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1015. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 417-418

Dans le Tableau philosophique de l'esprit de M. de Voltaire, pour servir de suite à ses Ouvrages, & de Mémoire à l'Histoire de sa Vie

1016. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre II. De la patrie d’Homère » pp. 258-259

Cette observation nous servira à découvrir le véritable Homère.

1017. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XX. Du dix-huitième siècle, jusqu’en 1789 » pp. 389-405

Un certain asservissement de l’esprit empêche l’homme d’observer ce qu’il éprouve, de se l’avouer, de l’exprimer ; et l’indépendance philosophique sert, au contraire, à mieux connaître, et la nature humaine, et la sienne propre. […] Racine lui-même fait à la rime, à l’hémistiche, au nombre des syllabes, des sacrifices de style ; et s’il est vrai que l’expression juste, celle qui rend jusqu’à la plus délicate nuance, jusqu’à la trace la plus fugitive de la liaison de nos idées ; s’il est vrai que cette expression soit unique dans la langue, qu’elle n’ait point d’équivalent, que jusqu’au choix des transitions grammaticales, des articles entre les mots, tout puisse servir à éclaircir une idée, à réveiller un souvenir, à écarter un rapprochement inutile, à transmettre un mouvement comme il est éprouvé, à perfectionner enfin ce talent sublime qui fait communiquer la vie avec la vie, et révèle à l’âme solitaire les secrets d’un autre cœur et les impressions intimes d’un autre être ; s’il est vrai qu’une grande délicatesse de style ne permettrait pas, dans les périodes éloquentes, le plus léger changement sans en être blessé, s’il n’est qu’une manière d’écrire le mieux possible, se peut-il qu’avec les règles des vers, cette manière unique puisse toujours se rencontrer ?

1018. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre IX et dernier. Conclusion » pp. 586-601

Ce système de perfectibilité est aussi combattu par quelques penseurs ; mais il a surtout contre lui dans ce moment, en France, ces sentiments irréfléchis, ces affections passionnées qui confondent ensemble les idées les plus contraires, et servent merveilleusement les hommes criminels, en leur supposant des prétextes honorables. […] C’est elle qui sert à connaître tout ce qu’il y a de bien dans la nature ; c’est elle qui peut seule ajouter à tous les biens de la vie la durée et le repos.

1019. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre I. Malherbe »

Et pareillement, c’est raison qu’on élimine de sa parole tout ce qui nuit ou ne sert pas à l’intelligence des choses ; l’expression parfaite est celle qui met la pensée en pleine lumière. […] C’est une langue symbolique, où les termes ont des valeurs fixes, où les formes sensibles qui servent à l’expression de la pensée, sont indépendantes pourtant de la sensibilité individuelle de l’écrivain.

1020. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Préface »

Que ne donnerions-nous pas pour qu’il nous fût possible de jeter un coup d’œil furtif sur tel livre qui servira aux écoles primaires dans cent ans ? […] L’erreur la plus lâcheuse est de croire qu’on sert sa patrie en calomniant ceux qui l’ont fondée.

1021. (1799) Dialogue entre la Poésie et la Philosophie [posth.]

Dialogue entre la Poésie et la Philosophie, pour servir de préliminaire et de base à un traité de paix et d’amitié perpétuelle entre l’une et l’autre LA POÉSIE. […] C’est l’ouvrage d’un homme distingué par son rang, qui, après avoir utilement servi sa patrie3, n’a pas cru s’avilir en cultivant les lettres.

1022. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVII. Le Retour du Christ. Appel aux femmes ! »

Selon le père Didon, qui est un théologien et qui doit s’y connaître, il y a dans le Retour du Christ des choses hétérodoxes, c’est là le mot dont il se sert. […] Veuillot, ce formidable fouetteur qui, de cette fois, s’est servi d’une discipline bien douce !

1023. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire de la Révolution »

Évidemment, l’homme qui se sert de cette plume-là et sait partager, en la racontant, l’impatience de sang et de fierté des hommes qui furent les ennemis de sa cause, est fait pour autre chose que pour être un fataliste historique et rester l’écrivain qui, par amour du style, ne trouve rien de mieux que de mettre le mot « trombe » à la place du mot Dieu ! […] En cela il ressemble à beaucoup de révolutionnaires, qui pourraient lui servir tout naturellement de miroir quand il les rencontrera dans son histoire, mais il retournera le miroir.

1024. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Th. Carlyle » pp. 243-258

Carlyle, je l’ai dit déjà ailleurs, est l’Hogarth de l’Histoire, — de l’Histoire qui a une verge de plus dans sa main, quand elle se sert de la caricature… Or, qui appartient plus à la caricature, à la cruelle, sinistre et déshonorante caricature, que la Révolution du 4 septembre et les crimes bas de la Commune de Paris ? […] » La vulgarité devient là une calembredaine ; mais voici qui est mieux : « Si la Convention voyait clair et devant et derrière elle, elle serait une Convention paralysée ; mais comme elle voit clairement jusqu’au bout de son nez, elle n’est pas paralysée. » La vulgarité de l’image sert du moins ici à quelque chose.

1025. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VII. Vera »

L’atroce ennui qui s’échappe de sa logique, et sa logique est tout son système, ne servira pas de bouclier à Hegel contre les Heine de l’avenir, qui l’attendent, car comme Kant tué par un Allemand, il ne mourra pas d’une plaisanterie française. […] Tout de même qu’on est parfois métaphysicien malgré soi, en raison d’une conformation spéciale de la tête, et tout en sachant très bien que la métaphysique est l’agitation instinctive et réfléchie de problèmes qui n’ont pas toutes leurs solutions dans ce monde, tout de même il y a des esprits qui, de conformation naturelle, réfléchissent les métaphysiques qu’ils n’ont pas créées, et, pour nous servir d’une expression hégélienne, qui repensent la pensée des autres.

1026. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Jules Soury. Jésus et les Évangiles » pp. 251-264

Dernièrement (si on se le rappelle), un travail de lui, insultant et faux, sur les filles de Louis XV, m’avait, dans un journal, passé par les mains, et je l’avais proprement et correctement déchiré en quatre morceaux, pour qu’il pût servir à quelque chose. […] Ils lui ont rendu un fier service, quoique le service n’ait pas infiniment servi… Ils lui ont tué Jésus-Christ, et avant de le tuer, ils l’ont couvert d’ignominies.

1027. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Musset »

Car chacun d’eux faisait son édition, à part, des Œuvres complètes, mais ils n’avaient pas, chacun, leur Vie, et la même devait servir à tous les trois. […] A quoi a-t-il servi, en dehors de la vente peut-être ?

1028. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Laurent Pichat »

Ironie charmante de la Providence à laquelle il ne veut pas croire, l’athéisme de Pichat est d’un talent qui se fonce tout à coup quand il traduit en vers, souvent très beaux, les croyances de sa jeunesse, et que l’accent exécré, l’accent catholique plus fort que lui, passe à travers la langue de sa poésie, — cet accent qu’il finit toujours par renier, quand il s’en est le mieux servi… Ce qui n’est pas reconnaissant ! […] La passion s’allume et l’âme repliée Montre un tel désir d’être à jamais oubliée,            Qu’elle veut laisser, dans le pli D’un lac et dans des vers qui serviront de socle, Quelque chose d’étrange et du genre Empédocle,            Un souvenir de son oubli.

1029. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Armand Pommier » pp. 267-279

Cette grande Inconnue à nos pères a versé, en ces derniers temps, tant de notions dans la connaissance humaine, qu’elle est certainement une formidable acquisition et un magnifique enrichissement pour toutes les facultés de l’esprit ; et l’imagination, comme les autres, a le droit, et je dirais presque le devoir, de se servir de ces notions qui tantôt ont leur certitude et tantôt leur mystère pour arriver à des effets de pathétique absolument nouveaux. […] … Beaucoup d’entre eux, en proie aux préoccupations d’un temps auquel ne résiste pas leur faiblesse, se sont servis dans leurs livres de cette ressource d’un merveilleux si aisé maintenant, le somnambulisme.

1030. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iv »

servira la cause de l’évangélisation du monde dans cette génération. […] Je me suis consacré à toi dès ma jeunesse et j’espère que l’exemple que j’ai cherché à donner aura servi à te faire glorifier.‌

1031. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Introduction »

Sentiment ou principe, notion confuse et enveloppée ou claire et expliquée, ce sera toujours un « préjugé » qui nous dictera la solution : c’est-à-dire que pour mesurer la valeur d’une formule égalitaire, nous la rapportons à un certain idéal général que nous avons une fois admis, et qui nous sert de pierre de touche pour discerner les qualités estimables ou blâmables, les actions prescrites ou interdites. […] Cet idéal serait-il mieux servi par un suffrage universel « atomique » ou par un suffrage « organisé » ?

1032. (1860) Cours familier de littérature. IX « Le entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier (2e partie) » pp. 81-159

Nous nous connaissions par lettres ; il avait désiré servir avec moi, et sous moi, celui qui n’est plus à servir, mais qui sera toujours à respecter (l’enfant de la dynastie déchue). […] Je ne connais pas la force de son bouclier, etc., etc. » Le duc de Laval avait tort de suspecter la trempe de mon bouclier ; les séductions furent plus fortes pendant quinze ans qu’il ne pouvait le prévoir, mais mon cœur resta irréprochable envers la dynastie que j’avais servie et envers l’enfant que j’avais célébré comme le dernier espoir de la monarchie et de la liberté. […] Le prince de Carignan, depuis Charles-Albert, y affilie étourdiment ses amis de Turin, les compromet, les laisse violenter son oncle et son bienfaiteur, l’oblige à abdiquer ce trône à la succession duquel ce prince l’avait généreusement appelé, puis se repent, abandonne ses complices, s’exile lui-même pour servir contre la cause libérale qu’il a fomentée ; remonté au trône, devient le proscripteur implacable de ceux dont il a entraîné la jeunesse. […] Ce congrès, où il comptait briller et séduire, devait être pour lui le marchepied du ministère des affaires étrangères ; il se sert tour à tour de l’amitié dévouée et de l’enthousiasme pur de madame la duchesse de Duras pour son talent, de l’affection habile de Juliette, de l’amitié confiante de M. de  Montmorency, pour forcer la porte du congrès.

1033. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

Où est la femme qui a servi de modèle à la Vénus de Milo ? […] X On sait que Canova était de Possagno, village de Venise dans la terre ferme ; on y extrait et on y sculpte la pierre monumentale qui servait aux riches constructions de Palladio. […] XXXIX « Dans ces cités républicaines, et spécialement dans la plus démocratique, l’art exerçait une sorte de magistrature ; les images en bronze et en marbre des hommes illustres, en même temps qu’elles servaient de luxe sévère à la place publique, portaient dans tous les cœurs l’enthousiasme et l’émulation. […] Gaspari nous reçut comme des amis inconnus ; et, pendant qu’il envoyait son fils chercher une maison pour nous dans quelque masure encore debout d’Athènes, une de ses filles, Athénienne, belle et gracieuse image de cette beauté héréditaire de son pays, nous servait, avec empressement et modestie, du jus d’orange glacé dans des vases de terre poreuse, aux formes antiques. […] Plus haut encore, à une distance d’environ cinquante pas, on voit un énorme bloc carré, dans lequel on a taillé des degrés qui servaient sans doute à l’orateur pour monter sur cette tribune, qui dominait ainsi le peuple, la ville et la mer.

1034. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

Il était presque aveugle, et l’une de ses filles lui servait de lectrice. […] Il ne partit qu’après avoir achevé d’accabler les Grecs ; il ne se servit de cet accablement que pour l’exécution de son entreprise ; il ne laissa rien derrière lui contre lui. Il attaqua les provinces maritimes, il fit suivre à son armée de terre les côtes de la mer pour n’être point séparé de sa flotte ; il se servit admirablement bien de la discipline contre le nombre ; il ne manqua point de subsistances ; et s’il est vrai que la victoire lui donna tout, il fit aussi tout pour se procurer la victoire. […] Il abandonna, après la conquête, tous les préjugés qui lui avaient servi à la faire. […] Cela ne peut servir à rien au législateur sérieux.

1035. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Théâtre Henriette Maréchal Histoire de la pièce qui a servi de préface à la première édition (1866)19 Voici une pièce qui excite bien des passions, bien des colères et bien des haines. […] À quoi servirait cette communication de notre manuscrit ? […] Nous logeons au quatrième, et nous avons une femme de ménage pour nous servir. […] Voici seulement ce que j’ai voulu faire entendre, c’est que mon frère et moi, débutant au théâtre, et désireux d’être joués, nous avions essayé de faire une pièce jouable, une pièce cherchée parmi les combinaisons théâtrales ordinaires, trouvant déjà assez brave d’avoir risqué l’acte du bal masqué, un acte qui avait le mérite de la nouveauté, et d’un esprit original, avant que cet esprit fût devenu l’esprit de tout le monde, avant qu’il eût servi, tout un hiver, aux engueulements des bals de l’Opéra de la rue Le Peletier. […] Une petite bonne, une pauvre enfant trouvée de l’hospice de Châtellerault, servait les fillettes de Mme Marcille.

1036. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

Il renaquit à l’espérance : il passa en Amérique, non pour se battre avec Lafayette et Rochambeau, mais pour changer de place ; René est remarquable par son incapacité à servir une cause, un parti et à songer aux autres ; son individualisme est féroce : Moi, toujours moi ! […] La Fatalité, cette interprétation religieuse des phénomènes dont on ne sait découvrir les causes ; la Fatalité dont les Romantiques de 1830 usèrent et abusèrent si libéralement, était alors autre chose qu’un expédient littéraire, fraîchement retrouvé des Grecs : si Racine se servait des Romains et des Grecs pour déguiser les courtisans de Versailles, qui sont les personnages de ses tragédies, il ne recourait pas à la Fatalité pour expliquer leur actions. […] Sainte-Beuve fait erreur, le monde de René était découvert avant Senancour et Chateaubriand, mais l’honneur de le marquer de son sceau revient à Chateaubriand ; il sut se servit de la langue, des images et des passions du jour, et personnifier ce monde sentimental et idéal que les contemporains portaient dans leur cœur et dans leur tête. […] Les sentiments patriotiques si intenses pendant la grande période révolutionnaire, s’éteignaient ; l’idée de patrie, dont les conventionnels s’étaient servi, comme d’un levier, pour soulever la nation et la jeter aux frontières, était tenue en suspicion. […] Mémoire d’un détenu pour servir à l’histoire de la tyrannie de Robespierre, par Riousse arrêté à Bordeaux par un comité révolutionnaire.

