, il aura dit comme eux.
Si Dieu m’a créé bourru, bourru je dois vivre et mourir… Les gens d’esprit sont souvent très singuliers ; ils croient connaître le cœur humain mieux que d’autres, et, parce qu’ils ont fait du grec avec le père et qu’ils ne sont pas tout à fait aussi vieux que lui, ils croient que c’est une raison pour être aimés de la fille, d’une toute jeune fille, et cela sans faire de frais, sans rien retrancher à leur humeur, à leur procédé rude, à leur extérieur inculte, et en se conduisant, dès le lendemain de leurs noces, comme de vieux maris. […] Dans cette formation du parti libéral où il entrait alors tant d’éléments divers, Courier reste ce qu’il était de tout temps, le plus antibonapartiste possible, ennemi des grands gouvernants, se faisant l’avocat du paysan, l’homme de la commune, prêchant l’économie, parlant contre la manie des places, voulant de gouvernement le moins possible, faisant des sorties contre la Cour et les gens de cour toutes les fois qu’il y a lieu, méconnaissant ce qu’il y a eu de grand, d’utile, de nécessaire dans l’établissement des Louis XIV, des Richelieu, des grands directeurs de nations, disant en propres termes, pour son dernier mot et son idéal : « La nation enfin ferait marcher le gouvernement comme un cocher qu’on paie, et qui doit nous mener, non où il veut, ni comme il veut, mais où nous prétendons aller, et par le chemin qui nous convient » ; disant encore, et cette fois plus sensément : Il y a chez nous une classe moins élevée (que les courtisans), quoique mieux élevée, qui ne meurt pour personne, et qui, sans dévouement, fait tout ce qui se fait ; bâtit, cultive, fabrique autant qu’il est permis ; lit, médite, calcule, invente, perfectionne les arts, sait tout ce qu’on sait à présent, et sait aussi se battre, si se battre est une science. […] Quatre jours après (18 juin), il mourait d’apoplexie sous le coup de son effroi et de ses remords.
Ceci devait mourir dans le même lieu qui l’a fait naître ; mais ceux qui vivent dans une société ont des devoirs à remplir ; nous devons compte à la nôtre de nos moindres amusements. » Il semble même qu’en terminant ce mémoire, Montesquieu s’attache trop à diminuer le mérite de l’observateur, lequel a souvent besoin de toute sa subtilité d’esprit et de son invention ingénieuse pour amener le fait sous son regard : Il ne faut pas avoir beaucoup d’esprit, disait Montesquieu, pour avoir vu le Panthéon, le Colisée, des Pyramides ; il n’en faut pas davantage pour voir un ciron dans le microscope ou une étoile par le moyen des grandes lunettes ; et c’est en cela que la physique est si admirable : grands génies, esprits étroits, gens médiocres, tout y joue son personnage. […] Aujourd’hui, cette partie nous paraît morte, artificielle ; et, pour peu qu’elle se prolongeât davantage, elle ennuierait. […] C’est ainsi que dans l’Hippolyte d’Euripide, Diane, au moment où le jeune héros va mourir, s’éloigne, quoiqu’il semble qu’elle l’ait aimé : mais, si amie que soit des mortels une divinité ancienne, les larmes sont interdites à ses yeux. — L’Homme-Dieu n’était point venu.
Dans son premier ministère, qui dura cinq ans (1776-1781), il lutte contre les courtisans et contre les abus, et il tombe, il se retire par roideur et faute d’adresse devant le vieux Maurepas, qu’il ne s’agissait que d’user et de laisser mourir. […] Parlant des deux partis qui l’avaient tour à tour et à la fois blessé, du parti aristocratique surtout qui ne lui avait point épargné les sarcasmes amers, il disait, dans la supposition qu’il eût pu en regagner les plus indulgents : « Je ne veux aujourd’hui ni d’eux ni de personne ; c’est de mes souvenirs et de mes pensées que je cherche à vivre et mourir ; et, quand je fixe mon attention sur la pureté des sentiments qui m’ont guidé, je ne trouve nulle part une association qui me convienne. » C’est en ces termes que l’honnête homme blessé s’exaltait lui-même dans le premier soulèvement de sa douleur. […] Necker mourut le 30 mars 1804, dans sa soixante-douzième année.
Frédéric-Guillaume mourut le 31 mai 1740. […] Obligé de s’arrêter à Memel, puis à Varsovie, il y mourut le 8 novembre 1740, à l’âge de quarante-neuf ans. […] Quarante-cinq ans s’étaient écoulés ; l’aîné des fils de M. de Suhm qui, autrefois blessé au service, avait obtenu le titre de conseiller de guerre et la place de maître des postes à Dessau, allait mourir à son tour à l’âge de soixante-deux ans ; il écrivit à Frédéric une lettre touchante pour lui recommander ses trois fils, tous trois sous les drapeaux et peu avancés.
Racine, sur la suggestion de madame de Maintenon, risque une remontrance qui le fait chasser de la cour, et il en meurt ; Voltaire, sur l’insinuation de madame de Pompadour, aventure un madrigal, maladroit à ce qu’il paraît, qui le fait chasser de France, et il n’en meurt pas. […] Les vers d’amour d’André Chénier avoisinent sans désordre et sans trouble l’ïambe courroucé : « Toi, vertu, pleure si je meurs !
Sur la terrasse encore, au pied du même massif, un peu plus sur le fond que le groupe précédent, une femme morte, les pieds étendus du côté de l’homme convulsé, la face tournée vers le ciel, toute la partie supérieure de son corps nue, son bras gauche étendu à terre et entouré d’un gros chapelet, ses cheveux épars, sa tête touchant au massif. […] Pour cette femme étendue morte sur de la paille avec son chapelet autour du bras, plus je la vois, plus je la trouve belle. ô la belle, la grande, l’intéressante figure ! […] Comme elle est bien morte !
., — des Trois Roses surtout, le chef-d’œuvre du livre, dans cette variété de mourantes ; ces trois fleurs, d’un blanc si différent dans le lumineux et qui ne se fanent point pour mourir ! […] Ce qui distingue l’auteur des Horizons célestes de tous les grands inventeurs chrétiens, c’est que le paradis de sa pensée est le paradis, du moi intégral, de ce moi qui a aimé et qui a vu mourir ce qu’il aimait, et qui ne veut pas accepter la notion affreuse d’un ciel terrible où le moi serait mutilé dans son bonheur même. […] Voilà le cercle dans lequel, pour ainsi dire, ce cœur qui ne veut pas mourir renferme le Dieu dont elle exige l’immortalité.
Un brillant historien de nos jours4 a prétendu qu’il mourut l’esprit troublé, la conscience chargée. […] Malheureusement, il ne sert pas beaucoup devant les hommes de mourir en se repentant de sa faute. […] Sans le fanatisme valétudinaire de Louis VIII, qui mourut à la peine, toute grande démonstration eût été impossible.
