Les Dialogues des Morts ne sont que des assauts de pensées brillantes, où l’Auteur cherche plus à étonner par les Interlocuteurs disparates, qu’à instruire en développant le vrai caractere. […] Il n’a rien inventé, il est vrai, mais il a su se rendre propres les découvertes des autres, en y ajoutant des traits de lumiere qui n’ont pas peu servi à les faire valoir.
Puis, de tout ceci ainsi posé, faire un drame ; pas tout à fait royal, de peur que la possibilité de l’application ne disparût dans la grandeur des proportions ; pas tout à fait bourgeois, de peur que la petitesse des personnages ne nuisît à l’ampleur de l’idée ; mais princier et domestique ; princier, parce qu’il faut que le drame soit grand ; domestique, parce qu’il faut que le drame soit vrai. […] Dresser sur cette pensée, d’après les données spéciales de l’histoire, une aventure tellement simple et vraie, si bien vivante, si bien palpitante, si bien réel, qu’aux yeux de la foule elle pût cacher l’idée elle-même comme la chair cache l’os.
Il n’est donc pas rigoureusement vrai que les divinités poétiques des chrétiens soient privées de toute passion. […] Au reste, il n’est pas tout à fait vrai que les divinités chrétiennes soient ridicules dans les batailles.
Il est vrai que Raphaël et ses contemporains n’étudioient pas la nature seulement dans la nature même. […] Ainsi tant que les hommes découvriront des païs inconnus, et que les observateurs pourront leur en apporter de nouvelles richesses, il sera vrai de dire que la nature considerée dans les portefeüilles des peintres et des sculpteurs, ira toujours en se perfectionnant.
Or il est vrai que tout ce que nous voïons au théatre concourt à nous émouvoir, mais rien n’y fait illusion à nos sens, car tout s’y montre comme imitation. […] Car il n’est pas vrai qu’elle ait crû durant son ravissement voir Rodrigue et Chimene.
Ainsi encore, nous avons noté sur l’intuition tout un passage qui doit renverser de fond en comble, pour les esprits naturellement déducteurs, ce que la philosophie nous donne pour vrai depuis Bacon, et replacer à son vrai rang dans l’ordre des grands faits de la pensée le mysticisme si insolemment dégradé.
Ce n’est plus le trop-plein d’un sentiment vrai, c’est le besoin d’excitation qui les produit. […] C’est le cas du riche ; la vraie preuve, la preuve suffisante qu’il est bon pénitent, bien confessé, bien affligé, bien disposé, c’est qu’il a donné beaucoup. […] Sur quoi Satan baissa sa queue et se tint tranquille… » Ce bel endroit, ajoute le conteur, « est le vrai héritage des moines. » Voilà les rudes bouffonneries de l’imagination populaire. […] Tous ces récits sont liés, et beaucoup mieux que chez Boccace, par de petits incidents vrais, qui naissent du caractère des personnages, et tels, qu’on en rencontre en voyage. […] En effet, la poésie et la religion ne sont plus capables de suggérer un sentiment vrai.
Il est donc bien vrai que l’action se rapproche alors du réflexe par la rapidité. […] Les vraies distractions sont celles qui naissent de ce que l’esprit est attentif à une autre idée. […] Cette sympathie à distance serait la vraie télépathie. […] Si le fait est vrai, une sensation semble ici transmise comme par une sympathie à distance. […] Est-il bien vrai, d’ailleurs, qu’une somnambule réveillée ne voie aucunement la personne qu’on lui a suggéré de ne pas voir ?
Et quand cette grand’mère le faisait appeler, il restait très longtemps dans le lointain du parc, avant de se rendre à l’appel, laissant son vrai nom se perdre, s’évaporer, dans son retard à y répondre. […] Entre Hérédia, qui nous donne quelques échantillons de son discours à l’Académie, écrit dans une prose condensée, où il réduit à sa vraie taille, le petit père Thiers. […] Du reste impossible de mettre plus de louange délicate, et d’amitié respectueusement affectueuse dans ce discours de vrai lettré, qui, je l’avoue, m’a fait les yeux humides, un moment. […] Un vrai plaisir dans ce livre, à la dégustation d’une expression, d’une épithète, d’une image. […] Il y avait peut-être un peu de vrai dans ce dernier reproche, mais c’est justement ce piquage de nez qui faisait la valeur du rapport.
Ceci est tourmenté, n’est-il pas vrai ? […] Dickens a fait trois ou quatre portraits de fous, très-plaisants au premier coup d’œil, mais si vrais, qu’au fond ils sont horribles. […] Les larmes qu’il verse sont vraies, et la compassion est leur source unique. […] « Cela a des inconvénients, il est vrai ; l’art en souffre, si le public y gagne. […] Plus d’une fois, il est vrai, nos écrivains ont peint des avares, des gens d’affaires et des boutiquiers ; Balzac en est rempli.
Necker jusqu’à messieurs tels ou tels que je ne veux pas nommer pour ne pas faire rougir leurs partisans devant la taille vraie de leurs idoles successives ! […] du premier coup il déchire le voile des fausses convenances, et pénètre dans la nature vraie comme un conquérant dans son domaine. […] C’est vrai ; je l’avoue. […] Je lui reproche encore aujourd’hui ce manque d’originalité vraie ; je goûtais mille fois mieux vos intimités novatrices de Joseph Delorme. […] L’unité du ton, quand il est vrai, fort et animé, n’est point la monotonie.
Mais la mode, dans les choses de l’esprit, n’est souvent que l’excès d’une disposition vraie. […] Ce n’est pas la vraie. […] Nous sommes au sein du vrai. […] L’une et l’autre sont également vraies, mais diversement. […] N’est-ce donc vrai qu’au théâtre ?
Il est vrai que le jour suivant « elles semblaient plus belles que jamais elles n’avaient été ». […] Le vrai Dieu se retourna, et le regardant, lui dit : Ils ne t’attendront pas, mais toi tu m’attendras. […] Le châtiment de Malc paraît, il est vrai, justifié par son ingratitude, mais ce trait a précisément disparu des formes postérieures du récit. […] Ô Dieu vrai, combien tes œuvres sont admirables ! […] Il est vrai qu’en général l’addition après l’n d’un t non étymologique a une raison qui n’existe pas ici ; elle est d’ailleurs surtout habituelle en provençal (voy.
Les poésies, les romans sont arrivés à un tel degré d’individualité, comme on dit, à un tel déshabillé de soi-même et des autres ; — le style, à force d’être tout l’homme, est tellement devenu non plus l’âme, mais le tempérament même, — qu’il est à peu près impossible de faire de la critique vive et vraie sans faire une opération inévitablement personnelle, sans faire presque de la physiologie à nu sur l’auteur et parfois de la chirurgie secrète ; ce qui frise à tout moment l’offensant. […] Il est vrai qu’une littérature poétique a malaisément deux grands siècles. […] L’imagination et la sensibilité, quand on les possède, ont vite reconnu leurs traces, et la vraie poétique est trouvée.
Quand le vrai chrétien s’est acquitté de ses devoirs, son bonheur ne le regarde plus ; il ne s’informe pas quel sort lui est échu, il ne sait pas ce qu’il faut désirer ou craindre, il n’est certain que de ses devoirs ; les meilleures qualités de l’âme, la générosité, la sensibilité, loin de faire cesser tous les combats intérieurs, peuvent, dans la lutte des passions, opposer l’une à l’autre, des affections d’une égale force ; mais la religion donne pour guide un code, où, dans toutes les circonstances, ce qu’on doit faire est résolu par une loi. […] Lorsqu’un homme, après avoir commis de grands crimes, en éprouve un vrai remord, cette situation de l’âme est si violente qu’on ne peut la supporter qu’à l’aide d’idées surnaturelles. […] Enfin, les affections du cœur qui sont inséparables du vrai, sont nécessairement dénaturées par les erreurs, de quelque genre qu’elles soient ; l’esprit ne se fausse pas seul, et quoiqu’il reste de bons mouvements qu’il ne peut pas détruire, ce qui dans le sentiment appartient à la réflexion est absolument égaré par toutes les exagérations, et plus particulièrement encore par celle de la dévotion ; elle isole en soi-même, et soumet jusqu’à la bonté à de certains principes qui en restreignent beaucoup l’application.
Il est bien vrai que la Bonne Hélène a été refusée par le comité, l’un de ces Messieurs ayant dit que, si l’on recevait cet ouvrage blasphématoire, il n’oserait plus jouer la tragédie. […] Il arrive d’ailleurs à ces maîtres d’être inattentifs, ou bienveillants par lassitude et dédain, ou par scrupule de conscience et pour ne pas risquer de faire tort à une pièce qu’ils ont peu écoutée. — Il y en a un qui dit que votre langue « est solide », et je vous avertis que ce n’est pas vrai. Il y en a un autre qui dit que vos vers sont « de correction classique » : ce n’est pas vrai non plus.
Y eut-il jamais accent plus vibrant et plus vrai ? […] Le cou long, charnu, démesuré, est d’un lutteur, et, en effet, le poète de Rolla avait été doué de la vigueur héroïque, pour que la Passion et la Douleur, ses vraies amantes implacablement chéries, eussent de quoi s’acharner sur leur proie. […] (Il est vrai qu’on peut alors développer le contenu de ces mots « jeunesse et amour », et que cela ne laisse pas d’être long.)
Oui, tu dis vrai, ce monde est vain quand il n’existe par moi-même. […] Dans maints poèmes, assez obscurs il est vrai, l’Idée paraît seule participer de l’Etre et le moi ne serait donc qu’un moment de l’Idée, vivante émanation du Soi universel. […] L’homme s’agite dans la Joie et dans la Tristesse mais tout effort tenté selon la vie est vain, donc douloureux : il faut ployer la tête et suivre son destin. — Cette philosophie est, il est vrai, trop peu clairement indiquée au long des œuvres de M. de Régnier pour que les lignes précédentes aient une signification autre que probable ; peut-être même ai-je complété ici ce que je devinais de la théorie pour en faire pressentir la consistance.
Le Théatre de la Littérature est envahi par trois sortes d’ennemis qui le dégradent : une Philosophie tyrannique & inconséquente y suffoque ou corrompt le germe du talent ; le faux goût y anéantit les vrais principes ; une aveugle facilité à tout admirer, acheve d’en bannir l’émulation & de décourager le mérite. […] La République des Lettres est un Etat parfaitement libre, où tous les Citoyens jouissent des mêmes priviléges, s’ils n’y jouissent pas des mêmes honneurs : les plus illustres n’y ont d’autres droits que ceux qui sont appuyés sur le mérite & les talens ; le plus obscur n’excede pas les bornes de son pouvoir, quand il entreprend de les juger : tout dépend d’avoir la justice & les vrais principes pour fondement de ses décisions. […] Tout ce qui a pu donner lieu à des réflexions intéressantes, à des critiques utiles, à des réfutations nécessaires, à des discussions de morale ou de littérature ; en un mot, tout ce qui a été une occasion de rappeler aux vrais principes & de répandre de la variété, n’a pas été regardé comme étranger à notre Ouvrage.
Ils respirent partout la droiture, les bonne mœurs, le christianisme : mais y remarque-t-on un vrai talent ? […] Sans une élocution élevée & sublime, le grand paroît toujours grand : le vrai & le beau, pour saisir l’ame, n’ont pas besoin d’ornement étranger. […] Des gens d’un vrai mérite se trouvèrent mêlés dans cette dispute, avec des gens qui n’en avoient qu’un très-mince.
Il est vrai qu’un poëte peut être dégoûté de nous donner de grands ouvrages par la peine que coûte la disposition de leur plan. […] Il est vrai que Lucain composa sa pharsale malgré toutes les distractions qui viennent à la suite de l’opulence. […] Il est vrai que les poëtes trouvent un plaisir sensible dans l’entousiasme de la composition.
Mme Sophie Gay, comme Mme Necker, qui certainement valait mieux qu’elle, sera tuée par sa fille, — une moins puissante matricide, il est vrai, que Mme de Staël, mais dont l’éclat de talent a été suffisant pour effacer entièrement sa mère. […] , font l’effet maintenant de ces roses qu’on a mises entre les pages d’un livre et qu’on y retrouve aplaties, jaunies, n’offrant plus qu’un squelette de rose avec une odeur de mort… de rose… il est vrai… mais de mort. […] Sa fille, Mme de Girardin, qui, en faisant comme un homme, et même comme un homme médiocre, des romans et des tragédies, eut le tort d’emprisonner ses jambes de déesse dans cet affreux bas qui botta si hermétiquement celles de sa mère, Mme de Girardin a du moins jeté quelques cris passionnés du cœur dans quelques beaux vers et fait un vrai livre de femme par lequel elle vivra, parce que c’est un livre de femme, pur de tout bleuisme.
Il en porte la trace même dans son talent ; mais il guérira, à force de vitalité vraie. […] Si le titre du livre est vrai, c’est une inconséquence. […] C’était une vraie circonvallation d’éventails déployés, derrière chacun desquels je comptais régulièrement deux têtes qui s’avertissaient du regard comme on s’avertit du genou, — car il y a du genou dans le regard, à certaines heures !
En un mot, c’est ce scélérat adoré de La Fontaine, c’est cet hypocrite de naïveté, qu’on aime comme le plus vrai des hommes quand il n’est peut-être que le plus profond et le plus retors des artistes ! […] Je sais bien, il est vrai, qu’Amyot n’était pas tout le monde. […] Or, il est bien certain que cette chose est commune à Hérodote, ancien et véritable historien, aussi bien qu’à ces poètes, afin que je passe sous silence ce qu’il a de particulier en ce qui sent à plein son vrai chrétien. » L’expression va peut-être un peu loin, mais au fond Saliat a raison.
Tisserands ignorés qui ont travaillé à la trame de l’histoire de leur pays, sur laquelle ils brodèrent les noms des hommes plus grands qu’eux, Guizot les a étudiés comme les plus grands, tant il est vrai que rien n’est à mépriser dans l’Histoire ! […] mais il me semble qu’il y a dans ce choix une profondeur inaccoutumée, une admirable intuition de la vraie source historique, une faculté de démêlement qui est plus que de la sagacité. […] Il s’y agit de la Révolution d’Angleterre, il est vrai, mais la Révolution d’Angleterre, c’est toujours de la révolution, c’est toujours, sous une forme particulière et avec une date, l’amour ou l’effroi des nations modernes, la grande idée qui, comme un glaive, coupe pour un moment le monde en deux !
II Il est vrai que des deux séductrices dont Debay s’est fait encore plus le poète que l’historien, une seule est parfaitement connue, Ninon de Lenclos. […] Le mot méprisant d’Oxenstiern : « On ne sait pas combien il faut peu de génie pour gouverner les hommes… » est bien plus vrai quand il s’agit de ces dominations inférieures que les femmes exercent sur nous. […] Il est vrai que l’esprit tel que nous le concevons, nous autres modernes, était inconnu aux anciens, comme il est inconnu à l’Orient… Les mots de Laïs rapportés par Debay sont des lapalissades.
Mais il n’en est pas moins vrai que l’auteur des Ruines a l’honneur d’avoir avec eux la fraternité des idées et une parenté d’intelligence… Ce Revelière inconnu, et qui, dans l’égarement universel de la raison, a grande chance de rester inconnu, est un esprit d’une force rare, toujours, dans la pensée, et souvent dans l’expression, mais il est moins près de ces hommes profonds et sans égaux que d’un autre homme de leur temps, un autre observateur politique trop oublié et qu’il rappelle, ce Mallet-Dupan qui, lui aussi, préjugea la Révolution française dès son origine, et dont le préjugé eut parfois toute la justesse d’un jugement… L’auteur des Ruines est une espèce de Mallet-Dupan après la lettre, la terrible lettre de la Révolution ! […] Il n’y avait que des Frances flottantes, qui se déchiraient, qui se mettaient en pièces à chaque règne… Mais à partir de Hugues Capet, la Monarchie, la vraie Monarchie est instituée. […] Les idées qu’il exprime, ces verba novissima du dernier peut-être des royalistes purs, — si vraies qu’elles soient et en raison même de leur vérité, — ne sont pas capables d’arrêter le torrent des idées contraires qui emportent le monde vers d’autres ruines, lesquelles, certainement, nous vengeront de celles-ci !
Et pour tous ceux qui savent s’élever au-dessus des rubriques des partis et de leurs hypocrites langages, la vraie et la seule grandeur n’est-elle pas ici du côté de la vérité de l’Histoire ? […] C’était un langage inconnu il est vrai, à la plupart de ceux qui ont fait entendre aux hommes l’éloquence de leurs chaînes et qui se sont bâti un palais de publicité avec les murs de leur prison. […] Les beaux esprits qui feraient volontiers pendre leurs juges et qui, quand ils méritent le bagne, se plaignent qu’on les martyrise, tous ceux qui restent insolemment debout devant l’autorité, s’évaluant au même prix qu’elle dans le plateau contraire de la balance, tous les réclamateurs de l’impunité dans leur guerre sourde ou bruyante aux gouvernements, enfin tous les crocodiles des partis, maîtres en larmes hypocrites, mais qui savent très bien le prix des vraies, saluèrent cette voix de Silvio Pellico et la souillèrent en y mêlant la leur, croyant, et ne se trompant pas !
Moraliste, il est vrai, dont la morale a cela de supérieur, selon lui, — et d’inférieur, selon nous, — à la morale chinoise, qu’il n’aime point le bambou, et que la Chine a toujours joué de ce gracieux bâton à nœuds avec l’alacrité, la vigueur et la prestesse d’un bâtonniste. […] Il y a dans ce badinage, il est vrai, aux yeux du très sérieux M. […] C’est ce qui la distingue des autres civilisations… Chez aucun autre peuple on ne trouve aussi complètement formulées les éternelles lois du beau, du vrai et du juste, inscrites dans la conscience de l’homme.
Et pour tous ceux qui savent s’élever au-dessus des rubriques des partis et de leurs hypocrites langages, la vraie et la seule grandeur n’est-elle pas ici du côté de la vérité de l’histoire ? […] C’était un langage inconnu, il est vrai, à la plupart de ceux qui ont fait entendre aux hommes l’éloquence de leurs chaînes, et qui se sont bâti un palais de publicité avec les murs de leur prison. […] Les beaux esprits qui feraient volontiers pendre leurs juges et qui, quand ils méritent le bagne, se plaignent qu’on les martyrise, tous ceux qui restent insolemment debout devant l’autorité, s’évaluant au même prix qu’elle, dans le plateau contraire de la balance, tous les réclamateurs de l’impunité, dans leur guerre sourde ou bruyante aux gouvernements, enfin tous les crocodiles des partis, maîtres en larmes hypocrites, mais qui savent très bien le prix des vraies, saluèrent cette voix de Silvio Pellico et la souillèrent en y mêlant la leur, croyant, et ne se trompant pas !