1037. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

Le jeune roi, doué d’un courage héroïque, aussi habile à monter un cheval fougueux qu’à dompter un éléphant ivre de fureur, toujours vainqueur, soit qu’il se servît de la lance ou de la massue, du cimeterre ou de l’arc, semblable en majesté au chef des immortels, en éclat au dieu puissant de la lumière, était l’amour et l’admiration de son peuple. […] Le soleil et la lune, le feu et le vent, la terre et le firmament, et la vaste étendue des eaux, le jour et la nuit, les deux crépuscules du matin et du soir, tous les éléments sont les témoins des actions les plus secrètes de l’homme : s’il n’a point agi contre la voix intérieure de sa conscience, le juge incorruptible le fait jouir d’une félicité éternelle ; mais si en étouffant cette voix il s’adonne au crime, il est condamné aux plus terribles châtiments. » Un tel discours, dans un tel moment, est déplacé ; on voit que dans ces poèmes les situations les plus pathétiques servent moins au développement des passions qu’au développement de la haute morale qui domine dans l’âme des poètes les passions elles-mêmes. […] Ici sont des pierres tout onctueuses de l’huile de l’ingoudi, dont elles viennent de servir à broyer les fruits ; là, de jeunes gazelles, habituées à la voix de l’homme, ne se détournent pas à son approche ; et ailleurs ces lignes humides, tracées sur la poussière, et qui partent de divers bassins, ne doivent-elles pas leur origine aux gouttes d’eau distillées des vases nouvellement purifiés ? […] Toi, chère Sacountala, va, sans perdre de temps, à l’ermitage, chercher des fruits dignes d’être offerts à notre hôte : cette eau, en attendant, peut servir à rafraîchir ses pieds fatigués. […] À quoi nous servirait de la voir davantage ?

1038. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Son œuvre est un exemple qui nous sert de leçon. […] Mais, à supposer qu’ils eussent eu ce spectacle, on se demande s’il leur aurait servi à grand-chose. […] Le bon sens veut qu’on laisse tous ses souvenirs dans le rang ; le souvenir approprié répondra alors chaque fois à l’appel de la situation présente et ne servira qu’à l’interpréter. Chez Don Quichotte, au contraire, il y a un groupe de souvenirs qui commande aux autres et qui domine le personnage lui-même : c’est donc la réalité qui devra fléchir cette fois devant l’imagination et ne plus servir qu’à lui donner un corps. […] Mais le rêveur, au lieu de faire appel à tous ses souvenirs pour interpréter ce que ses sens perçoivent, se sert au contraire de ce qu’il perçoit pour donner un corps au souvenir préféré : le même bruit de vent soufflant dans la cheminée deviendra alors, selon l’état d’âme du rêveur, selon l’idée qui occupe son imagination, hurlement de bêtes fauves ou chant mélodieux.

1039. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Vous fûtes bien servi, prince. […] Il n’y avait point de nuances d’opinion pour des hommes qui servaient également bien. […] Il sentait comme Lamartine, mais l’expression ne servait pas toujours sa pensée. […] Ce Félix Bodin, qui servit de caution à M.  […] Quant au trousseau, il était à la mode de Wurtemberg et ne put servir.

1040. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

C’est de là qu’il concluait l’extrême différence du corps et de l’âme ; parce qu’il n’y a rien de plus différent de celui qui se sert de quelque chose, que la chose même dont il se sert. » Mais Bossuet, avec son grand bon sens, ajoute : « Il y a pourtant une extrême différence entre les instruments ordinaires et le corps humain. […] Elle sert à chercher l’étoile et à courir lestement dans le ciel ; l’autre sert, proprement, à observer. […] Si ces justes ne se nourrissent que de lumière, on se demande alors à quoi servent les fruits qui pendent aux arbres. […] Mais, chez l’auteur chrétien dans ce paradis, où les justes ne mangent et ne boivent que de la lumière, à quoi servent les fruits ? […] Guido Reni peignait avec une sorte de pompe ; il était alors vêtu magnifiquement, et ses élèves le servaient en silence, autour de lui rangés.

1041. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Dumas, Alexandre (1824-1895) »

. — Le Docteur Servais (1849). — Automne (1849). — Tristan le Roux (1850). — Trois hommes forts (1850). — Revenants (1851). — Diane de Lys (1851). — Contes et nouvelles (1853)

1042. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 269-271

Son Précis de l’Histoire universelle, plusieurs fois réimprimé, est très-propre à servir d’Introduction à l’étude de l’Histoire, & à guider les pas de ceux qui veulent parcourir avec fruit cette vaste carriere, où la vérité se trouve si souvent confondue avec le mensonge & l’erreur.

1043. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 403-404

Son Oraison funebre du Cardinal de Fleury, est un chef-d’œuvre en même temps qu’elle fut son premier essai : les critiques qu’on en a faites n’ont servi qu’à en relever les véritables beautés.

1044. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 437-438

Son Altesse me congédie ; C’est le prix de l’avoir servie Pendant dix ans avec ardeur.

1045. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 176-177

A quoi sert de s'exalter péniblement l'imagination, pour produire quelques étincelles qui avortent, ou n'éblouissent qu'un instant ?

1046. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Bâtiment. » p. 534

Chaque faculté doit avoir son corps de bâtiment séparé, à l’instar de celui de la faculté des arts qui servira de modèle pour les autres.

1047. (1763) Salon de 1763 « Peintures — La Tour » p. 223

On sert.

1048. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre IX. De l’astronomie poétique » pp. 233-234

Les héros, et les hiéroglyphes qui signifiaient leurs caractères ou leurs entreprises, furent donc placés dans le ciel, ainsi qu’un grand nombre des dieux principaux, et servirent l’astronomie des savants, en donnant des noms aux étoiles.

1049. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Liégeard, Stéphen (1830-1925) »

Et ceux de Stéphen Liégard, sans être toujours assez frémissants, sont toujours de bons vers, et souvent des vers fortifiants, cueillis sur l’âpre coteau des vertus, ou des vers splendides, cueillis sur la « Côte d’Azur », pour rappeler l’expression qui sert de titre à l’un de ses volumes en prose, qu’il a créée, je crois, et qui a fait fortune.

1050. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 131-133

Je désire qu’elle serve de témoignage aux sentimens de considération & d’estime avec lesquels j’ai l’honneur d’être, &c. »  

1051. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 214-216

Les saillies de son esprit le firent aimer du Cardinal de Retz, qui fut tirer parti, en faveur de la Fronde, de son Génie chansonnier, toujours prêt à la servir.

1052. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « La Esmeralda » (1836) »

Si par hasard quelqu’un se souvenait d’un roman en écoutant un opéra, l’auteur croit devoir prévenir le public que, pour faire entrer dans la perspective particulière d’une scène lyrique quelque chose du drame qui sert de base au livre intitulé Notre-Dame de Paris, il a fallu en modifier diversement tantôt l’action, tantôt les caractères.

1053. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Carle Van Loo » pp. 92-93

Les femmes occupées à servir les figures principales sont éteintes avec jugement ; vraies, naturelles et belles, sans causer de distraction.

1054. (1914) Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne pp. 59-331

Il ne s’est point servi des règles du catéchisme pour vitupérer les autres. […] Il s’en est servi pour se faire beaucoup de mal. […] Dieu est servi. […] Et surtout que ces musulmans n’aillent pas croire que des barons français servent leur Dieu moins bien qu’ils ne servent le leur. […] Le catholique se sert de ceux qu’il y a.

1055. (1912) Réflexions sur quelques poètes pp. 6-302

Si le ciel m’avait favorisée davantage, au lieu de conseiller seulement, j’eusse pu servir d’exemple. […] Il avait copié de sa main un gros volume des épîtres de Cicéron, et comme il s’en servait aussi habituellement que de son Virgile, il le tenait sans cesse à sa portée. […] La libéralité ne fut point le vice de cet autre Henri, le roi de Navarre, que d’Aubigné servit fidèlement. […] Ce dernier lui servit de maître et favorisa son goût pour les lettres et la poésie. […] Cette chambre était meublée de livres entassés pêle-mêle sur le plancher ; deux serviettes sales servaient de rideaux à un lit de sangle.

1056. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 374-375

Garasse a cependant servi d’autorité, & l’on ne sera pas fâché de trouver ici une citation d’un Sermon du P.

1057. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Argument » pp. 249-250

Observations philosophiques et philologiques, qui doivent servir à la découverte du véritable Homère.

1058. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Le corps est une âme qui se sert d’un corps, a énoncé un philosophe antique. […] Il a servi, il a excité la littérature et donné le goût du nouveau, de l’original. […] Et où sont ceux du monde des lettres que sa camaraderie n’a pas servis ? […] Le tout est de savoir s’en servir. […] — Je crois que cette tentative servira surtout au drame lyrique.

1059. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

Elle « régna » pendant quelque temps, mais je crois bien que ce fut Pallas qui « gouverna », et qu’il se servit d’elle plus qu’elle ne se servit de lui. […] Et c’est, en effet, le vieux monsieur qui sert un bon coup d’épée au jeune mari susceptible. […] C’est à cela que lui aura servi son escapade. […] Ce qu’on va nous servir aujourd’hui, c’est le poncif rustique. […] Son « acquis » de comédien le sert étonnamment dans ces circonstances solennelles.

1060. (1896) Psychologie de l’attention (3e éd.)

1° Comme organe intellectuel, le cerveau sert de substratum aux perceptions (dans l’attention sensorielle), aux images et aux idées (dans la réflexion). […] Nous croyons avoir établi qu’elle est une adaptation aux conditions d’une vie sociale supérieure, qu’elle est une discipline et une habitude, une imitation de l’attention naturelle, qui lui sert à la fois de point de départ et de point d’appui. […] b) La deuxième catégorie comprend la plupart des idées générales qui servent à l’usage courant de la pensée. […] Parmi eux, beaucoup ne servent pas au but principal ou en détournent. […] Pour y parvenir, c’est le fait même de l’attention normale qui doit nous servir de point de départ, et il nous reste à en noter les variations de nature et les déviations.

1061. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

Mais joué une fois, ayant éprouvé l’instrument dont il disposait, le jeune dramaturge aurait appris à s’en servir, à adapter aux habitudes du théâtre sa fantaisie irréfrénée. […] Personne n’eut pu tarir en lui ce don du mouvement, cette divination du cœur humain et ce lyrisme actif qu’à un moindre degré il partageait avec Shakespeare, et la scène les eut servis. […] Nous assistons ici au conflit le plus pathétique qui se soit produit chez un homme entre le dramaturge et l’écrivain : tour à tour ils se serviront et se desserviront l’un l’autre. […] On saura s’en accommoder, puis s’en servir. […] Oui, il a créé l’instrument de ce théâtre poétique dont nous avons rêvé ; il ne s’agit plus que de s’en servir.

1062. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

Sa femme et ses enfants étaient morts ; il vivait seul, délaissé, servi par une vieille femme. […] Vous auriez dû vous servir de l’huile blanche que je vous ai donnée. » Il tire la fiole de sa poche, et la farde sur les deux joues. […] imaginez que ces bonnes œuvres Serviront à cacher vos mauvaises. […] Chute sur chute, honte sur honte, rien ne lui sert ; sa femme déclare qu’elle consent à le garder tel qu’il est. —  Le légiste propose une autre voie légale ; Morose obtiendra le divorce en prouvant que sa femme est infidèle. […] Though need make many poets, and some such As art and nature have not better’d much, Yet ours for want hath not so loved the stage, As he dare serve the ill customs of the age, Or purchase your delight at such a rate, As, for it, he himself must justly hate.

1063. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VII. Les poëtes. » pp. 172-231

Il est cauteleux, malin, en avorton nerveux qu’il est ; quand il souhaite une chose, il n’ose pas la demander rondement ; avec des insinuations et des manœuvres de style, il amène les gens à la mentionner, à la faire venir, après quoi il s’en sert. […] Une nuit, chez lord Oxford, pendant le terrible hiver de 1740, de peur de perdre une idée, il fit lever quatre fois la femme qui le servait. […] Boileau fait le second vers avant le premier ; c’est pourquoi, une fois sur quatre, le premier vers chez lui ne sert qu’à boucher un trou. […] Il y montre que Dieu a fait tout pour le mieux, que l’homme est borné et ne doit pas juger Dieu, que nos passions et nos imperfections servent au bien général et aux desseins de la Providence, que le bonheur est dans la vertu et dans la soumission aux volontés divines. […] Il ne leur sert de rien d’être passionnés ou réalistes, d’oser décrire comme Shenstone, une maîtresse d’école et l’endroit sur lequel elle fouette un polisson : leur simplicité est voulue, leur naïveté archaïque, leur émotion compassée, leurs larmes académiques.

1064. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

La voici ; elle servira mieux que des pages de dissertation à vous attester la contagion du son sur les sens. […] Lorsque nous serons de retour à Salzbourg, il sera en état de servir la cour du prince-évêque. […] Aucune des lettres que j’avais pour Paris ne m’aurait absolument servi à rien, ni les lettres de l’ambassadeur de France à Vienne, ni l’intervention de l’ambassadeur de l’empereur à Paris, ni les recommandations du ministre de Bruxelles, comte de Cobenzl, ni celles du prince de Conti, de la duchesse d’Aiguillon, ni toutes celles dont je pourrais faire une litanie ! […] Le 12, nous avons vu les fonctions ; nous nous sommes trouvés tout à côté du pape pendant qu’il servait la table des pauvres. Nos beaux habits, la langue allemande et ma liberté habituelle, que j’employai fort à propos en commandant en allemand à mon domestique d’appeler les hallebardiers suisses pour nous faire faire place, me servirent à merveille et nous permirent partout de nous mettre en avant.