Il y a quelque chose de douloureux et d’attachant dans cette destinée d’un jeune esprit qui regarde le monde et la vie exclusivement à travers la nation juive et qui meurt au service de ceux qu’il aime le plus, mais dont il tient à se distinguer. […] On peut hardiment supposer que ce petit recueil de lettres exprime une manière de penser qui fut à peu près unique dans les ravins de la Fille Morte. […] De degré en degré, nous nous sommes élevés ; ici la fraternité trouve spontanément son geste parfait : le vieux rabbin présentant au soldat qui meurt le signe immortel du Christ sur la croix, c’est une image qui ne périra pas.
Poète qui n’a été qu’un type éclatant de bien des âmes plus obscures de son âge, qui en a exprimé les essors et les chutes, les grandeurs et les misères, son nom ne mourra pas, Gardons-le particulièrement gravé, nous à qui il a laissé le soin de vieillir, et qui pouvions dire l’autre jour avec vérité en revenant de ses funérailles : « Notre jeunesse depuis des années était morte, mais nous venons de la mettre en terre avec lui. » Admirons, continuons d’aimer et d’honorer dans sa meilleure part l’âme profonde ou légère qu’il a exhalée dans ses chants ; mais tirons-en aussi cette conséquence de l’infirmité inhérente à notre être, et de ne nous enorgueillir jamais des dons que l’humaine nature a reçus.
Napoléon, qui n’avait désespéré à aucun moment, voyant, tout s’écrouler à la fois, tout manquer sous lui, son armée en débris et son Empire, reculait à pas lents sous une pluie de feu ; il semblait décidé à ne pas survivre, vouloir mourir avec ses grenadiers. […] On ne se rendait pas, et l’on mourait.
Hase, mourait surchargé de titres, de places et d’honneurs bien mérités, Dubner, à l’âge de plus de soixante ans comme au premier jour, n’était rien qu’un travailleur isolé, tout entier voué à l’exécution des grandes entreprises philologiques qui roulaient sur lui, dont il était la cheville ouvrière et l’âme, se dérobant, ne s’affichant pas, étranger au monde, n’ayant au dehors que les relations strictement nécessaires, enseveli, comme il le disait, dans sa vie souterraine au fond de sa mine philologique, et tout semblable à l’un de ces mineurs du Erzgebirge auquel lui-même il se comparait ingénieusement. « Oui, je le remarque avec peine, avec regret pour la France, l’Académie des Inscriptions et Belles-lettres a laissé vivre et mourir, sans se l’associer, ce savant homme si essentiel, dont la perte est reconnue aujourd’hui, par tous ceux qui ont droit d’avoir un avis en ces matières, comme immense et presque irréparable.
Or il y a dans l’Académie et hors de l’Académie un parti qui a besoin de se recruter, parce qu’il se meurt ; et qui, en même temps, ne veut que des recrues inoffensives, parce que toute supériorité l’offusque et l’effraye. […] « Lucrèce dit qu’en un cœur coupable sont tous les fouets, tous les aiguillons de l’enfer ; et que le méchant, ne voyant aucun terme à ses tortures, les prolonge et les aggrave en idée après cette vie : d’où naît la crainte chimérique du Tartare : ……………………… At mens sibi conscia facti, Præmetuens », adhibet stimulos torretque flagellis Mec videt interea, qui terminus esse malorum Possit, nec quæ sit pœnarum denique finis ; Atque eadem metuit magis hæc ne in morte gravescant Hinc Acherusia fit stultorum denique vita.
Victor Hugo disait de lui en ce temps-là : « Jules Lefèvre a été mordu par Latouche. » Il donnait l’idée de quelqu’un qui a bu d’un breuvage vénéneux et qui n’en peut ni guérir ni mourir. […] Il mourut avec la fermeté d’un stoïque dans les opérations de la pierre.
Lorsqu’elles naquirent et que le chant parut, il y eut des hommes si transportés de plaisir, qu’en chantant ils oublièrent de manger et de boire, et moururent sans s’en apercevoir. C’est d’eux que naquit la race des cigales, et elles ont reçu ce don des Muses, de n’avoir plus besoin de nourriture sitôt qu’elles sont nées, mais de chanter dès ce moment, sans manger ni boire, jusqu’à ce qu’elles meurent.
Ni Dante ni Pétrarque ne troublèrent jamais de leurs violences Béatrice et Laure ; et Elvire mourut sans avoir été bousculée par Lamartine. […] C’est celui de Phèdre qui meurt, d’Ériphile qui dénonce, d’Hermione qui fait tuer, et de Roxane qui tue.
Jusqu’à l’arrestation de Jean, que nous plaçons par approximation dans l’été de l’an 29, Jésus ne quitta pas les environs de la mer Morte et du Jourdain. […] Il existe au monde peu de régions plus désolées, plus abandonnées de Dieu, plus fermées à la vie que la pente rocailleuse qui forme le bord occidental de la mer Morte.
C’est ici le pain qui est descendu du ciel, afin que celui qui en mange ne meure point. […] Ce pain n’est pas comme la manne, que vos pères ont mangée et qui ne les a pas empochés de mourir ; celui qui mangera ce pain vivra éternellement. » Une telle obstination dans le paradoxe révolta plusieurs disciples, qui cessèrent de le fréquenter.
La joie ou la tristesse instinctives que tout homme éprouve encore, aujourd’hui, en voyant la campagne mourir et renaître, le Grec antique les ressentait avec des transports passionnés. […] C’était donc lui surtout qui florissait et mourait selon les saisons.
» * * * — Le lit où l’homme naît, se reproduit et meurt : quelque chose à faire là-dessus, un jour. […] Une jeune fille qu’on croyait morte à la suite de cette maladie, — son père pleurant au pied de son lit, — rejette soudain le drap qu’elle avait sur la tête, se soulève dans une attitude de prière, montrant un visage à la beauté surnaturelle qui fait croire à un miracle, et après un petit discours de consolation adressé à son père, se recouche et repose le drap sur sa tête, en disant : « Je puis dormir maintenant. » * * * — J’ai connu un amant qui disait à sa maîtresse se plaignant d’avoir perdu une fausse dent de 200 francs : « Si tu la faisais afficher ?
Sa sœur Drusile étant morte, il la mit au rang des déesses. Il fit mourir ceux qui la pleuraient, et ceux qui ne la pleuraient pas : les premiers, parce qu’ils pleuraient une déesse ; les autres, parce qu’ils étaient contens de sa mort.
Un jour, la maîtresse s’en va, ou meurt — je ne sais plus lequel — et cette séparation trouble si bien la cervelle de l’infortuné Caillou, qu’il tue son lapin, de désespoir, en lui cognant la tête contre un mur. […] Qui donc a prétendu que les artistes mouraient de faim ?