Millevoie mourait de pulmonie, Millevoie, cette faible transition du faux au vrai, qui devait redevenir le faux si vite ! […] L’impersonnalité n’existe pas pour les vrais poètes. […] Ce n’est pas le Moïse vrai, historiquement peut-être, le Moïse hébreu et biblique, mais quel beau Moïse humain, profond à la manière moderne, car il n’y a que les modernes qui soient profonds !
Que le personnage ait été fabuleux ou vrai, il y avait donc fort anciennement des vers répandus sous son nom. […] Comment l’idée d’un poëte sacré, dominant par l’harmonie jusqu’aux bêtes féroces et aux rochers, n’aurait-elle point apparu dans cette Grèce, où nous voyons, aux époques historiques, un vrai législateur chanter en vers élégiaques, sur la place publique d’Athènes, les conseils qu’il donne à ses concitoyens ? […] Pausanias60, si studieux explorateur de la Grèce, au temps des Antonins, a décrit, sans exprimer de doute, le monument d’Arion, du moins fort ancien, s’il n’était vrai ; et, dans le siècle suivant, un polygraphe assez judicieux, Élien, citait une ode de ce poëte fabuleux sur la merveille de son sauvetage inespéré.
Et, d’abord, je n’y pouvais faire remarquer combien le titre, il est vrai, heureusement corrigé par l’épigraphe, était mauvais. […] Ceci est vrai pour l’évolution de tous les arts, en tous les temps. […] On ne peut, dans la quête du vrai, prendre à son compte le langage des héros grandiloquents. […] Borluut et Godelieve peuvent être la vraie vertu ; comme ils parlent une simple langue d’extase, ils ne pourront passer inaperçus dans une Babel du chiffre. […] On est étonné de trouver Delille aux côtés de Châteaubriand — opinion qui a pu sembler très tranchante et pourtant vraie.
Il faut s’élever à une grande hauteur pour adopter ce mot dans son entier ; mais toujours est-il vrai qu’on doit avoir pour le Sort un genre de respect. […] Elle est la vraie mesure de la grandeur de l’homme, mais elle n’a droit à notre admiration que dans l’être généreux qui se l’oppose à lui-même et sait s’immoler quand elle le commande. […] L’homme qui, prêt à tuer son amie, célèbre un festin avec elle et s’exalte par des chants et des liqueurs comme s’il craignait le retour des mouvements vrais et raisonnables ! […] La vraie supériorité dans tous les genres n’est point de la bizarrerie : c’est une intensité plus énergique et plus profonde dans les impressions qu’éprouve la masse des hommes. […] N’y a-t-il pas bien plus de vraie chaleur dans ce qui est compris par tous, que dans ces natures humaines inventées, pour ainsi dire, comme une fiction faite à plaisir ?
Ces derniers jours, quelques privilégiés viennent de prendre, à Paris, par la grâce du Petit-Bayreuth, un peu d’encouragement à attendre la réconfortation du grand, du vrai Bayreuth. […] (Proposition évidente et rigoureuse, peut-être vraie) On raconte que le jeune Hercule, en un temps sans doute fort lointain, allait, souriant et robuste, par les campagnes bleues du royaume de Mythologie. […] L’histoire est fort ancienne, si elle est vraie. […] Platon a compris la réalité unique du Moi créateur, la projection de Lui au néant d’où naissent les mondes ; il a superposé la philosophie idéaliste parfaite du Vrai à la science évolutionniste de l’Apparent. […] J’ai admiré, encore, quelques images très légères et vraies, par Madame Morizot, et un très beau tableau de M.
Cela n’est point vrai pourtant, lorsqu’on lit la traduction de Moschus que M. […] On y rencontre par-tout ce vrai comique qui va chercher les ridicules jusques dans les replis du caractère, pour l’exposer ensuite en plein Théatre. […] La simplicité du style n’est point incompatible avec la vraie poésie. […] Cet éloge est ingénieux ; mais il n’est pas aussi vrai. […] Il est vrai que sa gaieté surprend d’autant plus, qu’il étoit accablé d’infirmités & de douleurs ; mais elle ne se soutient pas toujours.
Le rhéteur fut le vrai maître de cette société ingénument décadente. […] La vraie France va naître hors du contact de la « Romanie » submergée. […] Cela est vrai, et personne ne songe à le nier. […] Il n’en est pas moins vrai qu’elle n’est pas tellement immorale au fond. […] Le groupe des vrais Révolutionnaires échoua également.
Schlichtegroll et simplement traduite de l’allemand : ce qui n’est vrai que jusqu’à un certain point ; et quant aux Lettres sur Haydn, qui sont en partie traduites et imitées de l’italien de Carpani, l’auteur ne le dit pas, bien qu’il semble indiquer dans une note qu’il a travaillé sur des lettres originales. […] Beyle abusera ainsi souvent d’une observation vraie en la poussant trop loin et en voulant la retrouver partout. […] Il n’entre pas dans la raison et dans le vrai de certains préjugés qui ne sont point pour cela des erreurs. […] Ce public, tel que nous le connaissons aujourd’hui, ne serait pas si difficile sur son plaisir : qu’on lui offre seulement quelque chose d’un peu vrai, d’un peu touchant, d’honnête, de naturel et de profond, soit en vers, soit en prose, et vous verrez comme il applaudira. […] Le goût du vrai et du naturel qu’il met en avant a souvent, de sa part, l’air d’une gageure ; c’est moins encore un goût tout simple qu’une revanche, un gant jeté aux défauts d’alentour dont il est choqué.
Qui voudrait recueillir dans les correspondances du temps les mots et les jugements de Mme Du Deffand, du président Hénault et autres de ce monde-là sur Voltaire, les jugements du président de Brosses, de Frédéric, de Mme de Créqui (j’en ai donné des échantillons), quiconque ferait cela aurait l’idée d’un Voltaire vrai, non convenu, non idéalisé et ennobli par l’esprit de parti, et auquel on laisserait toutefois la gloire entière de ses talents. […] Il est vrai que, si l’on excepte les poèmes épiques, on fait bien des choses à la fois dans la jeunesse. […] Il est vrai que je ricane beaucoup. […] Il était réellement sous le charme : il l’admirait, il la proclamait sublimée, il la trouvait belle ; il se plaît, dans ses lettres à Falkener, à donner son adresse chez elle, au château de Cirey : « Là, disait-il, vit une jeune dame, la marquise du Châtelet, à qui j’ai appris l’anglais, etc. » Trois choses pourtant me gâtent Cirey, a dit un fin observateur : — d’abord, cette manie de géométrie et de physique qui allait très peu à Voltaire, qui n’était chez lui qu’une imitation de la marquise, et par laquelle il se détournait de sa vocation vraie et des heureux domaines où il était maître ; — en second lieu ces scènes orageuses, ces querelles de ménage soudaines, rapides mais burlesques, dont nous sommes, bon gré mal gré, informés, et qui faisaient dire à un critique de nos jours qu’il n’aurait jamais cru que l’expression à couteaux tirés fût si près de n’être pas une métaphore ; — en troisième lieu, cette impossibilité pour Voltaire, même châtelain, même amoureux, même physicien et géomètre de rencontre, de n’être pas un homme de lettres depuis le bout des nerfs jusqu’à la moelle des os ; et dès lors ses démêlés avec les libraires, ses insomnies et ses agitations extraordinaires au sujet des copies de La Pucelle (voir là-dessus les lettres de Mme de Grafigny), ses fureurs et ses cris de possédé contre Desfontaines et les pamphlets de Paris. […] J’ai trouvé la douceur du repos, le vrai bonheur.
Il donne l’idée que la première condition pour être psychologue est d’être infirme, ce qui ne se doit dire d’aucune science vraie : « Quand on a peu de vie, dit-il, ou un faible sentiment de vie, on est plus porté à observer les phénomènes intérieurs. […] — L’année suivante en refaisant son mémoire autrefois couronné à l’Académie de Copenhague, il éprouvait de nouveau quelque chose de la même joie intellectuelle, tant il est vrai que ce n’est que le travail régulier et un cours tracé de production qui lui manque pour retrouver toute la conscience de lui-même et son équilibre : « Ce travail, dit-il, a duré un mois. […] il peut toujours être content de lui, mais il est toujours loin de tout ce qui est bon et vrai. […] C’est une vraie misère de vivre sur la terre. » Il a besoin d’un secours extérieur encore, mais, cette fois, de ce secours invisible qui opère par la grâce et moyennant le canal de la prière. « La plus fâcheuse des dispositions, dit-il, est celle de l’homme qui, se méfiant de lui-même au plus haut degré, ne s’appuie pas sur une force supérieure et ne se livre à aucune inspiration ; il est condamné à être nul aux yeux des hommes comme à ses propres yeux. » Il connaissait bien cet homme-là. […] J’ai alors le sentiment intime, la vraie suggestion de certaines vérités qui se rapportent à un ordre invisible, à un mode d’existence meilleur, et tout autre que celui où nous sommes.
Pour ne pas nous perdre ici en des apologies de détail dont le lecteur n’a que faire, nous poserons tout d’abord un principe, et ce principe est celui-ci : Il faut avoir l’esprit de son âge, dit-on : cela est vrai en avançant ; mais surtout et d’abord il faut en avoir la vertu : des mœurs et de la pudeur dans l’enfance, de la chevalerie, de la chaleur de conviction et de la générosité de pensée dans la jeunesse. […] et lorsqu’on voudrait ensuite réparer et se reprendre aux nobles idées, aux sentiments vrais, le pourrait-on ? […] Puis, durant ces quelques semaines qu’il passe auprès de madame de Charrière, n’ai-je pas fait valoir aussitôt l’influence heureuse de cette première tendresse que rencontre le jeune homme, influence balancée, il est vrai, par l’excès d’analyse et par la nature aride de certaines doctrines ? […] Ce singulier fragment nous apprend bien des choses, et d’abord qu’il ne faudrait pas absolument se fier aux lettres d’amour qu’il écrivait, pour y trouver l’expression toute vraie de sa pensée ; car enfin ce qu’il appelle ici du tendre galimatias pourrait bien, si on le retrouvait sans comme ntaire, paraître tout simplement de la tendresse exaltée. […] Une conséquence de ce capricieux et subtil détournement de la sensibilité dans la jeunesse, c’est de produire, jusque dans un âge assez avancé, des retours simulés, des chaleurs factices, des excitations énervées : on dirait par moments que l’orage de la passion se retrouve et s’amasse tel qu’il n’a jamais été aux années les plus belles, et que le vrai tonnerre, la foudre divine enfin, va éclater.
Si, malgré tout, on ne s’accorde pas toujours sur le vrai, que dirons-nous du beau ? […] Ce qui est vrai pour la vie d’un homme l’est aussi pour la vie d’une nation. […] Car, s’il est vrai qu’une œuvre est déjà supérieure pour s’être mise hors de pair dans un seul des ordres de beauté que nous avons distingués, il est évident qu’elle sera plus remarquable encore, si elle occupe un rang élevé dans plusieurs ou dans tous. […] Une œuvre qui plaît aux sens vaudra mieux, si elle satisfait en même temps notre besoin d’émotions et notre intelligence ; elle sera une œuvre suprême, un vrai chef-d’œuvre, si elle est par surcroît largement douée de la beauté morale et de la beauté idéale. […] Un roman, très moral, s’il n’émeut pas, s’il nous promène parmi des personnages et des événements qui ne sont ni vrais ni vraisemblables, n’est qu’une ennuyeuse inutilité et la plus fade des lectures.
Même dans ce désir et dans les moyens qu’il lui suggérait, elle restait vraie, elle était sincère. Elle disait d’elle-même et pour expliquer son succès auprès des autres, qu’elle avait le vrai de tout, tandis que d’autres femmes n’ont le vrai de rien. […] Mon ami, jamais on ne s’est fait voir avec cet abandon. » C’est cet abandon qui fait l’intérêt et l’excuse de cette situation morale, la plus vraie et la plus déplorable qui se soit jamais trahie au regard. […] Résumons avec elle : « Tant de contradictions, tant de mouvements contraires sont vrais et s’expliquent par ces trois mots : Je vous aime. » Remarquez qu’à travers cette vie d’épuisement et de délire, Mlle de Lespinasse voit le monde ; elle reçoit ses amis tant qu’elle peut ; elle les étonne bien parfois avec ses variations d’humeur, mais ils attribuent cette altération chez elle à ses regrets de l’absence, puis de la mort de M. de Mora.
Ce qui reste, c’est l’ensemble des mœurs, c’est le fond du tableau, et rien ne paraît plus vrai ni plus vivant. […] Supprimez cette invention du tuteur, et tout le reste est vrai. […] Je suis vraie sans être franche. […] Ce côté des Mémoires de Mme d’Épinay est vrai, sans être autrement original. […] Ce jugement de Byron me paraît le vrai.
Quand il vint la dernière fois à Paris en 1741, M. de Fontenelle ayant remarqué dans sa prononciation quelque chose de l’accent de Normandie, lui en fit l’observation, et lui demanda s’il n’avait pas d’abord appris notre langue d’une personne de cette province ; ce qui était vrai en effet. […] Pour lui comme pour La Rochefoucauld, il serait vrai de dire que la politique servit surtout à faire de l’homme d’action incomplet un moraliste accompli. […] Ce qui soutient et presque ce qui touche le lecteur, dans cette lutte où tant d’art est dépensé et où l’éternel conseil revient toujours le même au fond sous tant de métamorphoses, c’est l’affection vraie, paternelle, qui anime et qui inspire le délicat et l’excellent maître, patient cette fois autant que vif, prodigieux de ressources et d’adresse, jamais découragé, inépuisable à semer sur ce sol ingrat les élégances et les grâces. […] Ce sont des caricatures qui outrepassent le vrai. […] Il prémunit tout d’abord son fils contre cette idée que les Français sont purement frivoles : Les froids habitants du Nord considèrent les Français comme un peuple frivole, qui siffle, chante et danse toujours : il s’en faut de beaucoup que cette idée soit vraie, quoique force petits-maîtres semblent la justifier.
Il est vrai que, par un reste de fidélité à ses épigrammes, il n’a jamais cédé aux suggestions amicales qui lui furent faites plus d’une fois de se mettre sur les rangs pour un fauteuil, bien qu’il réunît certainement à cet effet toutes les qualités à la fois solides, sérieuses, distinguées et même mitigées, qu’on préfère ou qu’on exige. […] Les connaisseurs pourtant ont retenu et me signalent du doigt dans ces volumes un vrai bijou, la vie et la mort de Mayeux, le fameux Mayeux (le type grotesque de notre versatilité politique), venu au monde à Paris le 14 juillet 1789, et qui s’est successivement appelé Messidor-Napoléon-Louis-Charles-Philippe Mayeux, selon les noms des divers régimes qu’il a, tour à tour, épousés ou répudiés, Mayeux un moment porté sur le pavois après 1830, et qui meurt, vers 1833, de douleur et de honte d’avoir été renvoyé des rangs de la Garde nationale et rayé des contrôles comme coupable de faire rire. […] Bazin par un mot : il suit sa ligne, il vise au vrai, il fait de son mieux, mais il ne daigne pas se mettre assez à la place du lecteur ordinaire ; son procédé envers lui n’est pas obligeant, ni prévenant. […] Bazin n’eût, rien assurément de ce sympathique vrai ou faux qui enlève les hommes, je crois qu’il aurait encore méprisé dans tous les cas leur faveur. […] Il m’eût été facile de donner de lui un portrait en apparence plus favorable de tout point, et aussi plus effacé ; mais je crois que la plus grande faveur qu’on puisse faire à un homme distingué et qui a de belles et hautes parties, le plus vrai service à rendre à sa mémoire d’homme de Lettres, c’est-à-dire d’homme qui veut, en définitive, qu’on se souvienne de lui, c’est de le montrer le plus au vif qu’on peut, et le plus saillant dans les lignes de la vérité.
L’histoire de la philosophie, qu’il y traite de seconde main il est vrai, la description des arts mécaniques, dans laquelle il se montre peut-être plus original ; trois à quatre mille planches qu’il fit dessiner sous ses yeux, la charge et la direction du tout enfin, ne purent jamais l’absorber ni émousser sa vivacité de verve. […] Il est vrai que, comme il n’y a pas de langue qui puisse exprimer les finesses de la forme ou la variété des effets de la couleur, du moment qu’on veut en discourir, on est réduit, faute de pouvoir exprimer ce qu’on sent, à décrire d’autres sensations qui peuvent être comprises par tout le monde. […] Çà, petite, ouvrez-moi votre cœur : parlez-moi vrai : est-ce bien la mort de cet oiseau qui vous retire si fortement et si tristement en vous-même ? […] Diderot, dans ses Salons, a trouvé la seule et vraie, manière de parler aux Français des beaux-arts, de les initier à ce sentiment nouveau, par l’esprit, par la conversation, de les faire entrer dans la couleur par les idées. […] J’y trouve mille idées hardies, profondes, vraies peut-être, folles et libertines souvent, une contradiction si faible qu’elle semble une complicité entre les deux personnages, un hasard perpétuel, et nulle conclusion, ou, qui pis est, une impression finale équivoque.
Ces proverbes sans doute pourront eux-mêmes avoir besoin, sur quelques points, de commentaire, mais surtout ils seront eux-mêmes un commentaire vivant et une explication animée des prétentions et des travers d’une époque : c’est là ce que j’appelle les vignettes amusantes et vraies de l’histoire. […] c’est vrai ! […] Théodore Leclercq est ainsi de saisir la comédie toute faite qui passe devant lui, de la décalquer et de l’encadrer dans des dialogues vrais, sans lui rien donner du grossissement et du relief propres au théâtre. […] Quel trait plus vrai et plus naturel que celui du domestique François, qui a tant résisté à son maître sur le chapitre de la cuisine, qui a tant dit qu’il ne la savait pas faire, qui n’a entrepris l’omelette, l’immense omelette de quinze œufs, qu’à son corps défendant, et qui, dès qu’il en est venu à bout, est si fier, puis si mortifié quand son maître lui dit qu’il ne la mangera pas ! […] Pour s’en bien figurer l’effet, il faut relire ces scènes satiriques en se remettant dans la vraie situation du moment.