1065. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

On ne peut pas dire de Voltaire qu’il ait eu de l’influence sur les poètes étrangers, qu’il leur ait servi de centre de réunion, et qu’ils aient reconnu en lui un maître et un souverain. — La lettre d’Émile Deschamps était écrite avec une très aimable et très cordiale aisance. […] Je l’avais dans la tête depuis longtemps, comme vous savez, mais, pendant l’exécution, il s’est énormément augmenté, et je ne peux plus me servir que de ce qu’il y avait de plus général dans mon ancien plan. […] Qu’est-ce qui est authentique, sinon ce qui est tout à fait excellent, ce qui est en harmonie avec ce qu’il y a de plus pur dans la nature et dans la raison, ce qui sert encore aujourd’hui à notre développement le plus élevé ? […] L’amour mortel sert de clef à la plus sublime métaphysique. […] Byron est aussi poète, mais moins sensé ; c’est le délire de la versification à qui la lyre sert de jouet, le cœur humain de victime, et Dieu lui-même de dérision.

1066. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

Ces données servent de base aux premières inductions de la psychologie. […] La plus courte étude sert aussi à montrer clairement que les actions qui constituent la pensée, se présentent, non en même temps, mais l’une après l’autre. […] Il commence d’abord par réclamer, en faveur de la perception, contre la suprématie exclusive que les métaphysiciens attribuent à la raison. « Par elle, nous avons pu passer d’un petit nombre de notions simples, vagues, comme en possèdent les sauvages, à ces vérités nombreuses, complexes et précises, qui nous servent maintenant de guide d’une manière si large. […] Elle nous a servi à compliquer et à perfectionner ces arts de la vie qui demanderaient des encyclopédies pour les décrire. […] La raison a servi d’instrument pour réprimer les formes inférieures du gouvernement mental, — le gouvernement par préjugé, le gouvernement par tradition, etc., et partout où elle les a remplacées, elle tend à jouer le rôle de despote à leur place.

1067. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

Ravaisson dans une de ses pages les plus souvent citées : « des profondeurs de la mémoire sort aussitôt tout ce qui peut y servir des trésors qu’elle contient. […] Une fois les idées produites, elles peuvent servir de base à leur tour pour de nouveaux jugements et raisonnements. […] Le concept général est une image qui sert de point d’intersection à une multitude d’images et de mouvements semblables, entrevus d’une vision indirecte : en la fixant, on sent qu’elle est représentative d’une multitude mouvante, par sa relation de similitude avec toutes les autres images prêtes à renaître. […] De plus, l’imagination sert à la solution des problèmes en inventant les constructions capables de les résoudre. […] Si j’imagine une femme à queue de poisson, comme la sirène, l’imagination est purement constructive ; si je me sers de cette représentation pour exprimer le caractère à la fois séduisant et bas de la volupté, l’imagination devient expressive.

1068. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

elle était née au plein milieu du dix-huitième siècle ; les descendants de l’Ordre Teutonique étaient devenus luthériens ; luthérienne donc, et puis femme d’ambassadeur, elle eut à essuyer d’abord toute cette vie de monde, de scepticisme et de plaisirs ; et lorsqu’elle y échappa, lorsque la flamme des événements publics vint éprendre cette âme si fervente sous une enveloppe si frêle, et lui fit croire à l’heure de prédire, de frapper tour à tour et de consoler, il se trouve que bien peu l’entendirent ; qu’elle fut comme la prophétesse stérile d’Ilion en cendres ; que ceux même que sa rapide éloquence de cœur avait un moment saisis, comme la poussière éparse que la nue électrique enlève, elle passée, retombèrent ; et qu’elle-même, sans ordre fixe, sans discipline, sans tradition, soulevée par le souffle ardent des catastrophes et n’ayant entrevu que des lueurs, perdit aussitôt la trace de l’avenir, et mourut dans une Crimée, sans rien laisser, sans rien servir, flocon de neige apporté et remporté par l’aquilon, un simple éclair et un cri de plus dans le vaste orage ! […] La partie profonde de son âme était (pour me servir d’une expression de Valérie) comme ces sources dont le bruit se perd dans l’activité et dans les autres bruits du jour, et qui ne reprennent le dessus qu’aux approches du soir. […] Vous n’êtes point captive dans les liens de la mort, comme tout ce qui n’a eu que le domaine du mal pour régner ou pour servir. » Et elle finit en montrant la Croix laissée dans ces lieux comme un autel magnifique qui doit tout rallier, et qui dira : « Ici fut adoré Jésus-Christ par le héros et l’armée chère à son cœur : ici les peuples de l’Aquilon demandèrent le bonheur de la France. » Ces pages expriment clairement en quel sens Mme de Krüdner concevait et conseillait la sainte-alliance ; mais ce qui était son rêve, ce qui fut un moment celui d’Alexandre, se déconcerta bientôt, et s’évanouit en présence des intérêts contraires et des ambitions positives, qui eurent bon marché de ces nobles chimères. […] Quelques mots engagés à la rencontre, n’importe à quel sujet et en quel lieu, servaient de texte, et sur un escalier, sur un perron, au seuil d’un appartement, l’entretien tournait vite en prédication.

1069. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

Quelques documents inédits sur André Chénier49 Voilà tout à l’heure vingt ans que la première édition d’André Chénier a paru ; depuis ce temps, il semble que tout a été dit sur lui ; sa réputation est faite ; ses œuvres, lues et relues, n’ont pas seulement charmé, elles ont servi de base à des théories plus ou moins ingénieuses ou subtiles, qui elles-mêmes ont déjà subi leur épreuve, qui ont triomphé par un côté vrai et ont été rabattues aux endroits contestables. […] M. de Latouche, dans son édition de 1819, a fait des manuscrits tout l’usage qui était possible et désirable alors ; en choisissant, en élaguant avec goût, en étant sobre surtout de fragments et d’ébauches, il a agi dans l’intérêt du poète et comme dans son intention, il a servi sa gloire. […] Ainsi tout lui servait à ses fins ingénieuses ; il extrayait de partout la Grèce. […] La patrie allume ma voix ; La paix seule aguerrit mes pieuses morsures, Et mes fureurs servent les lois.

1070. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIe entretien. La passion désintéressée du beau dans la littérature et dans l’art. Phidias, par Louis de Ronchaud (1re partie) » pp. 177-240

Cette route est serpentante comme la couleuvre d’eau bleue qui se glisse à vos pieds à travers les prairies étroites et les petits caps de rocher qui servent de lit à la rivière. […] Les scieries reçoivent, par des ornières gigantesques, les cadavres encore verts des sapins ; ils glissent avec des bonds de tangage jusque sur le bord des cataractes où la dent de l’acier va les démembrer ; d’autres, lancés tout entiers sur l’eau courante, vont flotter jusqu’à la rivière d’Ain, et jusqu’au Rhône, pour servir de mâts aux navires et pour plier sans rompre sous les voilures, de même qu’ils ont plié et se sont redressés sur la montagne, sous leurs feuilles et sous le vent, comme pour s’exercer à porter le poids des tempêtes. […] Fauvel ramassait ses pierres à Athènes, il me parlait souvent d’eux ; mais il levait les épaules au nom de M. de Chateaubriand visitant le Parthénon avec un chaudronnier de Smyrne qui lui servait de guide à quinze sous par jour. « Ne m’en parlez pas, me disait-il, celui-là n’est qu’un faux prêtre de notre culte pour le marbre ; il fouille du bout de sa canne à pomme d’or, qu’il appelle son bâton blanc, les cendres du foyer des terres dans l’Acropole ; mais il n’y cherche que des mots, des images, de la gloire, et non des collections sacrées comme ces vestiges. […] Puis, il me rappelait mon ascension du lendemain du débarquement à l’acropole, et ma longue station sous les propylées, au milieu d’un groupe prisonnier de soldats turcs qui faisaient leur feu de myrte au pied d’une colonne, foyer auquel deux jambes de déesses séparées des bustes servaient de chenets.

1071. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (3e partie) » pp. 365-427

Galilée s’en servait déjà à Venise ; Kepler constate que toutes les étoiles sont autant de soleils entourés, comme le nôtre, de leurs planètes. […] Les étoiles, par leur changement de place relativement à la Terre, servent à motiver les pas que notre système planétaire lui-même fait en s’avançant dans l’espace absolu. […] L’homme est profondément humilié de sentir que l’antique forêt n’est point encore propre à lui servir de demeure. […] Il s’élance contre l’arbre auquel il prétend s’attacher, et le bois de la tige croît en s’appliquant, comme du plâtre à mouler, sur un des côtés du tronc qui lui sert de point d’appui.

1072. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre quatrième »

Le ciel sembloit estre exempt de leurs mains ; Et toutefois les bons pères romains, Pour servir Dieu que mieux connoistre ils surent, Y prirent siege, et les clefs en reçurent ; Or, maintenant, leurs riches successeurs Pour estre encor plus amples possesseurs, Et leurs acquets augustes imiter, Ont pris enfer, et y vont habiter. […] » Les poëtes de l’école de Marot, le maître compris, ne sont pas traités plus doucement : « Laisse-moi, s’écrie-t-il, toutes ces vieilles poésies françoises aux Jeux Floraux de Thoulouze et au pays de Rouen comme rondeaux, ballades, virelais, chants royaux, chansons et aultres episseries qui corrompent le goust denostre langue, et ne servent sinon à porter tesmoignage de nostre ignorance. » Du Bellay propose de remplacer tous ces vieux genres par des genres nouveaux. […] Ronsard dès sa jeunesse était devenu sourd ; on ne cherchait qu’un prétexte pour l’égaler à Homère ; cette surdité y servit ; il n’y eut entre Homère et Ronsard que la différence d’infirmité. […] Il voulait qu’on fît de verve, verver, vervement ; de pays, payser ; d’eau, eauer ; de feu, fouer, fouement ; et « mille autres tels vocables, dit-il, qui ne voyent encore la lumiere, faulte d’un hardy et bienheureux entrepreneur98. » Sa théorie, du provignement des vieux mots est ingénieuse « Tu ne desdaigneras dit-il, les vieux mots françois, d’autant que je les estime tousjours en vigueur, quoy qu’on die, jusqu’à ce qu’ils ayent fait renaistre en leur place, comme une vieille souche, un rejeton et lors tu te serviras du rejeton et a non de la souche, laquelle fait aller toute substance à son petit enfant, pour le faire croistre et finablement establir en son lieu99. » On sait jusqu’où il imita la hardiesse de la langue grecque dans la formation des mots composés.

1073. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

On composa de ces histoires qui ne concluent pas, comme si la science humaine devait être un interminable catalogue de faits, comme si elle avait d’autre raison d’être que de servir la vie immédiate et prochaine ! […] Il n’y a réellement pas de mot dans une langue qui soit banal ni inutile, pas de mot usé, avili, qui ne puisse servir une fois, et il n’est pas d’image si belle, d’expression neuve et juste, qui ne soit ridicule dans certaines occasions. […] Il s’adressait à des êtres qui ont le devoir de ne regarder que leur personne parce que mille intérêts en dépendent, et qu’ils servent réellement le monde entier en ne pensant qu’à eux-mêmes. […] Les êtres qui sont faits pour servir, pour s’humilier, pour s’effacer, vont peu à peu prendre une arrogance stupide et dangereuse.

1074. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

Quand quelqu’un souhaite lire, il bande, avec une grande quantité de toutes sortes de petits nerfs, cette machine ; puis il tourne l’aiguille sur le chapitre qu’il veut écouter, et en même temps, il en sort, comme de la bouche d’un homme ou d’un instrument de musique, tous les sons distincts et différents qui servent, entre les grands lunaires, à l’expression du langage. » On pourrait dire de même que de nos jours tel roman de Jules Verne, telle fantaisie d’un poète, de Victor Hugo, par exemple, dans Plein ciel, présagent l’invention des bateaux sous-marins ou des nacelles ailées qui opéreront la traversée effrayante d’un astre à un autre. Le malheur est que cette prescience n’a de valeur qu’une fois les choses trouvées, parce qu’elle est le plus souvent trop vague pour servir de guide aux chercheurs. […] Les figures imparfaites dont elles se servent pour l’invention ou la démonstration ne sont qu’un auxiliaire dont elles peuvent se passer. […] Il m’a paru qu’il serait bon de faire cesser ces étroitesses de goût, ces dédains réciproques, ces prétentions exclusives auxquelles les programmes d’enseignement servent encore aujourd’hui de champ de bataille.

1075. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 février 1886. »

Ils se servaient dans leurs morceaux religieux, de rythmes, de cadences, d’harmonies dont aujourd’hui quelques-uns nous sont devenus incompréhensibles, tandis que d’autres ont complètement perdu le sens qu’ils avaient pour eux. […] N’est-ce pas même pour remédier à ce manque d’une langue déterminée, que Wagner a imaginé d’exposer au début de ses drames les principaux motifs dont il se servirait et le sens qu’il leur attribuait, afin de donner du moins à ses auditeurs le vocabulaire spécial nécessaire à l’intelligence de l’œuvre qu’il leur présentait ? […] Platen s’en servait dès le début, et il se montrait maître absolu dans ses Ghazels, ses Sonnets, ses Octaves et Tergines, ses Gloses et Triolets. […] C’est à quoi doivent nous servir les paroles si jeunes et si chaudes qu’il a écrites sur Bellini, il y a cinquante ans.

1076. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1883 » pp. 236-282

— Mais c’est… — Oui c’est… et il se servit du mot scientifique… et avec cela on a le cancer… j’ai le cancer… oui je l’ai… maintenant gardez cela pour vous, et merci. […] Mardi 20 février Ce soir, après dîner, au pied du lit en bois sculpté, où on sert les liqueurs, Zola se met à parler de la mort, dont l’idée fixe est encore plus en lui, depuis le décès de sa mère. […] Il nous parle de la salle de spectacle, qui comme le plus grand local, sert aux assises, et où l’on pend sur la scène, après le théâtre, — et où il a vu, dit-il, un pendu qui se raccrochait aux montants des coulisses, et sur lequel les spectateurs tiraient de leur place. […] À quoi sert ?

1077. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

Dans l’ancienne poésie dramatique, c’était la première partie d’une pièce de théâtre, qui servait à faire connaître le caractère des principaux personnages, et à exposer le sujet sur lequel roulait toute la pièce. […] Au reste, cet usage dura peu chez les Grecs, c’était dans les chœurs que les poètes portaient le plus loin la licence, et c’est sur les chœurs principalement que tombe la réforme qui sert d’époque à la comédie nouvelle. […] Il serait à souhaiter que la disposition du sujet fût telle qu’à chaque scène on partît d’un point pour arriver à un autre point déterminé ; en sorte que le dialogue ne servît qu’aux progrès de l’action. […] Dans la comédie, il faut s’en servir pour produire des jeux de théâtre, comme lorsqu’un acteur fait en deux mots, tout bas, une réflexion plaisante sur ce que l’autre dit tout haut, etc.