Elle était plus encore… elle était la faiblesse, cette forte femme, la faiblesse contre la souffrance, contre la vie, contre elle-même, contre tout, et elle est même morte de cette faiblesse, tant elle était femme et n’était que femme, cette femme sur laquelle tout le monde s’est trompé, même Napoléon qui la crut à tort un Napoléon femelle, un bronze contre son bronze ! […] Pour la première fois, on soupçonne la femme faible qu’elle fut en tout, cette femme éblouissante de génie, qui fut, au fond, aussi faible que Valmore, et qu’on y voit, en pleine maturité, de sa faiblesse divine, mourir !
Et elle doit en mourir, grâce par grâce, si elle n’en est morte déjà !
Et comme tout se tient dans les sociétés, dans les idées et dans le langage, et que le désordre introduit quelque part amène le désordre partout, si les comédiens des sociétés modernes et chrétiennes sont mis là où la bassesse romaine et païenne mettait avant leur mort les empereurs, sous qui elle tremblait, où ces sociétés mettront-elles leurs vrais grands hommes, — ceux qui honorent, éclairent et servent la patrie, et, quand il le faut, meurent pour elle ? […] Entre le tabac, qui narcotise l’esprit des modernes dans des proportions que la science et l’histoire constateront plus tard, et le théâtre, cette passion de gens fatigués et de nation en décadence, l’esprit meurt, la conversation s’éteint.
Il n’y a rien de plus intelligent dans ce pays-ci que de mourir. […] Il n’y a pourtant de beau dans le monde que le dévouement et que l’héroïsme, et si l’excessif n’est pas toujours sublime, le sublime est toujours excessif, depuis le : Qu’il mourût !
On ne sait pas assez combien les peuples chicanent peu avec les races qu’ils aiment, et quelle puissance de fautes de toute espèce ces races prédestinées peuvent porter dans leur tête ou en faire sortir, sans en mourir ! […] Malheureusement, cette justice à rendre à un homme qui mourut loin de son trône et loin de son pays, mais ferme dans sa conscience comme dans son poste, n’a point tenté Macaulay.
Les leveurs d’empreinte qui viendront après nous et qui voudront prendre le plâtre de cette grande Morte du xixe siècle, de cette époque qui aura vécu dans la turbulence et dans l’inquiétude, trouveront sur son front deux caractères ineffaçables, à travers lesquels il sera toujours aisé de la reconnaître : — l’individualisme dans la vie morale, et, dans la vie intellectuelle, la fureur de généraliser. […] Homme à destinée complète, peut-être aurait-il attaché, s’il avait vécu, un éclat de plus, la gloire militaire, à son nom ; mais il mourut à Chio, et, à ce qu’il paraît, des suites d’une blessure reçue dans un combat de mer resté obscur.
Il n’avait pas plus que Stendhal cette fringale de publicité dont se tordent et se meurent les médiocrités et les vanités de ce temps, et même il riait de cette colique. […] Quand l’auteur de La Renaissance fait parler un de ces personnages dont on ne voit que l’action morte dans les autres histoires, il le fait positivement renaître, et son livre mérite d’être appelé Renaissance deux fois.
De toutes les sœurs, qui ne furent que des femmes, celle-là fut un démon que l’enfer reprit à Louis XV, et elle l’aurait foulé, si elle n’était pas morte, à ses pieds hautains, comme jamais la Pompadour, cette bourgeoise, et la Dubarry, cette fille du peuple, ne le foulèrent aux leurs ! […] Quand son infernale sœur eut pris sa place dans ce lit de roi qui allait devenir une place publique, madame de Mailly mourut, ce cilice ensanglanté de la pénitente pour toute peau de tigre, embaumant et purifiant sa mémoire souillée dans le mot sublime d’humilité qu’elle dit, un jour, sous l’atroce injure qui la nommait : « Si vous la connaissez, priez Dieu pour elle !
Ses Mémoires, doivent dire s’il avait été baptisé autrement qu’à la Jean-Jacques Rousseau, le Spartiate de Genève, qui voulait qu’on plongeât le corps de l’enfant, pour le faire fort, dans l’eau glacée, au sortir du ventre des mères, dût-il en mourir, et tant pis pour lui s’il en mourait !
Il masquait son nom et sa personne avec des chefs-d’œuvre qu’il ne signait pas, et l’Angleterre se mourait de curiosité, de cette curiosité plus piquante et plus enivrante pour l’âme choisie qui l’inspire, que la gloire elle-même et ses bruyantes admirations ! […] » — Raymond Brucker, qui n’a jamais bénéficié de rien, et pour lequel l’Église, dont il fut le serviteur fidèle et héroïque jusqu’au dernier moment, n’a rien fait, et qu’elle a laissé mourir de faim ou à peu près ; Raymond Brucker, dont les grands hommes littéraires du temps où il fut littéraire comme eux, avec autant de talent qu’eux, diraient peut-être, s’ils vivaient encore : « Je ne connais pas cet homme-là », comme saint Pierre l’a dit de Jésus-Christ, aura-t-il, à propos de ses Docteurs du jour, ce bonheur d’outre-tombe, qui ne sera un bonheur que pour nous qui l’avons aimé, de quelques rumeurs flatteuses autour de son tombeau ?
L’hermine, qu’une seule tache fait mourir, a gardé une place blanche, qui témoigne de sa pureté première. […] Elle mourra vite.
Il mourut à quatre-vingts ans. […] On l’appela Agrippa (d’ægre partus), parce qu’en venant au monde il avait tué sa mère et failli lui-même de mourir.
Les poésies célèbres, de Baudelaire ne sont que l’expression des sens révoltés qui se tordent dans l’épuisement et la fureur de leur impuissance, serpents de Laocoon qui n’ont plus à étreindre que le fumier sur lequel ils meurent. […] Au moins, dans tous les autres poètes qui chantent les angoisses familières aux âmes passionnées, ou même dans Baudelaire, le Vampire, ce pourlécheur des pourritures devant lesquelles, vivantes, le malheureux se prosternait, il y a, au milieu des ruines et des désolations de la créature qui se sent mourir et qui croit que tout va finir avec elle, des pages éclairées, des tableaux qui passent accentués plus ou moins de fraîcheur et de mélancolie, des souvenirs qui attirent et retiennent comme des yeux fascinateurs rouverts, des caresses qui se reprennent aux beaux cadavres pressés autrefois sur le cœur.
Le vent n’est pas venu caresser leur poitrine, L’abeille s’en détourne, et je les vois mourir Dans le corsage bleu de mes vases de Chine ! […] Elles n’oublieront pas la manière dont il a chanté en pleurant sa fille morte, et c’est elles qui commenceront sa gloire.