C’est que la vraie poésie, en puisant aux mêmes sources, se rencontre et se réfléchit par les mêmes images. […] Alors je compris que, dans nos moments d’émotion et de fièvre, parlant et agissant, nous étions tous laconiques et éloquents, pleins de verve et d’action, vrais poètes enfin lorsque nous n’y songions pas ; et je compris aussi qu’une muse pouvait, à force de travail et de patience, en arriver à être tout cela en y songeant. […] Avec sa facilité improvisatrice, encore aidée des ressources du patois dans lequel il écrit, Jasmin pourrait courir et compter sur les hasards d’une rencontre heureuse comme il n’en manque jamais aux gens de verve et de talent : mais non, il trace son cadre, il dessine son canevas, il met ses personnages en action, puis il cherche à retrouver toutes leurs pensées, toutes leurs paroles les plus simples, les plus vives, et à les revêtir du langage le plus naïf, le plus fidèle, le plus transparent, d’un langage vrai, éloquent et sobre, n’oubliez pas ce dernier caractère. […] Il est vrai qu’un poème comme Jocelyn, exécuté et traité avec le soin que Jasmin apporte aux siens, coûterait huit ou dix années de la vie, et l’on n’aurait guère le temps de faire à travers cela une dizaine de volumes sur les Girondins ou les Jacobins, et une révolution de février, la chose et le livre à la fois, et toute cette série d’improvisations que nous savons et que nous oublions, ou que nous voudrions oublier. […] Nul garçon ne meurt pour une fille, et ils n’ont pas tort ; ce n’est que trop vrai : personne ne perd plus que celui qui s’en va.
C’est un républicain de naissance et d’affection, ne l’oublions pas, un vrai citoyen de Genève, que cet homme qui, par bon sens et par la force de la vérité, est obligé de déclarer à la France de 89 et de 92 qu’elle n’est pas faite pour la république, et qu’il faut trente ans encore d’éducation préliminaire pour que les Français s’accoutument à quelque pratique de la liberté ; c’est un républicain qui n’est royaliste que parce que l’évidence de la raison l’y oblige et qu’il ne peut écrire contre sa conscience. […] Il est pour les gouvernements mixtes, les seuls qu’il croyait compatibles avec la vraie liberté quand on la veut réelle et sincère chez une grande nation : c’est dire qu’il ne partage nullement les exagérations de la droite pure, et il est aussi loin, on peut l’affirmer, en bien des cas, de l’abbé Maury que de l’abbé Sieyès. […] C’est le rôle que vous avez joué jusqu’à la dernière extrémité ; et certes quand vous avez quitté votre tribunal, il en était temps. » Dans une brochure qu’il écrivait à Bruxelles en 1793, et où il se séparait des émigrés violents et légers, parlant lui-même au nom des vrais royalistes : Plus d’une fois, disait Mallet du Pan, j’ai été leur organe, et ils ne m’ont jamais désavoué. […] » Sachant les vraies fins de l’homme, et que, dans les orages de la société, c’est à agir et non à lire que les hommes sont destinés, il sentait bien que lui-même, qui ne parlait qu’à des lecteurs, n’offrait qu’un remède insuffisant : « Des têtes noyées dans l’océan des sottises imprimées ne sont plus propres à se conduire, disait-il ; n’en attendez ni grandeur ni énergie ; ces roseaux polis plieront sous les coups de vent sans jamais se relever. » — « On ne combat pas une tempête avec des feuilles de papier », répétait-il souvent. […] On croit qu’il va se limiter lui-même ; mais ce genre de raisonnement, qui peut être vrai pour une période historique de quelque étendue, est tout à fait trompeur et décevant pour les courtes périodes d’années qui sont si essentielles dans la vie d’une génération : Tandis que cette foule de gens d’esprit, dit-il, pour qui la Révolution est encore une émeute de séditieux, attendent, comme le paysan d’Horace, l’écoulement du ruisseau ; tandis que les déclamateurs phrasent sur la chute des arts et de l’industrie, peu de gens observent que, par sa nature destructive, la Révolution amène nécessairement la République militaire.
Avant de tirer une réflexion de ses lectures, il faudrait se demander si les historiens disent vrai ; il y a une critique à faire sur les textes et sur les traditions à demi fabuleuses : Montesquieu ne la fait pas. […] À côté de Montesquieu j’ai voulu lire du Machiavel : c’en est la vraie réfutation, ou du moins la vraie correction. […] Et pourtant, si l’on ne reporte pas directement, comme fait Bossuet, le conseil et la loi du monde historique au sein de la Providence même, il me semble qu’il est fort difficile et fort périlleux d’y trouver cette suite et cet enchaînement que Montesquieu, après coup, se flatte d’y découvrir ; et Machiavel, sur ce point, me paraît plus sage encore et plus dans le vrai que Montesquieu, en nous rappelant toujours, au milieu de ses réflexions mêmes, combien il entre de hasard, c’est-à-dire de causes à nous inconnues dans l’origine et dans l’accomplissement de ces choses de l’histoire et dans la vie des empires. […] Le mot de Mme Du Deffand : « Ce n’est pas L’Esprit des lois, c’est de l’esprit sur les lois », est un mot qui pouvait être vrai dans la société particulière de Montesquieu, mais qui cessait de l’être au point de vue du public et du monde.
Barbey d’Aurévilly sont et peuvent être chacun aussi vrais que ceux d’un roman de Balzac. […] Zola sont vrais. […] Il en préfère certains, les montre avec faveur, et les exalte au-delà du vrai. […] Que ce procédé revient à déranger l’ordre vrai des faits pour instituer d’artificielles coïncidences, il est inutile de le montrer. […] Toute la première partie de l’Œuvre, cette histoire lentement développée de l’affection de Christine et de Claude, les magnifiques scènes où elle se résout à être le modèle de son amant, ou elle se livre à lui, revenu croulant sous les huées, leur idylle de Bennecourt, sont de grands et vrais tableaux où la vie frémit, où la sympathie jaillit du cœur du lecteur.
Mais, par là même, tout demeurait confus ; et souvent, à côté de l’éclair du vrai génie paraissait seulement l’essai maladroit d’un art grossier, qu’on admirait, par inexpérience, autant que le génie même. […] Dante, presqu’au sortir de l’enfance, a senti l’amour pur, vrai, profond ; il en a rendu les illusions et la douleur, avec une force qui rejette bien loin toute la poésie convenue et le langage affecté du siècle ; il en a gardé l’ineffaçable souvenir, comme un sceau de Dieu sur lui ; il a été consacré poëte par la religion et par l’amour. […] Souffrir avec la vertu est un destin digne de louange. » Il n’est pas vrai, toutefois, que ces premières chansons du Dante, ces odes passionnées avec diffusion, eussent élevé déjà le grand poëte au-dessus de tous ses contemporains. […] Merveilleux et tendresse, sublimité des images et profonde émotion du cœur, il y aura donc là ce que la poésie la plus vraie, la plus naturelle, avait pu concevoir de plus grand, à la pensée de Dieu et sous les rayons de la plus éclatante nature ; et là devait se rencontrer aussi ce que l’âge plus avancé du monde, ce que l’expérience plus triste de la vie, ce que les malheurs réitérés des siècles, auront appris à l’âme humaine. […] Le génie transporté par une vraie passion ne doit-il pas atteindre toutes les hauteurs de l’art ?
Ces Mémoires sont de vrais préludes de Don Juan, dans la jeunesse dissipée et voluptueuse d’un fils des Lagunes. […] Et c’est ainsi qu’un vrai critique découvrirait presque toujours dans le poète, dans le musicien, dans le peintre, dans le poète, les véritables sources de l’œuvre de ces grands artistes. […] C’est ainsi que les vrais poètes changent d’objet sans changer d’amour, parce qu’ils impriment sur tout ce qu’ils adorent l’image que Dieu a gravée dans leur âme. […] Bien que la Faustine fût véritablement d’une beauté accomplie et assez orgueilleuse pour savoir parfaitement combien elle était admirée, elle ne put s’empêcher de s’écrier : C’est vrai, c’est vrai, elle est encore plus belle que moi ! […] Il y a de l’adultère entre un art et un autre art : leur vraie nature leur interdit certaines unions, sous peine de se diminuer en croyant se grandir.
Son amie, dont nous allons beaucoup vous parler, venait de lui faire élever un lourd et assez plat monument funéraire à côté des tombeaux de Machiavel et de Michel-Ange (ces vrais grands hommes !) […] La vraie raison, c’est que je n’étais pas du pays, et que la mode du temps ne m’avait pas plié suffisamment à cet enthousiasme de convention. […] La preuve en est que tous les vrais grands hommes sont persécutés, et que tous les sophistes font des fanatiques de leurs sophismes. […] Mais peut-il y avoir excès dans la passion que l’on éprouve pour le juste et pour le vrai, surtout quand il s’agit de la faire partager aux autres ? […] Il est vrai aussi que, si je n’ose me flatter du second, j’ai un vrai pressentiment du premier, qui me console infiniment dans le comble de mon chagrin.
Et on a peut-être rarement dit de la musique de Wagner un mot plus vrai que celui qu’écrivait, déjà en 1838, Dorn : « … Ses pieds sont enracinés dans les œuvres de Beethoven, la tête oscille entre Bach et Bellini » (Glasenapp, Biogr. […] Il n’y a aucune violence à lui faire ; on n’a qu’à le prendre tel qu’il est, car le vrai drame, chez lui, était toujours tout intérieur ; et quant au monde qui l’entourait, il ne différait guère que par le costume de celui qui nous entoure. […] Il ne faudrait point s’exagérer la valeur de telles études, car le vrai fond de toute création artistique reste inévitablement caché. […] C’est donc agir d’une façon parfaitement arbitraire que de choisir telle œuvre et de déclarer : voici le vrai système, les antres sont ou bien poussées trop loin, ou bien viciées par des concessions. […] Plus on souffre, plus on est près du vrai but de la vie.
Ce à quoi je n’ai pu m’empêcher de dire : « C’est vrai ! […] C’est vrai ! […] Il finit par déclarer que se produire, vient de notre bassesse littéraire, et qu’il n’y a qu’une chose de vraie et d’estimable en ce monde : la sainteté. […] Quel merveilleux tableau pour un vrai peintre de la vie élégante, si le xixe siècle en avait un ! […] Voici l’imprévu, le décousu, l’illogique du vrai.
Avec cela un beau jardin, de vrais arbres. […] Et ce vrai bonheur d’hier est devenu un vrai chagrin d’aujourd’hui. […] L’un diminue l’autre : cela est si vrai, que les amoureux de la femme quittent, un jour, le tabac, parce qu’ils sentent ou s’imaginent que le tabac est un stupéfiant du désir et de l’acte. […] * * * — L’idéal du roman : c’est de donner avec l’art, la plus vive impression du vrai humain, quel qu’il soit. […] C’est un grand document, malheureusement trop délayé, où le talent de Mme Sand, dans le vrai, l’observation juste des autres et d’elle-même, étonne et surprend.
Il est vrai qu’Horace dit encore** : L’objet de tout poëte est d’instruire ou de plaire. […] Il est vrai que Perrault ne l’avoit imaginé que pour faire revenir de la grande admiration pour les Grecs & les Latins. […] La plupart des remarques de La Mothe étoient justes ; ses principes étoient vrais : mais il s’égara dans l’application qu’il en fit. […] Il est vrai qu’il n’y en a qu’un seul dans l’Énéide, que l’auteur a tout sacrifié à Énée. […] Ce chant est la description des nôces vraies ou imaginaires d’Énée avec Lavinie.
Il est vrai que je n’ai pas l’honneur d’être le fils d’un patriarche. […] Une larme vraie ou fausse lui tombe de l’œil. […] Ils ont dans la tête (…) ; et ils ne se doutent pas qu’il est encore plus vrai qu’(…). […] Prendrons-nous les connoissances préliminaires de l’imitation de nature, pour la véritable imitation de nature, ou raporterons-nous les productions du peintre à leur vrai but ? à leur vraie raison ?
» — cet aphorisme est vrai en littérature comme en politique. […] Nous ne rejetterons rien des vraies richesses, ni des conquêtes définitives de nos devanciers. […] Au vrai, quand on s’est une fois mis en garde contre leur badauderie descriptive, on reste stupéfié du peu que les naturalistes nous apprennent. […] Rien n’est plus vrai. […] Tous les vrais aristocrates d’une nation se reconnaissent à première vue, d’où qu’ils viennent.
Il m’arrivera certainement de vous dire des choses qui m’apparaîtront moins vraies aussitôt que je les aurai dites et qu’il me faudra, ou retirer, ou transformer. […] Il est vrai qu’un tel calme, une telle objectivité peuvent vous paraître encore maintenant sacrilèges. […] La question est de savoir si ce que Proust dit de l’amour est vrai ou non. […] Il est vrai que souvent aussi elle l’avait averti de leur fragilité. […] Cet amour était vrai, puisque je subordonnais toutes choses à les voir, à les garder pour moi seul, puisque je sanglotais si, un soir, je les avais attendues.
La vraie immortalité a le temps d’attendre, elle est éternelle. […] Si ce que tu dis était vrai, il m’aurait avertie de me préparer à recevoir le roi. […] Avec votre permission, rien n’est plus vrai ; notre thane est en chemin : un de mes camarades a été chargé de le devancer. […] serait-il donc vrai ? […] Ô récit trop cruel dans son exactitude, mais trop vrai !
Cet art intermédiaire ou d’imitation est à l’art vrai, c’est-à-dire à l’art inspiré par une époque, ce que nous disions tout à l’heure que l’industrie était par rapport à l’art lui-même. […] Ils ont écrit par une inspiration aussi vraie, aussi actuelle que les auteurs de l’Iliade, ou ceux du Romancero. […] Il est bien vrai qu’un lien d’étroite affinité est déjà formé pour une grande partie de la famille humaine ; l’Écosse et l’Amérique, toutes reculées qu’elles sont, reçoivent les pulsations du cœur ; et le cœur, c’est la France. […] Je le répète, l’un généralise la vie, et l’autre l’individualise : voilà leur vraie et fondamentale distinction. […] L’une répond à l’état vrai de l’Humanité de notre temps ; c’est le fond noir et profond du cœur humain dans notre époque.
Il ajoutait encore, que c’était une faute de manger des radis, au commencement du repas, qu’il fallait les manger entre tous les services, et comme cela le radis était un vrai précipitant de la digestion, et le meilleur balai de l’estomac. […] Rachel descend tout en larmes, et dans l’affliction la plus vraie, mais un quart d’heure ne s’était pas passé, que l’artiste était toute à l’étude de l’agonie de la femme, qui était devenue pour elle une étrangère, un sujet. […] En effet, les choses de la nature ne sont-elles pas tout aussi vraies, vues dans le clair de lune, que dans un rayon de soleil de midi ? […] Pas un mot de vérité vraie, des modernes de contes de fée, mais vus avec une optique toute particulière à l’homme : l’optique de l’hyperterrestre funambulesque. * * * — Il est peut-être possible que quelques honnêtes gens n’aiment pas le vrai en littérature, mais on peut être certain que tous les malhonnêtes gens l’abominent.
Comme secrétaire perpétuel et historien de l’Académie, il n’a écrit qu’un court chapitre, assez piquant d’ailleurs, dans lequel il insiste beaucoup sur l’égalité académique, égalité qu’il contribua plus que personne à maintenir lors de l’élection du comte de Clermont (prince du sang) dans la compagnie : La liberté que le roi nous laisse, dit-il, et l’égalité académique sont nos vrais privilèges, plus favorables qu’on ne le croit à la gloire des lettres, surtout en France où les récompenses idéales ont tant d’influence sur les esprits. […] Dès qu’un auteur produit une idée nouvelle, elle est aussitôt reçue comme vraie ; la nouveauté seule en est le passeport. […] En rassemblant ces divers faits un peu disparates, j’ai senti plus d’une fois combien le caractère d’un homme est compliqué, et avec quel soin on doit éviter, si l’on veut être vrai, de le simplifier par système. […] Auger a fait remarquer qu’il y est parlé des femmes au chapitre de la Réputation ; il n’en est pas moins vrai que l’omission générale subsiste.
j’ai un si grand faible pour le talent qu’il n’est pas jusqu’à ce diable de Veuillot à qui je ne pourrais m’empêcher, je crois bien, de donner ma voix s’il se présentait. » Voilà le vrai littérateur, libre d’esprit, comme je voudrais être. […] — Cet autre homme, lui, est chrétien ; il admet la divinité, une émanation plus ou moins directe de la divinité, une inspiration d’en haut dans la vie, dans les actes et les paroles du Christ : mais il se permet de rechercher quels ont été au vrai ces actes et ces paroles ; il étudie les témoignages écrits, les textes ; il les compare, il les critique, et il arrive par là à une foi chrétienne, mais non catholique comme la vôtre : homme pur d’ailleurs, de mœurs sévères, de paroles exemplaires : et cet homme-là, parce qu’il ne peut en conscience arriver à penser comme vous sur un certain arrangement, une certaine ordonnance, magnifique d’ailleurs et grandiose, qui s’est dessinée surtout depuis le ve siècle, vous l’insulterez, vous l’appellerez à première vue blafard en redingote marron ! […] Ce sont de ces choses qui me causent une vraie douleur quand je les lis chez M. […] Veuillot distingue deux veines et deux courants dans la littérature française, le courant gaulois, naturel, et ce qu’il appelle l’influence sacrée, religieuse, épiscopale : il fait à celle-ci, pour la gravité et l’élévation, une part bien légitime ; il est ingrat pourl’autre, pour le vrai et naïf génie national qu’il sent sibien, qu’il définit par ses heureux caractères, et que tout à coup il appelle détestable, se souvenant que ce libre génie ne cadre pas tous les jours avec le Symbole.
Cet écrivain si distingué, le premier des critiques de guerre proprement dits, qui avait produit son ouvrage de génie à vingt-six ans, et que la nature fit naître par une singulière rencontre dans le temps où elle venait d’enfanter le plus merveilleux des guerriers (comme si elle avait voulu cette fois qu’Aristarque fût le contemporain et le témoin de l’Iliade), Jomini a éclairé, en fait de guerre, tout ce qu’il a traité ; mais il n’en est pas moins vrai que la narration précise, détaillée, de ces trois campagnes pyrénéennes, l’histoire et la description de chacune des opérations qui les composent, écrite d’après les pièces et documents originaux, et vérifiée point par point sur les lieux, restait à faire, et M. […] Les vœux de tous les vrais soldats et de la population elle-même l’accompagnèrent. […] Mais, arrivé à Perpignan, il y trouva Dugommier, un vrai général en chef, une tête et un bras dignes du commandement, et il se contenta de retourner dans sa Cerdagne y faire le diable à quatre comme devant. […] il avait trouvé des troupes sans instruction, sans lien et sans cadre, de vraies cohues : il sut les aguerrir en s’en faisant adorer.