1078. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 337-339

Les Preuves de la Religion, ainsi que l’Examen des faits qui servent de fondement au Christianisme, seront toujours, aux yeux d’un Critique plus impartial, la réfutation de cet absurde badinage.

1079. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 157-158

En remontant jusqu’à la source primitive d’un systême de musique connu à la Chine depuis plus de quatre mille ans ; en approfondissant les principes sur lesquels ce systême appuie ; en développant ses rapports avec les autres sciences ; en déchirant ce voile épais qui nous a caché jusqu’ici la majestueuse simplicité de sa marche, ce Savant eût pénétré peut-être jusque dans le Sanctuaire de la Nature… Son Ouvrage nous eût peut-être fait connoître à fond le plus ancien systême de musique qui ait eu cours dans l’Univers [celui des Chinois] ; & en l’exposant avec cette clarté, cette précision, cette méthode qu’on admire dans son Mémoire, il eût servi comme de flambeau pour éclairer tout à la fois & les Gens de Lettres & les Harmonistes : les premiers, dans la recherche des usages antiques, & les derniers dans celle du secret merveilleux de rendre à leur Art l’espece de toute-puissance dont il jouissoit autrefois, & qu’il a malheureusement perdue depuis. »  

1080. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre premier. Caractères naturels »

Appuyons cette vérité sur des exemples ; faisons des rapprochements qui servent à nous attacher à la religion de nos pères, par les charmes du plus divin de tous les arts.

1081. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

Il faut ne pas contrarier son maître, et le servir dans son goût, surtout lorsque les circonstances rendent tout autre parti impossible ou dangereux. […] Cependant le roi et Mme de Pompadour restaient mécontents de Bernis ; il recevait précisément dans le moment même le chapeau de cardinal ; il avait été comblé de faveurs et de grâces depuis deux ans ; nommé successivement abbé de Saint-Médard, abbé de Trois-Fontaines7, commandeur du Saint-Esprit, on pouvait s’étonner qu’il se lassât de servir justement à l’heure où il lui était difficile de rien obtenir de plus pour sa fortune. […] En homme humain et excellent, il s’inquiète avant tout de la position qu’on fera à ses secrétaires et à ceux qui l’ont servi.

1082. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — I. » pp. 325-345

Que le chancelier, d’un trait de plume, rende aujourd’hui, suivant le vœu des gens sensés, ces Treize Coutumes uniformes, à quoi serviront demain ces fruits d’une vieillesse agitée, pénible, plus qu’elle n’est heureuse ? […] Au centre, c’est-à-dire dans l’Assemblée nationale, les clubs et les assemblées sectionnaires de Paris avaient leurs orateurs ; la tribune nationale servait de tocsin général du parti. […] En général, il ne condense pas et ne grave pas de la sorte sa pensée : mais cette fois la vivacité de l’impression, l’effroi des souvenirs, et aussi cette forte idée de Hobbes, lue et méditée auparavant dans la retraite, et se résumant en un style concis, ont servi à l’inspirer.

1083. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Il y servit sous les ordres et comme adjoint de M.  […] De même dans cette épître (« Hoc erat in votis… ») qu’il rend d’ailleurs avec sentiment, dans le morceau célèbre sur le bonheur des champs, il ose bien nommer la fève que le poète devenu campagnard sert sur sa table, mais il recule devant ces petits légumes assaisonnés de fin lard, et dont Horace nous laisse arriver le fumet : Uncta satis pingui ponentur oluscula lardo ; et il dit en échange : Quand verrai-je ma table offrir du lait, des fleurs ! […] Daru pour l’empressement et la confiance avec lesquels il a bien voulu me remettre entre les mains toutes les pièces et documents originaux qui devaient me servir de base dans ce travail sur son père ; et il y a joint des observations de tout genre dont j’ai eu presque toujours à profiter.

1084. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Ce qui la séduisit surtout dans cette union fut la certitude que sa petite sœur ne la quitterait pas, qu’elle resterait maîtresse de lui prodiguer ses soins et de lui servir de mère. » « On cita, parmi les seigneurs russes dont ce mariage avait frustré les vœux, un jeune homme auquel la naissance, la fortune et de rares qualités d’esprit ouvraient une grande destinée, le baron, depuis, comte Strogonof. […] Nous devions le signaler, parce que, sous une forme ou sous une autre, la question Rambouillet recommence toujours ; parce que, de plus, ces politesses excessives et ces complaisances de langage servent à revêtir de coulantes facilités de jugement. […] Ce serait inexplicable s’il n’y avait pas un peu d’éternité dans certains moments… » C’est du spirituel le plus raffiné, et l’éternité elle-même n’est là que pour servir à la coquetterie de l’esprit. — Leurs deux salons, leurs deux mondes plus tard restèrent en bonne intelligence, mais de loin, sans risquer de se heurter ni de se confondre ; ils ne se faisaient, en réalité, ni opposition ni concurrence.

1085. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

Voulez-vous persuader à toute l’Europe, qui a les yeux sur vous, que, dans le nombre des gens qui vous aiment, il n’y en a pas un seul que vous jugiez digne de vous servir ? […] Et quand bien même vous eussiez fait tout ce que vous avez omis, quand vous auriez acquis toutes les preuves imaginables de l’attentat le plus noir, vous eussiez dû encore modérer votre emportement contre un homme qui vous a réellement servi. […] « En vérité, le monde n’est pas si corrompu que ces messieurs le prétendent ; la bonté n’est pas rare ; chaque nation offre à celui qui les cherche une infinité d’hommes estimables, portés par leurs principes ou par leur naturel à aimer, à servir ceux qui leur ressemblent ; partout le mérite et l’honneur trouvent de l’appui, des secours, des amis.

1086. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

De telles historiettes à la Tallemant qui circulaient dans Paris, et que chacun brodait à plaisir, arrivaient à l’oreille du roi lui-même qui faisait semblant d’en rire, mais qui, tout en continuant à se servir de l’homme, tirait dès lors la barre à la fortune et au crédit de l’ambitieux. […] M. de Harlay, en toutes ces démarches qui ont gravé à jamais son nom dans l’histoire de la Compagnie, était animé du noble désir de la servir, et aussi peut-être de la crainte que si l’Académie venait à se choisir, après le chancelier Séguier, un second protecteur au-dessous du trône, ce protecteur ne fût pas lui, encore si nouveau et l’un des derniers élus. […] Feuillet lui répondit qu’il n’en savait rien, mais que depuis peu il avait dit sur ce sujet à Monsieur (et l’on sait de quelle nature étaient les mœurs de ce prince) qu’il n’avait point besoin de confesseur en menant la vie qu’il mène à la Cour, et qu’il lui conseillait d’épargner les 6,000 livres qu’il donne à son confesseur qui ne sert qu’à le tromper, et qu’il valait bien mieux pour lui de les donner aux pauvres, afin de fléchir pour leurs prières la miséricorde de Dieu sur sa personne : après quoi, si Jésus-Christ lui donnait quelque sentiment de pénitence pour se convertir, il choisirait lui-même un homme de bien pour régler ses mœurs et la conduite de sa vie. — Ce discours, que la plupart des gens prendraient pour quelque chose de bien grave et de bien sérieux, parut à M. de Paris si agréable et si divertissant qu’il fut plus d’un bon demi-quart d’heure à en rire de tout son cœur. » 54.

1087. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

En dehors des choses sérieuses et même au jeu, cela sert de se posséder toujours. […] Brantôme, qui raconte le fait, se demande si toutes ces adresses et subtilités dont le maréchal de Matignon savait si bien se servir, et qui lui avaient fait une réputation à part d’homme habile autant qu’heureux, ne venaient point de quelque démon ou esprit familier qu’il avait à son service, comme le bruit en courait parmi le peuple. […] Je me servis du capitaine Saintes, ayant besoin de nos soldats.

1088. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin »

Prenons notre revanche alternativement au profit des deux arts, sans les mélanger, sans les forcer et en observant une limite que d’autres plus hardis, plus aventureux, plus singulièrement doués, ne craignent pas de franchir, mais qu’il me paraît bon, à moi, de maintenir et de respecter. » — Distinguant donc entre les idées visuelles ou plastiques et les idées littéraires, il rend les premières sur ses toiles, réservant les secondes pour ses pages écrites, attentif à se servir en chaque chose de l’art le plus approprié. […] Il se sert de tous ses sens, Il n’a pas trop d’eux tous pour rendre son impression totale et harmonieuse. […] Le paysagiste pur reparaît dans mainte page, — dans la halte si bien décrite autour du pistachier, cet arbre à tête ronde et aux larges rameaux en parasol, qui abrite un moment à midi la caravane rassemblée : « L’arbre reçoit sur sa tête ronde les rayons blancs de midi ; par-dessous, tout paraît noir ; des éclairs de bleu traversent en tous sens le réseau des branches ; la plaine ardente flamboie autour du groupe obscur ; et l’on voit le désert grisâtre se dégrader sous le ventre roux des dromadaires. » Quand il nous décrit, au contraire, la végétation monotone de l’alfa, espèce de petit jonc, plante utile qui sert de nourriture aux chevaux, mais la plus ennuyeuse aux yeux qui se puisse voir, et qui, régnant sur des étendues infinies, ressemble à « une immense moisson qui ne veut pas mûrir, et qui se flétrit sans se dorer », on retrouve l’homme dont le sentiment souffre et dont l’âme s’ennuie.

1089. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin (suite et fin.) »

Les deux premiers chapitres servent d’introduction et de préambule au récit, et y préparent. […] Les paysans qui l’ont vu naître et grandir, et qui le retrouvent aux lieux où vivait son père, le respectent et l’aiment ; il s’arrange lui-même pour les aimer assez, surtout pour les servir et ne pas trop voir leurs laideurs et leurs défauts. […] Dominique, à la veille de quitter les Trembles et se sentant arraché lui-même du lieu où il a pris racine et où il a mis tout son cœur, avait mêlé de ses sentiments à ceux du héros carthaginois, et il avait écrit cette composition scolaire les yeux tout baignés de larmes ; la nature lui parlait plus haut qu’Annibal en ce moment et par cette belle après-midi d’automne, où il essayait de le mettre en scène et de le traduire : « La pierre qui me servait de pupitre était tiède ; des lézards s’y promenaient à côté de ma main sous un soleil doux.

1090. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre III »

Arthur Young, visitant des sources près de Clermont, est arrêté741 et l’on veut mettre en prison la femme qui lui a servi de guide ; plusieurs sont d’avis qu’il a été « chargé par la reine de faire miner la ville pour la faire sauter, puis d’envoyer aux galères tous les habitants qui en réchapperont ». […] On fait venir les dragons de Provins, les braconniers en tuent un, abattent trois chevaux, sont sabrés ; quatre d’entre eux restent sur la place et sept sont pris. — On voit par les cahiers des États Généraux que, chaque année, dans chaque grande forêt, tantôt par le fusil d’un braconnier, tantôt et bien plus souvent par le fusil d’un garde, il y a des meurtres d’hommes  C’est la guerre à demeure et à domicile ; tout vaste domaine recèle ainsi ses révoltés qui ont de la poudre, des balles et qui savent s’en servir. […] J’ai vu dans le dépôt de Rennes plusieurs maris arrêtés sur la seule dénonciation de leurs femmes, et autant de femmes sur celle de leurs maris ; plusieurs enfants du premier lit à la sollicitation de leur belle-mère ; beaucoup de servantes grosses des œuvres du maître qu’elles servaient, enfermées sur sa dénonciation, et des filles dans le même cas, sur la dénonciation de leur séducteur ; des enfants sur la dénonciation de leur père, et des pères sur la dénonciation de leurs enfants : tous sans la moindre preuve de vagabondage et de mendicité… Il n’existe pas un seul jugement prévôtal qui ait rendu la liberté aux détenus, malgré le nombre infini de ceux qui ont été arrêtés injustement. » — Supposons qu’un intendant humain, comme celui-ci, les élargisse : les voilà sur le pavé, mendiants par la faute de la loi qui poursuit la mendicité et qui ajoute aux misérables qu’elle poursuit les misérables qu’elle fait, aigris de plus, gâtés de corps et d’âme. « Il arrive presque toujours, dit encore l’intendant, que les détenus, arrêtés à vingt-cinq ou trente lieues du dépôt, n’y sont renfermés que trois ou quatre mois après leur arrestation, et quelquefois plus longtemps.

1091. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

IV À l’exception de l’extrême douleur qui brise les cordes de l’instrument et qui leur arrache un cri inarticulé, cri qui n’est ni prose, ni vers, ni chant, ni parole, mais un déchirement convulsif du cœur qui éclate, quand l’émotion de l’homme est modérée et habituelle, l’homme se sert pour l’exprimer d’un langage simple, tempéré et habituel comme son émotion. […] Nous nous servions habituellement, pour ce jeu, des longs cheveux fins, jeunes, blonds et soyeux, coupés aux tresses pendantes de mes sœurs ; mais un jour, nous voulûmes éprouver si les anges joueraient les mêmes mélodies sur des cordes d’un autre âge, empruntées à un autre front. […] Le roi, madame de Maintenon et le duc de Beauvillers avaient été admirablement servis par le hasard ou par le discernement, en rencontrant et en choisissant un tel maître pour un tel disciple.

1092. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre III. Montesquieu »

Par la raison que leurs crimes, leurs injustices, le mal qu’ils justifient par l’utilité et le bien public, que tout cela ne sert à rien : leurs agitations sont vaines et ne changeront rien à l’action toute-puissante de causes éternelles. […] Agissons, puisqu’il faut agir, mais croyons que le résultat sera le même, de quelque façon que nous agissions : et par conséquent agissons selon les lois de la commune morale, puisqu’il ne servirait à rien de les violer. […] Il voudrait y détruire le despotisme, y restaurer la monarchie, l’entourer d’une noblesse, d’une magistrature et d’un clergé, qu’on renforcerait et qui serviraient de contrepoids à l’autorité royale : dans les Parlements, il trouverait le pouvoir judiciaire ; de là réunion des trois ordres il dégagerait le pouvoir législatif ; la royauté ne détiendrait plus que l’exécutif.