Par exemple, la fin du xviiie siècle, qui mourait pourri sous ses élégances, était très visible dans cet effroyable chef-d’œuvre de Laclos : Les Liaisons dangereuses, mais elle ne l’était qu’à travers l’individualité de Valmont, de la présidente de Tourvel et de madame de Merteuil. […] Quand le monde romain et païen se mourait, c’était le monde physique qui finissait, le plus puissant monde physique qui eût jamais écrasé de son poids la terre, et il avait encore la force de rejeter, de son ventre épuisé, des arrière-faix comme Messaline.
De nos jours, Le Sage ne serait pas mort chétivement à Boulogne-sur-Mer, chez le chanoine, son fils, gueux comme un rat d’église qui quitte le désert de son église, où il meurt de faim, pour la desserte d’un chanoine ! Malheureusement, il ne faisait pas gras chez celui-là, et c’est là qu’il mourut à plus de quatre-vingts ans, indifférent aux politesses de son siècle, n’entendant plus le bruit de sa renommée.
Roland, pour mourir, d’après la Chanson, s’étend sous un pin. […] Roland en met en fuite les derniers débris, après avoir blessé — et non tué — leur chef, et meurt vainqueur, maître du champ, le visage tourné vers le pays ennemi. […] Enfin, il s’avisa d’une grande malice : il fit croire au chevalier qu’on avait secrètement instruit leur procès et qu’on les cherchait tous deux pour les faire mourir. […] à Schleswig, donna sa démission en 1593 et mourut le 25 février 159886. […] Quant à la première, « sardoine » est là pour l’assonance, mais il pouvait fort bien y avoir des rochers sur la hauteur où Roland monta pour mourir.
L’auteur était un jeune homme de beaucoup de cœur et d’esprit, qui avait su inspirer à notre cher directeur Eugène Yung une vive sympathie, et qui mourut peu après, à vingt-sept ans, Mme Paul Chalon vient de réunir en volume les essais de son mari.
Les Pleureuses viennent l’une après l’autre ; tous leurs yeux n’ont pas les mêmes larmes, mais c’est le même convoi qu’elles suivent, le convoi, dirait-on, d’une âme morte avant de naître… C’est bien une âme, oui, plutôt même qu’un cœur, qui se désole en ce poème, tant tous les sentiments, l’amour, les désespoirs, et les haines aussi, s’y font rêve… Les Pleureuses pleurent en des limbes, limbes de souvenance où se serait reflété le futur.
Dacier, née à Saumur en 1651, morte à Paris en 1720, a été la femme la plus savante ou la plus érudite que la France & peut-être les autres pays aient produite.
Il en avoit fait une soixantaine, lorsque l’Abbé Desfontaines mourut.
Aussi le nom de mademoiselle de Brie ne mourra pas ; elle partagera quelque peu l’immortalité de cet homme dont elle était le courage et la consolation. […] je m’en vais tout à l’heure te donner un louis d’or, pourvu que tu veuilles jurer. » Le pauvre : « Non, Monsieur, j’aime mieux mourir de faim ! […] La cloche sonne comme elle sonnerait pour les morts, Louise de la Miséricorde va mourir, on n’attend plus que l’absolution du prêtre. […] ce damné meurt sans avoir crié : Grâce ! […] Il meurt sans avoir courbé la tête ou fléchi le genou !
Aux actes III et IV, elle se prépare à mourir. Au cinquième, elle meurt. » C’est vrai. […] Pauline le suit au lieu du supplice, le voit mourir. […] si elle en mourait ! […] Nous mourrons !
* * * — Je crois que nous finirons par mourir avec l’idée que personne n’a lu un livre ni vu un tableau. […] Une figure qui, sous le dessous d’une figure de courtisane encore en âge de son métier, a cent ans, et qui prend, par instants je ne sais quoi de terrible d’une morte fardée. […] En lui meurt la gaieté de Paris, et dans tous les cafés, on voit les garçons s’essuyer les yeux du coin de leur tablier. […] Il n’y a que ce temps-ci pour faire mourir les gens de vieillesse à 38 ans. […] Ce monsieur, qui avait cent mille livres de rente, un jour, prit congé de ses amis, de ses connaissances, du monde, les prévenant qu’il s’en allait mourir dans la montagne.
Certes, ce dut être une joie, pour ces anatomistes de la pensée, que de pouvoir, dès leur coup d’essai, faire des expériences en grande que d’avoir, pour premier sujet, une société morte à disséquer. […] Il traverse en naissant la littérature latine qui se meurt, y colore Perse, Pétrone, Juvénal, et y laisse l’Âne d’or d’Apulée. […] Il serait conséquent d’ajouter ici que tout dans la nature et dans la vie passe par ces trois phases, du lyrique, de l’épique et du dramatique, parce que tout naît, agit et meurt. […] Disons mieux : tout cela mourra dans l’opération ; et c’est ainsi que les mutilateurs dogmatiques arrivent à leur résultat ordinaire : ce qui était vivant dans la chronique est mort dans la tragédie. […] Le jour où elles se fixent, c’est qu’elles meurent. — Voilà pourquoi le français de certaine école contemporaine est une langue morte.
La littérature française n’était pas seulement muette, elle était morte. On ne sait pas assez combien meurt vite une civilisation littéraire sous la hache d’une assemblée ou sous la faux d’un Attila. […] — ou plutôt mourons, car il n’y a plus qu’à désespérer des peuples qui n’ont d’estime que pour ceux qui les ont le plus méprisés ! […] Il mourut littéralement en balbutiant deux de mes vers. […] Il mourut à l’œuvre.
Il ne se fit aucune illusion sur son sort, et alla consciemment mourir à Morlaix, le 1er mars 1870.
« Il considere ce progrès insensible, mais si rapide de la vie vers sa fin, la mort toujours prochaine, ou plutôt toujours présente, le tombeau, la cendre, le tribunal de son Juge, les peines & la gloire de l’Eternité ; il attache sa vue sur ces dernieres fins de l’homme, si propres à régler sa course, &, prosterné chaque jour devant Dieu, il lui demande la grace de bien vivre, pour avoir celle de bien mourir ; sacré soin, précieuse solitude, sceau de Dieu dans les ames prédestinées, vigilance nécessaire, mais rare dans tous les hommes, plus rare dans les Grands, & plus nécessaire encore aux Grands qu’aux autres hommes ».
L’approche de sa derniere heure lui fit comprendre que le triste honneur de mourir dans l’impiété, ne valoit pas le sacrifice de ses lumieres & de ses sentimens.
Tout le monde sait qu’après avoir épousé une protégée de M. de Voltaire, il a eu l’honneur de loger chez lui ce Patriarche des Beaux-Esprits, de le soigner dans sa derniere maladie, & de recueillir ses derniers soupirs ; ce qui a donné lieu au distique suivant : Admirez d’Aroüet la bizarre planete : Il naquit chez Ninon, & mourut chez Villette.