Après avoir, par ses premières œuvres, payé sa dette à la patrie allemande en vrai fils du Nord, il était allé « s’asseoir au banquet des Grecs », et il ne s’en était plus guère écarté. […] Lisant une des histoires quelconques de Napoléon qu’on publiait alors, il fait cette remarque, si justifiée depuis : « Le héros n’en est pas diminué ; au contraire, il grandit à mesure qu’il devient plus vrai. » Il essaye de lire Bourrienne, et le livre bientôt lui tombe des mains : « Cela », dit-il, « tiraille des brins à la frange et aux broderies du manteau impérial, déposé d’hier, et cela croit par là devenir quelque chose ! […] Il y a eu, il est vrai, un temps en Allemagne où l’on se représentait un génie comme petit ; faible, voire même bossu ; pour moi, j’aime un génie bien constitué aussi de corps. — Quand on a dit de Napoléon que c’était un homme de granit, le mot était juste, surtout de son corps. […] Ce sont, hommes et femmes, des marionnettes incapables de vivre ; elles ont des proportions habilement conçues, mais, sur leur charpente de bois ou d’acier, ces poupées n’ont absolument que du rembourrage ; l’auteur les fait manœuvrer sans pitié, les tourne et les disloque dans les positions les plus bizarres, les torture, les fustige, déchire leur âme et leur corps, et met sans pitié en pièces et en morceaux ce qui, il est vrai, n’a aucune chair véritable : — et tout cela est l’œuvre d’un homme qui montre de grandes qualités d’historien éloquent, et auquel on ne peut refuser une vive puissance d’imagination, sans laquelle il lui serait impossible de produire de pareilles abominations. » — Vous qui parlez sans cesse de liberté, qui la voulez dans l’art et en tout, soyez conséquents ; sachez admettre et supporter les manières de sentir, même les plus opposées à la vôtre, quand elles sont sincères.
Mais M. de Senfft est un de ces hommes qu’on ne peut bien connaître sans connaître aussi sa femme ; car il lui était entièrement attaché, dévoué et même jusqu’à un certain point soumis ; il l’était parce qu’il appréciait en elle les plus hautes vertus, les plus tendres délicatesses ; il avait pour elle un vrai culte comme on en aurait pour une femme qu’on n’aurait adorée qu’à distance, comme pour une Laure ou une Béatrix. […] Une vénalité tempérée par de la modération et de la sagesse, une part faite à la corruption à laquelle on trace d’avance ses limites et que l’on subordonne à des intérêts supérieurs, on m’assure que c’est bien le vrai sur M. de Talleyrand ; M. de Senfft, qui est de cet avis, ne veut voir là qu’une simple tache, et il estime que M. de Talleyrand n’en gardera pas moins, pour de certaines résistances, « sa place glorieuse dans l’histoire. » Cela est possible ; mais c’est bien le cas de dire qu’il y a deux morales. […] Son ambition était d’une trempe au-dessus du commun et s’élevait vers la vraie gloire qui était son idole. […] Pendant que M. de Senfft, à la veille de l’éclatant démenti de l’histoire, se montre ainsi à nous un peu la dupe des confidences de Fouché qui, évidemment (comme l’abbé de Pradt, et avec plus de malice), était entré dans ses vues, avait médit du pouvoir qu’il servait et ne s’était pas fait faute de gémir sur les folies du maître, il m’a paru curieux de citer une lettre de Napoléon adressée, vers ce temps, à son ministre de la police, et qui, dans sa sévérité encore indulgente, va droit au défaut de l’homme, rabat fort de cette haute idée trop complaisante et remet à son vrai point ce prétendu génie du duc d’Otrante, un génie avant tout d’ingérence audacieuse et d’intrigue.
Il est vrai qu’à la fin la plupart attendent un Messie sous une tout autre forme que la véritable, et qu’ils ne le conçoivent que sous la figure d’un guerrier, d’un roi-pontife à la manière des Macchabées, et d’un libérateur terrestre. […] Le vrai Dieu était généralement ignoré, bien que le désir et l’idée s’en fissent sentir à quelques âmes. […] La vie de Jésus, le scandale qu’il cause par sa prédication et sa vertu même, l’attentat commis en sa personne par la Synagogue, sa condamnation et son supplice, sont résumés en une page touchante : « Le Juste est condamné à mort : le plus grand de tous les crimes donne lieu à la plus parfaite obéissance qui fut jamais. » — Autant j’ai pu paraître en garde précédemment, autant je dirai ici en toute conviction que ces pages admirables par la simplicité et la beauté morale de l’expression sont en bonne partie vraies, de quelque côté qu’on les envisage. […] De même sur les Macédoniens et sur Alexandre : chez Bossuet, c’est une première et large vue ; l’homme est bien compris dans son ensemble et posé avec son vrai caractère en termes magnifiques ; l’historien orateur est égal à son sujet, à son héros ; ce portrait d’Alexandre est un portrait d’oraison funèbre ; il a le mouvement et comme le souffle oratoire : chez Montesquieu, les raisons de la politique et du génie d’Alexandre sont bien autrement recherchées et déduites ; c’est bien autrement expliqué ; chaque parole frappe comme un résultat, et l’expression est vive, figurée ; le tout gravé en airain : c’est un long bas-relief d’Alexandre.
L’auteur, il est vrai, ne les écrivit pas de suite et avec continuité ; il y revint à plus d’une reprise et comme par époques, sans se soucier beaucoup des liaisons. […] Le vrai moment social de M. […] Je sais toutes les exceptions qu’on peut faire, elles me reviennent et se lèvent devant moi en ce moment : je salue tous ces grands beaux hommes spirituels ; mais en fait il n’en est pas moins vrai que cela semble une singularité de trouver l’esprit d’un abbé Galiani dans le corps d’un grenadier. […] Il est vrai que M.
Il n’est pas moins vrai que le jeune abbé malgré lui, fier et délicat comme il était, dut ressentir avec amertume l’injustice des siens : quoique d’un rang si distingué, il entrait dans le monde sous l’impression d’un passe-droit cruel dont il eut à dévorer l’affront ; il se dit tout bas qu’il saurait se venger du sort et fixer hautement sa place, armé de cette force qu’il portait en lui-même, et qui déjà devenait à cette heure la première des puissances, — l’esprit si la théologie avait pu être en passant une bonne école de dialectique, il faut convenir encore que cette nécessité où il se vit aussitôt de remplir des fonctions sacrées, sans être plus croyant que l’abbé de Gondi ; que cette longue habitude imposée durant les belles années de la jeunesse d’exercer un ministère révéré et de célébrer les divins mystères avec l’âme la moins ecclésiastique qui fût jamais, était la plus propre à rompre cette âme à l’une ou l’autre de ces deux choses également funestes, l’hypocrisie ou le scandale. […] L’anecdote est digne d’être vraie, et la porte d’entrée était bien choisie. […] Jugeant les hommes avec indulgence, les événements avec sang-froid, il a cette modération, le vrai caractère du sage… « Amène ne songe pas à élever en un jour l’édifice d’une grande réputation ; parvenue à un haut degré, elle va toujours en décroissant, et sa chute entraîne le bonheur, la paix ; mais il arrivera à tout, parce qu’il saisira les occasions qui s’offrent en foule à celui qui ne violente pas la fortune. […] Voltaire, — et j’entends le Voltaire du fond, de la pensée de derrière, tout ce qu’il y avait d’éclairé et de prophétique dans Voltaire, — eût été pour la Révolution, et je ne crois pas être loin du vrai en répondant : Talleyrand à l’Assemblée Constituante, c’est assez bien Voltaire en 89, un Voltaire moins irritable et sans les impatiences : mais aussi Voltaire avait de plus le feu sacré.
Mais à mesure que, dans ce bataillon des poëtes qui ne sont, ne peuvent ou ne veulent être que cela, on s’élève et on arrive à l’élite, à la vraie distinction, à l’état-major, il est bien difficile qu’on rencontre toujours d’obstinés et purs poëtes. […] Marie, je le dirai pour le petit nombre de ceux qui l’ignorent, est une jeune paysanne bretonne, que le poëte a aimée autrefois, dans son enfance, de cet amour de douze ans, le plus vrai, le seul vrai peut-être, puis qu’il a perdue de vue et qui s’est mariée dans le pays. […] On a fini, et l’on en voudrait encore ; il est vrai que, s’il y en avait davantage, on en demanderait toujours plus.
La reprise d’aujourd’hui a réussi ; on n’est pas tout à fait revenu aux larmes, mais on accorde de vrais applaudissements. […] Elle crut qu’une victoire obtenue sur l’amour le plus vrai et le plus tendre ennoblissait le sujet, et en cela elle ne se trompait pas ; mais elle avait encore un intérêt secret à voir cette victoire représentée sur le théâtre : elle se ressouvenait des sentiments qu’elle avait eus longtemps pour Louis XIV et du goût vif de ce prince pour elle. […] Quatremère de Quincy, a fait comprendre à merveille que les statues, les objets d’art de la Grèce, rangés et classés dans nos musées, n’avaient ni tout leur prix ni leur vrai sens ; que, voués avant tout à une destination publique et le plus souvent sacrée, c’était dans cet encadrement primitif qu’il fallait les replacer en idée et les concevoir. […] Il est vrai qu’on peut, au premier abord, opposer que ce Titus, non plus qu’Énée de qui il tient, n’est assez passionnément amoureux ; que, s’il l’était davantage, il céderait peut-être.
Nécessairement celui qui les présente a dû les choisir ; et jamais il ne peut s’établir une confiance assez grande entre l’auteur le plus vrai, le plus exempt de préjugés, et le lecteur le plus indulgent ou le plus docile, pour que le choix des faits ne soit pas sujet au moins à être discuté. […] Une idée acquise est une vraie conquête ; et, une fois entrée dans le monde, cette idée ne peut plus y périr. […] Il est vrai de dire aussi que nos rois ont, dans tous les temps, marché en avant de la civilisation européenne, parce qu’ils furent, dans tous les temps, guidés par cet admirable sentiment de la magistrature éminente attribuée à la nation française sur tous les peuples de l’Europe, magistrature qu’il est impossible de nier, puisqu’elle est prouvée par les excès mêmes où elle est souvent tombée, puisqu’elle est revêtue d’un signe extérieur, l’universalité de la langue. […] N’oublions pas surtout qu’il y a chez la plupart des hommes, ainsi que nous l’avons déjà remarqué, deux sortes d’opinions bien distinctes, bien spontanées, également vraies et intimes, et au-delà de tout calcul ou de tout retour personnel.
Cette biographie, qui pouvait ne pas être du tout, — car l’histoire des hommes célèbres par leurs ouvrages n’est souvent que dans leurs ouvrages, et Voltaire même a fait une loi (fausse, il est vrai, parfois), de ne la chercher que là, — cette biographie s’est trouvée, par hasard (cette étoile de Sterne !) […] Son père à lui, Sterne, officier, mourut des suites d’un coup d’épée, reçu pour une oie, qui n’était pas une femme, mais une vraie oie. […] Stapfer montre que Rabelais, le grand Rabelais, à qui les esprits qui contestent Sterne ne refusent pas le respect, n’est pas moins déraisonnable et inintelligible, à certaines pages de son Épopée, que Sterne à certaines pages décousues de son roman de Tristram Shandy ; mais il prouve à merveille que ni la valeur ni le vrai génie de Sterne et de Rabelais ne sont dans ces pages. […] Sterne n’est pas là, c’est trop évident, le Sterne du Voyage sentimental et du Tristram, le vrai Sterne enfin ; car, puisqu’il s’agit d’une œuvre de la pensée, la personnalité de l’auteur ne peut être que dans son génie.
Tout ce qui n’est pas concevable pour nous-mêmes n’est ni vrai ni vraisemblable à nos yeux. […] Nous pouvons donc conclure que, si le réel est le vrai dans la présentation des phénomènes, il n’est pas toujours le vrai dans la représentation de ces mêmes phénomènes. […] comme c’est vrai ! […] Mais enfin tel trait qui, dans son jeu, eût paru extravagant il y a vingt ans, paraîtrait aujourd’hui vrai et naturel. […] Sur la scène, on ne bâtit pas de vraies maisons, on ne plante pas de vrais arbres, on ne déroule pas de véritables flots, on ne pousse pas dans le ciel de vrais nuages, etc. ; on ne nous donne de toutes ces choses que des imitations.
Je regrettais enfin qu’il m’eût parlé avec une espèce de dédain de l’abbé Jouffroy, son parent, très médiocre professeur, il est vrai, mais excellent homme et qui avait été pour lui un second père : c’était, selon moi, pousser un peu loin le zèle d’un nouveau converti. Il est très vrai qu’il appartenait à une famille essentiellement catholique, et même contre-révolutionnaire.
Lucrèce, jouée samedi dernier, a eu, je le répète, un vrai succès ; la foule était accourue à cet Odéon désert. […] Les trois cents exemplaires ont été épuisés le second jour : un vrai, louable et charmant succès.
Il n’est que trop vrai, en effet, que le Journal des Débats, depuis des années, ne cesse de contrevenir et de faire défaut de plus en plus au rôle important qu’il lui convenait de tenir : la Presse dit très-insolemment de lui : « Il a l’expérience de la vieillesse, mais il en a aussi la corruption, l’ironie et la stérilité. […] De loin, à nous humbles esprits, il nous semble que, malgré tout, la partie n’est point perdue pour la cause des Lettres honnêtes et sévères, et que ce drapeau si bruyamment déployé par des spéculateurs intrépides peut au contraire servir de signal à tous les esprits modérés et sains, à tous les talents restés sérieux et dignes, pour s’unir, se serrer en groupe, et pour résister à un coup de main qui tend à changer ainsi de fond en comble le régime et les conditions vraies de la littérature.
Victor Hugo, en répondant, a eu un vrai succès dans la première partie de son discours ; mais bientôt un grand lieu commun sur les femmes a un peu dérouté les auditeurs ; puis est venu l’éloge des lettrés, et une espèce de tableau idéalisé de ce que c’est que l’Académie ; c’était tout à fait une transfiguration. […] La morale elle-même, qu’il affecte, est chez lui une forme plutôt qu’un but, ou du moins il vise non pas tant à atteindre les vrais ressorts de l’homme qu’à user et à jouer de ces ressorts pour l’art de la vie.
. — Tant est vrai le mot que m’écrivait l’autre jour dans sa modestie un homme d’un beau nom et d’un vrai mérite, qui vient de donner une bonne édition de l’un des classiques épistolaires du xviie siècle : « Je sens mieux de jour en jour combien il faut savoir de choses pour parler de n’importe quoi sans dire une bêtise !
On voit dans la querelle des Anciens et des Modernes, où Racine et Boileau défendent Homère contre Perrault, combien il y avait peu, de part et d’autre, de sentiment vrai de l’antique. […] Vous connaissez l’Orphée, et je n’ai point à vous en parler ; mais à Ballanche, à Quinet (dans son Voyage en Grèce), il manque un peu trop, pour correctif de leur philosophie concevant et refaisant la Grèce, quelque chose de cette qualité grecque fine, simple et subtile, négligée et élégante, railleuse et réelle, de Paul-Louis Courier, ce vrai Grec, dont la figure, la bouche surtout, fendue jusqu’aux oreilles, ressemblait un peu à celle d’un faune.
Il semble que, quand elle revient au logis du poète, elle pose sa cruche à côté d’un broc de clairet, un peu faible, mais savoureux, sentant fort son terroir, pas traître, sans ivresse profonde, sans bouquet complexe (en tout cas, c’est du vrai vin), que le poète a été chercher dans son cellier ; et il tend tour à tour à son lecteur le gobelet de vin et le verre d’eau. […] Gabriel Vicaire est, aujourd’hui, le vrai poète folkloriste traditionnel, accomplissant pour la poésie ce que réalise pour la musique M.
Le vrai individualisme, celui qui ne rampe pas sur le ventre, celui qui dans un temps aussi ignoble que le nôtre tenait debout les stoïciens, ignore les préoccupations utilitaires. […] Affranchis des servitudes matérielles et morales, des espérances, des craintes et des dogmes, seuls nous avons la vraie liberté.
Seroit-il permis d’ajouter, que peu de Littérateurs ont eu le coup-d’œil plus juste pour découvrir les défauts d’un Livre, le tact plus fin pour en sentir les négligences & les beautés, qu’il a été long-temps le seul des Journalistes qui relevoit les fautes de langage aujourd’hui si communes, & qui, en matiere de style, ait su plus finement distinguer le simple du bas, le naturel du recherché, le sublime de l’enflure, le vrai du faux ? […] Freron nous apprend, il est vrai, « qu’il avoit à craindre le mécontentement de plusieurs puissans Mécènes pleins d’entrailles pour leurs chers petits Rimailleurs, ou leurs insipides Romanciers ; que ses amis ont été cent fois le trouver lorsqu’il paroissoit un Ouvrage nouveau, pour l’engager à n’en pas dire du mal, parce que l’Auteur étoit vivement protégé par tel Prince, ou tel Duc, ou telle Dame, qui ne manqueroit pas d’employer contre sa personne & son Journal toutes les ressources du crédit* ».
A peine cet Ecrivain a-t-il été hors de France, que, profitant de la liberté des presses étrangeres, il a écrit contre ses ennemis, & les a peints sous les couleurs les plus vraies. […] Linguet l’a bien senti lui-même par le désaveu glorieux qu’il en a fait, & par les éloges vrais qu’il a donnés depuis à ce grand homme d’Etat, dont la Nation & les Etrangers admirent également la sagesse & la probité ; qui ne doit son élévation qu’à son mérite ; dont tous les pas dans la carriere politique, où il est entré dès l’âge le plus tendre, ont été marqués par des services rendus à la Patrie ; qui, malgré sa grande modestie, jouit de toute sa réputation ; & dont la gloire, appuyée sur l’estime générale de ses contemporains, ne pourra qu’augmenter par la succession des temps.
Agamemnon, il est vrai, exige d’Iphigénie le double sacrifice de son amour et de sa vie, et Lusignan ne demande à Zaïre que d’oublier son amour ; mais pour une femme passionnée, vivre, et renoncer à l’objet de ses vœux, c’est peut-être une condition plus douloureuse que la mort. […] Quant à la peinture du vice, elle peut avoir dans le christianisme la même vigueur que celle de la vertu, puisqu’il est vrai que le crime augmente, en raison du plus grand nombre de liens que le coupable a rompus.
Il est étrange, et cependant rigoureusement vrai que tandis que nos pères étaient des barbares pour tout le reste, la morale, au moyen de l’Évangile, s’était élevée chez eux à son dernier point de perfection : de sorte que l’on vit des hommes, si nous osons parler ainsi, à la fois sauvages par le corps, et civilisés par l’âme. […] Or, le vrai et l’idéal sont les deux sources de l’intérêt poétique : le touchant et le merveilleux.
Il est si vrai que le christianisme jette une éclatante lumière dans l’abîme de nos passions, que ce sont les orateurs de l’Église qui ont peint les désordres du cœur humain avec le plus de force et de vivacité. […] Ce toit, ce foyer hospitalier, où naguère elle accueillit l’ingrat, sont donc les vrais dieux pour Didon.