1093. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

Voyez ce fragment d’une description dans le Berger : … Le logis occupe une moitié de la chaumine, sans communication avec l’autre, qui sert à tous usages et tient lieu de bûcher. […] La grande fourche est piquée dans le fumier, à côté du râteau qui sert à mettre les crottes en monceau… Remarquez, outre la minutie excessive des détails juxtaposés, le luxe des explications techniques. […] Or, il est naturel de se servir de ce qu’on sait, et la science de M. de Glouvet vient d’autant mieux à propos, que la chicane tient une assez grande place dans la vie des paysans.

1094. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

Au reste, il isole ces œuvres, néglige le plus souvent la personne même des écrivains ; ou, s’il en parle, c’est pour leur attribuer, au nom du libre arbitre, le mérite ou le déshonneur d’avoir servi ou trahi l’idéal littéraire dont il a posé au commencement la définition. […] Ce culte est ici fort légitime, Stendhal ayant manié avec plus de sûreté, de finesse, de hardiesse et de suite qu’aucun autre écrivain, l’instrument dont s’est servi M.  […] » Toutes ses enquêtes sur les sentiments originaux de ses contemporains lui servent à rechercher en même temps le sens et le but de la vie.

1095. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

En un mot, une information si ample, puisée à des sources si directes, servie d’un langage si lucide et si étranger aux prestiges, constitue, chez l’historien qui traite un sujet contemporain, la plus rare comme la plus sûre des impartialités. […] Enfin, dans sa marche tardive, il est embarrassé par ses malades, peu servi par ses jeunes soldats que l’ardeur du climat dévore, mal secondé surtout par ses lieutenants, par le général Védel, qui fait là, en diminutif, ce que Grouchy fera un jour à Waterloo. […] Pendant les longues entrevues des deux empereurs, la foule des rois, des souverains de second ordre, des princes et des ambassadeurs, servira de comparses sur l’avant-scène ; les parties de chasse et les fêtes couvriront le sérieux du jeu.

1096. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Le duc de Lauzun. » pp. 287-308

Lauzun, qui servait comme aide de camp, y avait tourné la tête à une Mme Chardon, jeune et jolie femme d’un intendant militaire, pleine d’imagination et de caprice. […] C’est vous seule que je veux servir, vous êtes mon unique souveraine… » À travers mille échecs et mille traverses qu’il rencontrait à chaque pas, il continuait de jouir, selon son expression de fat, « de la plus ridicule faveur dont on puisse se former une idée ». […] Mais, auparavant, Lauzun servit avec honneur dans la guerre d’Amérique, et ses Mémoires se terminent précisément avec cette guerre (1783).

1097. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Essai sur Amyot, par M. A. de Blignières. (1 vol. — 1851.) » pp. 450-470

Bien jeune, il vint à Paris continuer comme il put ses études de grammaire ; il servait en même temps de domestique à quelques écoliers. […] Parquoi Numa, pensant bien que ce n’étoit pas petite ne légère entreprise que de vouloir adoucir et ranger à vie pacifique un peuple si haut à la main, si fier et si farouche, il se servit de l’aide des dieux, amollissant petit à petit et attiédissant cette fierté de courage et cette ardeur de combattre, par sacrifices, fêtes, danses et processions ordinaires que il célébroit lui-même… Et plus loin, marquant que, durant le règne de Numa, le temple de Janus, qui ne s’ouvrait qu’en temps de guerre, ne fut jamais ouvert une seule journée, mais qu’il demeura fermé continuellement l’espace de quarante-trois ans entiers : Tant étoient, dit-il, toutes occasions de guerre et partout éteintes et amorties : à cause que, non seulement à Rome, le peuple se trouva amolli et adouci par l’exemple de la justice, clémence et bonté du roi, mais aussi aux villes d’alenviron commença une merveilleuse mutation de mœurs, ne plus ne moins que si c’eût été quelque douce haleine d’un vent salubre et gracieux qui leur eût soufflé du côté de Rome pour les rafraîchir : et se coula tout doucement ès cœurs des hommes un désir de vivre en paix, de labourer la terre, d’élever des enfants en repos et tranquillité, et de servir et honorer les dieux : de manière que par toute l’Italie n’y avoit que fêtes, jeux, sacrifices et banquets.

1098. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

Les ancêtres du maréchal avaient servi sous le Grand Condé, et son trisaïeul avait été placé par le prince dans la charge de prévôt des bailliages du nord de la Bourgogne. […] Veut-on savoir, par exemple, comment il apprécie tout d’abord le politique en Bonaparte, lorsque, lié au siège de Toulon et depuis avec les révolutionnaires ardents, Robespierre jeune et autres, plus terribles pourtant de nom que de fait, le futur César les domine déjà et songe à se servir d’eux pour les chances possibles : Éloigné par caractère de tous les excès, dit Marmont de Bonaparte, il avait pris les couleurs de la Révolution, sans aucun goût, mais uniquement par calcul et par ambition. […] En prenant ce commandement des mains de Masséna, il ne se fait aucune illusion sur les difficultés de la tâche et sur la nature des moyens ; après quelques considérations sur le pays, théâtre de la guerre, il en vient au moral et au matériel des troupes : De la misère, dit-il, de l’indiscipline, du mépris de l’autorité, un mécontentement universel, et un désir immodéré de rentrer en France de la part des généraux ; une artillerie détruite en entier, et point de munitions ; une cavalerie réduite à peu de chose, et ce peu dans le plus mauvais état ; l’infanterie diminuée de près de la moitié : tel était tout à la fois le pays dans lequel je devais agir, et l’instrument dont il m’était donné de me servir.

1099. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — I. » pp. 41-62

Le peu de notes qu’on a publiées de lui, et où il fait son portrait, ont donné à sa physionomie une vie et un naturel qui est mieux que de la majesté : « Plutarque me charme toujours, disait-il ; il y a des circonstances attachées aux personnes qui font grand plaisir. » Né le 18 janvier ‌1689, au château de La Brède, près de Bordeaux, il sortait d’une famille de robe et d’épée, de bonne noblesse de Guyenne : « Quoique mon nom ne soit ni bon ni mauvais, disait-il, n’ayant guère que deux cent cinquante ans de noblesse prouvée, cependant j’y suis attaché. » Son père, qui avait servi, après s’être retiré de bonne heure, soigna fort son éducation ; le jeune Montesquieu fut destiné à la magistrature. […] Mais, dans le même temps où il travaillait à ce petit mémoire sur des objets d’histoire naturelle, il laissait échapper un autre ouvrage pour lequel il n’avait pas eu besoin de microscope, et où son coup d’œil propre l’avait naturellement servi. […] Toutes les questions à l’ordre du jour sous la Régence sont abordées dans les Lettres persanes, la dispute des anciens et des modernes, la révocation de l’édit de Nantes et ses effets, la querelle de la bulle Unigenitus, etc. ; l’auteur y sert l’esprit du jour, en y mêlant et y enfonçant ses vues ; le règne de Louis XIV y est vivement attaqué à revers.

1100. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

De ce que Romulus prit, dit-on, le bouclier des Sabins, qui était large, au lieu du petit bouclier argien dont il s’était servi jusqu’alors, Montesquieu en conclut déjà à un certain usage et à une certaine politique des Romains, qui consistait à emprunter successivement des vaincus ce que ceux-ci avaient de meilleur. […] Il dira encore : « Rien ne servit mieux Rome que le respect qu’elle imprima à la terre. […] Il arrive souvent qu’il cite inexactement et pour l’effet, comme Chateaubriand le fera plus tard : cela arrive aux hommes d’imagination qui se servent de l’érudition sans pouvoir s’y assujettir ni la maîtriser.

1101. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

Quand il le sait malade et qu’il le voit comme prêt à s’évanouir dans sa pure essence, il s’écrie : La seule pensée de votre mort me sert d’argument pour prouver l’immortalité de l’âme ; car serait-il possible que cet être qui vous meut et qui agit avec autant de clarté, de netteté et d’intelligence en vous, que cet être, dis-je, si différent de la matière et du corps, cette belle âme douée de tant de vertus solides et d’agréments, cette noble partie de vous-même qui fait les délices de notre société, ne fût pas immortelle ? […] Que me servira votre âme immortelle après votre mort ? […] Voilà pourquoi, Sire, je me fais un devoir et m’empresse à vous écrire encore une fois, afin de vous recommander ma pauvre famille… Suivent les recommandations du plus tendre père en faveur de ses quatre enfants et de sa sœur qui leur sert de mère ; après quoi il poursuit : Il me suffit sans doute, Sire, de vous avoir témoigné ces derniers souhaits d’un cœur paternel pour pouvoir espérer avec confiance qu’ils seront exaucés.

1102. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Jeune, il connut le général en chef de l’armée d’Italie ; il fut dans sa confiance et dans sa familiarité ; il le servit dans quelques missions transitoires qu’il n’eût tenu qu’à lui de pousser plus loin. […] mais je ne trouve pas que ce mot un garçon d’esprit soit de bon goût appliqué à un prince qu’on a aspiré à servir, même lorsque plus tard il vous aurait exilé. […] Arnault et qui servais alors sous des drapeaux littéraires tout différents, j’ai pu me convaincre de la réalité de l’éloge en ce qui touche le caractère.

1103. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre quatrième. L’expression de la vie individuelle et sociale dans l’art. »

Hugo, et le mot a toujours servi, de là l’impossibilité d’exprimer l’émotion. » Eh bien non, et c’est là ce qu’il y a de désolant pour le poète, l’émotion la plus personnelle n’est pas si neuve ; au moins a-t-elle un fond éternel ; notre cœur même a déjà servi à la nature, comme son soleil, ses arbres, ses eaux et ses parfums ; les amours de nos vierges ont trois cent mille ans, et la plus grande jeunesse que nous puissions espérer pour nous ou pour nos fils est semblable à celle du matin, à celle de la joyeuse aurore, dont le sourire est encadré dans le cercle sombre de la nuit : nuit et mort, ce sont les deux ressources de la nature pour se rajeunir à jamais. […] L’intelligence peut seule exprimer dans une œuvre extérieure le suc de la vie, faire servir notre passage ici-bas à quelque chose, nous assigner une fonction, un rôle, une œuvre très minime dont le résultat a pourtant chance de survivre à l’instant qui passe.

1104. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse esthétique »

Que l’artiste use d’éléments choisis dans le réel et agissant par leur vérité, ou d’éléments empruntés de même, mais de valeur émotionnelle accrue, parfaits, et agissant par leur caractère d’idéal, — qu’il se serve de faits minutieusement décrits comme dans tout l’art prosaïque et réaliste, ou de mots et par conséquent de types vagues, comme dans tout l’art poétique et idéaliste, puisés à ces deux sources, ses œuvres tenteront également d’émouvoir et d’émouvoir stérilement. […] L’œuvre d’art étant extrêmement relative, c’est-à-dire produisant des effets très différents en degré sur des personnes différentes, il ne servirait à rien de mesurer par un artifice, l’excitation diffuse qu’elle produirait sur une personne donnée. […] De la sorte ; des œuvres de critique littéraire, portant elles-mêmes sur des œuvres de critiques antérieurs, servent, sans absurdité, de sujet à des analyses.

1105. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre I. Shakespeare — Sa vie »

Pas de carrefour où l’on ne bâtonnât quelque pick-pocket avec le drotschbloch, qui sert encore aujourd’hui en Groningue à battre le blé. […] Le comte de Shaftesbury, ami de Locke, était l’homme qui écrivait un Essai sur l’enjouement dans les conversations importantes, et qui, à la manière dont le chancelier Hyde servait une aile de poulet à sa fille, devinait qu’elle était secrètement mariée au duc d’York. […] Beaucoup de bruit pour rien servit également de canevas deux fois : à Davenant, en 16/3 ; à James Miller, en 1737.

1106. (1868) Curiosités esthétiques « VI. De l’essence du rire » pp. 359-387

Qu’on me permette une supposition poétique qui me servira à vérifier la justesse de ces assertions, que beaucoup de personnes trouveront sans doute entachées de l’a priori du mysticisme. […] Du reste, elle ne comprend guère ni ce que cela veut dire ni à quoi cela sert. […] Bien des spectacles qui excitent en nous le rire sont fort innocents, et non-seulement les amusements de l’enfance, mais encore bien des choses qui servent au divertissement des artistes, n’ont rien à démêler avec l’esprit de Satan.

1107. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — I » pp. 219-230

Il en est de ces mets de l’intelligence comme de ceux du corps : il vient un moment où même les plus excellents, à force de reparaître et de nous être servis sous toutes les formes, lassent le goût ; il n’était pas jusqu’à Beuchot, l’éditeur passionné de Voltaire, qui, sur la fin, lorsqu’on lui apportait des lettres nouvelles de son auteur favori, ne criât grâce et ne répondit : « Assez, j’en ai assez !  […] Ne négligeons rien, poussons le scélérat par tous les bouts…. ; Quelle personne pourrait servir auprès du curé de Nicolas-des-Champs qui est l’ami de M. 

1108. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers »

Ces heures du matin étaient nécessaires pour rassembler nos troupes, pour les amener de bien des points sur le terrain prévu, pour y laisser déboucher les Prussiens eux-mêmes, dont l’ardeur servait nos desseins. […] Pour lui, prenant en fin de compte un demi-parti, il se contenta d’envoyer dans la direction de Bry une seule de ses divisions (Durutte), qui, dès lors, n’atteignit le but qu’en tâtonnant et sans servir à autre chose, la journée finie, qu’à précipiter la retraite des Prussiens ; et lui-même il arriva à Frasnes sur les derrières de Ney, trop tard, et quand il n’y avait plus à agir.