La Cleopatre se meurt, et le serpent est encore sur son sein.
Tantôt elle se dit qu’elle fournira le charme qui doit dompter les taureaux, et tantôt que non, mais qu’elle périra elle-même ; puis tout aussitôt elle se dit qu’elle ne mourra pas et qu’elle ne donnera pas non plus le charme, mais qu’elle prendra en patience et à tout hasard son malheur. […] Mais en général on a recouvert l’antique mal, lorsqu’il se présente, d’expressions plus vagues et plus flatteuses, en même temps que, dans une foule de cas de simple galanterie, on a détourné par abus les expressions physiques de leur sens propre : on s’est mis à brûler et à mourir par métaphore. […] Seule donc, durant la nuit, et partagée entre mille résolutions contradictoires, elle se débat avec elle-même : elle regrette de n’être point morte de mort naturelle, de n’avoir point été frappée des flèches de Diane avant l’arrivée de cet étranger. […] mieux vaut mourir cette nuit même, à l’instant, avant le crime, avant la honte. — Je continue de traduire : « Elle dit et s’en alla prendre la boîte dans laquelle étaient rangées bien des drogues, les unes salutaires, les autres destructives, et, l’ayant placée sur ses genoux, elle se lamentait. […] Cette imprécation contre Jason qu’elle va trouver m’a rappelé le mot de Catulle sur Lesbie : « Lesbie dit sans cesse du mal de moi, je veux mourir si elle ne m’aime pas à la rage : Lesbia mi dicit semper male, nec tacet unquam De me : Lesbia me, dispeream, nisi amat !
La France, le sol du sens commun, fut le pays où germèrent le moins ces pavots enivrants des chimères sociales, et où ces poisons soporifiques moururent le plus tôt. […] Mille fois plus éloquent que Platon, mille fois plus passionné que Fénelon, aussi poétique que le sophiste grec, aussi religieux que l’archevêque français, né à une époque où le vieux monde féodal mourait, où la France sentait déjà remuer dans ses flancs l’embryon d’une révolution radicale, l’enfant de Genève, J. […] Elle mourut malheureusement avant de pouvoir lui donner ses vertus. […] Combien un écrivain, qui sait puiser dans la vie familière le pathétique simple des scènes intimes, et fait d’une veillée entre un vieillard, un enfant et le souvenir d’une mère morte, un drame muet qui remue le cœur dans des millions de poitrines, combien, disons-nous, un tel écrivain doit-il être, à son gré, le maître des cœurs, ou l’apôtre des vérités ou le roi des sophismes ! […] Incapable d’activité dans la foule, incapable de repos dans la solitude, recueilli par la famille de Girardin, à Ermenonville, dans un dernier ermitage, il y meurt d’une mort problématique, naturelle selon les uns, volontaire selon les autres : le mystère après la folie. — Le moins raisonnable et le plus grand des écrivains des idées des temps modernes repose, jeté par le hasard, sous des peupliers, dans une petite île d’un jardin anglais, aux portes d’une capitale, lui qui, dans sa mort comme dans sa vie, sembla le plus misanthrope des hommes en société, et le plus incapable de se passer de leur enthousiasme.
« — Grandet, ta colère me fera mourir, dit la pauvre femme. « — Ta, ta, ta, ta, vous autres, vous ne mourez jamais dans votre famille ! […] Je meurs. […] madame se meurt, cria Nanon. […] En 1827, le vieillard mourut à la porte de son cabinet plein d’or.
Gregorio, avant de mourir, en 1766, les confia à la tutelle du cardinal Negroni, homme distingué du sacré collège. […] Arrivé à la maison maternelle, après avoir langui dans la souffrance et subi une opération chirurgicale, il mourut vers l’âge de dix ou douze ans et fut enterré à Saint-Marcel. […] Quand il mourut, le cardinal Negroni, sans me consulter, me proposa au Pape pour le remplacer, et c’est ainsi que je devins secrétaire de la Congrégation. […] Elle mourut très jeune à Bologne, où elle était allée prendre les bains d’après l’avis de la Faculté. […] Comme j’étais bien résolu de mourir auditeur ou d’attendre le cours naturel des choses, afin d’en être le doyen et d’arriver au cardinalat par cette voie, je crus que visiter la famille Braschi, ce serait alors gratitude et non plus intérêt.
… En sorte que toute l’humanité naissante, déchue, gémissante, priante, chancelante, vivante, morte, ressuscitée, est contenue et exprimée dans cette épopée des races hébraïques ; que le prêtre et le poète n’est qu’un seul homme pour les peuples de cette théogonie ; et que toutes les fois que le peuple assiste à ses mystères dans les temples, il entend le pontife réciter ses annales, chanter ses hymnes, commémorer ses drames, et qu’il assiste ainsi à sa propre épopée en action ! […] Là des peuples taris ont laissé leurs lits vides ; Là d’empires poudreux les sillons sont couverts ; Là, comme un stylet d’or, l’ombre des pyramides Mesure l’heure morte à des sables livides Sur le cadran nu des déserts ? […] Là où il n’y a pas de mot, la pensée meurt, ou naît embarrassée et confuse dans ses langes. […] Il naquit, il vécut, il mourut dans le temple. […] La mort du prince de Condé, son premier protecteur et son admirateur le plus constant, lui disait que toute célébrité doit mourir.
Elle était morte, à vingt-trois ans, d’un refroidissement pris en faisant une étude de plein air. […] Dieu aura pitié de moi, mais je me sens faible et il me semble que je vais mourir. — C’est comme je l’ai dit : ou je veux avoir tout ce que Dieu m’a permis d’entrevoir et de comprendre, alors c’est que je serai digne de l’avoir, ou je mourrai ! […] Et puis, ne devais-je pas mourir ? […] Amenez le père, puisqu’il faut qu’il se soigne ; s’il reste malade à la campagne, il mourra, dites-le à la princesse. […] Oui, vous avez eu là une pointe de romantisme à la Stendhal tout bonnement, mais soyez tranquille vous n’en mourrez pas encore cette fois.
Une tante de la jeune personne, Mme Brack, lui avait fait don d’un moulage en plâtre, figurant les bras et les mains de la morte. […] — Nous mourons. » Mme Récamier à cette date était absente. […] Il mourait avant qu’Ampère pût le revoir. […] Adieu tendrement. » Tocqueville mourait en avril : la chère malade, pour laquelle Ampère avait tant tardé à venir et qu’il alla retrouver dès qu’il le put, mourait en septembre de cette même année (1859). […] Duparquet, lorsqu’elle mourut le 28 septembre 1827.