Ventura, homme d’immense doctrine, de foi profonde, de vigueur de parole, un vrai lion évangélique enfin, n’aurait-il pas pu se reposer de ses travaux de prédicateur en nous écrivant cette majestueuse histoire ? […] Les héroïnes de Michelet, toutes ces femmes modernes qui ne sont pas de vraies chrétiennes, toutes ces femmes plus ou moins libres, avec les droits politiques qu’elles rêvent ou jalousent, avec leurs vaniteuses invasions dans les lettres et dans les arts, avec cet amour de la gloire, le deuil éclatant du bonheur, disait madame de Staël, et qui est le deuil aussi de la vertu ; toutes ces femmes, il ne faut pas s’y tromper !
Incapables d’atteindre encore une telle idée par le raisonnement, ils la conçurent par un sentiment faux dans la matière, mais vrai dans la forme. […] Les victimes humaines sont appelées dans Plaute, victimes de Saturne, et c’est sous Saturne que les auteurs placent l’âge d’or du Latium ; tant il est vrai que cet âge fut celui de la douceur, de la bénignité et de la justice !
Cette idée seule d’une tendresse enfantine (dont tu ris maintenant avec raison, et qui cependant pourrait servir de matière à de jolis vers) est gracieuse et vraie. […] Et quant à ceux qui sont dignes de l’aimer et qui lui feraient honneur par de vrais talents, l’orgueil trop souvent les entête du premier jour ; sauf deux ou trois grands noms qu’ils mettent en avant par forme et où ils se mirent, les voilà qui se comportent comme si tout était né avec eux et comme s’ils allaient inaugurer les âges futurs. […] Les ligueurs modérés, comme Villeroy et Jeannin, se rangeront même un jour sous ce drapeau qui deviendra celui de Henri IV et de Sully. » Voilà le vrai, le sens commun en pareille matière, et Charles Labitte l’a su rafraîchir de toutes sortes de raisons neuves et revêtir de textes peu connus. […] Elle me donne le droit de ne plus croire qu’à très-peu de choses, de me lier aux idées plutôt qu’aux hommes, de rire des sols, de mépriser les fripons de toute nuance, de me réfugier plus que jamais dans l’idéale sphère du vrai, du beau, du bien, et d’avoir à cœur encore les bonnes, les vieilles, les excellentes amitiés de quelques fidèles. […] Et si l’on trouvait que je vais bien loin, en appliquant cette gracieuse image à une production quelque peu rabelaisienne, qu’on se rappelle, entre autres, ce riant et beau passage : « Le Roy que nous demandons est déjà fait par la nature, né au vrai parterre des fleurs de lys de France, rejeton droit et verdoyant du tige de saint Louis.
La Fontaine est si pénétré des vrais caractères de ces animaux, qu’il change la morale primitive plutôt que de les altérer. […] Le vrai lapin est brusque, étourdi, gourmand, très-mauvais père, capable même d’étrangler ses petits, très-égoïste ; pourvu qu’il puisse « brouter, trotter, faire tous ses tours », il se soucie peu du reste. […] Ce chef demeurerait lui-même avec le reste du troupeau, s’il n’était chassé par le berger ou poussé par le chien. »133 Tout cela est vrai, mais ces animaux sont affectueux et bons. […] Toutes les aventures d’Ysengrin finissent de même ; et ce portrait demi-sérieux, demi-moqueur, est plus vrai que la sombre et terrible peinture de Buffon : « Il est l’ennemi de toute société, il ne fait pas même compagnie à ceux de son espèce. […] Buffon a disséqué, un peu tard il est vrai, mais enfin il sait dix fois plus de détails que La Fontaine.
Tant il est vrai que le sentiment de l’art est inaccessible au mensonge, et que les poupées se sentent mal à l’aise devant les statues. […] Mais qu’il est vrai et terrible, dans sa crudité ! […] Qu’est-ce que la baronne d’Ange du Demi-Monde, l’Albertine du Père prodigue, sinon la Dame aux Camélias démasquée de son auréole, dépouillée de son idéal, montrée, non plus dans l’exaltation éphémère d’un sentiment vrai qui la transfigure, mais dans sa corruption normale et dans l’exercice régulier de sa profession ? […] C’est une figure toute neuve, au théâtre, que celle de ce comte de Lys, vrai Taciturne du mariage, ni sympathique ni odieux, ni attrayant ni blâmable, abstrait comme le droit, patient comme la force, inexorable comme la justice et tuant, comme elle, dans un cas prévu, à heure fixe, la montre en main, sans émotion et sans colère. A vrai dire, il n’assassine pas l’amant de sa femme, il le fusille légalement, militairement, parce que l’adultère est la guerre, et qu’a cette guerre-là il est presque toujours ridicule de faire des prisonniers.
Eschyle est de ces hommes que le critique superficiel raille ou dédaigne, mais que le vrai critique aborde avec une sorte de peur sacrée. […] Dans le vrai critique il y a toujours un poëte, fût-ce à l’état latent. […] Ces figures grossissantes, propres aux poëtes suprêmes, et à eux seuls, sont vraies, au fond, d’une vérité de rêverie. […] Elle devient vraie et reste démesurée. […] Réduction de Thalès et de Pythagore au vrai immédiat, telle était l’opération.
Le poète des Amoureuses a ôté aussi un conteur charmant dans son roman du Petit Chose, sous le nom duquel on a lu le vrai nom du Little Moore français. […] On a la bonté d’admettre qu’il peut émouvoir et qu’il peut être ému, dans la mesure, il est vrai, de son organisation de Petit Chose. […] L’ironie, qui est une ride, au moins, et quelquefois une grimace, n’est pas faite pour ce jeune, aimable et franc visage, dans lequel la larme qui tombe des yeux est aussi vraie que le sourire qu’elle vient mouiller. […] Sans cette faculté d’attendrissement, il resterait, je n’en doute pas, par son fond, mortellement antipathique aux esprits élevés et délicats, le vrai, le seul public pour un écrivain de la race de Daudet. […] XI Ce roman — on l’a dit, et il y a une note à la fin du volume qui répond à ce bruit, — a été inspiré par des aventures vraies.
et leur langage, fut-il vrai pour nous, peut-il être bon pour traduire Hérodote ? […] Il serait impossible de tirer de là une peinture fidèle, un sentiment vrai, une seule expression naturelle et vive. […] J’ai mon excuse pour ne pas te mêler ainsi à des génies grands, il est vrai, mais sans proportion avec toi. […] Ce n’est pas que Shakspeare soit toujours naturel et vrai. […] Depuis Homère jusqu’à Dante, depuis le Tasse jusqu’à Racine, l’âme du vrai poète a toujours mêlé ses tons divers.
Mais il pratiquait cette charité moins facile qui va droit au vrai malheur. […] Les vrais connaisseurs ne s’y sont jamais trompés. […] Ces montagnes nues, vrais prédicateurs, te donnent naïvement de leurs sommets arides la révélation trop vraie de l’état presque universel des hommes. […] Son irritation nerveuse l’emportait trop loin et l’égarait au-delà du vrai et du juste. […] La Henriade, il est vrai, paraissait lui donner raison.
Il est vrai qu’ils durèrent peu. […] Nous n’avons plus qu’un moment pour le trouver encore simple homme de lettres : il est vrai que ce court moment ne fut pas perdu et va nous le montrer sous un nouveau jour. […] vraies paroles d’oracle ! […] » Mot charmant, dont une moitié au moins reste plus vraie qu’on n’ose le dire ! […] Ils étaient vrais il y a vingt ans, ils le seront dans soixante : mais ils ne le sont pas aujourd’hui.
Toute sa méthode tient dans cette recherche de la relation vraie entre l’œuvre et l’homme. […] J’ignore si c’est vrai. […] C’est un paradoxe, semble-t-il, mais il est vrai. […] Tant il est vrai que tous les génies s’apparentent par une discipline identique. […] Il est vrai aussi dans le domaine des réalités naturelles.
La chaleur modérée de tant de nobles œuvres, l’épuration continue qui s’en était suivie, la constance enfin des astres et de la saison, avaient amené l’atmosphère des esprits à un état tellement limpide et lumineux, que du prochain beau livre qui saurait naître, pas un mot immanquablement ne serait perdu, pas une pensée ne resterait dans l’ombre, et que tout naîtrait dans son vrai jour. […] Si heureux d’emblée qu’eût été La Bruyère, il lui fallut, on le voit, soutenir sa lutte à son tour comme Corneille, comme Molière en leur temps, comme tous les vrais grands. […] , il nous dit, dans cet admirable chapitre des Ouvrages de l’Esprit, qui est son Art poétique à lui et sa Rhétorique : « Entre toutes les différentes expressions qui peuvent rendre une seule de nos pensées, il n’y en a qu’une qui soit la bonne : on ne la rencontre pas toujours en parlant ou en écrivant ; il est vrai néanmoins qu’elle existe, que tout ce qui ne l’est point est foible et ne satisfait point un homme d’esprit qui veut se faire entendre. » On sent combien la sagacité si vraie, si judicieuse encore, du second critique, enchérit pourtant sur la raison saine du premier. […] On se révolte, il est vrai, de temps à autre, contre ces belles réputations simples et hautes, conquises à si peu de frais, ce semble ; on en veut secouer le joug ; mais, à chaque effort contre elles, de près, on retrouve cette multitude de pensées admirables, concises, éternelles, comme autant de chaînons indestructibles : on y est repris de toutes parts comme dans les divines mailles des filets de Vulcain. […] Il est vrai que ses mille écus de pension comme homme de lettres de M. le Duc et le logement à l’hôtel de Condé lui procuraient une condition à l’aise qui n’a point d’analogue aujourd’hui.
Que le lecteur s’observe lui-même lorsqu’il voit une comédie nouvelle de Dumas fils ; vingt fois par acte, nous avons une ou deux minutes d’illusion complète ; il y a telle phrase vraie, imprévue, qui, soutenue par le geste, l’accent, les alentours appropriés, nous y conduit. […] Voilà le fait brut, et l’on voit que le souvenir, comme la perception extérieure, est une hallucination vraie, c’est-à-dire une illusion qui aboutit à une connaissance. […] Il est une connaissance, en ce que, dans le passé et justement à l’endroit convenable, il se rencontre une sensation exactement semblable à la sensation affirmée, et qu’ainsi notre jugement, qui, en lui-même et directement, est faux, se trouve vrai indirectement et par une coïncidence. — Ici encore, la nature nous trompe pour nous instruire. […] C’est pourquoi, lorsque, comme eux, elle subit la répression des sensations contradictoires, elle est contredite, non pas partiellement comme eux, mais absolument, et ne peut apparaître que comme sensation située nulle part, c’est-à-dire comme sensation simplement apparente et dépourvue de l’existence vraie. […] Il n’en est pas moins vrai qu’on ne sait plus où l’on est. » Il ajoute plus loin : « Souvent cette vision se fait lentement, pièce à pièce, comme les diverses parties d’un décor que l’on pose » ; mais, souvent aussi, elle est subite, « fugace comme les hallucinations hypnagogiques.
C’est un vrai gentleman, et puis il est damné de toute éternité, ce qui le rend intéressant. […] Il est vrai que M. […] Mais il est vrai aussi que son explication est difficile à suivre. […] Il n’y a pas tout à fait réussi, pour plusieurs raisons ; la première est que cela n’est peut-être pas vrai. […] Si la philosophie littéraire qui aboutit au seul naturalisme est fausse, celle qui aboutit au seul symbolisme risque de n’être pas plus vraie.
Si l’art est l’expression des vérités générales dans un langage définitif, les vérités de cet ordre et les termes qui ont servi à les exprimer n’étant pas sujets à changer ni à périr, il suit que l’histoire d’une littérature est l’histoire de ce qui n’a pas cessé, dans les œuvres littéraires d’une nation, d’être vrai, vivant, d’agir sur les âmes, de faire partie essentielle et permanente de l’enseignement public. […] Ne sommes-nous pas tous intéressés, pour notre conduite, principalement dans la vie publique, à savoir ce que notre nation a constamment tenu pour vrai, même après quelque oubli ou quelque dégoût qui ne faisait que rendre plus décisif son retour à ses habitudes ? […] Quelques-unes naissent spontanément et tout exprimées ; c’est la facile conquête de ceux qui sont nés sous une constellation heureuse : mais combien d’autres qui sont le fruit d’une poursuite ingrate ; qu’il faut remanier sans cesse ; qui, après avoir contenté un moment l’écrivain, le dégoûtent ; qui ne paraissent jamais qu’une image imparfaite du vrai, mais non le vrai lui-même ! […] Que de tours languissants et embarrassés se présentent avant le vrai tour, le seul qui doive donner à la pensée sa physionomie et son mouvement ? […] Elle s’est regardée successivement dans les images vraies ou prétendues de son propre esprit.
Leur seule conquête a été critique, c’est-à-dire psychologique197. » Déplorer l’usurpation de la science sur la métaphysique, dans la recherche du vrai, et préférer la dernière, c’est ressembler à un homme qui, voulant aller en Amérique, et trouvant le voyage à pied plus poétique que la vapeur, se mettrait à marcher résolument, sans souci de l’Atlantique qui l’en sépare. […] Un raisonnement exact est la réunion idéale d’objets dans leurs vrais rapports de coexistence et de succession : c’est voir avec l’œil de l’esprit. […] En résumé, « une proposition est absolument vraie quand ses termes sont équivalents, et alors seulement. […] Elle est morte et devait mourir, car elle n’avait ni but, ni vraie méthode. […] Il est vrai que par une ambiguïté déplorable de langage, il peut conduire à comprendre que la pensée est une sécrétion, tandis qu’en réalité il voulait dire qu’elle est une fonction.
Schiller et Goethe (c’était là leur crime) avaient traversé le moyen âge sans s’y emprisonner ; leur vrai domaine, c’était le présent et l’avenir. […] Si l’auteur, dans son indifférence, n’avait pas retracé deux ou trois scènes indignes d’une plume qui se respecte, le vrai caractère de son livre serait moins l’excitation au mal que l’épouvantable châtiment de l’adultère. […] Flaubert, en fin de compte, ne méritait donc pas tous les anathèmes qu’il a essuyés ; il est vrai qu’il en soulevait bien d’autres. […] Parlons sérieusement : aux prises avec l’impossible, l’auteur de Salammbô s’est senti arrêté à chaque pas, et, violant les conditions du vrai savoir, il a passé outre avec une intrépidité de matamore. […] Il se pourrait d’ailleurs que chaque détail fût vrai en lui-même et l’ensemble absolument faux.
monsieur, on dit que vous ne venez qu’à deux heures à votre bureau… — Il est vrai, monsieur le comte ; j’arrive un peu tard ; la rue Sainte-Avoie est si loin du faubourg Saint-Honoré où je demeure ! […] Mais il se trouve que ce jeune auteur, ami du père de la jeune personne, est un vieillard de soixante ans qui a fait dans sa jeunesse (à dix-sept ans, il est vrai, et il y en a plus de quarante) cette pièce qu’un tour de faveur si tardif vient d’exhumer. […] Ici l’auteur de circonstance, le romancier pamphlétaire a disparu, et le poète est entré dans le vrai de son sujet. […] M. de Latouche eut l’honneur de la deviner tout d’abord, de lui indiquer sa vraie voie et de lui rendre les premiers pas plus faciles. […] Il levait les épaules et la jetait dans le feu, c’est vrai… La patience minutieuse au travail était portée chez lui à un excès fatal à sa santé comme à ses succès.
. — S’il est vrai que l’univers entier obéit à un rythme souverain que l’astronome constate dans la marche des soleils et que le physicien retrouve dans l’infiniment petit de la matière, pourquoi serions-nous seuls à vivre au hasard ? […] S’il est vrai que l’humanité ne vit pas au hasard, si les principes ne sont pas une phrase, mais qu’ils ont en eux une logique, si les grands hommes que nous vénérons méritent cette vénération, si l’homme conscient est supérieur à la bête, cette méthode est juste. […] Ce n’est pas la masse, c’est un individu qui crée le Parthénon, la Divine Comédie, et la Marseillaise ; c’est un individu qui trouve la formule d’un monde nouveau, formule absolument vraie pour lui qui l’a tirée de ses entrailles, et suffisamment vraie pour plusieurs générations ; et c’est un autre individu qui brise la formule vieillie, pour délivrer son âme et celle de ses frères de douleur. […] Quelque contradictoires que puissent paraître ces œuvres d’art successives, chacune d’elles est vraie ; étant œuvres de vie, elles convergent toutes, dans la même sincérité, comme autant de rayons, vers l’immortelle beauté de la vérité. […] Quand les chrétiens prétendent que le vrai socialisme est tout entier dans le christianisme, ils ont raison d’un certain point de vue ; et quand d’autres retrouvent ailleurs les éléments constitutifs du christianisme, ils ont raison aussi ; mais c’est de la pure théorie analytique qui ne tient pas compte de la mentalité des groupes et des temps.
Quiconque, des Pyrénées aux dernières bornes de l’horizon, estime le vrai courage, va laisser déserts l’Aragon et l’Espagne. […] Honorons, dans les vers d’Herréra, cette voix du peuple qui ne trompe pas sur la vraie politique d’un temps, et cet instinct généreux trop lent parfois à renaître et à triompher. […] C’était, sous le coup d’un vrai péril, l’élan spontané de quelques États chrétiens, pour couvrir l’Italie, en écarter l’esclavage, le meurtre et la peste, et, en rejetant les Turcs de l’Occident, effacer la dernière trace des invasions barbares. […] où la langue française a-t-elle plus d’imagination vraie et de hardiesse heureuse ! […] Le génie propre de la langue et, sans doute aussi, l’éclair d’un sentiment vrai dissipaient cette fois le nuage, et laissaient paraître le poëte.
A ces honorables sexagénaires, on aurait pu faire remarquer que M. d’Alton-Shée n’avait pas encore soixante ans ; que dans son geste, son allure, dans toute sa personne, il y a toute la prestesse et la vivacité d’un homme encore jeune : il est vrai que la vue lui fait défaut. Oui ; mais il a pris sa revanche par sa mémoire qu’il avait développée de bonne heure comme par pressentiment, qu’il a meublée de toutes sortes de beaux passages, de scènes dramatiques en prose et en vers, une vraie mémoire d’aveugle qui ressemble à celle des anciens poëtes et rapsodes, du temps où l’on n’écrivait pas ; il retient, il récite, il joue. […] Refoulé en quelque sorte sur lui-même, ce net et vaillant esprit a cherché à tirer parti de ses souvenirs ; mais écrire vrai n’est facile en aucun temps, et dans tout ce qui se rapporte à des confessions, celles qu’on fait de soi touchent de bien près à celles des autres.
A l’aspect de cette poursuite opiniâtre, on finit, il est vrai, par compatir à l’angoisse du poète, et par démêler sous ses efforts ce je ne sais quoi d’ineffable auquel il aspire. […] Car, nous l’avons dit, l’inspiration première en est constamment vraie et profonde. […] Hugo ne ressemble à aucun autre : à son air de prétention et d’apparat, on croirait voir une sorte de miles gloriosus, un vrai Bayard de tragédie.