1109. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — II. Sur la traduction de Lucrèce, par M. de Pongerville »

Par une analyse sophistique et subtile, assez semblable à celle que l’abbé de Condillac appliqua depuis à la sensation, ou Helvétius à l’amour physique, Lucrèce faisait dériver de cette crainte de la mort l’ambition, l’avarice, l’envie, les haines fraternelles, les proscriptions sanglantes, les suicides ; il pensait donc servir la patrie en guérissant les Romains de cette terreur chimérique, et en prouvant que la mort ne menait à rien ; de là ces arides théories d’athéisme et de néant, toujours entremêlées de conseils probes, de consolations mornes et sévères. […] « Fidèle à la détestable méthode de collège, M. de Pongerville a tellement en aversion tous les mots qui servent de lien logique au langage, il les supprime si constamment, de peur de tomber en prosaïsme, que, pour peu que le raisonnement se prolonge, ce qui est très ordinaire chez Lucrèce, il devient impossible d’en suivre l’enchaînement chez son traducteur.

1110. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Feuilles d'automne, (1831) »

On entrevoyait à peine ce que deviendrait chez le poëte cette inspiration personnelle élevée à la suprême poésie, en lisant la pièce intitulée Promenade, qui est contemporaine des Ballades, et la Pluie d’été, qui est contemporaine des Orientales ; le sentiment en effet, dans ces deux morceaux, est trop léger pour qu’on en juge, et il ne sert que de prétexte à la couleur. […] Exquis pour les gens du métier, original et essentiel entre les autres productions de l’auteur, qu’il doit servir à expliquer, le recueil des Feuilles d’Automne est aussi en parfaite harmonie avec ce siècle de rénovation confuse.

1111. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Victor Vousin. Cours de l’histoire de la philosophie moderne, 5 vol. ix-18. »

Aussi, malgré les premiers étonnements et les hauts cris que soulève toute idée nouvelle, l’éclectisme, servi par la belle parole et l’infatigable activité de son promoteur, a fait fortune avec les années, et son nom est devenu celui même de l’école philosophique moderne. […] La tâche de l’ami de la vérité est de rechercher les débris utiles qui en subsistent et peuvent servir à de nouvelles et plus solides constructions. » Après avoir essayé cette méthode, un peu timidement encore, sur les principaux successeurs de Descartes, M. 

1112. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil. — I »

La première constitution fédérale, décrétée en 1778 dans la troisième année de l’Indépendance, subsista sans inconvénient tant que dura la guerre ; l’esprit des peuples, excité par le danger et réuni dans un intérêt commun, servait de supplément à l’acte fédéral et les portait spontanément aux efforts les plus énergiques ; mais la guerre une fois terminée et chacun réinstallé dans ses foyers, on accorda moins d’attention aux demandes du Congrès. […] Que ceci nous serve d’exemple à nous-mêmes : déjà nous avons éprouvé par un rude démenti que la négation de la légitimité ne rend pas toute autre monarchie excellente.

1113. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XV. De l’imagination des Anglais dans leurs poésies et leurs romans » pp. 307-323

Les passions sans combat, les dénouements sans gradations, les sacrifices sans regrets, les liens sans délicatesse, ôtent aux romans tout leur charme ; et le petit nombre de ceux de ce genre que nous possédons en français, ont à peine eu quelque succès dans les sociétés qui leur avaient servi de modèle. […] L’attention sert en toutes choses aux Anglais, soit pour peindre ce qu’ils voient, soit pour découvrir ce qu’ils cherchent.

1114. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre II. Définition. — Énumération. — Description »

Car, pour ne rien exagérer, je ne prends de ces états que ce qui sert à en fomenter les dérèglements, tes excès, les crimes, et cela me suffit pour y trouver du superflu. […] On peut s’en servir comme moyen d’inspiration, mais rarement comme forme de développement.

1115. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

Et l’homme et la femme savent, de naissance, que dans le mal se trouve toute volupté. » — « Je comprends qu’on déserte une cause pour savoir ce qu’on éprouvera à en servir une autre. » — « Etre un homme utile m’a toujours paru quelque chose de bien hideux », etc… Et son catholicisme ! […] Crépet a bien raison de dire dans sa Préface : « J’ai la conviction que ces documents ne peuvent que servir la mémoire de Baudelaire, en la dégageant, sous certains aspects, des ombres qui la couvraient. » On constatera, en feuilletant le volume, que Baudelaire fut un bon fils.

1116. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre V. Le théâtre des Gelosi (suite) » pp. 81-102

Infortunée, pourquoi perdre plus de temps à servir ce cruel ? […] Refusée, chassée, fuie, honnie, je sers celui qui me repousse, j’aime celui qui me hait.

1117. (1888) Demain : questions d’esthétique pp. 5-30

Cette époque fut, chez nous, celle de la floraison de la raison pure et il est assez facile de la reconnaître sous sa livrée chrétienne, cette raison qui ne s’était pas abdiquée, bien qu’elle prît gloire à servir la messe. […] Or, si elle n’aboutissait à la synthèse, à quoi servirait l’analyse ?

1118. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Bossuet, dans quelques lignes sur la mort de Bouhours, relève « certaines expressions affectées et de mode, dont il s’est servi dans sa traduction de l’Évangile, et les déclare indignes, non seulement de l’Évangile, mais encore de tout ouvrage sérieux. » C’est la seule oraison funèbre que Bouhours obtienne de son ami. […] Au peu d’esprit que le bonhomme avait L’esprit d’autrui par supplément servait.

1119. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VII. Développement des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

On crut que pendant le temps qu’il passa dans cet affreux pays, il avait traversé de terribles épreuves, que Satan l’avait effrayé de ses illusions ou bercé de séduisantes promesses, qu’ensuite les anges pour le récompenser de sa victoire étaient venus le servir 337. […] Peut-être craignait-il aussi d’être enveloppé dans les sévérités qu’on déployait à l’égard de Jean, et ne voulait-il pas s’exposer, en un temps où, vu le peu de célébrité qu’il avait, sa mort ne pouvait servir en rien au progrès de ses idées.

1120. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre III : Théorie psychologique de la matière et de l’esprit. »

Je vais des signes aux sentiments qu’ils traduisent ; ma propre expérience sert de base à mon induction. […] On pouvait admettre à la rigueur que le monde extérieur est une collection de phénomènes sans substratum ; car il reste encore un esprit qui en fait la synthèse et qui lui sert de support.

1121. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre troisième. De la sympathie et de la sociabilité dans la critique. »

Tout le travail préparatoire entrepris par la critique historique n’aura servi qu’à déterminer ce point de vue, à nous faire connaître les types vivants conçus par l’auteur en analogie avec sa propre vie et sa propre nature : nous verrons alors jusqu’à quel point il a réalisé ces types, ou, pour mieux dire, s’est réalisé lui-même, s’est objectivé et comme cristallisé dans son œuvre, sous les aspects multiples de son être. […] La première de toutes, c’est la puissance de sympathie et de sociabilité, qui, poussée plus loin encore et servie par des facultés créatrices, constituerait le génie même.

1122. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — M. de Voltaire, et M. de Maupertuis. » pp. 73-93

Il se contentera de cette supériorité, & ne voudra pas se servir de celle que lui donne sa place, pour accabler un étranger qui l’a enseigné quelquefois, qui l’a chéri & respecté toujours. » Maupertuis passa pour être l’artisan de toute cette indignité, & pour en avoir ourdi la trame à Francfort, quelque tems avant que de venir en France. […] La persécution, au contraire, servit son ennemi.

1123. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VII. Le langage et le cerveau »

Trousseau essaye d’expliquer ce fait en disant que ce malade a conservé la mémoire de l’acte et qu’il a perdu celle du signe ; mais l’acte lui-même est un signe, et ce malade ne l’emploie pas au hasard, il s’en sert parfaitement et correctement pour exprimer sa pensée, ce qui est le caractère essentiel du signe. […] Quelque intéressants que soient par eux-mêmes les faits que nous venons de rapporter, il est difficile d’en tirer une théorie générale, et c’est assez arbitrairement qu’on désigne des phénomènes si différents sous le nom général d’aphasie, à moins qu’on ne convienne que c’est là une étiquette purement arbitraire, qui sert à dénommer tous les troubles, de quelque nature qu’ils soient, qui peuvent affecter les rapports du langage et de la pensée.

1124. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VIII. Des romans. » pp. 244-264

Nous avons encore du même auteur la Baronne de Luz, Acajou & les Mémoires pour servir aux mœurs du XVIIIme. siécle. […] Tous les traits de ses tableaux servent à faire connoître les hommes & à développer les replis du cœur humain.

1125. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 2, de la musique rithmique » pp. 20-41

Mais nos artisans ont cru qu’il falloit à quelque prix que ce fut, prescrire une methode qui reglât la mesure du geste, qui déplaît également, soit qu’il soit trop lent, soit qu’il soit trop précipité, et le principe qu’ils ont établi est ce qu’ils ont pu imaginer de mieux. " j’ai traduit le mot d’ artifices dont se sert ici Quintilien par ceux qui font profession de composer la déclamation des pieces de théatre, et de les faire representer sur la scene, fondé sur deux raisons. […] Le rithme laisse cette liberté au gesticulateur, qui se contente lorsqu’il s’en sert, de compter les temps qu’il laisse vuides, pour ainsi dire, et qu’il marque même quelquefois pour les compter plus sûrement, tantôt par un mouvement de doigt, tantôt par un mouvement de pied, laissant passer ainsi quatre ou cinq tems sans faire aucun mouvement.

1126. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VI. Du trouble des esprits au sujet du sentiment religieux » pp. 143-159

Le seul avantage que conservèrent les religions anciennes, ce fut de perpétuer le sentiment religieux chez les peuples qui leur furent soumis ; car, comme nous l’avons déjà remarqué, l’erreur même sert quelquefois à conserver la vérité ; et c’est le sentiment religieux, toujours si respecté par les philosophes anciens, que les philosophes modernes ont tenté d’ébranler, parce qu’ils parce qu’ils toujours, comme nous venons de le dire, de retomber tout vivants dans le christianisme. […] Le christianisme, en outre, a mis dans le monde des idées morales qui ne peuvent plus en être exclues, qui sont la sauvegarde de la civilisation, et qui, par conséquent, serviraient encore à le conserver, indépendamment même de son origine divine, et du fait de la révélation.

1127. (1818) Essai sur les institutions sociales « Addition au chapitre X de l’Essai sur les Institutions sociales » pp. 364-381

Je me servirai de ses propres expressions ; seulement je les condenserai un peu, pour qu’elles tiennent moins de place. […] Par une transformation opérée en vertu des lois merveilleuses de l’analogie, l’on s’est servi de ces mêmes sons vocaux pour représenter soit nos perceptions intellectuelles, soit les rapports intellectuels, les volontés, les actes de l’esprit, que faisaient naître nos sensations et nos besoins.

1128. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XV. Mme la Mise de Blocqueville »

, doivent servir à mettre au jour nos brumes intérieures… » Drôle de fonction pour l’amitié, mais qui peut devenir dangereuse ; car, dans le livre que voici, on ne voit plus goutte en tous ces brouillards qui sortent d’elle et auxquels ses amis, ses pauvres chers amis, servent, si commodément et avec tant d’abnégation, de soupape !

1129. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les civilisations »

Après quelques affirmations empruntées à des sciences d’hier, pédantesques dans leur langage comme tout ce qui ne sait pas encore grand’chose, l’auteur des Études retombe à des récits qu’il nous sert en tranches et qu’il nous coupe dans des historiens peu connus, ou d’autorité contestable, qu’il ne critique pas, dont il ne discute pas la valeur, et qu’il suit, comme le chien suit son maître. […] Aussi, pour prendre exactement la mesure d’une civilisation dans l’histoire, il n’est besoin que de se servir comme mesure de la civilisation chrétienne… Et c’est, malheureusement pour lui et pour nous, ce que l’auteur des Études sur les civilisations n’a pas fait.

1130. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Odysse Barot »

Les grands esprits que je viens de nommer ne sont à ses yeux que les pierres d’attente d’une littérature plus grande que la leur, parce qu’elle sera plus pratique et plus politique, et qu’elle servira davantage à l’émancipation définitive de l’humanité. […] Mais ils disent : À quoi cela sert-il ?

1131. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Grèce antique »

À quoi lui servirent et sa pénétration inouïe de la destinée des peuples, et sa toute-puissante analyse du mécanisme des constitutions ? […] Il ne se sert pas de l’histoire pour faire la guerre, au profit d’une théorie, avec elle.

1132. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIII. M. Nicolardot. Ménage et Finances de Voltaire » pp. 297-310

Il vous serait bien aisé d’alléguer un nombre de faits très intéressants qui serviraient de preuves. […] Ces messieurs sont servis !

1133. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. H. Wallon » pp. 51-66

Il aurait peut-être été obligé de se servir à chaque minute de son épée de Taillebourg, pour faire (comme il disait) sa bonne et ronde justice, et pour dompter définitivement ces barons, qui se souvenaient toujours trop qu’ils avaient été indomptables. […] Mais que Frédéric II, l’abominable Frédéric II, l’auteur des Trois imposteurs, le sarrasin, le sorcier, l’âme damnée, qui pouvait tout par la force et qui s’en servit si souvent avec une atrocité diabolique, invoquât à son tour la justice de Saint Louis, il y avait là, dans ce fait, quelque chose qui dépassait évidemment la puissance de la simple Royauté.

1134. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. le vicomte de Meaux » pp. 117-133

Le fragment historique qui sert de préface au livre de M. de Meaux montre que l’Église, représentée par ses ennemis comme le plus incompatible et le plus impitoyable des Pouvoirs, fut, au contraire, magnifique de bonté jusque dans sa manière de punir. […] Mais il avait, plus tard, condamné cette opinion, comme tous les évêques d’Afrique, qui la repoussèrent et qui reconnurent avec lui que tous les princes chrétiens doivent servir par leurs lois Jésus-Christ et punir qui le combat ou qui l’abandonne.

1135. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Th. Ribot. La Philosophie de Schopenhauer » pp. 281-296

Et c’est ainsi que, pour la place de Schopenhauer dans la mémoire des hommes, il lui aura certainement plus servi d’avoir lu Chamfort que d’avoir médité sur Kant. […] Ribot, agrégé de philosophie et docteur ès lettres, la métaphysique, qui n’aboutit jamais qu’à du matérialisme ou de l’idéalisme athée, ou à un scepticisme pire encore, est une science orgueilleuse dont on démontre le néant par la force de ses philosophes… Ils servent à cela.