En 1702, pour un pamphlet entendu à contre-pied, on le condamne à l’amende, on le met au pilori, on lui coupe les oreilles, on l’emprisonne pendant deux ans à Newgate, et c’est la charité du trésorier Godolphin qui empêche sa femme et ses six enfants de mourir de faim. […] De Foe ressemble à l’un de ces braves soldats obscurs et utiles qui, l’estomac vide, le dos chargé, les pieds dans la boue, font les corvées, emboursent les coups, reçoivent tout le jour le feu de l’ennemi et quelquefois par surcroît celui de leurs camarades, et meurent sergents, heureux quand de rencontre ils ont accroché la croix d’honneur. […] Tel gentilhomme ami de Lovelace détourne une jeune fille innocente, l’enivre, passe la nuit avec elle dans une maison publique, l’y laisse pour payer l’écot, et se frotte les mains tranquillement en apprenant quinze jours après que la maîtresse l’a mise en prison et qu’elle y est morte folle. […] Le capitaine Oakum déclare qu’il ne veut plus de malades à bord, les fait monter sur le pont à coups de fouet, crachant le sang, défaillant de faiblesse ; plusieurs deviennent fous, beaucoup meurent, et de soixante et un il n’en reste que douze. […] Lisez encore le récit de miss William, une jeune fille riche et de bonne naissance réduite au métier de courtisane, rançonnée, affamée, malade, grelottante, errant dans les rues pendant de longues nuits d’hiver, parmi « les misérables créatures nues, en haillons crasseux, entassées comme des pourceaux dans le coin d’une allée sombre », qui appellent les matelots ivres pour obtenir « de quoi apaiser avec du gin la rage de la faim et le froid, et qui descendent dans l’insensibilité bestiale jusqu’à ce qu’à la fin elles aillent mourir et pourrir sur un fumier. » Celle-ci est jetée à Bridewell avec le rebut de la ville, soumise aux caprices d’un tyran qui lui impose des tâches au-dessus de ses forces et la punit de ne pas les remplir, fouettée jusqu’à s’évanouir, puis à coups de fouet tirée de son évanouissement, pendant ce temps volée de tout ce qu’elle a sur elle, bonnet, souliers, bas, « mourant de faim et aspirant à mourir vite. » Une nuit, elle essaye de se pendre.
La pleine fortune pour un chef de gouvernement, la gloire peut-être, c’est de mourir entre les deux. […] Pour le sauver, car il en mourait, il fallait le nommer. […] vais-je donc avoir peur de mourir ? […] Il faut faire cela avec régularité et méthode, mettre du sang-froid dans le dévouement, de la discipline dans le sacrifice, ne pas mourir en tumulte. […] J’en doute, car je me sens mourir… Il ne reviendra pas ici avant ce soir… Jusque-là comment dévorer le temps ?
Champfleury Le pauvre Bertrand mourut à l’hôpital, enlevé par la phtisie qui a dévoré tant de poètes ; mais son œuvre est restée pure, d’un travail qui fait penser aux admirables coupes de jade de la Chine.
Sainte-Beuve Si l’on considère aujourd’hui le talent et les poésies d’Hégésippe Moreau de sang-froid et sans autre préoccupation que celle de l’art et de la vérité, voici ce qu’on trouvera, ce me semble : Moreau est un poète ; il l’est par le cœur, par l’imagination, par le style, mais, chez lui, rien de tout cela, lorsqu’il mourut, n’était tout à fait achevé et accompli.
Barthélemy mourut jeune, en 1843.
. — Le Vœu d’une morte (1866). — Thérèse Raquin (1867). — Édouard Manet (1867). — Madeleine Férat (1868). — Les Mystères de Marseille (1868). — La Fortune des Rougon (1871). — La Curée (1872). — Le Ventre de Paris (1873)
Le besoin se faisant sentir d’une nouvelle École, l’École Romanitas va se former, qui affirme que notre langue se meurt depuis le jour où, après Racine, elle s’est écartée du dialecte roman, père du dialecte français.
Puisque c’est l’heure où tous doivent se mettre à l’œuvre, Fiers, ardents, Écraser au-dehors le tigre, et la couleuvre Au-dedans ; Puisque l’idéal pur, n’ayant pu nous convaincre, S’engloutit ; Puisque nul n’est trop grand pour mourir, ni pour vaincre Trop petit ; Puisqu’on voit dans les cieux poindre l’aurore noire Du plus fort ; Puisque tout devant nous maintenant est la gloire Ou la mort ; Puisqu’en ce jour le sang ruisselle, les toits brûlent, Jour sacré !
Il mourut presque jeune, en 1511. […] Il y mourut, pauvre et obscur, peu de temps après, en 1544, à l’âge de quarante-neuf ans. […] Pourquoi ceux-là meurent-ils en naissant et non ceux-ci ? Pourquoi ceux-là meurent-ils jeunes et non ceux-ci ? […] Il mourut au prieuré de Saint-Cosme le 27 décembre 1585.
Ses ennemis parlent de la femme d’un libraire, qui, pour une petite fièvre de rhume, fut saignée quinze fois en douze jours, et mourut d’un purgatif en sus qu’on lui administra. […] Et, débordant sur ce sujet, cet homme d’école s’écrie dans un dernier accès de fierté et de superbe plus doctorale que philosophique : Tous les hommes particuliers meurent, mais les compagnies ne meurent point.
Un des insignes bonheurs de Henri IV fut (et je parle toujours d’après des contemporains), que Henri III, un peu avant de mourir et depuis son attentat de Blois, dans l’extrémité où il se vit réduit par la révolte des principales villes, eut besoin de lui, fut contraint, au vu et su de toute la France, de capituler avec lui, de le rappeler à son service, d’en faire son bras droit et son chef d’avant-garde. […] Du Fay mourut à la fin de 1592, à Quillebeuf, dont il était gouverneur. […] On raconte que plusieurs personnes moururent de douleur à la nouvelle de cette mort, et l’on cite des noms.
Cela s’explique : elle mourut à la veille du déluge. […] Mme Geoffrin, morte quelques années auparavant, avait été célébrée sur tous les tons par Thomas, l’abbé Morellet et tout le chœur des gens de lettres, ce qui faisait dire avec malignité à Mme du Deffand : « Tout cela, c’est bien du bruit pour une omelette au lard5. » Mme de Luxembourg, cette crème du bon ton, n’eut rien ; mais plus tard et dès qu’on fut rassis, on se ressouvint, et tous ceux dont le suffrage compte ont parlé. […] et de longs soupirs ridicules, mais celle que les délicats, les voluptueux, les prince de Ligne, les Saint-Évremont de tous les temps, ceux qui y ont vécu ou qui étaient dignes d’y vivre ont goûtée, ont décrite, ont vainement essayé de retrouver après l’avoir perdue, j’aurais voulu, moi aussi, te traverser et te connaître, mais non pas me renfermer en toi et y mourir !