Il faut se rappeler ici que la condition essentielle de la vraie critique est de comprendre la diversité des temps, et de se dépouiller des répugnances instinctives qui sont le fruit d’une éducation purement raisonnable. […] La foi ne connaît d’autre loi que l’intérêt de ce qu’elle croit le vrai. […] Une autre famille, il est vrai, alternait avec celle de Hanan dans le pontificat ; c’était celle de Boëthus 1026.
Le style en est simple et noble ; les pensées en sont justes et pleines de raison ; les sentiments en sont vrais, élevés et profonds : on peut dans ces écrits rendre tout à la fois une idée juste de la portée et des directions de la marquise de Rambouillet, et des conversations qui avaient lieu dans son intimité. […] « Il exige encore une franchise naïve et une coutume de dire vrai, aux choses même indifférentes, sans vaine ostentation, sans retenue affectée. […] Il croit que ce mot, chez les Romains, s’entendait principalement de la science de la conversation et du don de plaire en bonne compagnie ; que les Grecs ont abusé de cette connaissance, et que les seuls Romains, même en Italie, en ont connu le vrai et le légitime usage.
Les législateurs anciens étaient dirigés par de bien plus hautes raisons que celle qu’on leur suppose si gratuitement d’avoir voulu entretenir l’ignorance des peuples ; et, une fois pour toutes, ne devrait-on pas s’entendre sur la vraie et juste acception de ce terrible mot d’ignorance ? […] Nous avons, il est vrai, découvert un monde nouveau ; mais nous avons cessé de connaître l’intérieur de l’Afrique. […] Autrefois il suffisait de gouverner avec l’opinion ; à présent il faut gouverner par elle, sous peine de la laisser gouverner elle-même, ce qui constituerait une vraie anarchie.
Au milieu de la cacophonie d’un ouvrage où le récit croise la correspondance et la correspondance le dialogue, ce qui plane, ce qui domine et ce qui choque, c’est je ne sais quel ton cavalier dont le dessous et le vrai nom sont le sans-façon et l’impertinence historiques, — deux défauts et deux ridicules que la Critique ne peut laisser passer, du moins sans avertir ! […] Mais tous ces principicules allemands, qui jouaient au Louis XIV avec la rage de leur petitesse et de leur insignifiance, dans des Versailles de paravent, taillés sur le modèle du vrai Versailles, ne forçaient, eux, que le trait des mauvaises mœurs, et ne trouvaient pas dans une conscience en proie à l’orgueil et à la négation protestante une seule raison pour enrayer sur cette pente-là. […] Son mérite actuel a été de savoir l’anglais et l’allemand, — ce qui est honorable et souvent utile, mais ce qui n’est pas tout, car le mot célèbre de Charles-Quint n’est pas vrai en littérature… Dans ce mystère dévoilé de la mort du comte de Kœnigsmark, que de questions à tenter un esprit qui aurait eu quelque puissance, et qu’il n’a pas effleurées !
Malgré les différences qu’on a cru voir entre le de Maistre qui parle à cet être abstrait et sans visage, le public, et le de Maistre qui parle à ses amis ou à ses enfants, aux visages qu’il aime, il y a pour le vrai critique le de Maistre de toutes les Correspondances dans le de Maistre des Œuvres, et j’en atteste particulièrement les Soirées de Saint-Pétersbourg ! […] Le sentiment paternel a cela de divin, il est vrai, qu’il se paye comme Dieu avec lui-même et qu’il est heureux uniquement de ce qu’il existe. Vous savez la phrase très commune, mais très vraie : « Quel mérite a-t-on d’aimer ses enfants ?
C’est peut-être la seule phrase pensée, la seule phrase vraie de ces deux volumes de littérature politique. Elle est vraie comme une indiscrétion. […] Je sais bien, il est vrai, qu’il ne s’en déchargea point, mais on n’en sent pas moins dans les articles qu’il y a écrits cette gestation douloureuse et puissante du grand orateur et du grand ministre, dont il n’accoucha pas, pour son soulagement et à jamais pour le nôtre, mais qui n’en communiqua pas moins une force mystérieuse dont, avait grand besoin, du reste, le pauvre Journal des Débats.
Il est vrai qu’il en avait dit des choses inouïes. […] Je vais vous lire encore… » « Votre état me touche (continuait-il en 1745), à mesure que je vois les productions de votre esprit si vrai, si naturel, si facile et quelquefois si sublime… » Et, en 1746, faisant toujours la boule de neige de ces incroyables éloges : « Je vais lire vos portraits, — lui mandait-il. — Si jamais je veux tracer celui du génie le plus naturel, de l’homme du plus grand goût, de l’âme la plus haute et la plus simple, je mettrai votre nom au bas… » Ailleurs, à propos de cette détestable et ridicule déclamation, fausse comme les larmes d’un catafalque, sur la mort d’Hippolyte de Seytres, tué dans la campagne de Bohême, il avait déjà comparé Vauvenargues à… Bossuet ! […] Il est vrai que ce René semblait avoir des motifs suffisants pour se permettre de la mélancolie.
Dans ce livre sur Abailard, il est vrai, ce n’est pas sur le philosophe rigoureusement dit qu’on ramène l’intérêt et la lumière, mais qu’importe ! […] Il n’y a que la Philosophie, la victime habituelle des idées fausses, qui puisse être victime à ce point des sentiments faux et qui soit destinée à confondre l’affection et la mauvaise rhétorique avec l’expression des cœurs vrais ! […] Cependant la femme, la vraie femme, le cœur qui se connaît en cœur, ne manque point chez Madame Guizot.
En effet, nous la retrouvons en ces deux volumes (une vraie bonne fortune pour ceux qui aiment les correspondances) telle que ses lettres à Horace Walpole, son ami aussi singulier qu’elle, nous l’avaient montrée. […] Walpole, malgré tous ses mérites d’esprit qui sont très grands, était un excentrique adouci, un excentrique au pastel ; il avait — par avance — un peu de l’affectation du dandy anglais ; mais Madame Du Deffand, lorsqu’elle s’ennuie, est très vraie. […] Il ne partage nullement, sur le compte de la duchesse, les illusions de Madame Du Deffand, cette aveugle d’amitié, et de l’abbé Barthélemy, ce commensal reconnaissant, et dans plus d’une note il a relevé les sottises de cette femme qu’ils crurent tous les deux supérieure, et qui sont, il est vrai, moins ses sottises personnelles que celles de son temps.
Le rire, comprimé par la Révolution, repartit, quand elle fut finie, avec une force de gaieté, la vraie furie française ! […] Et il y a plus, je prétends que la chanson, chez Collé, n’était nullement son vrai génie. […] Ce n’est, il est vrai, qu’un fragment bien court de l’Histoire du xviiie siècle, mais ce fragment est supérieur à sa manière aux diverses histoires écrites par les contemporains, et par l’excellente raison que Collé est aussi peu un contemporain que possible.
Il y a des choses, il est vrai, dans cette Correspondance, qu’il est impossible même à MM. de Goncourt de ne pas voir… En leur qualité de peintres, d’ailleurs, et de peintres recherchant des effets de peinture, ils ont peut-être trouvé frappant et pathétique de montrer les vices et la misère, fille de ces vices, chez la plus brillante et la plus spirituelle courtisane du xviiie siècle, morte de misère après l’éclat et les bonheurs du talent et de la fortune, le triomphe, l’enivrement, toutes les gloires sataniques de la vie, et de faire de tout cela un foudroyant contraste, une magnifique antithèse… Mais s’ils ont montré — hardiment pour eux — la fameuse Sophie Arnould, qui naturellement devait tenter la sensualité de leur pinceau, dégradée de cœur, de mœurs, de fierté, de talent et de beauté, au déclin cruel de la vie, ils n’ont pas osé aller jusqu’à la vérité tout entière. […] Sophie Arnould commença par chanter dans les églises, à la Cour, puis à l’Opéra, où cette voix expressive, cette voix d’esprit, lutta contre la vraie musique, — la musique de Gluck qu’elle avait appelée « une bête » et contre laquelle elle se brisa. […] Cette horreur dite d’elle est-elle vraie, d’ailleurs ?
Il est vrai qu’il en avait dit des choses inouïes. […] Je vais vous lire encore… Votre état me touche (continuait-il en 1745), à mesure que je vois les productions de votre esprit si vrai, si naturel, si facile et quelquefois si sublime… » Et en 1746, faisant toujours la boule de neige de ces incroyables éloges : « Je vais lire vos portraits, lui mandait-il. […] Il est vrai que ce René semblait avoir des motifs suffisants pour se permettre de la mélancolie.
Dans ce nouveau livre sur Abailard, il est vrai, ce n’est pas sur le philosophe, rigoureusement dit, qu’on ramène l’intérêt et la lumière, mais qu’importe ! […] Il n’y a que la Philosophie, la victime habituelle des idées fausses, qui puisse être victime à ce point des sentiments faux et qui soit destinée à confondre l’affection et la mauvaise rhétorique avec l’expression des cœurs vrais ! […] Cependant la femme, la vraie femme, le cœur qui se connaît en cœur, ne manque point chez Mme Guizot.
Il ne s’agit pas de l’univers, il est vrai, ni de ce prodigieux phénomène de la décadence. […] Que si, du reste, par hasard ou par inconséquence, c’était là le fond vrai de sa pensée, nous aurions la preuve une fois de plus que l’étude de l’Histoire est quelquefois stérile, et que savoir correctement les faits et les reproduire avec éloquence n’est pas tout. La nature vraie du nègre aurait échappé à ce rude peintre, qui en fait saillir si admirablement les grimaces quand elles s’individualisent dans quelqu’un, et, comme tant d’autres, cet esprit, qui semblait n’avoir rien de commun avec les badauderies contemporaines, y échouerait… ce ne serait rien de plus qu’un homme à la mer !
Eux, ils sont de vrais jeunes gens de lettres. […] Il est vrai qu’à côté des quelques misérables de lettres dont MM. de Goncourt ont fait « Les Hommes de lettres », il y a deux ou trois opulents portraits, très-ressemblants, dans lesquels on reconnaît quelques littérateurs de ce temps qu’on aime à rencontrer partout, mais surtout là, où ils nous lavent et nous essuyent l’imagination des figures inventées par MM. de Goncourt, en mépris de la littérature. Le seul inconvénient de ces portraits est pour la modestie des auteurs, qui semblent avoir voulu intéresser l’amour-propre de leurs juges naturels à leur faire trouver leur livre une œuvre vraie et éclatante, — ce à quoi ils n’ont évidemment pas pensé.
Il est vrai que, pour tout autre que M. […] Même dans cette fameuse et coupable Mademoiselle de Maupin, ce sujet flétrissant, que l’auteur n’a peut-être abordé dans sa jeunesse que par amour de la difficulté vaincue, l’indécence, froide et maniérée sous le relief et le luxe des mots, manque de la vraie chaleur de la vie, et le danger d’un pareil livre vient bien moins de ce qu’on le lit que de ce qu’on le prend pour le lire. […] Comparez seulement les vivants, si violemment vivants et vrais, des Contes drôlatiques, aux pâles et exsangues momies habillées du Capitaine Fracasse, lesquelles font l’amour du même air, du même ton, avec la même phrase qu’elles se plaisantent ou qu’elles se battent, le long de ce fatigant roman, sans que l’auteur lui-même se départe un moment de l’emphase suspecte de son récit, dans laquelle le plaisant et le sérieux se confondent au point qu’on ne sait plus si l’auteur est réellement un romancier sincère, qui croit à ses héros et qui les aime, ou un humouriste en pointe d’ironie, qui se moque également de ses personnages et de son lecteur !
On sent bien qu’un tel caractère est peu favorable aux éloges ; mais les panégyristes poursuivent encore plus les rois, que souvent les rois ne sont empressés à les fuir ; il paraît même que Louis XIII en fut importuné ; peut-être même que son esprit naturel lui fit haïr de bonne heure un genre d’éloquence qui, le plus souvent, n’a rien de vrai, et qui au moins est vide d’idées ; peut-être aussi qu’un homme calme et sans passions doit mieux sentir le ridicule de ce qui est exagéré ; et c’est le vice nécessaire de tout ce qui est harangue ; peut-être enfin que tant d’éloges sur de grands événements auxquels il avait peu de part, lui rappelaient un peu trop sa faiblesse et une gloire étrangère. […] Ils avouent que l’abaissement des grands était nécessaire ; mais ceux qui ont réfléchi sur l’économie politique des États, demandent si appeler tous les grands propriétaires à la cour, ce n’était pas, en se rendant très utile pour le moment, nuire par la suite à la nation et aux vrais intérêts du prince ; si ce n’était pas préparer de loin le relâchement des mœurs, les besoins du luxe, la détérioration des terres, la diminution des richesses du sol, le mépris des provinces, l’accroissement des capitales ; si ce n’était pas forcer la noblesse à dépendre de la faveur, au lieu de dépendre du devoir ; s’il n’y aurait pas eu plus de grandeur comme de vraie politique à laisser les nobles dans leurs terres, et à les contenir, à déployer sur eux une autorité qui les accoutumât à être sujets, sans les forcer à être courtisans.
Est-il vrai que dans tous les genres il n’y ait qu’un certain nombre de beautés marquées, et que lorsqu’une fois elles ont été saisies par des hommes supérieurs, ceux qui marchent ensuite dans la même carrière, soient condamnés à rester fort au-dessous des premiers, et peut-être à n’être plus que des copistes ? […] Il est bien vrai que la nature est immense, mais les organes de l’homme qui la voit, sont affectés d’une certaine manière dans chaque époque. […] On voit qu’il était plus fait pour instruire les rois que pour les célébrer, tant il est vrai que les plus grands talents ont des bornes dans les genres qui se touchent.
Ce début était celui d’un vrai poète. […] N’est-ce pas ici le cas de redire le mot assez amer, mais vrai, du moraliste ? […] Pas plus que Brunetière, son vrai maître, M. […] Giraud, ami de Taine assurément, ami du vrai par-dessus tout, se croit tenu de la fournir. […] Ce sont bien là des impressions de vrai poète.
Tous ceux qui en sont atteints reconnaîtront en lui les vrais signes : une lacune fait son malheur. […] Sa pratique, d’ailleurs, avait aussi ses excès : « Le grand abus de la médecine, disait-il, vient de la pluralité des remèdes inutiles, et de ce que la saignée a été négligée. » Cette saignée, Gui Patin en usait et en abusait, si ce qu’on raconte est vrai. […] Ce qui est à noter, c’est que lui qui parle de la sorte, il sera prodigue de pareils mots insultants et grossiers, non pas avec ses amis, il est vrai, mais avec les adversaires qu’il rencontre en mainte occasion. […] Cela est assez vraisemblable, à en juger par la vivacité furibonde qu’il montre à ce sujet dans ses lettres : Si ce Gazetier (c’est ainsi qu’il l’appelle toujours) n’était soutenu de l’Éminence en tant que nebulo hebdomadarius (ces mots de polisson, de fripon à la semaine, reviennent sans cesse sous la plume de Gui Patin, il est vrai que c’est en latin qu’il les dit), nous lui ferions un procès criminel, au bout duquel il y aurait un tombereau, un bourreau, et tout au moins une amende honorable : mais il faut obéir au temps. […] Je vous confesse, disait-on au nom de la Faculté, que vos gazettes vous font reconnaître pour un Gazetier, c’est-à-dire un écrivain de narrations autant fausses que vraies.
Lorsque Saint-Martin croit que les vérités religieuses n’ont qu’à gagner à la grande épreuve que la société française traversait au moment où il écrit, il est dans le vrai de sa haute doctrine. Selon lui, l’âme humaine, toute déchue et altérée qu’elle est, est le plus grand et le plus invincible témoin de Dieu ; elle est un témoin bien autrement parlant que la nature physique, tellement que le vrai athée (s’il y en a) est celui qui, portant ses regards sur l’âme humaine, en méconnaît la grandeur et en conteste l’immortelle spiritualité. […] Il a pour lui un grand attrait et un grand faible : En lisant Rousseau, dit-il, et voyant que c’est un homme qui dit si bien, on est tenté de penser que c’est un homme qui ne peut que dire vrai. […] Il est vrai qu’il ajoute « qu’elle ne devrait jamais sortir de ces limites-là, et que par ce moyen elle deviendrait naturellement une des voies de l’esprit ». […] Tous nos profits, tous nos revenus, devraient être le fruit de notre travail et de nos talents ; et ce renversement des fortunes opéré par notre Révolution nous rapproche de cet état naturel et vrai, en forçant tant de monde à mettre en activité leur savoir-faire et leur industrie.
Il aimait la réflexion, l’étude, le vrai pour le vrai, le bien pour le bien ; il avait un sentiment de justice, de droiture, de cordialité que rien n’altéra, et qu’il exprime en des termes d’une sensibilité incomparable : Je suis tout accoutumé, disait-il, à cette espèce d’ingratitude ordinaire, qui est l’oubli des bienfaits, qui ne consiste qu’à ne pas rendre le bien pour le bien. […] du seul archevêque de Bordeaux, mon oncle, lequel était un petit esprit, taquin et triste, grand économe, homme à vues bourgeoises, aimant sa maison avec orgueil, mais sans générosité, plein de lui et vide des autres, dur et sec, haïssable, et échappant seulement à la haine publique par son économie ; mais mon père et mes aïeux ont toujours passé dans leur temps pour gens francs, nobles, courageux et dignes de l’ancienne Rome, surtout de nulle intrigue à la Cour ; aimant la vie de province, ce qui est la vraie vie de la province ; riches ou pauvres, et cependant s’y faisant d’abord distinguer par les lumières de leur esprit et la bonté de leur cœur. […] Il me fait bien comprendre par tout ceci, d’une part le succès du Méchant, cette comédie de Gresset, aujourd’hui si peu sentie et qui vint si à propos alors (1747) pour traduire aux yeux de tous le vice régnant, la méchanceté par vanité 21, et aussi cet autre succès, bien autrement fécond et durable, de Jean-Jacques Rousseau venant apporter au siècle précisément ce dont il manquait le plus, un flot de vrai sentiment. […] Rien n’est plus vrai qu’il n’y a plus de bons écouteurs en France, ni 131 même d’écouteurs.