1136. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Christophe »

Dieu l’eût sans doute sauvée pour la justification de ses promesses ; mais la gloire des grands hommes est de se servir de leur liberté et de leur intelligence de manière à économiser l’action directe de Dieu sur la terre et à lui ménager l’effet des grands coups de sa providence. […] Cette plume est grave, orthodoxe, renseignée, pleine de droiture, très au courant des obligations de l’histoire et de l’historien, que celui qui s’en sert a exposées avec netteté dans une introduction fort bien faite, mais où il a un peu trop insisté peut-être sur les critiques dont son premier livre a été l’objet.

1137. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Gratry »

Eh bien, nous l’y trouvons, superbe, puissant, et tel que désormais la philosophie spiritualiste en tiendra compte et mettra son honneur à se servir de la méthode qu’il nous révèle. […] Sa distinction si saisissante des attributs de Dieu en attributs métaphysiques et moraux correspondant au dogme de la Sainte-Trinité appartient, il est vrai, à saint Thomas d’Aquin, l’Aristote catholique, mais c’est qu’il n’est guère possible de ne pas se servir de la bêche laissée par ce grand homme, quand on veut défricher dans la pensée humaine et aller un peu plus loin que lui.

1138. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Agrippa d’Aubigné »

Henri IV, que, dans son histoire, il diminue pour rester vrai, l’aimait au point de vouloir le faire servir à ses vices et employer à ses amours, sachant que les femmes qui résistaient au roi ne résisteraient pas au poète, et qu’il les lui prendrait comme les forteresses… Mais il était trop fier faucon pour de telles chasses, et il resta ce que le pur et délicieux Joinville lui-même serait resté, si, par impossible, Saint Louis eût été Henri IV ! […] III Mais, il faut bien le dire aux éditeurs des Œuvres complètes, si c’est l’enthousiasme pour l’auteur des Tragiques qui les a poussés à publier cette masse de poésies inédites, leur publication servira plus à l’Histoire et à la Critique littéraires qu’à l’homme dont ils auront voulu augmenter la renommée et fixer incommutablement la gloire.

1139. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVI. Des éloges académiques ; des éloges des savants, par M. de Fontenelle, et de quelques autres. »

Tous les objets dont on s’y occupe sont grands, et en même temps sont utiles ; c’est l’empire des connaissances humaines ; c’est là que vous voyez paraître tour à tour la géométrie qui analyse les grandeurs, et ouvre à la physique les portes de la nature ; l’algèbre, espèce de langue qui représente, par un signe, une suite innombrable de pensées, espèce de guide, qui marche un bandeau sur les yeux, et qui, à travers les nuages, poursuit et atteint ce qu’il ne connaît pas ; l’astronomie, qui mesure le soleil, compte les mondes, et de cent soixante-cinq millions de lieues, tire des lignes de communication avec l’homme ; la géographie, qui connaît la terre par les cieux ; la navigation, qui demande sa route aux satellites de Jupiter, et que ces astres guident en s’éclipsant ; la manœuvre, qui, par le calcul des résistances et des forces, apprend à marcher sur les mers ; la science des eaux, qui mesure, sépare, unit, fait voyager, fait monter, fait descendre les fleuves, et les travaille, pour ainsi dire, de la main de l’homme ; le génie qui sert dans les combats ; la mécanique qui multiplie les forces par le mouvement, et les arts par l’industrie, et sous des mains stupides crée des prodiges ; l’optique qui donne à l’homme un nouveau sens, comme la mécanique lui donne de nouveaux bras ; enfin les sciences qui s’occupent uniquement de notre conservation ; l’anatomie par l’étude des corps organisés et sensibles ; la botanique par celle des végétaux ; la chimie par la décomposition des liqueurs, des minéraux et des plantes ; et la science, aussi dangereuse que sublime, qui naît des trois ensemble, et qui applique leurs lumières réunies aux maux physiques qui nous désolent. […] Vous y voyez l’homme dans les cieux, sur les mers, dans les profondeurs des mines ; l’homme bâtissant des palais, perçant des montagnes, creusant des canaux, et faisant servir tous les êtres à ses besoins, à sa défense, à ses plaisirs, à ses lumières.

1140. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

D’ordinaire, les écrivains se servent du doute pour détruire ce qui existe, afin d’y substituer leur opinion. […] Un de leurs principaux mérites, qui augmente surtout leur intérêt, c’est qu’elles servent à faire connaître les sentiments et les pensées du poète. […] Ainsi Voltaire ne servait pas encore de modèle. […] Son habileté n’a servi qu’à faire voir encore mieux combien l’essence de la nature morale est étrangère aux lois qui peuvent régir la matière. […] Pour pouvoir les risquer, pour ne pas nuire à la cause qu’ils voulaient servir, que de concessions dans le langage !

1141. (1896) Les époques du théâtre français (1636-1850) (2e éd.)

Pareillement encore, Mesdames et Messieurs, que font ici, de quoi servent l’amour d’Hippolyte et le personnage d’Aricie ? […] Molière ne les a, comme vous le savez, qu’esquissés l’un et l’autre, et par bonheur, ils n’ont encore presque pas servi. […] Ai-je besoin d’ajouter, qu’avec le même esprit de justice, tout ce qui pouvait lui servir à peindre la corruption régnante, Le Sage le leur a partagé ? […] Puisque je te pardonne, Que servent les regrets où ton cœur s’abandonne ? […] Je rompis mon épée pour m’en servir à creuser, mais j’en tirai moins de secours que de mes mains.

1142. (1875) Premiers lundis. Tome III « M. Buloz et le Messager de Paris. »

Plus le régime de la presse est libre et ouvre un vaste champ à toutes les haines, à toutes les injures, et plus il est du devoir de tous ceux qui veulent s’en servir à bonne et longue fin, d’apporter envers les adversaires, et ne serait-ce que par égard pour soi-même, une certaine modération de ton dont rien ne saurait dispenser.

1143. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Breton, Jules (1827-1906) »

On ressent, à le feuilleter, une impression complexe, et il y a certaines de ses pièces formant si bien tableau, qu’on s’arrête pour laisser passer l’image ; il faut lire les Glaneuses, les Deux Croix et le poème du Pardon : un long défilé de costumes bretons, de mendiants bariolés, de bannières flottant comme des petites voiles sur cet horizon de mer qui sert de fond à toutes les fêtes bretonnes, apparaît écumant ou calme, uni ou blanchissant, entre les menhirs gigantesques, les vieilles églises romanes, comme la poésie éternelle et l’éternelle menace de la nature.

1144. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Popelin, Claudius (1825-1892) »

Si sa science s’étend aux langues anciennes, il est mieux armé encore, car il a rendu esclaves un plus grand nombre de mots, et, qu’il s’en serve ou pas, ils demeurent serfs et enrichissent le domaine du poète.

1145. (1894) Propos de littérature « Appendice » pp. 141-143

Pour chacun de ces chapitres, — où elles m’ont servi d’exemple, — les œuvres de M. de Régnier s’inscrivent d’elles-mêmes dans la colonne de droite, celles de M. 

1146. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 245-247

Les Mémoires pour servir à l’Histoire de Madame de Maintenon ont plus réussi à le rendre célebre, que les injures de M. de Voltaire à le rendre odieux.

1147. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 302-304

Un vieux Prêtre énergumene, déclamant contre sa Religion, & renversant, par frénésie, des Autels qu’il avoit servis toute sa vie ; de longues tirades contre tous les Cultes ; de fréquentes oraisons à la Divinité ; des personnages tous Déïstes, venant, chacun à leur tour, exhaler leur dépit contre le Sacerdoce & la Religion ; des allusions prétendues ingénieuses, & qui n’ont décélé que de l’audace ou des puérilités ; toutes ces heureuses combinaisons ont été crues propres à répandre dans les esprits ce que le Monde philosophique appelle des lumieres.

1148. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 400-402

Les efforts qu’on a faits pour imiter ses Caracteres, n’ont servi qu’à prouver combien ils sont inimitables.

1149. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 55-57

Affranchis-toi, romps tes liens, Quelque légers qu’ils puissent estre, Viens, Ménage, en ce lieu champestre, Où, content de tes propres biens, Tu n’auras que toi pour ton Maistre Non que le Maistre que tu sers Ne soit un homme incomparable, Qu’il n’ait un mérite adorable, Et que la douceur de tes fers Ne soit charmante & désirable.

1150. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 167-169

Tout son art consiste à altérer les bonnes choses qu’on avoit dites avant elle ; semblables aux Harpies qui vivoient de rapines, & infectoient, en y touchant, les mets servis sur la table des Sages & des Héros.

1151. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 502-504

Petis a plus servi à étendre l’honneur du nom François, c’est par une Histoire de Louis XIV, écrite en Arabe, & par la Traduction en Langue Persane, de l’Histoire de ce même Prince par les Médailles.

1152. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 260-261

Ce Poëte a de plus le mérite très-estimable d'avoir dédaigné dans ses Ouvrages le vernis philosophique, & de s'être élevé contre les Philosophes, dont les « Ouvrages, dit-il, ne peuvent servir que de trophée à l'extravagance humaine.

1153. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Roslin  » pp. 149-150

Mais pour Dieu, dites-moi un peu comment il se fait que ce griffonnage peut vous servir aujourd’hui, et vous serait inutile demain.

1154. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Introduction »

Spencer, le problème méthodologique n’occupe aucune place ; car l’Introduction à la science sociale, dont le titre pourrait faire illusion, est consacrée à démontrer les difficultés et la possibilité de la sociologie, non à exposer les procédés dont elle doit se servir.

1155. (1828) Introduction à l’histoire de la philosophie

De même dans l’histoire générale tout se succède, tout se développe, tout sert à l’accomplissement du but de l’histoire. […] L’humanité ne se soumet pas à une force étrangère, mais à celle-là seulement avec laquelle elle sympathise et qui la sert. […] Voilà tout le dévouement que vous pouvez, que vous devez attendre de l’humanité ; elle n’est pas capable et il ne serait pas bon qu’elle fût capable d’aucun autre ; elle sert qui la sert. […] L’Église ne considère les individus qu’autant qu’ils l’ont ou servie ou contrariée. […] L’Allemagne n’a pas seule servi la philosophie ancienne.

1156. (1892) Sur Goethe : études critiques de littérature allemande

L’Alsace était jadis une province qui servait en quelque sorte de trait d’union entre l’Allemagne et la France. […] Werther en a été le héros principal, celui du moins qui a servi de modèle à tous les autres. […] Elle ne nous inspire pas seulement de servir nos semblables ; ce qui n’est peut-être pas moins rare, elle nous aide à les supporter. […] Ce juge, lui-même, n’est pas moins qu’un Moïse de village qui sert de guide à son peuple errant et qui raconte son histoire avec une majesté digne de la Bible. […] Mais que sert à Antoine cette victoire !

1157. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

. —  En quoi elle a servi son talent. —  Il est le peintre de la seconde société féodale. […] Pareillement la plupart des poëmes du temps sont dénués de fond ; tout au plus une moralité banale leur sert d’étai ; en somme, le poëte n’a songé qu’à étaler devant nous l’éclat des couleurs et le pêle-mêle des formes. […] Elle promit de servir la Feuille et s’en revint. […] La servitude est si pesante, que, même dans son Testament de l’Amour, parmi les plus touchantes plaintes et les plus cuisantes peines, la belle dame idéale qu’il a toujours servie, la médiatrice céleste qui lui apparaît dans une vision, l’Amour pose des thèses, établit « que la cause d’une cause est cause de la chose causée », et raisonne aussi pédantesquement qu’à Oxford. […] Au fond de chaque œuvre d’art est une idée de la nature et de la vie ; c’est cette idée qui mène le poëte ; soit qu’il le sache, soit qu’il l’ignore, il écrit pour la rendre sensible, et les personnages qu’il façonne comme les événements qu’il arrange ne servent qu’à produire à la lumière la sourde conception créatrice qui les suscite et les unit.

1158. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

Il mourut en 1821, dans ce même appartement qui avait servi d’asile à son retour des pays étrangers. […] Le roman historique est un mensonge, et le plus dangereux de tous, puisque l’histoire ici ne sert que de faux témoin à l’invention ; c’est mentir avec vraisemblance, c’est tromper avec autorité. […] « — Allons, disait-il, dépêchez-vous de servir pendant que Germain, Louis et Étienne vont seller leurs chevaux ; M.  […] Et vous, messieurs les Italiens, avez-vous servi votre jeune princesse ? […] — Que tout travaille et serve dans leur famille. — Ne fais-je pas travailler ma femme, moi ?

1159. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

Deux valets de chambre, dont les gants étaient d’une blancheur irréprochable, nous servaient en silence, mais avec une adresse et une prévenance extrêmes ; ils devinaient nos moindres désirs. […] Il reconnaît dans la meunière malade de la poitrine une certaine Anina, jeune femme, d’une classe et d’une éducation supérieures aux paysans et qui servait à Pétersbourg chez un de ses amis M.  […] — Je continuerai à la servir, comme d’ordinaire. — Allons donc ! […] … elle s’était attachée à Arina, … et Arina, qui la servait, n’a pas eu assez de conscience pour… Ah ! […] Éclat de bois de sapin dont se servent les paysans russes pour éclairer leurs chaumières.

1160. (1903) Articles de la Revue bleue (1903) pp. 175-627

Gabriel Sarrazin, et son admiration pour le génie anglo-saxon l’ont bien servi. […] Ces concepts ont un sens précis : le prosateur les connaît et s’en sert. […] Les religions lui ont dérobé ses formules incantatrices et les ont fait servir à la domination des trônes et des races. […] S’il veut être compris par autrui, il est obligé de se servir de modes d’expression qui sont connus, acceptés, qui ont un sens. […] Dans ses plus beaux moments d’inspiration, quand il était vraiment poète, Bossuet s’en servait d’instinct.

1161. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome II

C’est sur les héros de La Calprenède que nos poètes ont calqué leurs personnages tragiques, et les héros d’Homère ont servi de modèle à ceux de Sophocle et d’Euripide. […] Des critiques superficiels ont blâmé l’artifice dont Mithridate se sert pour arracher les secrets du cœur de Monime : c’est blâmer Racine d’avoir été peintre trop fidèle. […] Son examen des pièces de Corneille n’est qu’une satire qui sert de pendant au commentaire de Voltaire, ou plutôt qui n’en est que la paraphrase. […] Y a-t-il rien de plus intéressant et de plus tragique que la situation du superbe Aman, forcé de servir au triomphe de Mardochée dont il prépare le supplice ? […] La plus spécieuse objection contre Athalie, c’est l’équivoque et la ruse dont se sert le grand-prêtre pour attirer Athalie dans le temple.