Ses années de direction à Rome (1828-1835) forment une époque unique dans sa vie : une fille belle et adorée qui était sa gloire, et dont il a consacré l’image en maint endroit, faisait avec sa mère les honneurs de la Villa Médicis ; devenue Mme Paul Delaroche et morte à la fleur de l’âge, elle devait lui apprendre ce que c’est que la première grande douleur. […] Aussi nos pauvres soldats mouraient-ils comme des mouches. […] Représente-toi, sur un monceau de plus de cent cadavres de femmes et d’enfants, que les Kabyles dépouillaient ou achevaient lorsqu’ils respiraient encore, un sergent et un soldat du 17e leur disputant, les armes à la main, un pauvre petit être de quatre ans, encore attaché au corps de sa mère morte.
Louvois, qui devait mourir foudroyé le 16 juillet et manquer irréparablement à Louis XIV, à la France et à Catinat, avait conçu, au début de cette campagne (M. […] Alceste paraît avoir été un Philinte auprès de ce Rubentel qu’on ne put garder au service malgré son mérite et qui s’en alla vivre et mourir seul à Paris, disgracié, irrité, pestant contre les humains et gardant une dent contre quiconque était plus heureux que lui. […] Elle a jusqu’à présent tout le crédit qu’une jolie femme peut avoir ; elle a dans l’esprit tout l’enjouement et l’amusement qui peut plaire, menteuse avec un air naïf, n’aimant rien, point de vues pour l’avenir, hardie, ordurière, nulle teinture de modestie, livrée aux présents de M. le prince d’Orange, prenant de l’Empereur et du roi d’Espagne, et ce qu’il y a de beau, c’est que M. de Savoie le sait et qu’il trouve en cela le ménagement d’un méchant cœur ravi que sa maîtresse rencontre dans la libéralité d’autrui ce qu’elle ne pourrait pas trouver dans la sienne… Il redit tout à sa maîtresse, et sa maîtresse redit tout aux alliés… Dans tout cela Mme la Duchesse Royale ne fait qu’aimer son mari, le servir, vouloir ce qu’il veut et ne se mêler de rien ; Madame Royale (la mère) n’ose parler, et M. et Mme de Carignan sont dans une circonspection si craintive que, si M. de Savoie meurt, vingt-quatre heures après ils craindront qu’il n’en revienne. » Toute cette correspondance de Tessé que nous connaissons par des extraits de M.
De nos jours, les grands hommes dans les lettres, quand bien même, par leurs mémoires ou leurs confessions poétiques, ils seraient moins empressés d’aller au-devant des révélations personnelles, pourraient encore mourir, fort certains de ne point manquer après eux de démonstrateurs, d’analystes et de biographes. […] Quand ils vont mourir, ils ressemblent par leurs craquements et leurs gémissements à ce tronc chargé d’armures, auquel Lucain a comparé le grand Pompée. Telle fut la vieillesse du grand Corneille, une de ces vieillesses ruineuses, sillonnées et chenues, qui tombent pièce à pièce et dont le cœur est long à mourir.
… » Puis il mourut une heure après. […] Pour nous convier à bien mourir, qu’il nous peigne une belle mort, et qu’il ne nous présente pas surtout comme affreuse une fin que beaucoup d’honnêtes gens non croyants seraient plutôt tentés d’envier. […] Eynard, sur quelques points, n’a pas eu toute la critique qu’on aurait pu exiger, je noterai (et le biographe du médecin Tissot me comprendra) qu’Ymbert Galloix, que nous avons beaucoup connu et vu mourir, n’avait réellement pas de génie, mais une sensibilité exaltée, maladive, surexcitée, et qu’il est mort s’énervant lui-même.
La nourrice, qui était seule dans le secret, mourut peu après ; et jusqu’à présent Lelio, qui est la fille en question, passe pour un garçon. […] Il se résout à différer encore de tout révéler à Pandolfo qui pourrait mourir d’effroi et de chagrin. […] Ricciardo en a pensé mourir de rire et s’est montré joyeux de l’aventure.
C’est encore, si vous voulez prendre des exemples moins éloignés de nous, les marquises marchant à la guillotine avec un sourire et le souci de ne pas déranger leur coiffure C’est l’art de mourir en beauté. […] Non seulement ces pauvres diables mouraient littéralement de faim, mais leurs excursions dans le domaine de la pensée leur valaient toutes sortes de tracasseries de la part de l’administration. […] » — « Un des associés de la maison Alexandre Dumas (manufacture de romans) vient de mourir.
En Orient, des milliers d’hommes meurent de faim ou de misère sans avoir jamais songé à se révolter contre le pouvoir établi. Dans l’Europe moderne, un homme, plutôt que de mourir de faim, trouve plus simple de prendre un fusil et d’attaquer la société, guidé par cette vue profonde et instinctive que la société a envers lui des devoirs qu’elle n’a pas remplis. […] L’Anglais pauvre n’en veut à personne, s’il meurt de faim : c’est la fatalité.
La bonne Marie Coustot ne s’arrête pas à cette philosophie désespérée ; elle mourra dans sa simplicité, toujours obstinée à s’oublier et à se sacrifier. […] Une pauvre jeune fille très vertueuse meurt, laissant deux couverts et un petit sucrier d’argent qu’elle avait achetés de ses économies. Elle aimait beaucoup ce petit sucrier, qui représentait pour elle des privations, et, se voyant mourir, elle souffrait à l’idée qu’il passerait en des mains peut-être moins pures que les siennes.
Renaud de Montauban termine une vie d’aventures par une pénitence étrange qu’il s’inflige ; il se fait maçon pour travailler à bâtir la cathédrale de Cologne et il meurt martyr, assassiné par des ouvriers jaloux qui ne lui pardonnent pas de porter à lui seul des pierres que quatre d’entre eux ne pourraient soulever. […] Quand ils meurent sur le champ de bataille, loin des secours de la religion, ils communient, faute d’hostie, avec trois brins d’herbe mis en croix ; moyennant quoi ils vont tout droit en paradis, conduits par les anges qui sont descendus tout exprès du ciel pour chercher leurs âmes. […] Les personnages meurent en état de grâce ; mais ils vivent tout autrement ; et, s’ils finissent par arriver au paradis, il faut avouer que c’est par des chemins singuliers et après un véritable voyage en zigzag.
Philiberte aussi aime en secret ce beau ténébreux, mais elle désespère d’être aimée : Tiens, ne ranime pas cette espérance morte. […] Le jeune homme préfère la mort à cette corvée, et, pour mourir, il provoque M. de Talmay. […] Ce baron est un cousin du comte Sigismond, dilettante excentrique qui vient de mourir en laissant un splendide héritage.