S’il faut, outre cela, dire quelque chose de ses mœurs, le lieu d’où il est né, sa physionomie, ses paroles, ses gestes plus militaires qu’autrement, le font soupçonner d’être léger ; et néanmoins, soit par artifice qui a corrigé la nature, soit par vraie et naturelle inclination, il n’y a rien au monde si constant que lui, si attaché à une chose de laquelle il ne déprend jamais, quand il s’y est mis, qu’elle ne soit achevée, voire jusques au blâme véritable d’opiniâtreté. […] Jamais homme qui lui ait dit une parole vraie ne s’en repentit, quoiqu’elle fût hardie, principalement s’il reconnaît qu’elle parle d’amour et d’affection. […] Si sur quelques points l’auteur est enclin et entraîné à trop accorder à Henri IV, à le faire plus libéral dans le sens moderne qu’il ne l’était, à donner une trop grande consistance à ce qui n’a été que fort court, à croire qu’il aurait tout fait s’il avait plus vécu, il y a un train général de bien-être et de félicité bien ordonnée pendant ce règne, sur quoi il est pleinement dans le vrai et ne se méprend pas ; et il nous apporte toutes les pièces à l’appui, les démonstrations victorieuses. […] On croirait lire une idylle ; il en faut rabattre sans doute ce qui est de l’exagération propre à chacun quand on se met à revoir flotter à l’horizon du passé cet âge d’or des jeunes saisons : il en restera toujours un sentiment bien vrai et d’une couleur non feinte. […] Noblesse généreuse et brave, bien française, et qui a su accepter depuis et pratiquer l’égalité sur tous les champs de bataille ; mais si quelques descendants de cet ordre, qui était le préféré du prince dans l’État, pouvaient, dans des considérations rétrospectives, regretter la forme intérieure de monarchie qui parut possible un moment sous Henri IV, ils ne feraient qu’obéir à des instincts ou à des intérêts particuliers de race : les fils du peuple, les enfants du tiers état, arrivés à la vraie égalité, et qui n’ont pas perdu pour attendre, n’ont rien à y voir ; ce sont vœux et utopies en arrière38.
Laboulaye, l’estimable introducteur et commentateur, qui se plaît à retrouver dans ces écrits ses principes et sa propre doctrine, est un homme de l’école américaine, à prendre le mot dans le meilleur sens ; il est sincèrement d’avis que la liberté en tout, le laisser dire, le laisser faire, le laisser passer, est chose efficace et salutaire ; qu’en matière de religion, d’enseignement, de presse, d’industrie et de commerce, en tout, la liberté la plus entière amènerait les résultats en définitive les meilleurs, et que le bien l’emporterait sur le mal ; il pense que cela est également vrai chez toute nation civilisée et à tous les moments. […] Il n’en est pas moins vrai qu’Adolphe et le Portrait de Julie, cette sœur d’Ellénore, sont deux pastels délicieux et achevés, dans la teinte grise. […] Chateaubriand en fait son livre le plus éclatant, qui va redorer de son rayon, pour plus d’un demi-siècle, la grille du sanctuaire et le balustre des autels ; Benjamin Constant, à ses moments perdus, entre la maison de jeu et la tribune, refait et retouche sans cesse un livre plus vrai peut-être, plus religieux et plus philosophique que celui de l’autre ; mais sa poudre est restée trop longtemps en magasin, elle est mouillée ; il n’y a pas, comme pour Le Génie du Christianisme, feu d’artifice et illumination soudaine. […] La nécessité d’écrire tous les jours me paraît, il est vrai, l’écueil du talent. […] Il m’a avoué qu’il ne joue que pour cela. » — C’est cruel, mais c’est joli, et c’est vrai. — On a publié depuis peu la Correspondance de Sismondi avec la comtesse d’Albany ; es jugements sur Benjamin Constant, et qui remontent au temps de l’Empire, y sont d’accord avec les nôtres
La caricature est l’outrage au vrai, — outrage dans le sens d’outrance. […] La manière dont Gavarni trouve le plus souvent ses légendes est à noter. il dessine sur la pierre couramment, du premier jet ; il a le sentiment du vrai, du vraisemblable, dans les physionomies, dans les poses. […] Ce qui est vrai, c’est que son goût primitif l’eût peut-être tourné davantage vers les sujets de grâce et de sentiment ; mais on avait affaire, dans les journaux auxquels il collaborait, à un public mêlé auquel on portait un grand respect. […] Ce qui est également vrai et l’un des traits les plus essentiels à noter chez Gavarni, c’est l’humanité : il est satirique, mais il n’a rien de cruel ; il voit notre pauvre espèce telle qu’elle est et ne place pas très-haut sa moyenne mesure : il ne lui prête rien d’odieux à plaisir. […] Dans une lettre à Forgues sur les Petites miser es de la vie humaine qui ne put être insérée qu’en partie au National 32 à cause du trop d’irrévérence en politique, il y a une page des plus vraies et des plus touchantes d’humanité et de sentiment d’égalité, que je citerai peut-être un autre jour.
. — Dans la Réponse qu’il fit à la dénonciation venue de Brest en mai 1795, et où on l’accusait d’en avoir imposé à la France dans son Rapport sur le combat du 13 prairial, Jean-Bon n’opposait sur ce point que deux mots dignes et nets qui sentent l’homme vrai, sûr de lui-même ; on ne devrait pas omettre non plus cette partie de la Réponse dans les pièces du procès. — Le petit recueil que nous réclamons, avec un résumé sensé et simple, sans exagération ni faveur, aurait pour avantage, toutes dépositions entendues, de clore le débat sur une question déjà bien avancée ; le fait de la glorieuse bataille du 1er juin et de la part honorable qu’y prit Jean-Bon se présenterait désormais aussi entouré d’explications et aussi appuyé de témoignages qu’un fait de guerre peut l’être32. […] Mais encore une fois le grand instrument nous manque, la langue ; et le vrai moyen de perfectionner l’administration municipale, c’est de travailler à la rendre populaire. […] Une lettre de Jean-Bon au ministre de l’intérieur exprime au vrai sa situation de premier magistrat civil en présence de tant de difficultés accumulées et d’embarras insurmontables. […] « Citoyens, La fortune de l’armée navale française a bien changé depuis ma lettre du 11… Je ne connais pas au vrai ma perte. […] Voilà, Citoyens, le récit le plus vrai de cette malheureuse journée.
Cornélie, Porcie, Arrie, ces nobles dames transportées dans la situation, les eussent pu écrire à quelques égards ; elles sont d’un stoïcisme légèrement attendri, et la Française non plus, la républicaine un peu étonnée de l’être, n’y est pas absente ; le ton une fois admis, il y respire un sentiment vrai et comme de la douceur : « Puisse cette lettre te parvenir bientôt, te porter un nouveau témoignage de mes sentiments inaltérables, te communiquer la tranquillité que je goûte, et joindre à tout ce que tu peux éprouver et faire de généreux et d’utile le charme inexprimable des affections que les tyrans ne connurent jamais, des affections qui servent à la fois d’épreuves et de récompenses ‘a la vertu, des affections qui donnent du prix à la vie et rendent supérieur à tous les maux ! […] Il eût suffi, en cet endroit, d’un goût littéraire plus sévère et plus vrai pour empêcher Mme Roland de se laisser aller à une phrase, à une simple inadvertance déclamatoire, qui ressemble à un manque de tact moral. […] Mme Champagneux m’y avait autorisé, en se fiant à moi du soin d’expliquer et de présenter sous leur vrai jour, ou même de passer tout à fait sous silence certaines confidences des Mémoires, qu’elle m’avait d’ailleurs à peine indiquées, désirant ou ne trouvant pas mauvais que j’en eusse connaissance, mais évitant elle-même de s’y arrêter. » Il faut le savoir en effet, et c’est un sujet fort digne de réflexion : la fille de Mme Roland, cette Eudora si cultivée par sa mère et dont elle avait soigné l’éducation jusqu’à l’âge de onze ans avec un zèle éclairé et tendre, Eudora était devenue fort religieuse, — disons le mot, fort dévote avec les années. […] Associée à un homme que le même sort attendait, mais dont le courage n’égalait pas le sien, elle parvint à lui en donner avec une gaieté si douce et si vraie, qu’elle fit naître le rire sur ses lèvres à plusieurs reprises. » Je ne cherche dans ces extraits que la vérité, et je dirai jusqu’au bout ce que je pense. […] Mais la vraie piété n’a pas besoin de ces ressources mesquines, ni de ces expédients matériels.
Mais il n’en est pas moins vrai qu’écrire pour être lu du public est de moins en moins une rareté et une marque à part, que tout le monde aujourd’hui est sujet à se faire imprimer plus d’une fois dans sa vie, et que le maniement du langage dans ses emplois les plus divers n’a plus rien de mystérieux. […] Cela est vrai, depuis le souverain qui, lorsqu’il est fait pour l’être, parle des matières d’État avec élévation, avec dignité et simplicité, jusqu’à l’homme spécial et plein de son sujet qui, pour peu qu’il soit à la fois homme d’esprit, se trouve être son meilleur truchement à lui-même. […] Il est vrai qu’on s’en dispense trop souvent pour les juger ; toutefois, en voyant un tableau, en entendant un beau morceau, tout le monde ne se croit pas capable plus ou moins d’en faire un pareil. […] Il ne dit que ce qu’il croit vrai et ce qu’il pense. […] Deschanel, en célébrant, selon le goût du siècle, qui en cela va un peu loin, l’amour et l’adoration des parents pour les enfants, insiste avec raison sur une idée des plus vraies : c’est une bonne habitude morale d’avoir près de soi quelqu’un qu’on aime mieux que soi.
Cette grande actrice, qui dans la seconde partie de sa carrière, et quand il était déjà tard, avait trouvé tout son talent et le cri vrai de la passion, ne ressemblait guère d’ailleurs aux deux tendres amies qui, jusque dans leur sensibilité la plus épanchée, étaient toute crainte, toute alarme et tout scrupule, toute discrétion et pudeur. […] N’est-ce donc en effet que de la vraie misère que sortent ces accents inoubliables ? […] Elle était dans une vraie intimité avec Alexandre Dumas, qui mit, en 1838, une préface entraînante au recueil de Pleurs et Pauvres Fleurs, et de qui elle disait, en 1833, à son jeune fils Hippolyte, visité par lui au passage : « M. […] c’est bien vrai. […] Tu portais un beau châle de laine à palmes, et je portais le pareil en vraie sœur. — Hélas !
A son arrivée dans sa vraie patrie littéraire, sa surprise fut grande, comme sa reconnaissance : il s’était cru étranger, et chacun lui parlait de la Sibérienne, du Lépreux, des mêmes vieux amis. […] Tout est de vrai chez lui ; rien du roman ; il copie avec une exacte ressemblance la réalité dans l’anecdote. […] Mérimée : ce sont les deux plus parfaits pourtant que nous ayons, les deux plus habiles, l’un à copier le vrai, l’autre à le figurer. […] La Jeune Sibérienne est surtout délicieuse par le pathétique vrai, suivi, profond de source, modéré de ton, entremêlé d’une observation fine et doucement malicieuse de la nature humaine, que le sobre auteur discerne encore même à travers une larme. […] C’est le cas de dire avec Prascovie elle-même, lorsqu’après son succès inespéré, étant un jour conduite au palais de l’Ermitage, et y voyant un grand tableau de Silène soutenu par des bacchantes, elle s’écrie avec son droit sens étonné : « Tout cela n’est donc pas vrai ?
Il est vrai qu’en fait de poëtes chacun veut être admis, chacun veut être roi, Tout petit prince a des ambassadeurs, Tout marquis veut avoir des pages, et qu’admettre tant de noms, c’est presque paraître ingrat envers chacun. […] Ce qu’il y a de vrais talents et d’avenirs cachés dans ces premières fleurs se dégagera avec le temps. […] Évidemment la critique n’a plus rien à faire dans une telle quantité de débuts, et c’est au talent énergique et vrai à se déclarer lui-même. […] Auguste Barbier, avec lequel il n’a d’ailleurs que peu de rapports, vient d’apprendre au public le vrai nom de l’auteur, jusqu’ici pseudonyme. […] , semblent ici donner le ton ; mais, si le poëte profite des nouvelles cordes toutes trouvées de cette lyre, il n’y fait entendre, on le sent, que les propres et vraies émotions de son cœur.
Expression fidèle de la pensée de l’auteur, ils étaient seulement redevables à M. de Barante de ces soins de révision et de correction, dont le plus vrai succès consiste à ne laisser aucune trace d’eux-mêmes. […] Le grand exemple présent de Walter Scott venait apporter des preuves vivantes à l’appui de cette manière, en dehors, il est vrai, du cercle régulier de l’histoire, mais si prés qu’il semblait qu’il n’y eût qu’un pas à faire pour y rentrer. […] Il n’en restera pas moins vrai en principe que, puisqu’après tout l’historien fait toujours quelque peu l’histoire, soit qu’il articule à l’occasion ses pensées, soit qu’il se borne à extraire, à disposer les faits de manière à produire indirectement l’effet qu’il désire, il n’y a pas lieu, dans le champ ordinaire de ce noble genre, à tant de scrupule artificiel, à tant d’effacement de soi, à tant de confiance surtout en la réflexion du lecteur. Il est des moments, rares, il est vrai, mais indiqués, où l’historien intervient à bon droit dans le fait et le prend en main ; et, quand le lecteur sent qu’il a affaire à une pensée ferme et sûre, il aime cela. […] sOn l’a très-bien remarqué, M. de Barante arrive, procède volontiers sur toute chose, avec une théorie mesurée, qu’il présente aussitôt d’une manière agréable et succincte ; il est bien fidèle en cela au vrai sens de ce mot doctrinaire dont on a tant abusé.
Il n’y a plus de public aujourd’hui, il n’y a plus d’orchestre ; les vrais M. […] « Voltaire l’avait, les anciens ne l’avaient pas. » Le style de son temps, du xviiie siècle, ne lui paraît pas l’unique dans la vraie beauté française : « Aujourd’hui le style a plus de fermeté, mais il a moins de grâce ; on s’exprime plus nettement et moins agréablement ; on articule trop distinctement, pour ainsi dire. » Il se souvient du xvie , du xviie siècle et de la Grèce ; il ajoute avec un sentiment attique des idiotismes : « Il y a, dans la langue française, de petits mots dont presque personne ne sait rien faire. » Ce Gil Blas, que Fontanes lui citait, n’était son fait qu’à demi : « On peut dire des romans de Le Sage, qu’ils ont l’air d’avoir été écrits dans un café, par un joueur de dominos, en sortant de la comédie. » Il disait de La Harpe : « La facilité et l’abondance avec lesquelles La Harpe parle le langage de la critique lui donnent l’air habile, mais il l’est peu. » Il disait d’Anacharsis : « Anacharsis donne l’idée d’un beau livre et ne l’est pas. » Maintenant on voit, ce me semble, apparaître, se dresser dans sa hauteur et son peu d’alignement cette rare et originale nature. […] Je n’en sais rien en ce moment ; mais je soutiens qu’il se trouve dans tous les mots employés par le vrai poëte, pour les yeux un certain phosphore, pour le goût un certain nectar, pour l’attention une ambroisie qui n’est point dans les autres mots. » « Les beaux vers sont ceux qui s’exhalent comme des sons ou des parfums. » « Il y a des vers qui, par leur caractère, semblent appartenir au règne minéral ; ils ont de la ductilité et de l’éclat. […] Rousseau remplit l’intervalle qui se trouve entre La Motte et le vrai poëte. » Quelle place immense, et d’autant plus petite ! […] Vraie pensée de Socrate touchée à la Rembrandt !
Nous n’avions pas prétendu retracer toute l’histoire de cette femme brillante et diversement célèbre ; nous ne nous étions attaché qu’à bien saisir l’expression de sa physionomie en deux ou trois circonstances principales, et à la montrer sous son vrai jour. […] « Ce qui est inexplicable, ce qui est vrai pourtant, lui écrivit-il, c’est que je l’adore parce qu’elle vous aime. […] Eynard me paraît sortir du vrai. […] Elle était déjà très-consolée ; elle revoyait peu à peu le monde, recommençait à danser cette danse du schall qu’elle dansait si bien, et ressongeait à Paris, son vrai théâtre. […] La Revue des Deux Mondes, livraison du 1er juillet 1837 ; et dans les Portraits de Femmes. — Cette nouvelle et dernière Mme de Krüdner dément et déjoue l’autre sur quelques points ; je le regrette, mais, en ce qui me semble vrai, je n’ai jamais été à une rétractation ni à une rectification près.
En le perdant la Montagne perdait son sommet. » Ôtez de là la conception des journées de septembre qui appartient au hasard ou à la commune, vous aurez le vrai Danton, un Mirabeau du peuple ! […] Faire de la liberté une vertu, voilà la vraie révolution. […] Sur la pente des abîmes la vraie force est de s’arrêter. […] Au tableau vrai de sa première république. […] XV Mon jugement final sur la Révolution à la dernière page des Girondins, bien que vrai dans son ensemble, ne mérite ni de moi ni des autres une telle indulgence ou une telle justification.
J’avais pardonné cependant, quand je me rappelai que ce même écrivain, toujours pur selon lui et ses amis, avait fait la cour à l’empereur pour obtenir la place de secrétaire d’ambassade à Rome, sous le cardinal Fesch ; qu’il avait ensuite été le favori de M. de Fontanes, favori lui-même de la princesse Élisa ; qu’il passait son temps à Morfontaine, dans l’intimité de cette famille couronnée ; qu’il avait obtenu par elle l’emploi de ministre plénipotentiaire en Valais ; qu’il avait, il est vrai, donné sa démission après le meurtre du duc d’Enghien ; mais que, dans sa harangue à l’Académie, peu de temps après, il avait proclamé Napoléon le nouveau Cyrus, en termes d’un poétique enthousiasme ; le fond de mon cœur n’était pas sans quelque scrupule sur l’immaculée pureté du bourbonisme de M. de Chateaubriand. […] Allez au-devant de lui, vous serez plus vrai et surtout vous serez plus fort ; la Providence vous a doué des magnificences du talent ; consacrez-les aux larmes et aux dieux de la patrie ; soyez le grand prêtre du passé ; le monde vous attend et l’esprit nouveau se tournera vers vous comme le pieux regret qui embrasse passionnément une ombre. […] Les romans sont les livres des malheureux : ils nous nourrissent d’illusions, il est vrai ; mais en sont-ils plus remplis que la vie ? […] Les vraies larmes sont celles que fait couler une belle poésie ; il faut qu’il s’y mêle autant d’admiration que de douleur. » C’est Priam disant à Achille : « Juge de l’excès de mon malheur, puisque je baise la main qui a tué mes fils. » C’est Joseph s’écriant : « Je suis Joseph votre frère que vous avez vendu pour l’Égypte. » Voilà les seules larmes qui doivent mouiller les cordes de la lyre et en attendrir les sons. […] Il l’aura mis partout, parce qu’il a tout manié. » C’était vrai : l’amour avait tout consacré dans ce premier livre de Chateaubriand.