1162. (1856) Articles du Figaro (1855-1856) pp. 2-6

Buloz qui servit de gémonies. […] L’horreur du commun, — qui est assurément en soi une noble chose, — a bien mal servi et conseillé MM. de Goncourt. […] La Révolution portait virtuellement en elle une grande et forte littérature, mais la gestation devait être longue, et le dix-neuvième siècle était marqué pour lui servir d’accoucheur. […] Pichat, c’est l’homme qui rayonne sur le paysage ; la nature lui sert de cadre. […] Aurélien Scholl avait tenu à se servir de cette arme.

1163. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LIII » pp. 206-208

Ceux qui insèrent de telles fadaises s’en moquent sans doute, mais ils croient qu’il faut servir au public ce qu’il demande.

1164. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXI » pp. 220-221

Plaire au roi, servir ses propres amis, assurer un libre essor à leurs talents et au sien, plaire à Montausier même, furent trois succès que Molière me paraît s’être promis d’allier, en faisant le bel ouvrage dont nous parlons ; et j’aime à penser qu’il se proposa une alliance si difficile, parce que l’accomplissement de ce dessein ajoutait le mérite de la difficulté vaincue au mérite du talent le plus élevé.

1165. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 377-379

Un autre défaut qu’on peut lui reprocher, est trop de timidité dans le récit, & trop peu de cette abondance historique, si nous pouvons nous servir de ce terme, qui facilité la marche de l’Historien & lui donne de la rapidité.

1166. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 412-415

C’est dans ces morceaux que le Traducteur, si on peut se servir de ce terme, déploie les richesses de notre Poésie, & fait de vrais Originaux de ses imitations.

1167. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 441-443

Il eût pu y joindre cette autre-ci, pour lui servir de suite : & la maniere dont un mauvais Auteur se défend contre la critique, ajoute souvent à la preuve de la médiocrité de son esprit, celle de la petitesse & de la perversité de son ame.

1168. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XIV. Des Livres sur le Commerce & sur ce qui y a rapport. » pp. 329-332

Savari avoit donné un livre semblable : canevas imparfait, qui n’a servi que très-peu au nouveau rédacteur.

1169. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Bachelier  » pp. 147-148

Mais le Laocoon a saisi avec ce bras un des serpents dont il cherche à se débarrasser, et le Milon de Bachelier se laisse bêtement dévorer une jambe par un loup qu’il étranglerait avec sa main libre, s’il songeait à s’en servir.

1170. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Préface »

Bien qu’il se garde de prétendre à une nomenclature rigoureusement complète et amplement savante, cet opuscule pourra du moins servir à guider l’esprit hésitant du lecteur novice.

1171. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

Avoir tout vu de la vie, en savoir tous les courants et tous les écueils, s’y être brisé, puis s’en être relevé, connaître les hommes par leurs passions et savoir s’en servir, avoir appris à ses dépens à toucher en eux les cordes qui résistent et celles qui répondent, avoir conservé au milieu de toutes ses traverses, et jusque dans les désastres où l’on est tombé par sa faute, son sang-froid, sa gaieté, son entrain, ses ressources d’esprit, sa bonne mine, son courage, son espérance surtout, cette vertu et cette moralité essentielle de l’homme ; quelle préparation meilleure, quand le ressort principal n’a point fléchi, quand le principe d’honneur a gardé toute sa sensibilité ! […] je le sers de bien loin, mais je voudrais le voir grand et puissant ; pour cela, il ne faut pas qu’il soit mené par de petites gens et de petits esprits. » Il allait à l’extrémité de sa pensée ou plutôt de son impression, lorsqu’il écrivait encore (novembre 1840) : « Il faut que le gouvernement soit bien aveugle pour ne pas voir qu’avec la marche qu’il suit, il se perd infailliblement. […] Il y a une mosaïque (car on est, à Orléansville, sur une ancienne ville romaine), une mosaïque admirable, qui servait d’enseigne au tombeau de saint Reparatus : « Je veux, dit-il, dans un sentiment de Génie du christianisme que nous lui retrouverons plus tard, je veux faire bâtir l’église chrétienne au-dessus. […] Tout compte fait, et malgré les chances de guerre en Europe, il aime mieux l’Afrique pour le quart d’heure, bien assuré que, si l’on se bat en Europe, tout le monde en sera : « Ici, je sers mon pays, et je m’éloigne des mauvaises passions. » Le maréchal Bugeaud, rappelé dès ce temps-là à des commandements importants et consulté par le prince président de la République, dut lui donner les premières impressions avantageuses sur Saint-Arnaud comme officier général de grand avenir et comme homme de nerf à employer dans l’occasion : sa mort soudaine arrache à Saint-Arnaud des témoignages bien dus de regret et de profonde douleur. […] ) Ce qui est certain, c’est que cette force morale nouvelle qui lui vint par la religion servit puissamment à le rendre capable des derniers efforts auxquels sa constitution physique semblait par elle-même se refuser.

1172. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

Il avait besoin d’un truchement pour la plupart de ses idées, et je lui en servais. J’y servais aussi mes amis littéraires. […] Et ce ne sont pas seulement des livres, mais des lambeaux de papiers, évidemment ce qu’il trouvait à sa portée et qui lui servait à fixer sur-le-champ un mémorandum, improvisé. […] Chaque marge, chaque feuillet de son Virgile est plein de ses commentaires, où se révèle toute sa sensibilité d’âme et de goût ; et le poète des Pensées d’août, qui a relu un jour les notes d’un père qu’il n’avait point connu et qui s’est servi, après lui, du même exemplaire pour apprendre Virgile, a pu dire : Mon père ainsi sentait. […] Je retrouve des livres classiques qui ont servi à M. 

1173. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

Il a servi de texte ou de commentaire aux premiers conciles chrétiens ; il a été le crépuscule de bien des dogmes ; il a nourri à lui seul la philosophie romaine de Cicéron ; il a lutté dans le moyen âge avec la philosophie expérimentale d’Aristote, puis de Bacon ; il a été submergé un moment par la philosophie presque matérialiste de Locke, de Hobbes en Angleterre ; d’Helvétius, de Diderot, des encyclopédistes en France ; mais il est ressuscité plus vivant et plus populaire que jamais il y a peu d’années, par la traduction, par les commentaires et par les leçons d’un jeune philosophe, M.  […] J’ai aussi des parents cependant ; car, pour me servir de l’expression d’Homère : Je ne suis point né d’un chien ou d’un rocher, mais d’un homme !  […] Mais un mot d’abord sur l’origine antique et mystérieuse des belles et saintes idées que Socrate et Platon vont développer dans ce dialogue ; car rien ne vient de rien, et la philosophie grecque, qui devait bientôt, après Platon, servir d’ancêtre à la philosophie des écoles chrétiennes de Byzance et d’Alexandrie, avait certainement elle-même des ancêtres. […] « Les cygnes, quand ils sentent qu’ils vont mourir, chantent encore mieux ce jour-là qu’ils n’ont jamais fait, dans leur joie d’aller trouver le dieu qu’ils servent. […] Et moi, je pense que je sers Apollon aussi bien qu’eux, que je suis consacré au même dieu ; que je n’ai pas moins reçu qu’eux de notre commun maître l’art de la divination, et que je ne suis pas plus fâché de sortir de cette vie ; c’est pourquoi, à cet égard, vous n’avez qu’à parler tant qu’il vous plaira, et m’interroger aussi longtemps que les onze voudront le permettre. » Il badine ensuite avec une grâce véritablement divine, comme s’il était déjà un homme divinisé, avec ses amis, en jouant avec les beaux cheveux de Phédon, qui était assis à ses pieds, sur un siège plus bas que le lit.

1174. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

Ainsi encore les derniers fragments du Roman de Renart contiennent une critique amère des lois et coutumes existantes, de véritables appels à la révolte ; et pourtant ceux qui les ont composés ont gardé le cadre commode de la fable tel que leurs aînés l’ont façonné ; ils se servent toujours des animaux pour donner des leçons aux hommes ; ils racontent toujours les prouesses de leur héros populaire. […] L’histoire contemporaine a servi de clef pour pénétrer dans l’histoire ancienne, surtout dans celle des républiques antiques ou des communes du moyen âge. […] A quoi serviraient les armes courtoises qui sont émoussées ou les plis embarrassants des circonlocutions académiques ? […] Comme le chiffre ne raisonne pas, comme c’est un merveilleux instrument passif de tyrannie qui ne demande jamais à quoi on l’emploie, qui n’examine nullement si on le fait servir à l’oppression du genre humain ou à sa délivrance, au meurtre de l’esprit ou à son émancipation, le chef militaire de cette époque ne voulait pas d’autre missionnaire, pas d’autre séide, et ce séide le servait bien.

1175. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 mai 1885. »

» pour me servir d’une admirable expression bourgeoise. […] Oui, les plus grands, les plus augustes, les plus puissants de notre race, — en plein siècle de lumières, pour me servir de ta suggestive expression, mon éternel ami, — seront fiers de réaliser, d’après mon désir, le rêve que je forme et que voici : L’heure viendra, d’abord, où les rois, les empereurs victorieux de l’Occident, les princes et les ducs militaires, oublieront, au fort de leurs victoires, les vieux chants de guerre de leurs pays, pour ne célébrer ces mêmes victoires immenses et terribles — (et ceci dans le cri fulgural de toutes les fanfares de leurs armées ! […] Et c’est Haydn, précisément, qui, ainsi qu’on l’a bien observé, servit, entre tous, de modèle pour les premiers travaux de Beethoven. […] — Elle brava le Forceur-des-tempêtes : — quand, le plus dûrement, soi même, il se forçait, — ce que lui, le Maître du combat, — désirait faire, — mais s’interdisait, — se violentant, — elle, pourtant, confiante, — elle osa, la présomptueuse, — l’accomplir pour soi, — Brünnhilde, en le brûlant combat. — Le Père-de-la guerre — a puni la Vierge ; — en son œil il imprima le Sommeil ; — sur un rocher elle dort, fortement ; — elle s’éveillera, — la Consacrée, seulement, — pour aimer un homme, en femme. — La questionner me servirait-il ? […] Noufflard fait son livre d’après les écrits même de Richard Wagner, et, pour en compléter les renseignements, il s’est servi de l’admirable biographie allemande de M. 

1176. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

Ces comparaisons sont fâcheuses, je le sais, mais le livret dont s’est servi M.  […] Les cercles Wagnériens restèrent indépendants les uns des autres ; leur influence n’en fut pas moins grande : ils aidèrent à la diffusion des idées Wagnériennes, et, par l’agitation qu’ils instituèrent, ils contribuèrent, puissamment, à exalter le nom de Richard Wagner, et, suivant ses projets, ils servirent, efficacement, au succès de l’entreprise de Bayreuth. […] Les voix y jouent le rôle d’instruments humains, le texte sert, seulement, à revêtir les morceaux d’un caractère religieux plus défini. […] De même encore, cette représentation consciente de l’Idée du Monde dans le Drame semble être faite au moyen de cette loi intérieure de Musique, qui agit, mais inconsciente, chez le Dramaturge, à la façon de cette loi, d’ailleurs inconsciente, de la Causalité, qui nous sert à l’Aperception du Monde de l’Apparence. […] Il est accompagné d’un appendice : À quoi sert cette connaissance et de deux compléments Connais-toi toi-même et Héroïsme et Christianisme tous les trois publiés en 1881.

1177. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1860 » pp. 303-358

moi, toujours, répond Gautier, c’est l’homme avec lequel on a tapé sur mes admirations… c’est la mâchoire d’âne dont on s’est servi pour assommer Hugo. […] Ces deux jeunes filles toutes blondes, au bleu sourire des yeux, et dont l’une a le type angélique d’une vierge de Memling, se font apporter deux côtelettes de veau… « Elles ont leurs mères », disent-elles, et nous voici dans un gasthaus d’un faubourg de Berlin, ténébreux comme la caverne de Gil Blas, et verrouillé de serrureries et de ferronneries comme un vieux burg, et servis par un garçon considérant ces femmes avec l’air à la fois niais, cocasse et sensuel de Pierrot, regardant, par une fente, l’intérieur d’une école de natation de femmes… Chez la jeune fille au type de Memling, les yeux dans le plaisir, au lieu de se voiler et de mourir, vous regardent comme des yeux de rêve. […] L’État surtout, depuis 1789, a été diantrement absorbant, a joliment entamé au profit de tous, les droits d’un chacun, et je me demande si l’avenir ne nous réserve pas, sous le nom du gouvernement absolu de l’État, servi par le despotisme d’une bureaucratie française, une tyrannie bien autre que celle d’un Louis XIV. […] C’est la différence d’une couronne de roses à un mouchoir de poche : la religion chrétienne sert quand on pleure. […] On tire d’une armoire deux taies d’oreiller, pour nous en servir.

1178. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Quand Poe se sert, pour écrire des canards, de la plume et de l’encrier d’Arago, quand il traîne l’Encyclopédie dans la blague (pardon ! […] S’il avait plus d’imagination, il ne chausserait pas l’appareil de la technologie ; mais il s’en sert pour produire un effet dont il n’est pas dupe, et dans lequel au besoin d’art se mêle la mystification féroce de la race anglo-saxonne dont il descend. […] Que nous servirait de l’étudier sur quelque impuissant ou quelque noué ? […] Doué de la force de cette race de puritains qui se sont abattus d’Angleterre comme une bande de cormorans affamés, ce qu’il prend aux préoccupations contemporaines ne vaut pas la force qu’il déploie pour se servir de ce qu’il a pris ; et ici nous arrivons à ce qui l’emporte, selon nous, dans Edgar Poe, sur les résultats obtenus de sa manière, — c’est-à-dire l’application de son procédé. […] Mais pour le faire, ce drame, pour grossir cet atome en le décomposant, il se sert d’une analyse inouïe et qu’il pousse à la fatigue suprême, à l’aide d’on ne sait quel prodigieux microscope, sur la pulpe même du cerveau.

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