La voilà donc sur son cœur, c’est bon pour un instant ; mais le singulier, c’est qu’elle y resta assez de temps pour s’y endormir, car elle venait de passer plusieurs nuits en voyage, et elle mourait de fatigue. […] Goethe est, avec Cuvier, le dernier grand homme qu’ait vu mourir le siècle. […] que ne puis-je aller en Tyrol, et y arriver à temps pour mourir de la mort des héros !
La reine mère, en effet, était morte à cette date, et rien n’assujettissait plus à ce degré Mme de La Vallière qu’elle-même. […] Son fils, le comte de Vermandois, mourut à la fleur de l’âge (1683), atteint déjà et souillé par les vices de la jeune Cour. […] Mme de La Vallière mourut le 6 juin 1710, après trente-six années de cloître.
On ajoute qu’elle dit encore au maréchal que, s’il ne se hâtait, « elle lui arracherait la barbe et qu’il ne mourrait que de sa main ». […] Il est à remarquer, à ce propos, que Condé aimait et pleurait comme guerrier les amis qu’il eût vus mourir autrement sans les regretter peut-être. […] Elle mourut en mars 1693, à l’âge de soixante-six ans.
… On n’a point d’idée du genre de vie que l’on mène ici, d’où il ne peut sortir que des fous, si l’on y laisse longtemps les malheureux que l’on y renferme, et où l’on meurt enragé. […] Et il meurt le 11 juillet 1789, trois jours avant la Révolution décisive où s’abîme à jamais la Féodalité. […] Elle avait retrouvé, vers la fin, un lien de cœur réel et une vraie flamme pour un M. de Poterat, ancien capitaine de cavalerie, âgé comme elle de trente-cinq ans environ, et elle était près de l’épouser, lorsqu’il mourut de la poitrine.
Cette fille, d’un mérite extraordinaire comme on l’appelait, était née au Havre en 1607, sous Henri IV ; elle ne mourut qu’en 1701, à l’âge de quatre-vingt-quatorze ans, vers la fin du règne de Louis quatorzième, comme elle disait volontiers. […] Après avoir parlé de la longue suite d’aïeux que pouvait compter son héroïne : Sapho, ajoutait-elle, a encore eu l’avantage que son père et sa mère avaient tous deux beaucoup d’esprit et beaucoup de vertu ; mais elle eut le malheur de les perdre de si bonne heure, qu’elle ne put recevoir d’eux que les premières inclinations au bien, car elle n’avait que six ans lorsqu’ils moururent. […] Lorsqu’elle mourut, le 2 juin 1701, le Journal des savants du mois suivant (11 juillet) enregistra ces pompeux éloges.
N’ayant étudié ensemble ni en théologie ni en politique, nous avons donné en Suisse des scènes à mourir de rire, cependant, sans nous brouiller jamais. Ces scènes à mourir de rire qui s’étaient passées entre Mme de Staël et lui, M. de Maistre les appelait, aussi ses Soirées helvétiques, et il est dommage qu’il n’en soit rien resté. […] Mais la lettre est à peine écrite, que cette vieille amie meurt, et M. de Maistre répond au comte Golowkin, leur ami commun, qui lui avait appris cette triste nouvelle : Vous ne sauriez croire à quel point cette pauvre femme m’est présente ; je la vois sans cesse avec sa grande figure droite, son léger apprêt genevois, sa raison calme, sa finesse naturelle et son badinage grave (quel admirable portrait !).
Elle mourut en 1733 à l’âge de quatre-vingt-six ans, dit-on, ce qui la fait naître vers 1647. […] Quelques témoignages particuliers nous mettront à même d’en juger pertinemment et presque comme si nous y avions été admis : Je viens de faire une perte bien sensible en Mme la marquise de Lambert, morte à l’âge de quatre-vingt-six ans, écrivait le marquis d’Argenson (1733). […] (Ailleurs, il dit : Il lui prit une tranchée de bel esprit… C’est un mal qui la frappa tout d’un coup et dont elle est morte incurable.
Des années s’écoulent ; on est en 1770 ; il meurt coup sur coup quantité d’académiciens, Moncrif, le président Hénault, l’abbé Alary ; Mairan lui-même est bien malade et va les suivre. […] Voltaire avait réalisé son vœu : Je voudrais que les philosophes pussent faire un corps d’initiés, et je mourrais content. — Ô Frères, soyez unis ! […] Notez que ces calomnies secrètes et dites à l’oreille de tant de gens n’empêchèrent pas, cinq ans après, Voltaire renouant avec M. de Brosses, devenu alors premier président du parlement de Bourgogne, de lui écrire au sujet de quelque affaire qu’il lui recommandait (novembre 1776) : « Pour moi, à l’âge où je suis, je n’ai d’autre intérêt que celui de mourir dans vos bonnes grâces. » Littérairement, de Brosses eut une fois à juger Voltaire ; c’est à la fin de sa Vie de Salluste, et il le fit avec équité, sans qu’on y puisse découvrir trace de ressentiment.
Expression dont Virgile se sert pour rendre plus touchante la douleur d’un jeune guerrier qui meurt loin de sa patrie. […] Le labeur trop persévérant des truqueurs doit être détruit, comme une toile d’araignée, jusqu’à ce que la vilaine bête soit morte dans son trou. […] Les clichés définitifs, en effet, avant de mourir dans l’abstraction, passent par la phase du ridicule.
C’est trop, sans doute, de dire avec Cuvier que la vie disparaît pour peu qu’on touche à l’un de ses éléments (car on ne voit pas que l’homme meure quand on lui coupe une jambe, ce qui est cependant pour lui une révolution assez grave) ; mais on peut croire que, tout étant lié à tout dans l’organisme, il n’est pas possible de bien étudier les parties en dehors du tout et de leurs relations naturelles avec le tout. […] En réalité, la matière vivante, tout comme la matière morte, est soumise à la grande loi de l’inertie. […] Il y a donc un circulus vital, mais qui n’a pas en lui son commencement absolu, et qui, même lorsqu’il nous apparaît comme entièrement indépendant, ne l’est pas en réalité, ne se soutient que grâce à des conditions physico-chimiques, externes ou internes, sans lesquelles la machine s’arrête, se désorganise et meurt.
J’ai dit au milieu de mes jours, je vais mourir ; et j’ai cherché le reste de mes ans. […] Tu retrouves deux fils pour mourir après toi, Et je n’en puis trouver pour régner après moi. […] Mais, dans une langue morte, le mérite de ces deux qualités disparaît en grande partie : on le suppose plutôt qu’on ne le sent3.
La parole parlée est une parole vive ; la parole écrite est une parole morte. […] Enfin la langue française n’est, à proprement parler, qu’une langue écrite : c’est la perfection de la langue morte. […] Ceux qui s’avancent hors de leur siècle, et qui, personnages isolés sur la scène du monde, fécondent les idées du siècle suivant, s’ils ne meurent pas obscurs, sont dignes de l’épopée.