Guy de Maupassant : un vrai, complet, pur réaliste. — 4. […] L’accumulation des petits faits, vraisemblables ou vrais chacun isolément, a quelque chose d’artificiel, de mécanique : ces bonshommes sont des caricatures sèches et tristes. […] Surtout ils ne se sont jamais doutés combien cette féroce application à tout convertir en notes pour des livres pouvait fausser les justes proportions, altérer la vraie couleur de la vie. […] Il se pourrait bien que la vraie poésie réaliste, que nous cherchions précédemment, ce fût lui qui l’eût trouvée. […] Cette vie, très particulière en son détail, est si vraie, d’une vérité si moyenne en sa contexture et qualité, qu’elle en prend une valeur générale : à sa tristesse s’ajoute toute la tristesse des innombrables vies que nous apercevons derrière ce cas unique, et la puissance douloureuse de l’œuvre en est infiniment accrue.
En somme, s’il est vrai, comme je le pense, que la vie la plus digne d’être vécue est celle qui nous permet de connaître l’humanité à tous ses étages, sous tous ses aspects, par tous ses côtés pittoresques et dans tous ses recoins moraux, le mieux est d’être né du peuple, et du plus petit. […] Il est vrai qu’elle se ravise un peu après, C’est égal, la tendresse manque singulièrement dans cette éducation. […] Il est vrai « qu’il fut réglé que le jeune gouverneur ne prendrait résolution sur aucun objet important sans l’avis d’un conseil dont son père avait nommé tous les membres ». […] Il est vrai que M. le duc d’Aumale ajoute : « Il n’avait pas l’étoffe d’un général en chef. » Il n’y en a pas moins une disproportion évidente entre ce portrait et le rôle presque nul que le narrateur prête à Gassion pendant la bataille. […] » — « Je vous supplie de considérer qu’on en a fait d’autres (maréchaux) qui n’avaient pas gagné des batailles si avantageuses que celle-ci : il est vrai qu’il ne commandait pas l’armée, mais il a si bien servi que je vous avoue lui devoir une grande partie de l’honneur que j’ai eu. » Et Espenan et le duc de Longueville parlent exactement de la même façon.
Pascal avait affirmé avec cette force qui lui est propre, plutôt que pénétré par des efforts d’analyse qu’il dédaignait, nos imperfections et nos impuissances ; il nous avait fait voir la profondeur de nos maladies et la vanité de nos remèdes ; il avait frappé de discrédit jusqu’à notre morale, vraie en deçà des Pyrénées, disait-il, fausse au-delà. […] L’explication qu’il en donne est peut-être plus prudente que vraie. « Les hommes de goût, pieux et éclairés, dit-il100, n’ont-ils pas observé que, de seize chapitres qui composent le livre des Caractères, il y en a quinze qui, s’attachant à découvrir le faux et le ridicule qui se rencontrent dans les objets des passions et des attachements humains, ne tendent qu’à ruiner les obstacles qui affaiblissent d’abord et qui éteignent ensuite dans tous les hommes la connaissance de Dieu ; qu’ainsi ils ne sont que des préparations au seizième et dernier chapitre, où l’athéisme est attaqué et peut-être confondu, où les preuves de Dieu, une partie du moins de celles que les faibles hommes sont capables de recevoir dans leur esprit, sont apportées, où la providence de Dieu est défendue contre l’insulte et les plaintes des libertins ? […] « Il vivait, écrit-il, en philosophe, avec quelques amis et ses livres ; il avait l’humeur agréable, point d’ambition, pas même celle de montrer de l’esprit. » Ce dernier trait contredirait ce que Boileau en a écrit : « Qu’il ne lui manquerait rien si la nature l’avait fait aussi agréable qu’il a envie de l’être. » Il est vrai que Boileau dit de l’auteur ce que d’Olivet dit de l’homme. […] Pour que l’avertissement du moraliste porte coup, pour que les portraits du peintre respirent, ni l’expression ne peut être trop forte, ni les couleurs trop vraies. […] C’est de la difficulté vaincue, il est vrai ; mais le mérite de la difficulté vaincue n’est une qualité supérieure que là où elle fait valoir les choses et non l’écrivain.
Si l’on est le produit de son époque, — et cela n’est vrai que dans une certaine mesure, — l’on reçoit avec l’intelligence des virtualités de sentir et de mûrir qui ne permettent que relativement de s’identifier avec ce que, dans l’atmosphère ambiante, intellectuelle et morale, il y a de formes éparses constitutives. […] Il est manifeste que, pour avoir été replacés en face de la même impossibilité de contrôler, dans la pratique, la métrique des impressions, et d’en fixer la modalité, en deçà comme au-delà des événements, nous nous rendons mieux compte que l’esprit humain transforme tout en idées ; que c’est là le plus sûr résultat de notre supériorité spécifique ; que ce résultat même indique combien nous voyons les choses d’une certaine manière, qui n’est pas la vraie, tant s’en faut ; qu’enfin nous devons uniquement à notre besoin de connaître, de nous être attribué un droit de savoir, dont l’expression est aussi caractéristique de notre humanité qu’elle restera accablante pour notre enfantine insoumission. […] Que bâtir qui soit utile et vrai, en face de l’incertitude et du doute ? […] France d’avoir su mettre dans son œuvre autant de symétrie, et d’ordre que d’esthétique, après avoir observé que, si la propension au vrai qui tend à assimiler aux énergies actives les objets, les formes, les degrés et les idées, et à laquelle ceux-ci paraissent devoir d’être assujettis aux mille réfrangibilités modales de l’expression et de l’attitude, — les rend, à notre image, aptes à persuader, — comme nous aussi, au préalable, elle les condamne à ne recevoir d’éclat que de certains accidents, et même à ne parler que dans certains bonheurs d’harmonie. […] France, plus subjectif et moins divers, pour oser ne pas le soupçonner de s’isoler, lorsqu’il se nourrit de solitude, et voir en lui, quand il y tient, un pessimiste cordial et un contempteur vrai de l’éphémère ?
Une menteuse s’appelait « une diseuse de pas vrai ». […] Dans les ruelles du xviie siècle, on s’occupe, il est vrai, avec prédilection, de discussions frivoles sur un mot, sur un sonnet, sur un point de galanterie. […] Non seulement les salons sont le berceau de la comédie de société, de ces petites pièces légères et faites de rien, qui comptent en France plus d’un frêle chef-d’œuvre ; mais la vraie comédie, celle qui est destinée au grand public, trouve là le secret du dialogue vivant et aisé. […] Cela est si vrai que transplantée dans des pays, en des temps où l’idéal était moins raffiné, où la société était moins polie ou plus démocratique, elle a dépéri comme une fleur délicate exposée aux intempéries d’un climat plus rude. […] Alphonse Daudet prétend quelque part105 que le « vrai salon littéraire, le salon où des gens de lettres ou se croyant tels s’assemblent une fois par semaine pour dire de petits vers, en trempant des petits gâteaux secs dans un petit thé, ce salon a bien définitivement disparu. » Je ne suis pas aussi sûr qu’il l’était de cette disparition ; je croirais plutôt à une transformation ; mais il est bien certain que telle brasserie, comme celle qu’il nous décrit dans le même livre106, ou comme celle qui fut, suivant Champfleury107, le temple où officièrent les pontifes du réalisme naissant, a eu sa part dans le développement de certaines écoles et de certains talents.
Mais dans ce cas, non plus que dans l’autre, il ne faut pas s’attendre à un amour vrai, naturel, partagé, à l’amour de deux êtres qui échangent et confondent les sentiments les plus chers. […] Puis, un incident heureux les ayant rapprochés, la fusion se fit, il prit insensiblement en main ce génie qui cherchait encore sa vraie voie. […] Bettina a des moments de bon sens et des éclairs de passion vraie où elle s’aperçoit et se plaint de cette inégalité d’échange : « Oh ! ne pèche pas contre moi, dit-elle à Goethe, ne te fais pas d’idole sculptée pour ensuite l’adorer, tandis que tu as la possibilité de créer entre nous un lien merveilleux et spirituel. » Mais ce lien tout spirituel et métaphysique qu’elle rêve, cet amour en l’air, pourrait-on lui dire, est-ce là le vrai lien ? […] Mais, le lendemain du jour où l’on a lu ce livre, pour rentrer en plein dans le vrai de la nature et de la passion humaine, pour purger son cerveau de toutes velléités chimériques et de tous brouillards, je conseille fort de relire la Didon de l’Énéide, quelques scènes de Roméo et Juliette, ou encore l’épisode de Françoise de Rimini chez Dante, ou tout simplement Manon Lescaut.
Il vit la mort de près, il entendit les médecins dire de lui : « Il n’en a pas pour deux heures. » L’image de sa vie passée lui apparut sous son vrai jour ; rapproche des jugements de Dieu le jeta dans l’épouvante. […] Il n’était que tonsuré, il est vrai, et point prêtre. […] Ici, c’est un torrent d’éloquence… Si l’on allait à une vraie mission apostolique, j’y regarderais à deux fois avant de contester cette subite infusion d’éloquence à M. […] Basset, saisira très bien, tout à côté, et nous rendra d’une manière charmante l’art et l’esprit habile des Jésuites qui, à peine débarqués dans un endroit, au cap de Bonne-Espérance ou à Batavia, chez les Hollandais protestants, se hâtent d’établir leur observatoire et de se faire bien venir en mettant du premier jour leur science, leurs lunettes astronomiques, au service de la curiosité populaire : « Ils vont dresser leurs machines, dit Choisy, pour au moins payer leur hôte avec un peu de Jupiter et de Mercure. » Et il ajoute comme moralité : « C’est une bonne chose, par tout pays, que l’esprit. » Pourtant, cette nature fine et mobile de Choisy a bien saisi, par éclairs, le vrai sentiment de l’inspiration apostolique. […] On comprend que des Mémoires, ainsi écrits au sortir des conversations, peuvent offrir des inexactitudes de détail, et cependant être très vrais par l’impression de l’ensemble.
Je voudrais ne forcer en rien les tons et ne point pour cela les affaiblir, ne pas faire fléchir, la morale et ne la faire intervenir que très simple et très sincère, ne toucher en passant que les aperçus et pourtant atteindre aux points essentiels : en un mot, je voudrais être vrai, convenable et juste dans un sujet très fécond, très mélangé, à travers lequel il serait beaucoup plus commode assurément de donner tout d’un trait et de parti pris. […] Abordez dans cette pensée les Lettres écrites de Vincennes, et vous les apprécierez à leur vrai point de vue, au seul point de vue par lequel elles méritent l’attention de l’observateur et du sage. […] Il aime mieux croire à un prestige qu’à un vrai talent. […] Lorsque, décidément, le Mirabeau pamphlétaire eut cessé et que l’orateur eut levé la tête, quand il eut pris son grand rôle dans les assemblées des États de Provence et qu’il s’y fut dessiné comme tribun déjà et comme pacificateur tout ensemble, le vieillard, lisant la relation de ces scènes mémorables, s’écria : « Voilà de la gloire, de la vraie gloire ! […] Elle avait retrouvé, vers la fin, un lien de cœur réel et une vraie flamme pour un M. de Poterat, ancien capitaine de cavalerie, âgé comme elle de trente-cinq ans environ, et elle était près de l’épouser, lorsqu’il mourut de la poitrine.
Aujourd’hui les événements ont marché ; ils sont loin d’avoir donné raison en tout à M. de Maistre, et ce serait même plutôt le contraire qui aurait lieu : mais ils ont mis de plus en plus en lumière la hauteur de ses vues et leur vrai sens, la perspicacité de ses craintes, la sagesse de quelques-uns de ses regrets. […] Rien n’est plus vrai, monsieur le comte. […] Dans le vrai, je suis mort en 1798 (époque à laquelle il a quitté le pays), les funérailles seules sont retardées. Ce sont ces sentiments si vrais, si naturels et si pleins d’émotion, qu’on n’était pas accoutumé à rattacher au nom de M. de Maistre, et qui vont désormais donner à sa physionomie un caractère plus aimable et plus humain. […] On le voit, dans une lettre à l’un de ses beaux-frères, accepter les réprimandes de plus d’un genre sur des jeux de mots, sur « certaines tournures épigrammatiques qui tiennent de la recherche » : « Je suis fâché de n’avoir point d’avertisseur à côté de moi, car je suis d’une extrême docilité pour les corrections. » Cela était vrai, et, quand on l’imprimait, il se laissait volontiers corriger par celui en qui il avait mis sa confiance.
Le Brun était un vrai poète, et de la race des lyriques. […] Voici une histoire très vraie que j’ai entendu plus d’une fois raconter de la bouche même de l’aimable personne qui en avait été témoin et un peu complice. […] Il ne faut pas même oublier le post-scriptum qu’on a le tort de supprimer quelquefois, et qui donne au récit son vrai sens et toute sa moralité. La Harpe suppose que quelqu’un lui demande si cette prédiction est véritable, si tout ce qu’il vient de raconter est bien vrai. — « Qu’appelez-vous vrai ?
Je voudrais présenter d’une manière claire et incontestable pour tout le monde la vraie situation de Carrel au National, dès l’origine en janvier 1830, et les diverses gradations d’idées, de sentiments et de passions par lesquels il arriva à la polémique ardente et extrême qui a gravé son image dans les souvenirs. […] Le poète, à la lecture du premier article de Carrel sur les représentations d’Hernani, lui avait écrit une lettre explicative, et dans laquelle il lui rappelait les singulières prétentions des soi-disant classiques du jour ; Carrel y répondit par une lettre non moins développée qui commençait en ces termes : « Je suis pour les classiques, il est vrai, monsieur, mais les classiques que je me fais honneur de reconnaître pour tels sont morts depuis longtemps. » Dans la critique de l’Othello de M. de Vigny, il se faisait fort de prouver « que toute la langue qu’il faut pour traduire Shakespeare est dans Corneille, Racine et Molière ». […] Et restituant à la révolution de Juillet son sens général et unanime, la montrant indépendante des menées souterraines du carbonarisme, régulière, pour ainsi dire, et légale, et avouable en plein soleil, il ajoutait ces mémorables paroles, où un vrai patriotisme respire : Cette victoire est celle de la nation entière, et la nation qui n’a jamais conspiré, la nation qui croit ne s’être pas insurgée, mais avoir réprimé et puni l’insurrection du pouvoir, la nation, disons-nous, s’étonnerait et s’alarmerait de manifestations qui ne lui rappellent point des efforts et une gloire à elle, mais des dévouements particuliers à des affiliations politiques, et qui ne peuvent être appréciés à toute leur valeur que par ceux qui les ont vus de très près. […] Généreux envers les vaincus, envers les captifs, tenant compte à M. de Peyronnet lui-même de son maintien dans tout le cours des débats, de s’être montré habile, ferme, et « d’avoir laissé apercevoir parfois, sous les formes de l’urbanité la plus recherchée, le cœur indompté qui ne pardonne point sa défaite », il s’irrite contre les victorieux, et prenant fait et cause pour le général La Fayette destitué par la Chambre, il s’écrie, en tirant l’épée hors du fourreau (25 décembre 1830) : La Fayette était au-dessus de toute récompense, cela est vrai ; mais on le croyait aussi au-dessus des indignités d’un Parlement-croupion. […] L’expression a du vrai ; à le lire, c’est comme le Junius anglais, quelque chose d’ardent et d’adroit dans la colère, plutôt violent que vif, plus vigoureux que coloré ; le nerf domine ; le fer, une fois entré dans la plaie, s’y tourne et retourne, et ne s’en retire plus ; mais ce qui donne un intérêt tout différent et bien français au belliqueux champion, c’est que ce n’est pas, comme en Angleterre, un inconnu mystérieux qui attaque sous le masque ; ici, Ajax combat la visière levée et en face du ciel ; il se dessine et se découvre à chaque instant ; il brave les coups, et cette élégance virile que sa plume ne rencontre pas toujours, il l’a toutes les fois que sa propre personne est en scène, et elle l’est souvent.
Depuis quand la vraie gaieté au théâtre n’enlève-t-elle point l’invraisemblable avec elle ? […] On en avait assez des pièces connues, et très connues ; il y avait longtemps qu’il n’y avait point eu de nouveauté d’un vrai comique. […] Il n’y a plus de vrai Figaro chez Beaumarchais après Le Mariage. […] Dans une réponse pourtant qu’il fit à l’un d’eux (juin 1785), on lit : Vous me demandez s’il est vrai que le roi m’ait accordé des secours puissants dans ma détresse actuelle ; je n’ai pas plus de raisons de dissimuler les traits de sa justice, que je n’en eus de cacher l’affliction profonde où me plongea sa colère inopinée. Le roi trompé m’a puni d’une faute que je n’ai pas commise ; mais, si mes ennemis sont parvenus à exciter son courroux, ils n’ont pu altérer sa justice… Oui, monsieur, il est très vrai que Sa Majesté a daigné signer pour moi, depuis ma disgrâce, une ordonnance de comptant de 2 150 000 livres sur de longues avances dont je sollicitais le remboursement auprès du roi, tandis qu’on m’accusait du crime odieux de lui manquer de respect.
Ce qu’il y avait de vrai dans Franklin est poussé ici au faux par la rigueur de la déduction, et ne se tempère par aucun attrait. […] Volney, dans sa défense, ajoute avec plus de raison, en faisant allusion aux variations de croyances dont le docteur Priestley savait quelque chose : Si, comme il est vrai, l’expérience d’autrui et la nôtre nous apprennent chaque jour que ce qui nous a paru vrai dans un temps nous semble ensuite prouvé faux dans un autre, comment pouvons-nous attribuer à nos jugements cette confiance aveugle et présomptueuse qui poursuit de tant de haine ceux d’autrui ? […] « La France veut une religion », lui dit un jour le consul : Volney ne comprit pas ce mot simple et vrai ; il y répondit d’une manière irritante, faite pour enflammer la colère, et toute amitié cessa49. […] Au mot si vrai du consul : « La France veut une religion », il répondit par manière de défi : « La France veut les Bourbons !
Les gens simples pleurent au théâtre comme devant de véritables infortunes ; les chants guerriers soulèvent les masses ; et fort souvent cette émotion factice suffit à ceux qui l’éprouvent et leur ôte l’envie d’en éprouver de vraies de même ordre. […] Car s’il est vrai que les images, les sentiments, les sensations que ces œuvres suggèrent, sont faits pour surgir dans l’esprit d’hommes dont la vertu ou le crime importent à leurs semblables, s’il est vrai que ces images et ces sentiments influent sur la nature et la force de leur âme, il ne saurait être admis que, socialement, toute œuvre d’art paraisse innocente, soit pour la cité, soit plus profondément, pour le bien mémo de la race. […] Les penchants que les travaux analytiques révèlent en eux, la sensibilité que ces êtres montrent, l’enchaînement divers des mobiles, des actes, des pensées, des impressions causées par les événements, des dispositions maintenues malgré les hasards de la carrière, sont des faits psychologiques vrais, comme sont vrais aussi les détails extérieurs de leurs vie, leur visage, leur teint, leur gesticulation, leurs façons de vivre, de se vêtir, de mourir.